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Entre l’Antiquité et le 18ème siècle, il n’existe pas de salle à manger.

Les domestiques
montent les tablées à l’endroit même où se trouvent les gens. Seuls les monastères ont un
réfectoire.

A la Renaissance, invention du couvert individuel, qui vient d’Italie et se retrouve chez les
Médicis, cadre du raffinement extrême. A la Cour de France on ne commence à utiliser des
fourchettes que dans la deuxième moitié du 16ème siècle, sous Henri III. Puis c’est dans la
première moitié du 17ème siècle que l’Europe du Nord dînera à la fourchette.

L’assiette apparaît dés le 15ème siècle (assiette = assis  plat que l’on met devant
l’emplacement de chaque convive assis, les autres restant debout) sur laquelle on
commence à mettre une serviette. Après chaque plat, le domestique apporte une nouvelle
assiette avec une nouvelle serviette dessus. Au début du 17ème siècle, les serviettes sont
pliées lors des festins de façon à imiter des animaux ou des plantes (ouvrage de Mathias
Giegger « Li tre Trattari » 1639).
En France, les assiettes sont individuelles dans l’aristocratie sous François 1 er. L’assiette est
à la fois tranchoir et écuelle. De plus lorsqu’elles sont assorties aux plats, elles renforcent
l’unité, l’harmonie de la table. Antérieure à l’assiette, il y a les coupes à piédouche qui créent
l’homogénéité de la table et servent de plat pour le dernier service comportant les fruits et les
confiseries (de telles coupes sont conservées au palais Pitti à Florence, ciselées par Paul
Hübner entre 1585 et 1590).

Pour les besoins des Cours d’Europe, les assiettes sont fondues dans l’or, l’argent ou le
vermeil, et sont bien vite reproduites en porcelaine. Les techniques des maîtres potiers vont
alors se perfectionner rapidement sous les tentatives répétées pour imiter les fabuleuses
porcelaines de Chine. C’est en 1708 que Böttger, prisonnier de Auguste Le Fort à Meissen,
découvre enfin la formule en mélangeant le quartz avec le kaolin.

Au 16ème siècle, les premières assiettes sont à fond plat, entourées de larges bords plats. Du
fait de leur surface plane, il est facile de les décorer, incitant puissamment à la création. Vers
le milieu du 16ème siècle, certains plats sont ornés de scènes figuratives comme des
tableaux, destinés à la décoration des salles de banquets, des murs, des dressoirs et des
vaisseliers. D’Italie, ce goût pour les céramiques décorées se propage en France (la faïence
vient de Faenza, ville célèbre de potiers en Italie). Dans les régions rhénanes au 17ème siècle,
on meuble de céramiques la pièce où l’on mange, la « Stube ». Le poêle en carreaux de
faïence d’un côté de la pièce, de l’autre, les assiettes, les plats et les pichets sont disposés
sur un crédence. A la fin du 17ème siècle et début du 18ème siècle, ces faïences sont ornées
de motifs bleus et blancs sur le modèle des céramiques de Delft. Puis courant 18ème, cette
vaisselle devient polychrome. Aux 18ème et 19ème siècle, les intérieurs villageois ont à leur tour
un vaisselier pour présenter assiettes colorées de dessins chatoyants.

A la fin du 16ème et début 17ème, l’assiette est placée devant chaque convive comme élément
de décoration lors de festins. Au 18ème siècle la multiplication de la vaisselle de faïence dans
les foyers urbains des milieux populaires permet la production massive de pièces de
vaisselle et l’essor d’innombrable centres potiers dans toute l’Europe du 16ème au 18ème
siècle.

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L’APOGEE DES ARTS DE LA TABLE 1651-1789

Avec un raffinement jamais plus égalé, les arts de la table s’épanouissent au Siècle des
Lumières, le 18ème. Beaucoup d’invention au 18ème pour l’agrément des festins : la salle à
manger, le restaurant, le menu. Une esthétique nouvelle régit chaque élément du dispositif
du festin pour en faire une véritable oeuvre d’art, depuis les dessins des pièces de vaisselle
jusqu’à la salle même du banquet, les dressoirs et les décors de table. Le bouleversement
des mœurs s’opère au 17ème siècle par un retrait de l’influence italienne au profit de celle de
l’Europe du Nord-Ouest.
Il est vrai que l’art, la science, notre environnement, l’architecture avaient été façonnés par
l’Italie, notre sensibilité et nos manières d’être aussi.

De 1538 à 1587, il y a eu 16 éditions du « Livre du Courtisan » de Baldassare Castiglione,


dont 6 versions traduites en français jusqu’en 1690. Il y avait aussi les « Galateo » de
Giovanni Della Casa, étudié dans les écoles des Jésuites qui à leur tour répandent les règles
du savoir-vivre forgées en Italie sur tout le continent européen.

Comment alors les Etats du Nord-Ouest ont-ils créé leurs propres modèles ? et bien les
évolutions dans le domaine des arts qui ont introduit le classicisme (on quitte l’art italien) ont
eut également des conséquences sur les usages et les sensibilités. Dans la même période,
Molière impose aux côtés des italiens en 1658 le projet de la colonnade du Louvre par
Claude Perrault qui est préféré à celui du Bernin. La grande cuisine française jusqu’alors en
gestation se dévoile avec « Le cuisinier français » de La Varenne en 1651 et s’affirme en tant
que « gastronomie ». Le domaine des Arts de la Table qui se trouve au centre de toutes les
fêtes se transforme à son tour.

A partir du 17ème siècle, c’est le renouvellement de la cuisine qui semble commander à


l’organisation de l’ensemble des plaisirs de la Table, le succès d’un plat tient autant à son
apparence qu’à la complexité de la recette. Le patrimoine culinaire jusqu’à fin 16 ème siècle ne
tient qu’à quelques ouvrages comme « le Petit Traité de 1306 » , le « Viandier » de Taillevent
1392, maître queux de Charles V, et le « Mesnagier de Paris » qui conseille l’ensemble des
tâches domestiques, donnant aussi quelques recettes. En 1604 Lancelot de Casteau publie
« L’ouverture de cuisine » et innove davantage par la forme que par le fond : premier
ouvrage rédigé en français précisant les proportions des ingrédients à cuisiner.

A la Renaissance, l’organisation du repas commence à être pensée comme un art, et cet art
est directement confié aux artistes. Fondée en 1512, la société d’artistes de « La Truelle » ,
24 membres, organise des festins soigneusement préparés autour d’un thème, mais ne
trouve guère de nouveauté culinaire, excepté l’introduction de mets composés en sucre
selon les techniques de Chypre, « l’Ile de Candie». Pour présenter cette denrée encore rare,
les cuisiniers imaginent des formes précieuses annonçant les décors de figurines.

Comment cuisinait-on ?

L’espace de la cheminée est intégralement utilisé, jusqu’au conduit où sont placés les
viandes à fumer. Le travail du maître queux se concentre alors autour de l’âtre avec toujours
les mêmes plans de cuisson :
- 1er plan, le foyer proprement dit : on y introduit directement certains aliments (truffes,
œufs) à cuire sous la cendre. Les poêles à frire et les grilles vont sur la braise aussi.
- 2ème plan, au-dessus du feu : c’est là que se place la marmite accrochée à sa crémaillère,
où se prépare les aliments bouillis.

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- 3ème plan, devant le foyer : les broches, suspendues à des chenets pour les rôtis. Les
graisses sont récupérés dans des lèches-frites et on arrose avec les pièces de viande et
de volaille de leur jus. Quand les chenets ont à chaque extrémité des paniers en fonte,
on y place les mets à garder au chaud.
- Enfin, le four : seules les riches demeures disposent de leur propre four, placé dans la
cheminée où se préparent les tourtes et les pâtés (les tourtes apparaissent à la
Renaissance).
Ce dispositif se retrouve dans bien des intérieurs ruraux jusqu’à la fin du 19ème siècle.

Au 17ème siècle, avec le « cuisinier français » de la Varenne de 1651, une série de livres de
cuisine voie le jour qui rompt avec les traditions médiévales et consacre la naissance de la
gastronomie française. C’est une rupture nette avec le passé qui bouleverse les habitudes
anciennes dans le contenu des recettes, comme dans la présentation des mets et les
techniques culinaires :

- Fini les sauces épicées et sucrées, épaisses à la chapelure grillée. Les aliments
conservent leur saveur naturelle. Pour preuve, lire « Les Délices de la Campagne » de
Nicolas de Bonnefons en 1679.
- Le dindon remplace progressivement le paon ou le cygne, recousu dans ses plumes
selon la tradition médiévale. Seule subsiste de nos jours la dinde farcie de Noël.
- On élabore un système « modulaire » d’un choix d’ingrédients de base, préparé à
l’avance comme les bouillons, liaisons ou farces, servant à la confection des plats à la
commande.
- La disposition des convives se fait autour de la table (et non plus d’un seul côté).
L’attention des dîneurs ne se fait donc plus sur les distractions proposées dans la salle,
mais davantage sur ce qu’ils mangent. L’essentiel du repas s’oriente plus vers les plaisirs
du goût que vers celui des yeux.
- Le « service à la française » (plats posés sur la table) se prête moins aux présentations
théâtrales des mets, si prisées au Moyen Age. Finalement, le convive ne mange que le
plat qui se trouve devant lui, aussi tout le monde ne fait pas le même repas.
- Le cuisinier dispose d’un 4ème plan de cuisson en plus de ceux aménagés dans la
cheminée, c’est le « potager » (ancêtre du fourneau) à plusieurs fourneaux pour faire des
ragoûts. Grâce au potager, il est possible de contrôler efficacement la température et la
consistance des mets les plus délicats.

Partie de Paris, une véritable révolution du goût s’étend progressivement à toute l’Europe.
Des cuisiniers comme Noël à Berlin, Clouet à Londres, sont appelés au service des Cours
d’Europe. Le « Modern Book » de Vincent La Chapelle publié à Londres en 1733 et à La
Haye en 1735 rend accessible au public international les nouveautés culinaires françaises :
au-delà des frontières et jusqu’au 20ème siècle, le français demeure le langage par excellence
de la cuisine. Ces changements contribuent à former un modèle français du Savoir-Vivre et
induisent à leur tour de nouveaux comportements. Des groupes d’amateurs éclairés se
forment dont le premier « l’Ordre des Coteaux ». Cette société de gastronomes fait des
émules et tout grand seigneur cherche à se surpasser par la finesse des mets présentés. La
réussite d’un festin devient une affaire d’honneur : en 1671, Vatel au service de Condé,
après avoir été à celui de Fouquet tombé en disgrâce, se donne la mort pour n’avoir pu
pourvoir parfaitement au festin offert pour le roi à Chantilly.

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Au 18ème siècle, la gourmandise s’accorde à la galanterie : c’est l’époque des soupers fins,
où on invente un petit meuble de desserte pour se passer de la présence indiscrète des
domestiques. Il y a un autre moyen pour cela : la clochette, que l’on agite pour faire venir à
son gré ses laquais afin de pouvoir manger tranquillement. Au 18ème siècle, le souper fin
entre dans le jeu de la séduction. Il est le modèle même de nos dîners en tête-à-tête, où
s’allient plaisirs de la table et galanterie. Autour des tables galantes du 18ème siècle, de
petites sociétés de libertins s’organisent, le Régent lui-même donne le ton avec son groupe
d’amis, les « Roués » dont le duc de Richelieu.
Les amis de la société du Caveau organisent des repas où les propos des gens de lettres,
égayés de chansons, mêlent la gourmandise à la grivoiserie.
Un siècle après la formation de « l’Ordre des Coteaux », quatre générations de gastronomes
se sont succédées dans l’entourage de Louis XV, l’Ordonnance des plaisirs de la Table
atteint un raffinement inégalé. C’est au 18ème siècle qu’une table créée tout spécialement
pour les repas, généralement ronde, quatre petits buffets autour qu’on appelle « servantes »,
pour les assiettes, vin, eau, etc… Ces buffets sont mobiles et se renouvellent au son des
clochettes et sonnettes dont les convives tirent les cordons. Par ce nouveau moyen, ils sont
débarrassés de la présence de la foule de domestiques qui n’apportent que gêne et
contraintes. Désormais les verres sont déposés sur la table (plus de valet préposé aux
boissons). Le vin ne se boit pas pur, mais coupé d’eau. C’est à cette époque qu’apparaît le
menu. Sur les menus, on découvre une abondance de mets servis. En fait, personne ne
mangeait tout. Personne ne faisait exactement le même repas qu’un autre.

Bien entendu , la grande cuisine ne sort pas des grandes demeures. Les 3.400
établissements qui offrent en 1796 « le vin et l’assiette» sont encore loin d’être des lieux de
délectation pour les palais délicats. Seuls les traiteurs servent des ragoûts et préparent des
plats à la commande. En 1765, Boulanger, dit Champ d’Oiseau, détourne le monopole des
traiteurs. Il a un restaurant. Il ne peut en fait que proposer une variété de bouillons fortifiants.
C’est alors qu’il propose également différents mets sur une petite table sans nappe, des
volailles au gros sel, des œufs frais, des pieds de mouton. Les traiteurs lui font un procès
qu’ils perdent ! A la Révolution, les propriétaires ayant fuit ou été guillotinés, leurs bons
cuisiniers se mettent marchands de bonne chère, sous le nom de restaurateurs.

Le 18ème a été le siècle de la table par excellence : les raffinements culinaires vont de pair
avec un art du décor de table, formé durant les siècles antérieurs pour atteindre la perfection
au 18ème : services assortis, la table, la salle à manger. Le luxe et l’apparat cède devant le
confort et l’intimité. les salles sont plus petites et on cherche le moyen de se passer de
l’omniprésence des domestiques. D’où le souci des architectes à imaginer une pièce
spécialement conçue pour le repas, munie de dessertes et de rafraîchissoirs pour les
bouteilles : c’est la salle à manger. Au début, il s’agit d’« antichambres» ou de «chambres»
servant de « salle à manger » ou de « chambre à manger ». La salle à manger s’impose
dans l’aristocratie dans le deuxième tiers du 18ème. A partir de 1735, Louis XV crée deux
salles à manger à Versailles, une d’été, une d’hiver. Sous Louis XV, les soupers fins
conjuguent intimité et sensualité. Les petits appartements où se déroule la vie privée du roi
prennent une importance grandissante. Les repas pris en particulier se tiennent dans les
petits appartements permettant au roi de choisir ses convives et parmi eux des hommes ce
que l’étiquette évitait jusqu’alors. L’apparition de salle à manger dans les petits appartements
matérialise clairement une volonté d’un espace intime dans la vie quotidienne qui déborde
bien vite du cadre de la Cour.
La table à manger qu’on laisse en permanence dans la salle à manger n’existe pas avant le
dernier tiers du 18ème siècle. C’est toujours la table médiévale à tréteaux.

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TRADITIONS ET INNOVATIONS DEPUIS LA REVOLUTION

Globalement moins d’innovation par rapport au 18ème. Le verre est toujours posé sur la table,
les couverts individuels se dédoublent ou se triplent. Devant chaque convive, le « Service à
la Russe » est appliqué. Tels sont les principaux apports du 19ème siècle. Ce qu’il y a de
nouveau, c’est la vulgarisation des arts de la table. Sous le règne de Louis XVI, les
raffinements culinaires et visuels des banquets sont réservés à une petite élite, le cercle
étroit des milieux de Cour.
Au 19ème siècle, les arts ménagers et la gastronomie commencent à pénétrer de plus en plus
l’ensemble de la société. Ce qu’il perd en faste et luxe, il le gagne en commodité et
accessibilité au plus grand nombre.
Après la tourmente révolutionnaire, la principale préoccupation des amateurs de bonnes
tables est de transmettre aux nouvelles classes dirigeantes les raffinements d’un art de vivre
élaboré dans l’intimité des hôtels des grandes maisons. La tradition de la gastronomie
française appréciée alors dans toutes les Cours d’Europe survit fort bien à la Révolution. Les
chefs, se trouvant sans emploi après le départ en exil des grands seigneurs, sont très
recherchés. Ainsi Robert, grand chef du prince de Condé parti en exil, ouvre son
établissement « Méot » rue Valois en 1791. En 1820, le « Grand Véfour » ouvre, à côté de
chez « Very » dans le style néoclassique, avec ses plafonds peints et garnis de stucs, ses
miroirs et ses tableaux au décor pompéien. Le cuisinier devient un artiste et arrive au
sommet de sa gloire. Carême, qui débute en 1804 chez les Talleyrand-Périgord, passe en
1823 au service de James de Rothschild. Il valorise la profession et exige qu’elle accède au
rang de Maître d’Hôtel. Grâce aux relations internationales des Rothschild, sa réputation
incarne la tradition culinaire française. Il publie en 1833 « l’art de la cuisine française au
19ème siècle » qui reste encore aujourd’hui une référence.

Sèvres, sous l’ Empire, et grâce aux réalisations, a une réputation internationale. Il a des
codes pour l’Empereur pour le palais des Tuileries, de Fontainebleau, de Compiègne ou de
la Malmaison : décors néoclassiques dus aux découvertes archéologiques (Herculanum),
les services olympique 1807, égyptien 1808 rappellent la campagne d’Egypte…Le
rayonnement de la France dans les arts de la Table et de la gastronomie va se trouver
codifié et magnifié par l’œuvre de Grimod de la Reynière en 1808.
Avec le « service à la française », tous les mets sont déposés sur la table et ne circulent pas
parmi les convives. Tout le monde ne mange pas les mêmes plats. Il est difficile d’établir un
menu. Avec le « service à la russe », il y a moins de plats et tous les convives mangent les
mêmes mets puisqu’ils sont présentés successivement à chaque convive. Il est plausible
d’établir un menu. C ‘est ce même menu qui va évoluer et mis à la disposition des clients des
restaurants : la carte ! Le menu est décoré plus ou moins richement et va devenir l’emblème
des grandes compagnies de navigation ou de chemin de fer, puis sert de pub à « LU » ou
« Moet et Chandon» qui expédient aux restaurateurs des fonds de carte à l’effigie de leur
firme. Avec Escoffier, la rédaction, la confection et la réalisation du menu devient un art qui
contribue à la perfection du repas.
Dans les grands banquets qui sont l’apanage d’un 19 ème siècle s’ouvrant à l’opulence
industrielle, le menu devient la trace matérielle de rituel important qui marque les pales
étapes de notre vie politique, comme le banquet des maires de France en 1900 avec plus de
10.000 couverts dressés. Puis l’usage du menu descend dans les couches de la société
française, lors notamment des communions et mariages, traditions villageoises du 20ème
siècle.
Comme on l’a vu par l’adoption du service « à la russe » l’appareil du repas se simplifie. Les
verres prennent place devant l’assiette : ce n’est que sous la Restauration que naîtra
réellement le service du verre. Ils participent au décor des grands dîners avec grâce et
distinction : moulée ou gravée dans le cristal, la verrerie se compose de gauche à droite d’un
verre d’eau, un verre moyen pour le vin blanc, un petit pour le vin rouge et un peu à l’écart, la

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flûte ou la coupe de champagne. Des canapés de cristal sont placés sur la table, le vin se
boit coupé d’eau. Les cristalleries de Saint-Louis fondées en 1767, Baccarat en 1789,
prennent alors leur essor et sont concurrents des cristaux de Bohême existants déjà depuis
deux siècles.

A la fin du 19ème siècle, l’assiette et le couvert adaptent leur forme à leur contenu : il existe
autant de pièces de service que de types de plats : assiettes et couverts à asperges, à
huîtres, à artichauts, à poissons, à salade. Pour la commodité du service, on cesse de
mettre tous les couverts à droite de l’assiette. Dés le début du repas, on empile les assiettes
et on aligne les couverts dans l’ordre des plats qui seront servis : couteaux à droite et
fourchettes à gauche.
Comme tout se met sur la table, il devient difficile d’en rajouter et le décor de table fastueux
tend à disparaître. Plus de « nef », pot à oille, cadenas, de pavillon chinois avec pont. A la
place des fantaisies de paysages, jardins et architectures de centre de table, on préfère
désormais le bel alignement des candélabres et des corbeilles en bronze dorée, etc… les
grands milieux de table éphémères et souvent excessifs sont inutiles. Le service à la russe a
changé toutes ces habitudes.
On se contente maintenant de placer au milieu de la table une corbeille d’argent ou de
porcelaine, garnie de fleurs naturelles, et cette parure fraîche et gracieuse, peu coûteuse,
s’harmonise avec les mœurs du temps fin 19ème siècle. La maison Christofle a été fondée en
1877. On bannit aussi les milieux de table avec miroir sous le surtout, les statuettes de Saxe,
et toutes ces additions d’importation allemande, américaine ou anglaise qu’on a trouvé
douteuses dans les maisons de France. Simplement des fleurs au centre de la table et une
touffe de fleurs en avant des verres devant chaque assiette. Parfois on fait courir une légère
guirlande de fleurs sur la nappe après les desserts.

Au 18ème siècle l’armoire et la faïence pénètrent dans les intérieurs populaires. Au 19ème
l’horloge apparaît, les costumes régionaux montrent une certaine aisance des milieux ruraux
(ce n’est que fin 19ème que l’on commence à quitter une société de pénurie. Jusque là, la
population rurale n’a pas toujours mangé à sa faim. Les raffinements des grandes demeures
vont progressivement atteindre toutes les couches de la population. Début 19 ème, les
villageois possèdent un vaisselier chargé d’assiettes et de plats en faïence peinte qui
introduisent une note colorée dans les intérieurs villageois. C’est l’essor des centres potiers
de Saintonge, Beauvais pour les céramiques, et de Nevers, Sarreguemines et Quimper pour
les faïences. Pourtant fin 19ème, les manières de table populaires sont dans une phase
transitoire entre le médiéval et le 19ème : au quotidien, on prend son repas « sur le pouce »
d’une tranche de pain couverte de fromage ou de lard que l’homme coupe avec son propre
couteau, accompagné d’une soupe.

La table de la salle à manger est souvent réservée aux hommes. Les terrines sont les chefs
d’œuvre d’art populaire en raison de leur contenu. La viande étant réservée aux grands
jours. Les plats à terrine sont fréquemment ornés sur leur couvercle de l’animal transformé
en pâté ! La céramique populaire reprend les décors de nature morte ou de scènes de
chasse qui ornent les terrines d’orfèvrerie.

DE NOS JOURS
Dans notre vie moderne, l’étiquette de nos repas quotidiens continue de se simplifier. Le
service à la russe proposant le même plat à tous les convives est d’une grande unité et une
égalité totale entre les convives. Ce service à la russe se simplifie à son tour. Les entrées
commencent à disparaître des menus bourgeois et le plat unique est l’ordinaire du peuple.
La formule d’un menu rapide composé d’un plat, parfois d’un dessert, est en train de faire
des émules chez bien des restaurateurs. Le « brunch » apparaît (entre petit-déjeuner et
déjeuner), copieux, permettant de réduire le repas de midi à une simple collation. Que dire
du Mac Do pour les enfants ?

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