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Pas d’heure, les autres ont des montres. À la nuit, il doit être deux heures.
Il n’a pas de carte téléphonique et se sert aux cabines des bars. Il ne pose pas
de questions, la vie attend tant de réponses. C‘est une espèce d’acteur sans
Blanche Neige croit. Elle a des vérités, enfin… elle les attend. Elle attend,
Neige, il est deux heures de la nuit. Elle ne sait pas dormir. Alors, elle veille et
rêve de paysages que le soleil plombe et replombe. Elle croit que s’étonner est
apprendre. Elle est brune, bien sûr… Elle ressemble à quelqu’un, comme
Ils ne sont pas les premiers amoureux du monde, Paris fait son boulot. Ni plus, ni
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IL ETAIT UNE FOIS
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« C’est toi ! » Promesse ou aveu ? Mais qui, vivant, saura le fin mot de
l’amour ?
l’amour vous prenait tout nu, en Italie, à Corfou ou ailleurs et à Paris souvent.
Elle lui disait qu’il était incapable de se coucher sans la vouloir. C’est vrai. Ils
Blanche Neige disait qu’une femme ne quitte jamais pour un autre, qu’elle
le laisserait pour rien, pour le temps. Mais, Blanche Neige l’abandonna pour un
autre. Et l’univers entier devint une pute. Pute comme la coke qui rend les filles
laides et l’amour trop lucide. Pute comme l’alcool quand on n’a pas de drogue.
Il alla tuer, par colère, place du Maréchal Juin, là où les chauffeurs de taxis
dorment sur leur volant devant la lampe bleue de la station. Qui appelle
d’ailleurs ? Peut-être un autre lui, depuis la chambre d’une autre elle. La nuit…
Certaines nuits ne sont faites que de pauvreté. La nuit, certaines nuits ne sont
que des voitures qui n’arrivent jamais. Rue du Renard comme un renard. Rue
taxi.
Il veut ouvrir une plaie aussi grande que la sienne, dédier un paysage de
sang, sacrifier une vie, saigner un homme sur la pierre de sa déesse. Saigner
pour toutes les femmes de ses souvenirs, y compris une pauvre petite caboche à
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qui des frelons de plomb décollèrent les cheveux. Saigner, pour ses tresses et sa
son vivant. Planter assez bas sur la droite. Pousser sur la poitrine de la main
gauche pour ne pas être prisonnier du poids du corps qui, en tombant, bloque le
Ça s’est passé comme ça : il n’était plus beau et l’âpre neige fondait dans
chair perdant l’équilibre. Sur les laves du précipice il n’y a rien où s’accrocher.
Bien sûr, l’homme qu’il tue meurt. La vie dévale devant les yeux des deux. En cet
refait son voyage de noces avec Denise. Il se souvient d’un Bellini qui coulait sur
une immense plaie ouvre l’homme d’en face, la mort y apprend toujours quelque
Ils sont là, dans l’eau d’ici, ceux qui sont sortis du temps. Grand amour de
nos vingt ans, fessées de nos enfances, chers êtres de chair, tous attendent au
monde aurait pu être beau et combien non. Et, qu’elle soit double, triple ou plus
multiple, la vie menée n’est qu’une seule plaie. Aussi, plus vieillissent les
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hommes, plus ils souffrent. Ils souffrent de ne pas savoir oublier. Ils souffrent de
tous leurs T.G.V. parallèles qui déraillent dans un même accident. Ils souffrent
Ils souffrent parce que les parallèles se rejoignent à l’infini d’une plaie.
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BLANCHE NEIGE
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Toujours, elle pense en lui. Il la sait à chaque instant. Il la sait avec
Scarabée-Lézard, l’autre, celui qui lui a volée. Le coup ne pouvait venir que d’un
Et merde !
pas d’âme, qu’une espèce de géomètre qui gribouille dans le facile ne peut pas
avoir de l’âme.
départ. Ma Dieu m’a abandonné. Maman, si tu savais comme elle est belle.
Pardon maman, j’ai aussi envie de tuer mon père, ton mari le boucher. Vendre
de la viande, c’est comme vendre du sexe, moi je deviens plutôt végétarien. Toi
maman, tu ne sais pas pourquoi je tue. Je tue, je tue pour me venger, sans que
les femmes le sachent, des cleptomanes de mon bonheur. Je tue pour oublier
Ça y est, la lame est bien entrée. Maurice hurle, il n’a pas l’habitude de
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Blanche Neige est au-dessus de tout, Blanche Neige est le cadeau de la Terre.
Mais, si elle avait accepté la déraison de leur amour seulement parce qu’elle ne
la voyait pas ? Et si, pour Blanche Neige c’était parce qu’elle n’avait pas d’autre
choix, qu’elle était endormie ? Ce serait dire qu’il aurait été seul, que ce n’était
pas elle qui l’appelait… Se dire cela, remuer ces hypothèses, serait désaimer,
devenir un vieux con. Ce serait croire que les princesses sont des histoires de
livres et qu’il ne faut que de l’encre pour écrire les livres. Ce serait une
Tout est vrai. Sa taille et ses seins aussi, tout est à chanter. Tout est vrai de
couper les ponts. Couper. Agripper Maurice par la nuque. Gueuler plus fort que
lui. Donner un grand coup de genou dans les couilles pour qu’il s’abandonne,
mélanger les deux cris et très vite qu’il n’en reste qu’un, celui qui tue. Celui qui
tue veut un cri plus grand que celui de Scarabée-Lézard quand il jouira, un cri
d’amour. Un cri avec des yeux plus vrais que ceux de Blanche Neige quand elle
jouira aussi. Grimper dans la poitrine plus vite qu’elle grimpe les escaliers qui
mènent au sale nid. Serrer Maurice plus fort qu’ils se serrent. Gagner. Aller plus
loin dans le corps, plus loin que leurs sexes ; qu’il ne reste que son cri, son cri de
Et après ?
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Après, avec ses mains chargées de sang et de rage, il sait qu’il n’a plus le
droit de la toucher, qu’il n’a le droit d’aimer personne, sauf les calvas des derniers
bars encore ouverts côté Pigalle. Côté hommes gris, fumées vertes et femmes
truites, là où ses ombres bougent pour lui faire une place entre calva et calva.
de s’y blottir…
Demain, encore la vie, la sale vie ! Demain, encore l’enfer, les hommes et
Tuer un homme, c’est déchirer une page, uriner à la raie de la vie, voler un
livre à l’univers. Voler, il a aimé ça. Il a aimé voler un homme à la vie. C’est
tellement efficace…
Voir toujours revenir le même amour, c’est relire une page volée. Volé, il
Combien c’est seul un homme quand ça se soûle les pieds dans la sciure,
homme au nouveau glas du matin qui arrive avec ses rayons réglant leur compte
aux ivrognes et aux travestis. Combien ça titube un homme, ces nuits-là, entre
mentent, s’évitent, espérant ne jamais avoir à se retrouver face à face. Quand ils
drame. Éjecté dans un univers noir, il gravite autour d’un clou : l’inutilité de sa vie,
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Pourquoi n’avait-il jamais amené Blanche Neige à Cabourg ?
parce qu’elle est frileuse et qu’il n’a jamais voulu qu’elle prenne froid. Au temps
d’avant il était une fois il croyait voir de la poésie dans tout ce qu’ils vivaient.
serré les lèvres à Cabourg, aurait-ce été le même Cabourg ? Au moins, ça lui fait
de poésie.
bonheur, au fond des yeux ils pouvaient lire que cet amour serait tué. Mais, tant
devenue ?
plus brillant mais par moins con. Lui se sent spolié : « C’est de la soie, imbécile !
pas faits, des pas compris et de cette si longue absence. En lui brossant le
Mais si elle ne voit jamais plus combien il a besoin d’elle ? Si elle n’entend
jamais qu’il la dit être d’exception, femme dessinée par la main de Dieu ? Ce
futur s’éloigne à mesure que la suite tombe sur lui sans elle.
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Sait-elle ?
hait !
Se suicider, se faire tuer, mourir, en finir. Finir sans Blanche Neige, sans
fatigue absolue. Avec infiniment d’institutrices pour lui rappeler que les verbes en
Même le manche du cran d’arrêt est mangé par la viande. Mangé, avalé,
aspiré, absorbé. Ce n’est pas un crime, c’est de la vie à mains nues. Que c’est
bon de gerber dans le trou, d’être de la chair vivante dans la chair qui meurt. Que
Mais pourquoi ? Pourquoi a-t-elle fait cela ? Pourquoi l’a-t-elle jeté aux
Pourquoi les vivants se font-ils mal ? Pour qui ? Il marchait sur l’eau, lui ! Il
sans elle ? Pourquoi cette mauvaise agonie ? À cause de quoi ? Ne l’avait-il pas
assez bouffé son panier de linge sale pour avoir droit à l’amour et à la paix.
qui ? Pour flinguer un Maurice par nuit ? Pour prendre les armes et tirer dans la
foule ? Pour se dire, sans y croire, que c’était inéluctable ? Pour prendre ses
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larmes et en faire de la foudre ? Pourquoi continuer ? Et pourquoi, déjà, faut-il
Pourquoi fait-elle cela ? De quel droit ? De quel droit pousser dans les
orties ?
changé dans l’ordre du monde. Il sent son corps comme celui d’un soldat
Comment ne pas voir la femme que l’on aime viciée par le sperme d’un
autre ? Même les yeux fermés elle est là, fanfemme omnipotente. Elle lui fait
peur.
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De toute la journée il n’a pas pu quitter sa chambre d’hôtel. Sueurs,
quand des créatures immondes ont pris ce dedans de lui. Il a eu mal et il a cédé.
Avancer de bars en bars, boire jusqu’à noyer toutes les sales bestioles qu’il
a dedans. Boire, non pour se consoler, non pour oublier, mais pour vomir encore
et encore. Pour vider la ménagerie par la gorge, pour cracher du feu. Pour en
crever, pour avoir mal ailleurs que partout, ailleurs qu’à elle. Pour être sale,
Blanche Neige le poignardent sans le voir, sans croiser son regard, sans sentir
son haleine et sa langue noire. Sans savoir qu’il se pisse dessus, qu’il pleure,
qu’il ne comprend pas, qu’il ne veut pas admettre, qu’il veut mourir, qu’il ne peut
plus vivre, qu’il ne peut plus supporter sa jalousie, qu’il est devenu lépreux.
En route pour le chemin qui mène à la lèpre ! Le chemin qui traverse les
fichus masquant la bouche et les doigts gantés de laid cachant les yeux.
dans les trous femelles d’appels d’une autre époque. Il s’arrête un peu, sent
passer des morceaux de vos passés. Il y voit lui et elle n’arrivant pas à nommer
leurs solitudes et gardant chacun leurs paysages au bord des lèvres. Tout est là,
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Le double de soi ne peut être un autre. Il ne multiplie pas, il divise par deux
en appuyant sur le haut du crâne et nous sentons nos doigts nous ouvrir la tête
comme un sexe de femme, et nous nous sentons inceste, parricide, rien qu’à
aux hommes, au monde. Dire qu’il connaît cette femme, lui. Dire, qu’il y a
longtemps, il y avait des « Merci d’exister ». C’était quand ils se laissaient des
cadeaux dans la peau pour se sentir moins seuls sans l’autre. C’était quand ils
la lèpre. Quand ils n’auraient jamais cru que… et pourtant. Quand la mort de
À quoi bon ces mots ? La vie les a vidés, en a fait des métaphores, de
Un autre avait le droit de mettre son nez dans Blanche Neige. C’est
étonnant combien l’un des deux êtres qui ont vécu tellement proches peut, du
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Quand elle était partie, il n’était pas prêt.
pauvres visions sur les barres rougies de son lui avec énormément d’alcool
de mondes à refaire, tapait contre les murs. Il gueulait qu’il savait qui élevait les
chiens qui bouffent les hommes, qu’il connaissait les grades et les matricules,
qu’il n’y avait de véritable acte initiatique que l’énergie du plus d’espoir. Il gueulait
qu’il gueulait du fond du trou de sa gueule parce que c’était là qu’il était.
encombrait le trou du cul, que le monde entier allait brûler avec lui, qu’il ne
saurait jamais Blanche Neige comme il l’avait toujours sue. Qu’il fallait qu’elle
l’oublie. Qu’il fallait qu’elle le sème ailleurs, qu’elle l’avorte à tous vents, qu’il
C’était bon pour lui de se laisser arracher des pans entiers de cerveau.
C’était bon puisque ça faisait moins mal que Blanche Neige. Tant qu’à être
déchiqueté, que ce soit pour elle. Que les drogues soient dures, très dures. Que
l’alcool soit trop, colossalement trop. Toutes les souffrances, il les alchimisera.
Renaître et mourir. Y être enfin. Bouffer tout crus les œufs charnus de la
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pas se trouver mais le savoir, être un homme déchu. Ce terrier, ce soir, sera dur
et trop crack et gin et il baise le monde entier, même les oreilles de Blanche
mort et lui piquer ses plumes, son corps est ailleurs. Encore un morceau de
perdu, un arbre brûlé dont les tisons se reconstitueront pour lui revenir comme
une secousse.
Blanche Neige ?
Pour ses yeux et la bouche interne de sa bouche jamais fermée, pour les
dons de son sexe inoubliable, pour le larsen de ses mains qui jouent sur le
ventre et guident dans ses braises il l’avait appelée Blanche Neige. De quoi se
souvient-elle ?
Il est vingt heures aux horloges du monde noir. Il avait perdu Blanche
des restes de sa vie. Tuer c’est être suivi pour toujours, c’est se débarrasser, se
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non-lumière. Tout ça, c’était pour se décharger de Blanche Neige, c’était de la
boucherie.
Il voulait se mélanger les viscères dans une autre logique, mourir vivant. La
drogue le soudait à vif avec ses sales lèvres qui le léchaient. Il était prêt à
charger ! À la guerre !
En avant, vivant ou mort ! Il n’ouvre plus exagérément les yeux comme les
avant dans sa guerre ! Il sait le nom des couteaux qui vident les orbites et leurs
annexes. Il se bat contre des images, des vies vides de sang, des migraines
par chaque pore. Ça pue ! Il se bouffe ! Toutes les portes claquent. Ça pue ! Les
rideaux s’arrachent, les vitres explosent. Il n’y a pas d’air, que du vent. Pour
respirer il faut se trouver des organes à vendre, ceux de l’amour sont très prisés.
scié, le corps qui se retourne comme une chaussette sale et collée. Il a la gueule
de bois pour ne pas engraisser les vers qui l’habitent. Il n’est qu’un fil de fer
comme lui. Faites-les fondre avant qu’ils n’aspirent à d’autres dents et d’autres
lèvres que les vôtres. Ne les laissez pas seuls, ne les posez pas, comme l’a fait
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n’apprend rien, il pèse. Il écrase les poumons, les arrache, prend leur place, puis
toute la place. Au bout, nous devenons des porteurs, des traîneurs de vécu, et
soleil ne brille pas, dans cette vallée brune où l’on cuit sans la peau, on boit des
et de vertèbres. On boit sous les cris et les applaudissements, sous les cris des
Ici, dans la vallée fermée à clef, la lumière est loin et la magie agit droit au
corps. Ici, il n’y a pas de beauté, pas de fleurs, mais des murs de folie où
poussent des yeux. Il y a quelques arbres noirs qui ne sont que des doigts. On y
parle à des os et l’écho brise les tympans. Ici, nous sommes tous venus avec
notre vécu au fond du cul, on se laisse creuser et on n’en jouit pas. Chez nous,
tu as le front qui devient bas et ta vie se résume au fait d’être là. Tu es une main
déréglé.
vaisselle, il arrivait quand même que Blanche Neige brille. Oui, il y avait eu cet
avant, cet avant lui maintenant, qui lui faisait un trou de lumière. Des années à
être heureux, des années où chaque jour Blanche Neige avait comblé son vide
jusqu’à devenir cette âme. Des années, faites du bout d’un jour au bout d’un
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Attention à la lumière ! Il ne faut pas qu’il la regarde trop.
débouche un évier, trop vite, d’un coup. D’un coup, plus rien. Elle était partie si
vite que les bords du vide qu’elle laissait saignaient. Et ça recommençait : tout
son corps était en manque, l’appelait plus loin, lentement, indéfiniment brûlait
Tequila salée : alcool cheveux. Gin fou : les joues et le front. Cognac et
multiplier en se faisant une ligne de coke sur la cuisse en zinc d’une femme
laissé, les aiguilles de la folie lui redéfoncent les sinus. Poussez ! Il doit honorer
les femmes de la vallée noire. Rebandez son corps ! Il faut qu’il y croie, plié en
deux sur la fenêtre de la femme, avec les cheveux qui touchent le fond. Est-ce
cigarette, non, deux comme avec elle. Comme pour… rien. Non, ce n’était pas ça
l’amour, c’était bien. Il est nu et son sexe pleure dans la poche d’un vieux tablier
gris. Il s’essuie sur une pomme de terre qui fut œil et se réhabille.
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Vite, se traîner jusqu'à un banc et s’y écrouler.
guerre est invisible. Si le monde était bien fait, il devrait y avoir Blanche Neige, un
sein découvert, en première ligne d’une armée ennemie. Il devrait y avoir sur le
trottoir d’en face Maurice, Scarabée-Lézard et Denise. Mais, c’est Paris vide, la
solitude tout seul. C’est quand on aimerait avoir des gourdes à la place des
doigts pour inviter les autres, être un peu entouré. Un banc c’est bien pour
mains. C’est confortable pour se préparer à être réhabité, pour devenir un lieu
prêt, un corps unique, un rythme autre que celui des tempes et leurs sirènes.
C’est fait pour rêver : une vie il ira en Orient prouver qu’il n’est pas fou. Dès que
la folie sent une place libre, elle s’installe et, un jour ou l’autre, les hommes de
bonne volonté sont vides. Mais lui il sera maître de son vide. Là-bas, en Orient,
quand elle arrivera sur lui comme une voix pour poser ses bagages, il rira et
s’éclatera dans ce rire. Elle reviendra dans le sommeil, lui susurrera de ne pas
la parole : « Tu ne me feras pas un asile dans le dos, je n’ai pas de place libre,
j’ai déjà rêvé de toi, je t’ai vue une nuit, là-bas, boulevard Beaumarchais à
Paris ».
En Orient, la seule place qu’il fera sera pour la femme au corps miracle.
Elle sera une esthétique au-dessus de toutes les lunes. Mais nous n’en sommes
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Un banc, c‘est idéal pour regarder passer les idées. Tiens, Maurice et Denise ont
eu un fils, il s’appelle Edouard. Un jour il aura dix-huit ans, jeune et plein de lui il
voudra gober en le savourant le temps qui est devant lui et changer le monde
voudra n’être que bon et partager le peu qu’il saura et il se prendra les pieds
dans les structures et les grillages devant lui. Edouard aura très peu connu son
père et pleurera chaque fois qu’il verra couper la branche d’un arbre.
Il s’en lave les mains de ce gosse ! Que vient-il foutre dans la nuit de ses
yeux ? C’est un étranger, il ne le veut pas en lui, il ne veut pas qu’il le mange, il
Edouard n’aime pas les bûcherons, l’assassin de son père court les rues.
Sur le banc, Edouard, il y a un homme qui n’a plus de matin pour jeter son
visage et ses ongles. Celui qui a tué ton père ne porte jamais plus les mains à sa
poitrine, il ressent en silence et ferme les yeux quand les pleurs arrivent. Quand il
y pense, ses doigts pansent son front. Ses doigts où sous les ongles rien ne peut
qui sait démolir les immeubles condamnés. Il prend la boule de lumière dans son
plexus solaire. Ça le plie en angle droit, ça le recroqueville et, très vite, le grand
calme…
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Vidé et détendu, au ralenti, en ne revoyant rien, il allume une cigarette.
Très efféminé, du bout des doigts, du bout des lèvres, il fume. Tout doucement,
les poumons. Blanche Neige en lui, il est bien et demande qu’on lui ferme les
yeux, qu’on les lui couse avec les cheveux de la belle adorée, qu’elle soit partout,
qu’elle le remplisse et ne puisse plus sortir. Il n’ose pas bouger, il ne faut pas que
des tombes. Et à des milliers de kilomètres, aux bouts des fils de ses jambes,
ses pieds le regardent s’apaiser. Au bout d’une perspective, défilant tels des
phares sur les périphériques de la nuit, des traînées vertes, rouges, jaunes et
bleues éclairent de leurs faisceaux ses bottes posées au pied du lit d’autres
univers. Beau voyage pour de vieilles galoches. Il pose une main sur sa poitrine,
elle brûle, elle a touché le cœur de l’homme qui devra passer bien des hivers tout
seul.
Remettre les bras le long du corps, mieux poser la tête, ne pas essayer de
devient de plus en plus intense, de plus en plus rapide : clavicule droite, clavicule
gauche, clavicule droite, clavicule gauche. Deux points précis, deux poignées
brûlantes pour être repris et ramené à la conscience. Et, il voit son corps partagé
en quartiers par les mêmes pointillés d’encre bleue que ceux qui redessinaient le
Qui veut le dépecer ? Il cède en haut et en bas, partout il craque. Qui veut le
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dépecer ? Les yeux collés, il appelle Blanche Neige, c’est Edouard qui vient, une
bonne pépite, elle se fondait dans ses fissures et le recollait. Et, il se mit à
follement aimer Edouard. Dans les yeux de ce gosse, il pourrait se perdre sans
danger. Il entre en Edouard par les yeux et y descend jusqu’à la poitrine qui
renferme un bel indien noir, il entre dans l’indien… C’est un trou de lumière, une
lumière capable de fondre tout, il entre dans la lumière où piaffent les couleurs…
Il flotte dans les couleurs, les ondulations, dans une peinture vierge de tache et
Edouard le veille un moment puis part après l’avoir embrassé sur la barbe.
Est-ce la fessée glacée du froid de janvier qui l’a réveillé ? Sont-ce les
larme ronde tombée de loin, d’un œil ami ? Non, c’est l’été ; Il a dormi des mois
sous le baiser du fils du mort. Sa cigarette fume encore et les pigeons ne l’ont
hommes sans souvenir que rien ne pouvait dissoudre ? Ils se disaient hommes-
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demandaient ce que sont ces seins que l’homme ancien adorait. Il veut être des
leurs, que le visage de Blanche Neige s’évapore au-dessus de leurs cimes, être
lui prêter, quand il le fallait, leurs troncs pour qu’il y pleure Blanche Neige. Il avait
même vu, le long de certains, d’autres larmes couler. Ils lui avaient appris que
c’était le mal aux dents des arbres. Quand il était prostré, accablé par le mal de
respectaient l’aura sourde qui l’emmurait. Les arbres savaient que c’était là qu’il
écoutait son âme blêmir et reprocher, ils cessaient alors leurs mélopées
En leur compagnie il était remonté vers des jours au soleil blanc et même
plus blanc que blanc, trait, un éclat de temps où l’on pouvait vivre des milliers
fuser vers le soleil, chanter là-bas, chanter pour le soleil. Pourvu qu’il soit sublime
Neige recommencent à lui faire un collier et elle n’est toujours pas là pour le lui
grands rêves sortilèges les grains de sève et les cheveux des comètes, il avait
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grains de sable ou vents de cheveux, de générations d’ADN en génocides contre
nature, il pouvait tout être et pourquoi pas un caillou cerné de poils durs qui
Dans le cou d’une oie, il rebondissait d’un mur à l’autre avec son sac à dos.
partout avec ses rêves de mers et de femmes, à émailler de mille décors les
fleurs des jardins et les princesses des balcons, il pouvait tomber n’importe où.
blanches. Les deux cherchaient l’air. Il sortit par le bec, devint le bec, un bec aux
tête éclater. Il se retourna vers la petite cervelle, s’y planta et dégusta. La drogue
était intéressante, elle montait dans la tête en faisant sentir les chemins du sang.
La presque morte n’entendait que le bruit que ça lui faisait, que l’homme-pou qui
lui bouffait la tête, elle invoquait l’avenir en espérant qu’il devienne enfin très
violent et que ce soit fini. Elle aimerait bien être un arbre après être sortie de sa
vie. Elle y repousserait unique branche sur son propre tronc et s’en envolerait
pour mener sa vie d’oie libre ailleurs. Elle commencerait par visiter le ciel de
Cabourg et quand elle serait haut, très haut, elle desserrerait les branches de
ses pattes et laisserait tomber celui qui lui a vidé le crâne. Il tomberait sur la
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Il est à Cabourg, au jour d’après que le suicide n’a plus été un concept
mais une solution. En ce matin d’été, il a des coquillages collés aux genoux.
Blanche Neige n’en a rien su… Les enfants ont un peu peur, leurs petits cris ne
lui fond pas mal aux os des oreilles, leurs petites mains boudinées tournent
comme des marionnettes, ainsi font, font…, il est le goût du sel et n’a plus de
lèvres.
Il aurait suffi d’un mot, mais ce mot ne fut pas. Il s’accroche au gros
Que cette ville paraît belle ! Que cette ville paraît facile !
Cette ville danse le tango sous son corps descendant, cette ville a les yeux
qui brillent et flèchent quelques mètres carrés de trottoir pour qu’il atterrisse. Il
crache une plume-signal comme balise et, aspiré par le bas, le banc plante de
vingt bons centimètres ses pieds dans le béton plat. Pris. Repris.
Est-ce que tout a changé ici ? Est-ce qu’il y aura moyen de faire
plusieurs âmes.
Les passants passent comme s’il ne s’était rien passé. Ils ne lui demandent
pas de dire les paysages aperçus. Etaient-ils fabuleux ou bien noirs à pleurer ?
Il revenait dans son corps, dans son monde de fées. Il avait rêvé une route
apprenante. Il avait rêvé qu’à deux ils convergeaient vers quelque chose
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où il serait facile d’apprendre. On y aimerait des fées et, même quand tous
Nous serions miroir pour le regard des autres, les autres seraient pareils. On
La réalité est autre et le décor ce qu’il est, mais il n’y en a pas d’autre et il
faut faire avec. L’histoire, vous en connaissez les raisons, il y a mieux sans
doute… On va essayer de faire avec ça, de tirer le rideau sur ce pauvre théâtre
en espérant que le vent racontera autrement quand il se réouvrira. Celui qui était
perdu dans sa vie y sera toujours, les coups de fouet de son sang, les coups de
même chose. Le temps que ce vent arrive, laisse celui de revenir à soi, ou du
Devant le rideau, peu importe d’ailleurs de quel côté du rideau, nous tâtons
tous le tain de nos doutes. Le rideau est un miroir qui ne réfléchit pas et derrière
Quels reflets espérait-il ? Les autres sentaient-ils une langue froide leur
parler aux vents ? Et ces vents, ces vents, que vont-ils faire de Blanche Neige.
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Il ouvre le rideau. Quoi de différent pour lui qui n’a été jusque-là qu’une
idée de Blanche Neige, que danger dans Paris, que fusées vertes faisant en
banc autopropulsé le tour du ciel, que gerbes de came et d’alcool ? Trop tôt, ce
n’est pas encore le bon vent, une tempête les a pris : ça tourne et ça traverse
des feux d’artifice de fers à souder, ça fait des bibliothèques garnies par les
peaux arrachées dans les virages, des portières de dents perdues contre les
volonté…
Il lui faut du temps pour vous rencontrer. Bouger de son banc et embrasser
les doigts de ceux qui l’aiment ne lui est pas encore possible, autant qu’il en
finisse avec les mauvais tours qu’il doit accomplir parce qu’il aime Blanche
Neige ; autant qu’il s’absente pour une autre virée dans sa tête. Quoi qu’il arrive,
celles d’après seront vos filles aussi, il partagera le ciel et le miel avec vous.
Regardez, une image s’incruste sur le rideau, le vent sait faire des choses que
auront la forme de vos pensées, il vous les présentera sur ce même rideau. Ne
chance de rencontrer un bon chaman qui prendra pour lui ses pierres de
cauchemars, ces projectiles chargés de tout ce qu’il croit avoir vécu, qui
vouloir du vent.
Il se dessèche, loin d’une Blanche Oasis où la neige n’était que pour lui.
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scorpion… Le rideau devra attendre, le venin le conduit dans le sexe du soleil, il
y tombe avec son mal à elle, sa soif d’elle, avec les trompettes de la jalousie et
dis-toi qu’il est difficile d’ouvrir le rideau avec un banc collé au cul.
Blanche Neige, Blanche Neige, c’est parce qu’il s’agrippe, qu’il se renifle,
Et c’est ainsi, voulant te voir à tout prix, qu’il regardait le feu du soleil. De si
près pas besoin de microscope : y brûlent des enlevés de force, des agrippés,
des reniflés, des pris par le dos, des sortis de leur amour. Et tous qui furent
réveillés, sinon ce ne serait pas drôle. Blanche Neige, si ça peut être utile, si ça
peut faire que personne d’autre ne se sente harponné dans l’échelle de l’échine,
Blanche Neige, ici au milieu d’un soleil, les lacs rouges sont beaux, dessus
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rien d’essayer de nous fuir ». La bouche noire et béante des sexes femelles du
Juste une fois pour se laisser faire, Blanche Neige, ce n’est pas une
énormité ? Crois-tu qu’il ne faille pas bouger, que les femmes du soleil n’ont pas
Face à toutes celles qui sont au fond d’elles, face à tous ceux qui sont au
fond d’eux, face à la mayonnaise de l’amour qui ne prend pas, face à des fleuves
de questions qui noient la tête et font aimer les idées qui pourraient tout arrêter,
Elle avance, les dents au creux de la main, mais pas comme Edouard, ses
dents lui trouent les paumes. Pour une histoire d’amour qui l’a noyée, elle aussi
est ici, séparée du bonheur. Elle est là, le voit-elle ? Pour elle aussi, la vie c’est
pour après, la vie c’est tout ce qui lui reste en moins. Et si, pour elle c’est comme
pour lui, elle a besoin d’eau. Alors, puisqu’ils sont deux à le vouloir, qu’il pleuve !
Il pleut. Il pleut et le soleil s’efface. Il pleut, rien de plus normal quand deux
qui se ressemblent le veulent. Il pleut vertical pour faire de la boue sous un banc.
qu’elle saura écrire les refrains des plus belles chansons à sa place. Il tombe des
gouttes qui remontent vers le milieu de l’œil. Il semble qu’il y a un œil qui
n’appartient qu’aux fiancés qui souffrent. Il pleut dans les yeux une pluie d’ail, la
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vie fait sa cuisine. Il pleut loin : il neige de la pisse sur Cabourg et les cartes
postales déteignent sous les trombes. Il pleut et ça fait des trous dans Blanche
Neige. Il pleut sur deux pauvres malheureux, l’un ferme les yeux. Quand il les
Que d’enfants grandis trop vite voit-on depuis les bancs quand on y est
cloué. On tend l’oreille pour essayer d’entendre ce que Dieu raconte à leurs
mères. Mais on est peut-être trop loin, mais il ne se dit peut-être rien… Et, à force
de scruter ainsi des yeux et des oreilles toujours le même point, on finit par se
faire des idées, des idées qui restent même en fermant les yeux et en se
bouchant les oreilles, des idées qui bourdonnent, prennent toute la place. Il faut
se lever. Cette idée-là a les traits de celle du sable d’avant les pierres. Où mène-
C’est un sale banc, un bar où aller boire serait encore mieux finalement.
Vite ! Un bar et aller boire, aller trouver du vent, une autre table, un autre soleil,
une autre couche de la vie. Il faut partir, aller se faire regarder ailleurs. Au diable
les promesses de sobriété ! Il y a plus fort qui le pousse : la vision de deux seins
Le cheval n’a peur de rien, ses fers claquent sur les rues, les pavés, les
impasses. Il se frotte les yeux et entraperçoit sa mère qui n’aime pas qu’il prenne
des coups.
Deux cents mètres. Cent. Cinquante. Cinq. Quatre. Trois. Deux. Zéro. Un
éclair sec le déchire comme une feuille de papyrus. Les miroirs de la Grande
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Pyramide du Louvre lui montrent qui il est. Quelques sarcophages, n’ayant pas
naze qui n’avait même pas soif. Le sexuel triangle des Bermudes de Blanche
Tans pis. Génération des fracas mec, génération fracassée. Qu’on lui porte
porte vitrée qu’il a percutée et promet le pire à une momie s’ils se retrouvent un
jour.
Souvenirs : la reine des nains avait de si beaux yeux que tout était
Mal au crâne : envie de vomir des larmes froides et des steaks d’existence
par les yeux. Ne pas se gérer, se laisser couler du traumatisme comateux sur les
joues, comme ça, avec tout de noué : le dégueulis, la violence d’être, le fouet, le
entrer. Si tout se passe normalement, on vous prend pour vous poser sur une
quand il voulait faire le bien, de s’abandonner aux idées qui passent, de lâcher
prise. Les rêves ont-ils un stérilet et, si oui, peut-on le sucer ? Les mers sont-
elles encapotées et, si même non, peut-on se les prendre au fond ? Pourquoi
tête.
« Non ». Bon sang, où sont les mots quand la tête est pleine de feux d’artifice
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pour au moins mille ans ? Où sont les mots pour sortir de là ? Qui a chiffonné la
Les mots, il en avait un grand panier. À ses heures les plus instables ils ne
lui avaient jamais fait défaut. Preuves ou leurres, ils lui avaient toujours ouvert
leur lit et leur âme. Avec eux il avait mangé, bu, aimé, menti.
vous pas livrés avec le cheval ? Auriez-vous, vous aussi, trouvé mieux ? De l’eau
coule de la nuque de la vie et il ne peut pas dire Blanche Neige autrement, juste
la ressentir le trahir par le corps. Il avait voulu se rincer l’œil, la douche est dure.
Il veut répondre aux questions qu’on dépose sur son corps allongé mais ne
peut rien faire avec les millions de petites étiquettes qui se sont mélangées
amis qui ne le veulent plus, les mots n’ont plus de sens. Essaims de billes
perdues, eux aussi ont un trottoir pour avenir, un trottoir à perte de vue… Les
mots ont du sang qui sort par les cheveux. Se sentent-ils rétrécir ?
Ton guerrier a perdu la bataille Blanche Neige, son bouclier Zoulou est à
terre et sa lance brisée. Il n’est même pas sûr de s’être bien battu, il faudra que
tu te renseignes.
mourir pour un coup de tête dans une vitre de bar, l’histoire, les mots et l’orgueil
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Ce n’est qu’un entracte, un espace longiligne, une soupape pour la
longévité, pour vider les poches du pantalon. Il avait quoi Rimbaud contre la
Bukowskienne… Il doit reprendre ses esprits pour ne pas se laisser arrêter, pour
ne pas aller en prison, pour ne pas faire pleurer sa maman. Et, au cas aussi où il
y aurait un après toi, une forme qui le fera oublier un peu. Avec le vent aidant, qui
sait. Avec le temps et les miracles, ses joues oublieront, peut-être, les tiennes.
vacuité sur le chemin des poubelles. La liberté devrait dire non quand on se met
dans de tels états. L’idée doit être de devenir meilleur. Gloire aux sœurs et frères
d’innocence.
- Merci
- Ça
- Va
- Aller…
jusqu’à ce que le rideau s’ouvre. Impossible, les mots pour dire « Merci ça va
aller » ne viennent pas. Alors, l’idée vivante c’est la chasse, la paupière qui
tombe sous le coup de fusil, le corps qui fume, le gibier qu’on découpe. Cet
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animal est plein de liberté et son indivisible regard lui montre le chemin des
belles. L’envie est vertigineuse, blanche, sans passé, sans épreuve, ouverte à
L’envie c’est que tout cesse, que les ombres se taisent, qu’il y ait de la coke
qui écrasera son cercueil. L’envie de l’idée est que sa tête explose pour de bon
deux ?
profondeurs pour aller pêcher des mots sans se laisser distraire par ceux qui
coups tordus. La respiration, c’est d’avaler un grand bol d’air enfumé et de les
poser, ces satanés mots, sur la table, d’un coup de poing, en se redressant :
demande un morceau d‘elle pour se casser un genou avec, ils rient. L’urine d’or
rouge qui coule de son front lui fait gagner du temps. Ne pas leur laisser le temps
de brasser dans le stock vital des mots qui lui reviennent petit à petit. Pour éviter
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la grande partouze des violences, il est mieux qu’ils n’aient que du vide à mettre
en joue. Avant, il était avec Blanche Neige. C’est elle qui chantait quand il
dansait.
œil de femme collé sur un coude d’homme. Qu’est-ce que ça veut dire ?
Que le rideau s’ouvre, il leur a dit que ça allait, qu’il s’excusait. Comme ils
n’avaient rien trouvé d’exploitable ils ne sont pas restés. Ils sont partis et
pourtant, quelque chose d’eux se manifestait, une phrase idiote accrochée à une
Le P.V. tournoyait avec sa mauvaise hélice, ses pales passaient dans les
Non, messieurs de la police, nous ne sommes pas cocus, nous avons été
violés et nos corps sont rugueux. Violettes, mauves, oranges… dans tous les
sens nous fûmes perdus. Violés ! Violées ! Mais ici n’est peut-être pas le vrai
monde. Et ici ce théâtre… et partout ces amis… Il faut bien avoir des amis avec
qui se serrer contre. Il faut bien se serrer contre pour laisser passer le pont où
passent les vies. Mamans on pense à vous. Mamans, il vous a fallu quand même
bien jouir un peu dedans, avec sur vous les kilos de l’homme dessus ; il faut bien
que le temps fasse ses constructions, ses trous et ses bosses dans le ventre.
Il y a ici une foule de réveillés sans autre raison que la procréation. Mamans,
vous verriez nos colliers, nos montures d’idéaux à terre, notre mal qui frappe les
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jambes. Mamans, vous verriez les barbes de Scarabée-Lézard nous poussant
sur les joues entre éclats de verre et de rire, trouant notre idée de l’innocence. Le
décor n’est pas excellent, cette pièce se joue dans le vide, en des cloisons
qu’elle faisait. Froid. Les forces ne reviennent pas, ni tous les bons mots. L’air qui
colle au corps, la batterie qui couvre les guitares et une pauvre guinguette de
tête qui se demande si elle n’est pas sourde. Une pauvre guinguette de tête qui
arrose la banquette, les éclairs qui s’y stockent en attendant d’éclater, des
escargots qui traversent la route, les jambes des fleurs qui tombent, le ciel qui se
couvre de sang.
Sous les néons, on vient lui demander son nom. Il demande un bras pour
Demain sera-t-il mouche, fleur ou rocher ? Dans quel état le monde va-t-il laisser
demain ? Ce que le roi des cocus voit dans son avenir après le verre d’eau, c’est
un bon cognac pour se remettre, un bon ascenseur à mach mille qui fait péter les
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étoiles et envoie en l’air. Un bon cognac qui coule dans la gorge et va où il faut
- Cognac !
tente a été plantée, déborde. Un homme recopie sur une page blanche les jours
qu’il a devant, il recopie pour une femme, elle s’appelle Blanche Neige. Elle en
Blanche Neige se balance dans mes yeux. Mes yeux vont cracher : c’est
un fleuve de colle qui lèche tout sur son passage. Le regard mute en sexe de
Blanche Neige projetant du feu gluant. Fixer intensément d’où ça sort. Sans
Théâtre dans un recoin cérébral, spectacle venu d’un nid de plastique sous
le cortex. Il a trouvé le numéro direct des premiers secours. A tout moment il est
et elle résonne au plus profond de la femme en feu que j’ai dans la tête. Ce
bouton, c’est la bosse fendue sur le front et le doigt, celui qui, il n’y a pas
Guignol, des deux mains, s’arrache du cerveau des vers de verre. Guignol,
maître du monde, va dans toutes les têtes dont une. Il est dans ton cerveau pro-
forma, petite, celui qui t’a fait passer la douane de ta raison. Il te parle dans la
citrouille, il sait que tu es disjointe, qu’un homme t’a repoussée jusqu’au souvenir
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de ta vieille fontanelle. Tu es jeune, tu es une montagne, ici nous sommes tous
soudés.
Il y a eu un avant ta nuit folle, la nuit qui t’a prise par surprise. Rien n’était
écrit se dit-on dans ces cas-là. N’est-ce pas ? Et l’autre n’en est pas devenu fou.
Comme si nous n’avions pas servi. Quand des destinées faites pour s’user
ensemble laissent une des deux places vide, comment sortir la dernière ?
Il te faudra, comme un arbre, résister à toutes les grêles, tous les cailloux,
doux front et elle n’est pas venue pour autant. Serait-elle devenue salope ?
sont pas les mêmes sensations… Tu te sentiras très seule dans la peur et cette
homme, cet autre toi, tu es prête à les porter jusqu’au bout. Quel bout ? Je te
vois marcher, ton crâne vide dans une main et ton bidon plein d’essence dans
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Tu en auras entendu des craquements, tu en auras vu des nuits se fendre,
Quand tu croiras être arrivée au terme de cette marche forcée, que rien
nouvelles portant le même sac. Et, si tu sens aussi l’univers t’échapper en cet
instant, ce sera parce que ses mains n’étaient pas sur les tiennes pour les rendre
fortes. Tu te diras qu’il ne sert à rien d’être un sac de rien jusqu’à la vieillesse,
Fixe bien le miroir. Derrière ton miroir, il y a une mer bizarre, une eau de
liens. Tu y vois un corps surprenant, un corps ardent… c’est ton corps. Ton corps
où sont déposés nos rendez-vous d’amour. Tu boiras toi aussi un cognac de trop
Blanche Neige, tu as corné une page de la vie, derrière c’est l’espoir. Que
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Saut ?
Une petite Tarzanne trouvée dans les fils de l’écriture et un reste de mec
dans un jean, ça saute où ? Je ne le sais pas, mais ça ne saute pas sans vous.
Aussi loin de l’amour il y a forcément des volontaires. Elle et lui se serrent pour
ne pas que leur dernier ciel les défasse. Ils s’accompagnent. Saut ? Qui porte
l’autre ?
Se poser ensemble, dans le même ciel, dans le même coup de rein, sur la
plus haute tour de Notre Dame de Paris. Bien sauter, c’est-à-dire ne rien perdre
des cheveux que nous avons entre les doigts, ne pas égarer la mèche brune de
Blanche Neige. Sauter en regardant nos mains : nous avons les mêmes pour
longtemps. Sur une, il y a les traces du verre de trop : cet ixième verre de cognac
il l’avait écrasé dans sa main, ça saigne, mais pas trop, ça pique quand il faut
s’agripper.
amour sur le dos. Bien sûr que ça fait mal aux dents, qu’il y a l’esquisse d’un étau
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Mais, nous volons mal… Oiseaux fous, serrons les dents, faisons-les
grincer et sentons l’émail qui casse pour avoir quelque chose dans le gésier.
Vous pouvez m’appuyer sur la bosse. Arrachez, sciez, volez, vos tours Notre
Dame sont en dedans, où l’être aimé nous manque. Allons l’y chercher, tendons
Sentez-vous la faim monter, l’envie de manger des pétales de rose et, d’un
l’anorexie d’amour, des regrets stockés, de l’adrénaline qui vole mal. La vie c’est
Nous voulions nous tenir à des faucons de pierre, nicher dans les ailes des
vertige ? Pourquoi n’est-il pas possible de se faire aspirer comme une figue par
la vie ?
petite Colombine ?
Il n’y a pas de suicide heureux. Coule le long du fil que tisse une araignée
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descendre, accroche-toi au coton des nuages, aux arrêts de neige, aux miracles
bons à vivre. Tu n’es pas seule, je coule avec toi le long du fil de l’araignée, je
papillons.
La pluie tombait, il a grêlé peut-être, elle avait le cœur qui saignait, son
de tout, confions-lui nos restes en vrac : l’espoir, les regrets et le grand vide
entre. Il semble en savoir beaucoup sur la race qui ne veut pas s’éteindre.
Nous descendons, nous nous cognons à des saints morts, froissons leurs
chrysalides, une infinité de diadèmes qui pourraient parer avec bonheur le front
d’une minuscule femme. Il nous faudrait être magiciens et sur le front d’un petit
Restons encore un peu ensemble dans cet air. Nous sommes à un petit
l’amour par un trou, les uns contre les autres, contre une corde.
Mon bouton est cassé, n’appuyez plus dessus. Son sexe adoré faisait
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DORA ET FLEUR
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- C’est combien ?
Neige.
chante faux, mon chevalet ne se plie plus à mes désirs, mes olifants sont rouillés.
Combien ?
fardée, cheveux de poupée Barbie, elle le délivre de rien après qu’il l’eut payée.
prévenir, de savoir qu’elle serait toujours là pour lui. Régulièrement il venait chez
Dora et pressait contre elle les pas qu’il entendait dans sa tête. Elle lui disait qu’il
n’y avait aucun bruit là-dedans, qu’il se faisait des idées, que c’était la faute à
l’alcool, à la drogue et au mal manger, qu’il n’était qu’un de plus tombé de Notre
Dame. Quelques sueurs d’un vieil amour, quand ils s’embrassaient, raclaient la
gorge.
Un jour, elle le doucha au rouge à lèvres et lui fit revoir une question qu’il
s’était posée une nuit où il voulait voler. Il en avait partout, il était la rose qui lui
bouchait les yeux. Il était une rose, strip-teasait pour elle en lui dédicaçant des
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pétales. Ensemble, ils regardaient les saisons défiler et elle riait… Plutôt rester
À part l’amour, il n’y avait pas grand-chose à faire. Parfois, pour tuer le
temps, il sortait les deux djembés sur le palier et, assis, s’essayait à avoir le
pour rien, qu’elle lui donnait de l’Afrique à chaque seconde passée avec lui.
jeunes filles nues se rendant au mariage des corps. Face à elles, des
majorettes. Chaque fois il ouvrait les yeux pour ne pas en savoir plus.
C’est entre eux, c’est chez elle. Dora sait se poser dans ses bras telle
Dora, c’est la faim finie. Son corps s’appelle l’anti-faute, l’ensemble parfait,
une rencontre avec Dieu. Quand ce corps dort, il se crée autour un espace de
beauté inviolable où l’on peut voir une porte qui s’ouvre et se ferme au rythme de
Dora qui dort ; des anges entrent et sortent. Elle a, écrits sur la peau, des mots
qui, quand on les effleure, racontent l’histoire du monde. Au réveil, elle me dit
qu’elle a fait le tour des rêves et qu’elle est heureuse d’être en vie puisqu’elle
m’aime. Souvent la honte m’a submergé, souvent j’ai pris son tendre visage dans
Ce sont des souvenirs tellement jolis… Des souvenirs où il fait bon flâner
comme quand, enfants, sur la route qui revenait du catéchisme, nous cueillions
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Comme ils sont loin les cauchemars : la vraie pierre qui fait voler est en
de ses deux index, il ôte la cire protégeant l’âme des morts, fond le tampon des
ancêtres, tend la main et serre celle d’un vieil homme décharné comme un qui a
passé sa vie à avoir faim. Quand Dora le lache, il a un grain de beauté au creux
de la main. Il l’avale et se sent muter relique, regardé par son corps pesant,
comprimé par un vide énergique. Il n’est qu’en lui et voit qu’il n’est pas généreux.
Il veut changer : il ne veut plus s’envoler n’importe où, ne plus être nombreux.
Seul, il sera plus facile de s’évaporer. C’est quasiment du miel qui pousse
maman qui l’aime, du lait partout. N’avoir été que le cœur qui a l’âme en lui…
Flotter, ne jamais plus être pris à partie, bizuté par la réalité. Courir comme une
biche-homme, un peu gambader dans tout cela. N’être que naseaux. Être né
autrement, être le vent qui va et se soûle d’une fleur. Passer avec des doigts de
fée ses mains dans tout ce qui est beau. Ne plus s’électrocuter mais vaguer,
faner du soi jusqu’au bonheur absolu. Aimer à fond, se sentir rosée. Comme une
jolie fleur émerveiller les enfants et l’amour. Être la fierté d’une famille nouvelle, le
tout amour. Percer un passage naturel, une gorge sur l’écume des rêves. Ne pas
vouloir savoir que la voix de Blanche Neige peut revenir dans la gueule parce
qu’il n’est pas le sentiment absolu, la générosité parfaite, mais avoir fait un pas.
Être un peu magique aussi, invoquer les excès comme des esprits, un
chouïa revendiquer.
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Encore un rêve ? Plutôt un changement d’altitude. Dans nos vies, s’il y a un
poids à porter suite à l’amour sans suite, il est bon qu’il soit empli de beaux
poésie, il a réinventé grâce à une fille chez qui il est monté amoureux, s’est uni à
dans la vie. Ce pari est harmonieux, il peut tout embellir, ne plus faire confondre
l’amour et la symétrie.
Un papillon blanc vient lui taquiner les joues, son long tube déroulé suce sa
barbe, lui fait du bien. Il sent la douceur lui rentrer dans le cœur et y couler des
papillon bédouin qui vient lui remettre les idées en place, le probocis dans le
visage, matin fait d’eau et de soleil, bonheur des rives, vérité des rêves. Toutes
les greffes prennent sur ceux qui voient l’amour comme un espoir et crachent la
tendrement toutes les fois que je m’écroule sur son épaule droite. Nous nous
fondions dans un même espace vert. J’avais l’impression qu’elle roulait très
connaissais pas. Ce n’était pas un voyage astral, c’était comme une bulle qui ne
vient qu’une fois dans une vie. Par flashs il me semblait apercevoir et reconnaître
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le vieillard qui m’avait tendu la main, il était toujours aussi maigre mais son
visage me faisait penser à de la magie qui aurait réussi et cette magie pouvait
marcher pour moi aussi : elle m’expliquait que j’en voulais trop à la vie qui ne
compte pas, qu’un camé est le résultat de plusieurs incendies, qu’un camé ça ne
brûle pas, ça ne peut continuer à vivre qu’en étant parano, que je ferais mieux de
ne me laisser prendre que par mes visions d’éternité, même si j’ai la sensation
qu’elles ne me prennent pas par le bon bout. Que si je continue à peser l’amour
douceur entrer par de vieux trous d’acné sans savoir qui parlait à mon visage,
que j’étais donc capable de faire confiance, qu’il fallait que je ne confonde pas
jusqu’au bout la réalité et ce qui est vrai, que tout ce que je vivais était vrai, que
Dora était la première qui croyait que j’avais un chemin, qu’elle allait bientôt se
garer, nous ramener chez elle par le conduit de la cheminée, au numéro deux
enfouîmes nos corps dans un seul. Comme brigande et brigand nous jouîmes
- « Merci. Merci pour tout. Je vous le rends mieux que je l’ai trouvé. Je le
de loin.
rien qu’à elle. Il me semble qu’il est prêt à accepter que la vie vive mieux. Vous
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allez voir, il sait dire des petites phrases entières à la vie, il n’est pas trop tard, il
peut encore avoir des overdoses de bonheur. Son drame est d’avoir tout perdu
trop tôt, comme il l’a fait mille fois en bébé, mesdames, en mon sexe ami.
Laissez-le se cacher dans le vôtre, dans les arbres, les ours, les grands-pères.
Nous fîmes plus que nous croiser, nous avons réalisé une rencontre, une chose
- Dora : « Je ne suis qu’une ouvrière, une femme que l’on vient voir pour
ses quatre ailes. Je rends la liberté quand les mots me paraissent plus droits,
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Vers Notre Dame, alors, aller voir ce que nous avons à donner ?
Vers Notre Dame, se souvenir de Dora qui sait aimer pour rien et essayer
Vers Notre Dame, se forcer à oublier Blanche Neige qu’on sent, malgré
Encore loin de Notre Dame, imaginer sur les marches un couple enlacé.
Les voir : il fait froid, ils sont tombés du ciel ou tout simplement venus de la ville,
eux ne grelottent pas, ce doit être du froid particulier. Frissonner à midi, suer du
givre, avoir froid comme un mort sans Dora et peur comme un lapin au bout d’un
C’est un couple tout simple, tout petit, tout bleu, et devant, invisibles, des
milliers d’assis, des milliers qui ont perdu l’autre avec l’autre qui dure dans leurs
ailleurs, et tous qui ont une bosse sur le front. En regardant vers Notre Dame, je
vois les Quasimodas et les Quasimodos qui portent l’amour qui fait mal devant
eux, les gibbeux et les gibbeuses à la protubérance sensible qui attendent que
ça passe.
Blanche Neige avait quelques grains de beauté sur le dos. Le temps passe
tel un peigne. Les yeux loups de Dora comme des phares ont pourtant éclairé le
bord de ma route… Notre Dame de Paris aux quatre points cardinaux dresse ses
pointes sèches. Dora qui se shoote à l’eau de pluie, la chance de pouvoir tout
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Au fond de l’un de ces mondes, nous avons des pieds à laver pour montrer
que nous aimons. Ceci est dit sans preuves tangibles mais, envie de prendre les
mains qui présentent une palette d’eaux… surtout ne pas se tromper, choisir la
bonne, la transparente et froide avec de la bonne mousse verte sur les rives.
Dans celle-là, des sauterelles aussi prennent leur bain, des cailloux brillent, le
sable fait un fond uni. Buvons l’eau où l’âme des femmes peut venir se laver les
pieds, où des vies peuvent être sauvées. Si c’est la bonne eau, une tombée du
Blanche Neige je pense à toi, la leçon est au bout de mon oubli de toi.
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Vers Notre Dame avec le vide en nous, comme un diable, comme un
manque. Comme un manque… Sans faire escale dans des bars laboratoires,
J’ai senti les dents du haut et celles du bas se toucher ; cette femme ne
grimaçait pas, ça me donnait la rage. Je ne tuais rien, les crocs dans la mort,
aussi serrait les dents puis, de ses deux mains, déverrouilla ma bouche et
disparut. Je n’y voyais plus, mes yeux étaient sourds, j’imaginais Colombine les
suis-je déboîté ? Je n’ai plus qu’un nom dans tout le corps : Ravaillac.
Ravaillac, l’une des figures de mon adolescence. Ça veut dire qu’on ne doit
plus être loin du Pont Neuf. Pont Neuf, donc Notre Dame but de mon kilogramme
quatre de matière noire. Notre Dame… Une nuit, une petite dont j’ai oublié le
portait qu’un voile bleu transparent, dessous les seins faisaient penser à la lune
quand les nuages passent devant. Deux petits seins, deux pommes pour moi
l’écraseur de grappes, le buveur de calva. Elle s’était fait violence et était venue,
toute jus, pas encore cidre, dans la patrie d’Esmeralda, et j’avais fait le bouc.
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Du dos de la main, on me caressait les yeux, on m’effaçait les images
d’après que j’eu déchiré le voile bleu-ange. Je dansais un slow infini avec cette
J’allais voir autrement, Colombine est mes mirettes, un peu de Dora coule
C’est un pont qui sent le vieux rideau, le théâtre oublié, l’odeur de cire
fanée, qui a des relents de clou de girofle. Fleur se dresse face à lui, prête à le
prendre. Colombine et moi voulions juste faire l’assaut de Notre Dame, Fleur veut
passer le pont. Fleur c’est l’idée que Dieu n’attend que de venir nous aimer et
cette idée fait pleurer. Fleur, c’est Colombine qui veut tenir le coup ne serait-ce
que pour les chemins d’étoiles et les cheveux des indiens, c’est moi qui ne veux
plus m’écrouler avec un crâne entre les cuisses, c’est Dora qui attache nos
casques et vérifie les mentonnières. Fleur ambidextre se laisse aspirer, ses six
bras en croix. Dans la jugulaire Dora vient contenir nos parents, rien ne doit
fatiguer.
Fleur doit marcher et ne pas vomir, Fleur doit avancer. Si le pont se refuse,
on doit pouvoir le faire à genoux. Si le pont casse nous ne serons plus. Il peut y
avoir des clones de Blanche Neige partout, des visions appelantes, des frissons
blancs, tout un volcan froid et violent qui fait tourner sur les têtes des masses qui
tuent. Colombine n’a ni avant ni après, que du temps séché, des millions
d’angles qui poussent les yeux de Fleur hors de leurs orbites. C’est son temps à
elle qui revient comme le mien l’a fait avec moi, le temps où elle était pétrie
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d’élans aboutissants, quand rien n’aurait pu la laisser seule. Elle saigne du nez.
Elle veut dire sa foi à Notre Dame. Petite Colombine est sous la mitraille des
remords. Je vous dis comme si c’était moi qu’elle se sent quittée à mort, il faut
qu’elle coure.
Petite Fleur, on se tient ? Petite Fleur, les trop cernés par l’amour peuvent
C’est comme ça, tout le temps comme ça. Cette ville, Fleur des sommets,
-Va vite Fleur, fais tout redéfiler, pas trop de détails, juste le rythme, je t’en
prie.
- Fleur : « Pour l’amour, pour le souvenir de mon amour, pour les genoux
que j’ai collés à mes joues, ce pont. Cette fièvre. Suspendue, j’y suis. Imagine-toi
vivante. Je sens mon homme recroquevillé dans ma mangue glacée. C’est donc
être vivante que donner un nom au non ? La destinée n’est qu’une suite qui ne
s’enchaîne pas. »
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- Encore plus Fleur, raconte les images !
- Fleur : « Nulle part. Se peler le cul. Née. Dissoudre les chaînes. La nuit
Être haute, partout, parmi. À l’amour ! Je ne suis pas que matière. Pas prévenue.
Juste amante. Je ne peux pas faire plus court, je ne suis qu’une trace de lait
prête à traîner longtemps dans les cieux regardables, la trace que cette nuit, ici,
mes yeux dessinent dans le ciel. Cette trace me fait penser. Je commence à voir
au travers de mes images. Oublier. Etre gardée au sec. C’est la vie ? Voilà mon
stylo. Au pigeon. »
Je ne sais pas quand. Je ne sais pas le tri entre les visions et les
avec Fleur nous nous passons dans les idées les lettres mentales de Dora. Nous
les avons écrites. Elles sont nos tuyaux pour sortir d’ici, puis de la mémoire, puis
qu’on s’y perde. Le pigeon ne nous amène pas Notre Dame. Elle va venir la
foutue cathédrale ? .
Puisque le pigeon ne l’a pas pris, le stylo de Fleur écrit sans main : « A la
vie future, aux beaux et aux belles, aux incendiaires à venir, aux après, moi
instrument vais faire du bateau sur les escaliers du pont. Moi stylo, prends de
l’avance sur les jours qui obligeront à vivre sans amour, puisque personne ne me
veut, je prends des forces sur les jours où personne n’aura le temps de mourir.
Je ne suis qu’un vieux stylo qui a peur de l’escalade, il y a plein de vies que le
ciel au-dessus du pont n’a pas vidées, plein de couches de vies. J’aimais
tellement mettre le feu aux mains quand je n’étais que de l’encre. Chaque fois
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que quelqu’un meurt, si je ne suis pas trop loin, je vais lui regarder les yeux et lire
Le pont, cette arche entre la tête et le travail d’amour… Fleur a une idée
qui éclot au creux d’une paume de main. On la cueille ? Dans la main de Fleur,
ça germe, ça pousse, ça grandit vite, le climat est tropical. Des mousses et des
soit qui me lie, qui que tu sois qui me lis, si tu as l’oreille aussi fine pour entendre
me rapprocher. J’ai une étoile dans une poche, une plume, je te l’offre afin qu’elle
touche du bout des doigts tes vagues et tes âmes, je suis vierge, je suis ton
stylo, crois à la paix, au partage, au jour où tout le monde aura à manger. Être
stylo, connaître tous les secrets de Polichinelle, toutes les envies de Blanche
Neige. Etre stylo c’est être un astre ouvert qui laisse entrer les rêves : Blanche
de la peur, rien en somme. Je pense à l’hiver qui conserve les corps. Je pense
aux morts. Je rêve d’un glacier de liberté, j’imagine les perdus du pont se
recroquevillant en paix dans les igloos et y dormir pour franchir les siècles. Seul
et pauvre, j’ai peur du monde autour, peur de la paralysie, peur de Notre Dame
de Paris, confiance aux cribleurs d’amour qui sont avec moi sur le pont. Ils
bouffent de la vie et des cheveux. Ils ont un soufflet dans la gorge, l’envie d’une
cathédrale, ils poursuivent la quête d’un monde sans mal. Comment leur dire que
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la cathédrale, elle, ne s’est pas couchée depuis des siècles ? C’est le vertige, la
pierre ne se tourne pas vers le soleil comme une fleur. C’est à cause du vertige :
Il faut me parler, tout faire, je ne suis pas loup, juste stylo. Fermez ma
braguette.
Il faut me parler, tout tenter pour ne pas me laisser endormir sur ce pont.
Ne laissez pas tomber petit soldat stylo qui a froid sans le lait de maman Dora.
Mon encre est-elle noire ou rose ? Rose bébé ? Je vous le redis : l’amour est une
« Je suis une trace sur la nuit, je ne sais pas quand. Je ne sais pas le tri
entre les visions et les souvenirs. Je n’ai personne à qui demander. Ils se sont
mis en boucle pour faire Fleur, je devais les laisser passer. Si je m’écroule, vont
passer des mains et des bateaux sans importance. Ailleurs, plus haut, des
suis pas le ciel, je suis le pont, le pont d’où les corps peuvent tomber.
réchauffer. Pour le moment, le vent au-dessus de mes têtes charrie des pierres
amitiés, je vais aller vers des ventres ouverts de chevaux morts et nous cacher
dans ces entrailles, nous y empoitriner à fond, y avoir chaud. Notre Dame
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lune restera une tache blanche dans le ciel, la bulle où la vie s’accroche fera
quand vous allez vous faire pétales dans le ciel, quand vous tombez sur moi…
Quand un pétale tombe de moi il est des millions, est-ce le même homme, la
même femme qui vole ? Je ne le sais pas, je crois qu’il s’agit d’une autre saison,
que quand tombe le sel des âmes fanées il n’y a ni homme ni femme à vouloir
voir. Moi, j’ai pour têtes des murènes aux cheveux fous, pardonnez les vivants
Par bonheur il y a le vent des disjoints, le vent qui ramasse, le vent qui met
la mort d’un côté et Dieu de l’autre, le vent qui démélange, le vent qui passe là.
Je ne suis pas lui et n’ai que ce qu’il m’offre : mon torse de cheval mort, un
oreiller de pus, une couette d’intestins. Vous pouvez vous y réfugier en pelote, y
- Dora : « Il neige sur les cordes du pont, amour c’est à toi d’écrire la suite,
il est bien que tu ne sois pas encore plus ailleurs, que tu crois à la main que j’ai
mise dans la tienne pour entrer dans la beauté et les couleurs. C’est un aller
Le pont : « J’en tiens, sur mes cordes, tous les jours des qui disent avoir
les bras écartés et accrochés dans le dos, des qui disent avoir les jambes qui
leur sortent des oreilles, femmes ou hommes, ils sont paralysés, désarticulés,
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hors du langage de la vie et pourtant ils marchent s’obligeant à souffrir par l’autre
alors que ce n’est que pour. Quand ils parlent, c’est à cet autre, ils lui disent que
s’il était là il n’y aurait pas de corde, qu’ils ne seraient pas là, que la vie irait
bien ».
Ils ont tous les mêmes mots : « Ensemble, nous serions allés au bout de la
ville. Regarde sous toi comme le monde est grand depuis ici, imagine tout ce que
m’accroche à ton cou, avec toi aucune route ne me fait peur ». Mais c’est dans
leurs rêves.
Mais.
Mais, illusions, vieux restes, vestiges des raisons d’une plaie pour toujours,
ils se sont ici quittés une fois pour toutes. Je ne suis pas un pont méchant, juste
tous les rêves. Disons que je suis une forêt magique et qu’il n’y a qu’ici que vous
pouvez voir autant d’arbres pousser ensemble et aussi vite. Si vous croyez
depuis toujours aux contes de fées, le merveilleux s’en souvient toujours une
nuit.
tous. Je ne suis qu’un pont bouffé par des poinçons de rouille, je les appelle mes
elfes, mes petits champignons attentifs. Moi aussi, j’ai envie de me laisser aller,
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Vos mains dans les leurs, ça ferait gagner du temps. Vos mains les étranglent.
Et ce froid éternel qui les damne depuis… C’est comme une prophétie
contre la tendresse.
Leur peau a des souvenirs de télescopes ayant pris des clichés de la vôtre.
Leur peau de lentilles et de miroirs optimise leur mémoire, leur supra sidérante
faculté à vous peindre dans leurs yeux oxydés, dans leurs bras coupés.
Rappelons-nous que nulle visite ne leur est maintenant permise. Comme gros
plans, il ne leur reste plus que ceux de l’eau ouverte du fleuve Seine. Il leur reste
à passer du big-bang de vos yeux chéris à celui des poissons morts. Ils auraient
Dora, quand tu n’es pas là, érotique balise, on ne se voit pas bien. On n’a
plus de doigts, alors on compte sur toi pour se sentir. Toi qui as le front bleu des
grandes africaines, montre-toi pour que nous y voyions. Viens clarté musicienne,
toi qui as déjà su me faire faire un tour sur les toits de Paris et atterrir dans la
soie de nos sucs emmêlés. Dora, avec tes bras hanches et leur sueur cyprine, tu
es le seul repère… Dora, tu sens tellement bon… Dora, ce pont n’est qu’un
à penser à quelque chose de vrai mais des papillons s’écrasent contre la forêt de
son front, la mousse pousse et sort de son nez. Il y a des éléphants aussi près
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Je cherchais un avenir, Dora dormait dans un de nos ailleurs. Elle en a
Sur le pont, un éléphant broute les clôtures de notre amour devenu fou.
vous, ne sont que des étaux sur un câble. Alors, j’ai pris Fleur dans mes bras et
J’étais sur le pont, je devenais femme par les doigts, je n’arrivais pas à me
dissoudre, je n’arrivais pas à désaimer. Quant à être femme, j’étais Dora dedans.
Je voulais qu’elle me fasse exploser plus profond, qu’elle me donne une épée à
me planter dans l’âme, j’aurais aimé dire des noms en forme de souvenirs. Qui
Il n’y a, pour se tenir sur ce pont qui m’a rendu la main, que des limaces
Suite :
Je crois que je ne suis pas tombé. Agrippé aux câbles rouges des écailles
tournent dans ma tête, des cailloux pensent à ma place et Dora (était—ce elle ?)
peau, je viens me présenter, accusé de tout, très mouillé, plus que nu.
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Dora, précautionneusement, se lèche une cheville, Fleur s’écroule de fatigue et
s’ouvrir à la grande spirale d’avant la vitesse, d’avant la lumière. Mais celle qui
arrive comme une grosse tempête est autre. C’est une spirale sans milieu, une
L’avaleuse d’hommes nous aspire dans son ventre par le nombril. Il faut y passer
n’est pas la même histoire. Je n’ai pas envie d’engothiquer le cul de l’énorme
langouste.
obèses sur la déesse de l’adiposité, quelle triste madone. Que de lard comme
murs de cette ogresse, de cette forge ! Que d’huile durcie à trouer pour sortir !
Aucun mystère ici, avec Dora nous sommes dans la vieille grosse
Qu’est-ce que c’était doux avant… Avant, quand j’étais deux et bizarre.
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Dedans, Dora s’est mise à se caresser comme la mort qui va et qui vient.
Elle me dit qu’elle a une fille pour moi dans quelques pages, que je serais bien
inspiré de faire comme elle, que ce n’est pas parce que j’ai occulté (ou voulu
oublier) le ventre du cheval que je n’y traîne plus. Donc, si je me fais la grosse ?
Je crois me souvenir que Dora m’a répondu que je pouvais aussi me faire
le cheval avec l’apparition sur la bite, que dorénavant, elle croyait en tout
Tout entier je suis tombé dans le ventre et y ai tiré mon coup pour que ce
soit le dernier. J’ai pleuré dans les cils de la grosse et chié dans la bouche du
cheval. J’ai regretté que la belle Dora ne soit pas là en vrai pour m’enlacer. J’ai
regretté que Blanche Neige ne soit pas aussi réelle que Dora. C’était moi le
prisonnier, mais pour sortir de l’anneau de ces deux femmes, la grosse devra se
lécher de l’intérieur.
qui traînent dans le vrai du rien de nous tous. Il serait bien que nous prenions
sans sens ».
Je veux un millimètre de temps pour tenir entre mes pattes le doux visage
de Blanche Neige, je veux sortir du tas de nouilles qui n’a pas de prénom.
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Tailler, tailler à coups de pensée, la tête prise entre deux ovaires enkystés,
pousser sans sortir. Tailler depuis un tambour de machine à laver, tailler comme
un tambour lui aussi emballé… La maquerelle des faux rythmes halète, râle et se
tait.
Maintenant, que le cheval aille où il veut. Madame pieuvre gît sous ses
brille la lenteur. Un immense et bon frisson vient, une petite vie engourdit, un fil
coud le cœur à sa blessure. La nuit est noire, une sainte pleure pour que ça aille
bien, les boucles de ses pensées passent toujours par les mêmes nœuds, ce
sont ses moutons à elle, elle les compte pour que le sommeil soit profond. C’est
Peut-être s’agit-il de cendres de neige, peut-être cela veut-il dire qu’il faut
regarder le ciel en reposant, qu’il a des choses à nous dire, à nous faire
comprendre, comme les laits oranges qui, au crépuscule, nous font lever
automatiquement les yeux vers lui et voir les sangs de soldats figés dans la neige
et la peur. Et, cette image est naïve comme une petite fleur perdue, une petite
Colombine.
Il neige en plein été. Est-ce une petite sanguine frangine qui nous a parlé ?
Il reste un peu de passé dans les doigts, un peu de goût : elle dormait
découverte et quand je posais le bout de mon index sur ses lèvres jamais
Blanche Neige, cette dernière goutte de salive donnée qu’on passe le restant de
sa vie à sucer.
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Tiens, il neige à Paris et Dora tousse dans son lit en prenant bien garde de
ne pas éteindre la petite flamme de la bougie. Elle a pris froid sur le pont et le
reste. Je suis certain maintenant qu’elle en avait profité pour aller parler à ma
mère. Laquelle des deux avait-eu l’idée de jeter mon couteau à l’eau ? Et oui, le
Notre Dame, l’une et les deux ont compris que je préférais tourner autour qu’y
Le couteau prenait son temps. Nous étions trois quand la lame alla salir le
fond de la Seine.
Avant, pour prendre des notes, il y avait Fleur, le stylo, le ciel-pont. Les
yeux fermés, les cils passionnés, droits comme la vérité, ils écrivaient sur ce
carnet, leur vie ne me quitte pas d’une pensée. Je m’étais voulu fort, j’avais voulu
être celui qui se retourne dans sa tombe pour que la création explose, j’avais
construit un cheval pour que ses éclats fichés en moi poussent un cri à l’attention
reprenne dans ses bras et me berce, me tienne la tête. Je voulais un petit baiser
sur le front, une preuve de bon amour, une certitude d’avoir été. Une caresse qui
pourrait m’absoudre face aux états qui m’absorbaient mais je n’arrivais pas à me
Il est une petite Shiva pas Hindoue, notre tendre Colombine qui caresse
sur son pont l’inconscient de Dieu. Elle rêve. Elle ne rêve pas de la Normandie,
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dépasser, de se souvenir d’avant autrement. D’être toujours un enfant qui
pardonnera tout.
Dora laisse faire. Comment naviguer sur les pleurs quand on est aussi
Fleur, Fleur qui sent le poivre ? Quand il y a Dora qui sait qu’il n’y a pas de bon
mes forces, je suis parti. Que va devenir Colombine ? Fleur va-t-elle continuer ?
Où est la clarté ?
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CLAIRE ET CLAIRE
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Où est la clarté ?
Des jours et des jours de marche après. Des nuits et des nuits qu’il est
entre quatre heures et demie et cinq heures du matin dans tout Paris. Pas de
La clarté vint d’un faible rayon de soleil fendant l’axonge de ce ciel sans
Claire pourrait être la grande sœur de Colombine… Mais il n’y aurait alors
Elle s’appelait Claire et avait (j’imagine) versé dans l’évier le café que je
n’étais pas venu boire un matin. Claire et son prénom tout en envol…
Le chien s’approche, très haut sur pattes. Son pelage annelé de couleurs
Comme si nous étions encore sur le pont tous les cercles du chien n’en
Sur le pont, Fleur aurait arraché les yeux blancs du chien, elle les aurait
mis dans ma poche et je serais en train de les faire rouler entre mes doigts.
Le haut sur pattes lui, même sans yeux, a des repères, la queue jaune et le
des ceintures rouges, violettes, bleues, blanches. Il y a comme une grande toile
devant les yeux, une grande peinture. Elle est noire, orange, mine de plomb,
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Si le chien a faim, il y a de la viande de moi en Blanche Neige. Il ne faut
pas se laisser distraire mais le regarder dans les yeux. Ce chien serait-il notre
propre agressivité ?
Reniflez, ça sent Claire. Dora dirait qu’il ne faut pas se laisser faire
Ce n’est qu’un chien nous aurait dit Dora. Ce n’est qu’une suite d’anneaux
des jambes de danseuse qui pourraient enfiler les bas de Claire. Les bas de
Les bas de Claire l’hiver et leur bonne laine… Ses pieds si bons dans ma
bouche nue. Ce n’étaient pas tout à fait des bas mais des collants. Ils étaient
talons noirs avant chevilles vertes, puis bleus, puis mollets rouges. Il y avait du
violet et du blanc quand je remontais jusqu’à ses yeux. Il y avait des touches, je
Un peu mal à la langue, un peu froid aux doigts ; d’aussi loin qu’arrive ce
Claire n’était pas désignée à la naissance, son grain de beauté lui était
71
Comment s’y prendre pour que Dieu nous voit ? Peut-on lui offrir quelques
vierges nées des mains de notre imagination ? Quand nous ne savons pas si
Claire, un jour il était parti pour ne plus pouvoir revenir, pour ne pas se
laisser tenter par ton corps tout chaud qui aurait su le retenir encore et encore,
pour ne pas laisser son regard le faire fondre dans les levers de soleil de tes
Déjà et avant toutes, je te dédiais mes petits doutes ensoleillés. Tu riais à donner
envie de vivre cent ans de plus à tous les rouges-gorges du monde. Nous étions
construisions les démons qui obséderaient nos vies d’après l’amour. Peut-être
avais-tu des réponses toutes simples à apporter aux questions que j’aimais
Claire, ce jeune homme que je ne suis plus t’inventait des poèmes idiots :
aux plumes des sorciers. Ton corps crie et flanche sous l’automne sans nom
etc., etc. » Il te disait aussi qu’il ne savait rien faire de plus important qu’écrire et
que Rimbaud criait vers l’aine obscure de son corps. Qu’il ne savait pas vivre
autrement.
Ça vient de loin.
avait un père plus présent et plus jaloux qu’un dragon. Eux, avaient la foi
72
suffisante pour en rire. Ils avaient deux gueules à faire fondre les couples.
Elle n’avait pas cette dot mais encore davantage d’amour à faire vivre,
davantage de biens. Elle aurait du s’appeler « Translucide » tant elle était jeune,
tant elle était folle, tant elle aimait emmêler ses cheveux aux siens. C’était au
temps d’encore avant, celui où les hommes avaient les cheveux longs. Ces
étoiles : le sexe n’était plus un mur, Claire en toute confiance croyait en lui.
comme suite, unis par les lèvres en se promettant de faire mieux et plus le
pas de la mémoire, ce ne sont pas des remords, c’est par ces souvenirs voir
la mémoire, ce ne sont pas des remords, c’est par ces souvenirs vouloir croire
que c’est Claire qui revient. Il n’arrive pas à se situer mais est sûr qu’elle est
restée comme le meilleur d’eux deux. Claire, c’est se demander s’il n’y a pas
erreur sur la suite. Il aime penser ces moments de vraie beauté. Il est dans cette
Peut-être que Claire est folle maintenant et que je n’ai pas été prévenu. Je
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L’hiver, Claire avait des pulls verts et l’été des pieds impatients. En ces
Ils riaient. Ils aimaient tout de la nature et de leurs états. Ils ne détestaient
Claire adorait monter à cheval, lui ne savait pas. Claire dansait très bien, lui
n’aimait pas ça. Rien ne pouvait les séparer et pourtant un papillon y arriva.
Pour une histoire de papillon, pour des ailes sur la peau, le café avait fini
dans l’évier.
chacun tatouer un papillon bleu sur l’aine. Pour être noués à jamais où que l’un
de l’autre soit, ils avaient trouvé ça. Elle s’était fait dépuceler l’arcade veloutée,
lui pas. Peur de la première fois, peur d’une nature morte qui marque à vie, peur
de peureux…
âges en échange des années qu’il lui reste à vivre. Claire, saches que son aine
est toujours vierge, qu’au moins tu aies vécu toutes ces années d’après sans
fantômes…
revenue où il t’a perdue… Son esprit défile entre les mailles de chaluts sidéraux.
Dans le vaste réseau des shampoings, sous les doigts détergents, il a mal au
crâne. À tous les esprits il parle de toi, comme Fleur offre des dessins, comme
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Il te ressemblait tant mais tu avais un papillon de plus que lui, tu étais la
plus forte des deux. Ses rêves de cire sont des océans et, dans les éclairs, ses
papillons.
regrette.
Plus tu es loin, moins il voit quelle cérémonie pourrait lui rendre la vie
indispensable.
Quand on ne sait rien, comme lui là, crois-tu Claire que le mieux est de se
faire des yeux prêts et capables de verser toutes les larmes du corps de Dieu, en
espérant qu’elles peuvent servir aux rigoles creusées sous les quinquets des
saintes ?
Claire ne revient pas, il n’y a que le besoin de parler avec les pleurs, l’envie
de dire au monde, avec des fleurs salées, qu’on l’embrasse. Pleurer sans
retenue, sans pont, sans barrage, sans aile. Chialer vers en haut, s’ouvrir le
cœur. Se casser les genoux contre une goutte, être un minuscule point bleu, une
chatouille.
Se dire alors que nous n’avons pas assez parlé aux arbres, comme il parle
75
feuilles des arbres : on y voit un infini constellé de petits carreaux. Regardons-en
un et on se dit que l’infini est un vitrail tracé par des compas pleins, ayant chacun
dans leur mémoire des cercles de parfums inconnus. Claire, il aime toujours les
J’ai pleuré aux pieds de Claire avec des arbres plein le cœur et encore une
Claire, celui que tu as aimé est devenu, un matin, un amant qui a pu tuer,
un voué à l’échec, un qui n’a pas su éclairer sa route. Tu avais raison, on peut
tout faire avec chacun de nos gestes porteurs de sacré, sauf que je me suis
égaré. Ce matin, je n’ai qu’une chose à faire, regretter. Il ne neige plus, l’enfance
Claire, je crois qu’il y a deux Claire. Claire, si c’était sur nos pupilles qu’un
papillon est gravé à l’envers ? Claire, est-ce de te parler qui a changé le cours de
l’histoire prévue : le chien devait se montrer agressif, j’avais des mots pour écrire
que nous nous battions et il ne reste rien de ce bec à bec. Ces mots de combats,
prêts dans ma bouche qui pendait comme du miel mort, ma bouche crachée
depuis que Blanche Neige a fermé tous ses clapets pour moi, je veux les donner
Schiste, minaret, le désert est grand. Il s’attache à vous pour ne pas mourir
mauvais. Mica il énerva, bauxite il mina des raies. Un mineur sort de la mine et
boit un verre de lait. Talc, fais une route, traces de farine éclairez de vos
poussières, portez-nous. La vie a des colles. Doigts de fées, soudez des colliers
76
à nos collants. Les vies ont des clous blancs pour nous fermer les yeux et nous
les coudre dans le dos. Amour. Pauvre matin que le soleil ? Matin que le soleil.
Une révolution est-elle encore réaliste ? Oui, l’amour est libre, il peut être
fait à l’envers contre les autres. L’amour est phonétique, faisons du bruit dans les
prisons. L’amour n’est pas vengeance, allons au beau et à la belle. Allons-y sans
perclure de nos dards maladifs les visages qui nous font mal. Partout où que
nous soyons, que nous nous sentions interdits, proscrits, en danger, marchons
avec dans le cœur la seule couleur qui sait faire de l’amour, soyons porteurs de
douceur.
branches et nids, c’est ici qu’on peut espérer dès que tu montres une fenêtre
d’où regarder.
modifie le jus des hormones, il faut que je t’appelle. J’ai perdu ton numéro de
Que le jour ouvre un fuseau pour que je t’entende, que je te mérite les
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Claire, la grêle tombe sur les tôles de mon crâne, troue des feuilles de fer,
c’est toi ? À qui sont ces mains tendues vers la pluie et le soleil ? Ces mains qui
Claire, je t’écris assis dans mes mémoires et mes souvenances, dans mes
guette, poireaute dedans, ce ça est du sein d’une terre pleine, de la terre où l’on
revienne. Je ne sais pas bien le temps, mais puisque j’y suis avec mes
Un rideau métallique s’ouvre avec le bruit fort qui va avec. J’entre. Des
monde de femmes, les lèvres tant cherchées sont maintenant gonflées, pleines
d’amour, prêtes à recevoir. Il n’y a que des reines. Les bras si vus dans nos
rêves nous semblent, alors, faciles à serrer en ce matin. Encore faut-il qu’ils ne
soient pas de sable. Encore faut-il qu’ils bougent et respirent dans le rythme de
la force d’amour.
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Tant de rêves touchaient l’amour quand nous étions appuyés contre le
étions tous des filles, nous le voulions. Sa queue dinosaure nous a fait bondir
Trois cent mille millénaires plus tard, portés par les femmes de lumière :
Qui va là ? Qui nous cherche ? Nous voulons vous raconter nos plumes
engluées, nos urgences de poésie et nos yeux malades. Certains de nous suent,
nébulisés, plantés verticaux, éternellement germants. Ils sont sans doute les
meilleurs. Les meilleurs… et pourtant ils suffoquent entubés par une vie qui ne
Cette horde a des corps de pierre. Pour aimer faut-il vivre dans l’autre ?
dans la lumière. Ça éclaire des entrelacs d’émois pas durcis, des intimités encore
marshmallow. Il est donc là le lieu idéal pour fumer sa propre gorge après l’avoir
roulée soi-même entre les doigts. Pas de mots amis mais pas d’agressivité non
désintéressement de ceux qui l’ont déjà fait des milliers de fois. Il n’aura servi à
rien de se marteler de réalité… acceptons la vie comme reine même quand elle
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Claire, ces femmes m’ont ouvert cette porte, je veux être digne d’elles,
digne.
J’avais peur quand, sur ce signe, les belles passèrent la porte des ouvriers
Le temps de quoi ?
Forgerons, il s’agit du temps qu’il faut pour raconter. Hommes aux muscles
rouges, nous sommes tous prisonniers ici et les belles aussi, il n’est pas question
qu’un seul de nous trahisse. Il est question d’écouter le vent et d’amour propre
celui qui écrit, peint, chante et se vide. Nous avons la même liberté que celle des
aveugles pour pleurer. Nous sommes les laissées et les laissés à ceux et celles
qui ne sont plus là. De feu et déjà cendres, souvent apostasiant, convaincus
tous.
Racontons, sous des soleils beaux comme les seins des femmes, des
yeux fardés par la palette des génies sous de saturniens diadèmes que le temps
a vieillis. Il faut persuader Claire. Tout qui tourne, qui brille et qui tonne. Tous
lumière est à deux pas, elle est une sœur du vent, avançons. Sommes-nous près
d’elle ? Claire est la reine des disparus, notre phare, la patronne des mal-vivants.
Tout qui se tend, miaule. Tout qui explose. Des scies rondes, expulsées de
leur platine à tourner les disques, déchiquètent les cous, envoient voler les têtes,
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C’est un nouveau jour du vent. En pleine lumière des faces de bougres
sont illuminées de la même foi. Disons que nous étions tous tortues, que nous
soufflait sur les carapaces perdues sous un drôle d’angle, un matin révélant. Un
matin à chercher partout l’œil triangulaire où la bouche peut se poser. C’était réel.
Je passais de mains en mains. Quelque part dans les bras de Dora, porté
Un jour, âmes, quelqu’un vous reviendra, ses yeux seront si beaux que
vous les regarderez comme lui regarde les vôtres. Un jour vous vous
nous trouverai à tous une place à Cabourg, entre les morts. Un jour ne restera
S’il faut parler avec les loups, s’il faut nous couvrir de nos propres
excréments, s’il faut se faire humer l’haleine dans l’haleine, si les effluves
maudits et les vapeurs mortes doivent se manger par la gueule et que cela est la
« Vous les gueux, les loulous, venez quelquefois vers nous pour être
cherchent leur mère. Vous avez peur du sang comme nous avons peur de vous.
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Être proscrits ne vous rend pas plus proéminents mais juste comme nous,
malheureux. Mais nous, nous le savons : notre race est d’être loups. Vous nous
avez tellement exterminés que nous passons notre avenir à boucher des places
mortes. »
Le chef loup avait une femme qui me demanda qui j’étais de plus que le
rencontré Claire ?
griser dans ta crinière, en fumer les instants et puis, bien plein de la vie qui était
Petite Colombine, Dora, Fleur sanguine, petit tout petit, je n’arrive ni à sortir
ni à entrer dans l’humain, je n’arrive pas à voir loin. Je ne crois plus aux visions.
Une seconde sera celle de la tombe, mais est-ce un lit pour dormir tranquille ?
tout ce qui bouge dans les murs. S’accrocher : wagon-poumons est cheval, chien
cou et nez bande de loups. Trop de trains roulent à vide. Trop de gares ne
jaillissent pas.
trous de l’amour, une musique qui tombe, qui crève la peau tendue du ciel.
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Comme si nous étions ensemble, sans pour autant chercher à se connaître,
forgerons, sortons des carrefours, allons place Claire à Paris, comme avant.
Avant quoi ?
Comme avant, dans les bras qui protègent de tout, dans l’amour qui tient
chaud partout. Comme s’il n’y avait pas eu de début. Comme avant, la guitare
offerte aux orteils du sommeil pour des lendemains enchanteurs, pour bien jouir
de dormir, pour poser des promesses aux pieds du nouveau jour qui viendra
poindre avec nous. Masturbons-nous tous, surtout les mâles pour nous faire
femmes, pour ne faire qu’une seule race. Ne rougissons pas de nos excréments
roulés en boule, ne répudions rien, faisons tout ce que nous faisons comme des
Nous ferons l’amour. Nous nous poserons comme les abeilles, nous
donnerons le bruit de nos ailes. Claire voudra-t-elle déposer nos enfants bleus
sur le haut des arbres qui poussent au firmament des montagnes ? Claire,
du drakkar et noierons le bestiaire fade qui nous ligote à une proue en forme de
Blanche Neige. Après t’avoir bue sous tous les noms, Claire, tu serais notre
seule idée. Cette idée serait du miel pour le cœur. As-tu toujours un peu de miel
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Claire, ou je vois double, ou tu es deux. Es-tu deux ? Claire, peut-être
connais-tu dans ce monde l’être à boire qui n’est pas toi. Celui où nous nous
Je te vois en deux dans le même ciel : deux filles évadées se tenant par la
main, laissant les fleurs mêler vos longues aubes propres, deux aériennes, deux
femmes dans les fleuves du vent, une et la même, deux pour que par ce nombre
les yeux se reposent. Être triple archange en paix avec ces deux cœurs…
Dora caresse la photo de lui qu’elle porte autour du cou dans un cadre de
graines rouges. Dora nostalgique parle à son fétiche. Elle tient, entre le pouce et
l’index, cette tête qui, même morte, ne pourra pas la dégoûter. C’est Dora vue
depuis les tissus roulés du cœur, au-delà de l’horizon, dans une planète
anthropomorphe.
Sur terre, les cobras se sont mis à battre dans les poitrines. Un jardin
recouvre le ciel. D’une fleur sort le père des abeilles venant demander de lui
Le miel de Claire n’a rien de malade, ouvrons la bouche et cachons un peu nos
dents à faim, usées par la fin de l’amour. Monsieur le père des abeilles soyez le
bienvenu.
Il s’y colle. Et nous, nous aimons ses grosses cuisses butineuses qui font
Dieu, les images, les femmes et le vent, les doigts et les visages peuvent lui en
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parler pour nous. Ne le mangeons pas, c’est à lui de nous digérer sans que nous
longtemps, dans notre bouche emmêlée, pendus à un fil de sirop sucré. Nous en
partirons spectateurs et nous en relèverons. Il faut, en effet, qu’il y ait des avenirs
autres et pas trop loin dans les au-delàs, des pages avec lesquelles on danse et
l’apiculteur. Nous n’avons qu’une idée en tête : poser la main, notre main, sur la
beauté. La reine s’emballait, les tuiles écrasaient les ruches, ce n’était rien de
plus que le vent. Ce n’était que l’air des jupes de Claire et Claire. La beauté
n’avait pas le temps d’attendre pendue à rien. C’était comme la fin d’une histoire
où nous nous serions garés en passant. La beauté, selon Claire, n’avait pas le
Claire ne parle pas, même non dits, les mots de femmes savent faire mal
aux hommes.
Les abeilles ont laissé un dard dans le sang, du froid, aux doigts des
bagues sans pouvoir, des questions comme : « La beauté nous arrive-t-elle avant
ou après l’humanité ? »
Avec Claire c’était beau, les oiseaux chantaient jour et nuit. Libérez-moi en
pressant cinq femmes folles d’amour sur la terre vaincue et écroulée, je veux
Une fumée bleue monte vers le ciel, précédée des fusées de l’âme.
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Refaisons-nous brindille. Des siècles, des semaisons, des Seines, des
muscles, des vins, d’autres seins de Vénus ont un fleuve Seine pour nous…
S’il n’y a pas de place là, en restant ici pauvres saints à roulettes qui se
sont fait voler l’amour, alors, continuons à marcher à l’envers, du mauvais côté
du pull de Claire, enfilés par les obstacles, le malheur dormant le désir contre la
peau.
Le ciel ne peut pas tout remplacer. Revenir en arrière fait peur, devant le
vent ventile.
N’ai-je pas bien appelé Claire, y a-t-il quelqu’un dans les pales de
l’horizon ?
Tout du soleil est une ombre pacifique, magnifique. Tout de Claire lui fait
Tout du soleil de Claire montre un théâtre qui fait danser sous la pluie, où
Claire n’était pas venue parce que je ne lui avais jamais fait de la place.
passer à l’autre pour voir le cœur où les pétales se rejoignent ? Si c’était sur
celui-là qu’il fallait mettre le feu aux jardins, faire perdre la mémoire et en jeter la
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terre jusqu’à ce qu’il n’en reste plus une trace au monde, aux yeux crever les
tempes ?
Avec ce temps où nous avons tant traîné, je ne sais plus si nous sommes
rive droite ou rive gauche. Droite ou gauche, sortons de cette rive, de ce pays
abandonnés.
Claire dort dans son pull, un papillon de nuit pour compagnon. Que sont
jolies les lèvres d’une femme qui souffle sa brume bleue sur les ailes du sommeil
Claire vole, Claire migre. Claire, dans son sommeil, tricote des nuages.
Dans son écheveau, elle veut voir les pieds de l’ange qui a planté sa statue tout
en haut du Mont-Saint-Michel alors qu’elle n’était pas née. Elle veut, quand les
siens la font voir fermée, ouvrir les yeux de l’humanité qui a mal sous la torture
Notre Dame pleine de sens, les vieux dolmens qui germent, les forêts qui
chantent, les pierres qui racontent, tout est photographié par le rêve reporter de
Claire.
Nous y sommes.
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Un vieil homme y est passeur. Très barbu, très arrière grand-père. Il se
Il me dit : « Blanche Neige ne t’aime plus, Claire dort tout habillée, Dora a
mal aux pieds sans toi, tu avais fait une promesse à Fleur et elle se fane. Tu n’as
qu’il n’en avait pas vu. J’irai marcher sur le vide aller et retour.
Claire, je lui ai montré mes mains, j’aurais aimé que tu sois avec nous. Il
m’a regardé passer. Ses yeux n’en savaient pas plus. J’ai aimé comme si tu étais
avec moi, à perte de vue, un champ de tulipes sucrées. En n’y passant que la
main, j’en ai coupé une délicatement, la lui ai tendue et l’ai laissé dans un grand
on la passer dans un sens et dans l’autre ? Je suis sur l’autre rive de la rue Z,
rue dont les deux côtés bordent le vide où passent les trains de la mémoire.
vous aimant, apprendre ce que vous mangez et quels sont vos états
Après le jardinage, Claire, j’ai pensé avoir trouvé ma voie et ai dormi pour
mieux ouvrir les yeux. En plein au-delà de la rue Z, je cherchais ton numéro de
téléphone. Je t’aurai dit que les hommes sont nés pour lire, pour pouvoir se
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Avancer, avancer, entrer dans la terre, se façonner une amie de glaise, une
amie qui ne disparaîtra pas. Cette femme sculptée même pas terminée, lui parler
et s’y planter. Lui dire que nous referons des enfants et la vie.
l’amour.
depuis longtemps.
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CAMILLE ET SES DOIGTS QUI CHANTENT
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Et après ?
pied, nous enfoncer rive gauche. Se poser devant un restaurant à chile. Bien sûr,
il est fermé à cette heure. Alors s’asseoir devant, serrer dans les mains la tête
pleine de femmes de cœur et les maroufler sur la neige et l’eau de notre peau
tendue par l’amour. Bien serrer à cause des aspérités : des nids à migraines où
Colombine, de trous laissés par Claire. Ma tête est pleine de poudre d’argent
pour que, dans vos yeux gouttent à gouttent des perles de vent et de couleur.
tomba dans les bras. La chance sourit toujours à ceux qui aiment le vent. Ça
m’émeut.
Elle avait trébuché sur lui, jolie Alice en quête de merveilles, dans une nuit
La novice totalement dyslexique se prend les pieds dans les mains. Elle
veut grandir et continuer à croire au petit Jésus. Pour dire qu’elle compte faire
des trous dans les montages et libérer le feu des volcans, elle s’embourbe dans
un incroyable flot de mots où des manteaux et une mémé lui agacent la langue.
Elle ne veut pas rentrer. Il suffit de regarder ses yeux pour la traduire. Vous
souvenez-vous des mots que nous cherchions quand il s’était fait mal à la tête
contre une vitre ? Du flot des mots quand ils étaient secs ?
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Quand elle s’accrocha à son bras, il ressentit une blessure ouvrir sa
bouche pour crier et lui demanda de se taire. C’était vraiment du bon vent qui
soufflait là. S’étant exclu des états de vie et de mort, convaincu d’être incapable
de se situer, de trier les souvenirs et les devenirs, il mit de l’ordre dans ses
croyances : elle était belle et à son bras. Comme lui, elle avait un os de la tête
Bouteille, contiens-tu toutes les forces de la nouvelle nouveauté ? Elle était ivre
Cahin et caha vont donc clopin et clopant parce qu’elle avait de quoi fumer.
Ils ne font de mal à personne, ils veulent juste ne pas voir le jour lever trop haut
pour elle c’étaient deux mains qui tenaient un astrophone (contraction des mots
marchaient et le temps les laissait passer. Quand elle lui a dit que leur rencontre
Elle est ivre et fait tomber les graines de ses malheurs dans la main qu’il
pose sur sa poitrine. Elle appuie comme une folle sur la patte qui la touche, le
conduit sous l’étoffe. Que la femme est douce… que sa peau fait voyager loin
Camiiille. A capela, avec ses mains, elle chante son nom, fond en lui. Elle sculpte
dans l’air des chansons profondes, des statues musicales. Elle chante, chante la
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folle sucrée et la vie se fait jolie. Il sort d’elle des formes, des couplets, des
refrains.
couleurs. Elle releva la tête, elle voulait voir ses yeux en face. Il les remit aux
chose de bien devait maintenant lui tenir la main. Le vent de ce matin-là sentait
bon.
passage pour les offrir à un pauvre clochard qui n’avait rien demandé et les a
sucés au goulot en éructant une insulte misogyne. Cette anecdote n’apporte rien
à l’histoire mais, comme certains détails sans importance des rêves, elle est
restée gravée dans ma mémoire alors que tant d’autres faits, que j’imagine
Il n’y a pas de risque, vous pouvez mettre les doigts dans la prise
pourtant l’électricité ruisselle sur les cuisses de Camille. Il met le doigt sur son
nombril du milieu du jour, creuse un sillon d’amour dans les formes de la belle. Ni
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l’un ni l’autre ne peut dire pourquoi la nuit passe si vite au jour, se couche sans
lutter davantage. Que la nuit et le jour s’emmêlent les pinceaux, Camille et lui
nouent autre chose. Leur main de vingt doigts, leur majeur de folie, leur nœud
Camille sortait d’un mauvais plan à la télé, elle avait eu beau battre l’air de
sa gorge, aucune chanson n’était sortie de ses mains, pas la moindre poterie,
pas un seul bonhomme en fil de fer, le bide… Elle avait tant sué de honte et de
déception qu’elle avait couru dehors, puis marché et bu, doutant d’elle, en feu.
Tout aurait pu être un autre, elle était tombée, ou plutôt avait trébuché sur lui. Ça
aurait pu sentir les peines qui s’enlacent, les vies qui vont se réfugier dans un lit
fait, mais le bon vent les avait menés là. Ça fait ce binôme qui n’a qu’une jambe,
cette rencontre non contrôlée, ce couple. Il l’a montée sur son dos pour qu’elle le
porte chez elle. Chez elle peut-on remplacer Blanche Neige ? Il trottinait en
remerciant les hasards de la vie, une culotte large comme un doigt dans la
nuque, deux faces rebondies et joyeuses sur les épaules, c’était du temps
gagner au tiercé des étoiles. Plus haute que lui, elle respire le vent et tombe
amoureuse.
Camille. Camille hirondelle, ses éperons dans les côtes… Comme cocher,
elle est douce. Ça donne envie de lui laisser la vie à gérer et de n’avoir plus qu’à
Quand chacun d’ici sera mort, quand plus personne ne comptera, quand il
n’y aura plus rien à énumérer, même plus les prénoms et leur double, même plus
les bras, même plus les doigts, quand les hasards n’auront plus de rencontre,
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quand chacun de cet acte et de ce théâtre aura fini de passer par le temps,
Camille évoque des arbres et des pluies. Il l’aspire par la nuque, elle
l’inspire. Elle lui musque son nez cervical, trouve des trous par où entrer. Elle est
comme l’eau de pluie qui coule d’une branche, une branche d’un arbre de vie.
perdre l’équilibre, aux fils qui délimitent le bien du mal. Nous avions tellement
peur de nous électrocuter l’un sans l’autre. Je sculptais des chansons que je
pouvoir en devenir violent, alors je faisais valoir mes obligations pour assurer le
quotidien, je les érigeais en droits, sortais mes griffes et finissais par me calmer.
Il me serrait dans ses bras : « Jeune Camille, tu vois, tu n’avais pas besoin de
celle-là . » Et je comprenais tout des histoires qu’il me racontait, tout des voyages
où le contenu de la valise est bien moins important que la force du vent. Quand
je lui disais qu’il avait bien fait, il était fier de lui. Nous nous adorions.
Nous nous adorions, n’avions pas peur de nous. Nous nous touchions
beaucoup et tout ce qu’on nous avait dit sur la pudeur tombait en poussière.
Nous nous sucions les doigts à en jouir, nous déguisions, nous reconnaissions
jumeaux et finissions épuisés dans la peau l’un de l’autre. Nous nous courions
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dessous, dedans, dans tous les sens, nous traversions nos vies en signe de
communion.
Nous étions tellement ensemble que je lui avais demandé d’écrire mes
sculptures. Il prenait plaisir à faire rimer l’angle d’un nez avec des volumes de
regards. J’étais sûre qu’il avait beaucoup de mots en lui pour moi, qu’il crevait de
l’envie de revivre. Quand je rentrais, je le retrouvais la main vivante sur des vers
ou endormi sur des feuilles froissées. J’aimais l’idée de cette chère âme qui
faisait tout pour trouver la longueur du vers-lasso qui, depuis la scène, les ferait
Il en a pondu des œufs pour ma voix des mains. Il en a fait courir des petits
lapins dans ma gorge… Il les a tellement imaginés ceux du premier rang qu’il les
susurrer de la libido devant un micro. Chez moi il devait être dans la cuisine à la
fumé dans le noir. D’où j’étais, je l’ai senti voir les îles que je racontais et me les
prendre. Il se passait quelque chose que je ne maîtrisais pas. J’ai jeté mon
torchon et pris un taxi pour vite le rejoindre. Et s’il posait des questions à mes
elle ? > Une lune rouge brillait dans l’œil du taximan qui me ramenait.
Ce n’était pas très grand chez moi, il devait m’attendre, mes îles à ses
pieds.
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J’avais très mal aux pieds
Il avait peur que Camille soit curieuse, qu’elle pose les questions qui visent
et touchent, qu’elle s’aperçoive qu’il devenait fou quand elle le laissait. Vous
Camille n’avait jamais voulu violer ses secrets, jamais essayé de casser la
coquille d’une larme enfoncée et bien bloquée dans son écrin. Cette nuit-là… A
peine arrivée, sans un mot, elle se jeta dans ses bras pour flipper avec lui. Nous
nous tenions les mains, nous réchauffions les coins, nous taisions. Camille se
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lançait vers l’eau de lui comme si ça pouvait la consoler. Quel silence
l’oppresse ?
Les doigts de Camille étaient chez eux, sur lui. Des nuits et des nuits, sans
sortir, nous avons lancé de loin des caramels à Notre Dame de Paris. Nous-nous
transportions loin, nous fumions les ailes, nous relevions réveillés, nous
enfouissions dans les rosiers que ces doigts faisaient pousser. Et, dans cet
appartement, devant nos silences, tous les prénoms du monde étaient écrits sur
les murs.
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Ce n’était pas une nuit comme les autres. Un jour, un jour, l’un des deux de
Rien de Camille n’est de trop, partir sans elle doit être se désintégrer au
décollage. Elle regarde dehors avec ses yeux immenses et leur envie de tous
nous sauver. Elle habite à deux pas du mont Parnasse et fait quelques provisions
J’aurais aimé lui avoir écrit des chansons de Léo Ferré, des sculptures sur
mesure pour la the nana qu’elle est. Tous les jours –dans ma tête- j’avais porté
mes bagages sur les rives toutes proches du confort amoureux pour qu’ils
prennent l’air. Mes mains, en ces temps-là, étaient lestées d’envies d’évasion.
si bonne de cette chanson blanche. Je coulais de beaux jours avec toi Camille,
au temps des très belles heures à ne rien être de plus, à juste faire semblant de
qu’il y avait à entendre revenir les mots quand ils étaient passés de la tessiture
de la petite mer que tu avais faite pour lui. Et, comme d’habitude, la savonnette
lui échappait des doigts et tu plongeais avec lui dans un fou rire. Au temps où tu
allais mettre en forme une cigarette que vous fumeriez ensemble quand il
profitait de ce temps pour essayer de faire passer Blanche Neige et une Claire
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par le trou de la baignoire. Au temps où il reniflait la serviette pour s’assurer
étaient posés.
Mais, mais depuis une nuit tu es là tout le temps. Je ne peux plus t’écrire
des prières pour orants en quelques minutes et quand elles étaient faites, qu’ils
avaient les genoux secs, me promener tout au long des longues enfilades des
heures et parler à ton chat. Fasciné par les ongles rétractiles de ton petit tigre, il
faisait les questions et les réponses et, quand ils ne trouvaient plus rien à se dire,
Te souviens-tu, ton sacré Mistigri avait les poils les plus ordonnés du monde, ça
chez toi nos ronrons griffus draguaient des déesses ; nos pensées, par ces
gestes repues, et nos panses aussi, momifiaient leur savoir sans se soucier de
fouilles possibles à venir. Quelqu’un chez toi s’occupait de ton chat. Tu t’étonnais
litières tombaient du ciel. Mistigri et moi nous serrions, j’en renaissais. Puis tu
arrivais et j’allais avec toi dans une autre chaleur. Nous avancions, devenions
chatons, jouions à faire l’amour, nous amusions avec les plumes qui toutes les
Au temps où Camille n’était pas là, des plumes à Mistigri et moi faisaient
éternuer les anges. S’il peut se souvenir, il a sur le dos des poussières gonflées
d’histoire. Miaou…
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Une veste, un sac, des pompes en vrac au pied du canapé…, ce doit être
banal mais combien de fois ai-je contemplé ce tableau de toi comme le chef des
nous, elle ne chantait que chez elle. Alors, la vie naissait là et faisait oublier les
force dans le fleuve du dos était loin, très loin. Elle avait pouvoir de démurer
l’oued pour qu’il déborde du ventre de l’échine. Et le ventre n’était plus aride…
Mistigri joue avec les collants de Camille, je me moque de lui, les lui vole et
les mets en bandeau autour du front. Je lui fais l’indien, elle bat la mesure,
Elle avait des doigts superbes. De longs doigts fins et pleins sur lesquels
venaient se poser des papillons, des doigts d’où l’on aurait aimé pouvoir
ponte de chansons pour chat et amour. Nous ne faisions plus que lui, elle ne
suait jamais et, plus elle allait jouir, sentait bon… Et, et… et la petite Camille
Voilà pourquoi Camille et ses doigts qui chantent sont de ma vie. Petite
oiselle, une nuit, était rentrée définitivement pour être là quand je sortirais de la
sienne. Ce temps que l’on pouvait imaginer sans fin et qui nous fût bon, Camille
101
passer, en cons de mecs, comme il le faisait de nous. Que pouvait-il se passer ?
senti, une nuit, une douleur dans ses îles et avait été sûre, après, qu’elle venait
de moi. Si je me sens son esclave, elle me donnera toute sa liberté pour que je
sorte. Je n’étais pas plus enchaîné que Mistigri, juste chéri, mais il y avait si
scène, la même qu’il y a plus d’un an, celle des adieux, la boucle est bouclée. »
Rien n’est sorti, j’avais perdu l’habitude. Elle n’a pas pleuré, est restée
droite dans son short de spectacle et m’a demandé, en me disant merci, de lui
laisser tout le sable de mon cœur avant de partir boucher la mer. Elle m’a dit, elle
m’a dit qu’elle aurait beaucoup de mal, dorénavant, à chanter. Mes bras
manquer, tu vas être autrement qu’en moi, tu ne vas plus jouer sur moi avec tes
cheveux. Qui après toi voudra encore de moi ? Nous n’avons pas à nous
plaindre, il y a presque deux ans j’aurais pu tomber sur un con et toi aussi. » Elle
déposa un baiser sur mon front et me tourna le dos. J’avais un beau timbre
Au petit matin j’ai poussé la porte qu’elle avait laissée ouverte et suis
descendu, sans Mistigri, jusqu’à l’air libre, libre. J’avais eu l’idée qu’une odeur de
café moussu m’attendait. Mais non. Qu’est-ce qui avait changé depuis qu’elle
m’avait aidé à monter chez elle un matin très tôt ? Les arbres et les oiseaux
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avaient-ils eu d’autres enfants, des enfants feuilles, des enfants gazouillis, de
nouvelles vies ?
musique, avec un autre cœur, lever les yeux vers les baies vitrées du dix-
tout le long de l’immeuble de Camille, des yeux de chat éclairent les taches du
caveau en béton. Un mur laid me montre ses langues tranchées à vif à coup de
truelles. Camille douce est là-haut toute douleur. Vous souvenez-vous ? Entre
deux lames d’un rideau à jalousies vous pouvez l’apercevoir vous regarder. Elle
est là-haut avec ses doigts qui ouvrent tout, avec son front qui nous a recueillis
C’est du théâtre, ce sont des mots lancés, c’est ce que veut le vent.
Partir, poser une larme de plomb aux pieds d’où elle habite.
Marcher.
Qui nous veut avec nos pieds brûlés, nos pieds irisés aux orteils de corne ?
Qui peut avoir envie de nous demander l’heure ou du feu avec ce vent ? Qui veut
se laver les mains devant tous ? Qui a les réponses emplies de compassion ?
Au plus profond des secrets est la source de vie, les femmes sont comme
des puces sous mes ongles. J’ai des idées d’été, des pulls à tricoter aux
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Quand nous étions petits enfants, poser des questions sans sens nous
qui, pour nous, étaient vieilles. La vie immense, comme un fil est aussi passée
par ces petits trous en délivrant son permis d’être là, le droit à chacun de
Et vous luttez, pris dans les traces d’une aspiration propre, non
partageable. Vous essayez de remonter dans votre poitrine, vers vos yeux, de
morve qui coince de son gras l’entonnoir de la voix, des larves de pensée, des
résidus d’étés où seule et silencieuse vous protégeriez tous vos bébés dans
votre poitrine.
responsable de ma fatalité à être aimé vite. La folie du vent venant sans cesse
attiser les amours cuites était aussi de la faute à cette terre qui se sentait obligée
sortait, alors que j’en rêvais d’autres, des mots ongulés et fourchus. Mon corps
Seul en bas, la vieille obsession d’agression sur celui qui m’avait volé
l’amour me reprenait. Il serait toujours fautif. Allez ! dans le même sac que la
terre, le reptile !
Paris sans Camille, Camille là-haut dans son appartement. Une réflexion
posée tout en délicatesse sur son toit : ceux qui ont des maisons sentent-ils
quelquefois en rentrant chez eux que quelqu’un y est passé en leur absence ?
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Les fleurs ont bougé, une chaise veut parler, ce n’est pas comme en partant.
Plus aucune drogue, difficile de peindre des paysages où l’on n’est pas.
Plus de drogue c’est ne plus avoir horreur des questions et de la vie. C’est
la vie n’est plus une ennemie. Camille frappe en moi et je lui réponds. En lui
couleur qui pourra me couvrir jusqu’aux fesses. Envie d’une veste rouge.
Une veste rouge, un pantalon vert, une boule Neste, car cet été je dois être
beau et avoir tellement grandi qu’à l’automne elle m’arrive aux coudes. J’ai
encore un cil de Camille sous la langue, où puis-je aller le faire briller ? Jusqu’à
maintenant je n’ai joué qu’aux billes (aux filles ?) en m’écorchant les genoux
jusqu’aux poumons et pris la peau comme elle me tombait dessus. Avec la veste
rouge tout va changer, je ne l’enlèverai pas pour faire l’amour à celle qui a du
temps devant moi. Puisque ma conscience ne peut être nouvelle, que cette
pas.
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Je veux une veste rouge pour couvrir mon nombril maman, mes épaules
brin de paille dans la bouche, souffler du bon jazz et faire pleurer de bonheur.
Une goutte vient de tomber sur mes bras demandants, elle est à vous. Une
goutte salée vient de tomber des yeux de Camille sur le bras de personne, elle
doit avoir froid. Au diable les larmes de la terre, la mer de l’amour m’attend !
que je lui offre et y glisse cette branche de graminée née depuis deux lignes de
bonheur.
pour Camille et la lui déposer dans la boîte aux lettres : pas vu, pas pris.
Cette chanson verte, il ne sait où, les unit tous les deux à la vie.
vent pourrait le faire passer en Egypte, ou ailleurs. C’est comme le veut la vie.
Les doigts de Camille savent-ils encore chanter ? Camille lui avait souvent
demandé le nom de l’eau blanche qu’elle buvait dans ses rêves. Ce breuvage
Il aura toujours dans sa plus petite tache blanche sur le cœur l’odeur de
Camille. Arrivera-t-il à sortir des énonciations que leur vitesse même fait sentir
creuses ? Il va faire comme s’il n’y avait plus que l’amour. Il va aller vers une
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LUZ ET PERLE
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Ailleurs, là où un œil s’est posé entre deux seins, là où attend Luz.
Portons-nous là-bas, où vit celle qui n’a pas peur, celle qui pousse la vie à coups
de tête.
Dans la rue après Camille et l’envie d’une tenue baba cool comme sur-
peau météorite, s’envoler… Ce n’est plus très loin, l’air tourne sans vent,
En bas, elle avait l’œil de sa maman chérie cloué sur la poitrine, celui de sa
grand-mère, de l’arrière arrière et plus si hérédité. Les yeux cloués au ciel elle
Les hélices envoyaient un vieux fado dans le dos. Baissons les gaz pour
Il fait doux, c’est un bon présage pour déployer les ailes afin que rien ne
bruisse dans le ciel. Être là alors qu’on continue à marcher dans Paris pour aller
se rhabiller en rouge et vert c’est simplement être deux fois la même chose.
Envie de se poser.
Mouffetard, lui sourient bêtement. Drôle d’avion que celui de la bilocation par
hasard.
Elle est plus brune que Blanche Neige, beaucoup plus sauvage. Il est sûr
que ses larmes seront plus fécondes. La magie irradie cette femme terre, la
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transperce de lumière de lune. Peut-elle tout changer en mieux ? L’avenir, aussi,
espère.
fout du calendrier.
Qui traîne-t-elle chez elle, la limace sans veste rouge livide sur un banc
en boule contre elle. Au réveil, le premier bouger a été de l’embrasser sur les
lettre chère.
En collant une oreille sur la terre de chez elle il est possible de discerner
comme un souffle d’authenticité. Ce n’est pas encore une lumière très forte mais
en cherchant plus loin dans cette femme ça peut donner une saison au-dessus
de toutes, un été sans limite. Elle dit qu’elle est d’accord pour ces fouilles-là.
Sans arrêt elle lui sert de l’alcool arabe au goût de regret qui fait replonger dans
l’amour. Ces liqueurs qui reposent et posent l’esprit dans un ciel de douceur font
partir au loin regarder… On s’occupe de lui. Une femme lui enlève la peur qu’il a
qui ses oniriques pensées flottent, tout à coup en paix. Sur son corps revenu,
une fée fait chanter ses doigts. Il est encore fatigué, pas très conscient, il avait
Si elle le veut, si le vent revenu les cache aux chasseurs, ils pourront savoir
un peu des lunes qui éclairaient de près les premières heures, ils marcheront un
peu dans les traces, maintenant oubliées, des pas des loups. Ils auront quelques
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clefs pour les strates de ces nuits où de fiers mammifères mangeaient de
Ne rien savoir d’elle et reprendre chair. Fixer l’œil bleu de sa famille qui ira
à sa fille si elle en aura une, ou à sa sœur, ou dans une boîte. Prendre son
sourire dans la mémoire du dessous des ongles, celle qui enchâsse du henné
qui y vit longtemps et finit par faiblir à mesure que l’arthrose empêche les doigts
C’est fou comme nous sommes petits. Elle est seule depuis longtemps, ne le
connaît pas encore et va lui faire oublier sa mémoire. Dans sa nuque comme un
nouveau pays, s’attarder question de voir s‘il n’y a pas de vieux époux qui
traînent. Elle vient de parler d’un ange. Qui est là ? Elle dit aussi que puisque
l’avion est venu, les anges ne mentent pas. Elle parle une langue qui fend le ciel
d’un grand sourire. En regardant sa bouche, bouche contre elle, on voit des
par l’horreur.
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Oh ! le bien montre que sa bouche est
Ils s’en allèrent marcher dans les galeries entre les narguilés et les
paravents oubliés, il y buvait beaucoup prenant les rats morts pour des loukoums
séchés et les toiles d’araignées pour des squelettes à effriter. Sûre qu’il
l’attendra, la femme quitta son bras, s’éclipsa dans les veines caves du palais
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mastodonte en lui laissant tant à boire que sans elle là le temps peut y passer
la revoilà, elle lui tend un cadeau sur une mosaïque de carreaux tout menus.
Croyez ces mots : elle avait dans la main un vieux cran d’arrêt. Manche en corne,
lame aux sales centimètres, douze exactement. Toujours la vie doit-elle rattrapée
par le pire ? Il dit à Luz qu’il n’a pas peur et à Blanche Neige qu’il va la laisser
dormir en paix. Luz et lui vont de plus en plus se rassembler et aller au bout de
leurs rêves.
Est-ce une baignoire ? Non, ce n’est pas Camille. Dans le pays d’elle elle
remplit une piscine. Dans le pays d’elle, sur la troisième marche qui attend que
l’eau vienne, elle pose le couteau qui a tué Maurice. Il ne serait jamais aussi bien
Ils dormaient tous les deux sans grain de sable dans les idées, le jour vint
pour les réveiller comme deux bébés. Elle dormait encore quand il sortit du
putain dans l’eau d’ici en faisant attention de ne pas la réveiller. L’eau sur les
doigts lui est venue l’idée d’un dieu, à la mort de son fils, saignant, implorant. Son
âme ne voulait pas de cette image : c’est Jésus qui avait saigné et Dieu pleuré.
Luz dort toujours, Dieu et Jésus dans ses frémissements. S’il se lavait les mains
pour Luz et lui ? Le couteau à la main il s’attendrit devant Luz belle et dormante,
Luz miroir, s’allonge de nouveau près d’elle et glisse l’arme sous la tête en rêvant
qu’au réveil la petite souris l’aura remplacé sur l’oreiller de pierre pour un sou
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neuf. Luz est dans un sommeil épais, un sommeil qui sent bon, sur lequel on
peut poser le front. Elle a aussi, si on s’en souvient bien, la bouche de Blanche
Neige, en plus orientale, ni sombre ni éclairée. Il regarde ses rêves monter aux
ciel, ses cils aller vers son front d’étoiles, croire. Son sommeil chante l’amour, elle
l’est, il l’écoute… Son chant lent fait le bateau, traîne et enroule ses ailes sur le
paysage et les murs. Luz chante par les cheveux : l’œil bleu tend sa chaîne
jusqu’aux plafonds, marque la mesure, tombe, monte. Ses seins pleins la font se
raidir.
Mon Dieu, il a envie de vous demander votre avis : « Cette face de Beauté et
Si elle regrettait de m’avoir pris ? » Elle est dans son sommeil et ne le renvoie
pas d’où il vient. Luz, en plein dans le mille, apparaissante, le veut là. C’est avant
elle que nous n’aurions pas du être nous. Finalement il n’y a que la poésie qui
à retraduire le matin. La poésie est fréquence, rimer riche est devenu tellement
pour les coller au plafond. Qu’ils y restent à vie et qu’ils gardent le sommeil de
Luz avec lui ! Mille Luz, magnifiques apparitions, attendent. C’est avant qu’il
Il se rendort dans le temps de Luz, ils dorment en même temps. Ils veulent
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Contre elle on se sent fleur, en rêvant on apprend à ouvrir les doigts pour
engelures de l’esprit et du théâtre sous la peau. C’est elle, c’est lui qui dort.
Seule, elle avait des réveils encerclés d’éléphants collés aux murs et avait pris
Il faut croire que ce lieu ne tenait que par elle, au premier coup d’ongle de
lui contre un mur il leur fit savoir, en tonnant dans son échine, qu’il n’était pas
d’accord. Luz l’ignore, lance son regard bleu autour des bras de l’homme,
dort dans le creux chaud d’une Terre-Lune réveillée. C’est vers où le désert ? Elle
Si tu es sûre que marcher nous rend plus libre, marche Luz, marche et fais
Le palais tremble, Luz avance en tapant contre les murs. Des mers rouges
coulent et inondent. Elle crie. Une eau de mort ronronne dans un oued mis à jour.
Il imaginait plus qu’il n’entendait et voyait. Ils étaient seuls dans le palais en
transes, elle est remontée dormir, la joue contre l’autre, pour être deux enfants.
Ce que j’aime le plus de ses mains sont ses ongles. Cette guerrière est la
Luz dans son petit sommeil me pose deux étoiles de mer dans la main,
une rouge et une jaune. Elle a deux réponses à deux de mes questions :
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- Question un : Luz, c’est bien que je sois venu ?
- Réponse : Tu étais dans un sale état, je t’ai ramassé. C’est bien que tu
ailles mieux.
ses yeux, les murs éclatent d’un rire à fendre les têtes, un palais s’éboule.
pur volent, se marient cent fois, se trouvent. Un doigt de Dieu entre leurs lèvres,
ils respirent. Leurs poumons aussi font l’amour, brûlent sucres contre sucres. Ils
prêts à prendre l’amour comme il se présentera. S’ils ont raison une fleur peut en
naître. Ils veulent faire une fleur, être cette fleur, ce calice qui sauve, une fleur qui
dit, une fleur digne de Van Gogh, et tanguer avec. Important de tout refaire
joliment avec les sillons creusés dans l’Atlas de Luz. L’avenir d’amour est que
tout vienne d’elle. L’avenir espère avoir assez de doigts pour serrer ses cheveux,
Alors qu’on se demande encore de quoi on sera un jour le noyau, Luz lui
sert du dedans d’elle un litre de folie froide dans la bouche. C’est de l’alcool de
figue de fille. Boire Luz désinfecte, après Blanche Neige ça brûle Scarabée-
115
- Laisse tomber Luz, la terre nous boira après ici.
Sur une idée d’elle, dans les ruines, il arrache le bijou bleu et l’avale. Sur
Luz sans lune la chaîne brisée flotte et les maillons disjoints viennent écrire sur
ses dents. Elle sourit : « Tu étais entré dans un bar, complètement dépendant,
C’étaient des mots comme des portes dures à passer, même si elles voient
réelles.
Il pleuvait sur ses dents et sur Istanbul. L’envie d’attaquer un train nous
donnait l’idée de partir. Les murs pleuraient du fer, du plomb, tout un dictionnaire
de projectiles. Ils devaient en sortir. Pour eux, il était inconcevable de mourir ici. Il
minuscules toupies… »
C’était vrai, ils étaient nulle part en train de se créer des points cardinaux.
Boussoles folles ils s’envoient dans l’air avec prétention. Orgueilleux, ils fixent et
défont le vide, le front en avant. Leur double langue lèche le vent qui peut passer
entre les nuages. Ils ne vont nulle part mais ne sont plus acculés. Ils sentent
leurs os blanchir. Ils ne font plus de miel en bas, leur rencontre en demande plus.
116
Que peuvent espérer deux marionnettes de l’impossible ? De choisir les tireurs
de fils ?
pluie, Luz la divine mauresque, gazouille et papille pour moi. Luz danse le
couteau pendu entre les seins. Luz danse, elle a les mains dans l’air, sur les
Pour que Luz soit, à des kilomètres de cordon, en bas, exactement à la verticale,
à deux pas de nous, une chanteuse de buleria était enterrée. Les pleurs de Luz,
dans l’impossible, la prend dans mes bras et la regarde encore. Comme nous
n’existons pas elle lève les yeux et me soulève. Ses bras de vingt mètres me
Nous écrivions avec faim, sur nos fronts de rien du tout, nos fronts de
papier, des mots qui n’engageaient à rien. Nous nous promettions des images
sur les buvards de nos maux de tête, nous nous unissions et aussi vite
gommions le dit. Nous étions cordes sur une même guitare… bien sûr
Nous marchions sur les toits, nous inventions des notes pour notre
musique. Et les bras de Luz se contractèrent pour nous poser près de sa mère :
veux que tu les finisses. Ma mère mérite mieux qu’elles comme compagnes
éternelles. Je me souviendrai que c’est toi qui l’a fait quand, dans un temps qui
117
prendre à toi et que je croirai avoir de plus belles ailes qu’avec toi pour nager
Ils se tenaient par un cheveu tellement il était soûl. Luz riait-elle ou pleurait-
avec dessine sur lui, fait l’amour. On prétend que la mandragore est le fruit de
l’amour fait à la terre, quel sera celui de l’amour fait avec de la terre ?
Luz qui avait peur du vide voit qu’elle a réussi quelque chose, se mange les
mains avec la terre qui y reste et vomit des gouttes d’or par les trous de nez. Luz
pissait de l’or par les naseaux, l’homme y enfila ses oreilles. Pendant qu’elles
entraient elle s’envola un rien de temps et posa sur lui, au retour, une veste
rouge.
La veste rouge monta au ciel. Il la suivit des yeux jusqu’à ce que fixer le
minuscule point qu’elle était devenue parmi les points des étoiles devienne
impossible. Ainsi Luz lui avait fait faire un petit bout de chemin chez les anges.
posé sur l’une de ses ailes et se laissait tomber dans le bruit de ce vol.
118
Avec mille précautions Luz l’a déposé sur le tapis, a vérifié son pouls,
mouillé ses lèvres d’un baiser puis, s’est mise à danser. Elle danse, il a les yeux
rouges comme une question, se sent vieux comme une barbe… Elle lui danse
qu’il suffit d’une main vivante sur quatre pour faire du feu en les frottant. Luz,
lumière infatigable, feu follet, sait tout faire et l’éternel devient ami. Trouver Luz
c’est l’amour trouvé avant d’être morts, c’est la réalité dans une des extases de la
vérité. C’est la lueur de vie qui brûle pour tous, c’est maintenant que ce souvenir
a dévoré tous les autres, ce qu’il reste, ce dont il faut être sûr de se souvenir
D’écrire en rouge, de se baisser pour laisser passer les mains à tuer les
remords. Des mains, des mains en devenir, des ombres claires avec chair
palmant les doigts, des mains pinceaux. Nous voulons laisser passer du rouge
lame, prendre ta main chère et tendre, choisir un doigt comme si j’allais le couper
et de son ongle cueillir dans l’onglet de la lame une croûte. Puis je fermerai le
ressouderons ta chaîne ».
Et Luz nous réenvola. Le palais est vide pour toujours, abandonné aux
Luz et son homme remontent l’histoire, main dans la main, jusqu’à une sale
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Mêmes visages, même odeur de pomme de terre crue, mêmes serrures à
sexe… ils débarquent chez des générations de rouille, dans la peur. La peur
prend aussi la peau de Luz nez à nez avec une femme mille fois laide qui lui
montre une poche verte ronde de bébés : son ventre. Il y a cent ans qu’elle aurait
- Bétail de mes chimères où es-tu ? J’ai à manger pour toi, pour tous tes
Pendant ce temps, Luz, l’incroyable Luz, prodigue des soins et dédie sa vie
Luz, pour soigner, cherche dans les murs qui n’ont jamais entendu parler
d’elle, les murs contre lesquels son père, depuis loin dans le temps, tue à tour de
bras. Ce n’est pas un papa rupestre, il n’y a pas une image de lui sur les parois.
Son père à tuer n’est pas un héros d’il y a cent mille ans mais un con bien vivant,
son géniteur.
corps de Luz à le mémoire bleue deux genoux jaunes, pires que jaunes, couleur
pisse. Le jeune corps de Luz demande à être vengé et je l’ai promis à sa mère.
Je regarde le bijou fou qu’elle porte au bas du cou et lui fais l’amour devant
120
Ce n’est qu’après que je crois pouvoir dire que nous étions dans le vrai.
Il lui fait l’amour avec une lépreuse collée sur le dos. Ça arrive : son père
- C’est ta fille, imbécile, celle qui a besoin de ta mort pour vivre. Je l’aime,
je vais te tuer.
Le père a une langue qui traîne sur la terre de la cave, je l’y cloue.
La tribu lépreuse chante et danse, elle n’a pas besoin d’exemples, elle
espère une bagarre. Du couteau de Luz j’en tue douze. Les formes s’effritent en
petits bruits. Luz magnifique n’a bougé ni d’un cil, ni d’un pas. Enfin son père est
immédiatement su que tu le tuerais. Une de mes multiples, plus que ça, toutes
mes sœurs sont sorties avec moi. Ensemble, nous t’avons dit : « Viens, on se
tire, il n’est pas bon de traîner ici. Tu as des poèmes et nous un père. » Je suis la
plus jeune sœur de Claire, l’atlas où tu peux rebondir, une double biche. Ma
sœur fatiguée voulait savoir si celui qu’elle aimait avait un fond, si ce n’était pas
qu’un trou.
121
La plus jeune des sœurs de Claire. Suis-je dans l’inceste ? Tout est-il
fille de Luz. Claire tu n’as pas le droit, Claire tu m’as tendu un piège…
Au feu !
gonflée de tous les pompiers de Paris. Le bar, les gens devant et derrière le zinc,
étaient-ils de Claire ? L’œil bleu sur la poitrine était-ce encore elle ? Les femmes
Chez lui, maintenant, tout est re-rêvé avant d’être écrit. Pourquoi a-t-il fallu
que ce soit elle, celle qu’il avait fait sauter sur ses genoux aux temps clairs.
papier. Claire me semble vieille. Petite main de henné veut foncer voir si l’air est
plus respirable ailleurs. Ses doigts n’arrivent plus à tenir les siens, leurs mains se
quittent.
Tout n’est pas perdu, j’ai enfoncé dans une oreille un petit mot-numéro
tracé par la main de Luz. Tout n’est pas perdu, les pompiers sortent sur un
La grotte où ils ont fait l’amour vient d’exploser. Luz doit marcher vers
des plafonds, la face joliment inondée de lumières rouges. Luz doit courir et ses
cheveux s’étendre dans le vent. Luz doit avoir les yeux mi-clos et les bras fous. Il
ne faut pas appeler Claire, même si Luz a donné son numéro de téléphone.
voudrait être un épi de vent sur tout d’elle, que personne ne la touche par
122
hasard. Luz ! Il voudrait être accroché aux arabesques de ses boucles d’oreilles.
Sa place serait d’être un éclat sur la chaîne d’or qui coule sur sa taille. Luz ! Il
voudrait être une partie d’elle, qu’ils ne se perdent pas. Il voudrait de cette
musique émanant du corps de Luz avoir le droit de poser le doigt sur la corde
d’un violon. Il voudrait revenir en Luz goutte de salive et que sa voix sorte. Il veut
vivre. Il veut danser le flamenco avec elle quand elle est possédée. Il espère tout
et surtout qu’elle ne soit pas la petite sœur de Claire. Comment faire dans toute
cette fumée ?
redevienne sexy.
Pourquoi lui avait-il coupé des dents le collier qui tenait l’œil bleu de sa
famille maternelle ? Pourquoi avait-il fait sur elle cette soudure très personnelle ?
Il faut entrer dans le ciel où qu’elle soit, aimer se brûler. Il veut retomber
dans l’amour, n’être que le fil qui tient le soleil au-dessus de la tête pour le guider
vers elle.
Après tout l’amour ouvre à tout, même l’amour qui manque : il veut avoir un
doigt pour deux mains. Pouvoir le passer, sans la déranger, sous la bretelle de
son soutien-gorge et laisser l’ongle admirer, même si cet ongle n’en appelle
123
Il veut déposer des milliards de pensées sur ses paupières immenses. Elle
Il ne lui veut que du bien, il lui demande de le laisser entrer dans ses
couleurs.
rouge, je t’attends.
Depuis que je suis certain de l’aimer ce ciel ne peut plus avoir de mouches
124
Et Maurice dans tout ça ?
plomb qui lui bouchent la vue et l’empêchent d’enfiler les tubes du ciel.
125
Il se sent cousu à l’amour par des fils verticaux et à Luz aussi.
déguerpi, elle est son sang. Elle est son sang. Est-elle dans le monde où il perd
toujours ses femmes de vie ? Dieu, que Luz avait un beau palais d’où sa sublime
voix montait…
- Luz, c’est toi ? J’en suis sûr, c’est toi ! N’arrête pas de parler, j’arrive.
Luz : - Délivre-moi…
hologramme.
Il la sent lui dire qu’elle l’aime sans le voir, qu’elle l’attend dans son infini,
infiniment tout de suite, qu’il est sa suite, qu’elle n’est pas sa sœur, que d’ail-leurs
il ne doit pas haïr Claire, qu’il doit entrer en lui pour polir l’homme qu’il cherche,
qu’il peut voler à l’intérieur, qu’elle est à deux pas, qu’elle a besoin d’air.
Luz : - Je ne vois rien, j’ai peur aussi. Je suis la voix pas de toi quand tu
parles. Je crois que je suis en toi. Je te dis que l’autre voix c’est moi. Tu
m’entends ?
126
La sécher, l’embrasser, l’embrasser, l’embrasser… Elle veut qu’ils se
Ils étaient entrés dans un tout petit hôtel. Luz est là, assise sur un couvre-
pieds marron-hôtel. Il l’admire, allongé, calme, sur le lit de cette cage tapissée.
Elle le remercie et lui s’excuse d’avoir cru qu’elle avait pu vouloir partir loin de lui.
Vive cette vie avec Luz, cette ville avec l’eau de Luz ! Elle se cambre face à
lui en position tailleur. Il ne bouge pas, elle le déshabille sans décroiser les
jambes, le glisse gentiment entre les draps et se couche tout contre. N’importe
couvraient les draps de suie. Bonjour Dora… Ça sentait la bonne fumée, celle qui
Luz sur lui, c’est l’immensité vraie, l’exacte, celle qui pense à tout, et c’est
Qui sait comment ils pleuraient ensemble ? Qui sait combien ils aimaient
127
Ils feront des nuages, des boules
Et des constellations
Ils se connaissent de mieux en plus avec cette petite chambre d’hôtel qui
les congrue.
La fenêtre fermée
Nous tentions, sans voir personne d’autre, de tout faire bien. Nous avions
une chambre, autant s’y aimer avec la belle liberté qui nous inondait, autant
toujours mieux s’y aimer en ne regardant que nous. Chez nous le temps ne pou-
vait pas s’arrêter, nous n’en faisions pas partie. Notre temps était de nous
L’air ne pesait jamais sur les nerfs et quand ça arrivait, ils faisaient l’amour
jusqu’à ce qu’ils ne puissent faire que dormir (par amour aussi Luz décidait de
te transformer, te difformer
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Elle ne mentait jamais. Ils vivaient ce « deux ». C’était une histoire d’amour,
alors ils n’étaient plus là pour avoir des idées. Les idées… il sera toujours temps
Ils se tendaient vers une naissance et l’un nettoyait l’autre toujours. Ils
dur sur l’épaule de Luz, un grain dans lequel il regardait la vie bouger. Un grain
Qu’en penser ? Est-ce parce que deux sœurs ont un grain de beauté sur
dédoublement pas loin, comme de l’air inspiré et jamais expiré qui nourrit une
double vie.
de théâtre au début de ces histoires, ils sont un peu vous tous ceux qui sont là,
en cet hôtel Nénuphar, dans une chambre sans charme que Luz qui peut tout
leurs pierres de foi, leurs lumières fendues, leurs os et leurs vies, leur sac, leurs
pleuré. Pour vous remercier, ils vous donneront de l’amour qu’ils font. Vous ne
pouvez pas les perdre, ils ne partent qu’où chacun est pétale éternel de la même
fleur. Ils s’imaginent bien en rose. Comme chez eux, à part cet hôtel, ils n’ont que
129
votre amour. Il y avait ce palais, là-bas loin en Turquie ; mais ce palais ne laissait
Il va descendre et sortir, faire des courses pas très catholiques pour payer
monter et de descendre.
Luz prenait aussi les escaliers pour aller chercher l’alcool, les clopes, les
sept de l’hôtel Nénuphar n’était que pour eux et l’interdiction qu’on vienne en
Ils vivaient avec bonheur ce temps qui leur faisait pousser les cheveux, Luz
Ils en avaient parlé et elle ne lui avait jamais trouvé de faute grave.
130
Non, ce n’était pas de la Blanche Neige, c’était plus blanc, ça n’avait rien à
voir avec les nuits seul et tordu, c’était droit. C’était sain et admirablement blanc.
C’était une confiance énorme, une présence magnifique. C’était une confiance
énorme, une présence magnifique, c’était la beauté qui avait su tenir compte des
vieux délires, c’était enfin et vraies, devant le bout de ses doigts, des paupières
La longueur des pouvoirs de Luz lui donnait une autre tête. Et les lèvres de
Luz étaient comme des ailes de papillons, légères et puissantes. Comme des
papillons le portant, les lèvres de Luz faisaient voler son corps. Son corps deve-
Si elle en avait envie elle faisait pousser, d’un battement de cil, n’importe
Il n’y avait pas un seul « oui mais » à l’horizon. Elle ne voulait pas le remplir
mais lui laisser le temps de dormir. Il n’y avait plus d’avants disponibles, ça faisait
si longtemps qu’elle rendait la vie belle. Il aimait par dessus tout quand elle était
rouge, arbre, soleil, qu’elle jaillissait d’elle. Tout passait par elle, elle n’était pas
131
dessous ? Oui. Ils bouchaient tous les trous pour que le palais et la grotte ne
reviennent pas, que gros cerbère ne monte pas. Peut-être qu’ils n’auraient dû y
voir que des trous de souris, mais. Mais ils préféraient être un barrage dressé
Luz est plus nue qu’une énigme, avec elle nous sommes dans un autre
courant de l’air, avec elle il est regrettant. Elle est pure, remède avec lui et pour
Luz disait à ses cheveux qu’il n’avait rien fait d’irréparable, qu’il avait voulu
Fées, ils se cachaient jambes contre tête. Magiques, ils faisaient l’amour en
marchant. Ils vont bien arriver à descendre de leur chambre ensemble, un jour.
Un jour.
éjaculé à la gueule du portier qui visait le cul de Luz. Luz avait failli en mourir de
rire : « Tiens lui la tête, moi aussi je peux le faire. » Et Luz pisse sur la gueule du
con à mouiller comme si elle vidait toutes les femmes, ça n’en finissait pas :
Ils avaient des jeux comme ça, des farces, des trucs qu’ils n’avaient pas pu
132
Ils riaient à s’en crever la panse. Ils se félicitent cent fois et s’embrassent
mille. C’était l’évènement du trou à rats où ils faisaient tout pour ne jamais
graisse au bas de l’escalier n’a jamais osé lever les yeux sur l’un des deux. Ils
une main, sur une oreille, selon que l’inspiration leur venait. Ils faisaient comme
ils voulaient et le gros baissait les yeux et Luz devenait de plus en plus femme.
Elle ne voulait pas entendre parler de Blanche Neige, la Blanche Neige qu’il avait
tant aimée. D’ailleurs, il ne se souvenait pas très bien de cet amour. Il ne savait
pas où le ranger vraiment. Dans les sentiments ? Dans les états baroques ? Ce
L’important est l’âme de Luz qui enveloppe leurs deux cœurs avec des
soleils compagnons. Accompagnés par ces lumières très longues ils s’aimaient
en toute vérité. Dans leurs doigts qui se croisaient et se serraient en des preuves
beaucoup, elle lui demandait d’expliquer, il lui disait qu’elle en savait plus que lui
puisque c’était elle qui créait tout ça. Elle lui disait que non, que ça se passait
ainsi parce qu’elle était avec lui et que, plus ça avançait, plus c’était fort, plus il
devenait évident que, finalement, l’amour rend tout plus simple. Que, en y
réfléchissant bien, la vie est une étreinte et qu’ils ne se prenaient pour personne
d’autres qu’eux en se serrant fort. Elle disait cela comme si les mots sortaient de
la peau de ses lèvres. Elle ne parlait pas vraiment, elle laissait sa bouche
respirer. Où qu’il posât la main sur elle, il y avait des mots. Elle parlait de partout.
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Luz de ces instants perlait de mots et les mots flottaient, visibles, tout
autour. Dès qu’il voulait en saisir un, celui-ci s’évaporait. De l’air, tu n’es que de
l’air et tu retourneras air. Les plus beaux étaient les mots des
préférant le bonheur à la liberté. Les plus durables étaient, aussi, les mots des
paupières de Luz, encore bien des jours après on pouvait les écouter… Sachant
combien Luz était de chair, il n’osait plus faire de mal au moindre mot, même aux
plus petits, même à ceux que nous avons l’habitude d’écraser d’un doigt parce
qu’ils nous grattent. Maintenant, il marchait dans la foule des mots sans jouer des
épaules. Luz n’avait pas à prendre ce genre de précaution, les mots la laissaient
La Musulmane, l’Espagnole, lui avait offert un œil bleu qu’il portait à son
cou. Lui, le jour même, avait remplacé sur la chaîne de Luz la trace laissée par la
croûte des vieux mondes par une petite pierre rouge et cabossée qui s’était
C’étaient toujours des jeux de mômes, des jeux de complicité, des jeux
d’imagination, tous les jeux aux dépens des passants, qui les éclataient. Ils
toujours. Ils se firent, ainsi, une cour des miracles d’amis qui, s’ils avaient dû
marcher contre les autres, auraient peint sur un drap blanc le visage de Luz.
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Mais, ces deux-là n’avaient pas besoin de drapeau, n’avaient rien d’extérieur à
attaquer. Une part d’ombre était leur dessert. Il devenait de plus en plus rare
Ils pouvaient s’aimer partout. Ils ont montré qu’ils pouvaient faire l’amour un
samedi après-midi sous l’ombre du plus bel arbre du Jardin du Luxembourg. Est-
ce ainsi que l’automne est arrivé ? Ils revinrent le lendemain, sous l’arbre se
étaient l’automne qui portait la bonne nouvelle : l’été était fini. Seul ou seule tout
cela n’aurait pu être et, si même oui, n’aurait pu marcher. Et dire qu’à deux c’était
si facile, si naturel… C’est Luz qui trouva les bons termes : ils étaient en bizutage
Qu’elle soit lune ou luciole, Luz n’est jamais une autre, Luz voit toujours mieux
que les autres. Qu’elle soit lutine ou lyrique, Luz semble connaître par cœur le
début de toute chose. Quand Luz prend une main pour lire ce que la vie a écrit
sur ses lignes, rien à voir avec les diseuses de bonne aventure qui vous picorent
la paume comme une mangeoire, Luz fait dans le vivant, Luz se recrée au-
dessus de votre main et se souvient de tout ce que l’on a pu vous faire et vous
dire avant. Ça fait se poser de sacrées questions. Il n’y a qu’une Luz, elle est
avec lui. Comme il est important de ne pas être mort avant ou ailleurs…
Luz espagnole avait une idée simple sur « el pasado » et « las atrocitades» : il
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Leur premier passé commun était Claire. Luz fut la plus courageuse, vous
passé. »
Les feuilles du grand arbre étaient tombées d’eux. Luz qu’il tenait se mit à
vomir : « Excuse-moi, j’avais de sales mots, pas à moi, dans la bouche ». Elle
reprit vite le dessus : « Celle qui s’est ainsi présentée est bien ma sœur. Elle
nous prend comme parloir, il faut qu’elle soit moins catégorique, qu’elle me laisse
faire. » Et, elle lui envoya quelques mots cheveux, quelques araignées
yeux et part un peu. Pour un instant, ils vont décroiser leurs doigts. Combien de
temps ça durera ? La mesure de ce temps dépend de par qui l’esprit sera pris.
Sans Luz :
Que de seins de trop, que de mères, que de noyés. Qu’est-ce que Luz lui
manque déjà… Le regard éteint il regarde comment le soir tombe et toutes ces
histoires qui pour un oui, pour un nom, changent les couleurs de l’horizon. Rien
ne parle dans cet horizon-là et il lève les bras au ciel, il étudie. Il étudie son effet
sur la vie, il a envie de prier. Il prie et voit deux voies : celle où l’on traduit la
poésie et celle où l’on croit à la poésie pour que la poésie soit la poésie. Puisque
c’est si évident, pourquoi n’y arrive-t-il pas même si, accessoirement, il rime un
peu ? Il regarde vers ses mains, ne les voit pas, les appelle.
Luz : - Elles sont dans les miennes, j’étais juste partie m’essuyer les lèvres.
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Et pourquoi serait-ce Luz ? Après la sœur de Claire il y a peut-être la sœur
comparaison, à cause des ongles de pieds à lui, de ses cheveux sans forme, de
C’était Luz : « Mange un peu et ne fais plus n’importe quoi dès que j’ai le
dos tourné. Si je n’ai pas le droit d’aller me laver les dents, qu’allons nous
devenir ? »
Le temps, ou Claire, ou un esprit, lui avait encore joué un de ses tours. Luz
lui dit qu’elle ne l’avait pas épousé par esprit de famille, qu’il devait se laisser
complètement aller en elle, qu’elle avait tout le temps pour qu’il apprenne à voir,
se disait-il…
Luz de ses yeux un peu rougis, de ses yeux vrais bijoux, lui offre la terre et
la chair pour le réunir. Il y lisait que depuis le début d’eux elle n’avait fait que
l’attendre.
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Et puis j’ai trop honte, lisez Luz pour moi.
« Je vous raconte, il n’était pas en Turquie mais dans le bar de mon oncle.
J’ai dix-sept ans de moins que Claire et ai lu toutes les lettres qu’il lui avait
envoyées. Enfin… J’ai lu celles qui étaient restées dans la boîte aux lettres. J’ai
toujours voulu lui demander ce qu’il voulait dire quand il écrivait qu’il était là pour
clamer jusqu’au fond de chacun, qu’il voulait que personne d’autre que lui le
pense, qu’il pouvait tout laisser de la vie pourvu que la mort soit pleine. Je crains
que lui-même ne le sache pas mais je l’aime. Et moi, à moi que va-t-il m’écrire ?
Que va-t-il faire grandir de l’amour que je donne par amour ? Surtout qu’il ne
m’en rende rien, j’ai vingt ans, je veux savoir ce que veut l’homme avec qui
Certaines lettres n’étaient pas pour Claire, elles étaient à la mer, à Luz
inconnue, à rien, aux arbres, à tout ce qui peut porter du papier. En ce temps-là
d’avant la peur, avec Claire nous avions des histoires acides, nous en prenions
Les paupières de Luz, ma femme des dunes et des oasis qu’elle a voulu
vous faire passer pour un bar, se sont baissées. Ses lèvres se sont trouvées et
Blanche Neige.
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Blanche Neige, vous vous souvenez ?
C’est elle qui pose les questions, qui regarde autour, qui serre mes mains
pour se serrer et qu’avoir un peu mal fasse juste du bien. Elle m’embrasse par
les doigts, s’unit à toutes mes âmes… Tout cela, les yeux fermés, sans témoin
intérieur…
En jouissaient-ils jusqu’à la sorcellerie qui fait tourner le cou et met les yeux
Elle lui mord les lèvres, il sent le sang au goût de salive d’elle. C’était leur
sang, c’était leur bouche, c’était l’amour qui ne pleurait plus parce qu’il arrivait à
sortir. Ils sont ensemble, Luz lui demande son avis sur le nouveau parfum qu’elle
Ce nouveau sur sa peau sentait exactement le vent chaud sur les sables et
les desserts aux baisers, ça sentait le soleil, le désert et ses roses des sables.
Cette fille sert le secret des fleurs sur la grande nappe des familles. Elle le
Avec ou sans elle ce n’est pas le même amour. Il voulait en savoir moins
de Claire et plus de Luz. Luz qui me réveillait, me voulait. Que ses lèvres soient
bleues, rouges, jaunes ou noires, elles sont pleines de bonne eau. Elle chante
de nous, sa porte était ouverte à tous les souffles, des sables et des burnous
désunir. Luz les prenait par le sexe pour les tenir quelque temps loin de nous, les
139
chéchias volaient, les épouses poussaient leurs youyous, les chameaux se
Luz, la rose des vents, la vivante, la greffe sur ses doigts était avec lui et il
lui suçait les oreilles. En douce la vie les traversait. Je crois, je pense plutôt, que
retombe pas…
Parce que, chaque fois que le vent retombait il lui disait l’âge qu’il avait, elle
lui disait qu’elle était de l’autre sexe et que pour celui-là l’âge est celui de l’avenir
possible. Quel avenir dans son regard ? Elle lui demandait de fermer les yeux et
- « J’ai cru si longtemps, Luz, que l’amour était le père des plaies. »
Depuis longtemps elle le soignait, l’amour était leur tente, ils y oubliaient
tout. Forts de l’envie de vivre, forts d’avoir remonté des courants contraires, forts
comme des siamois, ils n’avaient plus de force et faisaient l’amour, pire que
chance nous l’avons ensemble. Elle est pour nous qui savons que la vie peut se
Ensemble, nous avons une tête pleine de grains de sable, des ponts
surréels qui relient des idées à des trous. Nous aimerions tant être des millions.
Vous venez ?
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Plus nombreux ensemble nous serons une force pour la vie. Sans nous
unis la vie ne deviendra qu’une vieille croyance. Nous aurons les cartes en main,
à quatre mains nous sommes déjà un nœud d’amour. Je l’aime avec vous.
monde ne peut les tuer. Ils le font, ils le veulent comme preuve de la construction
possible de l’amour qui sème dans l’âme de l’autre des grains de ciel, de
tendresse, de vie et de terre jolie. Ils font tout pour bâtir l’amour comme ça parce
qu’ils l’aiment. Ils se sont bouleversés, ils se sont rentré dedans par les yeux et
ils ont admiré la nature. Aimer un paysage c’est se fondre sans retenue en lui et
vaut guère plus qu’un fait divers. Ils s’étaient rencontrés parce qu’ils avaient en
commun. Ils avaient en commun l’idée que les corps ont besoin d’amis pour se
dire, pour savoir et de se savoir retranchés dans l’idée de ne pas y avoir droit
langue. Pétrifiés ils se lèchent les pieds et recrachent de la fumée par le nez.
plus à vomir depuis l’escapade de Luz une fois, ils recrachaient des banquises
couraient sur le monde avec un cœur pour tous. Ils avaient fait le même rêve d’or
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d’un plomb universel qui voulait que tout le monde vienne se fondre. Ils avaient
toujours cru avoir fait le plus dur quand ils s’étaient trouvés. Ils aimaient leurs
corps collés que l’amour justifiait. Luz n’arrêtait pas d’embellir et ils avaient peur
Il leur arrivait qu’ils avaient faim et qu’ils avaient fini les provisions depuis
longtemps.
- Luz.
Puis, il y a eu des doigts dans la soupe et des objets qu’il entendait parler. Et
plus en plus dépassé. Il en fit part à Luz, sa femme lumière : « J’ai l’impression
de me vider de moi, de m’enfoncer dans une lumière qui ne brille que parce
qu’elle me pompe la vie. » Ces derniers jours, sans doute la faute à la porte
eux sans faire attention à lui alors que Luz faisait d’eux ce qu’elle voulait. Ils
Et Luz, accompagnée par ses musiciens des sables s’est mise à danser et
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Les notes étaient prenantes, il lui disait « encore »
Elles reprenaient : « C’est toi qui m’a baptisée. Je suis ta vérité. » Il veut
musiciens ou l’une des créatures de la soupe ? Luz s’est déjà posée dans le
creux d’une de ses oreilles : « Tes questions te fatiguent encore plus bébé,
La porte était ouverte, les rideaux tirés comme au jour de leur arrivée ;
caresser les idées. Orchestre des sables ou musiciens de métal blanc ? Quand
chanter avec Luz, à la servir avec ferveur. Comment les arracher l’un de l’autre
bête qui voulait gagner sur eux ne devait pas bien les connaître, c’est elle qui
allait être labourée par leurs désirs. La bête qui voulait leur trouer les yeux serait
danger elle aussi et sans elle il n’était rien. Cette nuit ou cet après-midi-là, le
sexe de Luz lui grimpa sur le crâne et sans autre forme de présentations essaya
de le pomper par là. Luz ne s’était rien cassé en tombant, tant mieux. Il la
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massait entre les cuisses quand il eut l’impression d’être dans un ascenseur. Le
ciel leur était-il tombé sur la tête et par la même occasion sur le toit de l’hôtel ?
prendre sur les épaules, lui serrer bien fort les jambes, la porter elle et ne rien
essayer de sauver d’autre. Luz, cassée en deux, respirait fort sur son occiput, il
Luz me dit dans l’os le plus haut de mon crâne qu’elle va bien et a envie de
Luz me battait les flancs de ses jambes : « Hue ! Hue ! Cheval d’amour, j’ai
porter. Elle a sifflé, personne n’est venu, j’ai couru longtemps encore.
Luz : - Tes épaules n’en peuvent plus, on peut s’arrêter ici, ça sent le
nougat.
Je m’écroulai plus que je ne fis descendre Luz. Tout allait redevenir simple,
la vie par amour allait reprendre. Luz debout il redevenait évident qu’il n’y avait
pas de code, pas de secret, rien à faire de mieux qu’aimer. Oui, ça sentait le
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nougat ici et j’aimais. Pourquoi s’obséder à renaître alors que cela nous est déjà
arrivé en naissant ?
Voyez-vous ?
Harar, ce temps était le tien, il était normal que ça sente comme ça. Elle est tout
ce qui est nécessaire à la vie : la mer, le sommeil, les bulles d’air, le vin,
l’espérance. Elle est une allée pavée de soleil où tu creuses, trouves et te fais un
joint en or. Tu fumes, Luz brille, tu as toute la chaleur du monde bon dedans. Tu
as devant toi des yeux clairs qui te font battre le cœur, ton cœur lave tes mains.
Ils étaient en liberté. Elle jeta dans la Garonne une clef marquée d’un
- Je devine notre maison dans un fleuve immense qui, mieux que couler,
lave le dedans.
Où qu’ils soient ne changeait rien, elle aimait l’odeur de là, qu’ils soient
vivants, le bonheur. Le but à atteindre et la mémoire n’étaient que des mots qui
ne disent pas, seule l’envie la portait. Elle avait raison, rien n’était grave pourvu
Pour mieux aller en elle il était venu au bord du fleuve. Autour de lui la vie
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Ils étaient partis nus du Nénuphar. Elle voulait aller plus loin.
Qu’on y aille
Elle a appelé puis passé une robe bleue tombée des mains du ciel.
- Et moi ?
harnachement des chevaliers, avec les poils en plus disant qu’ils sont vivants.
Même pas scarabée, même pas lézard, juste putain d’animal crochu. Le père de
Luz en mangeait ? Il va lui montrer que c’est lui l’homme, le vrai de sa fille. Il
meurt d’envie de les niquer, d’envie d’écraser la nuit, leurs nids de sperme
- Luz !
œufs se traînent depuis le début et nous nous voyageons sur le dos de notre
mère l’ivresse. Tu es plus forte qu’eux puisque tu es vraie. Si tu veux que nous
peuvent quoi à part se reproduire ? Ce ne sont pas quelques têtards des sables
qui vont nous bouffer la chatte ! Après ce que nous avons vécu, ce que nous
avons mangé, tout ce qui nous est tombé sur la gueule dans ton palais, puis
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après dans la grotte, puis dans la chambre, nous avons la mort bloquée, la
piqûre indolore, la peur non recevable. Nous sommes les plus forts !
- Soufflons leur un peu dans le cul. Si nous avons tout faux, j’essaierai de
siffler un morceau de ciel bleu pour te faire une robe et que nous décampions.
Ne crois pas que je m’y connais en miracles. Et, si nous avons envie de nous
L’image du père de Luz maté, la langue clouée sur son lieu de mort était un
peu ici…
À une pensée près tout aurait pu être autrement, mais Luz releva sa jupe
caressant, d’entrer en érection. Elle voulait voir ce qu’est une femelle scorpion
race qui se féconde sans réellement s’accoupler. Son sexe gonflé de vie se
retournait vers son cul. Luz témoin, qui lui tient la queue, le force dans l’autre
sens, l’y bloque, il éjacule dans une femelle scorpion et redevient petit garçon.
- C’est fini amour, elle est morte et les autres partis : elle le nettoie de son
indéfinissable amour.
Luz lui racontait qu’elle n’avait connu de ces bêtes que leur piqûre sous un
ongle, qu’en principe l’homme en perdait le doigt et le jetait aux chiens, qu’elle
allait faire de sa robe des bas bleus et qu’il avancerait, toujours plus loin du
passé, avec sa femme sur les épaules, tranquille comme une jument assouvie.
Luz lui disait qu’elle en avait connu d’autres ici, qu’il aurait pu cette fois même
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pleuvoir des scorpions et que la peur devienne un gène, qu’elle aimerait toujours
Avec Luz à l’ADN salvateur, la sans sommeil qui ne prend pas de temps
pour rêver parce qu’elle n’a pas peur d’en perdre, la fleur qui pousse en avant
pour que tout ce qui ne sert à rien soit en dehors de tout ce que l’on aime ; il est
avec quand Luz ouvre les yeux. Douceur en chef de la maison des caresses, elle
rasait sa barbe d’un doigt tendre, il avait envie d’arrêter de respirer. Ils se
respiraient et le reste de l’air était moins bien. Avant, l’un sans l’autre, ils aimaient
le danger, maintenant ils étaient bien pour deux. Ils avaient envie de se revoir
pour l’autre des ailleurs, des déviants extrêmes vers la vie. Quand la vie les
videra, ils y auront pensé. Elle passera par là la vie qui les vidangera.
Luz dans les yeux de l’amour. Elle n’est pas contre mais doute : « Il est vrai que
le temps va, il est certain que le temps n’est pas rejoignable, pas contestable,
être beaux pour la beauté. Il n’est pas toujours agréable de savoir que l’espace
regarde le trou du cul de nos yeux et qu’il se vide en nous par là. Il est rare
d’oublier sans se souvenir. Il ne fait jamais le bon temps pour se sortir de soi par
l’œil. Il n’est pas facile de s’arracher du sang. Il est, avec Luz, au bout du monde,
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bateau, voiles et vent. Elle est à lui au bout des monstres, aux lèvres d’intenses
inductions, là où le passé peut s’étendre tel un invité. Ils sont dans la terre à
venir, l’amour malade de tout. Ils vivent la fin et n’ont qu’eux au monde. À chaque
fois qu’ils se décident à placer un pion sur l’échiquier, ils se retournent pour aller
le toucher dix fois et se rassurer. Ces deux-là n’aiment que la solitude et l’instant,
c’est-à-dire le fragile.
Ces deux-là font beaucoup avec rien, dans les contretemps, les difficultés à
mille fois sur mille, ses pleurs pour rien, le désir éternel, je suis une copie de son
âme.
- Oui, Luz.
Ces deux vivants font pousser le sable et les cailloux. Ces deux-là se
bouturent sur tout. Ces deux présents ne font rien de la vie et font de la vie avec
rien. Leur travail est de pousser les murs du monde, d’épouser les formes qui
passent, de regarder en face tout ce qui transforme. Leur force est dans la
beauté de Luz. Pourvu que ça marche, pourvu que ça flotte pour toujours…
Pourvu que l’amour ait le temps de continuer à crier dans l’oreille du monde.
Pourvu que leur vie ait servi. Pourvu que Luz soit éternelle. Luz, si la vie est bien
faite il mourra avant toi. Après, Luz chantera à la proue d’autres bateaux pour
faire revenir la pluie quand il n’y a qu’elle qui peut sauver. Après eux, Luz sera
toujours là et dans l’espace, elle aura des réacteurs dans les poches et se les
collera aux cuisses quand il sera urgent de décoller pour chercher –comme il
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Luz : - J’ai trouvé, je suis ta femme.
Il se vit marin vêtu de bleu pilotant un bateau blanc qui passerait par
Cabourg. Il se vit faisant monter l’eau et hissant Luz sur les toits qui dépassaient.
Il voulait la faire rire. Il voulait la protéger et sans rien décevoir d’elle faire le tour
voulait étirer le temps et ricocher en eux. Le vent tournait en rond, Luz dormait, il
cassait des idées dans sa tête. Il fallait croire pour que tout arrive.
Avec elle tout arrivait. L’œil bleu était revenu danser au-dessus de ses
seins. Elle aimait tant la mer qu’elle les y avait portés. Sous l’eau il n’y a pas de
Il croyait qu’elle dormait et elle avait fait passer le temps. Tout cela est au
passé, ils sont mouillés. Ils nageaient dans l’eau, dessous, et ne pouvaient plus
- Hein amour que nous sommes bien sous cette Garonne sans fin, réussie,
Cet ailleurs sera le but, l’eau et le sel, la faim annulée. Luz et lui vont au
bout de leur vie athlétiquement. Ils voulaient vivre un an d’amour car ils pensaient
d’un commun amour qu’il faut au moins un an à l’amour pour rester en deux. Ils
ne voulaient pas être partagés. Ils n’avaient pas envie de trouer la mousse, de
remonter à la surface. Ils étaient bien sous ce drap du monde, jouant aux doigts
dans les cheveux et à la peau sur la peau. Ils faisaient l’amour au-dessous de
tout, sans se voir, en allant vite. Ils regardaient celle qui allait leur venir, le bébé
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de la fusion, la perle qui naissait de leurs salives et lui donnèrent par avance le
nom de « Peau Douce », pour qu’à jamais sa mère envahie soit honorée.
Luz leur avait trouvé une maison dans le sable du dessous de la mer d’où,
de la nuit de là, ils regardaient passer le ventre noir des bateaux et le dos des
requins. Dans ce morceau d’eau l’amour faisait des miracles. Et dire qu’avant il
avait eu besoin de drogues… D’ailleurs, il traînait encore un peu de lui dans les
rades du bord de ce qu’il reste à gratter quand on n’a qu’elles. C’était humain et
le passé passait aussi sur le dos de Luz. Le passé avait une échine pas belle. Ils
s’écroulaient l’un sur l’autre comme des anciens, étaient fous d’amour, n’avaient
plus d’autre repère vivant que l’envie. Luz lui disait qu’il fallait se méfier de tout,
qu’on pouvait leur voler le temps qui fait respirer dans l’eau. Quand il n’y aura
plus d’air il tombera, pas question d’aller en prendre en haut. Il tombera sur Luz,
il n’y a pas de femme après Luz. Le temps avec ses millimètres humains a peur
de tout, pas Peau Douce. Le temps est vide d’eux, la beauté est moins belle que
Ils étaient très famille, se découvraient de filiations avec les étoiles de mer
et avaient du sel devant leur porte. Luz qui savait invitait et quand il le fallait
chassait les démons à coups de pieds au cul. Peau Douce disait à ses copines
transparentes que ses parents étaient fous mais qu’elle les aimait encore plus
que l’eau. Certains jours, ils s’écroulaient et dormaient dans les cendres de leurs
souvenirs. Luz lui soufflait qu’il serait bien que leur enfant s’appelle « Perle ».
Peau Douce ou Perle avait planté un arbre qu’elle avait baptisé « soleil ». Alors,
les peuples de l’eau aimèrent Soleil sur les cheveux de Luz, qu’au gré des
marées ils rejoignaient. L’enfant était un regard clair, une vraie fille. Une fille qui
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jouait aux osselets avec des morceaux de sable et à la marelle avec la craie des
poissons. Qu’il est bon d’être posé dans le monde sans tempête, de ne peser
que le pour…
Luz fleurissait et parlait aux arbres ; quand ils tendaient la main en signe de
Pour manger, ils suçaient aussi des cailloux palmés. Les plus belles
montagnes sont ici dans les cœurs culminants et les chants d’avant Blanche
Neige, avec sa petite sœur d’amour et leur fille sucrée, leur perle d’âme. Il n’est
le mieux de personne, il a Luz et maintenant Perle devant les yeux pour que
appris, toute seule, à écrire avec une pierre sur le dos des poissons. L’œil de
Luz, sur lui, écrivait sans fin à l’univers. Luz étirait le soleil et en faisait un hamac.
baisers et la sucraient dedans. Tout allait bien à la maison, c’est peut-être plus
d’enfants d’eau sortant des failles comme des nés ici ne furent que poissons. Ici,
ce sont des soleils tombés du monde du dessus qui fusent. Ici chez les poissons
Luz l’a épousé et collé aux œufs que pondait leur arbre. Elle voulait une autre
fille, il objectait qu’il était trop tôt pour aller déclarer tant de nouvelles identités.
152
En haut il n’y a pas de plage où rêver les bras mouillés sur la femme et les
enfants, en haut il n’y a rien de bon. En haut, tous les charmes sont rompus. En
haut l’eau ne sait que pleuvoir, ici elle est mieux. Ici, où il n’y a ni drogues ni
alcools, elle leur crame les neurones. Ici, il n’est pas important pour eux de
Luz deviendrait blonde que les enfants et les requins l’aimeraient encore.
Brune, blonde ou blanche, elle aurait toujours la peau douce des arbres d’ici. Ici-
bas tout prenait de la place, les seins de sa folle ne tenaient plus dans ses
mains, ses mains ne tenaient qu’à elle. Et, il y avait la petite Perle qui trouvait de
plus en plus de place en eux. L’Espagne jouait sur le toit de leur maison et ils
aimaient ce vent d’amour qui les unissait. Parfois un naufragé tombait dans le
jardin, comme le plus souvent il n’avait rien à dire dans sa chute ils n’en tenaient
pas compte, l’enjambaient durant quelques jours jusqu’à ce qu’il soit redevenu
sable sans un seul regard d’eux. Tout ce qui laissait leur passion grandir en paix
n’était pas ennemi. Il y eut bien quelques engloutis qui bougeaient encore un peu
à l’arrivée, c’était facile Soleil s’en occupait. Soleil était un bon arbre : potence
Si vous saviez comme ils auraient aimé voir venir un suicidé qui aurait fait
ça pour rien, mais tous coulaient chez eux chargés d’un fardeau qui ne les
intéressait pas. Ce qu’ils aimaient avant tout c’était la générosité, la folie des
flammes, les haciendas qui brûlent parce qu’avec Luz l’été est toujours là. Le
vent de l’eau dessine des tournants imprévisibles que seule Luz connaît par
cœur. Ils sont chez elle, ils s’aimaient et Perle –née Peau Douce- leur disait qu’ils
étaient le meilleur de ce qu’elle avait vu jusqu’ici. Sous vous, chez eux, le sol est
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meuble, amis vous vous y enfonceriez comme des piquets. Luz et lui y sont et y
ont fait Perle, ils n’ont plus le poids de la vie, seuls l’amour et le mystère leur
appuient dessus. Sous la vie, vous ne choisissez pas votre rue, vous ne pensez
à rien d’utile sauf à une bonne révolution qui ferait du haut un nouveau haut. Ils y
avaient cru très fort aussi en haut, prêts à vivre autrement. Comme vous ils ne
voyaient pas d’autre solution. Luz –avant que Perle soit- avait tout essayé. Trop
Luz à la perle bleue disait que ce n’était pas la peine de se faire des trous
aux mains pour avoir un père, que le pire est de faire peur au monde. Quoiqu’ils
tentent ils étaient, au moment même, dans le même temps. No passé à jamais !
Ici il meurt pendu au soleil. Ici, le passé est du temps qui s’est perdu dans leur
jardin.
n’écoutaient qu’eux. Ils n’avaient conquis aucun nouveau territoire, juste un peu
appris de l’eau et du sable sans rien demander à la vie. Cela était déjà bien.
Luz pour le rendre jaloux lui susurrait : « Je ne suis pas une femme, petit,
je suis ta femme. »
Elle était sa femme livrée, son allongée au soleil, la maman de Perle, celle
qui le prie de dire à tous et en une seule phrase où il a mis les autres. Il
s’exécute avec fierté : « Pour toujours Luz est ma femme, celle qui a renvoyé
Blanche Neige aux oubliettes, Dora aux hommes, Camille au destin et Claire au
retard. »
Ça fait du bien.
154
- Papa ?
- Oui Perle, je suis ton père, ton père aux feuilles séchées.
Il dormait sur les bras de sa femme et sa fille, la tête dans l’inconnu, les
Il dort dans son pays et ses femmes adorées, joliment des soleils
presque fou. Presque île en terre. Quand il aperçoit un hasard sculpté en forme
”de” par le temps et la magie, il l’embrasse sur la bouche. Il entend des voies. Il
sait ce qui n’est pas réglé, il sait qu’il n’y a pas de retour pour lui, qu’ils seront en
danger. Tant que les humains seront, il aura peu. Luz et lui ont des tonnes de
souvenirs, six milliards et plus d’êtres humains ne peuvent plus les décicatriser.
Le danger lui dessèche les lèvres. Perle Douce peut, un jour, revenir d’excursion
divers de taxi, une lettre de sa tante, le nom de la rue où elle a trouvé un tube de
Il dort protégé par sa guerrière maure, telle une feuille dessinée trop tôt
l’avenir tremble. Elle est sa toujours debout, son garde du corps quand le corps
tremble. Elle est celle qui lui a donné à boire pour qu’il ne décrive pas trop, pour
qu’il déssoûle simplement en apprenant à respirer où il était alors, elle est le don
dont ses mains ont besoin. Elle est celle où l’on peut dormir pour reprendre des
forces, celle à qui, celle où, celle à qui l’on peut confier ses yeux en sachant
155
Perle s’envola sur son arbre préféré pour jouer, hors d’eux, avec les nids
que l’eau et ses habitants creusent vite dans les crânes des noyés. Alors, étant
moins mère, Luz se coucha contre lui et fit jouer ses doigts dans les cheveux de
son homme, et puis ses lèvres, et puis ses cils, et puis son œil bleu et ses
mémoires, et puis le flamenco et les bulerias, et puis ses seins et les martyrs, le
Il adorait la boire et lui raconter ses ivresses. Elle lui disait qu’elle aimait le
prenait pas trop de risques, s’il n’y avait pas de morts trop vivants entre deux
Ce sera quand la vie voudra. Il y mangera des huîtres, des moules et des
oursins avec vous sur les genoux. Pour l’instant ils sont dans leur eau du bas où
Perle semble pouvoir vivre pour toujours. Cette eau du bas qui veut boire le ciel
et nager sans soif et brûler et fumer et avoir quelqu’un d’elle sur la croix. Cette
eau qui veut être à la table du soleil. L’eau voulait rire. Luz fit pousser un champ
de jacinthes et Perle des fleurs de mer. Pour qu’il ne se mêle de rien mère et fille
lui avaient glissé une amande d’elles dans la bouche. Ses femmes sous la
réveiller les autres, embrassa une endormie sur les lèvres. Baiser volé, baiser
redéposera où il t’a pris. Il croqua l’amande pour boire Luz et Perle, les faire
156
couler dans sa gorge puis, désœuvré, pas foutu de transmuer, déchira une
quand il rentre chez lui. Dans la vague il s’accrochait au fil qui le conduisait à sa
maison et avançait. Il savait qu’au bout Luz donnait le sein à Blanche Perle. Il
avait envie de les tenir toutes les deux par la main et de voler vers où ils
prépare du bonheur sans limite. Il a froid aux pieds donc mal aux orteils, quand il
arrive, Luz lui en coud des neufs. Elle le cajole, lui répète qu’elle sait d’où il vient,
que le repas est prêt et servi sur la table que gardent les poissons. Tout est
Maintenant, leur douce enfant, leur Perle adorée construit des cathédrales
et leur demande des conseils pour. Ils lui disent de faire l’amour aux pierres pour
qu’elles se souviennent qu’elles sont. Elle leur rappelle qu’elle n’a pas de
Cette nuit-là, ils prirent Perle dans leur lit et la couvrirent d’amour sur sa
peau claire. Cette nuit-là ils ne firent pas le monde autrement, ils bercèrent
- Je fais comme vous, je marche sur les braises de l’amour. J’ai, peut-être,
été un peu cassée à la naissance... Papa, il y a une fleur qui t'aime bien.
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Ça fait du bruit, ça galope en Luz, ça fait des trous dans le corazon, c’est
Perle est belle comme le cœur des pures, leur miracle à protéger contre
vents et marées, mais Perle saigne du nez. La mer est rouge et il n’y a rien au-
dessous d’eux.
A trois, ils vont jaillir de l’eau rouge du dessous de Cabourg. Ils vont aller
partager. Ô Perle, ma Bulle née en mai, Perle pas enfantée mais faite par le
bonheur…
Ils regardèrent leur royaume dur à quitter. Bulle aux multiples prénoms mit
le feu à la maison. Luz cherchait des bagages à remonter, il n’en voyait pas. La
magie pouvait, sûrement, arranger ça. Perle était pressée, lui vidé. Luz s’arracha
C’est un mérou, vieux et glauque, qui ramena sa fraise : « Ici, il n’y a que
des poissons qui chantent et des parfums sans fleurs, les seules portes sont
celles de mes ouïes, vous avez rêvé les enfants, l’amour vous a tourné les
sens. »
Les paroles de Mérou des sables noirs laissaient un froid dans leur jeune
sang d’eau. Ils sont au grand complet, ils sont trois et à trois ils ne peuvent se
perdre.
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Luz shoota dans le mérou pour le renvoyer d’où il s’était permis
d’apparaître : « Ici, c’est moi qui décide qui peut venir nous parler d’amour. »
Cette femme est l’évidence, les murs bleus et les fleurs blanches.
créatrices de Luz, peignons la mer comme des fauves et, quand Luz le sentira,
Luz la devina et leur dit que le plus dangereux serait de partir d’ici sans
bagage, « sans le strict minimum vital » précisa-t-elle. Elle rajouta qu’elle allait
leur remettre la tête à l’endroit pour qu’ils oublient qu’ils ne sont pas.
Ils se soumirent à son massage crânien. Elle leur trouva des failles
retournées, des trous oubliés que ses doigts pouvaient inverser. Elle cherchait et
jetait les cérémonies, les reliquaires, les sifflets et les masques imprésentables
en haut. Elle noyait la magie dans l’océan de sa bonne volonté. Ses seins se
déplaçaient et lui couraient dessous des pieds à la tête. Ça faisait un peu peur à
Perle, pour elle la magie était beaucoup plus naturelle : elle était ce qui lisse
l’eau, pas ce qui fait des bosses à sa maman. Quand Perle se referma, Luz lui
Lui, doutait qu’il y ait en Perle une faute à trouver, même par anticipation ou
repentir. Luz leur apprenait qu’ils n’étaient pas assez attachés à ce qu’ils
croyaient et que c’était pour cette raison qu’ils avaient si souvent peur de tout.
Les doigts dans les cervelles elle les soignait et gagnait le temps qu’il faut en
159
extraire et ne pas mourir. Il l’aimait au plus profond des ongles. Aimée elle leur
sortait des têtes de la tête, des plombs des nageoires et des vers de la bouche.
Sa femme parle aux couleurs et à une petite valise. Et les vents et les
couleurs, la petite valise et les liens de l’amour savent ce qu’elle dit. Et, ça fait le
bonheur qui le calme plus que tout. Perle fond et rêve en des rêves d’amour, des
rêves à elle.
Ami, entends-tu, après coup, la pureté qui passe ? Entends-tu les mains de
Luz qui chante devant toi ? Vois-tu ce monde sous-marin qui éteint ses lumières
pour ne garder que les doigts de Luz ? Tout le monde veut garder Luz et Luz
n’est qu’à elle, qu’à lui, qu’à leur fille. Luz est libre. Il pense à tous ceux qui sont
seuls et ont froid aux bras, il pense aussi à ses amis les arbres qui ont froid aux
oiseaux. Il nage dans sa tête, les poumons palmés et les cheveux au vent. Il est
l’accompagnent, il se sent attendu par des fronts où Luz laissera toujours une
mèche de cheveux luire. Encore une fois il lui fait l’amour avec les nageoires,
dans cette eau où tout était si bon quand le temps s’y était perdu. Encore une
fois tout va être neuf, il sera bon de vivre et de s’écouter aimer. Dans les bras de
Elle lui donna sa langue et le temps de la manger. Les adieux à l’eau nageaient
entre deux cieux. Elle prit ses yeux entre ses mains et les embrassa tendrement.
160
Luz : - On y va !
Ne bouge pas Cabourg ! Ils arrivent où personne ne les attend. Ouvrez vos
cœurs. Ils remontèrent, Perle cachée dans la bouche, tantôt de l’une, tantôt de
l’un. Ils sortirent en plein printemps loin de la mer et de la plage et posèrent Perle
sur une feuille ouverte, près d’un grain de rosée. Déjà, elle se ridait sans se
plaindre : « Maman… »
Maman Luz le regardait pour que ce soit lui qui la sauve : « C’est dans la
valise. »
Il ne voyait pas de valise. Il était en train de passer à côté d’une des plus
Luz était en larmes : « Pauvre père de ta fille, tu n’avais même pas pensé
redonna la vie à Perle. Puis, elle se lécha la plaie et lui balança la valise à la
gueule.
Le pire de tout fut quand Luz , visiblement, s’est dissoute devant ses yeux,
Il a attendu longtemps que le miracle revienne dans l’autre sens, lui tombe
dessus. Il a imploré leur pardon, il les a appelées dans toutes les langues. Il a
voulait nulle part et tout lui interdisait de mourir. Doit-il dorénavant vivre avec ses
161
Ça va être celui-là son nouveau monologue ? Lui qui rêvait d’aimer sa
femme comme le meilleur des hommes se demande qui l’attend dans son dernier
aussi il doit partir, les coups de fourche dans le cul ne sont plus de son âge. Il
n’est toujours pas arrivé au bout et Luz est dans d’autres mondes. Merde, c’était
Il trace la route sans être ému par les étoiles, il y en a deux qui devraient
être à ses côtés. Plus ça va, plus c’est loin. Que la vie et d’autres racontent Paris
si ça les amuse, lui ne parie plus sur rien. La folie de son amour est plus grande
que la folie des fous. Il faut bien arriver au bout de ce désamour quoi qu’il arrive.
Il a tout appris en vous racontant sa petite vie d’homme, il doit conclure loin de
témoin, Perle, juste ton goût sur ses joues, les phares de ta mère dans sa
gueule, le prix à payer pourvu que vous viviez. Et, tous ces cheveux de Luz qu’il
retrouve dans ses poches… Et toutes ces heures qu’il ne te prendra pas… Tu
Il se dit qu’il a toujours aimé tout de suite pour ne pas avoir à attendre un
horoscopes à la con… Il n’a plus personne et sait très bien que c’est son passé
qui commence à défiler devant ses yeux : il a été un tueur en forme, le garçon et
162
femmes. La dernière l’a traversé et posé sur l’ourlet des miracles, pour lui c’est le
bout du chemin.
Tiens… encore un pont par lequel il faut passer. Il y a des dangers qu’il
croyait morts. La vie est difficile dans les deux sens et tous les ponts ont les
mêmes défauts.
naissance. Ça défile, il veut aimer le miroir et non son reflet. Miroir, son laid
l’être, c’est que tu n’es pas digne de l’amour. Tuer n’est pas tuer la mort, tes
guerres saintes ne valent pas un clou. Les distances que tu as trouvées pour
Mistigri de Camille ne le sait pas. Mon vieux chat, j’aimerais que tu épouses
Perle, que tu lui fasses des enfants lions loin de mes mains, de ma mer, des
nombres pairs, de l’hiver, que tu les fasses dans la jungle de vos trois cœurs, en
vrai, en spirale, pour moi. Il me plairait aussi que tu ailles faire régulièrement pipi
163
dans les chaussures de Blanche Neige, que tu lèches quotidiennement les doigts
numéro un, que tu sois le chat de Luz. J’aimerai, mon chat être près de toi quand
je serai au paradis des chats. J’aimerai aussi qu’avec mes doigts tu serres la
grands-pères.
J’aimerai, chat, que tu trouves Claire, que tu vois loin, que tu protèges
Colombine et Mlle B., que tu te blottisses dans les yeux de Dora et le front de
Claire. J’aimerai que mon paradis des poètes soit avec toi, mon chat, ma
souviens des rats que nous débusquions à deux chez Camille. Je me souviens
de ton frère aussi qui m’accompagnait dans les champs quand j’étais petit
homme et qui m’a fait ainsi, ainsi, plus vous que chien dans l’ordre des ans et
l’œuvre de la vie. Mon chat, sans toi je serais quoi au paradis des puces ? J’y
suis presque, ni abyssin ni de gouttière et je crois à ton ciel, à tes étoiles et à tes
soleils.
fait bouger de rares nuages venus de la mer. Les mots se nouent en tendant une
toile aux poings serrés, aux langues sèches et dures comme des os. Il n’en veut
pas pour peindre Perle et Luz. Il aimerait tant avoir réalisé, une fois dans sa vie,
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un portrait d’amour… Mais là, ce serait de l’amour cannibale qui, trou dans la
un matou qui fait le gros dos, la grosse queue, les gros yeux, les gros poils, les
grosses dents, les grosses babines, un bon gros matou qui sort de ces lignes et
s’assied sur le livre que vous êtes en train de lire. Il s’appelle « Gros Manitou » et
vous empêche de tourner les pages, il peut aussi en faire des confettis que le
boosté par le ”Destop” des sentiments. Il avale tout cet œil perfide, aussi bien les
petites grenouilles d’un premier bécot que les bisons de la passion et les
où, il va où l’amour ? Dans l’herbier de qui est-il étiqueté, une épingle dans
chaque aile et un clou dans le dos ? Qui est ce collectionneur ? A-t-il aussi des
Il n’a plus Luz pour lui inventer la vie, ni Perle pour être fier de lui.
Sur une route dure sous ses pieds encore un peu poissons des visages
affluent. Il y reconnaît sa sève qui a pleuré dans les bras d’elles, sa lèvre
cherchant la leur, leurs yeux. Il y voit le bout du reflet de Blanche Neige sur
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souvenir chaud de la petite main de Perle dans la sienne. Que d’amour… Merci à
la vie bleue qui a si souvent su le relever. Merci aussi aux voleurs de Dieu et de
défiler.
Est-ce qu’il parle ? Est-ce qu’il braie ? Il vient de se manger les oreilles, de
te passer, ma Luz, la main dans les cheveux. Il marche avec ton sexe dans ses
mains et vous brillez tous les trois dans un doute-horizon de mer et de poissons.
tremblants que, alors qu’il ne s’attendait à rien, une bonne brise marine vient
Luz : - Perle, sa bulle, sa claire, nous nous sommes fait une vie comme
personne et c’est en admirant l’amour que nous avons peint cette idée de nous
trois. Soleil était nos campagnes, tu faisais de la botanique, nous étions le feu, la
fête, nous étions l’un à l’autre et à trois plus forts que tout. Nous avons connu la
lumière qui sort des cœurs, nous ne voulions pas être partagés ni qu’on nous
posés dessus.
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Luz avait tous les dons, savait comment il entrait et sortait, lui avait fait faire
son plus grand voyage, l’avait aimé dans la vie et même se souvenait de lui.
À l’œuvre !
très loin. Il avance. Elles sont son étoile du berger, son signe venu de l’eau. Il
entre dans Cabourg et se l’enfile jusqu’à la plage. Maintenant, c’est tout droit…
Alors, se dire qu’on peut bien s’asseoir un peu sur le sable pour regarder le défilé
de plus en se concentrant avec Mistigri et Gros Manitou sur la fin près de Luz et
Perle.
Il commence à s’ennuyer, la fin du corso de ses vies est assurée par des
deuxièmes couteaux. Des chevaux même pas bons pour l’abattoir, des chiens à
vieilles bourges, des papillons aux ailes fades, des forgerons d’opérette, des
cathédrales en carton-pâte, des lépreux de carnaval, des boîtes et des bars sans
défoncés, des flics rigolos, des fers à souder qui ne collent rien, des blacks made
in America, des homos parce que déguisés, des dieux de catéchisme, des étaux
en caoutchouc, des cordes en papier crépon, des putes de douze ans, des macs
d’artificiers, des pendus qui se marrent, des cécités à la pirate, des anges qui ont
des ailes, des saintes qui draguent, des coquillages en sucreries, des histoires
d’amour qui finissent bien, des fleurs qui n’ont rien à dire, des spirales qui
n’aspirent pas, des ponts immobiles, des réveils qui ne passent jamais sur quatre
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heures du matin, des cloches en barbe à papa, des déserts sans profondeur, des
cailloux sans histoire, du miel sans sucre, des dolmens sans histoire, des forêts
sans papier ni incendies, une chanteuse sans trac, des chats sans amour dans
les yeux, des poubelles vides, des bains sans plaisir, des fesses sans promesse,
des avions sans rêve, des indiens sans passion, des sacrifices sans sang, des
refrains sans chanson, des étoiles sans souvenir, une veste rouge pour lui, un
œil bleu mais pas turc, juin et juillet qui n’ont jamais entendu parler de Luz, des
souris qui ne font rien pour les dents perdues pour toujours, des oueds pour
lèvres qui ne se mange pas, un sosie de Luz sans pouvoirs, Spermato Premier
pas jaloux, et puis, et puis, plus d’images : rien que le bien de Luz, Perle et lui…
ne t’ai pas quitté, j’ai fait mon dernier tour de magie. Tu es un homme qui va
vie. Ne t’en fais pas, Perle est une fille de sang et de corps aujourd’hui, elle
ressemble aux autres mais a les yeux de toi. Elle voit, rien n’est fini, je t’aime.
Je l’aime.
Il se prit pour Venise et, avec ses chats, marcha dans la mer jusqu’à sa fin.
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Que sa vie, mangée par l’eau de la mer, le dos tourné à Cabourg, devienne
du sel pour l’amour de tous et apprenne à faire désaimer toutes les Blanches
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