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Recadrages « positifs » et « négatifs »

Un des plus grands cadeaux que vous pouvez faire à vos clients est de leur apprendre à
faire la distinction entre envisager un comportement et l'avoir. S'ils y arrivent, ils peuvent
envisager pleinement ce que cela ferait d'avoir n'importe quel comportement. Tandis qu'ils
l'envisagent, ils peuvent découvrir de l'intérieur ce que ça donne et si ça vaut le coup de
l'adopter vraiment - par rapport à leurs valeurs et à leurs objectifs.
HOMME : Donc le recadrage - que ce soit pour une petite croyance ou un grand
présupposé - consiste simplement à prendre une inquiétude et la transformer en quelque chose
de positif.
Non. Faites attention avec les trucs « positifs ». Vous recadrez d'une façon utile, dans
certains contextes. Vous devez être vigilants avec ces notions de « positif-négatif ». C'est
positif d'être utile. Ceci est un recadrage, au passage.
Jusqu'à présent, nous avons parlé exclusivement de recadrer quelque chose de « mal »
en quelque chose de bien, et c'est souvent ainsi que c'est le plus utile en thérapie. Mais le
recadrage ne sert pas seulement à prendre des choses qui ont des connotations négatives et les
changer pour qu'elles aient des connotations positives. Il est parfois utile de recadrer dans
l'autre sens. Prenez l'exemple d'une personne qui croit vraiment en elle-même mais qui est
incompétente. Elle a besoin que sa confiance soit recadrée comme étant de la surconfiance.
J'ai vu Frank Farrelly faire un recadrage « négatif » intéressant. Pendant une conférence
au cours de laquelle je devais modéliser son comportement, il travaillait avec un homme qui,
grosso modo, disait qu'il ne pouvait rien tirer de sa femme. Frank, en pleine forme comme
d'habitude, harcelait l'homme à tel point que celui-ci ne pouvait plus suivre ce qu'il disait.

FRANK : Alors, est-ce que vous draguez les autres femmes ? Hein ?
HOMME : Ben, oui, parfois.
- Mais vous vous retrouvez avec votre femme et il ne se passe rien ?
- Ben, oui, je suis complètement tendu.
- Alors, où êtes-vous tendu ? Ceci est très important !
- Ben, vous savez, partout.
- Et quand vous êtes avec d'autres femmes, est-ce que vous vous êtes tendu partout ?
- Non, non. Vous savez, j'ai eu des tas d'interactions avec d'autres femmes et, heu...
- Des interactions ? Est-ce que c'est comme baiser ? (Frank est très raffiné.)
- Heu, ah... Oui.
- Votre femme est au courant ?
- Non.
- Et est-ce que votre femme a, elle aussi, des « interactions » ?
- Ben, heu, non.
- Comment le savez-vous ?
- Ben, vous savez, je sens que...
- Ah ! L'intensité de vos sentiments ne permet pas de tester ce qui fait partie de la réalité
!

Ça, c'est une sorte de recadrage. Si vous trouvez que le recadrage ne sert qu'à prendre
quelque chose de désagréable et le transformer en quelque chose de bien, alors il ne vous faut
probablement pas être thérapeute. De nombreuses personnes ont besoin d'avoir une vue plus
réaliste d'eux-mêmes et du monde, et ce n'est pas toujours drôle.
L'homme avec qui Frank Farrelly travaillait présumait que sa femme n'avait pas «
d'interactions » avec d'autres hommes et qu'elle ne savait pas qu'il voyait d'autres femmes. Il
présumait aussi quelque chose de beaucoup plus dramatique : qu'elle n'était pas importante
pour lui. C'est le genre de personne qui vient en thérapie quand sa femme le laisse tomber
comme une chaussette sale. D'un seul coup, plus aucune femme au monde ne fera l'affaire.
J'appelle ces gens-là les « lamenteurs ». Ils viennent se lamenter sur leurs amours perdus. Et
s'ils avaient eu plus d'expérience sensorielle dès le début, ils ne les auraient peut-être jamais
perdus.
Imaginons que je me suis retrouvé thérapeute sans vraiment savoir pourquoi. Je faisais
mes études et la chimie était trop difficile, je n'appréciais pas vraiment les maths et l'histoire
m'ennuyait. Tous mes amis voulaient devenir enseignants mais cela ne m'intéressait pas parce
que je voulais rencontrer de nouvelles personnes. Je ne me sentais pas sûr de moi, or, quand
j'ai commencé une thérapie, j'ai vu que les gens se complimentaient toujours et j'ai trouvé ça
super. Donc je suis devenu thérapeute ; j'ai mon diplôme, mais j'ai encore l'impression de ne
pas être sûr de moi, ce qui me pose problème. Si je généralise mes propres problèmes au reste
du monde, il y aura un tas de gens que je ne pourrai pas aider, parce que certaines personnes
n'ont pas mon problème. D'ailleurs, si certains d'entre eux ne se sentaient pas sûrs d'eux-
mêmes, ils se porteraient mieux.
Il y a des tas de gens qui ne savent pas exploiter l'expérience sensorielle pour tester et
découvrir ce qu'ils font bien ou mal. Ils ont vraiment besoin d'une forte dose de doute envers
eux-mêmes. Lorsqu'ils sont trop sûrs d'eux, ils font souvent quelque chose qui fait qu'ils vont
avoir mal. Cependant, ils n'utilisent pas ça pour être moins sûrs d'eux-mêmes utilement. Ils
traversent des cycles semblables à ceux d'un maniaco-dépressif : compétence, COMPÉ-
TENCE, COMPÉTENCE, échec ! Je rencontre souvent des gens comme ça. Ce que vous
pouvez faire pour les aider, c'est de tendre la jambe et les faire trébucher juste au moment où
ils commencent à se sentir vraiment compétents - avant qu'ils ne tombent de trop haut. Puis
vous pouvez commencer à les aider à construire un système de prise en compte des
informations sensorielles qui va leur donner une information correcte sur eux-mêmes.
Ne pensez donc pas que le recadrage est approprié uniquement dans un contexte où on
prend quelque chose de négatif pour le rendre positif. Parfois, une bonne dose de peur,
d'incompétence, d'incertitude ou de suspicion peut être très utile.

FEMME : Vous ressemblez au diable.


-Vous n'êtes pas la première à me le dire ! Dans un de mes séminaires, une personne est
venue me voir...
FEMME : Un homme ou une femme ?
-Quelle importance ? Êtes-vous sexiste ? Voilà comment renverser un présupposé !
Cette personne s'est approchée de moi et m'a dit timidement : « Est-ce que vous me dites que
c'est acceptable d'être rusé ?
- Oui, c'est ce que je vous dis.
- Oh, j'y arrivais si bien quand j'étais jeune, et je n'y arrive plus depuis des années. Est-
ce que ce sera manipulatoire ?
- Oui. »

Je crois qu'il s'agit d'un exemple où le recadrage est vraiment nécessaire.

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