la loi autant que le roi ! ». Cette corporation
Le parcours du jeune garçon coïn-
aura effectivement un pouvoir grandissant,
puisqu’en 1221 elle obtiendra le privilège de
basse-justice. Les marchands d’eau sont à l’ori-
gine des prévôts des marchands, lointains ancê-
tres du « maire » de Paris : la nef et la devise
présentes sur le blason sont un vestige explicite
de ce passé fluvial et commerçant.
Les bâtisseurs de Notre-Dame peut également se
lire comme un roman d’apprentissage. Les
aventures d’Aubri sont une invite à la lecture, et
son âge (12 ans à peine au début du récit) per-
met au jeune lecteur de s’identifier à lui. De fait,
suivre l’évolution du héros, c’est grandir avec
lui, partager les difficultés des relations avec les
adultes, éprouver les premiers émois amoureux
et les premières désillusions sur le monde « des
grands ». Les obstacles sont présentés comme
autant d’épreuves nécessaires à la construction
QUESTIONNAIRE
A) L’Occident chrétien
1) L’Église : les clercs
Donnez les définitions de clerc, laïc, pape.
Par qui le pape est-il désigné, quels sont ses pouvoirs ?
Qui prononce l’interdit ecclésiastique ? Quelles sont
ses conséquences lorsqu’il s’applique à une person-
ne? À un royaume ?
Les églises et les abbayes sont des « lieux d’asile » :
que signifie cette expression ?
Par quel autre mot désigne-t-on une abbaye ?
Pourquoi appelle-t-on les moines que rencontre
Aubri des « moines blancs » ? Qui a fondé l’ordre
de Cîteaux ? Qu’est-ce qui caractérise les bâtiments
construits par les moines de Cîteaux ?
Au cœur d’une abbaye se trouve le cloître, à quoi
sert-il ?
En dehors de la vie monastique quelles sont les acti-
vités des moines ?
Donnez la définition d’évangéliste. Dans la Bible
chrétienne quels sont les quatre évangélistes ?
Quand les artistes les représentent en peinture ou
en sculpture ils sont généralement associés à un
symbole, quel est le symbole de chacun des évan-
gélistes ?
2) Une chrétienté conquérante
En Europe, dans quels pays et contre qui les chré-
tiens se battent-ils pour que triomphe leur religion ?
Quels sont les noms donnés aux habitants de
l’Espagne musulmane ?
Donnez la définition du mot croisade.
Pourquoi des croisades ont-elles lieu en Orient ?
Quand a eu lieu la première croisade ? Quel succès
a-t-elle remporté ?
de l’individu.
cide avec sa quête d’identité : loué comme un
vulgaire outil dès sa plus tendre enfance, il
deviendra une personne dès lors qu’il recouvre
sa liberté ; libre de sa vie, responsable de ses
choix, il finira par trouver sa vocation, et donc
sa place dans la société.
Un « fil rouge » entre deux disciplines.
À l’aide du roman et de leur livre d’histoire,
on peut demander aux élèves de se livrer à
quelques recherches à partir d’un questionnai-
re, que nous proposons ci-dessous. Sa place sera
définie par les professeurs : soit comme liaison
entre la séquence de français et le cours d’his-
toire, soit comme évaluation finale, soit comme
point de départ de recherches individuelles et
interdisciplinaires pour élaborer un dossier.
Gisèle Dronne, professeur de lettres,
Nicole Rastetter,professeur d’histoire.
Citez deux ordres de moines-soldats qui assurent la
défense du tombeau du Christ à Jérusalem et des
États chrétiens en Orient.
À quelle croisade le roi Philippe Auguste participe-t-
il ? Avec quels autres souverains européens ? En
quelle année ? Quel est le but de cette croisade ?
3) La construction des cathédrales
D’où vient le mot « cathédrale » ? Où sont donc
construites les cathédrales ?
Sous le règne de quel roi la construction de Notre
Dame de Paris a-t-elle commencé ? Quel est le nom
de l’évêque qui décida de sa construction ?
Donnez un synonyme d’ « imagier » ? Quels outils
utilise-t-il ?
B) La ville de Paris
Décrivez ce que voit Aubri depuis la colline Sainte
Geneviève ? Comment l’enceinte se présente-t-
elle ? Qu’y a-t-il au milieu du fleuve ? Où sont situés
le palais du roi , la nouvelle cathédrale ?
L’espace enserré dans les remparts est-il entière-
ment construit ?
Pourquoi les eaux de la Seine sentent-elles mau-
vais ? Quelle est l’origine de ces déchets ? Quel est
le travail de ces artisans ?
À quoi servent les enseignes placées dans les rues ?
Quels sont les dangers de la rue ? À quoi servent les
sergents du guet ?
Où Gautier a-t-il pu voir Lys et Juan avant de les
retrouver chez Étienne Garnier ?
Quel est le métier d’Étienne Garnier ? À quelle cor-
poration appartient-il ? Donnez la définition de cor-
poration ? La corporation à laquelle appartient
Garnier est-elle importante ? Pourquoi ?
Classe de collège
Les bâtisseurs de Notre-Dame
L’auteur : Jacqueline Mirande est née dans le Bordelais. Après
des études d’histoire à Paris, elle épouse un marin et fait de
nombreux voyages dans le monde entier. Elle imagine alors des
histoires pour se distraire, et, de retour à Paris, elle les écrit !
Ainsi sont nés Le perroquet bleu, Viva Isabel, Julie-Égalité et de
nombreux Contes et légendes (de Paris, du Pays d’Oc). Pour la
jeunesse, elle s’est rendue célèbre par ses romans historiques.
Chez Pocket Jeunesse : La promesse des croisés (collection
« Les romans des légendes »), Le cavalier, Sans nom ni blason,
1848, la fille des barricades.
Pocket Jeunesse
Le choix du héros : de la réalité à la fiction
Grand Format
N°22 - Mai 2006
Jacqueline Mirande elle-même explique comment elle a créé son héros, Jean de Vitry, en
tenant compte d’un double impératif : romanesque et historique.
Collège Collège Collège Collège Collège Collège
Si nous sommes bien renseignés sur l’évêque de Paris, Maurice de Sully, qui fut l’initiateur du pro-
jet de construction de la cathédrale Notre-Dame de Paris, nous ignorons tout de celui qui en conçut
les plans.
La première « signature » de maître d’œuvre qui nous soit parvenue est celle de Jean de Chelles,
apposée à l’extérieur du transept sud, en 1258. Or, la première pierre ayant été posée en 1163 par le pape
Alexandre III, on peut bien imaginer que, pendant toutes ces années, la construction de l’édifice néces-
sita la présence successive d’au moins deux architectes, demeurés tout aussi inconnus que le premier.
Dans de telles conditions, et pour rendre le roman plus intelligible à de jeunes lecteurs, j’ai pris la
liberté de donner un nom à l’un de ces maîtres d’œuvre et j’ai choisi celui de Jean de Vitry, en
m’inspirant de la pratique alors en usage : un prénom suivi du nom du lieu de naissance (tel Jean de
Chelles, Pierre de Montreuil, etc.).
L’action se déroulant au retour de croisade du roi Philippe Auguste, il m’a paru intéressant de
donner à cet architecte un passé en Syrie franque – ce qui pouvait rendre plausible le choix que le
roi faisait de lui.
La cathédrale Notre-Dame de Paris fut définitivement achevée en 1345. Mais, déjà en 1196 le choeur,
la nef et le transept étaient construits, en 1208 la construction et la décoration des portails et de la faça-
de achevées. Et en 1239, quand le roi Saint Louis vint l’inaugurer, la tour sud était terminée et la tour
nord très avancée. Elle sera achevée en 1250 ainsi que la galerie reliant les deux tours.
Les façades nord et sud du transept seront, à partir de 1258, l’œuvre de Jean de Chelles, puis de
Pierre de Montreuil, ainsi que, plus tardivement, les arcs-boutants.
Niveau : Classe de cinquième, dans le cadre d’une séquence interdisciplinaire français/histoire.
Quelques réflexions sur le travail des compétences plus que des contenus. »
en interdisciplinarité. « L’approche faite en liaison avec le programme
Les Instructions officielles pour le collège d’histoire est comprise comme une contribution
préconisent très explicitement un échange entre réciproque des deux disciplines l’une à l’autre :
les deux disciplines : la lecture des textes a pour de même que la connaissance de l’histoire éclai-
objectif général « la constitution d’une culture re la lecture d’une œuvre en la contextualisant,
commune » et s’organise « souvent en relation de même cette lecture donne souvent de la chair
avec la progression mise en œuvre en histoire ». et de la vie à des connaissances historiques. »
Dans les « Accompagnements de programme en
français » une partie spécifique est consacrée à Objectifs
l’interdisciplinarité (pp.93 sqq.). Quelques Ce travail en commun montre que des
extraits ici, pour aller à l’essentiel : « La relation connaissances historiques sont nécessaires pour
entre les disciplines au collège consiste à croiser comprendre les choix de l’auteur. Elles aident à
Les bâtisseurs de Notre-Dame
situer le cadre du roman, à en apprécier toutes
les allusions, toutes les nuances, à mieux com-
prendre l’évolution des personnages.
Pour mettre en œuvre cette approche, il
convient que les professeurs de lettres et d’his-
toire s’informent mutuellement sur les pro-
grammes et les méthodes à acquérir. Les pro-
grammes d’histoire étant soumis au respect de
la chronologie, c’est donc le professeur d’histoi-
re qui choisira le moment où, dans l’année sco-
laire, ce travail en interdisciplinarité pourra être
effectué. Cependant, tout en respectant le pro-
gramme officiel et ses horaires, il garde une cer-
taine liberté pour décider alors quelles parties
de ce dernier pourront être privilégiées voire
rapprochées pour être en cohérence avec le tra-
vail prévu en français.
Le programme d’histoire de 5ème prévoit l’é-
tude de la chrétienté occidentale en 13 à 14 heu-
res. Il comprend trois parties : la société médié-
vale, l’Église en Occident, le royaume de
France à partir du Xe siècle. Le cadre historique
de ce roman permet d’accompagner le travail
effectué en français.
En raison du thème central du roman on insis-
tera sur le mouvement artistique du Moyen Âge.
D’une grande ampleur, il exprime la foi en Dieu
et répond aux besoins spirituels d’une popula-
tion plus nombreuse. La splendeur des cathédra-
les au cœur des grandes villes témoigne de la foi
de toute la société, mais aussi de la puissance de
l’Église médiévale. Les décors sont conçus
comme des offrandes à Dieu, préfigurant la beau-
té du Paradis. Des scènes tirées de la Bible sont
représentées sur les sculptures des portails et des
chapiteaux, sur les fresques des murs et des voû-
tes et sur les vitraux des fenêtres. Au XIIe siècle
l’art gothique naît et se développe d’abord en Île
de France. Il correspond à une évolution due à
une meilleure maîtrise des techniques. La croisée
d’ogives reposant sur des piliers soutenus à l’ex-
térieur par des arcs-boutants renforcés par des
contreforts permet l’élévation de la voûte.
L’utilisation de l’ouvrage Naissance d’une cathé-
drale de David Macaulay aux éditions de l’École
des Loisirs, présent certainement au CDI, appor-
tera des compléments précieux sur le travail de
l’architecte, ses choix techniques, les procédés
employés, les outils utilisés par chaque atelier.
Philippe Auguste accède au trône à quinze
ans en 1180. Le domaine royal a été agrandi par
ses prédécesseurs mais il reste bien petit face
aux possessions du roi d’Angleterre. Ses luttes
contre Richard Cœur de Lion, puis son frère
Jean sans Terre, marquées par la victoire de
Bouvines en 1214, lui permettent d’arracher la
Normandie, l’Anjou et le Poitou aux rois
anglais. À sa mort le domaine royal s’est consi-
dérablement agrandi. Sa popularité est d’autant
plus grande qu’il lutte contre les grands féodaux
en affermissant le pouvoir royal. Il veille à l’em-
bellissement de Paris en créant des halles, des
fontaines, en faisant paver les rues principales.
Il dote la ville de remparts (1190-1213) et com-
mence la construction du Louvre dont la tour
fortifiée fait partie du système défensif. Un site
Internet sur Philippe-Auguste (www.philippe-
auguste.com) donne des indications précises sur
l’emplacement de l’enceinte dont on peut aper-
cevoir encore quelques restes… Cependant ses
aventures matrimoniales, en particulier la répu-
diation d’Ingebord du Danemark, puis son
remariage avec Agnès de Meran, ont pour
conséquence de voir le royaume de France frap-
pé d’interdit par le Pape Innocent III en 1200.
Cette sanction ecclésiastique crée une grande
inquiétude parmi la population car les lieux de
culte sont fermés et les sacrements - sauf le bap-
tême - ne sont plus administrés. Le roi doit se
soumettre et pour obtenir la levée de l’interdit
feint de reprendre sa femme répudiée.
On peut donc situer l’action entre deux limi-
tes historiques précises : 1195, Philippe Auguste
a trente ans ; 1199, Richard Cœur de lion meurt.
Pistes d’exploitation
La séquence de français demande la lecture
préalable du roman.
Les constituants du récit
On cherche à reconstituer avec les élèves le
schéma narratif du roman, afin d’établir une
vision d’ensemble du texte : ils apprennent à cir-
culer dans l’œuvre et à exploiter les titres de cha-
pitres. Ils peuvent ensuite rédiger un résumé.
Cela permet également de mettre en évidence les
chapitres clés et les passages que le professeur
étudiera plus en détail. Ainsi, au premier chapit-
re, les élèves font connaissance avec Aubri, et, au
Les bâtisseurs de Notre-Dame
même rythme que notre héros, ils vont à la ren-
contre de nouveaux personnages.
Le portrait du héros sera complété au fil des
séances, afin d’étudier l’évolution du jeune gar-
çon au sortir de l’enfance : sa transformation
naturelle d’adolescent s’accompagne de change-
ments importants liés aux rencontres et aux
choix de vie du jeune homme. La fin du chapitre
3 crée ainsi un effet d’attente : l’avenir d’Aubri
est incertain, il ne peut être sculpteur dans une
abbaye cistercienne, puisque les lois de l’ordre
rejettent toute ornementation ; le départ de frère
Laurent pour Senlis marque un tournant : le
héros doit changer de « père spirituel » et la figu-
re du grand architecte, Jean de Vitry, se profile à
l’horizon. Deux éléments semblent symboliser ce
parcours : l’oiseau de bois qui devient un objet
fétiche, et la prédiction de la vieille Ada (ch.2 :
« beaucoup de pierres, des épées et du sang »).
Les personnages semblent se répartir autour
d’Aubri selon deux axes : Laurent, Jean de Vitry
ou Etienne Garnier sont liés à la sphère
« publique » du jeune homme, puisqu’ils inter-
fèrent dans son parcours dans la société de l’é-
poque, tandis que Lys ou Pernette appartiennent
à la sphère privée, affective. On pourra néan-
moins suivre le schéma actanciel, où Robert de
Dreux se révèle comme le modèle de l’opposant
(« L’enlèvement de Lys », ch. 11). Dans un
second temps, on envisagera la dimension his-
torique des personnages, premier jalon pour
définir le genre du roman : le Pape, Philippe
Auguste, Richard Cœur de lion, Jean sans terre
ou Robert de Dreux sont des personnes réelles,
tandis qu’Aubri, Lys, ou encore le frère Laurent,
comme Jean de Vitry sont ces « êtres de papier »
nés sous la plume de Jacqueline Mirande.
Des lectures complémentaires offrent des pro-
longements possibles, les élèves peuvent ainsi
faire des liens avec d’autres textes, plus littérai-
res, et des personnages devenus des mythes. La
danse de Lys fait inévitablement écho à la belle
Esméralda (Victor Hugo, Notre-Dame de Paris,
Livre II, ch. 3).
L’étude du cadre est l’occasion d’aborder
la notion de « couleur locale » : les élèves pour-
ront ainsi relever et classer les éléments qui ren-
voient au Moyen Âge, en parallèle ou grâce au
questionnaire proposé ci-dessous. Le chapitre 2
fait ainsi découvrir l’univers de l’abbaye ; au
chapitre 5, notre héros découvre le Paris de
Philippe Auguste et le chantier de Notre-Dame.
L’apprentissage de la description, au program-
me de cinquième, peut prendre appui sur les
passages qui ancrent le récit dans un contexte
historique. Au premier chapitre, la rencontre
entre le héros et les « baladins » se déroule dans
une forêt, lieu par excellence du danger à cette
époque : repérer son champ lexical (outil du dis-
cours descriptif) permet de mettre en évidence
que l’enjeu de la description est bien ici de créer
une atmosphère. Au chapitre 5, on peut s’arrê-
ter sur l’emploi des temps verbaux : « les
cloches avaient déjà sonné deux fois… Aubri
fit quelques pas dans le jardin… il était
étroit...Aubri s’approcha, les bruits de la fête lui
parvenaient, assourdis. » Le professeur aura
ainsi un choix très large d’exemples au sein du
roman pour aborder les outils de la langue.
Les enjeux : roman historique ? roman d’aventures ?
roman d’apprentissage ?
Le travail en interdisciplinarité met d’emblée
l’accent sur la dimension historique du roman :
le statut des personnages, le cadre de l’action
permettent de définir le genre littéraire auquel
appartient Les bâtisseurs de Notre-Dame. C’est la
société médiévale des années 1190 qui prend
chair et vie à travers les aventures du jeune
Aubri. Les faits historiques sont à exploiter avec
la classe : étudier certains personnages demande
aux élèves un travail de recherche documentaire,
et éventuellement ouvre sur la production d’une
biographie ou d’une frise (savoir replacer les
événements est une compétence évaluée au
Brevet des collèges).
Pour les élèves parisiens ou franciliens, c’est
aussi l’occasion de découvrir le Paris médiéval
dans le cadre d’une sortie pédagogique : Notre-
Dame, l’enceinte de Philippe Auguste, les sou-
bassements de la forteresse du Louvre, sont les
sites principaux. L’étude de l’image sera asso-
ciée également à la séquence, par l’observation
de l’emblème de la Ville. Le blason et la devise
« Fluctuat nec mergitur » (aux élèves latinistes
de traduire !) trouvent une explication au sein
même du roman : Barbe, au service d’Etienne
Garnier, explique que la corporation des mar-
chands d’eau dont fait partie son maître, « [fait]