‘Les aventu
rs de la mer
Les iles de Ja mer des Caraibes furent aux XVI¢ et XVIIe
siécles le repaire des pirates et des flibustiers successeurs
des corsaires francais et anglais
LES FLIBUSTIERS
Aux corsaires, houcaniers, flibustiers...d Vile de la Tortue (pris &° Hat) soni attachés bien des 16
gendes et bien des exploits.
Au xvi sidele, les houcaniers, chasseurs de haeufe savages d'une rudesse incroyable, observaient
entre eux des coufumes asses sommaires mais auxguelfes ils tenalent abstinément, était fa « couume
de la cote ». Repoussés vers la mer par les Espagnols, qui massacréreny jusquiau dernier des breufs
leur seu! moyen de subsisiance—, les boucaniers vont alors devenir des fibustiers, d Vorigine « fribou-
tier », dérivé de Langlais « jreebooter » litee : thre : booty : butin)
Grace & leur audace ev leur avidité, ces excellents marins vont methodiquement piller rows les ba-
eaux espagnols, emplis des richesses du Nouveau Monde quis rapportaient en Europe
lites sociees, 4 Fexemple des houcariers Tres d'armes, desk por dev. Chague soiee
fie Tore dont is Gatent sus grow se cholssait un capitaine 2 gu elle obuicai
ements quivariaient de vinge a trente compa aveuelement, Au début de toute expediting, lx
none, davantae parfols Mls avetent eux aussi hommes promeritient au che! lu une soumis:
Li ‘Hibustiers formaient entre eux de pela coutume du matelotaze qui les unissait en
4Amérique Centrale
st du Sud étaient ro-
Hides & a métropole
fat des convois pro-
‘ges par Yo ating de
quer. 1a flor
royale espagnole
quite lo por de La
Havane au XVP side
Antoine Fut, corsaire
frangais dans a mer
dos Anti.
* fates étaient
its, Los corsaires,
ovanche, rocevsient
de leur souverain des
Terres de marque les
autorisant a chasser
les navites: de com-
merce ennemis.
DES ae
| C ‘ARAIBES rmawrz Funcic BRENTANO
sion gbsolue, serment prété sur un crucifix ou
sur Evangile, Le moindre manquement a l'en-
gagement pris entrainait fa perte de toute part
aux bénéfices de Fentrepri
Ce chef ne se distinguait d’aucune fagon des
hommes auxquels i} commandait. Neanmoins,
comme le fait remarquer CExmelin qui veew ax
milieu des boucaniers et des flibustiers en quali
{6 de chirvrgien, il n’était capitaine cans ta ma
rine des Bats polices qui fit assuré d'etre obei
‘et respecté comme un capitaine de flibustiers.
Mais sil arrivait que celui-ci se f0t end ins
digne du commandement ou bien eit perdu la
confiance de son equipage, il Gait débarqué & la
premigre céte venue, abandonné avec ses armes
‘et quelques provisiens ; puis les compagnons.
Glisaient un autre chef auquel ils obéissaient ab
solument comme ils avaent fait a son prédéces.LES AVENTURIERS DE LA MER
seur. La valeur des formations Pibutitres pro-
venait en somme de la confiance sans réserve
aque les membres avaient les uns dans les autres
‘ Seniraider, sentre-secourir et tenir leur pa-
role, voila leur culte et leur religion », écrit ie
Fientenant Vivant de Maissagues en un mémoire
conservé 4 la Bibliotheque nationale, Is pla-
caient cette vertu de AElKé et de loyauté les
tuns a T'égard des autres au-dessus de tout
force, fondement et lien de leur societé
‘Aussi nos compagnons se nommaientils eux
memes « Frares de la Cote». Cétait te nom
dont ils se montraient le plus fiers et quills ne
voulurent jamais quitter ls vivaient sur un pied
a egaINE absolue, Chacun faisait son devoir 3
son pouvoir, sans que nul s'avisat de dire ;
— Sen ai fait plus que celu'-la
Les flibustiers francais
avaient été justement
surnommés les diables
Quand le capitaine ne pouvait fournir de
vaisseau, ou au moins de barque pontee, dla so:
ci€té qui avait choisi pour chef, les Mibustiers
recouraient pour s'en prowsrer au moyen le plus
simple :jJs se groupaient par bande de quinze
‘ou vingt, chacun atmé d'un bon fysil, de deux
pistolets et d’un sabre ou coutelas fixé 2a cein-
ture. Et les voila, sous la conduite dn capitaine
lu, embarqués dans un canot qu'ils ont eux:
memes construit : une nacelle d'une seule pigee
taillee dans wn tsone d’arbre, une maaiére de pi-
rogue 4 yoiles. IIs emportent quelques vivres et
vont s'embosser dans une petite erique de la
mer des Antilles, ou bien ils en sillonnent les
flors, guettant les bargnes de pche montées par
les Espagnols. Leur situation est souvent des
plus pénibles. Il y faut leur énergie de caraciére
et leur endurance poor fa eupparter Is demeu-
rent parfois plusieurs jours et plusieurs nuits
conséeutils, exposés au soleil des tropiques, a la
pluie, & la tempéte, en des embarcations décou-
Vertes, Enfin une barque pomite ex en vue.
« Chasse dessus !» Avec quelle ardeur ils se di
rigent sur elle & toutes rames et s'en emparent !
Dans le navire canquis ils trouvent par sur-
croit vivtes et véetements, La barque est-lle en
bon état, ils en déposent 'équipage sur le pro:
chain rivage, sans Jui faire d'autre mal ; mais a
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teelle besoin de réparations, nos compagnans la
ménent en une des petites iles de Ia mer des
Antilles qu'ls nomment des « eayes » et se ser:
vent des Espagnols, de ceux qu'ils ont fats pri-
sonniers dans la barque ou de ceux quils trou:
vent sur la céte, pour leur faire faire le travail
de carénage et de radoub nécessaire. Aprés quoi
ils rendent 1a fiber & leurs prisonniers, ne
conservant avec eux que les esclaves, sls en ont
trouvé a bord. A leur défaut, ils retiennent un
Espagnol, qui aura la charge de leur faire la cui-
sine, car nos Compagnons entendent se consi
rer exclusivement 3 [eur métier de marins et de
conquérants Mibustiers
‘Voilh done le premier échelon franchi et no-
tre petite compagnie Mibustiere en possession
d'un vaisseaa ou tout au moins d'une barque
pontée. L'equipage se compose de trente ou
quarante hommes, plus un chirusgien, un char-
pentier et un cuisinier. Le maitre-queus met la
chauditre au feu sur les 10 heures du matin. 11
fait cuire dy ia viande salée, et du gros mil battu
dont il confectionne une sorte de bouillie
Epaisse. Aux repas, ni le capitaine nile cuisinier
ne sont avantagés, $i quelque homme de l'équi-
page trouve la portion én capitaine préferable a
a sionne, il est en droit de la reclamer, et le ca:
pitaine doit la ceder sans paraitre offusqué de la
Tegnéte,
Quand on arrive en vue d'un vaissema smelt
fon décide de donner la chasse, les MibustiersLie de la Tortue (4
‘roite) dans lamer
ides Antiles au nord
ide Maiti (carte-plan
Stablion 1667). El
porte ce nom on
colonie de tortos qui
vit sur ses vives. La
torte de mer (a
gauche) peut, attein-
oun poids do
7O0kg alors que Is
tortue de tere
passe pas Big.
‘commencent par se préparer a 1a mort. Ils ’em-
‘orassent I'un Pautre en se demandant récipro-
quement pardon des torts que chacun deux
peut avoir ; puis ils se mettent a battre leur mea
culpa avec ‘une force et une ardeur non parcilles
en demandant pardon & Dien pour leurs pé-
chés; puis ils Wi adressent des prigres afin
dobienir de lui, comme le don le plus naturel
du monde, victoire rapide et, surtout, riche bu-
tin, La priére terminée, chacun se couche & plat
entre sur le tillac, le pilote demeurant seul de.
bout pour conduire le navire.
Le vaisseau espagnol a repéré nos compa:
‘gnons. II tire sur eux & boulets ou & mittaille se.
fon la distance oit ils se trouvent: les flihustiers
s'y attendaient et ne paraissent guére s'en émou:
Pour recharger les canons, il faut un temps
dont les aventuriers profitent, Tandis que les ra-
meurs dirigent de tout leur pouvoir leur embar-
cation vers le navire qu'ils veulent aborder, les
meilleurs fusiliers se dressent dans la barque et
rent — avec une adresse singuliére — dans les
sabords de Vennemi, o& s'ouvre Ia gueule des
canons et ot) sont postés les artilieurs. Tls ne
ent pas d’en tuer ou ¢'en lesser plus d'un 4
Veffarement de l'équipage. La barqus flibustiére
se présente debout, elle est d'une mobilité ex-
tréme, aussi est-il rare qu'une nouvelle décharge
ppuisse Vatteindre, Et voici les aventuriers qui re-
His montent & labordage
LES FLIBUSTIERS
dans Ie style de Pierre le Grand. La vietoire cou.
ronne généralement leur effort.
Les Espagnols regardaient les flibustiers fran-
¢gais comme des diables. Is leur en donnaient le
‘hom. Ils les consideéraient tout au moins comme
des éires extraordinaires et dont Ia seule ap-
proche glagait leur courage et les paralysait. I
arrivait méme que le navire espagnol amenit
son pavillon sans se défendre, pour échapper 2
‘un massaere général,
‘Aprés la vietoire, les Mlibustiers ne man-
quaient jamais d'adresser & Dieu leurs actions
de graces, comme ils avaient fait de leurs
prires avant le combat, actions de griices pro-
portionnées & importance du butin trouve sur
la navire..
Contre les vaisseaux de moiadre importance,
Ia tactique des aventuriers était lEgérement dif-
ferente. Les houcaniers de la Tortue, habiles 2
tirer les taureaux sauvages a la course, en cher-
chant a les atieindre & une place précise de ma-
niére a ne pas en endommager le cuir, visaient,
comme nous venons de le dire, avec une adresse
nierveilleuse, Is distinguaient sur le pont du na-
vire le capitaine et les officiers de I’équipage, et
ayaient 10t fait de les abatire Cun aprés autre
dune balle bien ajustée, Privé de ses chefs,
Mequipage se rendait & merci
Le vaisseau pris, amaring, le chirurgien soc:
cupait des blessés, car un chirurgien était atta-
thé Ai chaque compagnie flibustifre. 1! soignak{
ot de
au tava is recevroot «la géne v en cas
do mauvaige volonté (¢ droite,
es ennemis comme les Mibustiers. Les vain
‘queurs se dirigeaient yers la c6te la plus proche
pour mettre leurs prisonniers 3 terre, puis se
artageaient & part égale te burn.
Tout ce qui avait & pris a bord du navire
conguis était mis en une masse sur le pont, au
pied du grand mat. Il était d'usage de tembour-
ser, avant tout partage, celui qui avait fait les
avances pour les preparatifs de lexpédition,
C’&tait genéralement le capitaine, Le chirurgien
cele maitre charpentier recevaient de coutuime
une part plus importante que celle des combat
tants. Une prime de cent écus était remise a ce-
Iwi qui avait découvert et signalé la prise. Enfin
les « Freres » blesses étaient indemnisés,
Le capitaine, selon le
code de la flibuste, devait
briler l'un des navires _
Voici le taux admis parla plupart des « socié-
tés>
‘Qui avait perdu la main droite, ou le bras
4roit ou une jambe, recevait deux cents piastres
ou deux esclaves ; un peu moins pour ta perie
dy bras gauche : pour Ia perte des deux bras ou
des deux jambes, six cents piastres ou six es-
claves, La perte d'un ail valait cent piastres on
tun esclave, la perte des deux yeux six cents
Piastres ou six esclaves. La perte d'un doigt ou
d'une ofeille etait indemniste par cemt piastres
ou un esclave ; la perte d'un pied par deux
‘ents piastres ou deux esclaves ; fa perte des
deux pieds av méme taux que celle des deux
yeux.
Les actions d°éclat emportaient des récom
ppenses particuliéres. Celui qui avait enlevé, du
navire attaqué, le pavillon ennemi pour y arbo-
rer celui des flibustiers, pavillon de France ou
WAngieterte, tecevait une gratification de cin-
‘quante piastres. Lorsque, dans les citconstances
critiques, on paryenait a faire un prisonniet qui
donnait des indications sur les forces, les res-
sources, la situation de Pennemi, la prise valait
ent piastres. Une prime de cing piastres était
38
adcibude & toute grenede lancte par-dessos ies
murs d'une place assi¢gée.
Le capitaine devenait généralement proprié-
taire du yaiseaw conguis, Ce vaiseau etait
amené A la Tortue si les Mibusticrs étaient des
Francais, 4 la Jamalque si les conquérants
faient sujets du roi Angleterre. Au gouver-
neur de la Tortue pour le roi de France était
versé le dixiéme de la prise, en reconnaissance
e sa protection,
‘Le code de a flibuste pouvait dslleurs varier
une compagnie a Vautre. Force est de se tenir
ici aux traits dominants. Au moment de s’enge-
ger pour une campagne nouvelle, ee que les Hi-
bustiers appelaient« faire la course & bon come
pagnon bon lot », chaque société jurait ¢'obser
Ver consciensitusement les divers articles d'une
chasse-parie tédigée pour une campagne ou
our une durée déterminée. Le mot était une
corruption de « charte-partie », acte que l'on
oupait en deux, au lieu d'en faire un double, et
dont les contractants gardaient chacun une moi-
tie,
‘La chasse-parte etablisait la part qui devaitees 15 FL BUSTERS
revenir & chacun dans le suceés de lentreprise
‘Ces chasses-parties stipulaient généralement,
‘comme nous venons de le dire, que si le bati-
‘ment que l'on montait appartenait 4 la « socié-
te», le capitaine recevait, outre son lot égal &
celui de chacun de ses hommes, le navire qui se-
rait pris. Mais si le batiment appartenait au ca-
pitaine, Je vaisseau conquis iui était remis avec
deux [ots, mais sous condition qu'il brilerait
Pun des deux navires, & son cholx, Ie sien ou le
vvaisseau pris, Dans fe meme cas, on veut dite s
le navire appartenait au capitaine, et qu'il fit
mis hors usage par la tempéte ou par les com-
bats, 1a dailieurs
terribies a P'adversaire et, par la cruauté, verita
bles bandits. Quand ils soupgonnaient les Espa-
gnols d'avoir cache des trésors, ils les mettaient
4 la torture avec des raffinements atroces, les
brilant & petit feu. D’autres fois ils les suspen:
daient en Fair & quatre pieux, par Tes bras et les
jambes, en faisant peser sur leur poitrine des
poids tr8s lourds, de maniére que fes malheu-
eux fussent Jentement éeartelés.
Ce qui ne les empéchait pas d’étre trés é1r0i
tement attachés 4 leur religion. On les a vus, au
moment du combat, adresser a Dieu leurs
ptitres d'un crur dévor, Au début du repas, les
catholiques disaient le cantique de Zacharie, le
Magnificat ou le Miserere ; les protestants en-
tendaient la lecture d'un chapitee de la Bible ou
chantaient des praumes. Nous avons déja rap-
pelé qu’au cours de leurs expéditions ils deman-
daient a Dieu de leur procurer un abondant pil-
lage ; aprés quoi ils le priaient, avec une dévo-
tion égale, de leur conserver ce quils avaient
pillé ; car ils simaginaient, de la meilleure foi
du monde, que les trésors dont ils '®atent em-
parés leur appartenafent désormais de la ma-
rire {a plus légitime.
Entre catholiques et protestants la religion fut
parfois cause de dissentiments violents. Au mo-
‘ment oi la flibuste atteignait son apogée, Ie pié-
tisme dominait en Angleterre. Les flibustiers
‘Vorigine anglaise suivent le mouvement. Ils te
‘moignent de la plus violente horreur aux prati-
ques décoratives du catholicisme. Au grand
scandale de leurs compagnons frangsis et ca-
tholiques, ils profanent les églises, cévent &
coups de hache les images des saints, prennent
our cible les statues pieuses, les figures de la
Vierge, tandis que feurs compaznons frangais,
scandaliss, se signent 8 la vue de ces sacriléges.
Plus d'une expédition habilement combinée,
vaillamment conduite, échoua de la sorte, les
ibustiers frangais sindignant de ces profana-
tions et ne youlant plus marcher de conserve
avec ceux qui s'en rendaient coupables ; les fl
bustiers protestants tenant au contraire & hon-
neur de manifester ainsi leur horreur de ce
quills appelatent idolatrie et superstition. Les
Frangais, il est vrai, pillaient eux aussi des
églises, mais avec une bonne intention : leur but
Gtait Gomer des plus belles images, de pré-
cieuses nappes d’autel, de cloches sonores et de
religuaires resplendissants les chapelles de leur
chére ile de la Tortue
Quatre-vingt-dix
flibustiers pour
quarante mille écus
A [a longue, il arriva aux flibustiers, comme
précédemment aux boucaniers de la Tortue, que
Ia « matiére > leur fit défaut. Les Espagnols, in-
capables de protéger efficacement leur com-
merce contre ces indomptables pirates, n’imay
nérent d'auire ceméde que ne plus mettre de na
vires de commerce i la mer ou, du moins, d’en
restreindre considérablement le nombre. $)
Slagissait de eargaisons trés importantes, qu'on
ne pouvait se dispenser de transporter par mer,
elles étaient aceompagnées d'un appareil mil
taire imposant
Voyant qu'on faisait disparaitre devant cux
les navires a piller, comme on avait fait
raltre les beeufs sauvages devant les boucaniers
de la Tortue, les Mibustiers, modifiant leur tacti
gue et redoublant de courage, remplacérent 'at-
aque des vaisseaux par celle des villes elles
‘memes et des ports de mer, Et les voila organi.
sant de yraies expéditions militaires, avec bu.
tailles, surprises, Sitges et assauts. Le premier,
‘selon Exmelin, qui tenta parelle entreprise, fut
MAnglais Louis Seot : il prit San Francisco de
Campéche qu'l pilla, mit la ville 4 rangon et re
vint 4 la Jamaique avee un butin immense,
Lum des hauts faits de ce genre les plus éton-
sants fut la prise de Grenade, au fond du lac de
Campéche, par le Mlibustier lamand Jean Da-vid. L’armée qu'il commandait comptait exace-
‘ment quatre-vingt-dix hommes. Nous sommes
toujours, on le voit, dans Vhistoire @ la d’Arta-
gnan. Guidé par un Indien, David entra dans la
rivitre de Saint-Jean, qui servait de déversoir au
lac. Artivé & lentrée du lao, il cache son vais-
seau, le laissant a la garde de dix de ses
hommes. On était & trente lieues de ta mer.
‘Avec les quatre-vingis compagnons qui Iui
restent, David gagne Grenade par des sentiers
détournés. Les sentinelles sont surprises et égor-
‘nées avant d’avoir pu donner V'alarme. Bt voila
nos quatre-vingts flibustiers dans une ville de
plusieurs milliers q'habitants. Ils frappent aux
portes des maisons, on ouvre. Ils baillonnent les
domestiques et, le pistolet sur la gorge, forcent
les bourgeois & leur donner ce qu’ils possédent
de plus précieux. Dans les églises, les bedeaux
se voient contraints de livrer les clés de saeris-
ties ob sont les vases sacrés
Quelques domestiques ont pu échapper, son-
ner les cloches, crier
— Ladrones ! Ladrones !(Aux voleurs !)
Cietait expression par laquelle les Espagnols
désignaient en ces regions les ibustiers. Et nos
;pagnons de battre en retraite, mais métho-
diquement, et riches d'ailleurs en argent
rnayé, en vaisselle d'or et en é
Puis, quand les Espagnols, qui se sont mis a
leur poursuite, sont sur le point de les atteindre,
ils se retournent, livrent batalle, et trouvent en-
core moyen, avant de poursuivre leur retraite,
de faire quelques prisonniers. Ceux-ci ne sont
mis en liberté que moyennant une rangon de
cing cents vaches qui fourniront le raviaille-
‘ment pour le retour.
David e ses camarades rentrérent tout glo-
ix & la Jamaique. L’expédition avait duré
hhuit jours. Le burin était de quarante mille €cus,
Nos flibustiers si braves, si entreprenants, si
dévouts les uns aux autres, n'étaient guére sou-
cieux de glofre. Lor, Vargent, les pierres pré-
cieuses, le bon vin, les liqueurs des iles for-
maient’ le mobile, le stimulant de leur hé-
rofsme ; mais ils n’en convenaient pas. Ils legit
tmaient leurs sanglantes expéditions sur la
conduite des Espagnols, sur leurs. eruautés,
leurs perfidies & I'égard des Indiens et leur pré-
tention d'etre les seuls a faire le commerce, &
pratiquer la péche et & établir des colonies dans
Te Nouveau Monde.
FRANTZ FUNCK-BRENTANO
(Extrait delle de la Tortue, Editions Tallandier)
eaLasn mRMNNESNEEN AER UO NOENEAS
LES NOMS
AU PASSE
LA CONFESSION DU RENARD DEVOT
«Se confesser au renard : découvrir son se-
eget calcul ene vantage, ou aul in
Fatarempéchor Fatisite.» Cette expression re-
lovee dans nos premiers dictionnatres de len.
‘GUE francaise (fin du avis siecle) est bien
‘conforme a la reputation du ruse goupil. Rus
Tegendaire dont il est le symbole patent, puls-
‘que c'est 'énorme suacde do 'épopde meds.
Yale communément intituise Te Roman. d
Ronare, dont lo horos central état 'e goupl
nomméRenart, qui a permis un changement
AARRKREARERRERRERARORATRATEAT
‘des scénos du Roman do
rier, pour mieux leurrer ses
les, s0 fait confesseur. A le fols admire
ui Tul sont donnees au xvi siecle
Your quant aux sentiments. des
Bialor Aisi le Dictlonnelre de. Trévoux
(1708) préclse que «la plus plaisan
du renard est de les prendre vfs, en
Fant avec des basses, cel 8 yeux st
de les laisser courre dans la campagne ».
Lerenard, souvent chassé, interessalt par