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UNIVERSITE PARIS 7 – DENIS DIDEROT

UFR DE MATHEMATIQUES
PREPARATION CAPES 2004 – 2005

NOMBRES REELS

I. Préambule
L’histoire des nombres réels remonte à l’antiquité grecque. A cette époque, seuls les entiers
positifs ont le statut de nombre et une théorie des grandeurs permet de gérer le continu. Cette
théorie, élaborée par Eudoxe au Vème siècle avant J.C. et reprise dans le livre V des Eléments
d’Euclide, permet de comparer et additionner des grandeurs, de comparer et multiplier des
rapports de grandeurs de même nature. L’unification du domaine numérique sera longue et
difficile. Ce n’est qu’à la fin du XIXème siècle, avec « l’arithmétisation de l’analyse », que
seront élaborées des constructions du corps des réels à partir des entiers et des rationnels.
Dans les deux paragraphes suivants, sont présentées très brièvement deux d’entre elles : celle
par les coupures de Dedekind (1872) et celle par les suites de Cauchy proposées par Heine et
Cantor (1872) (pour plus de détails, et en particulier les preuves que l’on obtient bien un corps
satisfaisant la propriété de la borne supérieure – voir plus loin la définition axiomatique – on
pourra se référer à [1]).

II. Construction par les coupures de Dedekind


Une coupure est une partition du corps Q des rationnels en deux parties non vides A et B
satisfaisant les conditions suivantes :
1. Tout élément de A est inférieur à tout élément de B.
2. B n’a pas de plus petit élément.
L’ensemble des réels R est alors défini comme l’ensemble des coupures.
On définit sur cet ensemble une relation d’ordre en posant :
(A,B) ≤ (C,D) ssi A ⊆ C
De même, on définit une addition et une multiplication en posant :
(A,B) + (C,D) = (E,F) avec E = {s+s’ / s∈A et s’∈C}
Si (A,B) ≥ 0 et (C,D) ≥ 0 , (A,B) x (C,D) = (E,F) avec E = {s.s’ / s∈A et s’∈C}
On étend ensuite la multiplication à des réels de signe quelconque via la règle des signes.

Exercice 1 : Montrer que R ainsi défini est un ensemble totalement ordonné vérifiant la
propriété de la borne supérieure.
Exercice 2 : Montrer que Q peut être plongé dans R, que l’ordre et les opérations définis ci-
dessus prolongent bien l’ordre et les opérations sur les rationnels.

III. Construction par les suites de Cauchy

On considère l’ensemble S des suites de Cauchy de nombres rationnels muni des opérations
d’addition et de multiplication usuelles et on définit sur cet ensemble la relation d’équivalence
suivante :
(un) ∼ (vn) ssi limn→∝ (un-vn) = 0
R est alors défini comme le quotient de S par cette relation d’équivalence.

Exercice 3 : Montrer que Q peut être plongé dans R ainsi défini et que R contient strictement
Q.
Exercice 4 : Montrer que si (un) est une suite de Cauchy de rationnels qui ne tend pas vers 0, il
existe un réel a>0 tel que, pour N suffisamment grand, on ait soit : ∀n>N un<-a , soit ∀n>N
un>a. En déduire un ordre total sur R.
Exercice 5 : Montrer que l’addition et la multiplication des suites de rationnels se prolongent à
R.

Les nombres réels peuvent être construits ; ils peuvent aussi faire l’objet d’une définition
axiomatique.

IV Définition axiomatique du corps des nombres réels


On admet l’existence d’un corps R satisfaisant les axiomes suivants :
1. R est totalement ordonné.
2. R contient Q.
3. Toute partie de R non vide et majorée admet une borne supérieure.

On peut démontrer que le corps R ainsi défini est unique à un isomorphisme près et que Q est
dense dans R. En fait, pour tout réel non nul a, aQ est dense dans R ; on en déduit
immédiatement que l’ensemble des irrationnels est lui aussi dense dans R.

Exercice 6 : Monter que R ainsi défini est archimédien (∀a>0 ∀b>0 ∃n∈N n.b > a) et que,
pour tout nombre réel x, il existe un entier et un seul (appelé partie entière de x et noté E(x))
tel que : E(x) ≤ x ≤ E(x)+1.

La propriété 3 ci-dessus exprime la complétude de R. Cette complétude peut s’exprimer sous


diverses formes équivalentes dans un corps K totalement ordonné, en particulier les
suivantes :
a) Toute partie non vide et minorée a une borne inférieure.
b) Toute suite croissante majorée converge.
c) Toute suite décroissante minorée converge.
d) K est archimédien et l’intersection de toute suite décroissante de segments emboîtés
dont la longueur tend vers 0 est non vide et réduite à un point.
e) K est archimédien et complet.

Exercice 7 : Montrer que les propriétés ci-dessus sont bien équivalentes à l’axiome de la
borne supérieure.

V Nombres réels et développements décimaux


N
Un nombre décimal est un nombre rationnel qui peut s’écrire sous la forme , avec N entier
10k
relatif et k≥0. Il s’ensuit qu’un nombre rationnel est décimal ssi, mis sous forme irréductible,
son dénominateur est de la forme 2p.5q.
Soit (an) une suite telle que a0 soit un entier naturel et les ai, pour i>0, soient des entiers
a
compris entre 0 et 9 inclus. On lui associe la série de terme général nn. Cette série à termes
10
1
positifs a un terme général majoré, pour n>0, par n-1 qui est le terme général d’une série
10
géométrique convergente, donc elle converge vers un réel. a0,a1….an… est appelé le
développement décimal illimité de ce réel. La généralisation aux réels négatifs est immédiate.
Les réels décimaux ont deux développements l’un se terminant par une infinité de zéros et
correspondant à leur écriture décimale usuelle et l’autre se terminant par une infinité de 9 (1
s’écrit ainsi : 1,000… et 0,999…).
Les réels non décimaux ont, eux, un seul développement illimité. La partie entière de a.10n,
divisée par 10n, donne le développement tronqué à l’ordre n du réel a.

Exercice 8 : Montrer qu’un nombre réel est rationnel ssi il admet un développement décimal
illimité périodique.

[1] C. Houzel (1996). Analyse Mathématique. Paris : Editions Belin.

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