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COLLECTION DE L'ECOLE FRANÇAISE DE ROME - 33

LA PAPAUTÉ
ET LES MISSIONS D’ORIENT
AU MOYEN ÂGE
(Xllle-XVe siècles)

JEAN RICHARD

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Jean Richard

LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO N S


D OR1ENT AU M O Y E N ÂGE
(XI1I'-XV' SIÈCLES)

La présence des missionnaires de


1’ÉglÍse latine en Asie, dòs les pre-
mières décennies du XIIIc siècle, nest
pas sculement la conséquence de la
naissance dordres religieux mieux
préparés que le clergé séculier à la
prédication «aux nations» et de la
inise en place par la papauté de hié-
rarchies épiscopales assurant la vie
des «nouvelles plantalions de la foi».
Elle prend place dans un contexte qui
ouvre les pavs orientaux à la pénétra-
tion des Européens. La constitution
de 1’empire mongol principal facteur
de la transformation du monde dont
Marco Polo fut le témoin, a favorisé
les contacls et ouvert 1’accès aux pays
dOrient et d’Extrême-Orient. Sa
désagrégation et le développcment de
puissances hostiles à la chrétienté
occidentale nont pas permis à leffort
missionnaire, qui avait connu des
succès certains, de sy poursuivre
au-delà du milieu du XVCsiècle. Mais
les religieux qui en furent les acteurs
et qui vécurent cette extraordinaire
aventure avaient su sadapter à un
monde très différent du leur et qu’ils
ont largement contribué à faire
connaltre.

í
IS S N 0223-5099 j
IS B N 2-7283-0519-6

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COLLECTION DE LÊCOLE FRANÇAISE DE ROME
33

Jean R1CHARD

LA PAPAUTÉ
ET LES MISSIONS D'ORIENT
AU MOYEN AGE
(XIIIe-XVe siècles)

Deuxième édition
augmentée d'une postface

ÉCOLE FRANÇAISE DE ROME


PALAIS FARNÈSE
1998

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École française de Rome - 1998
ISSN 0223-5099
ISBN 2-7283-0519-6

D iffu s io n ert F ra nce:

D1FFUS10N DE BOCCARD
11 RUE DE MÉDICIS
75006 PARIS

SCUOLA TIPOGRAFICA S. PIO X - V IA ETRUSCH1, 7-9 ROM A

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AVANT-PROPOS

Nous avions orienté nos recherches vers les missionnaires latins de


1Asie médiévale lorsque notre nomination en qualité de membro de 1'École
française de Rome, en 1943, nous ouvrit la possibilité de travailler dans une
perspective qui nous intéressait depuis longtemps: 1’histoire dos Occiden-
taux qui s’enfoncèrent en Asie entre le XII* et le XVC siècle. à la favour do la
fondation des Etats latins, puis de la conquète mongolo, quils fussont sol-
dats, marchands, missionnaires, captifs, voire renégats. C'est seulomont 011
1947 qu'il nous fut possible de passer près d ’une année dans la Villo Eter-
nelle, et de compléter les recherches déjà effectuées par des dépouille-
ments menés dans les Archives du Vatican, dans les bibliotheques romainos
et dans dautres dépôts et collections. Cest surtout alors que, gràce aux
R. P. Loenertz et Laurent, nous avons pu préciser le theme d'uno rechorche
qui allait aboutir à la rédaction d’un mémoire consacré à la Papautc, aux
missions dOrient et aux origines de l'épiscopat titulaire. Ce mémoire, qui
avait reçu 1'approbation d'Albert Grenior et qui fut présenté a l Académie
des Inscriptions et Belles-Lettres en 1948, formait dans sa première partie
une première rédaction du présent ouvrage. Mais il a dú être entiòrement
repris; et les années ont passé, car une vie professionnelle chargée d’obliga-
tions de toute sorte nous a empèché de le faire plus rapidement.
On ne s’étonnera pas qu’une refonte ait été nécessaire, si lon songe à
tous les travaux qui, au cours des derniéres décennies, ont renouvelé I his-
toire de 1'Orient. Le domaine que nous devions parcourir en compagnie des
missionnaires médiévaux forme le champ des études des islamisants, des
bvzantinistes, des arménologues, des turcologues, des iranisants, des india-
nistes, des mongolisants et de bien dautres; et chacune de ces disciplines a
connu un développement considérable en ces derniéres années. Quant à
1’histoire des relations entre 1’Orient et 1’Occident, un peu dédaignée quand
nous avons entrepris ce travail, elle a bénéficié elle aussi du labeur de nom-
breux historiens, et nous serions bien ingrat de ne pas évoquer des ouvra-
ges qui, comme ceux, tout récents, de M ,,e von den Brincken ou de M. Bez-

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AVANT PROPOS
VI

zola sur 1’image que les Occidentaux se sont faite des chrétiens orientaux
ou des Mongols, se sont ajoutés aux ceuvres posthumes de Pelliot, désor-
mais accessibles, pour nous donner une vision plus précise de ces relations.
L e t u d e des missions médiévales nest pas chose nouvelle. Depuis q u e n
1741 Mosheim publa son Historia Tartarorum ecclesiastica qui utilisait large-
ment les documents d'origine pontificale déja mis en ceuvre par Rinaldi
dans les Annales ecclesiastici, les efforts des religieux latins p ou r converlir
les Mongols et les peuples qui leur étaient soumís ont retenu I attention. Ce
chapitre de 1’histoire missionnaire figure aussí bien dans 1 H isloire générale
des missions catholiques depuis le X IH e siècle jusqua nos jou rs (1846) du
baron Henrion ou dans la Storia universale delle m issioni francescune du
P. Marcellino da Civezza, dont la parution s étala de 1857 a 1883 que dans
YHistoire universelle des missions catholiques de iMgr S. Delacroix (1957) et
dans les ouvrages similaires. Quant aux monographies et articles scientifi-
ques, ils sont légion; ceux de Moule ( Chrislians in China) ou de Pelliot
( Chrétiens d'Asie centrale et d'Extréme O rient) ont faít dale; mais la consulta*
tion de notre bibliographie, que nous avons cependant voulu succincte,
dira aisément 1’abondance de tels travaux.
C ’est dans le cadre de chacun des deux grands ordres religieux qui ont
assumé au Moyen-Age 1'essentiel de la táche missionnaire que se sont réali-
sés la plupart de ces travaux. Deux noms, ceux du P. G irolam o Golubovich,
auteur de la monumentale Biblioteca bio-bibliografica delia Terra Santa e
d eliO rien te francescano, et du P. Raymond-J. Loenertz auquel nous devons
La Société des Frères Pérégrinants. Elude sur 1'Orient dom inicain, suffiraient
à attester que, du côté de chaque ordre, 1'enquéte a été m enée pratiqiie*
ment à son terme, s'il ne fallait y joindre celui du P. Van den Oudenrijn,
incomparable connaisseur de l’Arménie au temps des Freres Uniteurs.
II nous appartenait, nous a-t-il semblé, de prendre le t u d e des missions
par un autre aspect. Dominicains et Franciscains se sont partagé les efforts
à accomplir dans le domaine de lapostolati mais derricre les deux grands
ordres se discerne 1’action d u n organisme fédérateur qui nest autre que la
Papauté. L ’intervention de celle-ci se manifeste a chaque instant, de telle
sorte que les registres de la chancellerie pontificale sont notre principale
source documentaire; et c est la Papaulé qui. par la création d un épiscopal
missionnaire comme par len v oi d a m b a ss a d e u rs ou de commissaircs
s efforce de donner à la táche d évangclisation a la foi.s son a m p le u r et sa
permanence.
Que ce soit la Papauté du X III- siècle, alfrontée au * redoutables pro-
blemes de I Union des Eglises - dans le climat p ropre a u * Etals nés des
Cro.sades - et de la menace mongole, puis m am elúke; la Papauté avignon-

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AVANT-PROPOS VII

naise, qui passe outre à la «centralisation pontificale» pour essayer de


doter les «nouvelles plantations de la foi» des moyens de mener une vie
autonome; la Papauté du Grand Schisme qui, à Rome comme à Avignon,
maintient tant bien que mal les efforts missionnaires terriblement gènés
par les mutations de la fin du X IV C siècle; la Papauté redevenue romaine,
préoccupée par la réalisation de l’Union des Eglises par voie conciliaire :
nous avons cru discerner chez tous ces pontifes la persistance du souci mis-
sionnaire, et dans la Papauté le moteur des réalisations qui s'opèrent par
1intermédiaire des deux ordres.
En prenant la Papauté comme point de départ pour 1'étude des mis-
sions, nous rencontrions un autre avantage: celui de pouvoir envisager
1effort apostolique dans sa totalité, en prenant en considération à la fois les
Frères Prêcheurs, les Frères Mineurs, les autres religieux, les séculiers, les
laics mêlés à la tâche missionnaire. C'est ainsi que s’imposait dès l’abord un
examen des théâtres de 1'apostolat, et qu’il nous est apparu qu'entre les
pays « d e 1’Aquilon», d'une part, ceux «d e 1’Orient et du Midi», de 1'autre,
d'autres différences que celles qui résultent d’un découpage géographique
se faisaient jour. Ce qui nous a confirmé dans 1’adoption de cette optique.
Si nous avons exclu de notre recherche le vaste domaine des relations
entre 1'Eglise romaine et 1’Eglise byzantine, sauf à évoquer certains aspects
des contacts entre les Latins et les Melkites de Syrie, les Géorgiens ou les
Russes, c’est précisément parce que ce domaine était trop vaste et aussi
parce que les relations en question ont été trop marquées par l interférence
du temporel et du spirituel pour que nous ayions pu envisager de nous y
aventurer. Les ouvriers, d ailleurs, sont ici nombreux et plus habiles que
nous ne 1'aurions été à manier leurs instruments; nous souhaiterions avoir
pu contribuer à leur tâche en leur fournissant des points de comparaison
qui aideront à mieux apprécier la spécificité des rapports gréco-latins. Mais
nous voudrions, d ’emblée, marquer combien nous nous sentons, de notre
côté, redevable à leur endroit pour tout ce qu ils ont apporté à notre tra-
vail.
Les controverses portant sur les problèmes dogmatiques, rituels ou dis-
ciplinaires auxquels 1'Eglise catholique et les Orientaux apportaient des
solutions différentes appelaient sans nul doute des analyses plus détaillées
que celles que nous avons esquissées; nous nous sommes en effet attaché
davantage à 1’histoire de 1'organisation missionnaire q u a celle de la théolo-
gie, de la liturgie et du droit canon qui requièrent 1’intervention de spécia-
listes. Nous devons incidemment préciser que nous avons conservé 1’usage
des appellations de Nestoriens ou de Jacobites dans le sens qui leur était
donné au Moyen-Age, c’est-à-dire de termes désignant des communautés à

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j AVANT-PROPOS

la foto ri.uelles e. nationales, sans que 1'emploi de ces termes postulà,


adhésion de ceux quils concemaien. aux hérés.es de Nestonus ou des
Monophysi.es. Recourir aux appella.ions de Chaldéens ou de Synens (ce
dernier mo. designa longtemps les Melki.es) pourraU parfo.s apparaure
comme un anachronisme.
Nous nous sommes. enfin, systéma.iquement abstenu de nous referer a
un autre domaine de recherche, celui de la missiolologie. Les travaux
menés depuis quelques décennies dans ce domaine, tendant a degager des
perspectives de labeur missionaire fondées sur de nouvelles approches des
contacts et des divergences entre les diverses religions et les différentes
Eglises, sont sans doute riches de développements à venir, il nous a paru
impossible d’en transposer les résultats, dans la mesure ou ceux-ci sont
définitivement acquis, dans un passé vieux de plusieurs siècles. Le monde
de pensée dans lequel ont évolué les missionnaires médiévaux n était sans
doute guère différent de celui des évangélisateurs du haut Moyen-Age, ni de
celui des grands missionnaires des X VIe, X V H e, X V IIIe siècles, ou des temps
contemporains. Et cest là ce qui importe à l'historien.
Mais il est temps de nous acquitter d’une dette de reconnaissance
envers tous ceux à qui nous sommes redevable d ’un conseil, d ’un éclaircis-
sement ou d’un encouragement. La coopération entre chercheurs n'est pas,
pour nous, un vain mot, et nous avons conscience d’en avoir été le bénéfi-
ciaire; combien de tirés à part qui nous ont dispense de rechercher des
publications parfois quasi-introuvables, de lettres qui sont venues résoudre
une difficulté!
II nest, en effet, pas toujours facile de mener, sans disposer sur place
d'un éventail de bibliothèques spécialisées, des recherches telles que celles
dont ce volume est 1'aboutissement. Aussi notre gratitude est-elle grande à
1égard de nos amis ou collègues, des conservateurs des bibliothèques et
des archives qui ont facilité notre tâche. Et il nest que justice de dire quel
concours nous avons trouvé dans notre entourage familial, en particulier
auprès de notre femme, d ’Hugues, de Francis et d’Hélène Richard.
Nous nc saurions oublier ceux qui nous ont aidé à définir ce travail:
Albert Grenier, Paul Pelliot, René Grousset, Marie-Hyacinthe Laurent, qui
nous ont trop tót quittés. Le P. Mécérian, J. J. Saunders, N. V. P ig u le v s k a ja ,
qui s’y étaient intéressés, ne sont plus là non plus. Mais ce nous est une joie
de remercier ici, en nous excusant de le faire aussi succinctement, R. Bau-
lier J A. Boyle, H. Bresc, E. Ccrulli. A.-L. Courlel, J. Darrouzès, J. Dauvillier,
C. Dedeyan, G. Fedalio, J.-M. Fiey, J. Filliozat, L. Hambis, E.-R. Hambve,
K.Jahn. P.Lemerle, G. Moyse, L. Pe.ech, M. Roncaglia. K. M. Setlon.
D. Sinor. D. el J. Sourdel, B. Spuler, W. R. Tyler, A. Vauchez, A.-D. von dcn

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AVANTTROPOS IX

Brincken, de 1’aide qu’ils nous ont apportée et de 1’intérêt qu’ils onl témoi-
gné à ce travail. Et nous aurions aimé pouvoir apporter avec 1’hommagc dc
ce livre notre gratitude au P. Loenertz, qui avait suivi nos recherches depuis
le début en nous faisant profiter de sa grande connaissance de leur objct,
mais que la mort nous a enlevé le jour mème ou nous remettions ce
volume en vue de son impression.
Un grand merci aussi à notre ami Jean Glénisson et à 1'Institut de
Recherche et d’Histoire des Textes qui ont tant facilité la réalisation de ce
volume aux dernières heures de son élaboration. A l’Ecole française dc
Rome et à son Directeur, M. Vallet, nous voudrions exprimer aussi toute
notre gratitude. C’est grâce à notre séjour au Palais Farnèse, auprès des col-
lections vaticanes, que nous avons pu entreprendre ce travail; c’est à
1Ecole que nous avons trouvé un appui toujours très secourable; c’est dans
les Mélanges d'archéologie et d'histoire qu'ont paru les premiers des élé-
ments détachés qui se sont égrénés tout au long de la préparation de ce
livre; c’est dans ses collections que 1’Ecole veut bien accueillir celui-ci
après sa longue gestation. Puisse-t-il, en se révélant utile aux historiens, jus-
tifier toute 1'aide que son auteur a rencontrée!

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SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE

La documentation sur laquelle repose une enquête sur les missions


orientales au Moyen-Age est constituée en premier lieu par la série des
registres de la chancellerie pontificale. Si une tentative de réunir dans des
volumes spécialisés les textes intéressant les questions missionnaires ne vit
le jo ur que très tard et de façon éphémère, les lettres des Papes aux princes
d ’Asie et aux prélats orientaux, les recommandations ou les pouvoirs accor-
dés aux missionnaires lors de leur départ, les décisions de toute sorte pri*
ses par le Saint-Siège, les exhortations aux ordres religieux se rencontrent
pratiquement dans chacun des registres conservés. Aussi le dépouillement
de ceux-ci a-t-il été à la base de notre travail.
Entrepris depuis longtemps par les auteurs des Bullaires, notamment
ceux des ordres franciscain et dominicain, ce dépouillement a été rendu
plus aisé grâce à 1’inestimable collection des Registres et Lettres des Papes
des X I I I e et X Í V e siècle. Mais, au cours des trente dernières années, sest éla-
borée la série des Fontes de la commission pontificale pour la rédaction du
Code de droit canonique oriental, qui a systématiquement rassemblé tout
ce qui, dans les registres pontificaux, intéresse 1'Orient, y compris des sup-
pliques et tout le dossier de la grande controverse sur la foi et la discipline
de 1’Eglise arménienne. Ce recueil nous a fourni un instrument de controle
et d'utiles compléments; il est désormais pour les travailleurs un excellent
moyen d'accès à tous ces textes jusqu'ici dispersés - on s’en rend compte
par La chiesa latina in O riente de D. Giorgio Fedalto, excellent ouvrage qui
se propose un objet parallèle au nôtre Nous avons cependant cru devoir
conserver les références anciennes, en y joignant celles des Fontes, à la fois
pour permettre de reconnaitre les textes habituellement cités et parce que
la série des Fontes n a pas toujours trouvé dans les bibliothèques la diffu-
sion qu'elle mérite.
Viennent ensuite les documents émanant des ordres religieux - actes
des chapitres, lettres des ministres et maitres généraux, avec les lettres et
rapports des missionnaires que nous avons cru pouvoir com parer aux célè-

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XII SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE

bres « lettres édifiantes»'— lesquels apportent une contribution sans doute


moins abondante que la précédente, mais fort importante.
Ces documents s’apparentent aux récits de voyages, dont certains,
comme les M ira b ilia de Jourdain de Séverac, sont eux aussi des excitatoriae,
des invitations à concourir à la tâche missionnaire. II nest voyageur, füt-il
laíc comme Schiltberger ou Marco Polo, qui n'apporte sa contribution à la
connaissance des missions, qui figurent dans les perspectives de certains
projets de croisade. Mais beaucoup d'auteurs des uns et des autres sont
eux-mêmes des missionnaires ou des « pérégrinants ». Et de véritables rap-
ports sur 1’état et les possibilités de 1’évangélisation sont sortis de la plume,
par exemple, des archevêques Jean Icr et Jean III de Sultanieh. II est
regrettable que 1’allégorie qui règne d’un bout à 1'autre du Songe du V ie il
Pélerin nous empêche d ’utiliser aussi le tableau du monde qu'esquissa Phi-
lippe de Mézières!
Bon nombre d'informations qui rentrent dans nos perspectives ont
trouvé place dans l une ou l'autre chronique. Un Mathieu Paris, un Jean de
Winterthur, un Jean Elemosyna, sont particulièrement bien informes; mais
nous aurons d’autres chroniqueurs à citer épisodiquement parmi nos sour-
ces.
Cette documentation multiforme, pour autant qu'elle concerne 1'ordre
des Frères Mineurs, a été extraite et commodément rassemblée dans la pré-
cieuse Biblioteca bio-bibliografica du P. Girolamo Golubovich, que nous
avons abondamment utilisée dans nos références, comme constituant un
véritable corpus des textes intéressant les missions franciscaines, tandis que
le premier volume des Sinica franciscana a permis au P. Van den Wyngaert
de foumir une édition scientifique des relations de voyages sorties de la
plume des voyageurs du même ordre. Les textes de provenance domini-
caine sont sans doute plus dispersés; mais les études du P. Loenertz en réu-
nissent les références sous une forme très accessible.
Nous avons cependant eu à compléter ces dépouillements douvrages
imprimés en recourant aux documents darchives ou à des manuscrits,
pour vérifier les indications données par nos prédécesseurs ou rétablir des
textes tronqués, et aussi à la recherche dmformations nouvelles. Les archi-
ves notariales de Gênes et les fonds de 1'Archivio segreto Vaticano (notam-
ment les Instrum ento m iscellam a et les archives de la Chambre apostoli-
que) nous ont livré un nombre appréciable de documents inédits sans que
nous puissions prétendre avoir fail mieux qu un glaneur qui retrouve quel-
ques épis après le passage des moissoneurs.
Une source feconde, mais quasi-désespérante par sa dispersion est
const.tuee par les actes émanant d evêques affectés à des sièges orientaux

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SOURCES ET BIBUOGRAPHIE XI I I

et se trouvant plus ou moins durablement en Occident, qu’ils accomplis-


sent certaines fonctions pontificales pour seconder des évêques diocésains,
ou qu'ils s’associent pour enrichir certaines dévotions d'un nombre de
jours d indulgence proportionnel à celui des évêques ainsi rassemblés. C est
ainsi quun e de ces lettres d ’indulgence collectives, retrouvée par le P. M -
H. Laurent, a livré le sceau du célèbre Rabban Çauma. Beaucoup de ces
documents ont été recensés par le P. H. Delehaye, Les lettres d’indulgence
collectives (dans Analecta Bollandiana, XLIV-XLVI, 1926-1928). Mais il en est
d'autres, dispersés dans des Códices diplomatici, des Urkundenbücher, des
Regestes, ou encore inédits, qui nous ont livré des mentions intéressant
notre propos, au prix d'une prospection longue, et cependant certainement
incomplète.
La littérature historique relative aux missions médiévales est considé-
rable; nous n'avons pas la prétention d'en avoir épuisé la liste dans la
bibliographie qui suit. Nous n’avons pas cru, en effet, devoir recenser tous
les ouvrages qui n’ont plus d ’intérêt scientifique, quel que fut leur mérite à
1’époque ou ils ont été écrits - sauf lorsquon y trouve la démonstration de
faits qui sont depuis considérés comme établis par les historiens. Pas
davantage, tous ceux qui nous permettent daccéder à la connaissance du
milieu dans lequel s'insère 1’histoire missionnaire, qu’il s'agisse de l’histoire
des Eglises orientales, de 1’Orient aux temps mongols, des relations politi-
ques ou économiques entre 1'Occident et 1’empire mongol ou les régions
voisines.
Nous avons en effet la bonne fortune de disposer depuis ces derniéres
années d'ouvrages qui ont établi d’excellentes bibliographies auxquelles
nous ne saurions faire mieux que de renvoyer nos lecteurs, qu'ils aient à
utiliser Y Introd u ction à Vhistoire de 1'Eurasie centrale de D. Sinor, Das M on-
golische W eltreich de KJaus Lech, Die « Nationes christianorum orientalium »
de M ,le von den Brincken, Die M ongolen in Abendlandischer Sicht de G.-
A. Bezzola, les deux livres classiques de B. Spuler, Die Goldene Horde et Die
M ongolen in Iran, ou les pages consacrées aux missions et à 1'histoire des
Eglises d'Orient par Hans-Eberhard Mayer dans sa Bibliographie zur Ges-
chichte der Kreuzzüge. Et il est inutile de dire que nous avons eu recours
bien des fois au D ictionnaire dH istoire et de Géographie ecclésiastiques, au
Lexikon für Theologie und Kirche, ou à YEncyclopédie de 1'Islam, dont les
notices nous ont rendu les plus grands services.
On trouvera dans nos notes infrapaginales la référence à de nombreux
ouvrages ou articles que nous n avons pas releves dans cette bibliographie
liminaire. Celle-ci se veut consacrée, dune part, aux travaux consacrés à
1’histoire des missions elles-mèmes; dautre part, aux ouvrages que nous

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XIV S0URCE8 HT IIIIII.KKJKAPHIE

avons plus d une fois cites et dont la description s’est trouvée de ce fait plus
ou moins fortement raccourclc*. II nous laut dailleu rs preciser qu'il nous
est arrivé de renvoyer à des truvaux, ct notamment à des publications de
textes, qui peuvent apparaitre comme dépassés par dautres, plus récents.
Nous avons été ici handicapé non seulement par letalement de la gestation
de ce travail sur presque trente ans, mais par l'é!oignement oú nous nous
trouvions par rapport à des bibliothòqucs bien dotees en ouvrages de ce
g e n r e 1.
Cette liste bibliographique ne fail pas le départ entre les sources que
nous avons utilisées - pour la plupart, nous l'avons dit, imprimées - et la
littérature historique. Ce n’est pas que nous ayons fait nôtres les thèses de
certains historiens qui récusenl cette distinction; mais c'est que, dans le
dom aine dont il s’agit, très nombreuses sont les publications qui associent
1 edition d u n texte ou d'un documcnl à une étude historique: que 1’on
pense à la B ib lioteca biobibliofirafica de Golubovich! Et que bien des tra-
vaux se présentent comme des éclaircissements apportés à des éditions de
textes, à la façon des Recherches de Pelliot. II aurait faliu citer sous la rubri­
que « S o u r c e s » trop d’ceuvres que l'on aurait retrouvées sous la rubrique
« B ib lio g ra p h ie ». Aussi notre propos a été de facililer 1'identification des
ouvrages cités, en espérant que le fait d ’avoir mélé publications de textes et
études consacrées soit à ces textes, soit aux questions soulevées par 1’his-
toire des missions, ne rcndra pas plus malaiséc 1’orientation de ceux qui
voudront utiliser cette liste pour dirigcr leurs propres dépouillements2.

1 Une q u estion p a rtic u liè rem en t dólicute ac pose à q u icon q u e tra va ille à ch eva l sur plu-
sieu rs d o m a in e s lingu istiqu es relcvant de ro rie n la lis m e : c e lle des tran scription s et de 1’usage
des signes diacritiqu es. N ous uvons ch erch é à suivre 1'usage g òn éra lem en t suivi par les mon-
g o lisa n ts français en ce qui co n ce rn e les nom s m ongols, sauf à rem p la ce r le y par gh; de
m ê m e en c e qu i co n c e rn e les nom s persans, la c c e n l c irc o n fle x e se su bslitu e au L e m p lo i
d e fo rm e s tra d itio n n e lle m e n t reçues dans n otre langue p ou r des n om s géograph iqu es, tel
ce lu i d e Djagatai, ne d e vra pas su rpren dre. M ais nous plaidons à l a van ce co u p a b le pou r un
pa rti-p ris d e sim p lifica tio n .
2 En c e qu i co n c e rn e les le tire s d in d u lg e n c e c o lle c liv e s , nous avons pu sim p lifier nos
ré fé re n c e s , en raison d e l'existen ce de la r t lc le du P. D elahaye cité plus haut.

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LISTE DES OUVRAGES CITÉS

Abu 1 Faraj : voir Bar Hebraeus.


Alishan (Léon), Sissouan ou 1'Arméno-Cilicie. Venise 1899.
Altaner (Berthold), Die Dom ikanerm issionen des 13. Jahrhunderts. Habelsch-
werdt, 1924 (Breslauer Studien zur historischen Theologie, 3).
Anaissi (T.), B ullarium M aronitarum . Rome 1911.
Analecta sacri ordinis fratrum praedicatorum, Rome, 1839 et suiv.
Archives de VOrient latin. Paris 1881-1884, 2 vol.
A rchivum franciscanum historicum. Quaracchi, 1908 et suiv. - Abrégé AF.H.
A rch ivu m fratrum praedicatorum Rome 1931 et suiv. - Abrégé AF.P.
Arm eno-Veneto (V). Compêndio storico e docum enti delle relazioni degli
A rm eni c o i Veneziani. P rim o periodo, Venise 1893.
Assemani (J. S.), Bibliotheca orientalis. Rome 1719-1728, 3 tomes en 4 vol.
Atiya (Aziz Suryal), A history o f Eastem christianity. Londres, 1968.
Aubri de Trois-Fontaines. Chronicum (-1241) A lberici m onachi T riu m Fon-
tium, ed. P. Scheffer-Boichorst, dans M onum enta Germ aniae histórica,
Scriptores, t. XXIII.

Bacon (Roger), The «o p u s m ajus» o f R oger Bacon, ed. by J. H. Bridges. Lon­


dres, 1900, 3 vol.
Balard (Michel), Gênes et iO utre-m er, I, Les actes de Caffa du notaire Lam-
berto di Sambuceto, 1289-1290. Paris-La Haye, 1973 (Documents et
recherches sur l'économie des pays byzantins. . . et leurs relations
commerciales au Moyen-Age, XII).
Les G énois en Asie centrale et en Extrêm e O rient au X IV e s iè c le : un cas
exceptionnel, dans Econom ies et sociétés au M oyen-Age (Mélanges
E douard Perroy), Paris 1973, p. 681-689.
Baluze : voir Vita In n o c e n tii III, Vitae paparum A vin ion en siu m
Banescu (N.), La dom ination byzantine à Matracha ( . . . ) , en Zichie, en Khaza-
rie et en « Russie» à 1‘époque des Comnènes, dans Académie Roumaine.
B ulletin de la section historique, XXII, 2, 1941.

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XVI LISTE DES OUVRAGES CITfcS

B a r Hebraeus, G reg orii Abulpharagii sive Bar Hebraei ch ron ico n syriacum,
éd. et trad. Kirsch. Lcipzig, 1739 (nous avons utilisé cctte cdition par
commodité au lieu de The Chronography o f A bu'l F a ra d j. .. Bar
Hebraeus, éd. et trad. E. A. Wallis Budge, Oxford, 1932, 2 vol.).
G re g o rii Bar H ebraei ch ro n ico n ecclesiasticum, éd. et trad. Abbeloos ct
Lamy. Paris et Louvain, 1872-1877, 2 vol. en 3 tomes.
Barbaro (Josafa) et Contarini (Ambrogio), Traveis to Tana and Persia, transi,
by W. Thomas and S. A. Roy, and ed. by Lord Stanley of Alderley. Lon­
dres 1873 (Hakluyt Society).
Bautier (Robert), Les relations économ iques des O ccidentaux avec les pays
d'O rient au M oyen Age. Points de vue et documents, dans Sociétés et com-
pagnies de com m erce en O rient et dans l'Océan /ndien, Paris, 1970
(Bibliothèque générale de l'Ecole pratique des Hautes Etudes), p. 263­
331.
Bergeron (Pierre), Voyages faits principalem ent en Asie dans les X l l e, X III*,
X I V e et X V e siècles. La Haye, 1735, 12 parties en 2 vol.
Beumann : voir Heidenmissionen.
Bezzola (Gian-Andri), Die M ongolen in Abendlandischer Sicht (1220-1270).
E in Beitrag zur Frage der Võlkerbegegnungen. Berne et Munich, 1974.
Bihl (M.) et Moule (A.C.), De duabus epistolis Fratrum M in o ru m Tartariae
Aquilonaris, dans A rchivum franciscanum historicum , XVI, 1923, p. 89­
112.
-, Tria nova docum enta de missionibus FF.MM. Tartariae Aquilonaris, Ibidem,
XVII, 1924, p. 55-71.
Blanke (Fritz), Die M oham m edanerm ission im M ittelalter, dans M issionspro-
blem des M ittelalters und der Neuzeit, Zurich et Stuttgart, 1965, p. 77-88.
Bongars (Jacques), Gesta Dei per Francos sive orien ta liu m expeditionum et
regni Fran coru m H ierosolym itani historia a variis sed illiu s aevi scripto-
ribus litteris commendata. Hanovre 1611.
Boyle (J. A.), The ll-K h a n s o f Persia and the princes o f Europe, dans Central
Asiatic Journal, XX, 1976, p. 25-40.
Bratianu (Georges), Actes des notaires gênois de Péra et de Caffa. Bucarest,
1927.
La m er N o ire des origines à la conquête ottomane. Munich, 1969 (Societas
acadêmica dacoromana. Acta histórica, IX).
Recherches sur le com m erce gênois dans la M er N o ire au X I I I e siècle. Paris,
1929.
Bréhier (Louis), L'Eglise et 1'Orient au Moyen-Age. Les Croisades. 5C éd., Paris
1928.

i
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LISTE DES OUVRAGES C1TÊS XVII

Bretschneider (E.), M ediaeval Researches from eastern asiatic sources. Lon­


dres, 1888, 2 vol.
B r e w e r : voir M on u m en ta franciscana.
Brincken : voir Von den Brincken.
Brosset (M. F.), H isto ire de la G éorgie depuis 1'antiquité ju sq u a u X I X e siècle.
Saint-Petersbourg, 1849-1858, 2 t. en 4 vol.
B ru n (C.), D ie Franziskanerm issionen und der O rien t bei Johann von W inter-
thur, dans Z eits ch rift fü r schw eizerische Geschichte, XVII, 1923, p. 29-37.
B runel (Clovis), D a vid d ’Ashby, auteur m écon n u des « Faits des Tartares»,
dans R om an ia , L X X IX , 1958, p. 3946.
B ry e r (Anthony), L u d o v ic o da B ologna and the G eorgian and Anatolian
embassy o f 1460-1461, dans Bedi Kartlisa (R evue de K artvélologie), XIX-
X X , 1965, p. 178-198.
B u lla riu m fra n c is c a n u m : cette abréviation renvoie normalement aux volu­
mes publiés sous ce titre par K. Eubel (t. V à VII de la première série),
ceux publiés par Sbaralea (début de cette série) ou par Hüntemann
(2e série) étant cités sous le nom de 1’éditeur.

Cahen (Claude), La Syrie du N o r d à le p o q u e des Croisades et la p rin cip a u té


fra n qu e d ‘A ntioche. Paris, 1940.
Canivez (D o m J.), Statuta c a p itu lo ru m gen era liu m ord in is Cisterciensis. Lou-
vain, 1933 et suiv. (Bibliothèque de la Revue d ’Histoire ecclésiastique).
Cato (J. I.). G u illa u m e du P ré et les Tartares, dans A rch ivu m franciscanum
h is to ric u m , LX, 1967, p. 210-213.
Cerulli (Enrico), E tio p i in Palestina. S toria delia com m u n ità etiop ica di G eru-
salem m e. Roma, 1943-1946, 2 vol.
E u g ê n io I V e g li E tio p i al c o n c ilio di Firenze nel 1441, dans R e n d ico n ti
d e liA c c a d e m ia dei L in c e i (classe di scienze morali, storiche e filologi-
che), ser. VI, vol. IX, 1933, p. 347-368.
Chabot (J.-B.), N o te s s u r les relations du ro i A rg o u n avec iO ccid e n t, dans
R e v u e de l'O rie n t latin, II, 1894, p. 566-638. Abrégé : Chabot, Notes.
voir H is to ire de M a r Jaballaha I I I .
C h w o lso n (D.), S y ris ch -n es to ria n isch e G ra b in sch riften aus Sem irjetschie,
dans M é m o ire s de 1'Académie im p éria le des sciences de Saint-Peters­
b o u rg , 7C série, t. X X X V II I , n° 8, 1890.
Civezza (P. M arcellin o da), S to ria u niversa le delle m issio n i francescane.
Rome, 1857-1883, 7 vol. et app. (trad. franç. par le P. Victor Bernardin
de Roucn, H is to ire u n iv e rs e lle des m issions franciscaines, Paris, 1899,

4 vol.).

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X V III LISTE DES OUVRAGES CITÊS

Cocquelines (C.), B u lla ru m , p riv ile g io r u m ac d ip lo m a tu m R o m a n o ru m p o n ti-


fic u m am plíssim a c o lle c tio . Rome, 1739-1740, 6 t. en 13 vol.
C o n t a r i n i : voir Barbaro.
C o rd ie r (H.), Le ch ristia n ism e en Chine et en Asie ce n tra le sous les M ongols,
dans T o u n g pao, XVIII, 1917, p. 49-113.
voir Odoric.

Dauvillier (Jean), Les A rm én ien s en C hine et en Asie c e n tra le au M oy en Age,


dans M élanges de s in o lo g ie offerts à M. P a u l D e m ié v ille , II, Paris 1974,
p. 1-17 (Bibliothèque de 1'Institut des Hautes Etudes chinoises, X X ).
- , Byzantins d'Asie centrale et d 'E xtrêm e-O rien t, dans M éla n g es M a rtin Jugie
( R ev u e des Etudes byzantines, XI), 1953, p. 62-87. •
- , L e x p a n s io n de lé g lis e syrienne en Asie cen tra le et en E x trê m e -O rie n t, dans
L 'O rie n t syrien, I, 1956, p. 76-87.
—, G u illa u m e de R u b ro u ck et les com m u n a u tés chald éenn es d ’Asie ce n tra le au
M oyen-A ge, dans L ’O rie n t syrien, II, 1957, p. 223-242.
—, Les p ro v in c e s chaldéennes «d e le x té r ie u r » au M o\en -A ge, dans M élanges
offerts au R. P. F. Cavallera, Toulouse 1948, p. 261-316.

D aw son (Christopher). The M o n g o l M ission. N a rra tiv e s a n d letters o f the


F ra n cisca n m issionaries in M o n g o lia and China, translated by a nun of
Stanbrook Abbey, ed. by C. D. Londres et N e w York, 1955 (M a k e rs of
Christendom series).

D e m o d o S a racenos e x tir p a n d i: voir Guillaum e Adam.


Desim oni (C.) et Belgrano (L.T.), Atlante id ro g ra fic o dei m e d io e v o posseduto
dal Prof. T a m m a r L u x o ro , dans A tti delia d e p u ta zion e d i s to ria pa tria per
la L ig u ria , V, 1867, p. 67-168.
D esim om (C.), N u o v i studi s u liA tla n te L u x o r o , dans A tti d elia d e p u ta zion e
p e r la L ig u ria , V, fase. 2, 1869, p. 272 et suiv
De Vries (W .). tn n o z e n z * < 1 *3 .1 2 5 4 ) urrd d e r c h r is d ic h e O sten, dans O s ih r -
c h h c h e Studien, XII, 1963, p. 113-131.
D ie Püpste v o u A vig n or, u n d d er c h ris d ic h e O sien, d an s O r ie m a tia c h ris -
tiana p e rió d ica , X X X , 1964, p. 85-128.

D ir e c to r iu m ad passagium fa cie n d u m : voir Raymond Etienne

n «Cr r i ^ Rn CUer deS H is,“ rie" s ? es Croisades. D o c u m e n ts Arméniens.


D o m e ( H ). D re , T exle z u r G e s c h ,c h ,e d er U n g a m u n d M o n g o l e n : die M is-
s ,o ,,sre.se des fr. íu l.a rm s O. P. m s V ra lg e b ie t (1234 /5) u n d n a ch R ussland

N a c lr Z » í " deSJ E r z b is c h ° f ü b e r die T a rta ren , dans


N a c h n c h te n d e r A k a d c m e d e r W is s e m ch a fte n in G o m n g e n Philoloeis-
che-Historischc Klassc, 1956, p, 125-202. g

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LISTE DES OlATUGES CITES XIX

Dondaine (A.), Ricoldiana. Notes sur les ceuvres de R icold o da M ontecrocc,


dans A rch ivu m fratrum praedicatorum , XXXVII. 1967, p. 119-179.
Douais (C.), Acta ca p itu loru m p ro v in c ia liu m fratrum praedicatorum . Tou-
louse, 1894.
Dupré-Theseider (Eugênio), B onifácio V I I I e la zio n e missionaria, dans
Glaube. Geist. Geschichte. Festschrift fiir Ernest Benz. Levde 1967, p. 506­
512.

Egami (Namio), O lon-siim e et la découverte de leglise catholique rom aine de


Jean de M on tcorvin , dans Journal Asiatique. CCXL, 1952, p. 155-168. .
Encyclopédie de ilsla m . Nous avons utilisé la version en langue française,
tant dans sa première édition (1915-1938, 4 vol. et suppl.) que dans la
seconde (en cours depuis 1960). Abrégé Enc. IsL
Enoki (Kazuo), Nestorian christianity in China in the M edieval period, dans
L'O riente cristiano nella storia delia cixiltà, Rome, 1964, p. 45-77 (Accade-
mia dei Lincei, Problemi attuali di scienza e di cultura, quaderno
n<> 62).
Eubel (Conrad), B ullarium franciscanunu V-VII. Rome, 1898-1904, 3 vol.
Abrégé B u li franc.
Die avignonesische Obedienz der Mendikantenorden sowie der Orden der
M erced iarer und T rin ita rier zur Zeit des Grossen Schismas, dans Quellen
und Forschungen aus dem Gebiet der Geschichte, hggb. von der Gõrres-
gesellschaft, I, 2, Paderbom 1900.
-, Die w ahrend des 14. Jhdts. in Missionsgebiet errichteten Bistümer, dans
Ehses (St.), Festschrift zu elfhundertjahrigen Jübilãum des deutschen
Campo Santo in Rom, Fribourg en Br., 1897, p. 170-185.
-, H ierarchia catholica m edii ae\n, I. \en éd., Miinster, 1898; 2e éd., Müns-
ter, 1913.

Fedalto (Giorgio). La chiesa latina in Oriente. Verone, 1973-1976, 2 vol.


(Studi religiosi, 3) (le second volume, traitant de la H ierarchia latina
Orientis, paru trop tard pour que nous puissions 1’utiliser ici, reprend
et complète la partie orientale de la H ierarchia d’Eubel).
Fejer (G.), Codex diplom aticus Hungariae ecclesiasticus et civilis. Bude 1829­
1844, 43 vol.
Fiey (J.-M.), Chrétiens syriaques entre Croisés et M ongols, dans Orientalia
christiana analecta, t. 97, 1974, p. 327-341.
-, Chrétiens syriaques sous les M ongols (ll-K h a n a t de Perse, X I l I e-X IV e siè­
cles). Louvain, 1975 (Corpus scriptorum christianorum orientalium,
vol. 362, Subsidia, t. 44).

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XX liste d e s o u v r a g e s c it ê s

F o n te s : voir Pontifícia commissio. . , . , . ,


Franke (H.), D ie Gesandschaft des Johann von M a rign ola in Spiegel der chme-
sischen Literatur, dans Asien. T ra d ition und Fortschrist. Festschrift fUr
H ors t H am m itzsch, Wiesbaden, 1971, p. 117-134.

Gay (J.), L e pape Clém ent V I et les affaires d O rie n t (1342-1352). Paris, 1904.
G eraud de Frachet, Vitae fratrum ord in is praedicatorum , éd. B. Reichert,
dans M on w n e n ta o r d p ra e d hist., I, 1896.
Gestes des C h ip r o is : éd. dans R ecu e il des H istoriens des Crotsades. D ocu-
m ents Arm éniens, II. •
Golubovich (Girolamo), B ib lioteca b io-b ib liog ra fica delia Terra Santa e
d e llO rie n te francescano. Quaracchi, 1906-1927, 5 vol. (constituam la pre-
mière série parue sous ce titre). Abrégé: Golubovich.
E pistola syria D y on isii episcopi Taurisiensis, dans Archiv. franctsc. hist.,
X IX , 1926, p. 351-352. , , _
Grégoire d'Akanc, H istory o f the nation o f the archers, éd. Black et Frye, dans
H a rva rd J ou rn a l o f Asiatic studies, XI, 1949, p. 269-399.
Grousset (René), L E m p ir e des steppes. Paris, 1939.
H is to ire des Croisades et du royaume franc de Jérusalem. Pans, 1934-1 ,
3 vol. ,
Guillaum e Adam, De m od o Saracenos extirpandi, éd. Ch. Kohler, dans
R e c u e il des H istorien s des Croisades. D ocum ents arm éniens, II.
Guillaum e de Rubrouck : voir Van den Wyngaert, S in ica franciscana.
Guillaum e de Tripoli, Tractatus de statu S a ra cen oru m et de M a h om e to pseu-
doprop heta et de eo ru m lege et fide, éd. H. Prutz, dans K u ltu rg e sch k h te
d er Kreuzzüge, p. 573-598.
Guillaum e de Tyr, H istoria reru m in partibus transm arinis gestarum, dans
R e c u e il des H istoriens des Croisades. H istoriens occid entau x, I, 1 et 2.
Guzman (G regory G.), S im o n o f S a in t-Q uentin and the D o m in ic a n m ission to
the M o n g o l B a iju : a reappraisal, dans Speculum , X LV I, 1971, p. 232-249.

Halecki (Oscar), D ip lom a tie p on tifica le et a ctivité m issio n n a ire en Asie aux
X I I I e-XrVe siècles, dans C om itê In tern a tion a l des sciences historiques.
X I I e Congrès. V ienne 1965. Rapports, II, H is to ire des continents, p. 5-32.
Sixte IV et la ch rétien té orientale, dans M élanges E u g èn e Tisserant, Cité du
Vatican, 1964, II, p. 245 et suiv. (Studi e testi, 232).
H a llb e rg (Ivar), L 'E x trê m e -O rie n t dans la litté ra tu re et la cartogra p h ie de
VO ccident des X l I I e, X I V e et X V * siècles. Goteborg, 1907.
Ham bis (Louis), Les cim etières de la rég ion de Zaiton, dans Comptes-rendus
de 1'Académie des In s c rip tio n s et Belles-Lettres, 1960, p. 213-221.

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LISTE DES OUVRAGES CITES XXI

Jean de P lancarpin H istoire des M ongols (en collaboration avec Dom


Jean Becquet). Paris, 1965.
Hamilton (James), Le texte turc en caractères syriaques du grand sceau cruci-
form e de M ar Yahballaha III, dans Journal Asiatique, CCLX, 1972, p. 155­
170.
Haroldus (Fr. Franciscus, Hibemus), Beati Alberti a Sarthiano, O.M. reg.
observ., vita et opera. Rome, 1688.
Haython, La flo r des estoires de la terre d'Orient, dans Recueil des Hist. des
Croisades. Docum ents Arméniens, II.
Heidenm issionen und Kreuzzugsgedanke in der deutschen Ostpolitik des M it-
telalters, hggb. H. Beumann. Darmstadt, 1963 (Wege der Forschung, 7).
Heyd (W.), H istoire du com m erce du Levant, trad. Furcy Ravnaud. Leipzig,
1885-1886, 2 vol.
-, Studien über die K olonien der Rõm ischer Kirche in der Tartaren-lander im
13. und 14. Jh d t. . . , dans Zeitschrift für die historische Theologie,
XXVIII, 1858, p. 260-324.
Hill (sir George), A history o f Cyprus, t. II et III. Cambridge, 1948.
H istoire de M ar Jabalaha III, patriarche des Nestoriens (1281-1317), et du
m oine Rabban Çauma, ambassadeur du roi Argoun en Occident (1287),
trad. J.-B. Chabot. Paris, 1895 (extrait de Revue de 1’Orient latin, I, 1893,
p. 567-610 et II, 1894, p. 73-142, 235-304). En traduction anglaise: Wallis
Budge (Sir E.A.), The Monks o f Küblâi Khàn, Em peror o f China, o r the
history o f Rabban Sawmâ. Londres, 1928. En traduction russe: N.V. Pigu-
levskaja. Istorija M ar Iabalahi I I I i Rabban Saumy. Moscou, 1958 (Aka-
demija Nauk SSSR. Institut Vostokovedenija).
Hofmann (G.), Die E inigung der armenischen Kirche m it der katholischen
K irche auf dem K onzil von Florenz, dans Orientalia christiana periódica,
V, 1939, p. 151-185.
Kopten und Aethiopen auf dem K onzil von Florenz, dans Orientalia chris­
tiana periódica, VIII, 1942, p. 5-39.
-, Pàpstliche Gesandtschaften für die Nahosten. 1415-1453, dans Studia mis-
sionalia, V, 1950, p. 47-71.
Papst K alixt 111 und die Frage der Kircheneinheit im Osten, dans Miscella-
nea G iovanni Mercati, III, 1946, p. 209-237 (Studi e Testi, 123).
Papst Pius I I und die Kircheneinheit des Ostens, dans Orientalia christiana
periódica, XII, 1946, p. 217-237.
Hryts’ak (Pavio), Halytsko-Volynska derzhava (The duchy of Halych-Volhy-
nia). New-York, 1958 (Shevchenko Scientific society, Ukrainian studies,
vol. 5).

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xxrv LISTE DES OUVRAGES CITÊS

D ie H eidenm issionen des Spatm ittelalters. Festschrifí zum siebenhun-


dertjahrigen Jübiliàuni der Franziskanerm issionen (1219-1919). Münster,
1919 (Franziskanische Studien, Beiheft 5).
Le Quien (Michel), O riens christiantis. Paris, 1740, 3 vol.
L iv re (L e) de 1'estat du grant kan : voir Jean de Cori.
Loenertz (Raymond-J.), Deus évéques dom in icains de Caffa, dans A rchivum
fratrum praedicatorum , V, 1935, p. 346-357.
Evêques dom inicains des deux Annénies, dans Arch. F.P., X, 1940, p. 258
et suiv.
- Frère Philippe de B indon In con tris, O.P., du co u v e n l de Péra, in q u isite u r en
O rieni, dans A rch ivu m F.P., XVIII, 1948, p. 265-280.
-, Les m issions dom inicaines en O rie n t au X I V e siècle et la Société des Frères
Pérégrinants p o u r le Christ, dans A rch ivu m F.P., II, 1932, p. 1-83; III,
1933, p. 5-55; IV, 1934, p. 1-47.
-, La Société des Frères Pérégrinants. Etude sur VOrient dom in ica in , I, Rome,
1937 (Institutum historicum fratrum praedicatorum, Dissertationes his-
toricae, fase. VII). Abrégé : La Société.
- , La Société des Frères Pérégrinants de 1374 à 1475. Etude su r 1'Orient d om i­
nicain. II, dans A rch ivu m F.P.. XLV, 1975, p. 107-145.
Lopez (Roberto S.), N u ove lu c i sugli Ita lia n i in E strem o O riente prim a di
C olom bo, dans Studi Colom biani, Gênes, 1952, III, p. 337-398. (Atti dei
Convegno intemazionale di Studi colombiani, Genova, 1951).
-, Venezia e le grandi linee dellespansione com m ercia le nel secolo X I 11, dans
La civiltà veneziana dei secolo di M a rco Polo, Florence, 1952, p. 39-82.
Ludolf de Sudheim, De itinere Terre Sancte, éd. G.A. Neumann, dans Archi-
ves de 1'Orient latin, II, p. 305-377.

Makrizi, H istoire des sultans m am louks du Caire, trad. F. Quatremère, Paris,


1837-1845, 2 vol.
Mansi (J. D.), S a croru m c o n c ilio ru m nova et am plissima collectio. Venise et
Florence, 1759-1798, 31 vol. (réimpr. 1901-1927).
Marco Polo, The description o f lhe world, éd. Sir P. David, A.C. Moule, P. Pel-
lio t ... Londres, 1938 (voir aussi Pelliot, Notes on M.P.\ traduetion fran-
çaise par L. Hambis, M a rco Polo, La description du monde, Paris, 1955).
Marignolli : voir Jean.
Mas-Latrie (Louis de). H istoire de itle de Chypre sous le règne des rois de la
dynastie de Lusignan. Paris, 1852-1874, 3 vol.
Matanic (Athanasius). Bulla m issionaria «C u m hora und ecim a« ejusque juri-
dicum « D ire cto riu m apparatus», dans A rch ivu m francisc. hist., L, 1957,
p. 364-378.

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LISTE DES OUVRAGES CITÊS XXV

Mathieu Paris, Chronica tnajora, ed. Luard. Londres, 1872-1873, 7 vol. (le
vol. VI comprenant les Additamenta) (Rerum britannicarum medii aevi
scriptores). Abrégé : Matth. Paris.
Mayer (Hans-Eb.), Bibliographie zur Geschichte der Kreuzziige. Hanovre,
1960 (la partie consacrée plus spécialement à 1'histoire des missions:
p. 190-193).
Mecerian (Jean), Histoire et institutions de 1'Eglise arrnénienne. Bcyrouth,
1965 (Recherches publiées sous la direction de l'Institut des Lettres
Orientales, XXX).
Mercati (Angelo), Monumenta Vaticana veterem diocesim Colutnbensem (Qui-
lon) et ejusdem episcopum Jordanum Catalanum O. P. respicientia. Rome,
1923.
M .G .H .: M onum enta Germaniae histórica.
Michel le Syrien, Chronique, éd. et trad. J.-B. Chabot. Paris, 1899-1904, 4 vol.
en 5 fase.
Migne (J.-P.), Patrologiae cursus completus. Series latina. Paris, 1841-1864,
221 vol. Abrégé Patr. Lat.
Id. Series graeca. Paris, 1857-1876, 167 vol. Abrégé Patr. Gr.

Miklosich (Fr. v.) et Mueller (J.), Acta patriarchatus Constantinopolitani,


MCCCXV-MCCCCII. Vienne, 1860-1872, 2 vol. (Acta et diplomata graeca
medii aevi sacra et profana, I-II).
Mollat, Jean X X I I : voir Registres et Lettres des Papes. Jean X X II. Lettres
communes.
Monneret de Villard (Ugo), I l lib ro delle peregritiazioni nelle parti d'Oriente
di trate R icold o da Montecroce, Rome, 1948. (Institutum historicum
FF.PP., Dissertationes historicae, XIII).
Storia delia Nubia cristiana. Rome, 1938.
- La vita, le opere e le viaggi di frate R icoldo da M ontecroce, O.P., dans
O rientalia christiana periódica, X, 1944, p. 227-274.
M onum enta franciscana, ed. J.S. Brewer, Londres, 1858 (Rerum britannica­
rum medii aevi scriptores).
M onum enta Germ aniae histórica. Epistolae saeculi X I I I e regestris pontificum
rom anorum , ed. C. Rodenberg. Berlin, 1893. Abrégé : MGH, Epist.
Scriptores. Hanovre, 1826-1934, 32 vol. Abrégé : MGH, SS.
M onum enta ordinis praedicatorum histórica. Rome et Stuttgart, 1897, et suiv.
A b r é g é : M.O.P.H.
Moranvillé (H.). M ém oire sur Tamerlan et sa cour, dans Bibliothèque de
l'E co le des Chartes, LV, 1894, p. 433-464.
Mosheim (J.L.), H istoria Tartarorum ecclesiastica. Helmstadt, 1741.

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XXVI LISTE DES OUVRAGES C1TÊS

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Moule (A.C.), Christians in China before the year 1550. Londres, 1930.
-, voir Marco Polo.

N.Z.M.W., Neue Zeitschrift fü r Missionswissenchaft. Schõneck-Beckenried,


1945 et suiv.

Obertynski (Sdislaus). Die F lo re n tin e r U n ion der p oln is ch en A rm e n ie r und


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p. 42 et suiv.
Odoric de Pordenone, Les voyages en Asie du b ien h eu reu x frère O d o ric de
Pordenone, éd. H. Cordier. Paris, 1891 (Recueil de voyages et de docu­
ments. . ., X).
Ohsson (C. Mouradgea d'), H istoire des M ongols. La Haye et Amsterdam,
1834, 4 vol.
Olivier de Paderbon, Die Schriften des K õ ln e r D om scholasticus . . . Oliverus,
éd. H. Hoogeweg. Tübingen, 1894 (Bibliothek des litterarischen Verein
in Stuttgart, 202). '
O rientalia christiana periódica. Rome, 1935 et suiv. (Pontificium Institutum
Orientalium studiorum).

Papal L e tte rs : Calendars o f entries in the Papal Registers rela tin g to Great Bri-
tain and Ire la n d Papal Letter, éd. W.H. Bliss, C. Johnson, J.A. Twen-
l o w . .. Londres, 1893 et suiv.
Patr. G r. ; Patr. Lat. : voir Migne.
Pellegrini (L.), Le m issioni francescane sotto Alessandro I V (1254-1261), dans
Studi francescani, 64e année, 1967, p. 91-118.
Pelliot (Paul). A prop os des Comans, dans Jou rn a l Asiatique, 1920, p. 125-185.
Chrétiens d ’Asie centrale et d'Extrêm e-O rient, dans T o u n g pao, XV, 1914,
p. 623-644.
M élanges sur 1'histoire des Croisades, dans M ém oires de fA c a d é m ie des lns-
crip ú on s e, Belles-Lettrcs, XLIV, 1. 1960. p. 1-97. (tirage à part, Paris,

Les M on gols ei la Papauté, dans R evue de lO r ie n t c h ré tie n X X II I 1923


p. 3-33; XXIV, 1924, p. 225-325; X X V III, 1931-1932, p. 3-84^ ’ ’
-. Notes on M arco P o lo publiées par L. Hambis, Paris, 1959-1973, 3 vol.

’’ (CEuvres „ T " d e ! \ H o : de d ' ° r' P ubl L. Hambis. Paris, 1950


ILbuvres posthumes de Paul Pelliot, II).

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LISTE DES OUVRAGES CITÊS XXVII

Recherches sur les chréliens d ’Asie cenírale et d'Extrêm e-Orient, publiées


par J. Dauvillier et L. Hambis. Paris, 1973 (CEuvres poslhumes de Paul
Pelliot).
Zacharie de Saint-Thaddée et Zacharie Séfêdinian, dans Revue de ih is to ire
des religions, CXXI, 1942-1943, p. 151-154.
voir a u s si: Marco Polo.
Petech (Luciano), Les marchands italiens dans le m p ire m ongol, dans Journal
Asiatique, CCL, 1962, p. 549-574.
Pfeiffer (N .)p Die ungarische D om in ika nerprovinz von ihrer G riin d u n g 1221
bis zur Tartarenverw üstung 1241-1242. Fribourg, 1913.
Pisanu (L.), In n ocen zo IV e i Francescani. Rome, 1968 (Studi e testi frances-
cani, 41).
Pontificia commissio ad redigendum codicem juris canonici orientalis. F on ­
tes, series III. Nous avons utilisé les volumes suivants de cette collec-
tion (en y renvoyant lorsque les documents que nous citons figurent
dans des publications antérieures): II. - Acta In n o ce n tii papae 111, éd.
T. HaluSéynsckyi (1944); III. - H o n o rii I I I et Grego rii IX , éd. A. L. Tautu
(1950); IV. - In n o ce n tii IV ( l 4rc partie), - Alexandri IV (2C partie), éd.
T. HaluScynskyi et M. M. Wojnar (1960-1966); V, 1. - Urbam IV, Clemen-
tis IV. G re g o rii X, éd. A. L. Tautu (1953); V, 2. - ab In n ocen tio V ad Bene-
d ictu m X I, éd. F. M. Delorme et A. L. Tautu (1954); VII, 1. - Clementis V,
éd. A. L. Tautu (1955); VII, 2. - Joannis X X II, éd. A. L. Tautu (1952); VIII.
- B enedicti X II, éd. A. L. Tautu (1958); IX. - Clementis VI, ed. A. L. Tautu
(1960); X. - In n o ce n tii VI, ed. A. L. Tautu (1961); XI. - Urbani V, ed.
A. L. Tautu (1964); XII. - G regorii X I, ed. A. L. Tautu (1966); le tome
XIII, dont la première partie (ed. A. L. Tautu, 1970), concerne les actes
des papes de la série romaine et la seconde (ed. A. L. Tautu, 1971) ceux
des papes de la série avignonnaise, d ’Alexandre V et Jean XXIII, com-
prend essentiellement des analyses au lieu des textes intégraux.
Abrégé : Fontes.
Pressuti (P.), Regesta H o n o rii papae III. Rome 1888, 2 vol. - Abrégé: Pres-
suti.
Prutz (H.), K ulturgeschichte der Kreuzzüge. Berlin, 1883.

Quetif (J.) et Echard (J.), Scriptores ordinis praedicatorum. Paris, 1719-1721,


2 vol.

Raschid el Din, H istoire des M ongols de la Perse, éd. et trad. E. Quatremère.


Paris, 1836, tome I seul paru.

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X X VIII LISTE DES OUVRAGES CITÊS

(Raym ond Etienne), D ire c to riu m ad passagium faciendum , ed. Ch. Kohler,
dans R e cu e il des historien s des Croisades. D o cu m en ts Arm éniens, II.
Autrefois attribué à Burchard de Mont-Sion, ce texte est souvent
appelé le Pseudo-Brocardus.
Raynaldus (O.), Annales ecclesiastici ab a n n o 1198, ed. J. D. Mansi, Lucques,
1747-1756, 15 vol.
R e c u e il des H istoriens des Croisades, publié par 1Académie des Inscriptions
et Belles-Lettres. Paris, 1841-1906. Les différentes séries citées sont
abrégées Doc. Arni. ( D ocum ents Arm éniens, 2 vol., 1869 et 1906), Hist.
Occ. ( H istoriens Occidentaux, 5 vol. en 6 tomes, 1872-1895).
Regestum Clem entis papae V, édition des Bénédictins. Rome, 1885-1892, 8
vol., et index, Rome, 1946.
Reg. (avec le nom du pape) renvoie soit aux Registres et Lettres des Papes,
quel que soit le titre du volume, soit à 1'ouvrage précédent, soit à celui
de Pressuti.
Registres et Lettres des Papes du X I I I e siècle (Bibliothèque des Ecoles fran-
çaises d'Athènes et de R o m e ) : Les registres de G ré g o ire I X (L. Auvray);
- In n o c e n t I V (E. Berger); - Alexandre TV (Bourel de la Roncière, de
Loye, de Cenival, Coulon) - Urbain I V (J. Guiraud et S. Clémencet); -
Clém ent I V (E. Jordan); - G régoire X et Jean XXI (J. Guiraud et
L. Cadier); - N icolas I I I (J. Gay et S. Vitte); - M a rtin I V (F. Olivier-Mar-
tin et al.); - H on oriu s IV (M. Prou); - N icola s I V (E. Langlois); - Boni-
face V I I I (G. Digard, M. Faucon, A. Thomas, R. Fawtier); - B enoit X I
(C. Grandjean).
Registres et Lettres des Papes du X IV e siècle. Nous avons eu recours dans
cette série, également publiée par l’École française de Rome, à : Jean
X X II. Lettres com m unes, éd. G. Mollat et G. de Lesquen; B e n oit X II. Let­
tres com m unes, éd. J.-M. Vidal; B en oit X II. Lettres closes et patentes, éd.
J.-M. Vidal et G. Mollat; Clém ent VI. Lettres c lo s e s . . . intéressant les
pays autres que la France, éd. E. Déprez et G. Mollat; In n o c e n t VI. Let­
tres secrètes et curiales, éd. P. Gasnault et M.-H. Laurent; Les registres
d V rb a in V, éd. M. Dubrulle; Lettres com m unes d ’. . . Urbain V, éd.
Membres de l'Ecole et M.-H. Laurent, P. Gasnault et M. Hayez; Lettres
secrètes et curiales d e . . . G rég oire X I . . . , é d. G. Mollat.
Reichert (B.), Acta ca p itu lo ru m generaliu m ord in is praedicatorum , 3 vol.
(Monumenta ordinis praed. hist., III, IV et VIII).
Litterae encyclicae m agistrorum gen era liu m o rd in is p ra ed ica toru m (1233­
1376). Stuttgart, 1900 (Monumenta ordinis praed. histórica, V).
Remusat (Abel), M ém oires sur les relations p olitiq u es des p rin ces chrétiens, et
particuherem ent des rois de France, avec les em pereurs m ongols, dans

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LISTE DES OUVRAGES CITÊS XXIX

M ém oires de 1'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, VI, 1822, p. 396­


469. et VII, 1824, p. 335-438.
Richard (J.), A bou t an accou n l o f the battle o f Hattin referring to Frankish
m ercenaries in O riental M oslem states, dans Speculum , XXVII, 1952,
p. 168-177. - Cet article, comme plusieurs autres, a été reimprime dans
O rie n t et O ccident au Moyen Age. Contacts et relations ( X I l '- X V e s.). Lon­
dres, 1976 (Variorum reprints) que nous abrégerons ci-après OrOcc.
Les autres articles cités ci-après, dans la mesure oú ils ont paru avant
1977, doivent être réimprimés cette année mème dans un volume de la
même collection sous le titre Les relations entre O rient et O ccident au
M oyen-Age : études et documents.
-, La co n v ers io n de Berke et les débuts de iislam isation de la H orde dO r, dans
Revus des Etudes islamiques, 1967, p. 173-184 (O rO cc).
Chrétiens et M ongols au Concile : la Papauté et les M ongols de Perse dans la
seconde m oitiè du X I I I e s., dans 1274. Année charniére, p. 31-44.
Le début des relations entre la Papauté et les M ongols de Perse, dans Jour­
nal Asiatique, C C X X X V II, 1949, p. 287-293.
D eux évêques dom inicains, agents de 1’Union annénienne au Moyen-Age,
dans A rch ivu m fratrum praed, XIX, 1949, p. 255-265 (OrOcc).
E véchés titulaires et missionnaires dans le « Provinciale Romanae Eccle-
sia e», dans Mélanges d'archéologie et dhistoire, LX, 1948, p. 227-236.
L 'E xtrê m e-O rie n t légendaire au M oyen-A ge: R oi David et Prètre Jean, dans
Annales d E th iop ie, II, 1957, p. 225-242 (O rO cc).
-, Is o l le Pisan : un aventurier franc gouverneur d'une provin ce m ongole?,
dans Central Asiatic Journal, XIV, 1970, p. 186-194 (OrOcc).
La m ission en O ccident de Rabban Çauma et IV n io n des Eghses, dans X I 1°
C on vegn o Volta. O riente e Occidente nel medio evo, Rome 1957, p. 162­
167 (Accademia dei Lincei) (OrOcc).
Les m issionnaires latins dans lin d e au X IV e siècle, dans Studi veneziani,
X II 1970 (Mélanges Loenertz), p. 231-242 (O rO cc).
The M o n g o ls and the Franks, dans Journal of Asian history, III, 1969, p. 45­
57 (OrOcc).
- Les M o n g o ls et V O ccid en t: deux siècles de contacts. dans 1274. p. 85-96.
Les navigations des O ccidentaux sur lO céan Ind ien et la m er Caspxenne
’ (X I1 ‘ X V e S ) dans Sociétés et com pagnies de com m erce en O rient et dans
IV c é a n In d ie n , Paris 1970, p. 353-363 (Bibliothèque de 1'Ecole pratique
des Hautes Etudes, VI- section) (O rO c c ): et en traduction angla.se dans
Iran. J ou rn a l o f Persian studies, VI. 1968, p. 45-52
- La oapauté et les m issions catholiques en O rient au Moyen-Age, dans Melan-
' ges d 'a rch éologie et d h istoire, LVIII. 1941-1946. p. 248-266.

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X XX LISTE DES OUVRAGES CITfiS

Les p re m ie rs m issionnaires latins en E th io p ie ( X I I '- X I V r su\ le\), dans Atti


ciei C o n ve gn o in te m a zio n a le di studi ctio p ici, Rome I9f»0, p. 121 129
(O rO c c ).
Q uelques textes su r les p rem iers temps de 1'Eglise latine dc Jérusalem, dans
R e c u e il de travaux offerts à M. C lovis Brunel, Paris, 1955, 2 vol., t II.
p. 420-430 (O rO c c ).
- , Le royaum e la tin de Jérusalem. Paris, 1953.
-, S u r les pas de P la n ca rp in et de R u b r o u c k : la lettre dc saint Ixm is à Sartaq,
dans J o u rn a l des Savants, 1977, p. 49-61.
-, U ltim a tu m s m o n g ols et lettres a p o cry p h e s : 1'Occident et les m otifs dc guerre
des Tartares, dans C entral A siatic Journal, XVII, 1973, p. 18í>-1^4 (O rO cc).
Ricoldo de Montecroce, Lettres de R. de M. sur la prise d ’Acre (1291), ed
Rõhricht, dans A rchives de VOrient latin, II, 1884. p. 258-29(v
-, L ib e r P eregrin a tion is, éd. Laurent, P eregrinatores m ed ii aevi.
-, Voir Dondaine, Monneret de Villard.
Ripoll (Th.) et Brem ond (A.), B u lla riu m ord in is fratrum praedicatoruin.
Rome, 1729-1740, 8 vol. - Abrégé Ripoll.
R oberg (B.), D ie Tataren a u f dem 2. K o n z il von Lyon 1274, dans Annuarium
h istoria e c o n c ilio ru m , V, 1973, p. 241-302.
Rõhricht (R.), G eschichte des K õ n ig re ich s Jerusalem. Innsbruck. 18^8.
-, Q u in ti b e lli sacri scrip tores m inores. Genève, 1879 (Société de 1'Orienl
latin).
- . Regesta regni H ierosolym itani. Innsbruck, 1893; avec Additam eutum , Imis-
bruck, 1904.
-, T estim onia m in ora de q u in to b e llo sacro. Genève. 1882 (Société de 1'Orienl
latin).
Roncaglia (Martiniano), Frère Laurent de Portugal, O .F.M ., et sa légation en
O rient. dans B o lle tin o delia badia greca di Grottaferrata, nov. ser, VII,
1953, p. 33-44.
-, / Francescani in O riente durante le Crociate. Le Caire, 1954 (Biblioteca bio-
bibliografica delia Terra Santa e dell’Oriente francescano, serie quarta.
Studi, 1.1, Storia delia provincia di Terra Santa, vol. 1). En version
anglaise : Saint Francis o f Assisi and the M id dle East, 3° ed., Le Caire,
1957.
Rubrouck : voir Guillaume.
Runciman (Sir Steven). A history o f the Crusades. Cambridge, 1951*1954,
3 vol.
Rymer (Th.), Foedera, conventiones, litterae et cu ju scu m q u e generis acta
pub lica in te r reges Angliae et alios quosvis . . . 3C éd., La Haye, 1739-1745,
10 vol.

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I IM I IM.H (MA M Mil *< « III"» XXXI

Sacv (Silvesliv doV W»m»kmm* mo une * <»» »•♦%/»«•»»•/<*/«« #* /##«*<///«* de la m erla n


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l>. 470 cl sui\
Saint-Martin \.l V X »»r»*\ hi\t\ni%ine\ r l f!tU>fitaphh/ne\ \w lA in ie n ie . Paris,
18 W. 2 vol.
S a lla v ille *S.V I n fv n p fc ./*• mhv J n h t / a n M <"< X M ' siè cle : les
Gvrtiitix, dans l\ fi»>> lítnc, 10o, I*>M. |» 1'M ci hiiIv.
Salibi (Kam al S V lh e mmmum/i’ chutcJi in //#«• Míihlle -l/M ' aml it s th iio n wilh
Rome. dans OmVm> c/imaímíhiv, \l II, l ‘^8, |». IM,
S a n to n i O V n v V 4 / M i ./«' Nuxc.m o. o b s e n v n t ei hwnauiste. envoyé p o n tifi­
c a i *) J éiu sa lem et <!n dails d ‘a,i h eolo^ie et ( I histoire.
\to\Yn~ \c<* et < ’ <*•*?;*> »»»►«/«•»m«*\ t. 8(\ IMM, i» lf,k> 211.
S b a ra le a l l . H , ) , H u lla m o n ftunct.stwtwn. I IV. Home, 17591768, 4 vol.
A b tv js c : S K u aloa-
S c h a c tc i \\X lh e Xn^aben det \po\tolÍMhen Kannner nnter Johann
X X I I . Padorh orn . l ° U IíU íi‘ix'sh%'n*%
IIni-1*«II. Viitiknnlschc O ucllen, II).
P ie \usgaben def A f^ t o lis e h e n Kananet untet üenediki XI, Klcniens VI
und /itihvvMv \ I |/„V5*rí<%-*> P iu lcrbot». 1**14 (Vullkm ilschc Oucllcn, III).
- D ie G t M s f v n M ' » t^ p s tliw h e n K m i e untei Johann X X I I ( 1*16.1334) filt
die oricn ta lis ch e Christen, insbe^ondeie hlt das k tiniu» eich Annenien,
dan s O ric n s chti*tMHHs< IV. I^ W . p, 183*187.
S c h ih b c iv e r /*»«' KVi>r»t des Johanne* S c h iltb e ^ e i aus M ü n clien m kuropa.
Asicn u n d A fn k « w n I M bis 14.'?. cd. Nciunann. Munich, 1859 - dans
un aulrc icxtc. Hans S c h iltb e tç e n Rei\ebueh, cd Umuinuntcl. Tubin-
cen 1883 iHibliolhok des I itonu ischcii W iv ln s in Sluil^ui(. 172)
Schlum boivc. l l U Chalandon 0 ‘\> ct UlanduM (A ), S i t f l l j r a p h i e de lO n e n t
la tm Pa lis l° 4 * «uvltcolo^iquc ct hisloilquc du haul

u m Rubruk. dans Studn n. \\ . . |■ * ’ d


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Mongt>U net srx\>Jt \ I I I \ H < Milwn> *

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X X X II LISTE DES OUVRAGES CITÊS

S in or (Denis), In tr o d u c tio n à le tu d e de 1’E u ra s ie centrale. Wiesbaden, 1963.


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- Le M o n g o l vu p a r 1'Occident, dans 1274. A nnée ch a rn ière.
Les re la tio n s en tre les M o n g o ls et V E u rop e ju s q u a la m o rt d 'A rg h oitn et de
Béla IV , dans Cahiers d ’h is to ire m on d ia le, III, 1956, p. 39-62.
Un voy a geu r du X I I I e s iè c le : le D o m in ic a in J u lie n de H on g rie, dans Bulle-
tin o f the s c h o o l o f O rie n ta l and A siatic studies, XIV, 1952, p. 589-602.
Skriinskaja (Elcna C.), S to ria delia Tana, dans S tu d i veneziani, X, 1968,
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Soranzo (Giovanni), I I Papato, 1’E u ro p a cristian a e i T a r t a r i: un secolo di
p en etra zion e occid e n ta le in Asia. Milan, 1930 (Pubblicazioni deli Univcr-
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Spu ler (Bertold), Le ch ristia n ism e chez les M o n g o ls au X l l l e siècle, dans
1274. Année charnière.
D ie G old en e H o r d e : die M o n g o le n in Russland, 1223-1502. 2C éd., Wiesba­
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Streit (Robert), B ib lioth eca M issionum . IV. Asiatisches M issionsliteratur,
1245-1599. Aix-la.Chapelle, 1928.
Sugranyes de Franch (R.), R aym ond Lulle, d o cte u r des m issions, avec un
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Beckenried, 1954 (Neue Zeitschrift für Missionswissenschaft, Supple-
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Suriano, I I trattato di Terra Santa e d e liO rie n te di frate Francesco Suriano,
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Tamarati (M.), L E g lis e géorgienn e des orig in es jusqu a nos jours. Rome, 1910.
Tekeyan (Pascal), Controverses ch ristolog iq u es en A rm én o -C ilicie dans la
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T hroop (Palm er A.), C riticism o f the Crusade. A study o f p u b lic o p in io n and
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Tisserant (card. Eugène), E a stern c h ris tia n ity in ín d ia , adapted bv
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R evue de 1’O rie n t chrétien, XXIV, 1924, p. 336-355.
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col. 157-323.

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LISTE DES OUVRAGES CITÈS XXXIII

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dans Mélanges Lefort ( M uséon, 1946, p. 547-556).
Tournebize (H.-Fr.), Arménie, dans D iction n a ire d'histoire et dr géogruphir
écclésiastiques, IV, col. 290-391.
Les Frères-Uniteurs, dans Revue de iO rie n t chrétien, XXII, 1921 1922,
p. 145-161 et 249-279.
-, H istoire p olitiq u e et religieuse de iA rm énie, I (seul paru). Paus, 1900
Trasselli (Carmelo), S u gli E u rop ei in Armênia. A proposito di un p rivileg io
trecentesco e di una novella dei Boccaccio, dans A rch ivio storico nahuno,
CX X II, 1964, p. 471-491.
Un italiano in E tiópia nel X V a s e c o lo : Pietro R om bulo di Messma, dans
Rassegna di studi etiopici, I, 2, 1941, p. 172-202.
Troll (Christian W.), Die Chinamission im Mittelalter, dans Franznkanisitu-
Studien, XLVII, 1966, p. 109-150, et XLIX, 1967, p. 22-79

Van den Oudenrijn (M.-A.), Bishops and archbishops o f Naxivan, dans Ari hi
vum fratrum praed., VI, 1936, p. 161-216.
Les constitu tions des Frères Arméniens de Saint Basile en Italie, Rorne,
1940 (Orientalia christiana analecta, 126).
L'évêque d om inicain fr. Barthélemy, fondateur supposé d u n couvent dans Ir
Tigré au 14e siècle, dans Rassegna di studi etiopici, V, 1946, p. 7-16
Linguae haicanae scriptores O.P. congregationis Fratrum U nitorum et I ra
trum A rm enorum ordinis sancti Basilii citra mare consistentium, Bcrnc,
1960.
- The monastery o f Aparan and the Armenian w riter fra MxitariL, dans Arcln
vum fratrum praed, I, 1931, p. 265-308.
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- Uniteurs et D o m i n i c a i n s d'Arménie, dans Oriens christianus, XL, 1956,
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voir aussi p. 217, n. 199.
Van den Wyngaert (Anastase), Jean de M ontcorvin, O.F M., prem ier archevé-
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- Sinica franciscana, I, Itinera et relationes fratrum m in oru m saec. X I I I et
X IV . Quaracchi, 1929. Abrégé: Sinica franciscana.
Van der Vat (Odulphus), Die Anfange der Franziskanermissionen und ilire
W eiterentw icklung im nahen O rient und in den mohammedanischen iMn-

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XXXIV LISTE nHS OlIVRACiHS CITfcS

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Vidal (J.-M.), B e n oit XI I . Lettres d o s e s : voir Registres et Lettres des Papes.
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M C C C C L X X V ). Gênes, 1868-1879 (Alli delia Società ligure di storia
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Vitae paparu m A venionensiutn, ed. E. Baluze, nouv. éd. par G. Mollat. Paris
1916-1927, 4 vol.
Voerzio (M.), Fra G u g ticlm o da T rip oli, orientalista d om en ica n o nel secolo
X I I I , dans M e m o rie dom enicane, 71, 1954, p. 73-113, 141-170, 209-250, et
72, 1955, p. 127-148.
Von den Brincken (Anna-Dorothee), Die «N a tio n e s ch ristia n oru m orienta-
li u m » im Verstandnis der lateinischen H istoriographie von der Mitte des
12. bis in die zweite Halfie des M.Jhdts. Cologne et Vienne, 1973 (Kòlner
historische Abhandlungen, 22). - Abrégé: Die «N a tio n e s ».
-, Le N estorianism e vu par TOccident. I m sitiuuion générale de 1’Eglise nesto­
rienn e au M oyen Age, dans 1274. Année charnière.
-, Die universaIhistorischen Vorstellungen des Johann von M arignola OFM,
dans A rch iv fü r Kulturgescliiclite, IL, 1967, p. 297-339.

W adding (L.), Annales M in orum . 2«' éd., Rome, 1731-1736, 16 vol.


Witte (C.-M. de). Une ambassade éthiopienne à R om e en 1450, dans Orientaha
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Yahballaha I I I : voir Histoire.


Yule (Sir Henry), Cathay and the way thither. New edition revised . .. by
Henry Cordier. Londres, 1913-1916, 4 vol. (W orks issued by the Hakluyt
Society, 2e sér., 33, 37, 38, 41).

Zarncke (F.), D er Priester Johannes, dans Abhandlungen der kgl. s a c h s is c h e n


Gesellschaft der Wissenschaften, Philol.-Hist. Klasse, VII, 1879, p. 827­
1030, et VIII, 1883, p. 1-186.

1274. Année charnière. M utations et continuité, Paris 1978 (Colloques inter


nationaux CNRS, n° 588).

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INTRODUCTION

L CEUVRE MISSIONNAIRE AU XII* SIÈCLE


ET LA DÉFINITION D UNE DOCTRINE
DE LA MISSION

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La mission, c est-à-dire 1’évangélisation des peuples vivant en dehors de
la Chrétienté, était sans doute familière aux esprits des Occidentaux dês la
fin du X IC siècle. Mais elle se présentait surtout sous un aspect historique.
La conquête au christianisme de 1’Angleterre remontait au VIe siècle, celle
des pays frisons et saxons au VIIIe; aux X c et XIe siècles, la Pologne, la
Bohème, la Hongrie, la Scandinavie, avaient à leur tour embrassé le chris­
tianisme. Le problème missionnaire du XIIe siècle se réduisait à peu près à
1évangélisation des Slaves du bassin de 1'Elbe et de 1'Oder (pris entre
d autres Slaves déjà christianisés, ceux de la Bohême, des Carpathes et de
la Vistule, et les Germains arrêtés sur l’Elbe), des Suédois déjà touchés par
le christianisme, de leurs voisins finnois.
Au sud, les questions missionnaires se présentaient différemment. Le
bloc des pays soumis à l'influence byzantine, de la Russie à la Syrie du
Nord, relevait en principe de 1'Eglise grecque, qui était regardée par les
Latins comme une branche de leur propre Eglise, séparée de celle-ci par
des différends qui paraissaient pouvoir être aplanis par les voies diplomati-
ques - voire, comme on le vit lorsque le tsar des Valaques et des Bulgares,
Kalojean, envisagea de se soumettre à l’Eglise de Rome, par des manceuvres
politiques -. «O u tre mer», les Latins avaient implanté à partir de 1097 leurs
colonies, 011 les éléments venus d'Occident coexistaient avec des éléments
chrétiens de divers rites, tout en bordant les états soumis aux «Sarrasins»,
les Musulmans, mais peuplés eux-aussi de nombreux chrétiens. Ici, il sagis-
sait pour une part de ressortissants de 1'Eglise grecque - ceux qu’on appe-
lait Melkites ou Syriens mais pour une autre part de chrétiens séparés à
la fois des Grecs et des Latins par leur refus d adhérer à la foi définie par le
concile de Chalcédoine1.

1 Cf. Anna-D orothee von den Brincken, Die • Nationes chrislia noru m orie n ta liu m • im Ver-
stündnis der taleinischen Historiographie, von der Mitle des 12. bis in die zweite Halfte des
14. Jhdts.. Kòln, 1973 (K ó ln e r historische Abhandlungen, 22).

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4 INTKODircnON

Si nous laissons de còté 1’Eglise grecque, que l'on peut considércr


com m e ne relevant pas de la mission proprement dite, deux grands domai-
nes se laissent donc dès lors definir. Au delà des frontières de la Chrétienté
latine, nous trouvons au Nord les peuples «p a ie n s »; Slaves de Lusace, de
Brandebourg, de Poméranie; Baltes de Prusse, de Lithuanie, de Lettonie. dc
Courlande; Finnois, sur les rives de la Baltique, mais aussi disperses a tra-
vers le vaste territoire compris entre 1’Oural, les steppes, et les principautes
russes2; Lapons de 1'extrême Nord; Turcs Qipcaq (les Occidentaux les appe-
laient Comans) dans les steppes, au sud dc la Russie kièvienne et jusqu a la
basse vallée du Danube.
De ce còté, la Chrétienté du XII* siècle n'avait pas poussé bien loin ses
efforts d evangélisation; cest la nécessité de proteger les établissements
chrétiens - essentiellement allemands - qui avait décidé de I envoi d expe-
ditions, dont la principale fut la croisade lancée contre les Wendes en 1147
(l’expédition des Suédois en Finlande (1157) pouvant difficilement s identi-
fier à une «c ro isa d e»). Mais cest la conversion de certains princes wendes,
et notamment celle du prince de Brandebourg, qui permit au christianisme
d'enregistrer de ce côté ses principaux progrès3.
«O u tre-m er», la situation était plus complexe. La croisade avait lait
découvrir aux Latins la diversité des rites et des croyanccs au sein de la
chrétienté orientale, de YEcclesia orientalis qui s'identifiait à peu près pour
eux avec 1'Eglise grecque. Les chefs de la croisade. écrivant d'Antioche á
Urbain II, avaient avoué au pape leur désarroi en face de tant áhaereses et
leur désir de recevoir des directives pour savoir comment les traiter4. Pour
les Grecs, un problème délicat résidait en ce q u u n e Eglise partageant le
mcme foi, ne pouvait avoir qu une seule hiérarchie épiscopale : cette hié-
rarchie étant celle de la catégorie sociale dominante, des évèques latins
avaient pris place sur les sièges épiscopaux, et ce nest quassez tard quon
trouva la solution, en donnant aux évèques latins un vicaire grec pourvu de
la dignité épiscopale, mais au titre d'un autre siège, et de qui relevaient les

J Parm i les peuples finnois, les Esthoniens avaient reçu (très su p erficiellem en t) le chris
tianism c des Danois à la fin du X I* siècle; les Tchou des de Finlande. des Suédois, eux mêm
o ffic ie lle m e n t co n vertis par saint Eric au m ilicu du X II* siecle. ,
J Heidenm issionem und Kreuzzugsgedanke in der deutschen Ostpolitik des Mittelallers. gg
H. Beum ann, Darmstadt, 1963 (W e g e d e r Forschung. 7); E bcrhard Schm idt, Die Mcirk '
denburg unter den Askaniem (1134-1320), K óln, 1973, p. 28-37 (M itteld eu tsch e Forschunge .
71).
4 Ed. H agenm eyer, dans Archives de 1'Orient latin, t I, p. 181-183.

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CEUVRE MISSIONNAIRE AU XII» S. ET DÊF1NITION D UNE DOCTRINE 5

prétrcs de rite gre c s. Pour les autres Orientaux, la question ne se posait


pas : leurs Eglises gardaient leur autonomie. C’est donc des communautés
chrétiennes bien constituées et protégées par les princes latins, soucieux
d ’avoir 1'appui de leurs sujets indigènes, que les prélats latins avaient en
face d'eux.
Et ces communautés - jusqu'aux Maronites de Liban qui avaient, selon
Ricoldo de Monte-Croce, des coreligionnaires en Mésopotamie, et aussi, dós
le X IIC siècle, dans 1’ile de Chypre* - débordaient largement le cadre des
Etats latins. L'Eglise grecque avait fondé des chrétientés pratiquement
autonomes en Russie, en Géorgie; les Alains, les Ziques (Tcherkesses), du
Caucase, les Goths de Crimée, les Melkites (que les Latins appelaient
Syriens) en pays arabe, et jusqu a certains éléments dispersés en Asie cen-
trale, partageaient la même foi. Les Arméniens et leurs voisins les Albaniens
(Agh ou an s)7 formaient un autre groupe; les Jacobites, de foi monophvsite
et de langue syriaque, étaient répandus au Levant, en Mésopotamie, en Asie
centrale, et leurs coreligionnaires de langue copte8 en Egypte, et d ’autres
langues, mais de même rite, dans les royaumes chrétiens de N u bieg et
dEthiopie. Les Chaldéens, que les Latins appelaient Nestoriens par réfé-
rence à la doctrine dyophysite de Nestorius, étaient particulièrement nom-
breux en Mésopotamie mais aussi dans 1’Asie centrale, méridionale et

• C ette solution avait déjà été retenue au X II* siècle dans le rovaum e de Jérusalem : elle
tut éten du e a celu i de C hypre en 1213 ( Fontes . . . ad redigendum codicem juris canontct o rie n ­
ta/is, t III, n° 108, p. 147; Mas-Latrie, Histoire de l'(le de Chypre, t. III, p. 622). L a rc h ev êq u e de
Gaza et E leu th eropolis, associé en 1173 au clergé grec du Saint-Sépulcre, n eta it-il pas le
vicaire p ou r les G recs du palriarche latin de Jérusalem (D elaville le Roulx, Archives de 1’O rient
lalin I p 413)? Au X III* siècle, cette situation parait norm ale : c e s t seulem ent parce qu 'il n'y
a pas d e v èq u e g rec ou arm énien pour son diocese que le v è q u e de V alénie reçoit ju rid iction
sur les églises greequ es et arm éniennes, en 1224 ( Fontes. III, p. 178; Pressuti, n° 5388). Sur
M a b o r a t io n de cette d o ctrin e canonique, cf. J. A. Brundage, The decretalists and the Greek
C hurch o f South tialy. dans La Chiesa greca in Italia d a llV U I al X V I secolo, Padoue, 1973,
p. 1077 ( Italia sacra. 20-22).
‘ Cf. G eo rg e Hill. A history o f Cyprus. I, C am bridge, 1949, p. 305.
7 G. Dum czil, Vne chrétienté dispa rue: les Albaniens du Caucase. dans Journal Asiatique.
CCXXXII , 1940, p. 125 et suiv. , . . . _ . ..
• Le copte, d a illeu rs, connait un reeul très net devant 1arabe : le patnarche G abriel
(1 131-1146) dut íaire tradu ire en arabe le rituel et les livres saints pour les ren d re accessibles
aux fid eles (M ic h el le Syrien, Chronique, trad. Chabot, III, 235). Le reeul du syriaque (ara-
m éen ) est parallèle.
• Celui-ci devait su rvivre ju squ au X IV « siècle; il disparait vers 1330 (U go M onneret de
V illard Storia delia Nubia cristiana, Rom e, 1938). Mais on sait que les décou vertes archéolog.-
qu e* récen tcs ont révélé une survie de la ch rétienté nubienne qui atteint le X V I« siècle.

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6 INTRODUCTION

orientale, et jusque dans les iles voisines de 1'Arabie (S o c o to ra ),0. II va de


soi que les connaissances géographiques des Latins ne leur permettaient
pas de se faire une idée précise des zones dans lesquelles se trouvaient ces
différentes communautés chrétiennes: 1’exemple de la figure du Prètre
Jean, peut-être née d ’informations relatives à 1’Ethiopie, mais qui flotta pen-
dant trois siècles, de 1’Asie à 1’Afrique, selon q u o n lui attribuait tel ou tel
évènement, suffit à le dém ontrer11.
Néanmoins, du fait de leur installation aux Lieux Saints, les Latins ne
pouvaient manquer d a v o ir des contacts avec les pélerins venus de tout
1’O rie n t: la réception de l’higoumène russe Daniel par le roi Baudouin suf­
fit à montrer leur curiosité et leur intérêt. Le pélerinage, en effet, était une
forme de dévotion aussi appréciée dans les Eglises orientales que dans les
Eglises d Occident: le cartulaire du Saint-Sépulcre conserve la mention des
donations qui avaient été consenties en faveur de celui-ci en Russie, en
G é o rg ie ':, à Constantinople et dans Tempire byzantin11; on sait que les
Chaldéens de Mésopotamie se rendaient volontiers au Saint-Sépulcre, bien
que certains ecclésiastiques eussent à ce propos émis des réserves qui rap-
pellent celles quavait faites saint B e rn a rd 14 (et les plus célebres de ces
pélerins, les moines Marcos et Çauma, venaient de la région de Pékin); les
Ethiopiens aussi, malgré leur éloignement, fréquentaient les Lieux-Saints1'.
Les Latins jouissaient ainsi d ’une source d ’information très précieuse, sinon
très précise, sur les communautés chrétiennes vivant en dehors de ce qu on
pouvait appeler le monde chrétien latin et grec. La visite à Rome de cer-

IU Sur la diffu sion du christianism e m édiéval, cf. 1’ou vrage déjà cité de M elle Von den
B nncken, et les trois articles de J. Dauvillier, Les p rovin ces chaldéennes «d e 1'Extérieur» au
Muven-Age, dans Mélanges F. Cavallera, Toulouse, 1948, p. 261-316; Byzantins dAsie centrale et
d Extrém e-O rient. dans Revue des études byzantines, XI, 1953, p. 62-87; Lexpansion de leglise
syrien ne en Asie centrale et en Extrênie-Orient, dans L'O rien t syrien, I, 1956, p. 76-87,
" J. Richard, L E xtrèm e-O nent légendaire au M oyen-A ge: R o i David et Prètre Jean, dans
Annales d E thiopie, II. 1957. p 225-242; A.-D. Von den Brincken, D ie * N a tiones», p. 382-419;
cf. aussi Louis Hambis, La legende du Prètre Jean, dans La T o u r Saint-Jacques, 8, janvier-
fé v rie r 1957, p. 31-46; C.-F. Beckingham , The Achievements o f Prester John, an inaugural lec-
ture . . . , S chool o f O riental and A frican Studies, Londres, 1966.
12 Sur la dotation du Saint-Sépulcre en G éorgie, cf. Sim on d e Saint Quentin, Histoire des
Tartares, ed. J. Richard. Paris, 1965, p. 57-58.
11 Privilège de Célestin III (1195), dans Cartulaire de leg lise du Saint-Sépulcre de Jérusa-
lent, éd. E. de Rozière, Paris, 1849, p. 237.
14 J.-M. Fiey. Le pelennage des Nestoriens et Jacobites à Jérusaletn, dans Cahiers de civüisa-
tion m édiivale. X II, 1969, p. 113-126.
1' Enrico Cerulli, E tiopi in Palestina. Storia delia cotnunità etiopica di G eru sa len n n e, R o m a .
1943-1946. 2 vol

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CEUVRE MISSIONNAIRE AU XII* S ET DÊF1NITION D UNE DOCTRINE 7

tains personnages, comme le mystérieux archevêque indien Jean, au temps


de Calixte II (vers 1122), ou les envoyés supposés du Prêtre Jean, dont l'un
venait peut-être effectivemenl d’Ethiopie16, apportaient d ’autres informa-
tions.
De la sorte, on s’explique qu’on trouve des données intéressantes sur
ces chrétientés sous la plume d’auteurs comme Richard de Cluny17. Les
Latins devaient en garder 1'impression que 1'Orient entier était peuplé de
chrétiens, même si ceux-ci n’étaient pas toujours maitres de leurs destinées
et si des souverains infidèles leur imposaient leur domination : on lit, sous
la plume de Burchard de Mont-Sion, que les chrétiens orientaux sont par-
tout plus nombreux que les musulmans, dans une proportion voisine de
trente pour un; il ne Fait d’exception que pour 1'Egvpte et 1’A ra b ie '8.
De ce fait, les Latins étaient amenés à considérer que la seule tàche qui
leur incombait dans les partes orientales consistait à ramener à 1’union les
Eglises orientales. Pour ce qui est des Musulmans, les faits de guerre
avaient permis de convertir, de gré ou de force, un certain nombre de cap-
tifs - tel le chambellan du roi Baudouin Ier, Turc converti qui avait pris le
nom de son maitre et parrain; tels les «Tu rcoples» qui faisaient partie de
l’élément militaire dans les états latins comme en pays byzantin,', -. Mais,

•® Le voya ge de la rc h ev êq u e Jean - s‘il sa p p ela it ainsi - est attesté par une lettre d E u d e s
de Saint-R ém y de R eim s à Thom as de M arle ( Patr. Lat., 172, c. 1331-1334); il reste três obscur.
On cite ensuite une am bassade dont aurait fait partie un certain clerc Elysée. Par contre, une
am bassade sans dou te venue d ’Ethiopie, aurait réellem en t atteint R om e sous A lexandre III.
Cf. Z a m c k e, D e r Priester Johannes, dans Abhandl. der Kgt. Sachs. Gesellschafi, X V II, 1879,
p. 827-1030, et X IX , 1880, p. 122 et suiv. II faut ajouter à ces sources d ’in form a tion la fam euse
« L e t t r e du P rètre Jean à 1’em p ereu r Manuel C o m n èn e». Sur tout cela, une b ib lio g ra p h ie
c o m m o d e est rassem b lée dans le livre déjà cité de M elle V on den B rincken, Die « Natio-
n e s » . . . , p. 382-392.
17 C eiui-ci dresse un siatus des res humanae, à la date d e 1172, oü il en visage Tattitude
en vers le ch ristian ism e des souverains du m onde en tier (M G H, SS, X X V I, 84). Cf. A.-D. V on
den B rincken, op. c it , p. 424.
'* Oriens totus ultra mare usque in tndiam et E thiopiam nom en Christi con fitetu r et praedicat
(Peregrin a tores m edii aevi quatuor, ed. Laurent, p. 90). O liv ie r de P a d erb orn pense aussi que
les ch rétien s fo rm en t la m ajo rité de la popu lation des Etats musulmans.
'* Sur le ch am bellan B audouin, qui essaya d e m p o is o n n e r son m aitre en 1111, cf. n otre
Royaum e latin de Jérusalem, p. 123. B oh ém o n d aussi sert d e parrain à un Tu rc qui prend son
nom (R. H. C , H is t Occ., IV, p. 382); C o d e fr o y de B ou illon instruit de la fo i ch rétien n e
1’ancien g o u v e m e u r de Ram la, qui servait co m m e au xiliaire dans son arm ée, et qui reçoit le
b a p tcm e Ubid.. p. 491-493); un espion du sultan dc N icée, d écou vert. et craignant pou r sa vie,
su pp lie les C roisés d e lui c o n fé re r le b a p lê m e et finit par le re c e v o ir ( Ib id ., p. 312). R aym ond
d A gu ilcrs aussi signale, au m om cn t du siège cTArcas : baptizabantur etiam a liq u i S arra cenoru m
tim o re et zelo nostre legis (L e • L ib e r » de R aym ond d'Aguilers, éd. J. et L. H ill, dans Doc. relatifs

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8 INTRODUCTION

au X IIe siècle, si la perspective de la conversion des princes musulmans est


parfois évoquée20, aucune action n est menée en ce sens. Quand le duc de
Saxe Henri le Lion fait visite au sultan de Turquie, son lointain cousin,
(en 1172), une dispute théologique sengage entre les clercs de lentourage
du duc et les théologiens musulmans : on a lim pression q u ’il ne sagit là
que d u n jeu de lettrés21. Et les Latins ne font aucune pression sur leurs
sujets musulmans pour amener ceux-ci à la foi. A plus forte raison, n’est-il
pas question d ’envover des missionnaires en dehors des états latins : 01 ivier
de Paderborn, qui écrivait dans le premier quart du X I IIC siècle, estimait
que les chrétiens orientaux des divers rites étaient sulfisamment nombreux
en pays musulman pour que les Sarrasins n aient pas 1'excuse de l igno-
rance. C'était donc aux chrétiens orientaux que devait revenir 1'obligation
d instruire les Musulmans22.

à ihist. des Croisades. 9. Pans, 1969, p 112). Et Fou cher de C hartres parle de Latins qui epou-
sent des Sarrasines baptisees. Sur les Turcoples, cf. notre Royaume latin, p. 129 : nous ne pen-
sons pas q u il sagisse de metis, com m e on la d m e t souvent, mais bien d e Musulmans bapti-
ses.
10 En dehors de la lettre au sultan de Konya citée à la note suivante, cf. Aubri de Trois-
Fontaines. Chrom con. ed. S ch effer Boichorst (M G H. SS. X X III, p. 859), d apres Cuv de Bazo-
ches. sous Ia date de 1186 : Jn partibiis transm annis p o p u li qu i d icu n tu r Hassacinus numeras
esse L X m ilibus am phor p e rh ib e tu r. . . Contigit diebus nostris qu od m agistrum sibi prefeceruni
per quem msntuta M a h u m eth . . . relinquerunt. E t cum votis ardentibu.s appeterent suscipere
legem Christi petunt a rege /erosohmitano Balduino IV. regis A m a in e i filto, ut remissis I I mili-
bus au reorum quos quasi pro tributo quidam suorum solvebant fratribus Tetnpli, cotiferretur eis
ecclesiastici gratia sacramentv Le m eurtre de leur en voyé par des Tem p liers, et la mort de
Baudouin ÍV, auraient em pèché la conversion en masse des Ism ailiens (d e S y rie) au christia
rnsme. G uillaum e de Tyr, qui est la source de cette inform ation, ra p p orte ces evénements à
la n n e e 1173. mais est aussi a ffirm a tif sur la con version en visagée (liv r e X X , chap 28-29).
A m o ld i Chronica Slavorum , dans M G H , SS, X X I, p. 116-125. - M athieu Paris affirme
bien qu A lexandre III aurait en voyé, à la dem ande du sultan de Konya, un exposé dc la foi
cath oliqu e a 1'intention de ce dernier, lequel se serait co n ve rti ensuite secrètem ent. par
crainte des Turcs (C hronica nna,ora, éd. Luard, II. p. 250). Mais la lettre dont il donne le lexte,
sous la date de 1169, ém ane probabiem en t d A lexandre IV (1254-1261) et non d Alexandre IU
(1159-1181). Cf. infra, p. 46. n. 114.
“ H ec chn stia n oru m diversuates per totum Asiam Sarracem s sunt permixte, ne gens illa pér­
fida per ignorantiam se valeat excusare ( Historia Damiatina, éd. H o o g e w e g. p. 267. dans Schnf-
ten des K o ln e r D om schola sticu s. . . Oliverus, Stuttgarl. 1894). L idée selon laquelle on rencon-
tr.ut partout des chrétiens dans le m onde habité, ce qui dispensait les Latins de prendre en
ih a rg e la con version des iniideles, idee qui repose sur la m econnaissance de 1’étenduc du
m onde, est Lourante au XIJ- siècle : cf. la these d a ctylograp h iée d e M g. P Derumaux. Saint
Bernard et le salut des infideles. Paris, Faculté d e Theologu- de 1’Institut catholique. 1943. I
p 217,

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CEUVRE MISSIONNAIRE AU XII* S ET DÊFINIT10N D UNE DOCTRINE 9

La mission se limite donc, en pratique, à la discussion des points liti-


gieux de la foi et de la discipline chrétiennes avec les chrétiens orientaux -
entendons, avec leur clergé et, dans une certaine mesure, la libération
des cités et des villages placés sous la domination musulmane pouvait faci-
liter la vie des communautés chrétiennes et leur action auprès des Musul­
mans.
L'implantation des Latins en Orient les avait mis en contact avec les
principaux centres de plusieurs des Eglises orientales. Si, du côté des Mel-
kites, l'éloignement forcé des deux patriarches dAntioche et de Jérusalem,
lorsque des prélats latins avaient été substitués à eux après la conquête de
ces villes, avait rendu les contacts difficiles, on les avait vu réapparaitre'dès
le milieu du X IIC siècle23: de ce còté, nous savons mal si des discussions
intervinrent en vue 1’union, du fait des liens étroits des deux patriarches
avec 1'empereur byzantin, lui-mème en relation avec la Papauté pour met-
tre fin au schisme.
LE glise nestorienne avait peu de possibilité de relations avec les
Latins : non seulement ses fidèles étaient assez peu nombreux au X I le siè­
cle, sauf peut-ètre en Svrie du N o r d 24, mais son chef, le catholicos de Séleu-
cie-Ctésiphon, vicaire aux yeux des canonistes du patriarche d Antioche,
résidait à Bagdad. Pas davantage les Coptes, dont le patriarche portait le
titre dAlexandrie, - mis à part le clergé du Saint-Sépulcre -, n’avaient beau-
coup de contacts avec les Francs2S. Par contre, les Maronites, dont le chef,
titré patriarche d'Antioche, résidait dans un couvent du Liban, vivaient
pour la plupart dans les Etats francs. Les Arméniens, en raison de l'impor-
tance politique de la colonie qui était venue s’établir dans le Taurus, puis
en Cilicie, étaient en relations de voisinage avec les Francs: leur catholicos
s’était établi auprès des chefs nationaux, et s’installa au château de Hrom-
gla quand le comte d'Edesse dut renoncer à la possession de son comté
(après 1150).
Des autres peuples du Caucase qui avaient eu un catholicos - ou pri-
mat - préposé à leur Eglise nationale sous la juridiction théorique du
patriarcat d'Antioche, seuls les Géorgiens, de rite grec, avaient conservé

ü w. H otzelt, K irchengeschichie Palàstinas im Zeitalter der Kreuzzüge, dans Palàstina -


Hefte des deutschen Vereins fiir Heiliges Land, 29-32, Kòln, 1940, p. 24-30, 153-159.
34 Au X III* siccle, un archevèque nestorien (d e Jerusalém) avait sous sa ju rid iction les
Ncstoricns dc Syrie et de Palestine.
” A plu» fo rte raison, les Latins n‘avaient pratiquem ent aucun contact avec 1'archevèque
d E th iop ie, lequel était désigné par le patriarche copte d A lexandrie dont il relevait; nous ren-
contrerons cependant les Abyssins présents à Jérusalem, auprès du Saint-Sépulcre.

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^ 1

10 INTRODUCTION

leur importance; mais ils n etaient présents dans les Etats nés des Croisa­
des que par leurs monastòres de Jérusalem ou de la Montagne-Noire, près
d'Antioche26.
Pour les Jacobites, leur patriarche, qui portait lui aussi le titre d'Antio-
che, résidait habituellement au couvent de M ar Barçauma, non loin de Gar-
g a r 27. Lui aussi avait sous sa juridiction un catholicos pour les Syriens jaco­
bites vivant dans les territoires ressortissant jadis de l empire sassanide, le
maphrian, dont le siége avait d abord été fixé à Tekrit, et qui s était établi
dans un autre couvent, celui de M ar Mattà près de Mossoul. Si ce dernier
vivait en pays dominé politiquement par les souverains musulmans, les
liens entre le patriarche et le maphrian étaient étroits, et le monastère de
M ar Barçauma se trouva pendant la première moitié du X IIe siècle, sous la
domination politique des comtes d'Edesse; par la suite, le patriarche jaco-
bite ne devait pas rencontrer de difficulté majeure à se rendre dans les
Etats latins ou il avait un grand nombre de ses ouailles28. L'établissement
des Croisés, s’il fut générateur de quelques frictions dans 1’ordre ecclésiasti-
que entre Orientaux et Latins, favorisait les contacts entre ces derniers et
les chefs des Eglises orientales29.
Dès avant les Croisades, un geste significatif avait été fait par le catho­
licos arménien Grégoire II, qui en 1080, avait obtenu de Grégoire VII
1'envoi du pallium et une lettre dans laquelle le pape 1'avait invité à renon-
cer à certaines divergences dogmatiques et disciplinairesJ0. En 1141, le
légat pontificai Albéric, cardinal-évêque d Ostie, réunissait un synode à
Jérusalem : il y invitait le catholicos arménien Grégoire III et le patriarche
jacobite, qui tous deux remirent une profession de foi au légat et promirent
de ramener leurs Eglises respectives à l'union avec R o m e 31. Et il est possi-

2t Cf. J. Richard, Quelques textes sur les prem iers temps de 1’Eglise latine de Jérusalem, dans
R ecu eil de travaux offerls à M. Clovis Brunel, II, Paris, 1955, p. 420-430.
17 E. Honigm ann, Le cou ven t de Barsaiimà et le p atriarcal jacobite d'Antioche et de Syrie,
Louvain. 1954.
21 Cf. P eter Kaw erau, Die Jakobitische K irch e im Zeitalter der syrischen Renaissance. Idee
und W irklichkeit, 2* éd. Berlin, 1960 (B e r lin e r B yzantinische A rbeiten, III), et A n n e lie se
Lüders, Die K re u u ü g e im U rteil syrischer und arm enischer Quellen, B erlin, 1964, p. 66-72.
” Sur les églises orien tales dans leur ensem ble, cf. A. S. Atiya, A history o f Eastern christia-
nity, Londres, 1968.
w Fontes . .. I, n° 379-380. Cf. Fr. T o u rn ebize, Hist. polit. et relig. de 1'Armènie, I, Paris, 1900.
p. 163-164.
11 M ichel le Syrien. Chronique, trad. Chabot, III, 255-256; G u illau m e d e Tyr, XV, 18 - Sur
la date de ce synode, cf. Pelliot, Mélanges sur 1'histoire des Croisades, (E xtrait des Métnoires de
1'Académie des Inscriptions, t. X L IV ), Paris, 1951, p. 6-10.

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CEUVRE MISSIONNA1RE AU XII* S. ET DÊF1NITION DUNE DOCTRINE II

ble que ce soit à la même occasion que le patriarche maronite ait lui aussi
fait acte de soumission à la primauté romaine32.
La réunion d un concile - ou d'un synode - apparait en effet des lors
comme 1occasion de conversations entre les prélats latins et les chefs des
Eglises orientales qu il est d'usage d'inviter à ces réunions. Le patriarche
latin d Antioche, Aimery, qui était en relations amicales avec le patriarche
jacobite Michel le Syrien, envisagea de se faire accompagner au troisième
concile du Latran par celui-ci (1178). Et c’est dans la perspective du pro-
gramme du concile, qui comprenait la lutte contre les doctrines cathares,
que Michel écrivit un traité réfutant les doctrines en question, en
s appuyant sur la tradition orientale. Nous ignorons cependant si, a cette
occasion, le célèbre écrivain fit acte de son adhésion à la foi de 1'Eglise
romaine et de sa reconnaissance de la primauté de Rome - mais peut-ètre
était-il trop bon théologien pour s’engager sur le premier p o in t- 33. Et il
n'est pas exclu que ce soit également à 1'occasion du concile que le même
Aimery obtint du patriarche maronite le désaveu des doctrines monothéli-
tes qui étaient attribuées à son E glise: Guillaume de Tyr enregistre sous la
date de 1182 le ralliement des Maronites à 1'Eglise romaine34.
Toutefois, en dépit de ces adhésions officielles, et d excellentes rela­
tions personnelles entre les représentants des Eglises - parfois troublées,
d'ailleurs, par des querelles violentes nous avons trace de conversations
et de controverses. C’est ainsi que 1’archevêque jacobite de Jérusalem,
Ignace, se vit obligé dap p e le r à son aide 1’évêque dAmida, Denys bar

,J K am al S. Salibi, The m aronite church in lhe Middle Ages and its union wilh Rome, dans
Oriens christianus, t. X L II, 1958. p. 94
n M ich el le Syrien, Chronique, III, p. 377-378; le patriarche jacob ite, bien que prèt à des
co n cessio n s p o u r le bien de la paix, tenait ferm e sur la doctrin e m on op h ysite - cf. sa rép on se
aux G recs : Ibid., p. 334-336 et 351.
J4 Guill. Tyr, X X II, 8; K. S. Salibi, op. c íl , p. 94. Ce ralliem ent n'excluait pas des opposi-
tions qui se tradu isiren t par des attaques d irigées par les adversaires de 1’union co n tre des
eglises et des m onastères, ob ligean t Innocent I I I à in terven ir et à je te r 1'interdit sur la sei-
gn eu rie de G ib e let (ibid.. p. 95; Patr. L a t, C C XV I, col. 826). Cf. Le Quien, Oriens christianus, III,
p. 54-65.
s* Dans le co m té d'Edesse, en particulier, les Syriens faisaient baptiser leurs enfants dans
les églises latines; le m aphrian ja c o b ite consacre en 1129 un évêq u e dans la cath éd rale latine
de Tu rbessel (B ar-H ebraeu s, C h ronicon ecclesiasticum, II, p. 474, 478, 484). Les violen ces du
c o m te Jocelin II co n tre certains prélats jacob ites et le m onastère de M ar B arçaum a sont
connues. La réc ep tio n du patriarche ja c o b ite par la patriarche H éraclius à Jérusalem, après
1180, et à A n tioch e oü il passe la n n é e 1178-1179. après a voir été reçu avec honneur par la
patriarch e A im ery en 1168 - est trés ch a le u reu se; Ibid., p. 584, M ichel le Syrien, Chronujue,
III, p. 332, 378.

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12 INTRODUCTION

Salibi, qui écrivit à son intention une Expositio missae «p o u r pouvojr


rép o n d re aux Romains, c'est-à-dire aux F ra n c s » (1169) : il s'agissaii
d'appuyer par des arguments théologiques les usages suivis par les Jacobi-
tes dans la célébration de la messe, et notamment 1'emploi de pain fer-
menté, mêlé d'hui!e et de sei, pour la consécration36. En sens inverse, cest
au chantre d ’Antioche que saint Thomas d'Aquin devait adresser près d'une
siècle plus tard son petit traité De ra tionibus fidei contra Saracenos, Graecos
et Arm enos, destiné à fournir à ce dignitaire du chapitre cathédral de la
ville patriarcale - qui avait normalement la charge des écoles ou se formait
le clergé latin - les arguments nécessaires aux controverses qui conti-
nuaient sans doute entre les membres du clergé séculier, les chrétiens
orientaux et les M usulm ans37.
Ainsi se dégageait, «ou tre mer», une doctrine missionnaire qui avait
1’accord de la Papauté : 1'Eglise latine ayant dans son ressort les commu­
nautés chrétiennes des Etats latins, reconnaissait 1’existence de celles qui
ne vivaient pas selon le rite latin et leur droit à avoir leur propre hiérar-
chie; tout en postulant la soumission des évèques grecs à leur diocésain
latin, elle ne 1’exigeait pas des autres prélats. Elle cherchait à obtenir la
reconnaissance de la primauté romaine et de 1’unité de foi de la part des
chefs de ces Eglises, s'en remettant à eux de ladhésion de leurs ouailles, en
dehors comme au-dedans des Etats latins. Elle s’en remettait également aux
Orientaux en ce qui concernait la conversion des Infidèles - c’est-à-dire, en
Orient, essentiellement des Musulmans, les «p a ie n s » de 1’Asie intérieure
com me ceux de 1'Afrique noire n’étant pas entrevus38.
La doctrine missionnaire, en ce qui concernait les paiens, c’est-à-dire
celle qui devait sap p liqu er aux frontières européennes de la chrétienté -
les peuples de rite grec de 1’empire byzantin, des Balkans et des principau-

J‘ Assem ani. B ibliotheca Orieniatis, II, p. 156-177. Un certa in B ar A ndreas était contra Fran­
cos et Arm enos os eloquentissim um (B ar-H eb raeu s, Chron. eccl. II, p. 484-486).
37 Le P. M artin G rabm ann ( D ie S c h r if t : De rationibus fidei con tra Saracenos, Graecos et
Arm enos des hl. Thom as v. Aquin, dans Scholastik, X V II, 1942, p. 187-216) parait supposer que
le destinataire d e ce traité pou vait ê tre un D om in icain ; le titre de c a n to r co n vien d ra it mieux
à un d ign ita ire du chapitre.
“ II n est pas inu tile d e ra p p e le r que, si le n om d e p agani ou d e « p a ie n s » est souvent
donné, dans les textes d in spiration p o p u laire, aux M usulm ans, les textes savants font soi-
gneusem ent la d iffé re n c e en tre les S a rra ceni et les v é rita b le s paiens. O liv ie r d e Paderborn,
évoquant la légen d e du m oin e Serge, in sp irateu r de M a h om et, va ju squ à é c rire ( Historia
Damtatina, p. 203-205) : unde verius h e re tici quam S a rra cen i n o m in a ri deberent. Cf. A.-D Von
gg” r’ nc^le n ' °P ' c *t'1 P- 369-381, et Prutr, K u ltu rgesch ich te der Kreuzzilge, B erlin, 1883, p, 72-

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(EUVRE MISSIONNAIRE AU XII» S. ET DP.F1NITION DUNE DOCTRINE

tés russes mis à part - était différente; mais clle résultait d unc longuc
expérience. Aucun peuple n’avait pu ôtre amené à la foi sans que ses prin-
ces y fussent eux-mêmes gagnés des premiers : ainsi la propagation du
christianisme chez les Suédois, entamée au temps de saint Anschaire (IX C
siècle) ne fit-elle de pas décisifs qu avec la conversion de saint Eric, un siè­
cle et demi plus tard; par contre, pour autant qu’elle fut durable, la conver­
sion du prince entrainait en principe celle de ses sujets. La Papauté avait
pris 1’habitude de créer des évêchés dans les principales de ces principau-
tés, en les rattachant à des métropoles qui servaient de points d appui pour
les missions: Salzbourg pour les pays slaves du Sud, Magdebourg pour
ceux du Nord, Brême pour la Scandinavie. Mais déjà, au IX e siècle. les
papes Adrien II et Jean VIII avaient accepté de relever la vieille métropole
pannonienne de Sirmium, à la demande de saint Méthode, malgré 1'opposi-
tion de 1'archevêque de Salzbourg et de son suffragant de Nitra (qui
devaient d ’ailleurs finir par 1’emporter), pour rassurer le prince des Mora-
ves sur le maintien de son indépendance à 1'égard du roi de Germ anie'9;
Otton III et Sylvestre II avaient conçu une politique hardie, visant à favori-
ser la christianisation des pays encore paíens, en créant dans les nouveaux
royaumes de Pologne et de Hongrie les métropoles de Gniezno et d ’Eszter-
gòm, malgré l'opposition de l'archevêque de Magdebourg et de levêque de
Passau40.
La doctrine pontificale allait se préciser à la faveur de la conversion
des peuples de la Baltique. Les peuples baltes (Prussiens, Livoniens, Lithua-
niens. . . ) avaient longtemps résisté à levangélisation; saint Adalbert et
Brun de Querfurt avaient trouvé le martyre chez les Prussiens. Mais, en
Livonie comme en Prusse, le mouvement de conversion s’amorce entre
1180 et 1200. Les Cisterciens des abbayes de Lekno et d ’01iva amènent à la
foi les princes de Culm, ou il est possible d'ériger un évèché qui est confié à
un autre Cistercien en 121541. En Livonie, cest un chanoine régulier qui est
doté du premier évêché (1186), et un chanoine de Brême, Albert de Bux-
hovden, se fixe à Riga en 1200. On sait que le recours aux armes apparut
comme indispensable pour protéger ces jeunes chrétientés contre un

F. Dvornik, Les Slaves, Byiance et Rom e au IX * siècle. Paris, 1926, p. 157, 207, 260.
40 P. Fabre, La Pologn e et le Saint-Siège du X * au X I I I • siècle. Paris. 1896; E.-R. Labande,
M irabilia m u n d i Essai sur la personnalité d O tlo n III. dans Cahiers de civilisation médiévale.
t. VI, 1963, p. 464.
41 Ce sont égalem en t des Cisterciens, m oines et convers, de préféren ce (avec des reli­
gieux d a u tre s o rd re s) qui sont en voyés en L ivo n ie pour y prêch er la parole de Dicu, en 1220 :
Pressuti, Regesta H o n o rii papae I I I, n° 2367, 2368, 2398, 2399.

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14 INTRODLCTION

retour offensif des paíens, et que les évéques mirent sur pied des milices,
tant à Culm qu’à Riga — ces milices qui, en Prusse furent finalement absor-
bées ou qui fusionnèrent avec 1’ordre des chevaliers teutoniques lorsque
celui-ci, créé en Terre Sainte et pour la Terre Sainte, vint sétablir en terre
prussienne42. Mais Honorius III, s'il lançait une croisade pour défendre
l'église de Prusse, se préoccupait de défendre ces jeunes églises d un autre
côté, en les enlevant à la juridiction de 1’archevêque de Brème pour les
constituer en évêchés autonomes, avant qu lnnocent IV se décidàt a ériger
en 1246 un «archevêché de Prusse, Livonie et Esthonie»43.
Les efforts des papes tendaient également à mettre à 1’abri des convoi-
tises des pninces voisins les peuples nouvellement amenés à la foi; Gré­
goire IX dut préciser que les nouveaux convertis nappartenaient quan
Christ44, et Alexandre IV, qu’ils étaient libres de se soumettre à qui ils
voulaient, pourvu que leur conversion fút gratuita, non coacta^. Mais le
recours, considéré comme nécessaire, à la croisade, va souvent à 1'encontre
dc cet effort de christianisation non forcée46; les progrès des Teutoniques,

42 entre autres, F. G. Von Bunge, Die Stadt Riga im 13. und 14. Jhdt., Leipzig 1878
A. L. Ewald, Die Eroberung Preussen durch die Deutschen. Halle. 1872-1886; Baltische Ktrchen
geschichte, éd. R. Wittram, Gòttingen, 1956.
4S Sur les missions de Livonie et d Esthonie, cf. notam m ent B enn o Abers, Z u r papsilichen
Missionspolitik in Lettland und Estland zur Zeit Innozenz 11/, dans Com mentationes Baltuae, IV-
V, 1956-7, p. 1-18; J.-A. Brundage, The thirteenth century L ivon ia n cru sa d e: H enricus de Lettis
and the first legatine mission o f bishop W illia m o f Modena, dans Jahrbuch ftir Geschichte Osteu-
ropas, nouv. série, XX . 1972, p. 1-9; G.-A. Donner, /Cardinal W ilhelm von Sabina Bischof von
Modena, H eisingfors 1929; P. von Gótze. Albert Suerber, E rzbischof von Preussen, Livland und
Esthland, Saint-Petersbourg, 1854 (L e Provin ciale Romanae ecclesiae rap p elle la querelle avec
B rem e sous cette form e : Archiepiscopus Rigensis, qu i sub Brem ensi existens erectus futt in
archiepiscopum per dom inum Alexandrum papam .////., A lexan dre IV avant fixe à Riga le siège
de 'archevêché). - Sur la Prusse, cf. les articles de Fritz Blanke. Die Missionsr.nethode des Bis■
chofs Chnsnan von Preussen ( Altpreussische Forschungen, IV, 1927, p. 3-25) et D ie Entscheidtmg
der Preussenmisston, 1206-1274 (Zeitschrift fü r Kirchengeschichte. X L V II, 1928. p. 1840). repris
dans Heidenmission und Kreuzzugsgedanke in der deutschen Ostpolitik des Mitíelalters. hggb.
H elm ut Beum ann, Darm stadt 1963, p. 337-363 et 389-416.
44 Lettre aux princcs polonais, accusés d a v o ir en trave la co n version du prince de
Gdansk, en 1227 (Reg. de G régoire IX , n° 74-75).
« Aux Teutoniques, à propos de la soum ission en visagée d une peuplade lithuaniennc au
duc de Cujavie, en 1256 (Sbaralea, B u llarium Franciscanum . II, p. 148).
" I en est préché con tre les L ivon icn s dès 11711172. et en 1199. ad defendendam L i»«•
mensern ecclesiam et Christ,anos in illis partibus constitutos: co n tre les Prussiens. par Hono
, puis, en 1232, par G rég oire IX ; co n tre les Tavastes, re to u m e s au paganismo, la cro1
vade devant etre prèchée en Suède ( Reg. Crég. IX , n« 3971); co n tre les paíens voisins de la
N orvègc. en 1241 ( ld , n->6096-6098). On envisageait aussi (le ttr e du 21 mars 1228) d en P ^
cher une pour p roteger les Com ans c o n v e n is

J
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CEUVRE MISSIONNAIRE AU XII* S. ET DEFINITION D UNE IKK TRINI IS

qui se substituent aux princes prussiens ou livoniens, se heurtcnl aux lenta


tives des prélats missionnaires et compromettent longtemps la conversion
des peuples lithuaniens47.
Néanmoins les intentions pontificales tendent à taire dispaiaitre les
privilèges anciennement reconnus aux évèques des pays d ancienne chré­
tienté en dehors de ce pays, pour faciliter 1’accession à la loi des paíens
leurs voisins4*. Le rattachement à Rome des nouveaux evêches paiait cie
nature à dissiper les inquiétudes de ces derniers.
Des évêchés relevant directement, ou par l’intermédiaire d’une métro-
pole érigée elle aussi en pays de conversion, du Siège apostolique, apparais-
sent donc comme un élément indispensable a la constitution d une Eglise
en pays précédemment paien. La conversion du prince entraine celle des
fidèles, et nous savons qu’on ne s'est pas fait faute dadministrer des baptê-
mes collectifs. II convenait ensuite d'assurer 1’instruction et la desserle spi-

■*' Cf. les accusations du prince de Lithuanie et de l archevêque dc Riga contre les Teuto-
niques, au X I V ' siècle : ils détruisent des eglises construites par les Franciscains en pavs
lithuanien, de façon à p o u voir ju stifier leurs conquètes (Lem m ens, Heidenmissionen, p II
17); ils substituent leurs propres évèques à ceux que rarchevèque a institues; ils suscitent la
co lère des indigènes qui détruisent, en représailles, les évêchés de Letton ic ct dc Scm igallic
(Regestum Clementis papae V, n° 6770). Le prince de Lithuanie, Mindaugas, avait annoncc sa
con version en 1251; il reçoit de R om e la couronne rovale; son conflit avec les Teutoniqucs,
auxquels il in flige de lourdes pertes, am ène le pape à prècher la croisade co n tre les Lithua-
niens et les Iatvagues retournés au paganisme, et qui ne se con vertiron t finalem ent q u e n
1386. Un é v êq u e (Jatwesoniensis) avait été désigné pour les Iatvagues; il ne put résid er dans
son d io cès e (D e r Form ularsam m lung des Marinus von Eboli, hggb F. Schillmann. I, p. 177).
Sur cette création (fin 1256) et 1'opposition des Teutoniques, et sur le con flit de ceux-ci avec
le duc de C ujavie à prop os de le re c tio n d u n évèché à Lukow (1257), c f L. Pellegrini, Le m is-
sion i francescane sotto Alessandro IV (1254-1261). dans Studi francescani. 64' année. n" 1. 1967.

p. 97-101. ,
« Ainsi la création d u n évêch é de Ruthénie. ou des Ruthènes - qui fut sans d o u le érigé
par la rc h e v ê q u e de L ivo n ie en vertu des pouvoirs à lui con férés en 1247 (econtra : Altaner.
D om inikanerm issionen. p. 223-224) com m e celui des Iatvagues (si celui-ci est bien Yepiscopatus
W ersonie cité dans une bulle de 1255 : Reg. d'Alex. IV, 347) - en trep renait-elle sur la ju rid ic­
tion d e le v ê q u e de Lubeck, qui se considérait com m e 1'ordinaire de tous les Latins de Russie;
A lexandre IV lui donna des lettres de non préjudice (Reg., 1692) au m om ent, d ailleurs, oü
Daniel d e H alicz se séparait de Rom e. C e s t l evêque de Lubeck qui devait désign er le p re m ie r
évêq u e latin d e K ie v dont la nom ination fut co n firm ée par le Sainl-Siège en 1320 (Eu bel, Hie-
rarchia catholica m edii aevi, I. p. 302). Sur le rôle des Latins de K iev dans la diffu sion de la foi,
cf Reg de G régoire IX , n° 1961-1962; Fontes, III, p. 278. - Sur toutes ces quest.ons, cf.
O H alecki D iplom a tie pontificale et activité m issionaire en Asie aiix X U 1 , -X V ‘ siècles, dans
Connté In tern a tion a l des Sciences historiques. X U > Congrès, Vienne, 1965, Rapports, II. H istoire
des continents. p. 5-32 et notam m ent p. 9-10; H. O llendiek, D ie püpstliche Legaten im deutschen
Reichsgebiet von 1261 bis zum Ende des Interregnum s, Fribourg 1976, p. 38-46.

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INTRODUCTION
16

rituelle des nouveaux convertis: 1’organisation de paroisses suivait la créa-


tion de I evéché. Et 1’in.stallation de communautés monastiques - surtout de
celles dont les membres s'adonnaient à la prédication, com m e les Prémon-
trés, ou les Cisterciens qui donnent aux missions jusque dans les premières
années du XIII* siecle leurs meilleurs agents - donne un essor plus grand a
la ehrislianisalion par 1'exemple de la vie religieuse49.
On notera que nos sources font rarement mention d evènements mira-
c u le u x : le texte d'Aubri de Trois Fontaines, rapportant comment un
patriarchc de « S u s e » du nom de Jonas, en présence d un miracle eucharis-
tique, aurait adopté la foi de leglise catholique et serait ensuite devenu
patriarche d'Alcxandrie, aux environs de 1205, peut difficilement ètre rap-
proché d'un fait identifiable'0.
Ainsi, au moment ou sou vre une nouvelle période de 1'histoire des mis­
sions, la Papauté est-elle en possession d ’une doctrine missionnaire qui se
presente sous une forme différente selon q u ’il sagit de pays «p a ie n s » ou
des pays d'Orient ou 1’Eglise latine trouve en face d ’elle dim portantes com­
munautés chrétiennes'1. Cest cette doctrine qui va trouver à sappliquer, et
à s'adapter, a des conditions nouvelles.

** Sur lout c c ti, tf. The ch ron icle o f Henry o f Livonia, trad. J.-A. B ru n d age, M adison, 1961.
passuti Sur la création dc paroisses. cf. un texte b ra n d e b o u rg e o is d e 1235 c ité par Eb Sch-
midt. t>p. ciL. p. 74, n o lc : un évèq u e érig e une paroisse dans des v illa g e s oü les habitants nort-
dum lidem tathohcam ad plenum susciperim , sed adhuc quibusdatti te n e a n tu r paganis ntibus
irretiiu Lc rõle d c » Prém ontrés est m cntionn é dans le m è m e o u vra g e . p. 95. - Sur celui des
C isterciens, supra, p. 13, e l n. 41. La co n version des peu p les fin n o is ou sib érien s par les Rus-
ses paraít, elle aussi, a voir surtout éte assurée par le ra y o n n em en t des m onastères. - Nuus
rappelons que nous nc nous référon s ici aux ex em p les tirés d es pays b a ltes ou slaves que
pou r en degager des élém en ts dc doctrin e.
*° Aubri de T roí».F on tain es, Chronicon, éd. S ch effer-B o ic h o rst. p. 886. L e nom de Suse
co m m e siege d un prclat dc haut rang év o q u e la le ttre du P rè tre Jean à M anuel Comnène;
lo u te fo ii il a cffe etiv cm cn t existe, vers 1210, un p a tria rch e c o p te d A lexa n d rie, Jean, fils
bugaleb. qui aurait professé des op in ion s très p roch es des d o c trin e s ch alcédonienn es, au
po.nt que les m onophysites se seraient abstenus en masse, d e s u iv re ses ob sèq u es, auxquelles
aisisla t le patriarche m elk i.e : Lc Quien, O riens christianus, II. p. 488-489

oues í . UBe ' ,.tü? ,Íün Un PCU Pa rtic u liè re : In n o c e n t I I I ava it in v ité les archevê-
cgard a la rè u r * ! i * * Russic' clercs et laies, à r e c o n n a itre la p rim a u té romaine, eu
et 1'Eglise d e R om e. en .206; m ais les Dominica,ns
conversion des Russ -V T ** ,SUrlOUí Sa,nt H y a c ‘ n‘ he (m o r t en 1257) travaillcnt à la
nous 1'avon» vu B Ali- U n** Un ^v é c ^ c m iss‘ o n n a ire est c r é é ch e z ceux-ci, comme
p. 196 225 ' D o m inik anerm issionen des 13. Jhdts, H a b elsch w erd t. 1924,

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PREMIÈRE PARTIE

LES MISSIONS, DE LAPPARITION


DES ORDRES MENDIANTS
À LA CONQUÊTE MONGOLE

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Ce qui donna, vers le début du XIIIC siècle, un nouvel élan à lactivité
missionnaire de 1'Eglise latine, ce fut une série d’evénements se situant
dans le quart de siècle qui commence avec la chute de Jérusalem (l 187) et
qui s achève avant le quatrième concile du Latran (1215).
«Outre-mer», la conquête d ’une grande partie des Etats latins par Sala-
din, et notamment la perte du Saint-Sépulcre. marquent un tournant dans
1’histoire des établissements latins du Levant Les Latins cessent. provisoi-
rement (puisque les Lieux Saints furent à nouveau entre leurs mains de
1229 à 1244), d'être au contact des pélerins venus d Asie ou d'Afrique. Mais,
en acceptant finalement, à la suite de la troisième croisade. de regarder la
présence latine en Syrie, en Phénicie et en Palestine comme tolérable, le
sultan contribue à ouvrir les portes de 1’Asie aux Latins qui voudront s’y
enfoncer, marchands, religieux ou aventuriers. Et le sultan de Konya agit
de même, surtout après 1’installation des Croisés à Constantinople.
En second lieu, les colonies latines dépendent beaucoup plus, au X IlIe
siècle, de 1’assistance des Etats d'Occident qu au siècle précédent; des rap-
ports plus étroits se nouent entre les unes et les autres; et notamment,
1'intervention de la Papauté, cependant déjà très active par ses légats au
XII* siècle, se fait constante.
La puissance nouvellement acquise par les Arméniens de Cilicie,
grands bénéficiaires de l'effondrement de la puissance bvzantine à la suite
de la défaite de Myriokephalon et de la révolution dirigée par Andronic
Comnène, avait décidé le «b a ro n de la Montagne», le Roupénien Léon, à
faire sanctionner cette nouvelle puissance par 1’octroi d ’un titre royal; et,
en recherchant ainsi son entrée dans le concert des Etats chrétiens, à apla-
nir les difficultés dogmatiques et rituelles qui sopposaient à 1’union de
1'Eglise arménienne avec 1'Eglise romaine. La poursuite de cette union
allait être un des principaux buts de lactivité missionnaire pendant deux
siècles.

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20 L \ PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O RIE NT AU MOYEN-AGE

Vers le N o r d et sans o u b lie r la conquête de C o n s .a n tin o p le qui ouvrai,


de nouveaux horizons à la recherche de 1'union avec les Grecs. ma,s qui
ouvrait aussi la m er N oire aux naviga.eurs d'Oec,dent. I accroissem en l de la
puissance du royaumc de H ongrie allait s a c c o m p a g n e r d e la perspective
d u n e extension de la foi catholique aux pays sur lesquels 1 hegem om e du
royaum e arpadien allait s etendre. De ce còté. la m ission voyait s o u v n r Ic
m on de des steppes. qui allait lui o ffrir un c h a m p d activite mattendu.
N o u b l i o n s pas qu'au m êm e moment, A llem ands et Polonais, en même
temps que leurs voisins de Suède, entamaient le bloc balte et finnois. Le
théâtre de 1'activité missionnaire sétendait donc considérablem ent.
Et c e s t précisément à ce m om ent que naissent les o rd re s mendiants:
des ordres voués à la prédication et détachés de la gestion d un patrimoine
terrien. Sans doute rien ne les obligeait à devenir des o rd re s missionnaires,
mais il est certain qu ils étaient mieux adaptés à cette fin qu e les Cister­
ciens qui les avaient précédés. Et leur fondation répondait à un ensemble
de conditions tenant à la mentalité du moment, oú les perspectives mis­
sionnaires prenaient place (le désir de ram ener à la foi les dissidents avait
jo u é son rôle dans la fondation des Frères Prêcheurs et des Frères
M ineurs). Ce nest pas par hasard que saint D om iniqu e aspirait à aller évan-
géliser les Prussiens 1 tandis que saint François profitait de la Croisade
p o u r essayer de convertir le sultan lui-m êm e2.
Tout ceci laissait présager une nouvelle orientation des efforts mission­
naires. Elle se révèle aussi bien à la frontière hongroise, avec 1’évangélisa-
tion des Com ans et des peuples voisins, dans le territoire qui deviendra
plus tard la Tartaria A q u ilon a ris, que dans les pays d o u t r e - m e r situés au
sud de la m er Noire, qu on appellera bientôt les partes orientales.

I - L E S M I S S IO N S C H E Z LE S C O M A N S ET L E S P E U P L E S V O IS IN S

Depuis la fin du X I C siècle - depuis le m om ent oú ils avaient écrasé les


Petchénègues, alors établis entre le D anube et le Seret, avec 1’aide dAlexis
Com nène1 - les Turcs Qipcaq, que les Occidentaux appelaient Comans

1 B. A ltan er, D ie D o m in ik a n e rm is s io n e n . . . . p. 1-9.


1 La R e g le des F rères M in eu rs, dans sa s e c o n d e ré d a c tio n fix e d éja les co n d itio n s dans
le s q u e lle s les fr e re s d ésireu x d a lle r p r ê c h e r aux in fid è le s et aux Sarrasins, d o iv e n t dem ander
et o b te n ir lic e n c e du m in istre p ro v in c ia l : N o é S im on u t, 11 m etod o d eva n gelizza zion e dei Fruft-
cescan i tra M u s u lm a n i e M o n g o li nei s e coli X l t l - X I V , M ila n o , 1947, p. 17, note.
* P e tr e D iaconu , Les Petchénègues du Bas-D anube, B u carest, 1970.

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DE L APPARITION DIÍS MP.NDIAN IS JIJSOUAUX MONGOLS 21

(Cum ani, en hongrois K u n ), exerçaient lem hégémonie dans la région situee


au nord de la mer Noire, ainsi que, plus 1’est, dans les steppes qui s eten*
daient entre la mer Caspienne et l lrtych; des peuples apparentes - les
Yàmàk, par exemple - parlaienl une langue tròs voisine, usaient. comme
eux, de 1’alphabet ouigour, et sont pariois consideres comme appartenant
eux aussi au peuple Qipõaq-1. Ils semblent avoir laissé le cours inférieur de
la Volga à d'autres peuples: les Saqsin (Saxi des Latins)', les Wedin, qui
sont donnés comme Musulmans par les voyageurs hongrois(’; les Bulgares

* P. Pelliot, A propos des Comans, dans Journal Asiatique, 1920. t. I. KaSghari note la
parenté des langues parlées par les Yiimak, les Baükirs, les Q iptaq, les K irghizes et les Oghuz
(C. B rock elm an n , M ahm ud al-K aigha ri iiber die Sprachen der Tiirken, dans K ó rô s i Csoma
Archivum , I, 1921, p. 26-40). Cf. J. Richard, I m lim ite occideniale de 1'expansion de lalphabet ont-
gour, dans Jou m . Asiat., t. 239, 1951, p. 71-75 et I m conversion de Berke et les debuts de iisla m i-
sation de la Horde d ’Or, dans Revue des éludes islamiques. 1967. p. 173-184 Les Q ip ta q on en -
taux avaient partie liée avec les sullans khware/.miens.
5 P. Pelliot, Notes sur 1'histoire de la Horde d’Or, dans CEuvres posthumes de Paul Pelliot, II,
Paris 1950, p. 165-174. La résistance des Saxi A 1’invasion m ongole fut assez acharnée pour
a v o ir retenu 1'attention de Plancarpin (S inica franciscana, 1. p. 91). La leltre de Julien de Hon-
grie fait état de 1'occupation de la Sascia per les M ongols en 1236 ou 1237. Toutefois Benoit
de P ologn e, com p agn on de Plancarpin. écrit : Fratres vero euntes per Comaniam a dextris
habuerunt terram Saxorum , quos nos credimus esse Cothos, et h ii sunt christiani; postea Alanos,
q u i sunt ch ristia n i: postea Gazaros, qui sunt ch ristia n i: in hac terra sita est Ornam, civitas o p u ­
lenta, a Thartaris capta per subm ersionem aquaruni; deinde Cyrcassos, et hii sunt christiani; pos-
Georgianos, et h ii sunt christiani (Sinica Franciscana, I, p. 137-138). ceci place les Sfl.ii au
sud de la rou te su ivie par Plancarpin - de K iev & la région de Sarai, puis au nord de la Cas­
pienne et de la m er d Aral Les Saxi ne nous semblent pas pouvoir ètre les Goths de C rim ée
(cf. A. A. Vasiliev, The Goths in the Crimea, Cam bridge, Mass., 1936) - de m êm e que les Kha
zars, cités co m m e habitant á 1'est des Alains et à lou est (ou au nord-ouest) des Circassiens, ne
paraissent pas être ceux qui ont donné leur nom à une partie de la C rim ée il faudrait
a dm ettre que les «S a q s in ., si c e s t bien d e u x q u il sagit, habitaient dans la région de Sarai,
ou m ém e au sud, co m m e l'a pensé Pelliot. Néanmoins. il ne faut pas ou b lier que Benoit n a
pas visité le pays en question et que ses localisation* sont approxim atives. Plancarpin met au
Sud de la C om an ie les Alains, Circassiens, Khazars et Grecs; au Sud-Est les Ibères (G éor-
giens), Cathi, Bruthaci, les Ziques, les Arm éniens et les Turcs.
» Ce peu p le mal iden tifiable. aurait habité au Sud de la G rande B ulgane, d apres le De
inventa Ungana magna qui parle des Sarrasins appelés Vela, dont la civitas se nom m ait
Bunda Julien d e H o n g rie én um ère parm i les cinq royaum es conquis par les M ongols en
1237-1238 avec celui des Saxi et la Grande B u lgarie.. Wedin, M erow iam , Poydov.am Mordua-
norum regnum - (c e d e m ie r étant le pays des M ordves de la V o lg a ): H. D õrrie, D re, Texte zur
Geschichte der Ungarn und M o n g o le n . D ie Missionsreise des fr. lulianus 0. P m s Uralgebiet
(1234/51 und nach Russland (1237) und der Bericht der E rzbischof Peter Uber dte Tartaren
(N a ch rich ten der Akad der Wiss. in Gtítringen, Philol. Hist. Klasse, 1956, p. 125-202), rapproehe

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22 L> PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

de la Volga, les Russes - qui les appelaient Polovtses et a qui ils avaient pra-
tiquement enlevé le sud des anciennes principautés de Kiev et de Tchcmi-
gov, les éliminant de Tmutarakan (Matrega) et des ri\es e a mcr Noirc
et les Hongrois étaient leurs principaux voisins. Un autre peuple. peut-ètre
nom ade lui aussi, celui des B ro d n ic i8, parait avoir occupé une partie de ce
vaste domaine, la Cumania des vovageurs du X II Ie siècle.
Les Comans netaient pas des inconnus pour les peuples chretiens;
mais, jusqu au début du XIII* siècle. ils avaient surtout eu des contacts avec
les Russes, qui ne connaissaient que trop leurs razzias, et occasionnelle-
ment avec les G é o rg ie n s: cest mème à propos de la participation d un
corps important de Turcs Qipèaq à la guerre livrée par le roi de G^orgie
David le Réparateur aux Musulmans ( (1121) qu il est fait pour la premiere
fois mention du baptême administré en masse à ces auxiliaires par le* soins
des Géorgiens9. Plus tard, tandis que lTslam gagnait peu à peu les tribus
voisines du sultanat de K h w arezm 10, les contacts des Russes a\ec les
«P o lo v tse s» se traduisent par 1’attribution de noms chrétiens a certains
chefs q i p è a q : un Youri, un Vsévolod, un Daniel figurent parmi ceux-ci.

ce nom de celu i de la ville bulgare de W idin sur le Danube et p ro p o s e de v o ir dans les Wedm
une branch e du peuple bulgare, tandis que le nom de leu r civitas. « B u n d a z», évoq u era it celui
des Burtas, qui correspon d à 1'appellation russe des M ord ves, et qu e G a rd izi localisait entre
1'habitat des Khazars et celui des Bulgares.
7 II ressort des recherches de M. N. Banescu. La d om ina tion byzantine a Matracha . .. en
Zichie, en Khazarie et en «R ú ssia * à lep oqu e des Comnènes (B u li. de la section htsL de iAcad
roum aine, X X II, 2, Bucarest 1941), que M atrega était aux m ains des B yzan tin s au X c siecle, et
red evin t byzantine en 1094, après a vo ir appartenu a des prin ces russes qu i étaien t sans doute
vassaux du basileus. Mais 1'extension des Comans. m èm e si ceux-ci n o n t pas en le v é M a tr e g a
aux Russes. est responsable de l arrét de l expansion russe vers le K o u b an , c o m m e de la deca-
den ce de Kiev.
1 texte de 1228 ( Fontes, III, p. 206) cite « la terre des C om an s et des B ro d n ic i • c o m m e
ressort d u n e légation pontificale. et Bela IV d é p lo re la p erte du pays des B ro d in ci en mème
tem ps que de la Com anie, dans une lettre de 1247 (F ejer. Codex d ip lo m a i,cu s H unganae. IV. I,
p 336) L habitat de ce peuple a été localisé en tre le D niestr et les C arp ath es c f P. H r y ts ak,
Halyts’ko-Volyns'ka derzhava (T h e duchy o f H alych-V olhynia), N e w -Y o rk 1958, p. 43-44 et carte
(Shevchcnko Scientific society, Ukrainian studies, vol. 5).
* Brosset. H istoire de la Gèorgie, I, p. 379. On peut n o ter qu a p rés les Petchén egu es que
rencontrerent les Croisés de 1095. de nom b r eux C om ans s e rv ire m dans la r m e e b y z a n t in e :
des conversions intervinrent là aussi.

f„,t n° tr' a rt!clc C1,í' plus haul tLa de Berke). la le llr e d c Julien dc H o n g r *
“ r ,SqU U" Cí COma" ^ la d “ B u *. G u rcg (Y o u r i? - lc Y u M k , du
dw (U rJ ln n r llC " V T d “ C’ V " hu,: le va in c“ “ a u p rè » du sultan
d u rn a ih (U rgenj) qui I aurait fait d éca p iter

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DE LAPPARITION DES MENDIANTS JUSOUALX MONGOLS 21

indice d un début de christianisation dont les agenls sont évideimnent des


R usses".
Les Comans n'étaient pas pour les Hongrois des voisins plus luciles que
pour les R u s s e s : le roi André II devait établir les chevaliers du Temple,
puis les Teutoniques, en Transylvanie pour contenir leurs expéditions
menées depuis la plaine moldave. Mais la Hongrie était en pleine expan-
sion, et la grave défaile subie par les Comans et leurs alliés les princes rus­
ses sur la Kalka du fait de 1'armée mongole de Sübotai, en 1222, niodifia les
rapports entre les deux peuples. André II, qui avait enlevé à la Bulgarie des
terres contestées, et notamment, en 1233, la Petite-Valachie12, avait égale-
ment réalisé des progrès au nord des Carpathes, en intervenant dans les
querelles qui suivirent la mort du prince de Halicz, Roman (1206), ce qui lui
permit, après avoir essayé de faire de son propre fils Coloman un roi de
Galicie et de Lodomérie, de placer Daniel Romanovic sous sa protection,
étendant ainsi son influence ju sq u a K iev 13. Nom bre de chefs comans. et
ceux des B ro d n ici, après leur défaite devant les Mongols, se placèrent égale-
ment sous sa protection14. De ce fait, on pouvait faire circuler en Occident
des rum eurs selon lesquelles le comte de Transylvanie, envoyé par le roi de
Hongrie, avait écrasé une avant-garde mongole non loin de la mer d'Azov'\
tandis que Grégoire IX, désireux de soulager les Géorgiens pressés par le
sultan seljuqide d ’Asie mineure, envisageait lenvoi d u n e Croisade partant
de la Hongrie à travers le pays des Com ans16.

11 B rosset d o n n e le nom de V sevolo d com m e celui d un frè re du roi des Q ip ta q à la fin


du X I I ' s iè c le ; Y o u ri K o n é a k o v it (K o n ía k vivait en 1184) et Daniel K o b y a k oviò sont cités en
1223 ( A p ro p o s des Com ans, p. 149).
12 Dès 1205, K a lo je a n se plaignait des en trep rises des H on grois dans une lettre au pape;
et ce d e r n ie r était a m en é à p la cer sous 1’a u torité de la rc h e v ê q u e de K a locz 1’evèc h é d e la
• te rre d es fils d e Beleknese », qui était un évèc h é de rite g r e c : Fontes, II, p. 99-100 et 300. En
1237 c e s t la te rre d e S e verin ( C h e u rin ) dont le pape d o it rég ler le sort ( Fontes, III, p. 300-301).
L a ttitu d e du ro i d e H o n g rie en vers la B u lgarie réagit sur la po litiq u e du tsar Jean Asen à

l’égard d e la R o m a n ie latine. . . . .
” On peut n o te r la ttitu d e b ien veilla n te d e Daniel en vers les D o m in ic a in s : Altaner. Die
D o m in ik a n erm is s ion e n . p. 215-223. Son fils Léon. ép ou x d une princesse hongroise. leu r donna
un co u v en t dans sa v ille d e L w ó w (ibid., p. 219).
■‘ C e s t ainsi q u a u x en viro n s d e 1247. B ela IV pou vait se p la m d re au pape de ce que
1'invasion m o n g o le e ú . e n le v é à son ro y a u m e la Russie. la C om anie. la B u lgarie e ! le pays d e S
B ro d in c i q u i m m o g M p a m n o s iro d o m in ú , an,ea subiccean, (F ejer. Codex A p l. H unganae. IV.

P - A u b ry d e T r o is -F o n o in e s . éd. S c h e ffe r.B o ic h o rs , (M G H , SS. X X I l l p. 946). sous Ia

d a ' e " eR , > Ü ; B u llü riu m , p. 26-27 <F on ,e, .... p. 2 0 .: * . * » • * < * * 'X . > .2 ): 21 m ars

1228 .

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24 LA PAPAUTÊ ET LES MISSIONS D ORIENT Ali MOYEN AGE

Mais cette domination politique, favorisée par 1affaiblissement des»


Q ip c a q17, se doubla d une pénétration religieuse du fait de 1apparition des
Frères PrêcheursIS. Dès 1221, au moment même ou naissait la province
dominicaine de Hongrie, des frères étaient désignés pour aller prècher aux
Comans. Ce n’est pas sans appréhension qu ils se mirent en route, et ils ne
réussirent à pénétrer en Comanie qu’après plusieurs tentatives infruetueu-
ses. Ils parvinrent au Dniepr; mais un certain nombre d entre eux avaient
été martyrisés ou réduits en esclavage. Cependant, la prédication portaii
ses fruits: le « d u c » Bort (ou Burch) envoya en 1227 son fils unique, accom-
pagné de Dominicains, pour demander à 1archevêque d Esztergom de venir
le baptiser. Et les convertis furent si nombreux à recevoir le baptême que
1’archevêque se décida à élever à 1épiscopat le prieur des Frères Pitcheurs,
le frère Thierry19.
La mort de Bort, qui fut enterré dans la petite chapelle construite en
l’honneur de la Vierge par les missionnaires, ne ralentit pas le mouvement
de conversion. Son fils Membrok mourut à son tour et fut enseveli dans la
chapelle, devenue cathédrale; les conversions continuèrent.
Le pape Grégoire IX avait suivi avec intérêt cette entreprise; mais, en
dépit de la part presque exclusive qu'y avaient tenue les Hongrois et du
protectorat revendiqué par le roi de Hongrie sur le pays coman, il avait
tenu à marquer 1'autonomie de la nouvelle chrétienté. Quans 1'archevêque
d ’Esztergòm était parti en Comanie, le pape lui avait conféré les pouvoirs
d’un légat apostolique, et c’est en vertu de ces pouvoirs que l’«évêché des
Comans » avait été érigé. L'archevêque était encore légat « dans les provin-
ces des Comans et des B ro d n ic i», en 1231; il fut remplacé par le cardinal
Jacques, in provincia Cum anorum apostolice sedis legatus ( 1231-1234)20. Dès
le 21 mars 1228, Grégoire IX avait précisé, en confirmant la n o m in a tio n de
1’évêque Thierry (lequel était Hongrois), que l évêque des Comans ne relè-

17 En 1228-1229, on voit le roi André II co n céd er des terres «a u x dues et aux peuples des
C om an s» ( Registres de Grégoire IX , n° 344). Sagissait-il de fa ire en trer les chefs comans dans
un système féodal ?
" L o u vra ge fondam ental reste celui de N. P feiffer, Die ungarische D om inikanerprovt»'
von ihrer Gründung 1221 bis zu r Tartarenverw iistung 1241-1242, Fribou rg 1913. Cf. aussi
S. Salaville, Un peuple de race turque christianisé au X I I I * s iè cle : les Comans, dans E ch »'
efOnent, fase. 106, 1914, p. 193; B. Altaner, Die D orninikanem iissionen, p. 141 et suiv.
If Geraud de Frachet, Vitae fratrum, p. 38. 305; Fontes, III, p. 206 (Ripoll, Bullariti>n-
P 22). '
H Zim mermann, Die pàpstliche Legation in der ersten Hálfte des 13. Jhdts ( 1198-12*^'
Paderborn 1913, p. 135. C est en tant que légat que l'archevêqu e avait délim itó le dioce*1'
Fontes, III, p. 282.

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DE LAPPARITION DES MENDIANTS JUSQU AUX MONGOLS 25

verait que du Saint-Siège; et, le l er octobre 1229, il prenait les Comans sous
la protection du siège apostolique. L'évèque des Comans apparaissait
comme indépendant de la hiérarchie ecclésiastique du royaume de Hon­
grie : aussi, quand il fallut créer un évêque de Bosnie, ou prendre charge de
la Petite-Valachie laissée sans évêque (26 avril 1238), ces territoires revendi-
qués par la couronne de Hongrie étant sujets à contestation, c’est à l'évèque
des Comans que le pape s’adressa21.
Le diocèse confié à Yepiscopus Cum anorum , comme ceux des pays bal-
tes, ne portait pas le nom de la ville oú résidait 1'évêque - ville des plus
modestes, d'ailleurs, qui prit naissance autour du couvent dominicain et de
la chapelle déjà mentionnée22 mais celui du peuple soumis a la juridic­
tion de ce prélat. Pour limites, il eut, au Sud, les frontières de la Bulgarie,
qui relevait du patriarcat de Constantinople; à 1’Ouest, les Carpathes qui le
séparaient de 1’évêché de Transylvanie, relevant d ’Esztergòm. Au Nord, un
évêque des Russes avait été nommé en 1233 : sans doute sa juridiction théo-
rique coíncidait-elle avec les principautés russes, de Halicz à Kiev et Tcher-
nigov23. Par contre du côté de l'Est, il est vraisemblable que les limites du
diocèse auraient coincidé, si on les avait déterminées, avec celles du terri-
toire dans lequel nomadisaient les Comans - ce qui pouvait aller très loin
dans les steppes . ..
Toutefois les Comans n'étaient pas les premiers habitants de cette
région. Les anciennes notices épiscopales grecques, telle celle d Epiphane
de Chypre, connaissaient dans cette région les provinces de Mysie et de
Scythie; et, en Dobroudja comme en Moldavie, vivaient des Valaques qui
continuaient à pratiquer le rite byzantin et qui, daprès les plaintes de 1evê-
que Thierry persistaient à obéir à des «pseudo-évêques» grecs. Conformé-
ment à la doctrine reçue depuis le IV- concile du Latran, et déjà mise en
pratique antérieurement en Syrie franque, le pape invita levêque des
Comans à se donner un vicaire de rite grec qui serait ordonné eveque. lui

*■ Registres de G régoire IX . n° 344. 345, 536. 2120, 4286; Ripoll, B ullarium , 1, p. 26-27 (For.-

b W tán ér a ^ p ro p o ^ T d e localiser ce si.e avec celui de M ilc o . sur la M oldava, pour


, • , * ia fn i« du texte du Carmen miserabile, qui le situe au-delá du Sereth, et de la
bu» Z e Pc Ú o „ d ú ^ ge d e M ilc „ v Ce „ . « 7 . , u i se rÉ ftre » U n e ie n É, 4c h * des Com ans (D ie
D om im ka n erm isU on cn , p. 145 e. suiv.). II nous sem ble que e ie x .e de < ^
. . . , ___ _ n m ch e du Dniepr. - II n est pas exclu que la reteren ce a
que un site qui serait eau p j Tartares. ait été utilisée pour favoriser de
la cathédrale, com m e aux eglises, detruites p a n e s ia i r
nou velles création s d évêch és ou de paroisses (cf. infra., p. 88, 274).
” Altaner, op. cit., p. 216-217.

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26 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

jurcrait obédience, et limiterait sa juridiction aux seuls Valaques. d


toute 1’étendue du diocèse des Com ans24.
Nous connaissons mal les conditions dans lesquelles les premiers mis
sionnaires avaient commencé 1'évangélisation des C o m a n s : sans doute
avaient-ils été dotés de pouvoirs exceptionnels, comparables à ceux qUc
Grégoire IX concéda en 1237 aux Dominicains envoyés en Petile Valachie
tels que le droit de bénir les nappes d'autel et les vêtements sacerdotaux
généralement réservé aux évèques25. Avaient-ils dü aussi sadapter a la \\c
nomade des peuples pasteurs auprès desquels ils vivaient?
Dès 1228, en tous cas, on constate que des Comans ont tendance a se
fixer auprès des lieux de culte; et de nombreuses églises sont bàties. II sem-
ble d ’ailleurs que les religieux encourageaient leurs ouailles à cette séden-
tarisation. Une organisation paroissiale sesquisse26. Mais v avait-il dautres
desservants dans le diocèse, que des Frères Précheurs? Et les Comans
allaient-ils participer à 1'organisation ecclésiastique? On peut le suppuser
en constatant que Rubrouck a rencontré en Asie un Coman qui le salua en
latin, ce qui atteste que ce Turc avait reçu un début de formation scolaire
et cléricale27. Mais on ne peut en dire plus l o n g . ..
La mission hongroise avait donc pris largement pied en pavs qipeaq.
Elle porta ses regards au-delà: vers les peuples encore paiens de la region
de la Volga. Nous possédons deux textes relatifs aux expéditions mission­
naires vers la Grande-Hongrie, le De inventa Ungaria magna et la lettre du
Dominicain Julien au légat pontificai, 1evèque de Pérouse; textes qui ne
vont pas sans poser quelques questions aux historiens28.
Le premier texte fait état du désir qu éprouvaient les Dominicains hon*
grois, familiers de 1’histoire hongroise, de retrouver le rameau du peuple
magyar qui n avait pas suivi la migration de ce dernier vers 1’Occident, et
dont on supposait q u il vivait encore dans la patrie primitive des Hongrois:

14 Fontes. III, p. 284, n° 209 (R ip oll, B ullarium , I, p. 70); G.-I. Bratianu. Le problènte de la
con tin u ité d aco-roum aine (discussion d un a rticle de F. L o t) dans Revue hist du Sud-Est Euro-
péen. XX , 1943, p. 51 et 69-70.
” Fontes, III, p. 300-301; Registres de G régoire IX . n° 2689-2691 (m ai 1237).
» N ous ren voyon s ici à B. A llaner. op. c it , p. 144-145. Cf. Fontes, III, p. 282.
11 S inica Franciscana, I, p. 217.
» Ces textes ont été publiés à plusieurs rep rises (le p re m ie r est aussi désigné smis le
titre : De jacto Ungarte magne a fratre R ica rdo invento tem pore d o m in i G re g o rii pape noni) - c 1
L á tzló B en d ely, Fontes authentici itinera (1235-1238) fratris lu lia n i iüustrantes, dans Archivum
E uropae centro-orientalis, III, 1937. p. 1-52 et G om bòs, Caialogus fon tiu m rerum h u n g a ric a ru *
II, p. 1363-1367 (le ttre de Julien) et III. p 2046-2050 ( De m venta Ungaria magna). La dernit^
éd ition en date a été p rocu rée par H. D õrrie, op. cit.

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DE L APPARITION DES MENDIANTS JUSQUAI/X MONOOlX 27

la Magna Hungaria Oua«rc dVm re eux -cmtem , * n h a I, retherche <1,,


Hongrois de Grande-Hongrie; après Irois ans, l un d'cux, Irerc Ouon <„,§
vovagea.. sou» I habit d u n marchand, aurail finí par re n c n .r c , dans un
pa>> paien. des gens qui parlaient hongrois; revenu en Hongrie pour y trou-
yer des conipagnons. il y mourut; mais, avec laide du roi Bela ÍV (1235­
1270) qui finança 1'expédition, quatre religieux, ayanl adopté le costume
secuher et la.sse pousser barbe el eheveux a la mode paícnne, comme la
pernussion en avait été accordée aux missionnaires*', gagnerenl Constanti-
nople par la Bulgarie, s e m b a i quèrent et atleignirenl Malreya ou ils séjour-
nerent cinquante jours. Treize jours de traversée du désert les menerent
chez les Alains. ou ils connurent une telle détresse que deux d entre eux
rebroussèrent chemin. Les deux autres, Gcrard el Julien, partireni au bout
de six mois et. après trente sept jours de voyage, atleignirenl le pavs des
W edin ou \ ela . Gerard mourut; Julien se lil serviteur d u n prelre niusulman
a\ec lequel il atteignit la Grande-Bulgarie ou il rencontia une femme de
langue hongroise qui lui revela que la Grande-Hongrie n'était qu’à deux
jours de marche. Julien, parvenu au termo de son voyage, el forl bien
accueilli. constata que ces Hongrois étaicnt reslés au stade de Télevage et
de la cueillette, et prit conscience de la menace mongole. En quittant la
Grande-Hongrie. le 21 jirin, il mit quinze jours a traverser le pays des Mord
ves. des paíens qui avaient approché le duc de Vladirnir pour se faire caté-
chiser. et. à travers la Russie et la Pologne, il revini en Hongrie le lende-
main de Noel.
La lettre de Julien date probablement de I2371". Elle lait état du
voyage de quatre autres Dominicains envoyés en Grande-Hongrie pendant
que le narrateur lui-mème séjournait ií la cour de Rome. Ceux-ci seraient
passes par le duche de Souzdal, oü ils auraient rencontré des « Hongrois
paíen s» qui fuyaient devant les Tartares et qu'ils auraient convertis. Le duc
de Souzdal. mecontent. leur interdit de continuer leur voyage el les
expulsa; ils passèrent alors dans le duché de Riazan pour essayer de gagner

Cf. l a u to n s a tio n a c c o rd e e le 17 m ars 1226 par H o n o riu » III aux Dom inicains ct aux
Francis*:ains e n v o v e s au M a roc (q u i sont égalcinent a u torisé» a c m p o rlc r de la rgen t, contrai-
rem en t a la r e g le de leu r o r d r e ) : Pressuti. II. n° 5865.
* C f la d a ta tio n d e ces lex te s par H. D òrrie (op. c il. ) : Julien aum il c fle t lu é *on voyage à
lra\ers la Russie en 1237 e l regagn e la H on g rie au débul de I23H, qui serail la date de son
tex te II d e crn en e ffe i les a m ie e s lartares co m m e en position dcvanl Ic i duche* de Souzdal.
de R ia / a n d e V o r o n e j lO w h c n u h ) et en C om anie, el é v o q u e la fu ile d e » (Jip ía q vers la H on­
g rie O r c e s t en 1238 que Sou/dal el Ria/an lo m b e n l aux m a im det» M ongols; V oron ej tom be
en 1239

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28 \X PA PA U TÍ IM I.US MISSIONS D O K IE N T AU MOYEN-AGE

soit la G ra n d e -H o n g r ie , soit le pays des M ordves, soit m e m e celui des Tarta-


res. D e u x d entre eux arrivèrent a u p rè s du c h ef des M o r d x e s et disparu-
rent; d e u x a u tres reviurenl. Julien lui-même, avec plusieu rs compagnons,
reçut 1’o r d r e de se ren d re en G ra n d e -H o n g rie et passa p a r les confins de la
Prusse, o u il apprit q u e la G ra n d e -H o n g rie , la G ra n d e -B u lg a rie et d autres
r o y a u m e s avaient ete sou m is par les M ongols. Le du c de Souzdal lui fit pari
de rinterccption des m essagers tartares, et d un ultim atum que ceux-ci
ap p o rta ie n t au roi de H o n g r i e ’ 1. Estimant qu il était indispensa e in or-
m e r celui-ci. et q u e les convulsions qui a c c o m p a g n a i e n t 1 im a s io n mongo l
ren d aien t le u r mission im possible, Julien et ses c o m p a g n o n s, qu<- les dcu\
D o m in ic a in s qui étaient restes à Riazan avaient rejoints, regagnercnt a
H ° ngrie.
D e u x thèses saffron tent à prop os de ces textes. L a recherche de la
« G r a n d e - H o n g r i e » , à partir de données légendaires con ten ues dans les
écrits historiques hongrois, la redécouverte d un p eu ple resté miracu Çusc
ment s e m b la b le à celui qui, à travers une migration pluriséculaire, s était
fixé entre les Alpes et les Carpathes en saccroissan t d elém ents divers, le
so u v e n ir precis gardé p ar le ram eau resté vers 1’O ural des frères se p a re s:
autant de faits qui peuvcnt mettre en garde. Et M. S in o r a p r o p o s é de voir
dan s le D e in ven ta U ngaria m agna une fabrication réalisée à I aide de
connaissances livresques et de la lettre, celle-là authentique, du frere
Julien : ce qui réduirait à deux lc n om bre des missions hongroises ayant
ch erch é à atteindre la G ra n d e -H o n g rie 32. D ’a u t r e s ,} m aintiennent au
contraire l'authenticité des quatre voyages en q u e s t i o n : celui d Otton
(1231-1233); celui de Julien et de ses trois confrères, dont les informations
su r les pays de la Caspienne et de la Volga paraissent é v id em m en t de pre-
mière main - encore q u ’il nous semble, avec M. Sinor, q u e ce texte a éte
fortement rom ance -. Revenu en 1235, Julien serait parti en c o u r romaine
pendant que quatre autres Dominicains reprenaient la route de la Grande-
Hongrie, cette fois à travers la Russie (1236). Julien, reparti à son tour, en

11 Cf. J Richard, U/timatnm s m o n g o ls et lettres apocryphes, dan s C en tra l A siatic jo u m a l


X V II, 1973, p. 215 216.
D. S inor, Un m v a g e u r du X I I I • s iè c le : le D o m in ic a in J u lie n de H o n g rie , d an s B u li o f the
S ch o o l o f O rie n ta l and A fn ca n Studies, X IV , 1952, p. 589-602.
11 H. vo n Sicard, N h gut o m m cdeltida ungersk m ission o ch dess historisk a hakgrund. dans
K vrkh istorisk Àrsskrift, 1962, p. 13-26. H. D orrie, op. cit. S u r la litté r a tu r e a n té r ie u rc , cf. Mar>
Dicncs, E a s tem m issions o f lhe H u n ga rta n D o m in ica n s in the first h a lf o f the X l l l l h century,
dans Isis, X X V II, 2, 1937. p. 225-244.

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DE L APPARITION DES MENDIANTS JUSQU'AUX MONGOLS 29

passant par le Sud des pays lithuaniens (sans doute pour éviter la Comanie
alors en pleine turbulence) au début de 1237, recueillit deux de ces derniers
avant de revenir en H o n g rie 34.
La G rande-H ongrie ne parait pas mythique. Julien, qui ne fait dans sa
lettre de 1238 aucune allusion aux contacts pris au cours du vovage qu il
aurait fait trois ans auparavant35, a parlé en Russie à des pagani Ungari qui
fuyaient Tinvasion de leur pays d'origine. II semble difficile qu il n y ait pas
eu entre eux une certaine communauté de langue, même si celle que par-
laient les « G r a n d s H o n g ro is» netait certainement pas identique au magyar
du X III* siècle. On a retrouvé dans les textes orientaux, les traces de
« M a g y a r s » qui ne paraissent pas être ceux du Danube, encore que des
confusions rendent ces textes difficilement utilisables’6. D autant plus que
Julien appelle les pagani U ngari du nom de Bascarti, qui correspond a celui
q u e m p lo ie n t Plancarpin et Rubrouck, ce dernier donnant pour voisins a ce
peuple les Kirghizes ( K erk is) et les Bulgares de la Volga (dont la Grande-

« C e qui, à n o tre sens. em p êch e cTidentifier cette mission de quatre D om inicains à u


des q u a tre p erson n ages dont le De inventa décrit le périp le à travers la m er N oire. les pays de
la C aspien n e et d e la Volga, et m ilite en faveu r de lex isten ce d au m om s tro.s voyages.
í T c i é v id e m m e n t. se pose la question de savoir si Julien avait effe ctiv em en t part,c ,pé
’ Hnnt M D ò rrie fixe les dates entre 1234 et 1235 (non sans une d iff.cu lte tenant a ce
: ; i y^ i e ta q u T l ^ i t fa.t les frais de la mission. ne m onta sur le trône qu en octo-

br' ^ relève le „ 0 »
G en gis-K han avait c o n fie la soum , , C(/ p 1 43 . 1 4 7 ). Yàqút, parlant des BaSkirs,
C om ans, les B u lgares les ^ m ^ es Crands-Bulgares, mais q u a u début du X III*
ex p liq u e q u ils on t ete c o n v e m s à 1>I* _ quj ne sauraient étre ,es . H on grois chré-
siècle ils sont sous la dor" ,na fo rm a tjo n s de ,a p rem ière m oitié du X I V ' siècle, cite parm i
tiens .. A l-U m a ri, d apres a vcc K a ffa, Súdáq. Saqsin. B u lg a r. . et la p ro ­
les villes d e le m p ir e d e la H o ,e M engiar de M arco Polo, qu on rech erch e dans
vin ce d e B aS qird; m ais c e tte v p ^ ^ Russes. des Tcherkesses, des Màgàr et
la rég io n ca u ca sien n e; ailleu , e n lever des esclaves : s agit-il des «H o n g r o is chre-
des Alains c o m m e faisant des rai P aux khans d e ,a H o rd e d ’O r? Cf. H. Derem-
tie n s . ou d un des peu p les soum is e naire de l'E cole des Langues orientales, Paris,
bourg, Les croisades d a p r i , Yâqo u , d ^ . ■. h « b . Kl. U c h , W iesbaden.
1895, p. 91; Das M on goh sch e W eltre , 777-778, et Recherches sur les chrétiens
1968, p. 140 et 142; P. P elliot. Notes on M a rc ^ hvpothèse récen te a p rop osé d 'id en tifier
d Asie cen tra le et d E x tr é m e -O n e n tp . I I . - ■ & p eu p ,e de ,angue ou grje nne que les
les P ro to -H o n g ro is (M a d ja ri) aux d '0 rigine, dans la région de Riazan, vers lE s t; le rap-
Russes au raien t re fo u lé de eu r habitat d o n g .^ ^ ^ N o r ,hmen and
p ro c h em e n t avec les C ran d s-H on gr ^ sujv 92. , 0 , (S |a vo -Onenta-
Slavs. B astem E u ro p e in the n m th century, La H ay .

lia , 2 ).

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30 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O RIE NT AU MOYHN A<.l

Bulgarie rappelle curieusement la G r a n d e -H o n g n e ) ^


ç a n f l e pays d o r i g in e des H on grois près du grand lleuvc H h v , ,s U m „
V o lg a e. Ourai. un peu à lo u e st de la BaSkirie actuellc que e U c . a u ce
pays. Mais lid e n ti.é des BaSkirs e. des . G ra n d s -H o n g r o h • d«
sérieuses difficullés, dont la m oin dre n e st pas qu»- l!>J ’ 1 p a le n s i» No
d o n n é s c om m e d é jà musulmans, tandis que es secu . .
retrouverons d ’ailleurs les « G r a n d s - H o n g r o i s » *ui
m êm e incertitude sur leur habitat39. . . - , .
. .. • ruissioiinaiies ties» loin
Ces expéditions hardies, qui menaient d tja . •.
de leur pays d origine, et sans aucun soutien de la Pal , -‘ .. ...
taux, n e u re n t pas un très grand é c h o » : Hnvas.on ...ongol» q u . a v a U d e ,a
atteint les pays situés entre 1'Oural et la Volga, c o m t m n v a i . .
Russes et m êm e les Hongrois. Elle mettait provisoirem en l Im a t o u tetenta-
tive d'évangéliser les peuples entrevus par les m i s s i o m u u u s . e i ai
aussi mettre fin à la mission de Comanie, si florissante en tie e .
Les Qipèaq, en effet, navaient pas d'illusion sur le s o . I q u e leur reser-
vaient les Mongols. Dans son ultimatum, dont Julien avait pu obtem i a tra-
duetion en rencontrant, en Comanie, qu elqu un qui savail i m on ^o , e
khan (ou son lieutenant Batu, si celui-ci est le Chayni d u texte de Julien)
ordonnait au roi de Hongrie, et de se soumettie, et de uc plus u t e n ii sous
sa protection les Comans, «s e s e s c la v e s »43. Dòs 1236, de s elém ents du peu-

11 C e qui peut e x p liq u e r c e rta in e s co n fu sio n s, c o m m e c c llc q u e n ou s a v o n s r e le v é e thez


AJ-'Umari en tre B u lga res d c la V o lg a et B u lg a res du D a n u b e (Z e its c h r ift <U r d e u lsch e n Morgen-
làndische Gesellschaft, 121/1. p. 213-214). Et il ne serait pas e x c lu quà p r o p o s d e s BaSkirs,
Y ãq ú t eút é té in flu e n cé par le p r o te c to ra t e x e r c é p a r le r o i d e H o n g r ie . q u i sc titra il rex
Cum aniae, sur les Q ip ta q d on t ce rta in s é lé m e n ts é ta ie n t m u su lm an s.
3* Z. V. Togan , « B a s h jirl», dans E ncycl. Islam , 2C éd.. p. 1106-1109. a e x c lu lo rm cllcm e n t
c e tte a ssim ila tio n (les B a ik irs, au té m o ig n a g e d e K aS gh ari, p a r la ie n t le tu rc, et non une lan-
g u e o u g rie n n e ). P a r co n tre , P. P e llio t ( N o te s s u r ih is t o ir e de la H o rd e d 'ü r, p. 115-162) a m ontre
la v a r ié té d es a c c e p tio n s du m o t B a sqirt dans les te x te s m o n g o ls .
19 In fra , p. 188.
40A u b ri d e T ro is -F o n ta in e s a ffir m e q u e le ro i B e la a va it e n v o y é les D o m in ica in s en
G r a n d e -H o n g r ie p o u r s a v o ir si les T a r ta r e s m e n a ç a ie n t la C o m a n ie et la H o n g r ie (p 942). Sur
la d iffu s io n d e ces récits. cf. G. A. B e z zo la , D ie M o n g o le n in A h e n d lâ n d is c h e r S ic h t (1220-1270),
B e r n a et M u n ich , 1974, p. 57-65.
41 L e r o y a u m e d es B u lg a re s d e la V o lg a é ta it d é tru it p e n d a n t 1’ h iv e r 1237-1238; les Alains.
les Z iq u es, les p e u p le s d e C r im é e (K h a z a rs , G oth s, S o g d a ia ) é ta ie n t s o u m is e n 1239; les pnn-
c ip a u té s russes, d e 1238 á 1240.
42 Cf. J. R ic h a rd , La lim ite o cc id e n ta le de Valphabet ouYgour, d a n s J o iirtt. As., 1951. p 7I-7-'1
41 L e kh an r a p p e la it au r o i d e H o n g r ie q u e t r o is a m b a s s a d e s lui a va ien t dejà eie
e n v o y é e s et d e m a n d a it q u e les a m b a s s a d e u rs lui fu ssen t r e n v o v e s : la le t t r e d e Ju lien m o n in

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DE LAPPAR1TION DES MENDIANTS JIISOIIAtlX MONGOLS 31

ple qipéaq avaient été atlaqués par les Mongols prcs de la Volga. Bela IV,
inquiet de la (ermentation qui régnait parmi eux, se porta à leur rencontre
et défit I a i mée que commandait leur principal chel, Koutan. Mais ce der-
nier implora le roi de le laisser pénétrer en Transylvanie avec sa horde, en
promettant de recevoir le baptême avec tous les siens. Les Dominicains
intervinrent auprès du roi, qui se laissa convaincre; apres une prédication
sommaire, dix Frères Prêcheurs baptisérent plusieurs millicrs de Comans,
et ceux-ci pénétrèrent dans le royaume de Hongrie. D autres, cependant,
franchissaient le Danube et se présentaient aux frontières de lE m p ire
latin : les princes Jonas et S o ron iu s promirent eux aussi de recevoir le ba p ­
tême et obtinrent le droit d entrer, avec les leurs, dans le territoire de
I empire - qui se garda de négliger le précieux appoint de ces redoutables
guerriers, acteurs pour une part de la défaite ou Baudouin Icr avait disparu,
en 1205 après leur baptême, ils donnèrent leurs filies en mariage à Guil-
laume de Merry et à Narjot de Toucy, deux des principaux barons francs44.
Le territoire de la Comanie, lui, íut parcouru par les Mongols, et les
voyageurs, dix ans après, le trouvèrent encore jonché dossem ents.
D innom brables Comans chrétiens et quatre-vingt-dix Dominicains furent
massacrés, la résidence épiscopale détruite; dautres néophvtes furent
déportés en Asie centrale, ou Rubrouck devait en rencontrer. Le diocèse
des Comans disparut : on ne devait songer a le restaurer que plus de trente
ans après.
La conversion des Comans allait cependant continuei à être d ’actualité.
Dans la Hongrie, si éprouvée à son tour après la défaite du Sahjo (1241), les
nômades auxquels le baptême avait été administre si libéralement se révé-
lèrent un élément de trouble : on parut même craindre par moments q u ’ils
nentrainassent la Hongrie vers le paganisme. Innocent IV donnait en 1253
des privilèges aux Dominicains qui annonçaient la prochaine conversion
des Comans; en 1256, on apprenait qu un grand nombre d'entre eux avait

que le duc d e Sou zdal avait a rrêté le p o rte u r d e ce m essage. D 'apròs le De inventa, le frè re
Julien aurait re n c o n tré en G ra n d e-H o n g rie un en vo y é des M on gols qui parlait le m on gol, le
turc (c o m a n ), 1'arabe, le h on grois, le russe et 1'allemand.
G érau d De Frachet, op. ciL ; A u bry d e Trois-Fontaines, p. 946; S. Salaville. art. cité,
p. 193; S oran zo, I I papato, 1'Europa cristiana e i Tartari, p. 42 et suiv.; R. G rousset, L 'E m p ire des
steppes, Paris, 1939, p. 328-332. Cf. J. Lon gn on , L E m p ir e latin de Constantinople et la p rin cip a u té
de Morée, Paris, 1949, p. 182-183 (d e l‘un de ces m ariagcs naquit sans d o u te cet Anselin de
T o u cy qui. en 1264, put d é b a u c h e r des m e rc e n a ire » turcs au scrvice des B yzantins. ca r il pa r­
lait lu i-m êm e le turc : Ib id , p. 233). On peut ra p p e le r à ce p rop os le destin d autres fu gitifs qui
d e vin re n t les élé m en ts d e «g r a n d e s c o m p a g n ie s » à travcrs 1 'O rien t: les K h w a rezm ien s.

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32 l A PAPAUTF. IVI I I-S MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

reçu Ic baptème. Mais llrhain IV invitait en 1264 les archevèqucs hongrois tl


faire observei la foi cutholiquc par les Comans baptisés. à faire bapiiscr U s
autres, et chasser du royaume ceux qui refuseraient le baptème . . . Nu o.
Ias III, en 1278, demande aux Franciscains de Hongrie d ’évangéliser |Cs
Comans «qui paraissent disposés à recevoir la foi catholique».
En fait, les Comans étaient devenus une puissance dans le royaunie
Etienne V, Ladislas IV les soutenaient; aussi les engagements qu'ils pre.
naient de recevoir le baptème, de renoncer à leurs rites paíens et même au
nomadisme, de rendre les biens ecclésiastiques q u ’ils avaient usurpes, res-
taient lettre morte4\ II fallut qu'en 1283 le roi de Hongrie engageât la lutte
contre eux, les battit et les refoulât en territoire mongol (ce qui lui valut en
1284 une expédition de représailles) pour que le problèm e coman perdit de
son acuité.
Néanmoins, les Comans n’avaient pas tous été chasses, et ils eonti-
nuaient à vivre à 1’intérieur de la Hongrie, dont deux districts prirent lt-
nom de Grande et de Petite Comanie, et oú le dernier C om an parlam cette
langue mourut en 1770. La mission auprès des Com ans devenait une mis­
sion permanente: on constate, en 1348, q u ’il reste encore parmi eux dc
nombreux paíens; en 1382, le roi de Hongrie fait savoir qu'il donne tous ses
soins à leur conversion. En 1399, enfin, le pape pouvait affirm er que la
conversion des Comans était pratiquement terminé. Et il invitait les évè­
ques a ne pas contraindre ces nômades à renoncer à leur m od e de vie ■des
Franciscains devaient èfre allachés à leurs camps, les suivre dans leurs
peregrinations et leur administrer les sacrements46.

T qUC' dispa,,?e dans la steppe ukrainienne, la mission de


momrni ” rCP'''S ™ ' " m irieur mème du ro>'aum <-' de Hongrie. El. au
oue ne e T j: " " " f ™ 0 ^ C° manS eS* un fait ^ q u . s - bien plus lard
que ne e la.ssaient augurer les prem iers succès” - une form e dencadre-
ment religieux, adaptée à leur genre de vie « .
efforis de séden.arisa.ion que les premiers ^ r° m P ‘ 'S
premiers m issionnaires paraissent avoir

Cf. la le ttre de N ico la s I I I au roi d e H n n a r i» to a • , ,


l on a p p ren d q u e les C om an s a va ien t a c c e p té tout , m b r e 1279 : Fon tes' V ' 1 n" 49)' ° U
b a rb es et c o u p e r leu rs c h e v e u x ... a ceL p tc ,o u tes les ex ig e n ce s, sa u f c e lle s de raser leurs

m «* * * * < * . P 40; W' 276,; R“ chen- U " '


p. 410-411; Raynaldus, Annales ecclesiasíici, V II „ 45^ ' : W l- 2 * U : Soran'° ' ° P
<7 La s o lid ité d es c o n v e rs io n s oh tcn n
déportalion, on retrouvail des Comans atlachésTÍTf ^ h " ' <,U'aprt* Plusieurs anníe5. '
ita c n e s a la fo i c h r e tie n n e d a n s le m p ir e mongol.

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DE LAPPARIT10N DES MENDIANTS JUSQUAUX MONGOUS U

voulu imposer à ces nômades4". Toutefois, du fait que les Comans sYtaieni
établis dans un territoire déjà pourvu de son armature diocesaine, I** <li<*
cèse des Comans et son évèque particulier avaient définitivemenl dispam.
La mission de Tartarie Aquilonaire allait reprendre, sous une autrr lurme,
la tâche brutalement interrompue.

II - LE S M IS S IO N S DANS LES TERRES D O U T R E -M E R

Jusqu'à 1'apparition des Mongols, la différence que nous avons n levée


dans la tâche missionnaire, telle qu’elle se définissait au Nord et au Sud de
la M e r Noire et du domaine byzantin, reste bien marquée. Et le monde
auquel on accédait par la Méditerranée orientale, apparait encore comme a
peu près indépendant de celui qui setend à l'Est de 1’Europe : il faudra
qu'un esprit scientifique comme celui de Guillaume de Rubrouck mette en
parallèle ce que l'on croyait savoir de la géographie de I Orient sur la loi
d'Isidore de Séville, avec les enseignements des premiers voyages accom-
plis chez les Mongols pour q u o n sache que la Mer Caspienne netait pas un
golfe de 1’Océan septentrional49, et que les pays d ’Asie centrale et
d ’Extrême-Orient, infiniment plus étendus q u o n ne le croyait jusque la,
étaient accessibles aussi bien en venant du Sud qu en venant du Noid.
Aussi ne doit-on pas être surpris de constater que laction missionnaire
dans les pays du Levant reste dans le prolongement de celle du XII1 siecle.
Mais des différences notables se laissent cependant discerner.
La Troisième Croisade navait pu parvenir à la libération de Jerusalém;
mais elle avait amené les Occidentaux eux-mêmes, et non plus seulement
les Latins d ’Orient, à prendre conscience de la realite orientale. Lorsque le
pape Innocent III dem ande au patriarche de Jérusalem un rapport sur les
souverains m usulm ans” , il es. évident que le souci d nformanon a p m une
grande place. Et les meilleurs informateurs se revelenl etr<_ les Chreliens
orieniaux dont les communautés vivent sous la dommat.on des prmees
musülmans, com m e sous celle des U . in s . La Cinquième Cro.sade, sous

a nrnnn> ou e la ch arge de la m ission des Com ans passe des D om ini-


« On peut n o te r à ce p ro p o s que ia cn«*igc

cains aux Franciscains. 80 n 62


49 S in ica franciscana, I. p. 211-211 . «»/ «. P -^ Rggesfo regni hierosolym itani.
w B ongars, Gesta D ei p e r F ra nc , P- tetraSticus L yon 1846, p. 63 et suiv.; Palm er A.
n- 762. p. 303). Cf. RJ>m. m om ej a n i crusad . propatanda. A m s.cr-
T h ro op , C riticis m o f the Crusades, A study o ] pum y

dam, 1940, p. 8-9.

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34 l a PAPAI/TF. I‘ í I I.S MISSIONS 1/OKIIíNT AIJ MOYF.N AGE

rinipulsion du légal Pclu^c*, ptend ijii contacl plus étroit avec ceux-ci; ()n
voit pénétrer dans la liltératurc lalíne, la iraduction de textes apocalypij.
ques d o r i g in e syriennc, copie ou chaldéenne, ou les souverains chrétiens
plus ou nioins mylhiques, quí re^ricnt au-dclà de la barrière musulrnane
sont appelés ü jouer un róle déc ísil en lavcur des Croisés - celui que déja,
en 1145, 1'évéquc Hugues de («ab ala prôtail au Prètre J e a n sl La perspec.
tive d ’une intervention des íjéorgieris prend corps, et des relations s esquis,
sent de ce còté; un texte concernant les graves évènem ents qui se produi-
sent en Iran et en Asie centrale, en les attribuanl à un roi chrétien, David,
est recueilli par Jacques de Vilry et díflusé asse/ la r g e m e n t S2. La Cinquierrie
C roisa d e se révele ainsi com m e un m om e n l capital p o u r les relations entre
Latins et Chrétiens o r ie n t a u x ".
C e s t précisément avec la Ciriquieme Croisade, qu apparaissent trois
person n a g es avec lesquels 1’cspril missionnaire prend une nouvelle tour-
nure : Jacques de Vitry, lecolátrc de C o logn e O livie r et saint François
d A ssise .
II n ’est pas inutile de noter q u e les deux prem iers, qui nappartiennent,
ni l'un ni 1’autre, aux o rd re s de nouvelle création, ont été au départ des pré-
dicateurs de Ia Croisade, el que c est en Orient q u i l s se sont intéressés aux
perspectives missionnaires. Jacques de Vitry, qui fut é v ê q u e d Acre de 1216
à 1228, nous a laissé dan.s son H is to ria O rie n ta lis , à p r o p o s des progrès réa-
lisés en Orient p a r la doctrine m usulm anc, une d e sc rip tio n d e s peuples qui
avaient résisté à cette diífusion de l’Is la m S4: les C o m a n s , d o n t il connaissait
le p a g a n is m o ” , et les peu ples donl 1'adhésion à 1'Islam dissim ulait soit des
sou ven irs chrétiens - tels les B é d o u in s soit d e s d o c trin e s hétérodoxes
(N osairis, Assassins). Un peu plus loin, il passait à la d e s c r ip tio n de la Terre
Sainte oú il plaçait un tableau des p e u p le s qui h abitaien t celle-ci, en carac-
térisant chacun d e u x ™ les Poulains, les Francs de T e r r e Sainte, attiraient

'■ Cf. P. Pelliot, Deux passa^es de la prophétie de Hannan fils d’lsaac, dans Mélanges sur
lepoque des croisades, p, 73-97; R. Rõhricht, (Jmmi belli sacri scriptores minores, Genève, 1879,
(Sociétc dc rOricnt latin). Cf. G.A. Bezzola, op. cit., p. 13-28.
J. Richard, LExtrêrne-Orient lénendaire. .. Roi David et Prètre Jean.
53 Les sympalhies qu à tort ou á rai.son les Musulmans prètaient aux Chrétiens indigènes
a 1égatd des Croisés débarqués sur le sol égyptien, se traduisent d a i l l e u r s p a r une sévère
persécution : le patriarche (mclkitc) Nicolas et dautres évèques sen plaignent au pape.
1223 (Raynaldus, Annales eedesiustiei, 1223, §9).
4Dans J. Bongars, Gesta Uri per Francos, Hanovre, 1611, p. 1061-1063.
II suggere d expliquei' le nom des Turcomans, Turcomanni, en fa is a n t de ceux-ci un<
branche des Comans (Turci coinani).
P. 1086-1095, Une premièrc esquisse de ce tableau dans une de ses lettres ; Ltttres

~j
DE L APPARITION DES MENDIANTS JUSQU AUX MONGOLS 35

son attention par leurs vices et leurs maeurs orientalisées; les Syriens, par
leur adhésion au rite grec, en dépit de 1’usage quotidien de 1’arabc; les Jaco-
bites, par 1usage de la circoncision, 1’emploi soit du chaldéen, soit de
1arabe, les Nestoriens, peu nom breux en Terre Sainte, mais très répandus
en pays m usulm an et dans 1Inde, par 1'usage du pain fermenté; les Maroni-
tes, revenus à 1 Union, par leur emploi des ornements pontificaux de léglise
latine; les Arméniens, unis eux aussi, par 1'absence d eau dans le vin de la
consécration; il n oubliait ni les Géorgiens, ni les Mozarabes.
Cette enquête débouchait, dans son esprit, sur une évangélisation : ne
terminait-il pas une de ses lettres en affirmant que beaucoup de ces hcréti-
ques et des Sarrasins, se convertiraient facilement à la foi, s ils entendaient
prêcher la saine doctrine? Et il invitait ses lecteurs à prier « pour que le Sei-
gneur, qui ne déteste pas ceux q u il a créés et qui veut que tous les hommes
viennent à reconnaitre la vérité, daigne éclairer en ces jours-ci les ténèbres
de 1'Orient » 57.
Dès son arrivée à Acre, du reste, il avait obtenu des évêques jacobite et
melkite, qu'ils réunissent leurs ouailles auxquelles il avait prêché, les invi-
tant à aba n d on n e r leurs usages repréhensibles; l'absence de prélats nesto­
riens, arméniens et géorgiens, 1'avait empêché d'agir de même auprès de
ces trois com m u n au tés58. Parcourant le Levant, jusqu a Antioche, il avait
également prêché; il s'était tout spécialement intéressé aux Musulmans,
obtenant qu on laisse baptiser des esclaves musulmans dont beaucoup
disaient avoir été favorisés de visions59; et, voyant q u il ne pouvait aller
dans la terre des Sarrasins pour prêcher, il avait envoyé des lettres pour les
inviter à se convertir60 - au cours de la campagne d ’Egypte, il devait rache-
ter les jeunes enfants pris dans Damiette, dont cinq cents au moins reçu-
rent le b a p tê m e 61.
A 1ecolâtre de Cologne, nous devons également une description des
sectes orientales, sous la forme d une « longue digression » de son H istoria

Jacques de Vitry (J 160/1170-1240). E d ition critiqu e par R. B C. Huygens, Leiden, 1960, p. 83-87
et 93-97.
57 Lettres, p. 97.
s* í b iú p 93.84 Dans YHistoria orientalis, il donne à prop os de chaque secte une b rève
a rgu m en tation c o n tre les erreu rs d e chacune.
w Lettres, p. 88-89.
“ Ib id p. 96. A ses yeux, « si 1’h érita ge du S eign eu r était lib éré des infidéles, et l Eglise de
Dieu restau rée en O rient. les Sarrasins retenus par la crainte des autres se co n vertiraiem
súrem ent au S eign eu r et les ch rétien s qui sont op p rim és sous la dom in ation des paíens en
O rient seraient lib e r é s » (p. 89).
“ Ib id , p. 128.

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.V» I A FAPAliTf. KT LES MISSIONS D O KIFN1 Al M‘ »VI U A '.l

D u m iu h tia . à p r o p o s ct11 Nil dont il signalait q u i l venaii de p.»v% ,


les chretiens. 1'Ethiopie et la Nubie, cc qui I amenait a p.nl* < • j . ■
G éorgien s, d e s Grecs, des Maronites, des N o s a in s ( \< <>f<>'>h ■
niens. de s Neslorien s. des Syriens, des Jacobites ct d c » Kusm n VI..,
a p p r e n o n s aussi q u O l i v i e r s était livre à une enquctc pcrM»nni II*
un c o m e m g e o rg ie n de la M ontagn e Noire, q u a u p re s des Nc*tor.< r
rég io n d'An tioch e, p o u r s i n f o r m e r avec exactitude de Icuis nt«
d o g m e s : c est ainsi q u i l avait ap p ris des Chaldécns, qu< <* *
diaien t la d o ctrin e nestorienne en m atière ch ristologiqu c f ■
d a i ll e u r s . il s a b s t e n a it de d é c id e r si ses interlocuteurs avait n
m e n t sin c è re s . . . « C est à ce mom ent, qu e 1’Eglisc n e s to n e n n e c m ,
à è tre v raim en t c o n n u e des L a tin s64.
D e m è m e q u e Jacques de Vitry, O livier s était p r é o c t u p
m en t d e p r è c h e r la c ro isa d e et d e x c i t e r le zèle des c o m b a t ia m <:•
sade, m ais d e ssayer de con vain cre les M u su lm a n s d a d h e ri r .>
tienne. R egrettant d e ne p o u v o ir lui parler, il exposait par i n
d ’E g y p t e * 5 q u e e e ta it à tort q u e les chrétiens étaient q u a lih c s de
tes (in créd u los ), en lui expliquan t la doctrine de la Trinite; d ido - •
faisant la s é p a r a tio n entre la vénération d u e aux im ag e s et I a d o ra l.o n ,!«*
à D ie u s e u l; il précisait la doctrine relative aux images, ces .le t t r e , des
laics . . . qu i n o n t en elles-m ê m e s au cu n e p u i s s a n c e I I attaqua.t la ..
g a m ie , la c ru a u t é e n v ers les esc laves, le cara c tè re m a té r.e l d u paiaus
m u s u lm a n . et s e n prenait à M ah om et, élève d u m o in e apostat Sergius qu.
avait c o n v e rt i les p e u p le s p a r le glaive - a lo rs q u e les c h re tie n s n usa.ent du

« H is to r ia D a m ia tin a . dans Hoogeweg. D ie S c h r ifte n des K t íln e r D o m s c h o la u u u » O/.vr


rus, Stuttgart. 1894. p. 264-267 (Bibliothek des litterarischen Vcrcms m Stuttgart. 2
H no(t. aussi que la circoncision nest pas pratiquee par tous les Jacobitcv ma

men,MPArD , vÔn dííi Brincken. op. eit. p. 293 296, Léglise chaldéennc -dc- lextcneur. rest*
cependant encore inconnue: il faudra larrivée des Mongols pour que les U t . n s , q u i - l
dant nignorent pas la prcsence dc chréliens. dits Nesloriens. chez • les Medes et ics ^
ei dans l inde, decouvrcnl ceux d Asie centrale - cette Asie. il est vra. malgréla ^
D a v id e qui énumerait déjà des villes comme KaSghar, Balassaghun, Bu ara.’ ' , ^
qui est transcrite dans une lettre de Jacques de Vitry (éd. Huygens. p. 0 ^
informations apportées au comte de Tripoli par des marchands orientaux, n etai p
« perçue» par les Occidentaux. faisan:
Die Schriften, p. 2% et suiv. (lauteur ne néglige pas la captatio benevole .
1eloge de 1‘humanité dal-Kâmil envers les blessés chrétiens). transp^1’
** Ici, il tire argument de miracles survenus à Beyrouth, oú les Jui s avaien ^ ^
un crucifix. et à Sardenay, lieu dun miracle célebre dont 1'instrument etait un«. ico
Vierge.

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I)H 1. AITAKI 11()N DES MENDIANTS JllSQU'AUX MONGOLS 37

Klulve que P « * » i SC défendre de la puissance musulmane et pour reprendre


lu Trrtc Sainte, usurpéc sur les chrétiens. II se servait même du Coran pour
IIre» arnumcnt du respect témoigné par Mahomet au Christ. Aux «docteurs
il *1 cciivuit également pour défendre la substitution du baptême à
la circoncision, Im carnation du Christ et la virginité de Notre-Dame, etc.*7.
On pcut noter au passage que déjà en 1213, le pape Innocent III avait
c.HNuyé d o h l e n i r du sultan un accord pacifique sur la Terre Sainte, pour évi-
lor dc nouvclles guerres; mais sans grand espoir d ’y parvenir, et sans avoir
rssiivé d'ainencr le princc musulman au christianisme(,,<: les lettres d ’01i-
vicr el de Jacques de Vitry montrent le progrés réalisé par 1’esprit mission-
naire sans po ur autant que ces deux prédicateurs de la croisade fussent
inoins convaincus de la nécessité de leur tâche - au cours de la Cinquième
Croisade.

a) U s m issions auprès des M usulm ans

Saint François, lui, avait déjà envisagé d’aller prêcher la foi aux Musul-
mans. La croisade lui en donna 1’occasion. Parvenu au camp de Damiette, il
n obtint pas sans difficulté du légat Pélage, 1’autorisation de se rendre au
camp musulman. Par contre, laccès à celui-ci lui fut relativement fa d le *’ ,
et il parvint à se faire conduire au sultan al-Kàmil, avec son compagnon, le
Irere lllu m in a tu s de Rieti. Admis devant le sultan. celui-ci le reçut fort cour-
toisement; le saint souhaitait engager une dispute avec les théologiens
musulmans. qui auraient riposté en invitant le sultan à faire décapiter les
deux chrétiens, car « li lois (= le Coran) deffent que on n e n n oie nul pres-
chement Et s*il est nus qui veuille preecer ne parler contre le loi, li lois
com m an de c o n li colpe la teste». Al-Kâmil, en tout cas, que saint François
ait ou non offert de subir le p re u ve du feu pour garantir la vénté de sa m.s-
sion aurait répondu que, puisque ce chrétien était venu pour sauver son
ume! il ne pouvait le n punir, et renvoya les deux Franciscains dans leur

c a m p 70.

*’ * h rifíe " ' P 73° x X V1 967-968 (Patr. L a t. C C X V I. col. 831-832).


••Cf Mansi. C on e t i . X X V L 967 96^ ^ défnarche de saint François (Lettres, p. 132-133).
« Jacques d c V.try,, q j passaient d u n cam p à 1'autre. en reniant leur fo.. et
n ote le grar.d n o m b re d e transi j q ^ ^ christianism e p ersévéraien t rarem ent
préc.se q u e les M u su lm an s pa r (Chronilque d E m o u l et de B em a rd le T ris o rie r.
Ip I M ). F ra n ç o is fut pris p o u r un tel transtuge ^ </

*"• Ü Ü c é U b r , cf. M a r ,in ia „ o R oncaglia. S, F ra n cU o , Assisi W *. Middle


M
I
b.ast, 3* éd., Lx- Ca ire. 1957, p 25-30

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38 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS DORIENT AU MOYEN-AGE

L arrivée de François d'Assise marquait 1'entrée en scène des Ordres


mendiants dans le domaine des missions du Levant, encore qu on puisse
considérer la naissance de la province franciscaine de Terre Sainte comme
assurce, du moment ou le chapitre de 1217 avait désigné le frère Elie
comme ministre de cette nouvelle province71. L ’un des religieux, le frère
Electiis, fut bientòt martyrisé72; mais il semble que 1'essentiel de 1’activité
des Franciscains des couvents de Jérusalem, de Jaffa, d'Acre, d Antioche, dc
Sidon, de Tvr, de Tripoli et de Tortose (ainsi que de ceux de Chypre) se soit
exercée au sein de la population chrétienne des Etats latins. II s avéra cri
effet très vite que «le s Sarrasins écoutèrent volontiers ces frères tant qu ils
préchèrent la foi du Christ et la doctrine évangélique, jusqu'à ce qu ils se
missent à contredire manifestement dans leur prédication Mahomet, en le
traitant de menteur et de perfide. Alors ils les battirent cruellement - et, si
Dieu ne les avait miraculeusement préservés, ils les auraient fait périr - et
les chassèrent de leurs c it é s »73. En terre musulrnane, la prédication publi­
que était pratiquement impossible, les blasphèmes contre le Prophete et
son enseignement (et 1’on a vu par la lettre d'01ivier de Paderborn que la
réfutation de Mahomet faisait partie intégrante de la polémique islamo-
chrétienne) étant punis de mort, de même que le passage d u n musulman
au christianisme7''. Les missionnaires allaient partout vérifier cette impossi-
bilité.
Toutefois, 1’accès des religieux aux terres musulmanes, - q u ’il s agisse
des Franciscains ou des Dominicains, lesquels font leur apparition en
Orient probablem ent un peu plus tard que les disciples de saint François,
et fòndent eux-aussi des couvents dans les principales villes des Etats
latins7’ - est parfaitement possible : l accès des marchands occidentaux aux

71 M. RoncagJia, op. c íl , p. 31, 58 et passim.


72 M o n u m e n ta franciscana, p. 526.
71 G o lu b o v ic h , I, p. 9-10 (d a p r è s Jacques d e V itry, H istoria O rie n ta lis ).
74 Cf. p a r e x e m p le , la p e rséc u tio n a n ti-c h rétien n e qu i se d é c h a in e à M a rd in parce qu un
p r é tr e ja c o b ite ré n é g a t r e v ie n t à sa fo i p r e m iè r e (B a r H eb racu s, C h ro n ic o n ecclesiaslicum , III.
p. 564; 1171). Un m iss io n n a ire fra n cisca in d é s ire u x d e r e c e v o ir le m a rty re , et en ayant obtenu
lic e n c e d e son gard ien , in su lte M a h o m e t; la fo u le s’irrite, m ais un u lém a d é c la r e q u il est lou,
et il é c h a p p e a la m o r t : Jean d e W in terth u r, C h ro n ico n . dans A rc h iv f ilr Schw eizerische Ges-
ch ich te, X I, p 207,
7Í La c r é a tio n d e la p r o v in c e d o m in ic a in c d c T e r r e S a in te est d é c id é o p a r le chapitre
g e n e r a l d e 1228; m ais e lle réu n it d e s c o u v e n ts d o n t ce rta in s cxistn ien t avant c e tte date (celui
de N ic o s ie est a tte s té en 1226). Dans les Etats latins, on c o n n a it a v e c c e r titu d e ceu x d Acre. dc
J éru sa lem (1229-1244), d e Jaffa, d e T r ip o li, d A n tio ch e , et en o u tr e c e u x d e C h y p re ct d Arme-
n ie ; B A lta n cr, D ie D o m in ik a n e rm is s io n e m des 13. Jhdts, p. 19-41.

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DE 1. APPARITION DES MENDIANTS JUSQUAUX MONCiOLS

pays musulmans de I intcrieur, que jusque là n'avaient guère freqüentes


que des pélerins, tels Bernard le Pélerin et Henri de Morungen (que leur
dévotion entraina jusque dans I Inde, oú ils visitèrent le tombeau de saint
T h o m a s)7*', ou des avenluriers, servant comme mercenaires dans les armées
des souverains m usulm ans77, commence à devenir assez fréquent pour que
les princes leur accordent des privilèges leur permettant d ’atteindre, qui
Alep, qui I intérieur de la Turquie78. Les religieux allaient pouvoir. eux
aussi, bénéficier de ces conditions nouvelles.
Ils avaient un devoir à y rem plir: celui de porter des secours spirituels
et matériels à ceux que les revers subis par les Latins avaient fait tombei
aux mains des Musulmans. Dès 1183, le pape Lucius III ecrivait au frère de
Saladin, alors gouverneur d ’Egypte, à propos des captifs chrétiens. qu il
entendait respecter les conventions passées entre le roi d'Egypte et le pape
Alexandre III pour la libération des captifs, vraisemblablement sur la base
d’un échange™. Quelques années plus tard, Innocent III donnait leur règle
aux frères de la Trinité dont le rachat des captifs était la raison d è t r e 8'1. Ce
qui, d ailleurs, nétait pas toujours aisé, les Latins dOrient ne se montrant
pas très zélés pour renoncer aux services de leurs esclaves musulmans,
dont la libération garantissait celle d un nombre correspondam de chré­
tiens81.

7* J. R ich ard . Les m issionnaires latins dans Vinde au X IV • siècle, dans Studi veneziani, X II.
1970, p. 233. Un passage d u n e lettre dc P icrre dc Blois à Richard. évêqu e dc Syracusc (Patr.
Lat., CCVI1, col. 136), dans un parallèlc en tre Thom as B ecket ct 1'apòtre des litdcs, est ainsi
con çu : Eat, q u i volu erit, in In d ia m ad suffragta hean apostoli; lam longa peregrinatio nim is labo­
riosa est m ih i; m ih i su fficit Thom as m e u s ... Ce texte tem oigne-t-il d u n e certaine vogu e du
p è lerin a g e au tom b ea u d e 1’a p ò tre à la fin du X II* siècle? En tout état dc cause, un tel voya gc
ne fut sans d o u te ja m ais le fait que d c qu elqu es intrépides pélerins.
77 C f n o tre é d itio n d e S im on d e Saint-Quentin. H isioire des Tartares, p. 52, 74. et Aboul an
a ccou n t o f lhe balde o f H alún referring to Frankish m ercenaries m Oriental moslem states. dans
Speculum , X X V II, 1952, p. 168-177.
7* N ou s nous p e rm e tto n s de re n v o y e r à n otre etu de a para.tre dans les 4c/<5 du 9* collo-
qu e in tern a tio n a l d h is t o ir e m aritim e. et dont la traduetion angla.se hgurera dans notre
rec u e il Les relations entre O rie n t et Occident, 1-1 à 39.
79 R R õ h rich t, Regesta regni H ierosolym itam , n °6 26 (1 183).
" P a t r Lat C C X IV col. 444-449 (17 déc. 1198): ad redem ptionem captivorum qu, sunt
in c a ," r a ,iP,o ChrisH a p e r n i s . » ' l d e .o p r e a o r a . i o M p ro v,/ p ro
. , ^ „ l{xjnru m ut oostea. .. redim atur christianus p ro pagano . ..
redem ptione pa g a n oru m ca p n v o ru m itl p G rég o ire IX doit in viter le roi de
•’ " - A d i . le laisse déjà en tendre: dans sa le U r e d e ^ pm .

C h ypre à se p rè te r à ccs cc anges jéru sa lem et les princes d O rient a consentir à


mis aux captifs q u il i " y ' " “ ' , l e p a ' " “ c c x v l col. 5 0 9 ). - On sait que I* refus des
ces éch an ges : Fontes, II, p. 4U -^i-3 vruir. ,

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40 LA p a p a u t e e t l e s m i s s i o n s d o h i e n t a u m o y e n a g e

I * craime du pape élai. dc voii les caplifs, perdant lespoir delre l,h,
rcn, isoles les uns des autres, mais surtuut hors d etat d observer les ritL.s dc
leur religion íle travail du dimanche étant de règle pour eux) grossir |v
nombre des rénégats. dejà très important du fait que beaucoup de Chró-
lien», au moment de leur capture, acceptaient de «s e renter» pour sauvcr
leur vie*2. Leur assurer un minimum de vie religieuse était indispensable.
U* patriarche melkite dAlexandrie, Nicolas, se vit à plusieurs reprises félj.
titer par Innocent III pour son action en laveur des captifs auxquels il prü.
di^uait ses exhortations; en 1212, il avertissait le pape des besoins dc ceux-
ti, lesquels écrivaient en même temps au pontife q u ils n avaient quun
vieux prétre pour leur administrer les sacrements : Innocent III demanda
au patriarche de choisir parmi eux quelqu un qui fút instruit des fonctions
ecclésiastiques et de le promouvoir au diaconat*3.
Mais les rapports entre clergé latin et clergé grec, ou d autre rite,
n'étaienl pas toujours de nature à rassurer Rome : un certain nombre de
captifs passerent au rite copte*4. Aussi, en 1238, est-ce à un Franciscain que
Grégoire IX confiait le soin de donner les sacrements aux Templiers et
autres chrétiens captifs à Alep qui pouvaient aussi les recevoir de prétres
jacobites**. En 1279-1282, les captifs du Caire demandant un prétre au pape

fcrrip lier* dc libérer leurs esclaves donna p retexte au sultan B aibars p o u r attaqu er les etats
latin* cn 1263
*' Joinville donne la-dessus des dêtails p r é c is : les m arin iers d e sa n e f «e s to ie n t tuii
ic n u í c » , dc* prisonniers se voient o ffr ir le choix en tre le reniennent et la dccapitation (éd.
N dc Wailly, § 331, 334), on fait rem er les enfants — que saint Lou is p a rvie n t á se faire rendre
(»i - Un renegai explique a Joinville que c e s t la pau vreté qui l a d é c id é à se convertir,
m ulyn- *a torivcience '§ 395-396). N om breuses in form ation s sur la vie des captifs. et des réné-
«a i*, sou* la p lu m t du franciscain irlandais Sim on Sem eonis (Itin e rá rio S ym om s Semeonis. éd
M fi*p o »ito . Dublin, 1960>. O livier de P a d erb om racon te 1‘éva sion d'u n rénégat, profitant du
pa tta ge de* vaisseaux chretiens . H ísl Damiatma, p. 198.
hontei. JI, p 363. 410. Patr. U i . C C X V I, col. 23 (1209), 506, 509 (1212).
* Sim on Semeonis en cite deux. italiens de naissance (p. 62). Et, dans la liste des palriar-
'? i'tf*1* * ' ° n rcr,con,re un * T h eo d o re fils de Raphael, le F r a n c » (12 94 -129 9): E. Tisseranl
V : W ,* ‘ ; l * caUtU>gue patriarcal d A b o u l Barakat, dans M a sp éro. H isto ire des Patriarches

tdit Z T ? Í77- W * ~ « d' ■ » « que les C hré.icns in digínes « « . r ­


, . V / P' ' leuri iu m o n c í el rachètent (C olu bovich . II. p. 60).
‘ tr‘ " ‘ Vanasserio » " 1"olibe, alio ordinis Ira,rum minorum vel. « ■ " » »
“ " T “ ‘ absolvi e, ab eis super kiis p e rn ie m »"

d l«m < eriver* rr - I. -


vaU" s i u p- 3i8; ^ 1 pn?
n° i e r que le patriarch e ja c o b ite ven ait d e fa ire acte d o b i-
to n iin e pleineroeni * P ° COns,derer ,u n i° n d e le g lis e sy rien n e avec le g lis e latine

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DE L APPARITION DES MENDIANTS JUSQUAUX MONGOLS 41

Nicolas III, celui-ci s’adressa au général des Franciscains qui leur envoya
Giovannino de O llis de Parme'tft. D’autres Franciscains devaient visitei les
captifs, avec 1'autorisation du sultan, dans les premières années du X IV1-
siècle87. Et dautres, de passage, assurent occasionnellemenl leur desserteH\
tandis q u o n ne perd pas 1'espoir de ramener les rénégats à la foi chré-
tienne1
’9.
Par un retour des choses, il arrivait que les captils fissent du prosély-
tisme, encore que ce fut très difficile en milieu musulman, ou 1'abandon de
1’Islam était un crime. Césaire de Heisterbach signale toutelois que I évêque
de Beauvais, capturé sous Damiette, fut invité à baptiser un enfant malade,
fils d u n e «p a íe n n e », qui fut miraculeusement guériw. Mais peut-on, en ce
cas, parler de conversion?y|
Pour prêcher publiquement aux Sarrasins, c’est dans le territoire des
Etats latins seulement, que les missionnaires avaient la liberte de le faire. Si
nous en croyons Jacques de Vitry, le même égoisme des maitres laisait obs-
tacle aux conversions: «Q u i pourrait dénombrer», dit-il, «les vices d u n e
autre Babylone oü les chrétiens refusent le baptème à leurs esclaves sarra­
sins, quand ceux-ci le demandent instamment et avec des larmes?». Leurs
maitres disaient en effet, «c e à quoi mon âme refuse de saccord er», que
«s'ils étaient chrétiens, nous ne pourrions pas les exploiter ( angariare) à
notre volonté». Et 1evêque d ’Acre se réjouissait d etre venu à bout de cette
opposition, et d e n avoir baptisé beaucoup1'2. Vingt ans plus tard (1237),
Grégoire IX ordonnait au patriarche et à tous les ecclésiastiques de Terre

D après S alim ben e (G olu bovich. I. p. 275-276). A noter que, s il y a quelqu e chose
d e x a c t dans 1'histoire d e la croisade des enfants que narre Aubri de Trois-F onlaines (p. 893).
le « c a lif e » d ’Egypte aurait systém atiquem ent (en souvenir dc ses années d etu des à P a r is .. . )
racheté les eleres, au n om b re d environ 400. dont 80 prêtres, ce qui aurait pou r quelque
tem ps assuré une desserte spiritu elle aux captifs. Mais 1aneedote parait bien controu vée.
•7 G olu bovich, III, p. 68 (cin q frères mineurs, dont l'un mourut à A lexandrie et un autre,
Ange de Sp olète. devait plus tard m ou rir m artyr chez les Bulgares de la Volga).
•* Sim on Semeonis, en 1329, célèb re ainsi la messe, pendant son séjour, dans les chapei-
les destinées aux esclaves latins du Sultan au Caire et à Alexandrie (p. 86).
« " C f Ch. K o h ler, Deux projets de croisade, dans Revue de 1'Orienl latiu, X. 1903-1904,

p 443
*• Césaire de H eisterbach, D ialogi m iraculorum , dans Ròhricht, Testimonia m inora de
quinto bello sacro, G enève, 1882, p. 172.
VHj acqUes de V itry fait état. en effet, de 1habitude qu avaient bcaucoup dc Sarrasins dc
faire baptiser leurs fils par des prêtres syriens, dans la croyancc que cela les ferait vivre plus
longtem ps ( Lettres. p. 69); B crtrandon de la B roqu ière signale une superstition du m em e
genre en Tu rqu ie au XV* siècle. (M as-Latrie. Hist. de M e de Chypre, III, p. 7).
*2 Lettres, p 88.

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p

42 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

Sainte, d'instruire et de baptiser ceux des esclaves qui se convertiraient dc


bonne foi, c'est-à-dire sans avoir le seul désir de recouvrer ispo facto |eur
liberté, conformément à la coutume du pays*3. Encore cet affranchissernent
n etait-il pas universellement observé” . Mais les ^ss.ses de Jerusalem |€
regardent comme de droit pour les esclaves musulmans qui apres s etre
enfuis en «paienim e», revenaient de plein gré dans les Etats atins pour y
recevoir le baptème95.
Dautres que les esclaves, sans doute, étaient accessibles a la prédica-
tion des Franciscains, des Dominicains et de leurs émules du clerge régu-
lier ou séculier des colonies latines9*. L a u te u r du De statu Saracenorum , le
Dominicain Guillaume de Tripoli (peut-être le Guillaume Champenois de
Tripoli que nous allons retrouver), exaltant les avantages dc la simple pré-
dication, affirmait avoir conféré le baptème à plus de mille Sarrasins, sans
avoir recours à la force des armes ni aux disputes philosophiques 7. Peut-
ètre les habitants musulmans des vil les et des campagnes des Etats latins
ont-ils été les auditeurs de ses prédications98. D autres ont été touchés par
1evangélisation de façon diverse : pendant que saint Louis résidait en Terre
Sainte. «plusieurs d’iceulx (aussi comme environ V c) delessierent ceie

95 Registres de Grégoire IX , n° 3792 et suiv. ( Fontes, III, p. 307). - L e pape parait revenir
sur ses prem iéres affirm ations 1'année suivante (Ib id , n° 4147; 1238) lo rs q u ’il in vite le painar-
che de Jérusalem à contraindre les barons du royau m e, m algré leu rs réticen ces, a laisser
leurs esclaves musulmans assister au m oins à une p réd ica tion m en su elle, et, s ils le voulaient.
á rec evo ir le baptèm e, ceci n'entraínant pas n écessairem ent leu r a ffra n ch issem en t.
M On voit, dans le royaum e arm énien d e Cilicie, en 1274, v e n d re « unum sclavum baptiza-
tum nom ine G u irardin u m » sous con dition de ne pas le «v e n d e r e alicu i Sarraceno. nisi si
ipsum sclavum vellet fra n c h ire » (A rchives de 1'Orient latin, I, p. 477). L e ro i d A rm én ie interdit
aux G ènois qui achètent des esclaves dans son royau m e de les v e n d re aux Musulmans. s ils
sont baptisés (Tournebize, Hist. . . . de 1‘Arménie, p. 218; 1288).
95 Recueil des Hist. des Croisades, Lois, éd B eu gnot, II, p. 191.
** Les réticences que rencontrent les co n version s d e s c la v e s on t d a ille u r s ici leur corres-
pondance. les princes latins étant fort peu soucieux de m é c o n te n te r leu rs sujets non-chré-
tiens ou non-latins en les exposant au zèle indiscret des m is s io n n a ir e s : c e s t ainsi que Ray­
m ond Lull, étant venu en C hypre au lem p s de la ca m p a gn e d e G hazan en S yrie (1299-1300).
seta.t avise de dem an d er au roi H cnri II d 'in v ite r les Juifs, les M u su lm an s et les Chretiens
separes, a le laisser prèch er dans leurs synagogues, leurs m o sq u ées et leu rs eglises HenriU
^A iQ t i Sugranyes de Franch, Raym ond Lulle, d octeu r des missions, Schòneck Becken-
ned. 1954. p. 43-45.

r c D l ü / d . r r " 1' K u l" " l l, í c h ‘í h "; K re u itllg e . p. 597-598 C e passage a é le discute «


r i T r 1" ! d C" " m b l« «*“ • •* c o n v e rs io n d es in fid e le s par Palmer K
p " 4 " 6 C, aussi * h » * r . D om m ik a n rm iss,on '«. p .* M »
d e . S a r r a .™ e ^ . J , T 7 1' ■ " « * ' le * ' * * ' • » « « d c tra v a ille r à la conversion
a e » ü arra.m » et des Juifs du diocèse d A cre (1264)

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DE LAPPAR1TION DES MENDIANTS JUSQU AUX MONGOLS 43

puanlc íoy de Mahometh et s’en accoururent à li. Et il avoient esté prcmiè-


rement entroduis des freres Prescheurs et des freres Meneurs et entroduis
en 1'enseignement de la foy, et après ce il furent renovelés par le saint bap-
tesme *>w. Ces Musulmans convertis, au nombre d'un demi-millier, formè-
renl une «bataille» de Turcoples : sans doute venaient-ils pour une part des
unités de mamelúks des armées damasquines ou égyptiennes.
Des conversions intervenaient même en terre musulrnane; mais les
convertis n'avaient d ’autre choix que de gagner les terres des Chrétiens,
comme ces deux frères, André et Pierre de Bethléem, «qui étaient revenus
au culte de la pureté catholique en abandonnant les souillures des paiens,
sous 1'inspiration du Fils de Dieu» et qu’Urbain IV ordonnait, eu égard à
leur pauvreté, de faire entretenir dans un établissement religieux (1264) l0°.
La fuite en pays chrétien d autres Musulmans, désireux de se convertir,
donna mème un prétexte au sultan Baibars pour attaquer Tyr et Acre
en 1269101.
Ce désir d'atteindre directement, et individuellement, la personne
mème des Musulmans pour les amener à la foi chrétienne, sans s en remet-
tre aux chrétiens indigènes, représentait un élément nouveau dans l his-
toire missionnaire des Latins en Orient. Mais il n’était pas question de
négliger la méthode traditionnelle tendant à essaver de gagner les princes,
susceptibles d ’imposer ensuite leur foi à leurs sujets.
A vrai dire, la correspondance d lnnocent III, comme celle de son suc-
cesseur, ne fait pas encore place à des démarches de ce genre102. On disait
bien que les sultans de Konya nourrissaient des pensées très favorables
pour la foi chrétienne : Olivier de Paderborn croyait que le sultan qui mou-
rut en 1219, Kai-Kawüs, était baptisé, tant il manifestait de bienveillance
envers les Chrétiens qu'il faisait libérer dans les places prises à ses ennemis
- Olivier ne songeait pas que le sultan pouvait ainsi recruter les mercenai-

99 C h ron iq u e de Prim at, dans Rec. Hist. France, X X III, p. 14. - Les enfants rachetés par
Jacques de V itry après un raid en terre in fidèle (1217) sont baptisés et con fiés à des religieu x
pou r é lr e instruits aux lettres : sous le m ont Thabor, c est un jeune Sarrasin qui se rend dans
le cam p ch rétien et se fait b a p tis e r: O livier, p. 289.
i°o Registres d V rb a in IV, n° 2518.
101 Cf. Ibn al-Furàt (L y o n s et Riley-Sm ith, Ayyubids, Mamlukes and Crusaders, C am b rid ge
1971, II. p. 132-134). t
102 Le pape écrit au sultan d Alep, en 1211, pou r le p rie r de p ro té g e r le patriarche d'Antio-
che, m en acé par le roi d A r m é n ie : il fait allusion à ses bonnes dispositions en vers la fo i
catholique, tout en sachant qu il n'en a pas reçu les sacrem ents (Patr. Lat., C C X V I. col. 434
Fontes, II, p. 405). En 1213, c e s t au sultan d Egypte, pou r lui su ggérer de restituer la T e rre
Sainte aux chrétiens, d e façon à é lim in e r un casus belli (Ib id , col. 831; Fontes, II. p. 444).

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44 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

res de sa garde latinel0}. Et ses successeurs ménageaient les Latins pour di-
multiples raisons; mais leur bienveillance envers les Chrétiens venaii prü.
bablement, comme l’a noté Abu'l Faraj, que les mères des sultans étaient en
général d ’origine gre c qu e 104.
Cest en 1233 que Grégoire IX, au moment oú il répondait à 1’invitation
du roi de Géorgie en envoyant dans son pays le Franciscain Jacques de Riu.
san avec d autres frères, décidait d envoyer des Franciscains aux différents
princes musulmans : les sultans de Konya, de Damas, d ’Alep, du Caire, |e
Khalife de Bagdad, et même le «m ira m o lin » du Maroc. A chacun deux
était envoyée une exposition de la foi chrétienne et de la tradition apostoli-
que; les religieux étaient chargés de 1'expliquer et le pape priait les princes
de les écouter105. Nous n’avons guère q u ‘une lettre émanant d ’un prince
musulman et adressée au pape : celle du sultan de Turquie, lequel envisa-
geait la conclusion d'une alliance avec les Latins contre ses voisins aivübi-
des, en y faisant entrer la perspective de la reconquète de Jérusalem, mais
sans aucune allusion à une conversion éventuelle (1234)106.
Le peu de succès de cette première démarche diplomatique nempècha
pas la Papauté de récidiver. Des Dominicains et des Franciscains partent en
1238 «d a n s les terres des paiens et des Sarrasins, outre m e r » «pour la
conversion des paiens», sans être spécialement recomm andés auprès des
princes m usulm ans107. L ’un de ceux-ci, toutefois, 1'émir de Hama, donnait
en 1239 1'impression d ’être tout prêt à embrasser la foi chrétienne, et un
certain Guillaume Champenois, elere de Tripoli, alia prier les barons chré­
tiens de se porter sur Ham a pour que 1'émir püt se déclarer sans redouter
ses coreligionnaires : ce fut une déceptionl08.

101 H istoria Dam iatina, p. 234.


I(M Ch. aussi la lettre d e 1’e m p e re u r B au douin II à B lan ch e d e C astille (1243), suggérant
de m a rie r E lisabeth de M on ta igu a vec le sultan : m u i ti etiam nobiles a partibus illis habent uxo-
res christianas quae in lege sua assidue perseverant, vid elicet Grecae, Arm eniacae, Yverae et Ros-
sae (D u B ou chet, Hist. généa logique de la m aison de Courtenay, Paris, 1661, pr. p. 19).
105 Sbaralea, B u lla riu n t franciscanum , I, p. 100-103 (p r iv ilè g e s d o n n és aux religieu x) et 93­
96 (b u lle Coelestis a ltitu d o ); Registres de G ré g o ire IX . n° 1099-1100 (id .) cf. Fontes, III. p. 265.
Les F rères n e ta ie n t pas ch argés de p rê c h e r en G é o rg ie ; ils é ta ien t ch argés d une legatio, au
nom du Christ, ad gentes que non n o v e ru n t D eu m (T a m a ra ti, L è g lis e gêorgienne, Rome, 1910,
p. 426).
106 Raynaldus, Annales eccl., ad. ann. 1235, § 37. L e sultan ne ré p o n d pas précisément au
p ape : il a ffir m e lui a v o ir e n v o y é six a m b assades e n tre 1230 et 1234.
107 Sbaralea, p. 231, 233, 236; R ip o ll, I, p. 99; Fontes, III, p. 316.
101 Gestes des Chiprois, dans R e cu e il des Hist. des Croisades, D oc. Arm ., II, p. 726 : «0 n elere
de T rip le , qu y a v o it n om G u illau m e, C h a m p en è s en su rnom , m ais il es to it nés de Triple. «*

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DE LAPPARITION DES MENDIANTS JUSQUAUX MONGOLS 4S

L’envoi de missionnaires en 1245 avait une toute autre ampleur : Inno-


cent IV, avant de reunir le concile de Lyon, envovait ses messagcrs aux pre-
lats du monde entier, avec l’encyclique Cttni simus super que nous retrouve-
rons, en même temps qu'il les adressait aux Tartares109. II les recomman-
dait aux princes musulmans dont ils traverseraient les Etats, tout en les
invitant, comme en 1233, à embrasser le christianisme que ses messagers -
des Frères Prêcheurs - leurs exposeraient. Cette fois, ce sont les reponses
que nous avons conservées : elles paraissent avoir été rapportées par le
frère André de Longjumeau qui rencontra les princes de Baalbek, de Homs.
de Kerak et le sultan de Dam as110.
Le sultan de Damas et le prince de Kerak répondent de façon cour-
toise, mais banale, en accusant réception des lettres pontificales et en men-
tionnant leur entretien avec les religieux. Le prince de Kerak. au nom du
sultan d ’Egypte, s'excusait auprès du pape de ce qu’il n'avait pas été possi-
ble d'empêcher le sac de Jérusalem. Quant au prince de Homs, il exprimait
ses regrets de limpossibilité ou il avait été, d organiser une dispute théolo-
gique, les Frères connaissant trop peu d arabe pour qu elle put ètre protita-
b le 1".
En fait, c’est seulement avec le sultan de Konya que les conversations
continuèrent; en 1243, 1'empereur Baudouin envisageait les avantages que
représenterait pour 1'Eglise catholique le mariage qu’il recommandait: la
construction d'églises et la dotation indispensable à leurs desservants"2. En
1254, des Dominicains, traversant la Turquie, sont chargés d’une lettre dans
laquelle, à la demande du sultan, Innocent IV adressait à ce dernier un
exposé de la foi catholique111; cest peut-ètre à cette lettre que le sultan

estoit mout acointes dou seignor de Haman, et usoit mout en tor luy, vint en 1'ost dou roy de
Navare et dist as barons que le soldan de Haman lor m andoit que se il voloyen t ven ir vers sa
terre, par qu oy il eust la fo rce et 1'aye des Crestiens, il lor m etroit en main ses forteresses et
devien droit cre s tie n ».
109 Sbaralea, I, 360, 362, 353, 3 5 4 ...
110 Cf. P. Pelliot, Les M ongols et la Papauté, III (Rev. Or. Chrétien, X X V III) p. 612, discutant
un article du cardinal Tisserant, La légation en O rient du Franciscain D om inique d'Aragon
(1245-1247) paru dans Rev. Or. chrétien, X X IV , 1924, p. 336-353; cf. aussi II (Rev. Or. chrétien,
X X IV , 1924), p. 225-236.
" * Registres d 'In n ocen t ÍV, n° 3031, 3032, 3033, 3034. On notera qu en 1215, une dispute de
ce genre avait eu lieu à A lep entre un m oine orien tal et trois docteu rs musulmans (Prutz,
Kulturgeschichte, p. 75).
112 Du Bouchet, loc. cit.
111 Ròhricht, Regesta, n° 1213 (Raynaldus, Annales, 1254, §5 -6 ); Registres d ln n o c e n t IV,
n° 7780-7781.

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46 LA PAPAITÊ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

aurait répondu de façon fort courtoise, en laissant entendre qu il était pr(.,


à se convertir et qu il avait déjà reçu le Pentateuque, les prophéties d']saat
et de Jérémie, les épitres de saint Paul et deux des quatre évangiles. Alcxan.
dre IV lui envovait des religieux pour 1instruire"4.
Les tentatives de conversion des princes musulmans, prenant la forme
d'exposés de la foi, adressés par le pape aux souverains et destinés a ètre
commentés par les religieux qui en étaient porteurs, n eurent visiblement
pas grand succès; on ne les rencontre pratiquement plus à partir du milieu
du X IIIe siècle. Deux missionnaires, Guillaume de Tripoli et Ricoldo de
Monte-Croce, ont laissé le fruit de leur expérience, l'un dans le De staiu
Saracenorum qu ’il écrivit à 1’occasion de la préparation du concile de
Lyon (1273), l'autre dans son Im p rob a tio Alcorani, écrite vers 1310"5. Guil­
laume estime que les louanges données au Christ, à la Vierge, aux chrétiens,
dans le Coran, 1’éloge de 1’Ancien Testament, la place donnée à Jésus, au-
dessus des prophètes, sont autant déléments que les Musulmans peuvent
retenir en faveur de la foi chrétienne. La démonstration des dogmes de la
Trinité, de lTncarnation, permet de rapprocher encore les points de vue, et
la spéculation rationnelle attire les Sarrasins savants vers la foi chrétienne.
Ricoldo, lui, fait l eloge des vertus des Sarrasins, mais se montre beaucoup
moins porté à tirer parti de leur loi.
En fait, la prédication aux Musulmans à laquelle Dominicains et Fran­
ciscains paraissent n avoir jamais renoncé116, n avait pas donné de résultats

1,4 Rõhricht, Regesta, n° 1263, date cette lettre de 1257, d ’après Potthast, Regesta pontifi-
cunt, n° 17131 - on n otera que la référen ce de ce d e rn ier aux Annales de Raynaldus (1257,
§ 55-72) est erron ée - M. Gérard M ovse a bien voulu v é r ifie r pou r nous le manuscrit Vat. lai
3877, f° 81 -82 v*>, auquel ren voie Potth a st: il s a g it des D ictam ina de B éra rd de Naples, oú la
lettre n'est pas datée. Nous rappelons que M athieu Paris l'attribu ait à Alexandre III (supra.
p. 8); il est plus que douteux que B érard eüt repris dans son recu eil une lettre qui avait un
siècle dc date. Cf. Altaner, Dom inikanennissionen, p. 81.
115 Cf. le d itio n du De statu par Prutz, et le ch ap itre déjà cité d e P.A. Throop. Notons que
Guillaum e avait vécu en Egvpte, et qu'il avait été en vo y é à la co u r rom ain e en 1264, pour
exp oser 1'état de la T e rre Sainte (R õhricht, Regesta, n° 1338). Sur R icold o , cf. Ugo Monnerei
de Villard, La vita, le opere e i viaggi di trate R ico ld o da M ontecroce, dans Orienta/ia Chrisliar*
periódica, X, 1944, p. 227 et suiv.
On peut citer les bulles p o n tificales attestant 1'envoi ch ez les Sarrasins de relig>eU'
des deux ordres dotés des p ou voirs habitueis des m issionnaires, en 1233, en 1238, en
en 1233, nous savons que les D om inicains se rendent en Egypte, a vec une lettre pour le *ü
tan ( Annales sacri ord in is fratrum praedicatorum , IV, p. 118-119; cf. Pelliot, Les M on g ols «
Papauté, II, dans Rev. or. chrétien, X X IV , 1924, p. 61-62). F rère Ph ilip p e en voie trois de
con freres chez les Sarrasins en 1237. - Des m ém oires sur la vie de M ahom et et les cro>an

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DE LAPPARITION DF.S MHNDIANTS JIISü UAUX MONGOLS 47

très spectaculaires. Limitée moins pai rhosiilite exislnnt entre Franes et


Musulmans, que par le refus systcnuiliquc irentrer dans une controverse
jugée blasphématoire par les seconds, elle ne pouvait guòre deboueher sur
des conversions nombreuses que là ou les conditions sociologiques etaient
tavorables, c est-à-dire là oú la communuute musulrnane n ctait pas en posi-
tion de domination. Et, entre 1244 et 1263, les Etats latins d Orient com-
mencent à se rétrécir de telle sorte qu’ils apparaitront bientòt comme tri-
butaires de 1'empire mamelúk. Cest d u n autre còté que doit se toumer
1’activité missionnaire.

b) La recherche de l'U n ion des Eglises

Amorcée au X IIC siècle, la recherche de 1’union des Eglises orientales


separées avec 1’Eglise romaine connait dans la première moitié du X IIIC siè­
cle de nouveaux développements, en mème temps que se font jour des exi-
gences nouvelles dans la recherche de 1’unité des chrétiens. Larrivée des
Mendiants, ici aussi, contribue à rendre cette recherche plus active, en don-
nant à la Papauté des agents plus efficaces.
Pour les Maronites, l’acte dobédience quavait obtenu d’cux le patriar­
che Aimery d Antioche ne parait pas avoir sulli à apaiser leurs dissensions :
des éléments hostiles à 1’union avec Rome auraient amené le patriarche
Luc Ier à refuser de recevoir les légats pontiticaux chargés d interve-
nir(1203); et c'est la pression du seigneur de Gibelet, dont les domaines
étaient le principal habitat des Maronites et avaient été soumis à interdit,
qui aurait décidé le nouveau patriarche Jérémie, élu en 1209, à prendre le
chemin de Rome, oú il avait été invité à assister au quatrième concile du
L a t r a n " 7. Jérémie obtint d ’Innocent III une bulle qui lui reconnaissait
1autorité primatiale sur les églises qui lui étaient soumises (deux archevé-
chés quatre évêchés), et lui reconnaissait implicitement le titre patriarcal,
en mème temps que le droit de porter des insignes pontificaux, à la mode

des Sarrasins on t été en voyés à G rég o ire IX ct sont reprodu its par Math. Pans. Chrom ca
m ajor a éd Luard III, p. 343-361, le p re m ie r ayant été en voyé de parttbtis orientahbus per prae-
d,catares partes iílas pera gra n tes: ce sont vraisem blablem en t des Frères Prècheurs. Sur la
p a tern ite de ces m ém o ires , cf. B. Altaner, Die D onunikanerm issionen. p. 87. n. 10. et

P. A .T h ro o p . op. c á . p. 120, n. 4.
" 7 K. S. Salibi, The m a ron ile c h t ir c h ... ; Le Quien. Oriens chnsttanus. 111, p. 54-65; Puir.
Lat., C C X V I, col. 826 ou Fontes, II, p. 443 (le ttre adressée M a ron ilen si. . . archiepiscopo; avril

1213).

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48 l a p a p a u tê e t l e s m is s io n s d o r i e n t a u m o y e n - a c e

latine, pénétrait dans 1’Eglise maronite, qui n en gardait pas moins I usage
de sa liturgie et sa langue syriaquell8.
Les luttes intestines n'étaient pas terminées - le patriarche Daniel allait
ètre obligé de quitter la région de Gibelet pour celle du Boutron, et à sa
mort (1282) un patriarche uniate, 1’archevèque de Kaftun Jérémie, fut élu et
s’installa prés de Gibelet pendant q u u n compétiteur était élu par les adver-
saires de 1’union et s’établissait près de B c h a r r é l,y. Mais les Latins considé-
raient désormais 1’union maronite comme stable, encore que Ricoldo de
Monte-Croce estimàt nécessaire d o b te n ir de 1’archevêque maronite de
Tekrit, en Mésopotamie, une profession de foi répudiant expressément le
monothélisme120. Toutefois, le maitre des Frères Prècheurs mentionne, en
1256, que ses confrères de la province de Terre Sainte ont examiné les
livres des Maronites pour les corrig er121.
L'union arménienne était, elle aussi, déjà en bonne voie : on a vu que le
patriarche Grégoire Dgha avait reçu du pape Lucius III, en 1184, une mitre
(que le pape avait lui-même portée, dit-on), le pallium et 1’anneau, envoi qui
symbolisait la reconnaissance de sa juridiction. Une partie du clergé armé-
nien se déclarait en faveur d u n e union étroite avec les Latins - tel Nersès
le Grand qui exprimait hautement son admiration pour la vie des moines
francs dans leurs monastères122 mais aussi des raisons d ordre politique

■ T Anaissi. B u lla riu m M aronitarum , Rom e, 1911, p. 2 et suiv. ( Fontes, II, p. 458); Olivier,
Historui Datniatxna, p. 265. - Le titre de 1 «a r c h e v ê q u e des M a r o n ite s » est re m p la c é dans cette
bu lle par celui de patnarcha sive primas.
K. S. Salibi, loc. cit. \ «le n n o r a b le père frè re Jerem ie, p a tria rc h e des Maronins, ses
co m p aign o n s fre re Abraham, a rcevesq u e de V illeja rg o n , et fr è r e Y ah an na, arcevesqu e dc
R e s s h y n », assistent le 18 fé v r ie r 1282, à N ephin, à un acte du c o m te d e T r ip o li (Mas-Latrie,
Hist. de lile de Chvpre. III, p. 667). En 1243, In n ocen t IV c o n fir m e la d é s ig n a tio n de larchevê-
qu e d A io la faite par le p atriarch e (Reg. ín n . IV, n° 58).
120 R icold o , L ib e r peregrinationis, éd. Laurent, Peregrin atores m e d ii aevi quatuor, p. 113
et 126.

121 R eich ert. Litterae encyclicae m agistroru m ge n e ra liu m O.P., dans M o n ord praed histo-
rica, V, 1900, p. 40.

:2 R ec Hist. Croisades. D ocum ents arm éniens. I, p. 117. Cf. T o u rn e b iz e , Hist. politique et
rehgteuse de lA rm e m e. Paris. 1900, t. I. p 240-254. Sur ces contacts, cf. Pascal Tekeyan, Contro-
verses chrtstologiques en A n n én o-C ilicie dans la seconde m oitié du X I I * siècle (1 165-1198) dans
O n en talta christm na a m iecta , t. C X X IV , 1939. Si G r é g o ir e III, c a th o lic o s d e s Arm éniens! avait
p n s con ta ct avec Eu gen e III dès les en viro n s d e 1142, c e s t es s e n tie lle m e n t avec les Bvzanlins
qu e s en ga gen t des co n ve rs a tio n s en tre 1165 et 1193; les A rm é n ien s p ren n en t leurs distances
p a r ra p p o rt aux Syrien s m on op h ysiles, m ais sans a r r iv e r à un a c c o rd a vec les G recs sur les
q u esn on s c o n tro v e rs e e s : le c o n c ile d e 1179 ne p a rvie n t pas. m a lg ré une p rofession de foi
recon n aissan t ex p ressem en t la d u a lité des n alu res du Christ, à o b te n ir une proclam ation de

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1

DE I.APPAKITION DES MENDIANTS JUSOITAUX MONGOLS


49

poussaicnt le «baro n de la Montagne», Léon, à devenir legal des souve-


rains francs ct a se faire le vassal du Saint-Siège, ce qui était pour lui la
me.lleure garant,e d mdépendance. Traversées par les efforts des Bvzantms
pour rattacher le nouveau royaume à leur obédience, ces négociations.
entamees e n l ! 9 5 par Léon avec Clemcnt III, aboutirent en 1199'*»
L'envoyé de lem pereur d ’Occident. larchevêque de Mavence. couronna le
nouveau ro. d Arménie que sacrait le catholicos Grégoire Abirad. Quant au
tra.te qu, eta.t passé entre le pape et le roi, lequel recevait en 1201 la ban-
n.òre de Samt-Pierre et reprenait en fief de 1'Eglise romaine son chateai, de
Babai on ct dc nombreux villages, en marque de vassalité124, il postulait que
les Arméniens reconnaissent à 1’Eglise latine la possession des deux métro­
poles de Tarse et de Mamistra'2*, adoptent le Credo romain et abandonnent
ccitains ritos d inspiration monophysite; des écoles latines devaient ètre
créées pour les enfants arméniens126. Un peu plus tard, le catholicos
demandait au pape à n être soumis qu au siège de Rome, et à recevoir le
pallium, la mitre et le bâton pastoral: Innocent III avait accédé à ses
demandes127. Et, en 1205, le catholicos sengageait à visiter les lim ina tous
les cinq ans et à assister aux conciles qui se tiendraient deça la m er1211.
En fait, le traité ne fut appliqué que partiellement: les écoles latines ne
furent pas fondées, et rien ne fut changé dans la discipline arménienne l2*\
Les donations au Saint-Siège furent-elles exécutées? La latinité des églises

1'unité dc foi dc la part des Grecs. Cependant que Nersès de Lampron continue à négocier
avec ceux-ci, Léon II traite avec les Latins, et parvient ainsi à 1’accord de 1199.
123 Tou rnebize, op. cit., p. 260-270.
124 Sim on de Saint-Quentin. Histoire des Tartares, éd. J. Richard. p. 87-88; Patr. Lat.,
CCXIV. col. 815 ( Fontes, II. p. 204). L e n v o i du pallium et de 1'étendard accom pagne, en 1204,
la soumission du tsar des Bulgares à 1‘Eglise rom aine. - La forteresse de Babaron ou Paperon
(qui appartint par la suite au connétable Sem pad) a été identifiée au château de Cander-kale,
dans la vallée du Daghirm en, par Léon Alishan, Sissouan ou rAm téno-Cilicie, Venise, 1899,
p. 72-76.
125 Les A rm éniens avaient en effet occu pé la plaine de Cilicie, prccédem m ent annexée à
la principauté d ’Antioche, et oü les Francs avaient installé leurs archevèques (qui avaient
dailleu rs été chassés par les Byzantins).
126 Cf. Sim on de Saint-Quentin, loc. cit., et notre note.
127 Patr. Lat., C C X IV , col. 773, 1003, 1007, 1012-1013 (Fontes, II, p. 199, 220, 221, 223, 394) -
Le pape en voie égaiem en t le pallium à la rc h ev êq u e de Sis.
' 2* Patr. Lat., C C X IV , col. 687.
129 Selon Kirakos ( Rec. Hist. Croisades, Doc. Arm., I, p. 422-423), les Latins avaient
dem ande aux A rm éniens de c é lé b re r la fête de N oèl et les autres fètes des saints, de réciter á
I eglise les heures canoniques, de n u se r que du poisson et de Ih u ile les veilles de N oèl et de
Pâques.

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50 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

de Tarse et de Mamistra ne parait pas avoir été, sauf exception, remise en


c a u se 130. On considérait couramment les Arméniens comme « u n i s » 13*, bien
que certains eussent fait des réserves sur la sincérité de cette union 'w,
Néanmoins, les accords passés entre les négociateurs, et sanctionnés par les
lettres du pape et du catholicos, laissaient bien des points dans I o m b re : la
reconnaissance de la primauté pontificale et la constatation de I unité de la
foi pouvaient dissimuler des points de divergence. Et c’est là que les Latins
cherchèrent à apporter plus de clarté.
La part prise par le roi d ’Arménie dans la querelle dAntioche133
1'amena à se trouver tantôt en accord avec le pape, tantôt en désaccord
avec lui. II se trouva même excommunié en 1211l34, et prit alors des mesu-
res de rétorsionl3S. Mais il retrouva bientôt la faveur d Innocent III et

130 Le D ire c to riu m ad passagium faciendum ( D o c . Arm., II, p. 487-488) sc plaint qu‘il nc sub­
siste plus q u e c e lle d e Tarse. En fait, on constate la p résen ce au c o n c ilc de Sis (1307) d'un
é v ê q u e (a rm é n ie n ) d e Tarse à c ô té d u n a rc h ev êq u e latin (D o c. A rn t, I, p. L X X ). Un évêque
a rm é n ien de M am istra est en v o y é au pape en 1306 (R egestum C lem entis V, I, 748); lc chapitre
latin éLit son a rc h ev êq u e en 1320 (Arch. O rie n t latin, I, p. 266-267): c est en su itc que Jean XXII
tra n s fere à 1'Ai'as le siège de M am istra, v ille d é so rm a is d e se rte (id., p. 266-267; cf. Loenertz,
Evéques d o m in ica in s des deux Arm ènies, dans Arch. F. P., 1940, p. 269). On sc trou ve dans la
situ ation n o rm a le d un d io cès e oü T a rch evêqu e latin est associé à un é v ê q u e d autre rite,
p o u r la p o p u la tio n non-latine. La n o tic e d'E u bel, H ierarchia, I, p. 338-339 ( M a m istren.) ne tient
pas c o m p te d e c e tte situation.
131 W ilb ra n d d'0 1 d en b u rg con state en 1211 : in fide non erra n t (P ere g rin a tore s medii aevi
qu atuor, p. 174).
1,1 O liv ie r n o te qu'ils se disen t soum is à 1'Eglise rom ain e, sans en ê tr e peut-ètre tout-à fait
p e rsu a d e (H is t D am iatina, p. 265-266). Jacques d e V itry re lè v e 1’usagc d e co n sa crer du non
m ê lé d eau, rite qui peu t-être reg a rd é c o m m e m o n o p h y s ite (Lettres, p. 85). Un v if mouvement
d ’h o s tilité à 1’union s éta it m an ifesté au m o m en t d es n égo cia tion s, su rtou t dans les couvents
d e G ra n d e-A rm én ie, p a ssion n ém en t an ti-ch a lcéd on ien s, et K ira k o s p rê te au roi Léon 1’affir-
m a tio n qu il en ten d a it ne se so u m ettre qu en a p p a ren ce, tandis q u e 1'évêque d e Tarse Nersès,
ju sq u e là partisan d u n a cco rd a vec les G recs, faisait l e l o g e des F ran cs à 1’intention des
a d v e rs a ire s d e 1’u nion (T o u r n e b i 2 e, p. 268, 273).
133 CL Cahen, La Syrie du N o r d à ié p o q u e des croisades et la p rin cip a u té franque dAntioche,
p. 596-624.
134 Patr. L a t, C C X V I, col. 430 et 784-786 (Fontes, II, p. 404, 439, 441). L es m otifs de cette
e x c o m m u n ic a tio n ne d e v a ie n t rien à 1’in o b s e rv a tio n d es a c c o rd s d e 1199: il sagissait du
c o n flit du r o i et des T e m p lie rs .
■3* In n o c e n t I I I se p lain t en 1213 q u e L é o n ait in tro d u it d es G rec s dans le g lis e de Tarse
(P a tr. Lat., C C X V I, c o l 784-785; Fontes, II, p. 439); W ilb ra n d e x p liq u e (p. 175-177) que lors de
son pasbage, en 1211, le ro i d ’A rm é n ie avait ex p u lsé les p réla ts latins, dicens se injuste “
R o m a n a ecclesia g ra v a ri et e x c o m m u n ica ri, c e c i à M a m istra c o m m e à Tarse. En 1224-1226,
H o n o riu s I I I d e m a n d e la res titu tio n aux L a tin s d e ces ég lis es et d e leu rs b ie n s : Fontes, IU-
p. 176, 199 (P ressu ti, II, 5222 ct 6027).

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DE L APPARITION DES MENDIANTS JUSQU AUX MONGOLS 51

d’Honorius III, encore que le catholicos et les évêques d'Arménie, invités au


IVe concile du Latran, se fussent abstenus d'y participer.
La concession faite par Innocent III au catholicos, de ne relever que de
Rome, n’était pas faite pour agréer au patriarche latin d'Antioche, lequel
pouvait se fonder sur la tradition canonique pour revendiquer 1’obédience
des catholicos, primats d eglises nationales (des Arméniens, des Aghouans,
des Géorgiens, des C h a ld é e n s)136 instituées dans le ressort de son patriar-
cat. Grégoire I X se laissa convaincre et, en 1238, ordonna que l'on ramenât
le catholicos arménien à 1’obéissan ce137; en 1239, mieux informé, il recon-
naissait 1'exemption dont jouissait celui-ci à l'égard du patriarche138.
Les années passant, cependant, on prenait davantage conscience des
divergences séparant 1'Eglise arménienne de 1’Eglise latine. Le catalogue
des « e r r e u r s » imputées aux Arméniens par Simon de Saint-Quentin, qui
semble avoir été établi par les Dominicains sur des informations d ’origine
géorgiennel39, com porte des usages, tels que les jeünes propres à 1’Eglise
arménienne, la com m union des enfants en bas-âge, 1’emploi de cálices de
bois ou de verre, qui sont purement rituels; la non-célébration de Noél, le
refus de croire au purgatoire, d ’user d'eau pour la consécration, et surtout
de reconnaitre la dualité des natures dans la personne du Christ, tirent
davantage à conséquence. Toutefois, ces usages et ces croyances étaient-ils
généralement acceptés? La hiérarchie arménienne, dans le royaume de Cili-
cie, pouvait en discuter.

136 II n e s t pas q u e stio n d es ra p p o rts en tre 1'Arm enie et A n tio ch e dans G. A m adou n i,
L a u tocép h a lie du k a th olica t a rm én ien (I p a triarcati o rien ta li nel p rim o m illen n io, O rien ta lia
christiana analecta, 181, 1968, p. 137 et s u iv ). D eux autres ca th olico s avaient été institués p o u r
les M e lk ites ja d is tra n sp la n tés pa r les Sassanides en M é so p o ta m ie et en Asie cen tra le, à Iré-
nopolis (B a g d a d ) et à R o m a g y ris ; ils a va ien t disparu, sau f peut-ètre le secon d. Cf. J. Dauvil-
lier, Byzantins d Asie cen trale et d E x trê m e -O rie n t au M oyen-Age. dans R evue des études byzanti-
nes, X I. 1953, p. 62-70.
1,7 Registres de G ré g o ire IX , n° 4466 : 1’A rm é n ie e n tiè re est du ressort du p a tria rch e d ’An-
tioch e; le ca th o lico s, en refu san t o b é d ie n c e à celui-ci, c o n tre v ie n t aux canon s du c o n c ile
général. Le p a tria rch e en te n d a it d a illeu rs en m ê m e tem p s ra m e n er sous son a u to rité les
abbés et les c le rc s grecs, a rm é n ien s et g é o rg ie n s du d io cès e d A n tioch e, et assu jettir aux
dim es les non -latins in stallés p a r les seign eu rs latins sur leurs te rre ( I b id , n°*4467, 4470, 4474
- ces textes dans Fontes, III, p. 319-321) : il s a g it d o n c d u n e re v e n d ic a tio n d e ca ra c tè re g é n é ­
ral.
IM L e pape c o n fir m e les co u tu m e s o b s e rv é e s en A rm é n ie d e p u is le tem p s de saint G r é ­
g o ire et du p a p e S y lv e s tre Ier, et e n v o ie un palliu m et d a u tres insign es au ca th olico s, au qu el
il reconnait le d r o it d a u to ris e r à p r ê c h e r en A rm én ie, tout en co n cé d a n t une in d u lg en ce aux
A rm én ien s m o rts en luttant c o n tr e les in fid è le s ( Registres de Grég. IX , 4732-4735, 4739; Fontes,
III, p. 332-335; cf. T o u rn e b iz e , H istoire, p. 286-287).
,M S im on d e Saint-Q uentin, p. 60-62.

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52 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

Au fil des années, cependant, Rom e parvenait à obtenir un assoup|jSSl.


ment des positions affirmées par les Arm éniens : en 1243, Innocent IV obtc
nait, du catholicos Constantin, la reconnaissance d e 1'usage d e 1'Extrème
Onction; en 1251, le synode dc Sis acceptait le F ilio q u e . Mais la pression des
Arméniens orientaux, qui menaçaient Constantin d ’élire un contre-catholj.
cos, le retenait sur la voie de concessions nouvelles ,4°. Les c o n fé r e n c e s qui
réunirent en 1262 le légat Thom as Agni de Lentino et le d o e t e u r Mekhitar
de Daschir, furent marquées par une extreme m é fia n c e 141; et Urbain IV
jugea nécessaire, en 1263, d'envoyer le Dominicain W illia m F re n e y , archevè-
que d ’Edesse, en Arménie, sans doute p o u r rétablir un m e i l l e u r climat.
Cependant le royaum e de Cilicie setait déjà ouvert aux nouveaux
o r d r e s : le roi et les barons avaient appelé les Dominicains dès 1237, et.
peut-être à la suite de la mission de l archevêque d Edesse, le chapitre gene­
ral de 1266 eut à décider de créer « u n e maison en Terre Sainte, á la
dem ande du roi d'Arménie, en A r m é n i e » 142. Le roi H éthoum Icr avait visite
les Franciscains dans leur couvent de T r ip o li143; H éth o um II fit demander
au ministre général que six Frères mineurs fussent envoyés auprès de lui à
titre perm an en t144 - et il revêtit lui-même 1'habit franciscain lorsqu il abdi-
qua, en 1292 -. Le roi Oshin, à son tour, demandait en 1311 que six Francis­
cains fussent attachés à sa p e rso n n e 145.
C e s t Jean de Montecorvino qui avait présenté la demande d u roi
H é th o u m , et ceci au re to u r d une m ission particulièrem ent fruc-
tueuse (1288): les controversistes arméniens du X I V L- siècle font en effet
allusion au «concile qui se tint au temps du roi H é t h o u m », aux d is c u s s io n s
avec l e légat pontificai, à 1 acceptation par ce concile de la fo r m u la t io n
romaine de la procession du Saint-Esprit ^46. Et Nicolas IV recevait la pro-

140 T o u rn e b ize, p. 288-298; un p ré c é d e n t sy n o d e n ’avait pas a c c e p té le Filioque (R a yn al­


dus, Annales eccL, ad ann. 1238).
141 w
DovM
curritriu ut rr iéniens,
m e n ls arm c r i IC 1, p. 07 1.
691.
• « A ltaner, D om inikan erm ission en, p. 65-66 : R e ich e rt, Acra capit. gene r. O. P.. dans MOP»•
t. III, P 135; J. R ichard, D eux évèques d om inica in s, agenis de I V n io n a rm én ien n e au M oytnM h
dans AFP, X IX , 1949, p. 256-258 et n. 9.
• « Od. Van d e r Vat. D ie Anfange der Fra n zisk a n erm ission en u n d ih re Weiterentwwklung »
nahen O rien t. . . , W erl, 1934, p. 80.

eU' P ° UI; * d é c id e r le c h a p ilr e g é n é r a l á so u m ettre d ê * ™ * » 1'


yau m e d A rm em e a la v ic a m e d e T e r r e S a in le (1 2 9 2 ): G o lu b o v ic h . I. p. 341 e l 355.
145 Regestum Clem entis pape V, n° 7200-7202.

selon certL T n s'u ;11’ ^ § e l -58' P' 162 U S d iscu ssion s ^ r e n t c e rta in e m e n t très ard“ *
í r b ^ r u l; ur é acquis à runi° " ' °pp— « « « , ^ ,curs c
ns . le va rta b ed Vartan, de la M o n ta g n e -N o ire , a va it é c r it un liv r e c o n tr e le pape - <ul f

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DE L APPARITION DES MENDIANTS JUSQU AUX MONGOLS 53

fession dc foi du roi dArménie, qu il felicita per 1'intermédiaire du mème


Montecorvino en 1289147.
La politique de Léon Ier avait porté ses fruits : le royaume arménien de
Cilicie - au voisinage duquel le catholicos avait fixé sa résidence (à Hrom-
gla, qui ne tomba aux mains dc Musulmans q u e n 1292) - setait suffisam-
ment intégré au monde latin pour que les Arméniens fussent considérés
comme en communion avec 1’Eglise latine, en dépit de leur originalité reli-
gieuse qu ’ils avaient sauvegardéel48. Rome, d'autre part. et ses représen-
tants en Orient, bien que conscients de ce que certains rites portaient
l'empreinte des doctrines monophysites dont les Arméniens avaient aussi
subi 1'influence, n ’avaient cherché ni à imposer une uniformité dans les
usages149, ni à plier 1'Eglise d ’Arménie sous 1'autorité de la hiérarchie latine.
La collaboration franco-arménienne, ébauchée dès le début des croisades
sur le plan politique, allait jouer un grand rôle dans 1’histoire missionnaire.
C est encore les rapports entre la royauté géorgienne et les Croisés qui
favorisèrent le début des missions en Géorgie. La Géorgie, à la fin du X I I e
siècle et dans les vingt premières années du X IIIC, était en pleine expan-
sion; elle étendait ses conquêtes en Grande-Arménie et faisait passer sous
son protectorat les côtes du Pont, dans la région de Trébizonde, à la faveur
de l'effacement de 1’empire byzantin. L'utilité que présentait 1'établissement
de relations avec les Latins, eux aussi aux prises avec les mêmes souverains
musulmans, était évidente pour les deux parties150. Innocent III demandait
en 1211 au roi de Géorgie de porter secours au royaume latin de Jérusalem;
le légat Pélage lui demandait, en 1221, de faire la guerre aux Sarrasins pour

d a illeu rs brú lé (p. 227-228). Le futur patriarche Constantin II, p ou r son adhèsion à la fo i
rom aine, aurait été exilé, selon Sam uel d'Ani, précisém ent en cette année 1288 ( D o cu m .
Armén., I, p. 462).
147 Fontes, V, 2, n° 84, 85 e l 88 ( B u lla riu m franciscanum, VI, n° 86-87).
141 A la v e ille du co n cile de Lyon, G rég o ire X sa d resse au roi et au cath olicos, p o u r les
inviter au c o n cile et aussi p o u r leu r d em a n d er 1'envoi du texte des actes du c o n c ile de N icée
et des autres co n ciles reçus par 1'Eglise d A rm é n ie , que le patriarche de Jérusalem et 1'é vê q u e
de T o rto s e d eva ien t fa ire tradu ire en latin (Reg. Grég. X, n° 304-305; 27 a vril 1273).
,4’ Entre 1290 et 1293, le ca th olico s Etienne IV d é cid e d u n ifier la date de Pàques avec
1’Eglise latine (T o u rn eb ize, p. 301). Sur l'attitu de des auteurs latins à 1’égard des Arm éniens,
cf. A. D. Von den B rincken, op. c it , p. 186-209. .
,so Dès le débu t du X II* siècle, des contacts s’étaient établis par 1'interm édiaire des G é o r ­
giens fi\és à Jérusalem (J. Richard, Quelques textes sur les prem iers temps de 1'Eglise latine tle
Jérusalem. dans R ecu eil de travaux offerts à M. Clovis Brunel, Paris, 1955, t. II. p. 420-430); ct
Gautier le C h a n celier note la présen ce de ch eva liers francs dans 1’a rm ée du roi D avid II, en
1121 (Cahen, Syrie du Nord, p. 293, n. 23).

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54 LA PAPAUTÊ ET LES MISSIONS D ORIENT AU M O Y E N A G E

sc c o n d c r les opérations de 1’a rm ée des Croisés en Egypte; et la reine Russu


dan écrivait en 1224 au «t rè s saint Père le Pape, père et seigneur de tous les
chrétiens, assis sur le trône du bienheureux P ie r re » une lettre, confiée a
1’é v ê q u c d ’Ani David, 1’informant de ce que seule I arrivée inattendue et dé-
sastreuse d ’une arm ée m ongole Tavait em pêchée de mettre son arm ée en
route, tout en 1’avisant que le connétable Iw a n é avait pris la croix et
s a p p r ê t a it à partir dès que Tem pereur Frédéric II se mettrait lui-méme en
route. H o n o riu s III répondait en accordant des indulgences aux croisés
g éorgien s et en annonçant le prochain départ de l e m p e r e u r ' II semble
qu e des inform ations sur les dévastations com m ises par les Khwarezmiens
de Jalal al-Din et sur les conquêtes réalisées au détriment des Georgiens
p a r le sultan seljuqide aient filtré en Occident ou en Orient latin . le pape
envisageait en 1228 d ’organiser en Hongrie une expédition, dotée des privi-
lèges de la croisade, po ur soulager non seulement les C o m an s attaques par
leurs voisins, mais les chrétiens leurs voisins en butte aux attaques du sul­
tan de K onya et d a u t r e s 152.
Cest toutefois en vain que les G éorgiens appelèrent à 1’aide au moment
ou les M ongols com mencèrent la conquête de leur pays (1236): la lettre de
Russudan ne parvint pas au pape et, quand il en fut informé, il sexcusa de
nc pas avoir envoyé « l ’arm ée de 1'Eglise», d ailleurs retenue en Syrie, en
Espagne, et par la lutte contre les C a th a re s153. Les essais de coordination
des opérations militaires entre Latins et G éorgiens se révélèrent déce-
v a n ts',4.
Mais les négociations en vue de l'union des Eglises latine et géorgienne,
avaient pris place dans ces échanges d a m b a ssa d e s. Les Géorgiens. cepen-

1,1 Patr. Lat., C C X V I, c o l.4 3 4 ; A u b ry d e T ro is -F o n ta in e s, p. 911; O liv ie r. Hist. Damiatina,


p. 232 (d e n o m b re u x au tres tex tes fo n t a llu sion à l e s p o i r q u e les c r o is é s m ettaien t dans
lin t e r v e n t io n g é o r g ie n n e ; 1’a tta q u e d ir ig é e c o n tr e la G é o r g ie p a r les M o n g o ls surpril les
G é o rg ie n s cu x-m êm es, qu i c r o y a ie n t le « r o i D a v id » c h r é t ie n : les L a tin s su p p oséren t quils
a va ien t é té a ttaq u és p a rce q u ’ils n é ta ie n t pas vere credentes); M . T a m a ra ti, L é g lis e g é o rg ie n n e
des origines jusquà nos jours, R o m e, 1910, p. 416-417.
' ' J Supra, p. 23, e l n. 16.
'" T u m a r a li, p. 427-430 (c e s t à p ein e, d is a it le pa p e, « s i la d is ta n c e a laissé parvenir
ju squ 'à nou s le bru it d e vo s lu tte s » - et les le ttre s q u 'il ve n a it d c r e c e v o ir lui a n n on çaien t que
les G é o rg ie n s a va ien t battu les T a r t a r e s : ces le ttre s p o n tific a le s , é d ité e s aussi dans RipoU. 1
p. 108 e l Fontes, IV, p. 338, sont du 13 ja n v ie r 1240.
1,4 L c ro i G e o rg e s V, r e c e v a n t une d e m a n d e d a llia n c e du ro i d e F ra n c e c o n tre les Sarra
íim ». en 1332-1333, lui é c rit : D o tn in i reges F ra n cia e fre q u e n te r reges orie n ta le s com m overuit
con tra S a rra ce n o s ; postea n on venientes eos d im itte b a n t in trib u la tio n e gu erra e. Sed dicatts s
quod, qu and o tnare tran siverit, statim ine vid eb it ad s u u m b e n e p la citu m c u m X X X m ilibu s arma
loru rtt (G u lu b o v ic h , M, p. 415).

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DE LAPPARITION DES MENDIANTS JUSQUAUX MONGOLS 55

dant attachés au rite grec (mais relevant dAntioche et non de Constantino-


ple), jouissaient auprès des Latins d un préjugè très favorable : Aubrv de
Trois-Fontaines les qualifie de vi ri ca th olici el potentes in armis, et Simon de
Sainl-Quentin ne trouve guere à leur reprocher que la simonie regnant au
sein de leur clergé,ss. On voit Honorius I I I , en 1224, conceder des indulgen-
ces aux croisés géorgiens. comme s’il sagissait de Latins, et exhorter la
reine à être fidèle à la foi catholique. Mais, en 1240, Grégoire IX. en se
réjouissant de la très ancienne adhésion des Géorgiens à la foi, mentionne
que la reine et son fils, le roi David IV , ont demande la sanction de 1’union
des Eglises et exprimé leur reconnaissance de la primauté du siège de
Pierre, et leur envoie un exposé de la foi de 1’Eglise romaine.
Le travail missionnaire avait en effet commencé. Dès avant 1233, un
Franciscain, Jacques de Russan, avait été reçu à la cour de Géorgie. et la
reine avait exprimé sa vénération pour les religieux de 1'ordre auquel il
appartenait: le pape avait renvoyé Jacques et un certain nombre de ses
confrères en Géorgie, avec l intention, semble-t-il, de les voir établir une
base de départ en ce pays, pour prècher aux Infidèles15*. En 1240, c’est dans
la perspective d ’assurer 1’Union géorgienne qu il envoie huit Dominicains
en Géorgie : ceux-ci fondèrent un couvent à Tiflis, oú la mission d ’Ascelin,
en 1246, allait prendre un interprète et un informateur, en la personne de
Guichard de C ré m o n e 157. Dautres Latins, et notammcnt des missionnaires
partant chez les Mongols, furent eux aussi fort bien reçus par les Géor­
giens : Rubrouck y rencontra cinq Dominicains, en février 1255, ainsi q u u n
de leurs confrères qui avait séjourné avec le prieur du Saint-Sépulcre, venu
gérer les possessions de cet établissement en Géorgie. Et c est à lui que Sha-
hinsháh, seigneur d ’Ani, et son fils Zaharé, affirmèrent quils «étaient les fils
de 1’Eglise romaine et que, si le seigneur pape leur envoyait de laide, ils
réduiraient toutes les nations voisines à 1’obéissance envers 1’E g lis e »158. Et,
en 1289, Nicolas IV faisait état des «traits éminement louables du zèle» du

• » Aubry, loc. cit., Sim on. p. 57-59 : A. D. V on den Bnncken. op. c it, p. 103-125.
'*• Sbaralea, 1, p. 101 (Tam arati, p. 426; I I avril 1233): dilecto filio Jacobo de Russan, de
ordine fratrum m in o ru m . . . accepim us referente quod tu . .. personas ipsius ordmis. qutn potius
operantem in eis spiritu m v e n e ra ris ...
157 G uichard figu re parm i les frères dont le n v o i est annoncé dans la lettre du 13 ja n vier
1240; il accom pagne, au cou rs de 1247, la mission, dont faisait partie Sim on de Saint-Quentm.
qui le cite à plusieurs reprises, pendant cinq m ois (Sim on, p. 113). On perd apres 1256 la trace
du couvent de Tiflis, que B. A ltan er (op. cit., p. 67 et suiv.) suppose a vo ir ete une sim ple
domus. Cf. R. Loen ertz, S ociété des Frères Pèrègrinants, p. 137.
Sinica Franciscana, p. 324-325. Sim on de Saint-Quentin m entionne auss. la présence en
Géorgie d e larch idiacre du Saint-Sépulcre ( p . 58).

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56 LA PAPAUTÉ ET LES M IS SIONS D O R I E N T AU M O Y E N-AG E

cath olicos de G é o rg ie A b rah am , dont Jean de M o n te c orv in o avait été


témoin, en invitant le catholicos et le roi à rester fidèles à 1union des Eg|j.
ses, tandis q u ’en 1291 le roi de G é o rg ie était c on sidéré par lui com m e un
des « rois c a th o liq u e s » au xq u els était lancé un a p p el en faveur de la Terre
S a in t e 159.
L a situation des autres Eglises orientales était différente. Maronites,
Arméniens, Géorgiens, avaient leurs chefs religieux et leurs cadres natio-
naux en -deh ors des pays soum is à des souverains m u su lm a n s, les premiers
avaient, p o u r la plupart, lié partie avec les Francs de Terre Sainte; les
autres, constituant des roya u m e s nationaux, s associaient à la politique de
la Papauté, ce qui facilitait les rapports sur le plan r e lig ie u x l(,ü. Pour les
autres com m un autés, leurs chefs résidaient n orm ale m en t en pays musul­
man, oú se trouvaient égalem ent la plus gra n d e partie de leurs fidèles. Les
Latins, h a n d icap és (sau f pendant la courte p é rio d e de la réoccupation de
Jérusalem, entre 1229 et 1244) p ar la perte des Lieux-Saints oú s'étaient réa-
lisés les contacts du X I I C siècle, eurent donc à innover.
Le p r e m ie r texte que nous possédons est la lettre écrite au pape en
1237 p a r le p rie u r d u couvent de Jérusalem, frère P h i li p p e 161. Cette lettre
décrit 1’activité des D om inicains de Terre-Sainte, dans le domaine de
1'union des Eglises. Sans négliger les M usulm ans, a u xq uels trois frères se
consacraient, et les Maronites, qui persistaient dans le u r fidélité à 1'unité
c h r é t ie n n e 162, Philippe se préoccupait de ré p o n d re au vceu des barons et du
roi d ’Arm énie, qui dem an daien t q u o n le u r envoyât des Frères pour quils
a p p re n n e n t la lan gue; trois d'entre eux, dont G u illa u m e de Montferrat,
étaient allés j u s q u e n M éso p ota m ie , oú ils avaient s é jo u m é un certain
tem ps a u p rè s d u catholicos c h a l d é e n 163. Et tous se préoc c u p a ie n t dappren-
dre les langues orientales, et surtout 1’arabe.

ISM T a m a ra ti, p. 431-434, et A lta n er, p. 70.


160 E n c o r e fa u t-il n o t e r q u e les M a r o n ite s d e la m o n ta g n e o n t pu ê tr e m oin s favorablcs
aux F rancs, et à 1'Union, q u e leu rs c o n g é n è r e s d e la c ô t e ; et q u 'e n G rande-Arménie, oú 31
leu rs le « c a t h o lic o s d e la m a is o n d e s A r d z r o u n i» , ré s id a n t à A g h ta m a r d e p u is 1 113, ne r e c o n
n aissait pas 1‘a u to r ité d e c e lu i d e H r o m g la , on é ta it b e a u c o u p m o in s s e n s ib le aux argume
te n d a n t au r a p p r o c h e m e n t a v e c les L a tin s q u e n C ilic ie .
161 J. Q u é tif et J. É ch a rd , S c rip to re s o r d in is p ra e d ic a to ru m , I, Paris, 1719, p. 104; Rayna ^
Ann. eccl., ad ann. 1237, § 87; Fontes, III, p. 306. C e tte le t t r e c ir c u la la r g e m e n t ch ez les ^ ornl^
ca in s (c f. P. P e llio t, Les M o n g o ls et la papauté, d a n s Rev. or. c h r é i, X X I V , 1924, p. 229-230, no
et a é lé r e p r o d u ite p a r A u b ry d e T r o is -F o n ta in e s , p. 941-942, et M a th ie u Paris, C
M a jora , éd . L u ard , III, p. 396-399.
141 Les G re c s seuls, note-t-il, re s te n t o b s t in é m e n t r e b e lle s au x te n ta tiv e s d'union.
'•* G u illa u m e d e M o n tfe r r a t, q u i a v a it é t é l'u n d e s c o m p a g n o n s d e saint D om in iq1* ^
sans d o u te a s s o c ie p a r lui à ses p r e m ie r s p r o je ts m is s io n n a ir e s (c f. B. A lta n er, p- 4*^)> reC

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DE LAPPARIT10N DES MENDIANTS JUSQU'AUX MONGOLS 55
dant attachés au rite grec (mais relevant dAntioche et non dc Constantino-
ple), jouissaient auprès des Latins d’un préjugé très favorablc : Aubry de
Trois-Fontaines les qualifie de v iri ca th olici et potentes in armis, et Simon de
Saint-Quentin ne trouve guère à leur reprocher que la simonie régnant au
sein de leur cle rgé l55. On voit Honorius III, en 1224, conceder des indulgen-
ces aux croisés géorgiens, comme s’il s'agissait de Latins, et exhorter la
reine à être fidèle à la foi catholique. Mais, en 1240, Grégoire IX, en se
réjouissant de la très ancienne adhésion des Géorgiens à la foi, mentionne
que la reine et son fils, le roi David IV, ont demandé la sanction dc 1'union
des Eglises et exprimé leur reconnaissance de la primauté du siège de
Pierre, et leur envoie un exposé de la foi de 1’Eglise romaine.
Le travail missionnaire avait en effet commencé. Dès avant 1233, un
Franciscain, Jacques de Russan, avait été reçu à la cour de Géorgie, et la
reine avait exprimé sa vénération pour les religieux de 1'ordre auquel il
appartenait: le pape avait renvoyé Jacques et un certain nombre de ses
confrères en Géorgie, avec 1’intention, semble-t-il, de les voir établir une
base de départ en ce pays, pour prêcher aux Infidèles156. En 1240, cest dans
la perspective d ’assurer 1’Union géorgienne qu il envoie huit Dominicains
en Géorgie : ceux-ci fondèrent un couvent à Tiflis, ou la mission dAscelin,
en 1246, allait prendre un interprète et un informateur, en la personne de
Guichard de C ré m o n e 157. D'autres Latins, et notamment des missionnaires
partant chez les Mongols, furent eux aussi fort bien reçus par les G éor­
giens : Rubrouck y rencontra cinq Dominicains, en février 1255, ainsi qu'un
de leurs confrères qui avait séjourné avec le prieur du Saint-Sépulcre, venu
gérer les possessions de cet établissement en Géorgie. Et c’est à lui que Sha-
hinshâh, seigneur d ’Ani, et son fils Zaharé, affirmèrent quils «étaient les fils
de 1’Eglise romaine et que, si le seigneur pape leur envoyait de 1’aide, ils
réduiraient toutes les nations voisines à 1’obéissance envers 1’E g lis e »158. Et,
en 1289, Nicolas IV faisait état des «traits éminement louables du zèle» du

155 Aubry, loc. c it .; Sim on, p. 57-59 : A. D. V on den Brincken, op. cit., p. 103-125.
156 Sbaralea, I, p. 101 (Tam arati, p. 426; 11 avril 1233): dilecto filio Jacobo de Russan, de
ordine fratrum m in o ru m . . . accepim us referente quod tu. . . personas ipsius ordinis, qu in potius
operantem in eis spiritum v e n e ra ris .. .
,S7 G u ichard figu re parm i les frères don t 1'envoi est annoncé dans la lettre du 13 ja n vier
1240; il a ccom p agn e, au cours de 1247, la mission, dont faisait partie Sim on de Saint-Quentin,
qui le cite à plusieurs reprises, pendant cin q m ois (Sim on. p. 113). On perd après 1256 la trace
du co u ven t d e Tiflis. que B. A ltaner (op. cit., p. 67 et suiv.) suppose a v o ir été une sim ple
domus. Cf. R. Loen ertz, Société des Frères Pérégrinants, p. 137.
151 S in ica Franciscana, p. 324-325. Sim on de Saint-Quentin m entionn e aussi la présen ce en
G é o rg ie de 1'archidiacre du Saint-Sépulcre (p. 58).

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JO LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

catholicos de Géorgie Abraham, dont Jean de Montecorvino avait ' •


témoin, en invitant le catholicos et le roi à rester fidèles à 1’union des
ses, tandis q u e n 1291 le roi de Géorgie était considéré par lui co m m e *
des « r o is catholiques» auxquels était lancé un appel en faveur de la Te
S ain te 159. *
La situation des autres Eglises orientales était différente. Maronites
Arméniens, Géorgiens, avaient leurs chefs religieux et leurs cadres natio
naux en-dehors des pays soumis à des souverains musulmans; les premiers
avaient, pour la plupart, lié partie avec les Francs de Terre Sainte; |es
autres, constituant des royaumes nationaux, s associaient à la politique de
la Papauté, ce qui facilitait les rapports sur le plan relig ie u x 160. Pour les
autres communautés, leurs chefs résidaient norm alem ent en pays musul-
man, oú se trouvaient également la plus grande partie de leurs fidèles. Les
Latins, handicapés (sauf pendant la courte période de la réoccupation de
Jérusalem, entre 1229 et 1244) par la perte des Lieux-Saints oú s'étaient réa-
lisés les contacts du X I Ie siècle, eurent donc à innover.
Le prem ier texte que nous possédons est la lettre écrite au pape en
1237 par le prieur du couvent de Jérusalem, frère P h ilip p e 161. Cette lettre
décrit 1’activité des Dominicains de Terre-Sainte, dans le domaine de
1union des Eglises. Sans négliger les Musulmans, auxquels trois frères se
consacraient, et les Maronites, qui persistaient dans leur fidélité à 1'unité
c h rétien n e10-, Philippe se préoccupait de répondre au vceu des barons et du
roi d Arménie, qui demandaient qu on leur envoyât des Frères pour qu ils
apprennent la langue; trois d e n t re eux, dont G u illaum e de Montferrat,
étaient allés jusqu en Mésopotam ie, oú ils avaient s é jo u m é un certain
temps auprès du catholicos c h a ld é e n 163. Et tous se préoccupaient d’appren-
dre les langues orientales, et surtout 1’arabe.

159 T a m a ra ti, p. 431-434, et A lta n er, p. 70.


160 E n c o re faut-il n o te r q u e les M a r o n ite s d e la m o n ta g n e on t pu è tr e m oin s fa vo ra b les
aux Francs, et à lU n io n , q u e leu rs c o n g é n è r e s d e la c ô te ; e t q u e n G ra n d e-A rm én ie, oü dail-
s le « c a t h o lic o s d e la m a ison des A r d z r o u n i», ré s id a n t à A g h ta m a r d e p u is 1113, ne recon­
naissait pas 1'autorité d e c e lu i d e H r o m g la , on é ta it b e a u c o u p m o in s s e n sib le aux arguments
ten d an t au r a p p r o c h e m e n t a v e c les L a tin s q u e n C ilic ie .
141 J. Q u é tif et J. É ch ard , S c rip to re s o rd in is p ra e d ica to ru m , I, Paris, 1719, p. 104; R aynaldus.
Ann. e ccl., ad ann. 1237. § 87; Fontes. III, p. 306. C e tte le t t r e c ir c u la l a r g e m e n t c h e z les Domini-

cain s (c f. P. P e llio t, Les M o n g o ls et la papauté, dan s Rev. or. ch rét., X X I V , 1924, p. 229-230, note)
et a e te r e p r o d u ite p a r A u b ry d e T ro is -F o n ta in e s , p. 941-942, et M a th ie u Paris, Chronica
Ma/ora, ed . Lu ard , III, p. 396-399.

i*j r i P rCCS S*'U^S| n o tc t'd , res te n t o b s tin é m e n t r e b e lle s aux te n ta tiv e s d union.
„ n. j d « M un« r' r" i t . qu i avait é té l un d es c o m p a gn o n s d e saint Dominique «•
ou e associe p ar lui á ses p rem iers p ro jets m ission n aires (cf. B. Altaner. p. 4-9). rece»*"

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DE L APPARITION DES MENDIANTS JUSQU'AUX MONGOLS

lin co qui concerne les Jacobitcs, leur patriarche, Ignace N, vint cn 1237
scjourner dans la Ville-Sainte; il fut accueilli par les Frères Prècheurs avec
bcaucoup d égards (ils allèrent jusqu’à porter eux-mèmes sa litière), et il
eut avec eux des entretiens au terme desquels il jura obeissance au siège de
Rome, en leur remettant des lettres écrites en syriaque et en arabe, à
I intenlion du pape. Philippe note que son ressort s‘étendait à la Chaldee, à
la Perse, a la Médie et à 1’Arménie; mais il néglige de rapporter le conflit
qui I opposa à ce propos au patriarche, lorsque celui-ci voulut s appuyer sur
les Dominicains pour entreprendre sur la juridiction du patriarche copte
d Alexandrie, conflit qui se termina au profit dTgnace, lequel prétendit que
le prieur navait pas su sexprim er correctement en a ra b e ,t’4.
Les Dominicains s’étaient aussi adressés aux Coptes. L ’ « archcvèque
jacobite d ’Egypte» résidant à Jérusalem, avait lui aussi fait acte d obcdience
a Rome; mais des Frères avaient été envoyés au patriarche copte. en Egypte
mème, et en étaient revenus avec une réponse favorable, ce qui, aux yeux
de Philippe, concernait tous les Jacobites de 1’Inde majeure, de 1’Ethiopie et
de la Lybie (la Nubie) en plus des Coptes d ’Egvpte.
Du côté des Chaldéens, 1’archevêque ayant sous sa juridiction les fidè­
les de sa nation en Syrie et en Phénicie avait aussi reconnu la primauté
romaine. Et surtout, de «celui qui est à la tête de tous les Nestoriens» -
jusqu’en Inde majeure et au royaume du Prêtrc Jean -, des lettres étaient
égalemcnt arrivées, apportant 1’assurance de son obéissance au Siège apos-
tolique et de son désir de «rentrer dans le sein de 1'unité».
Grégoire IX ne pouvait que manifester sa satisfaclion : le 28 juillet
1237, il envoyait des lettres de remerciement au patriarche syrien et aux
deux archevêques16S. Lun ion des Eglises paraissait-elle effective pour

cn fé v r ie r 1235 de G ré g o ire IX une bulle lui conférant les pouvoirs habitueis au m om ent oü,
uvcc ses com p agn on s, il partait pou r des pays nobèissant pas au Siège Apostolique, et une
lettre de recom m a n d a tion auprès des ecclésiastiques, marchands et autres personnes vivant
«in terris S arracen oru m et aliis in fid e liu m » (Reg. Grég. IX, n° 2429-2430); Fontes. III. p. 286.
im B ar H ebraeus, C h ron icon e c c i, trad. A bbeloos et Lamy, p. 654-662 (cf. P. Pelliot, loc.
c it) Ign ace vo u la il sacrer m étro p o lite d’Abyssinie un Abyssin du nom de Thomas, en core
que l E th iop ie fut en p rin cip e du ressort d'Alexandrie. Craignant lo p p o s itio n du m étrop olite
de Jérusalem , qui était E gyptien. il rechercha l appui des Dom inicains. Ceux-ci lui conseille-
rent de su rseoir; il passa outre. Philippe la ya n t vivem ent repris, Ignace se tira d affaire en
prétendant qu e son e n v o y é avai. iran sform é les paroles d e , Frères. E, c'es. le prieu r qu, se fu
d ire par ses c o m p a lr io le s : « o » sati, a r M c t n o v ijn ... C est le jo u r des R am eau » (12 avnl
1237) u u le n a c e fit acte d o b é d ie n c e à 1’Eglise rom aine.
Reg. G reg IX , 3789 à 3791 (Raynaldus, Annales e c c i, ad ann. 1237, § 88; Ripoll. Bulla-

rium , I, p. 97; Fontes, III. P- 303).

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la p a p a u tê et LES MISSIONS D'ORIENT AU MOYEN-ACE

autant? On constate des cas d'intercommunion qui peuvent en donner un


indice166. Mais elle restait liée à une adhésion personnelle des dignitaire"
orientaux167, et la dextérité de ceux-ci à se tirer des situations difficiles pCUt
laisser quelques doutes1*8. D a u tre part, le clergé latin ne se sentait pas tenu
de respecter la juridiction des prélats ramenés à 1’union sur toutes leurs
ouailles, si nous en jugeons par des lettres de Grégoire IX invitant le
patriarche latin de Jérusalem et 1’évêque d Acre à em pêcher que l’on ne
moleste les Jacobites et les Nestoriens qui, en nom bre assez important
revenaient à lo béd ien ce de 1'Eglise romaine . . . ,69. Néanmoins, on peui
penser que de tels agissements ne ternissaient pas exagérément 1'image
d une unité retrouvée, aux yeux du pape, même si la plupart des Francs
d Orient et d Occident restaient sensibles aux différences de rite et de lan-
gue, et ne réalisaient pas pleinement ce q u ’était l’union des Eglises. La mis­
sion qu Innocent IV devait confier un peu plus tard à son pénitencier, com­
portam 1examen des griefs des Melkites contre les Latin s170, témoigne de
ces incompréhensions.
Car les Melkites eux-mêmes, dont le prieur Philippe déplorait 1’obstina-
tion, avaient été sensibles aux appels en faveur de l’Union des E g lise s: si le
patriarche Nicolas d ’Alexandrie, correspondant habituei d ’Innocent III et
H onorius III, avait envoyé un représentant au quatrième concile du
Latran, en 1215, il semble que le patriarche grec d'Antioche, David, avait
tait acte d o b é d ie n c e au Saint-Siège dès avant 1246l71.

- L e m ap h rian ja c o b ite Saliba, m ou ran t à T r ip o li en 1258, d iv is e ses legs en tre les églises

p V 2°8) « 'c T CU
a hm e T Cler8É franC P a n ÍC iP ' à “ ° b5è^ es H ^ r a e u , op. £ UI
P. 428). M CL C ah en a r e le v e une .n s c n p tio n d e fo n d a tio n en latin ( d u n e é g lis e latine) ema-
nant d un A b ou 1 F ad l, ,1 l a ttrib u e à un M a ro n ite (U n e in s crip tio n m al co m p ris e concernant le

danS MedieVal Qnd M íddle Studi“


la u m ÍT V í 1 a í .S ^ a r° niteS n é ta ie n t Pas n o m b re u x à A cre, pu isqu e Guil-
la u m e d e T y r les s.tu e dans les seuls d io c è s e s d e G ib e let, du B o u tro n et d e T r ip o li il pourrait
s a g ir d un O n e n ta l d u n e a u tre o rig in e ). Cf. aussi le testa m e n t du m a rc h a n d Saliba civis

7 a? T HmT h
J " 2 M ) : RÒhriCht' Reees,a « * » < osolym U am . „ « 1134
. v r r e \ ,u x pa , ; i a r c h e s s ° m « “ • ^ à Ai e P . C e i u ,.ci.
, ; ” * 3 A n l‘ ° ch e l a c o " flr m a liO " p a tria rc h e latin. m a is d e s m anceuvres dila-

Z d p 683) SUCC“ nV D e" yS' m° im faVOrable à I UnÍOn (C I Cahen' U Syr,t iu


C o m m e le p ro u v e 1’ h a b ilite d lg n a c e II dans 1'affaire d e l A b vssin
• R c t ,s,res Je C ré g o ire IX , n » 4138 et 4139 (9 m ars 1238); Fom es. III, p 312
Registres d In n o c e n t IV , n° 3046-3047.

F o n ü Ín T »M Í < Cm « ' T ' ?k0'830 <aVrÍl ’ 2 I3 : danS r ° mes‘ "■ p 4S6) « • Aubry de Trois-
« I c o m ia ,r " / 0 , 0n de David c l de ^arch evêqu e grec de Chypre. Germam.
est c o n tla té e par Laurent de Portugal (Sbaralea. B u li Franc.. I, p 483 484 e, 547). Nous ne

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DE LAPPARIT10N DES MENDIANTS JUSQU AUX MONGOLS 59

A 1’approche du concile de Lyon, le pape Innoccnt IV entreprit d asso-


cier les prélats orientaux à la réunion de ce concile. Ses prédécesscurs, et
surtout Innocent III, avaient invité certains patriarches à participer aux
conciles oecuméniques; Innocent IV préféra envoyer des ambassadcurs « à
tous les patriarches, archevêques et évèques dans les terres des Bulgares,
Valaques, Khazars, Slaves, Serbes, Alains, Ziques, Goths, Ibères, Géorgiens,
Arméniens, Nubiens, Nestoriens et autres chrétiens d'Orient». Ses envoyés
devaient leur remettre la lettre Cum simus super, qui comportait une affir-
mation de la primauté romaine, avec une démonstration de celle-ci par les
textes scripturaires. Le pape disait sa douleur de la division entre chrétiens
et priait les destinataires de ne pas différer leur retour à 1’Unité, en leur
disant son intention de ne porter en rien atteinte à leur dignité. II se disait
également prêt à réunir, s'ils le jugeaient nécessaire, un concile cecuméni-
que à cette fin, et s’excusait de ne pas leur envoyer de prélats en recom-
mandant ses envoyés comme des hommes de science et de vertu172.
La lettre en question avait été remise aux ambassadeurs que le pape
adressait aux Mongols (aussi priait-il les destinataires de faciliter 1’obten-
tion de sauf-conduits aux dits ambassadeurs, pour aller ad Tartaros et alias
gentes ulteriores). Cest ainsi que, tandis que Jean de Plancarpin la remettait
aux Russes et Ascelin de Crémone, probablement aux Géorgiens et certai-
nement au «vicaire pour 1'Orient» des Chaldéens, Siméon Rabban-ata173,
André de Longjumeau 1'apportait à ce dernier, à 1'archevêque chaldéen de
Nisibe Isoyahb, au «catholicos» ou mieux patriarche des «Chrétiens orien­
taux qui sont appelés Jacobites», Ignace, et au maphrian ou vicaire de ce
dernier pour la Mésopotamie, Jean, qui résidait à Mossoul. Nous avons

m entionn ons qu ep isod iqu em en t ces ralliem ents; mais, s'ils intéressent 1'Eglise grecque, ils
prennent aussi leur place dans les perspectives de 1'activité des religieu x latins dc Terre-
Sainte.
,7J Reg. Inn. IV, n° 1363 (Sbaralea, I, p. 362). Cette lettre, du 25 mars 1245, est d o u b léc par
une bulle Cum hora undecima, du 21 mars, qui accorde les privilèges habitueis aux Frères
M ineurs partant chez les m êm es peuples et aussi dans les terres des Sarrasins, paiens, Grecs,
Comans, Ethiopiens, Ruthènes, Jacobites, Indiens, M ossoulitains (n° 362; Sbaralea, p. 360); il
ne faut p rob ab lem en t pas attacher d ’im portan ce à cette distinction, car des D om inicains
apportèren t la lettre Cum simus super à des N estoriens ct sans doute aux G éorgiens, tels
André de Longjum eau ou Ascelin de C rém one (qui se rendit notam m ent en G éorgie). Plancar­
pin a raconté com m ent il rem it les lettres du Pape relatives à 1'unité de 1'Eglise (Cum simus
super), à Vasilko, duc d e V lad im ir et á ses évèques, en partant chez les Tartares, et com m ent,
á son retou r, dues et évèques lui rem irent réponse, disant qu'ils acceptaicnt la prim auté
rom aine (IX , 3 et 48; Sinica Franciscana, I, p. 103, 127-128).
173 Sim on de Saint-Quentin, p. 21, 30.

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60 LA PAPAUTÉ líT LES MISSIONS D ORIKNT AU MOYEN AGE

conserve les reponses de ccs d e r n ie r s 174: Ignace II proc la m e qu il partagu


la foi de sainl Pierre, réprouvant la doctrine d ’Eutychès, mais sans qu'il
semble avoir rcnoncé à la notion d ’une seule nalure dans le Christ17'.
ISoyahb, po ur sa part, em ploie 1'expression « d e u x natures, une personne»
qui ne parait pas différer de la lorm ulation « nestorienne » traditionnelle176.
Mais la collectc de ces prolessions de foi pouvait d o n n e r rim prcssion d ’unc
unitc des chrétiens d'Orient dans leurs croyanccs fondamentales.
Ignace II avait complété sa lettre cn dem andant à R om e le respect de
la u to n o m ie de son Eglisc, ce qui visait évidemment les entrcprises du
clergé latin de Terre-Sainte ix 1'encontre de cclle-ci; il rejoignait ainsi les
dem andes que Rome allait recevoir de la part du patriarche grec d Antio-
che et de la rc h e vê qu e grec de Chypre, tous deux ralliés à 1'église
r o m a in e 177, Innoccnt IV avait envoyé le Franciscain D om inique dAragon
apporter la mème lettre Cum sim us su p er au roi d A rm é n ie , qui ehargea le
varfubcd Vartan de rédiger « un exposé de la foi professée p ar 1'Eglise armé-
nienne, que nous a dem andé notre pèrc apostolique le pape de Rome par
l'intermédiaire dc son sage légat, frère Dimanche » l7*. En possession de ces
r é p o n s e s 179, il ehargea en juillet 1246 son pénitencier, le Franciscain Lau-
rent de Portugal, d une légation dans un ressort comprenant 1’Arménie, la

174 Raynaldus, Annales. ad ann. 1247, § 36-43. Lc íail q u e ccs le ttre s aien t été rapportées
pa r A n d ré d e L on gju m ea u . a é lé é la b li par P. P clliot, Les M o n g o ls et la Papauté, dans Rev.
O rie fil chrétien, X X IV , 1924, p. 226-238, ou sunt id en tifiés les a u teu rs d e ces m issives. Un poinl
reste dans 1’o m b r e : la raison p o u r la qu elle nous avons deux rép o n se s du p a tria rch e Ignace
(§ 36-38 et 39-40).
I7' Raynaldu s. Annales, 1247, § 36-37.
,7» Ib id , § 43.
177 Ig n a c e d e m a n d e q u e soit recon n u e a son eglisc, la lib e rté d e lir e son patriarche; il
d e m a n d e qu e les Ja cob ites so ien l ex em p ts de tou te ju rid ictio n d e la part des év èq u es latins,
et que les Latins ne leu r dem an d en t aucune red cva n c c (R ayn aldu s, Annales, ad ann. 1247,
§ 3 8 ).
I7* E- Tisserant, La légation en O rie n t du Franciscain D o m in iq u e d'Aragon, dans Rev. Orient
chrétien. X X IV , 1924, p. 336-355; U. A lta n er (D o m in ik a n e rm is s io n n e n , p. 51-53) se dem andait si
ce n é ta it pas à D om in iq u e q u 'il lallait a ttrib u er le reto u r de D avid d A n tio ch e à 1’Union. Lc
Franciscain avait été e n v o y é ad gentes qu i lhesum C h ristum non a gn oscu n t el ad subversionis
filios q u i sacrosancte ecclesie non obediunt, cn 1245; il était e n c o re à Constantinople en
a vril 1247.
,7V L u n e d e lle s n é ta it pas p a r v e n u e : c e llc des Russes, à qu i P lan carpin a p p o rta it la lol-
tre Cum sim us super avant de p a rtir ch ez les M on gols. L e pape con fia , le 3 m ai 1246, aux deux
D om inicains A lexis e l « H .» un n ou vel e x e m p la ire d e c e tte lettre : les e n v o y é s revin ren t avec
une le ttre des évèq u es russes d e Galiciu, a cco m p a g n és de G ré g o ire , h ig o u m èn e du Mont
Saint-D aniel (B . Altaner, D o m M k a n e rm ls s io n e n , p. 221-223; P. H ry ts a k , HalytsTco-Volynska
derzhava, p. 103, 108). Cf. infra. p. 71, n. 27.

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1)11 I AITAHI I ION 1)118 MENDIANTS JUSQU AUX MONGOLS 61

Turquie, la Grece, la Syrie, 1‘Egyplc, «auprès des Grecs de Chypre et des


patriarcais d Anlioilie ii dc Jerusalém», des Jacobites, Maronites et Nesto­
riens, légation qui paiail avoii eu pour but de tirer les conséquences dc
I enquéte réaliséc pai ses messagcrs. Laurent entra en conflit avec les
patriarches latins; le rallachcmcnt direct à Rome des chefs des Eglises
orientales ne pouvail satislairc ceux-ci ",0. Mais il saccordait pleinement
avec la doctrine pontificale,M.
Les missions conliées pai Innocent IV aux porteurs de la lettre Cum
simus s u p e re i au pénilctii ici laurent, marquaient une étape dans 1'histoire
missionnaire en Orient1"*: l Onion des Eglises avait été proposée aux res-
ponsables des Eglises orientales et, avec plus ou moins de sincérité ou
d enthousiasme, acceptée par eux. Les divergences dogmatiques ou rituel-
les n en avaient pas, pour autant, été aplanies.
Mais nous savons que les missionnaires, franciscains ou dominicains,
qui avaient été I inslmment de cette politique d ’union, avaient aequis la
sympathie du clergé oriental et des lidèles des rites orientauxISÍ. Lenthou*
siasme de 1'Eglise latine, qui avait déjà frappé Nersés de Lampron, pour
I union des Eglises, reslail un laeteur très apprécié des Orientaux. II restait
à laire passei dans la vie des communautés, cet esprit d unité. Et, d autre
part, 1'apparition des Mongols ouvrait des perspectives nouvelles.

C e lle lé($alion a été é lu d ié r par M. Koncaglia, Frère iM iirent de Portugal, O.F.M., el sa


légation en O rient ( Hnllettinn delia baditi gret a di (irottaferrata, nov. ser., V II, 1953, p. 33-44). Los
principales letlrei» qui s’y ra p p o ile n t Sbaralea, I, p. 421, 453, 483, 484, 547. Sa m ission est
défin ic dans la bu lle De supremis cnetnruni adressée aux chefs des eglises orien ta les; c est à la
suile de son passayi- que lo i i v r c a C hypre une crise qui n est résolue qu en 1260, par la pro-
m ulgaiion de la C o n slím tio Cypna (f» llill, A hislory o f Cyprus, III, p. 1053-1060).
1.1 En lait, note Cl. Cíihcn (Lu Syne dn Nord. p, 338-339), les Jacobites, très divisés en tre
eux, ne pouvaient tab sleru r de dc-rnarider lin te rv e n tio n de la hiérarchie latine dans leurs
querelles, n olain m cn t a lo c ta M o n de l é le itio n patriarcale de 1252. C’était déjà un recou rs au
patriarche latin d A ritio c h e qui, ve is 11|y, avait am ené celui-ci à rep re n d re vivem en t le
patriarche syrien Athanase en T a m is a u l de Mm onic, à la suite d ’une faute de tradu etion d un
in terprete, pui* a cnvifta|(cr dc le laire fra p p er de verges (B a r H ebraeus, Chron. ecclesiusti-
cum, II, p. 474 478)
1.1 Cf. L. Pitanu, !nnocenv> IV e I francescani, Roma, 1968 (Studi e tesli francescani, 41).
'** lyuacc II lail éla l de i c que le » P ré re » sonl fo rt bien reçus par le peuple. qui les aim e
et qui le » aide nolarnrricrit en <<• «fiii co n ce rn e le rachai des captifs (Raynaldus, loc. cit., § 38).

— — — ___ __

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DEUXIÈME PARTIE

LA CONQUÊTE MONGOLE
ET LES MISSIONS JUSQU’À LA CRÉATION
D UN ÉPISCOPAT MISSIONNAIRE

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Au moment oü Innocent IV remplace Grégoire IX à la téle de 1'Eglise
catholique, le domaine dans lequel les missionnaires sont au travail, entre
les frontières de la Russie et les lisières méridionales du monde connu, est
déjà considérable. En 1237 et 1238, les pouvoirs conférés aux Franciscains
étaient valables dans les terres des Sarrasins et des paíens; en 1239, on y
ajoute celles des Grecs, des Bulgares et des Comans; en 1244 les Domini­
cains envoyés chez les Orientaux ont été mandatés auprès des Grecs, des
Géorgiens, des Jacobites, des Nestoriens, des Arméniens, des Maronites et
des Mossoulitains1, que l'on peut s'étonner de voir considérer comme un
peuple à part si, comme nous le pensons, il s'agit de ces marchands de Mos-
soul, de confession chaldéenne, qui tenaient une place considérable dans la
Syrie franque2. En 1245, le nom des Ethiopiens, des Syriens, des Russes, des
Ibères du Caucase, des Alains de la steppe du Manytch, des Ziques du Kou-
ban, des Khazars de Crimée, des Indiens et des Nubiens sajoute à cette
liste3, ce qui ne signifie probablement pas, du reste, que des missionnaires
aient déjà atteint toutes les contrées énumérées. L ampleur croissante de
ces listes est cependant 1'indice d u n élargissement des perspectives dapos-
tolat.
L'idée missionnaire, dautre part, est désormais bien définie4. Cest
Adam de Marsh qui écrit, vers 1250, q u il est nécessaire de convertir, en se

1Sbaralea. I, p. 100, 231; Ripoll, I, p. 136.


J J. Richard, La confrérie des Mosserins dA cre et les marchands de Mossoul au X I I I • siècle,
dans L O rie n t Syiien, X I, 1966, p. 451-460; A. D. Von den Brinken. Die . Nationes christianorum
orien ta lium », p. 331-336.
3 Sbaralea, I, p. 360.
* Dans un a rticle suscité par la publication du t. IV des Fontes, lc P. W ilhelm de Vries a
tenté de d é g a g er les con cep tion s d ln n o c e n t IV en m atière missionnaire, tant en ce qui
con cern e les rapports avec les infidèles (les Tartares tout particulièrem ent) qu avec les Chré-
tiens de rite d ifféren t, 1’union en tre les Eglises étant l'un des im pératifs fondam entaux de la
politiq u e pontificale, et le schisme, aux term es de 1’allocution du pape au concile dc Lyon,

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66 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT Al) MOYEN-AGE

référant à 1'exemple de saint Augustin de Cantorbéry, et qui sa p p u ie sur |a


phrase évangélique, E c c o ego m itto vos sicu t agtios in m ed io lu p oru m , pour
inviter les missionnaires à ne pas craindre la m ort\ Et G érau d de Frachet
rapporte qu a plusieurs reprises, quand on dem an de aux Frères Prècheurs
des volontaires pour les missions, les volontaires se pressent et demandent
à partir avec des larm es6. Tandis que les Cisterciens vont s’imposer, en
1245, la récitation jo u m a liè re de sept psaumes p o u r les moines et sept
P a ter pour les convers « à 1'intention des Frères Prècheurs et Mineurs que le
seigneur Pape a envoyés dans les pays les plus éloignés p o u r les affaires de
la f o i » 7.
L'entrée en scène des M ongols avait largement contribué à étendre les
perspectives missionnaires. En raison du dan ger que ces nouveaux venus
faisaient peser sur la chrétienté, d u n e part; en raison aussi de ce quavec
leur arrivée, 1'Occident avait dü s’interroger sur la valeur de ses idées
concernant les dimensions du m onde habité et le poids relatif des chré­
tiens, des Sarrasins et des paíens : donc découvrir qu e le devoir de «conver-
tir toutes les nations» imposait à 1'Eglise des obligations plus lourdes qu’on
ne 1'avait cru.
II fallut d a ille u rs quelque temps p o u r que les « T a r t a r e s » fussent
c o n n u s8. Ils étaient apparus sur l'horizon de la chrétienté en 1221, lorsque

une des cin q p laies d e 1'Eglise. Les e n v o is d e c o u ro n n e s à des s o u v e ra in s c o m m e Daniel dc


H a licz, les a c c o rd s a vec les p ré la ts m e lk ite s au d é tr im e n t des p r é te n tio n s d e la hiérarchie
la tin e o rie n ta le , se situ ent dans c e tte p e rs p e c tiv e . Cf. W . d e V ries , In n o z e n z I V (1243-1254) und
d er c h ris tlic h e Osten, dans O s tk irch lich e Studien, X II, 1963, p. 113-131.
5 M o n u m e n to franciscana, éd. J. S. B r e w e r , I, L o n d re s , 1858, p. 434-437 (R e ru m britanni-
ca ru m m e d ii a e v i s c rip to re s ).
* G era u d d e F rach et. p. 150-155; u ne p r e m iè r e fo is, q u a n d J ord a n d e S a xe dem ande des
F re re s p o u r la T e rre -S a in te , en 1230; une d e u x iè m e fois, q u a n d In n o c e n t IV d e m a n d e au pro­
v in c ia l d e F ra n ce d e s F rè re s p o u r p a r tir ch ez les T a r ta r e s ; une tr o is iè m e fo is lorsq u e le nou­
vea u m a itre, H u m b ert, d e m a n d e d es v o lo n ta ir e s p o u r a lle r a p p r e n d r e les langues des peu­
p les b a rb a res dans le u r pays (v e r s 1255?).

7 II s agit c e r ta in e m e n t ici d es re lig ie u x e n v o y é s aux T a r ta r e s et aux p e u p les schismati


ques, ou su p p o sé s tels, p a r In n o c e n t I V : Statuta capitulorum generalium ordinis Cisterciensis,
éd. J. C a n ivez, t. II, L o u va in , 1934, ad ann. 1245, § 28, p. 294.
• La litté r a tu r e c o n c e rn a n t les M o n g o ls d an s leu rs r a p p o r ts a v e c l ’O c c id e n t, est c o n s id é ­
ra b le. A vec les H isto ire s des Croisades d e R. G rou sset o u d e S. R u n c im a n , il c o n vie n t de citer
G. S ora n zo, I I Papato, 1'Europa cris tia n a e i T a rta ri, M ila n o , 1930; D. S in o r Les relations entre
les M o n g o ls et 1'E u rope jusqu'à la m o rt d A r g h o u n et de Bela IV . d a n s C ahiers d 'histoire mondialt,
II 195É», p. 40-62; J. J. S au n ders, Th e h is tory o f the M ongol con qu ests, L o n d o n (1971):
,, Tata ren a “ f dem 2■ H v o n L y on 1274, d a n s A n nua n u m historiae conciho-
rum , V, 1973. p. 241-302; J. R ic h a rd , Th e M o n g o ls a n d the Franks, d a n s J o u rn a l o f Asian histoO-

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LA CONQUÊTE MONGOLE ET LES MISSIONS 67

la cinquième croisade recueillait des nouvelles réconfortantes sur la pro-


chaine arrivée d un «r o i David» qui viendrait à son aide, puis des nouvelles
plus surprenantes sur 1'attaque lancée par ces chrétiens supposés contre le
royaume authentiquement chrétien de Géorgie. Les Hongrois avaient com-
mencé à recueillir des informations sur une nouvelle offensive des Tartares
autour de 1236, tandis que le prieur Philippe enregistrait dans sa lettre de
1237, la dévastation d'une grande partie de la Perse, de la Médie et des
Arménies par ces derniers. La lettre de Julien de Hongrie, puis des informa­
tions relatives à la dévastation de la Russie et de la Géorgie commencèrent
à répandre 1'alarme; la campagne de 1241 contre la Hongrie, la Pologne et
la Bohèm e9, fit affluer en Occident les réfugiés et les relations du désas-
tre10. Un peu après, 1'effondrement du sultanat de Turquie faisait à son tour
trembler 1’Orient latin directement sommé de se soumettre par les Mon­
gols11.
Les Latins, pris au dépourvu par cette invasion dont ils discernaient
mal les motifs, donc les buts12, ne surent trop comment réagir, et la prédi-

III, 1969. p. 45-57, et Les M ongols el la chrétienté: deux siècles de contacis, dans 1274, Année
charnière : m utations et con tin uité (Actes du colloqu e international); G. A. Bezzola, Die M o n g o ­
len in Abendlandischer Sicht (1220-1270). E in Beitrag zur Frage der Vòlkerbegegnungen, B erne
et Munich, 1974. A jou ter 1'article tout récem m ent paru de J. A. Boyle. The ll-K ha ns o f Persia
and the princes o f Europe, dans Central Astastic Journal, XX, 1976, p. 25-40.
* G. Strakosch-Grassm ann, D er E infall der Mongolen in Mitteleuropa in dem Jahren 1241
und 1242, Innsbruck, 1893.
10 J. J. Saunders, Matthew Paris and lhe Mongols, dans Essays in Mediaeval history presen-
ted to B. W ilkm son, Toron to, 1969. Le rapport de larch evêqu e Pierre de Russie a été com-
menté par H. D orrie, D rei Texte zur Geschichte der Ungarn und Mongolen, cité plus haut; ce
«m y sten e u x a rc h e v ê q u e » (P e llio t) a été identifié, à la suite de S. TomaSevskij, Predteca lzi-
dora, Petro Akerovyc, dans Anal. Ordinis S. Basilii Magni, II. 1926, à Pierre A kh erovit, lequel,
après a vo ir été higou m ène du m onastère de Berestovo, aurait été pourvu, dans des condi-
tions obscures, de la charge de m étrop olite de Kiev, dont le d ern ier titulaire avait disparu
lors du sac de la ville par les Tartares. II aurait été envoyé en O ccident par certains princes
russes pour req u érir assistance contre les envahisseurs et aurait participé au con cile de
Lyon; c e s t alors q u o n 1'aurait in terrogé sur les M ongols (econtra : B Szczesniak, The mission
of G iovanni de Plano Carpini and Benedict the Pole o f Vratislavia to Halicz. dans Journal o f
Ecclesiastical history, VII, 1956, p. 20, note). Cf. A. M. Ammann, K irchenpolitik Wandlungen im
Osibaliikum bis zur Tode Alexander Newski, Rome, 1936, p. 246 et suiv. (O rientalia christiana
analecta, 105) et G. A. Bezzola, Die M ongolen . . . . p. 110-118.
" Cf. G. Altunian, Die M ongolen und ihre Eroberungen in kaukasischen und kleinasiatis-
chen Ldndern, Berlin, 1911 (H istorisch e Studien. 91), et B. Spuler, Die M ongolen in Iran, 3* cd..
Wiesbaden, 1968
11 Cf. J. Richard, Ultimatums m ongols et lettres apocryphes. dans Central Asiatic journal,
XVII, 1973, p 211-222.

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70 PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU M OY E N AGE

transmises Mathieu Paris - notamment celles qui avaient pour auteur |t


clerc Yves de N a r b o n n e » sur |'Europe occidentale. c om m e sur la Syric

franque. , , f
Innocent IV avait pris conscience dc cc danger, ct, par le bref Dei vimis
du 3 ianvier 1245, il avail inscrit le re m e d iu m c o n tra Ta rta ros parmi les qucs.
tions á traiter par le concile qu il avail convoque p o u r le mois dc juin>..
Mais cest sans attendrc la rcunion du concile qu il sc decida a envoyer «au
roi et au peuple des T artarcs» deux missives : celle du 13 mars 1245, dont le
préam bule commençail par C um n o n so lu m hom ines, exprimait letonne-
ment du pape devant lagression mongolc, dirigée contre les Chretiens quj
ne leur avaient causé aucun tort et, les menaçant dc la colère divine, leur
proposait de conclure une paix entre eux et la Chrétienté; celle du 5 mars
1245 ( D e i patris im ntensa), donnait un aperçu dc la doctiine chrctienne
(péché originei, rédemption, incarnalion, passion du Christ, transmission à
la succession apostolique du pouvoir dc lier et délier), faisait part à ses des­
tinataires de 1’immensc désir du pape d assurer le salul dc I âme dc ceux-ci
et accréditait auprès d ’eux ses envoyés, pour les instruire dans la foi2-.
Elles devaient être confiées à deux messagcrs, tous deux franciscains:
Jean de Piano di Carpine ( q u o n appellc habituellement en français Plancar-
pin) et Laurent de Portugal, le prem ier étant nom mé dans Cum non solum
et le second dans Dei patris im m ensa. II est prob a b le que chacun d eux
devait recevoir une expédition des deux lettres, en même temps que de la
bulle Cum sim us super destinée aux prélats des Eglises non-latines, dont il a
été question plus haut. Plancarpin quitta Lyon le 16 avril 1245 et, avec ses
compagnons, dont le principal était un autre Franciscain, Benoit de Polo-
gne, q u i l sadjoignit en passant à W roclaw , il em prunta la voie de la Russie.
Mais, entre temps, il scm ble que lc pape ait changé d a v is ; retenant auprès
de lui Laurent de Portugal (les Anglais Jean de Stanford et Abraham de
Larde, qui devaient laccom pagncr, ne partirent pas non plus), il confiait les
lettres en question à des Dominicains : Ascelin de C ré m on e et André de

« Ed. Luard, III, p. 488; IV. p. 270-277, etc.


14 Mansi, S a c ro ru m c o n c ilio r u m nova el am pl. cu lle cliu , X X I II , p. 608. Le c o n c ile adopte un
D e cre tu m de Tartaris ( ibid., p. 627-628) qu i q u a liíie ceu x-ci d c gens im pia, ch ristia itu m p o p d 11’•
subjugare sibi vel p o liu s p e rim e re appelens ct r c c o m m a n d e d e p r e n d r e c o n tr e eux des mesur*
d ê fin itive s.
” R<g. Itin IV , 1364-1365 (S b a ra lea , I, p. 353-354; R o d e n b c rg , E p is lo la e saecult XM.
M GH , Epist., t. II, n° 102 et 105); une tra d u e tio n a n glaise d an s The M o n g o l mission, ed. ^
D awson, p. 73-76. - Cf. P elliot, Ix's M o n g ols e l la Papaulé, II, dans Re v. Or. chr., X X IV . *
p. 288-290; n o tre S im o n de S a in t-Q u en tin , p. 21-22 ct curte.

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M m t s i j l f M Mo m ,o || FT I ftS MIVMOV» ?l

Longjumcau, qui lous clctix partaient dc X v n e Ascelin I r a v e r s a n i I.» Furquic


ei I Arménie pour attcirulre Iillis, el Andrc la Svrtc musulmane ei la regam
de M o n s o u I poui parvcnu a T abu /’*
Sans doute les messagers du pape esiimaient-ils suttisani de rcmcttrr
ces lettres aux eommandants des prernicrs dctachcments qu ils rctnoniie
raieni. n avant du reste que des idées tres vagues sur I orgatnsjiion pt>liti
que des cnvahisseurs (ce qui stupefia ceux-ci). Andrc de Longjumcau ren
contra les Mongols dans Ia région dc Tabriz, ou il lit la connaissancc d un
personnage quil retrouva deux ans plus tard comme envove d'un chcf
mongol. Le comrnandant de 1’armée stationnee dans les pa\s du Caucasc
Baiju, souhaitait envover Ascclin et ses compagnons auprès du Khan et \c
heurta au refus obstine de ceux-ci, qui durent attendre des mois a Sisian.
dans le Karabagh, que la réponse a leur message vint de Mongolic Plancar­
pin, lui, apres avoir quitté Kiev, fut achemine dc campement en campe
ment, el Batu décida lui aussi de 1'envoyer en Mongolic. oú le Franciscain
eut la bonne Fortune d'assister au couronncment dc Guvük
A côté de leur mission officielle - remettre aux Mongols les leltres pon-
tificales el les expliquer Dominicains et Franciscains ctaicnl chargcs dc
recueillir le maximum d'informations sur les Mongols. leurs intentions, el
leur façon dc combattre qui avait deroute Polonais, Allemaiuls el Hongrois
- mission d exploralion qui rappelle celle que Bela IV avait conlice Julien
de Hongrie el à d ’autresÍH Ils s en acquitiercnl on sait que Plancarpin,

í(l C e s t ainsi que nous interpretou * le passagr d une lettre d Adam de Marsh selou lequel
le pape avait ren on ce A en vovei des Fianciscam s ih iv les tartares en fait, Plantarpiri partit.
mais les deux franciseains anglais. auquel Adam s interessai! spccialcrm*nt, ne parlaient pus
Cl. M Roncaglia, Laurent of Portugal. O.F VI et sa Wgation en Orient, cite plus haut, Les mis
sions d'Ascelin et d A n d r é de Longium cau oru lait l ubjet de Ictu d c de P Pelliot, Les Mongols
et la Papauté, qui est desorm ais co m p leie e par les deux chapitres « En m arge de Jean du Plan
C a rp in » ct «C u illa u m e de R u b rou ck - publies dans Recherches sur les ih rélien s dAsie central«
ei tlE x trim e -O rie n t, Paris, 1973 (tEuvres posthumes de Paul Pelliot), par MM J D auvillicr et
L. Hambis. p. 1-74 et 75-235. Cf. aussi G. Soranzo. II Pap*ito. 1'Europa enstuina e i Tariun, p. 77­
125, et G. A. Bezzola. op. cit., p 118-182
}1 La raison pou r laqu elle Innocent IV décidait. le 3 mai 1246, d c n v o y e r d e u » Dornini-
cains. Alexis et « H », p o rter aux Russes la lettre Cum stmus super, avec les m êm es privileges
que ceux a cco rd es aux religieu x qui etaient en voyes aux Tartares (/te* Inn. IV, n» 1821-1822)
ne tient-elle pas à ce qu on croya it les Franciscains disparus? Le pape se serait adresse a nou
veau aux Russes — mais sans que ses messagers, cette fuis, aillent jusque chez les M ongols, ií.
supra, p. 60, n. N ous avons tou tefois note qu a Lyon, on ne séta it pas prem um con tre la p o v
sibilité d'un d o u b le e m p lo i: André et Ascelin allerent. en ignoram la mission d un de lautre.
porter la m êm e lettre à Sim éon Rabban-ata.
íi c f. D. Sinor, Les relattons entre les M ongols et l'E urope (dans Cahters dhist. mondiale, III.
1956), p. 42 et 47.

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72 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN ACL

dont la relation suscita une inlense curiosité, fut plus à i » K d observer


les «Tartares» chez eux, e. son H istoria M o r r a m en por te |a , ra
Simon de Saint-Quentin. qui rédigea le rapport de la rn.ss.on d Asceli#.
donna moins de renseignements sur les Mongols eux-memes, dans son Hu.
to ria Tartarorum, mais y ajouta des informations sur la Turqu.e la Ceorgie
et I'Arménie10; André dc Longjumeau n’a latsse que quelquLS notes, recueil-
lies par Mathieu Paris31. • ...
En ce qui concerne la conclusion d u n pacte de non-agression, 1échec
fut complet: la doctrine mongole du mandat du ciei conférant un empire
universel aux Gengiskhanides, rendait incompréhensibles k s arguments
pontificaux, et les conseillers de Güyük déclarèrent, en substance, qu ils ne
voyaient pas en quoi le pape avait pouvoir de décider si le ciei avait ou non
confié ce mandat aux Mongols12. Et ils réclamèrent un acte de soumission
de la part du pape et des rois francs33. Quant à Baiju, il agit de même en joi-
gnant à sa lettre la traduetion de 1’édit de Güyük, lui enjoignant d ’inviter
tous les peuples à se soumettre au K h an 34.
L appel à la conversion au christianisme, qui nous retient plus spéciale-
ment, avait été lui aussi remis aux Mongols. Plancarpin ne nous informe
pas des circonstances de cette remise, ni des discussions qui auraient éven-
tuellement eu lieu à ce propos. Le Franciscain, d ’ailleurs, n avait eu avec le
Khan lui-même qu un bref entretien, et c’est par écrit q u ’il lui avait commu-

La relation définitive de Plancarpin a été é d ité e en d e m ie r lieu p a r Van d e Wvngacrt,


Simca franciscana, I, Quaracchi 1929 n ^ n n m*» .
francaise nr>m i n ! r, ’ , m e ille u r c o m m e n ta ire . dans la traduetion
de H o Z fe cf” J T Z " * * ' % 5 ) • » « " « * “ =tabli à l in lealion du roi
Royal Asiauc socidy, 1957 p M o" sols' dans Journal o\ th
lui à Salimbene (MCH. s i, X X X , í “ 2
' ^ * T “ aien t é té données par
Pologne (Sinica franciscana I p 1 3 3 ) E, I. A - ,C" d e la m ission est dú à Bcnoil de

(R. A Skelton, Th. E. Marston, C. D P ain t«- r l T v l T j* d e ' » ' Tar:ar " ta iT
1965) a perm is d ’id en tifier une relation H ’ ,nland m ap and the T a rta r relation, Yale,
un religieu x : Hystoria Tartarorum C. de B r id L ^ ° yage, elabj ü r é e P a r tir d u n récit oral?) Par
10 Sim on de Saint-Quentin, « L t é<*‘ A ' Ô n n e fo rs. B erlin . 1967.
C. Guzman, S im on o f Saint-Q uentin and the D o Z * ™ ’ * A c h a r á , Paris, 1965. Cf. Gregon
sal, dans Speculum, X L V I, 197|, p 232-249 m m tca n w ü s io n to the M o n g o l B a iju : a reappral’
31 Ed. Luard, VI, p. 112-116 C f P p»|| i
” Cf. E. Voegelin. The M o n g o l orders ' o f ^ h * l° Papau lé’ H * P 251' 254-
Byzantion. XV, 1940-1941, p. 378-413. to E u ro p e a n pow ers. 1245-1255, d »" 5
T exte traduit du persan ■ P clliot ■
Tradu etion latine effc ctu é c à la cou r m o n ™ ! ^ ' ReV 0 r ch r■■ X X I I I . 1922-1923, P> 3°
" T exie dans Simon de S a i n l - Q u c m i n X X X " - P »> 7 .

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i
I

LA CONQUÊTE MONGOLE ET LES MISSIONS 73

niqué le but de son ambassade; la réponse semble avoir été élaborée en


dehors de lui. La lettre de Güyük prend cependant acte de cette remise,
mais sous cette forme assez d é c ou ragean te: «V o u s avez dit que si je rece-
vais le baptême, ce serait bien . . . Cette tienne requête, nous ne 1’avons pas
c o m p r i s e » 35. Simon, au contraire, nous donne un récit coloré de 1'audience
au cours de laquelle fut présentée 1'invitation à la conversion : Ascelin, qui
venait de rcfuser de se prosterner devant Baiju, déclara que, si le chef mon-
gol acceptait de se faire chrétien, les Frères non seulement se prosteme-
raient, mais iraient jusqu a lui baiser les pieds. L'homélie fut très mal reçue,
les « b a r o n s » m ongols traitant les chrétiens de «c h ie n s »; il est dailleu rs
vraisem blable que 1'emploi du terme de «C h rétien s» qui signifiait pour les
M o n g ols le « p e u p le des Chrétiens d ’Occident» plutôt que les «fidèles du
Christ», n a v ait pas facilité l’échange de vues36. En tout cas, Baiju ne fit
m èm e pas allusion à la lettre D e i patris immensa . . . Et cependant un chré­
tien oriental, du nom de Serge, allait porter sa lettre au pape, tandis q u a u
moins deu x des officiers de la chancellerie mongole avec qui Plancarpin
avait traité, étaient chrétiens; et le Franciscain n'ignorait pas les sympathies
chrétiennes du K han!
Les envoyés de Baiju navaient pas encore repris la route qui les rame-
nait aup rès de leur maitre, avec une lettre pontificale exprimant le regret
du pap e p o u r le refus de celui-ci d a d h é r e r à la foi chrétienne (22 novem bre
1248)37 que le représentant du Khan en Iran, Àlgigidài, avait déjà confié à
deux m essagers - deux chrétiens orientaux originaires de la région de Mos-
soul - une lettre adressée au roi de France, qui allait débarquer à Chypre et
qui la reçut en d é c em bre 124838. Nous savons que les Mongols setaient
vivement intéressés, 1’année précédente, pendant qu Ascelin séjournait à
Sisian, à la prochaine venue de la croisade de saint Louis, qui n allait pas

j5u tra d u c tio n é la b o r é e à S ira -o rd o est la su ivante : Tu a ru m con tin eba t series littera rum
q u o d d ebem us baptizjuri et effici c h ris tia n i Ad h oc tib i b re v ite r respondem us qu od « o n m telligi-

m us q u a lite r h o c facere debeamus.


« S im o n p 98-104 Les M o n g o ls s’in d ig n èren t en tre autres du refus qu e faisaient les F rè­
res d e se o r o s te r n e r d e va n t le rep ré s e n ta n t du Khan, alors qu ils le faisaien t d evan t des .ma-
g l s d e p ic r r e ou d e bois, e . ils r e ç u re n . fra ic h e m e n . les e x p lic a .io n » d A seehn S .m o „ caph-
- f He se D rostern er, les D om in icain s vo u la ien t m am fester, à 1in ten tion des
^ : ^ = n nd é p e „ d a „ c e d e ,'EgU se d e R o m e en vers ,es T a n a res. suje,

de c o n s o la tio n p o u r les p e u p les sou m is pa r ceux-ci.

» Sur í o u t cei é p is o d e , cf. P e llio t, U s M o n g o ls et la Papauté, I I I (dans Rev. Or. chréL,

X X V I I I , 1931-1932, p. 3-84).

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V
74 LA PAPAUTÉ t t LBS MISSIONS BOKIKN1 AU MI.VHN AM

.i.wlí-v w Alüwnl*" vls,bli*nu-ni


sans suscitcr chez eux quelques inqui ■ ^ a

cntrer au plus vite en relation a v e c I » lu n e cn lalin . 1'autr,


Nous n avons de sa lettre que . ( ,.,|l|l|c A |„qut.|le %'cst livre Pr|
français. loutes deux effcctuees u ^ l|lK.|ques a d jo n c .io n s M„,
liot a permis de reconnaiiu qu I s inspir,iii neitemenl des „sagCi
sans doute 1’ceuvre des messagc .. ^ ( ^ | hoh,,uelle invitc a la
de la chancellenc m o n H « - d é s o b é is s o n c e à 1'edil formule Par
soumission, et cest sans d®“ Qn de M 6 n g ka quand on lii allusion
Güyük qu. devait su sc.u r ^ g ‘ mblai| p |u)òi dcslineeiV prendre cena,,
devant lui a cette ambassad . lk, 0 ffen sivc des Francs contre l„
nes précautions, pour evitei une jnviter le toi de Francea
pays soumis aux Mongols. en même en.ps qu á i n v » nc, a
observer une des prescripiions de a 01 bo n n e s intcntionia
Àlgigidài saluait le ro, de France. h n _ „ |uj f
l’égard de la chrétiente et faisant ^ ' - „ |ou5 chfe
connaitre les termes de Fed. de ^ ^ ^
tiens» (entendons l e u r s p r e t > üjs.li( ;ulssi q u i | sétail preoe-
M o n e o s en reto u r de leurs pncrc.- • .
cupé de faire rebâ.ir les églises e. d a s s u r e r aux chrctiens v.vant en pavs
musulman, le droit de battre les tablettes (qui c o rre sp o n d e m aux sonnenes
de cloches des églises latines). Enfin. il precisai, q u e les Mongols ne la,-
saient aucune différence entre Latins, Grccs, Aim cnicns, N isto r «.ns ou
Jacobites, et invitait le roi à faire dc mèn.e dans son pays.
Cette lettre rend le même son que celle q u e le « v . c a i i c d O n e n t.d e
1'Eglise chaldéenne, Sirnéon Rabban-ata. avait conliec a A n d re ^ L o r j g j u
meau en réponse à la lettre Cum stmus super d Innocent IV . Verai
d Extrême-Orient po ur faire a pp liqu e r la loi m on g o le relat.ve a la tolerance
au profit des chrétiens jusque là soum is aux M u s u lm a n s ou victimes es
exactions qui avaient accom pagn é la con qu èlc, restaurateur d eglises.

>• S im o n , p. 97 98; J. Richard. La p o litiq u e o rie n ta le de s tin il L o u is , dans 7 ' c e n t e m i"


m o rt de sa in t Lou is. Actes des c o llo q u e s de R o y a u m o n t et de P arts (21-27 m a i 1970), Paris.

p. 197-207. . . jonflul
40 Cf. J. Richard, V ltim a tu m s m o n g o ls et lettres apocryphes, dans C en tra l Asm i

X V II, 1973, p. 217-218. . n i ; Schur


41 Cf., par exem ple, le p rivilè ge a c c o rd é au m é tr o p o lile d e M oscou ( t r a d u c t i o ^ ^ ^
mann, M o n g o lia n irib u ta ry pratices, dans Har\>ard j o u m a l o f A s ia tic studies, X IX , • ^
346, ou Chantal Lem ercier-Q u elqu ejay. La p a ix m o n g o le , Paris, 1970. p. 76-77). L >
gis-Khan s a p p liq u a it d a ille u rs aux p rêtres de tou te religio n .
42 Pelliot, Les M o n g o ls et la papauté, II (R e v . Or. ch r., X X IV , 1924, p. 225-262).

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\ Á CONQU&TE MONGOLE ET LES MISSIONS 75

Siméon avail non seulcrnent invité lc pape à faire la paix avec Frédéric I I 43,
mais aussi rccommandé a son interlocuteur - auquel il envoyait la profes-
sion de loi dem andée44 - 1’archevéque chaldéen de Jérusalem et les autres
«chrétiens orientaux» (cn ten don s: de rite chaldéen) vivant dans les Etats
latins, pour que personne ne leur fasse de tort45.
Les remarques de Siméon concernant la situation inférieure réservée
aux Orientaux dans les Etats latins, rejoignaient du reste celles quexpri-
mait, en cette mème année 1246, le patriarche syrien Ignace. Ainsi a-t-on
1impression qu a la laveur de l’irruption des Mongols (ces mêmes Mongols
qui avaient si mal re<,u la lettre Dei patris im mensa) sur la scène orientale,
les Eglises orientales se retrouvaient en position de force pour traiter avec
1Eglise romaine. C'était 1'indice de la découverte de toute une chrétienté,
celle qui vivait dans 1'Empire mongol46.
Plancarpin, comme Ascelin, avait surtout découvert, auprès des chefs
mongols, les représentants, humiliés et brimés, des peuples conquis - Rus­
ses, Arméniens, Géorgiens Mais déjà le premier avait pu noter que Güyük
avait continucllcment des chrétiens avec lui dans sa maison, qu une cha-

4’ S im éo n sc référa it a cc prop os à la récente destruetion d e Jérusalem par les K h w arez-


miens, c o n s id é ré c tom rn c un desastre pour la C hrétienté toute entière.
44 II e n v o ie un hhellus qu 'il avait ap p orté «d u sein de 1'Orient, de la terre d e C hine ( S in) •
et aussi celu i qui ren íerm a it la profession de foi de 1’arch evêqu e de N isib e (cf. p. 60) contresi-
g n ée d a u tr e s prélats, qui scm blc a voir été établie à sa dem ande. La m é tro p o le d e Sin (ou Sin
et M a sin ) dc 1'Eglise ch ald écn n e seten d a it sur une part assez vaste de 1’Asie centrale, notam -
m ent sur les te r rito ire s occu pés par les O ngiit et p rob ab lem en t aussi sur ceux des K e ra ít
(pu isqu e, selon S im on dc Saint-Qucntin, Sim éon avait suivi la fortu n e des princesses d e cette
tribu, ép ou ses des C cn giskh an idcs), les uns et les autres étant chrétiens, les Ongüt nom adi-
sant dans les O rdos, les K e ra il (sur les circonstances de leur con version , au début du X I* siè­
cle, cf. le récit d e B ar Hebracus, Chron. eccles. III, c. 279-282) en M o n g o lie septen trion ale. Cf.
J. D au villier, Les provinces chaldéennes « de 1'Extérieur», p. 300-312 (qu i pense plutôt a ttrib u er
les K e ra it au ressort dc la m é tro p o le d ’Alm âligh).
45 II n e s t pas exclu, bien entendu, ct P. Pelliot en a n oté la possibilité, qu e les C hrétiens
orien ta u x dc 1'cntourage d À lg ig id a i soient responsables de ces rem arqu es sur le g a lité de
tra item en t des d iverses com m u nau tés chrétiennes.
44 Sur c e tte ch rétien té, cf. J. D auvillier, Les provinces chaldéennes « de 1'Extérieur• au
Moyen-Age, dans Mélanges Cavallera, p. 261-316 et P. Pelliot, Chrétiens d’Asie centrale et
d 'E xirêm e-O rient, dans T o u n g pao, 1914. Sur sa d é c o u v e rte par les Latins, A. D. V on den Brinc-
ken, D ie • N a tio n e s », p. 327-330. - La satisfaction des C hrétiens orien tau x à l a rriv ée des M o n ­
gols est in d én ia b le, cf. J. Fiey, Chrétiens syriaques entre Croisés et M ongols, dans Orient. christ.
anal., t. 97, 1974, p. 327-341, ct surtout le livre du m êm e auteur qui vient de paraitre : Chré­
tiens syriaques sous les M on gols ( ll-K h a n a t de Perse, X I 1I*-X ÍV * siècles), Louvain, 1975 (C orpus
s crip to ru m ch ris tia n o ru m orien ta liu m , vol. 362, Subsidia, t. 44).

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PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O R IENT AU M O Y E N AC,E
76 la

pcllc chrétienne se trouvait devant la principale de ses tentes, q u il subve„.


üonait des eleres chrétiens e. que . l e s chrétiens qu, e.a.ent de sa maiSü„
nous disaien, croire fermement qu il aliai, se fa.re chretien.,. Les envoyés
d Algigidai, renchérissant sur les termes de la lettre de ce dermer, précj.
saienl que le Khan avait une chrétienne pour mere. qu ,1 avau lui-mème
recu le baptème avec de nombreux princes de son entourage; qu Algigidi,
était sur le point d'attaquer le khalife de Bagdad* . En m cm e tcmps. le roi
de Chypre et les barons du royaume de Jérusalem recevaien, la |e„ re
écrile de Samarkand par le connétable Sempad d'Armen,e, dans laquelle cç
grand baron, apparenté aux meilleurs lignages de 1Orient latin, disait son
émerveillement d a v o ir rencontré au coeur de 1'Asie centrale tant de Chré­
tiens, de se trouver au pays d ’origine des rois mages, d y visiter des églises.
et lui aussi faisait état de la conversion du khan Güyük lui-mème au chris-
tianism e (2 fé v r ie r 1248)48.
Dans ce contexte, saint Louis et le légat Eudes de Châteauroux se déci-
dèrent à répondre à 1’ambassade mongole : le roi fit contectionner une
m a g n ifiq u e ten te-ch a p elle a v e c d es p a n n e a u x r e p r é s e n t a n t la v ie du Christ,
donna à ses envoyés des fragments de la Vraie Croix p ou r A lg ig id a i et pour
le Khan, avec deux lettres dont nous ignorons la teneur. Lc légat faisait de
même et écrivait de surcroit aux prélats nestoriens dc l empire mongol
pour les inviter, ainsi que le Khan et sa famille, à reconnaitre la primauté
du Siège Apostolique. André de Longjumeau était placé à la tête de cette
ambassade, qui comprenait avec lui deux autres Dominicains, Jean de Car-
cassonne et un certain Guillaume. Partis de Chypre à la fin de janvier 1249,
les envoyés du roi passèrent à 1’est de la mer Caspienne ct arrivèrent en
Mongolie vers le début de 1250. Güyük était mort, et c e s t sa veuve, Oghul-
QaimiS, qui reçut, avec des égards, les messagers du roi et du légat. Mais la
lettre q u elle leur remit, et qui parvint en 1251 à saint Louis, nétait quune
invité à la soumission; les perspectives missionnaires envisagées par le roi
s evanouissaient à nouveau, et nous savons par Joinville q u i l ne se félicita
pas d avoir répondu à la lettre d'Àlêigidài - pas plus que ne le fit le nouveau
khan Mongka qui devait désavouer les envoyés de ce dernier, en les traitant
dc « menteurs ».

Néanmoins, comme l a souligné Pelliot. A n dré avait pris une connais-


sancc plus approfondie du milieu mongol, et d u christianisme en milieu

c h i - í Z 0" 10'' ^ MOng° h “ PapaMt- 111 P- » • * Pour Bar Hebraeus. Guyuk lui-même W»

(éd. de Douai 1624 X X X ^ T ^ r d a ^ V in cen t d e B eau vais. Speculum hisíonale, X X X II, l


uai. ,624. XX X I. 92) e, p u b l.ee p a r Yu le. Calhay. 2* é d , p . 262.2é3.

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LA CONQUÊTE MONGOLE ET LES MISSIONS 77

mongol, que ses prédécesseurs. II avait rencontré en chemin, a Talas, au


pied des Tien-chan, des Allemands déportés, qui appartenaient á I un des
princes mongols, Büri. Toutes ces informations n’allaient pas étre inuti-
les49. Et nous ignorons, d'autre part, si le Dominicain avait rencontré
quelquun des prélats auprès desquels Eudes de Cháteauroux lavait accré-
ditéSü.
« L a nouvelle de la conversion des Tartares se répand à travers le
monde», écrivait Adam de Marsh vers 1250'1. Mais lintérét que suscita
1annonce de la découverte de quelques-uns de ces captifs que les Mongols
avaient entrainés avec eux en 1241-1242 fut très v i f : Innocent IV, donnant
les privilèges habitueis à des Dominicains partant en mission, les accrédi-
tait auprès des peuples que I’on énumérait dordinaire dans ce type de let­
tres, en y ajoutant les Tartares, les Hongrois de Grande-Hongrie ct les cap­
tifs chez les Tartares (23 juillet 1253)52.
Peu après, un elere arménien du nom de Jean, se disant chapelain de
Sartaq, fils de Batu, arrivait à Anagni, au milieu de 1254. II affirmait avoir
été chargé par ce prince, de notifier sa conversion au pape; mais il avait été
arrèté en cours de route par le roi de Sicile. Le baptème de Sartaq parait
d ailleurs bien attesté, non seulement par ce témoignage, mais par celui de
Kirakos et de Bar Hebraeus selon lequel Sartaq «aimait la religion des
Chrétiens; il fut baptisé, apprit à lire et devint diacre»; le chroniqueur
musulman Guzgãni nous confirme cette conversion” . Le pape, toutefois, ne

4 ■Sur lout cela, cf. Pelliot, Les M ongols et la Papauté, III, dans Rev. Or. Chrét., X X V III,
1931-1932, p. 37-84. Talas est aujourd’hui le nom d u n e localité. sur le fleuvc du m èm e nom,
dans la RSS kirghize, en am ont de Djambul, 1'ancien Aoulic-ata. L ancicnne Talas etait-ellc au
m êm e en droit, ou à 1’em p lacem en t m êm e d'Aoulié-ata?
50 N o tre sou rce principale sur cette mission est en effet la vie de saint Louis par Join­
ville. à laqu elle sa jo u te n t les autres sources relatives à le x p é d itio n du roi outre-m er. Ce que
les D om inicains purent ra p p orter à Eudes de Cháteauroux reste inconnu. Nous savons seule­
m ent q u A n d ré de Longjum eau avait recu eilli sur la situation des chrétiens orientaux en pays
musulman, des in form ation s qui décid èren t le pape à en visager la création d u n épiscopat
m issionnaire par la bu lle Athleta Christi, sur laquelle nous reviendrons ( Reg. Inn. IV, n° 6365).
51 V u lga iu r p e r orbem m undanum et Tartarorum conversio, et consternalio Saracenorum,
G raecorum obsecratio et La tin oru m repressio ( M onum ento franciscana, I, p. 428).
” Reg. Inn. IV, 7753.
” B ar Hebraeus, Chron. eccles., I, p. 509; Kirakos, trad. Dulaurier, dans Joum . AsiaL,
1858, I, p. 170; The Tabakat i-N a siri of. .. al-Jurjani, trad. Raverty, L ondres 1873-1881, p. 1290
1291 (B iblioth eca indica, nouv. série, n» 272-273); Pelliot. ibid., p. 78, note 4. P. P elliot a retracé
ce que l'on sait de Sartaq dans ses Notes sur l'histoire de la Horde d'Or, Paris 1950, p. 34, en
ém ctlant 1'hypothèse que la m ort de celui-ci, en 1255 et 1256, et celle de son fils (ou frè re )
Ulaghti, très peu après, ont pu être le fait de 1’on cle de Sartaq, Bàrkã (p. 37-38 et 44, note). Cf.
B. Spuler, Die Goldene Horde. Die M ongolen in Russland, 2* éd. p. 33-34.

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78 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU M O Y E N AGE

semble pas avoir réagi autrement q u e n rcnvoyant à Sai i aq une lettre cie
félicitations, par les soins de Jean, le 29 aoüt 1254'4.
Cest que déjà la nouvelle de la conversion de Sartaq avait em u ausS)
bien les Chrétiens orientaux que les Latins. A lire le seul récit dc vo ya gc dc.
Guillaume de Rubrouck, nous apprenons que celui-ci rencontra a Nakhidje-
van, au début de janvier 1255, un Dominicain hongrois qui revenait
Tabriz, oú il avait essayé en vain d ’obtenir un sauf-conduit p o u r se rendre
auprès de Sartaq55; et, quelques jours plus tard, à Ani, cinq autres Dom ini­
cains, avec leur serviteur et interprète, dont quatre, désignés par le chapitre
de la province de France à la fin de 1253, avaient été recommandés par le
pape aux Géorgiens par le pays desquels ils devaient passer pour se rendre
chez les Tartares (26 février 1254); ils s'étaient adjoint un Frère d e la pro­
vince de Terre Sainte, sans doute pour leur servir d'interprète au moins en
arabe et peut-être en persan, comme 1'avaient fait avant eux Plancarpin en
sadjoignant Benoit de Pologne (qui, parlant les langues slaves. pouvait lui
permettre de communiquer avec les Russes qui lui servaient eux-mèmes de
truchement auprès des Mongols) ou Ascelin en incorporant successivement
à sa mission Simon de Saint-Quentin et Guichard de Crémone. Ces reli­
gieux étaient munis de lettres pour Sartaq, pour le grand-khan, et pour le
prince Büri (dont on savait qu'il était le maitre du groupe de déportés alie-
mands découverts par André de Longjumeau), lettres par lesquelles le pape
demandait pour eux le droit de séjourner dans 1'empirc mongol et d'y prè-
cher. Rubrouck, qui revenait précisément de la cour de Sartaq, qui l avait
quittée à la fin de juillet 12545‘ , renvoya les uns et les autres au couvent de
Tiflis, pour qu'ils préparem mieux leur voyage, en tenant compte de son
expérience57.
Le voyage de Guillaume de Rubrouck et de Barthélem y de Crémone,
tous deux Franciscains, avait été décidé à la fin de 1252 ou au début de
1253, quand saint Louis était en Terre Sainte. Lmitiative en venait-elle du

In n o c e n tíU V ‘i ? 7 dan$ RCV ° r chrél" l ' X X V M I- P 78-79 e l 81; Viw


' Ba'U2e’ V U . P. 397: R e e , K ne ^ l 5 ; Sbaralea. I.

” R u b rou ck , chap. 38.

des c Z n d e l : PaSSa6eS d e G u i" a u m e d e R u b r o u c k M é la n g e s s u r U p W ‘

P a p a u li, I I I (R ev . O r. \ e l a b lie p a r p M l l o t , Les M o n g o ls el lt


d o n n è r e n t e n c o r e d e leu rs’ n o u v e lle s • H u m h p rt ! T d P ‘ 78 ' 7 9 )‘ L e s D ° ™ n i c a i n s en question

d e 1254 (D e via sua m ic h i p ro s p era n u n tia v e r u n t) ^ ^ ^ S° "

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LA CONQUÉTE MONGOLE ET LES MISSIONS 79

roi de France, du ministre provincial, ou du Franciscain flamand lui-mème,


qui était probabJement venu en Orient en même temps que le roi? II est
vraisemblable que le projet émanait de Guillaume, qui désirait porter la
parole de Dieu aux Tartares, aux peuples qui leur étaient soumis et peut-
être aussi aux déportés dont déja Plancarpin et André de Longjumeau
avaient parlé - Simon de Saint-Quentin s'étant borné à rapporter q u o n les
laissait libres de pratiquer leur religion Le roi de France lui fit de géné-
reuses aumônes, qui lui permirent dadjoindre, en passant à Constantino-
ple, l'esclave Nicolas aux autres auxiliaires de la mission, le clerc Gosset et
un interprète, et de se pourvoir de chariots, de provisions et de quelques
objets destines a étre offerts en cadeau à des dignitaires mongols; la reine
Marguerite lui donna un beau psautier enluminé qui devait exciter la
convoitise de Sartaq au point que Rubrouck le lui abandonna. Enfin, le roi
le pourvut d une lettre de recommandation, adressée à Sartaq, dans
laquelle il demandait la liberté pour les Franciscains de séjourner dans ses
terres et de prêcher, tout en exprimant au prince mongol sa joie d a v o ir
appris son baptème et son espoir de le trouver favorable aux fidèles de la
Croix et hostile aux ennemis de celle-ciS8. Cette lettre devait donner un tour
inattendu à la mission de Rubrouck : traduite (de façon inexacte ou tendan-
cieuse?) par les interprêtes arméniens de Sartaq, elle fut interprétée
c om m e un appel du roi de France à la coopération militaire de Sartaq dans
sa guerre contre les Musulmans; Sartaq jugea 1affaire trop sérieuse po ur ne
pas en référer à son père Batu qui lui-même renvoya Rubrouck à la cour du
Khan M õ n g k à : là, on égara la lettre de Batu et l'on ne sut plus pourquoi le
Franciscain avait été envoyé si loin; aussi, à toute fins utiles, lui remit-on
une nouvelle invitation au roi de France pour que celui-ci fit sa soumission
aux Mongols, et on le renvoya, après 1’avoir traité en ambassadeur, par les
soins de la poste m o n g o le ” , rapporter cette lettre au roi. C e st ce qui empê-
cha R u b ro u c k d a c c o m p lir la tâche proprement missionnaire q u il s etait

»• En oassan t à C o n s ta n tin o p le , R u b ro u ck se p ro c u ra d a illeu rs une le ttre de I e m p e re u r


B a u d o u in II p o u r les M o n g o ls, qu il re m it au p r e m ie r c h e f q u il ren con tra. - S c a c a t a i. (B a u ­
d o u in éta it d é jà e n tr é en re la tio n s avec les M o n g o ls : son e n vo y é. B a u d o u m de H am aut. avait

rf „ ' r f P p r O l b n c h f ü Z P o Z t l n in China m te r den Mongolen-herrschal,, W ie sb a d e n 1954.


N a v a n t pas reç u dc- p r iv ilè g e s sp éciau x, R u b rou ck et son co m p a g n o n es sa y èren . d o b s e n ,e r
a y a n l P2S , Ç , Y |„u r o r d r e (à ce la près q u e n v o y a g e ils p o rta .e n t la barbe, ce qu. etait
s tric te m e n t la r e g le de le u r o r a r e va «-ci* h m a- nue o u ils tra-
a u to ris é d e p u is H o n o riu s III). Aussi est-ce pieds-nus, en ro b e d e b u re et tète nue, qu .Is tra
v e r s è r c n t 1'Asic e n tiè r e d 'a o ú t à d é c e m b r e . en tentan t d o b s e r v e r autant q u e p o ss.b le les

re g le s du je ú n e et d c l'a b s tin en c e.

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80 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O RIENI At) M O Y I N A U '

assignée60; il garda dailltiurs 1'impression, dc ses conversations avee


Mòngka ct avec Sartaq, que les souverains,m ongols elaient piêts a accueil-
lir les ambassadeurs, mais non les simples prédicateurs auxqucls ils deman-
daient d etre accrédités par leurs m aitres61.
II est peu probable que Rubrouck ait envisage sa mission comme un
voyage destiné à étudier les possibilités missionnaires dans I em pire mon-
g o l62. Plus probablem ent était-il disposé à se fixer chc/. Ics M ongols pour y
exercer son a p o s to la t: il demandait encore à M òngk a dc I autoriser a se
fixer auprès de lui pour servir Dieu et prier po ur le K h an; ct a Sartaq, il
exprimait son vceu de pouvoir revenir dans ses Btats. Les circonstances
1'amenèrent à se consacrer tout d ’a bord aux Latins deportes dans I cmpire
mongol et q u ’il rencontra au passage ou bien dans la capitale mongole,
K arak orum et son annexe, Sira-ordo.

Ml P o u r P elliot, Les M o n g o ls et la Papauté, III (Rev. Or. ch rél., X X V IM , p 77). la situation


d e R u b ro u c k « n e t a it pas a m b ig u e qu e dans la fo r m e » e l il était, en fait, c h a r g é d une mission
a u q u el le roi ava it vou lu c o n s e rv e r un c a ra c tè re o ffic ic u x . N ou s a v o n s re p ris c e tte question
dans n o tre a rtic le S u r les pas de P la n ca rp in et de R u b ro u ck . I m lettre de saint L ou is a Sartaq,
dans J o u rn a l des Savants, 1977, p. 55-60.
61 L e récit d e R u b rou ck p ren d la s p e c t d ‘un jou rn al tenu au jo u r le jo u r; il se presente
c o m m e u ne le ttre é c r ite à saint Lou is p o u r lui c o m m u n iq u e r à la lo is la rnissive d e Mòngka,
le ré c it d e ses e x p é r ie n c e s et ses co n clu sion s. L e rc lig ie u x pensait en e ffe t r e tr o u v e r saint
L ou is en S y rie ( d ’oú son itin é ra ire d e re to u r p a r le C aucase, la T u r q u ic et la C ilic ie ); mais, en
a rriv a n t à T r ip o li, le m in istre p ro v in c ia l le retin t c o m m e lec te u r, et il d u t e n v o y e r sa relation
au r o i d e F ra n c e pa r 1’in te r m é d ia ir e du e le re G ossct, le q u e l avait passé p lu sie u rs m ois à la
c o u r d e S a rta q ou dans une fa m ille a lle m a n d e fix é e a u p res d e la V o lg a , en a tten d a n t le retour
d es F ran ciscain s. C ette rela tio n , é d ité e d e n o m b re u s e s fo is, se tr o u v e en p a r tic u lie r au 1.1 des
S in ic a Fra nciscan a, p. 147-332; la tra d u ctio n la m ieu x a n n o té e est c e lle d e Fr. Risch, Wilhelnt
von R u b ru k , Reise zu den M o n g o le n (1253-1255), L e ip z ig 1934. á q u o i il c o n v ie n t désorm ais
d a jo u te r le trè s im p o rta n t c o m m e n ta ir e d e P e llio t, R e ch erch es s u r les c h ré tie n s d'Asie centrale
et d 'E x trê m e -O rie n t, p. 75-235.
62 C est I in te r p r e ta tio n du P. C h ry s o lo g u s S c h o llm e y e r , q u i a m is e n é v id e n c e que
R u b ro u c k se p r o p o s a it un but m is s io n n a ire et non d ip lo m a t iq u e : U ie m is s io n a risch e Sendung
des fra te r W ilh e ln t vo n R u b ru k ( O s tk irc h lic h e S tu d ien , IV, 1955, p. 138-146), et D ie Missionsfahrl
B ru d e r W ilh e lm s v o n R u b ru k zu den M o n g o le n (Z e its c h rift fU r M is s io n s k u n d e und Retigionswis-
senschaft, 1956, p. 200-205). E s p rit cu rieu x et b o n le ttre , R u b r o u c k sut d a ille u rs o b s e r v e r et
m è m e tir e r d e son v o y a g e d es c o n c lu s io n s d e c a r a c tè r e g é o g r a p h iq u c : c e s t lui qui r e c o n n u t
dans la m e r C a s p ie n n e une m e r fe r m é e et n on un g o lfe d e l'O c é a n s c p te n lr io n a l, ce qui trans-
fo rm a it 1'idée q u o n se fa isa it d e l'A s ie ; il eu t a v e c R o g e r B a c o n un e n tr e tie n d o n t celui-ci
ren d c o m p te (cf. Q u e lq u e s o b s e rv a tio n s du m o in e B a co n to u c h a n t les p a rties septentrionales du
m ond e, dans P. B e r g e r o n , Voyages fails p rin c ip a le m e n t en Asie dans les X l t ‘ , X l l l ‘ , X IV ', et XV‘
siècle, La H a ye, 1735, II, 2« p a r tie ; e t B a c o n , O p u s m ajus. éd . B r id g e s , I, p. 305, 354-355, etc.).
S u r les c o n c e p tio n s d e R u b ro u c k r e la tiv e s aux M o n g o ls , cf. les r é fle x io n s d e B ezzo la . op. cit.
p. 172-182.

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LA C0NQUÊTE MONGOLE ET LES MISSIONS 81

Les Allemands signalés par André de Longjumeau avaient quitté Talas


oú il ne put les rencontrer; ils avaient été transférés en Dzoungarie, à Bulac,
pour exploiter les mines d ’or et fabriquer des arm es63: Rubrouck demanda
1autorisalion à Mõngkà de revenir pour desservir cette communauté de
mineurs et de forgerons qui avait besoin d u n prètre - mais il nest pas
exclu qu elle en ait déjà eu un Des eleres hongrois sétaient mis en devoir
de donner à leurs compatriotes un minimum de secours religieux:
Rubrouck, à leur demande, leur fabriqua des livres. II rencontra à la cour,
et à Karakorum , des Français capturés en Hongrie (la lorraine Paquette de
Metz, 1’orfevre parisien Guillaume Boucher, le neveu de Tévêque normand
d un siège hongrois), des Hongrois, un Anglais, des Allemands; il célébra
pour eux la messe, administra des baptêmes et donna même le viatique à
Guillaume Boucher. II eut à résoudre des cas de conscience, en particulier
lorsqu il confessa les serviteurs des Mongols, obligés à voler pour vivre, et
les soldats au service mongol. Les prêtres grecs interdisaient 1'usage du
koumiz et des viandes da n im au x abattus selon les rites «p aien s»;
Rubrouck (qui prit goút au lait de jument fermenté, au point de regretter
que Baiju lui ait offert du vin au lieu de koumiz) apaisa les scrupules de
ceux qui ne savaient comment se passer de cette boisson et de ces vian­
des64. Aux Mongols même, il donna des éclaircissements sur la foi chré­
tienne, expliquant les images de ses livres à Sartaq et à Móngkà - à d ’autres
aussi, sans doute - se prêtant à une discussion théologique oú il eut à prou­
ver 1'existence de Dieu au nom des Chrétiens et des Musulmans, à 1’encon-
tre des Bouddhistes. II s’intéressa vivement aux chrétiens de rite grec
(Alains, Russes, Géorgiens) ou arménien auxquels il essaya d a p p o rte r quel-
que remède dans 1'isolement oú ils étaient tenus par les Nestoriens qui
auraient prétendu leur imposer un rebaptême avant de les admettre à leurs
offices65. D'ailleurs, le compagnon de Rubrouck, Barthélémy de Crémone,

65 Les in d ica tion s que don n cn t Ru brou ck : un m ois et dem i à 1'est de Talas (d e la vallée
du Talas à la D zoun garie, on pourrait c o m p te r cette du rée de voyage, en core que M. Lech ait
signalé, dans son é d itio n d'A l-’U m ari ( Das M ongolische W ellreich, p. 307), toute 1’im précision
dc ce m o d e d é v a lu a tio n selon le véh icu le u t i l i s é . . . ) . paraissent co n ven ir à cette nou velle
localisation. B olac (o u B ola i) serait 1’actuel Po-lo (m o n g o l Pulad) dans le Borotala.
44 Un M usulm an qui vou la it re c e v o ir le b a p tèm e y renonça devant la p ersp ective de se
voir interdire le k ou m iz...
♦•R u b rou ck , passim, (n ota m m en t, S inica franciscana, I, p. 217. 280. 299, 305, etc.).
R u brou ck se lia. pendant son séjour, avec un m oin e arm énien, Serge, venu de T e rre Sainte oú
il était erm ite, sur la fo i d une vision, p ou r baptiser M õngkà. Celui-ci, d ailleurs, exposa à
Rubrouck les raisons d e ses doutes en m atière religieuse. Cependant, si nous en croyons
I'A rm én ien H aython . le Khan sc laissa co n va in cre par le roi H éthou m I " d'Arm én ie. lequ el se

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82 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

effrayé par la perspective d'un long trajet à accomplir dans les conditions
très dures qui avaient été celles de laller, obtint la permission de restei à
K arak orum Ml: la desserte de tout ce groupe fut donc encore assurée quel­
que temps après le départ du Flamand.
La principale activité de Rubrouck, et le principal résultat de son
voyage, concernent les Chaldéens d'Asie centrale67. Le missionnaire cons­
tata avec peine la dégradation de la vie chrétienne parmi ceux-ci, 1’igno-
rance et les tendances à 1’ivrognerie, mème chez les prêtres, une polygamie
occasionnelle, les conditions parfois irrégulières des ordinations, consé-
quence d u n encadrement religieux insuffisant et de 1’éloignement oü se
trouvaient les églises d Asie centrale et orientale par rapport à leurs centres
intellectuels mésopotamiens. Mais il découvrit avec admiration la diffusion
des communautés chrétiennes dans un espace aussi vaste, 1’existence de
chrétiens jusque dans la famille régnante, la fidélité des Chaldéens à leur
liturgie syriaque. J. Dauvillier a constaté que, malgré sa science, qui rendit
grand Service aux Chrétiens lors des arbitrages et de la fameuse discussion
théologique oü le Franciscain démontra qu'il fallait substituer des argu-
ments philosophiques aux arguments d'autorité pour discuter avec des
incroyants, Rubrouck n avait pas compris, par exemple, que ses interlocu-
teurs révéraient la croix de la Parousie au lieu de celle de la Passion, ce qui
les amena à faire ôter le Crucifié de la croix fabriquée par Guillaume Bou-
cher. II trouva parmi eux une grande bonne volonté, notamment à légard
de la primauté pontificale qu ils ne firent pas de difficulté à reconnaitre; et
il fut admis à célébrer dans leur église, alors que, semble-t-il, on en refusait
1accès aux autres non-chaldéens. Et il aurait voulu que les Chaldéens, gens
plus instruits que beaucoup d autres et comme tels chargés d élever les
enfants des nobles mongols, fussent capables d attirer ceux-ci à la foi par
leur science et par leur exemple. II rencontra d ’ailleurs parmi eux, semble-
t-il, au moins un personnage venu dailleu rs (un chrétien de Mésopota­
mie?); et 1ignorance des « N e s t o r ie n s » n’était pas telle q u ’ils ne fussent
capables de mettre sur pied une petite chronique de Thistoire du monde.

rendit auprès de lui en 1255 (R ubrouck le manqua en cours de route), de se faire administrer
le baptem e par un évêque arm énien de la suite du roi. Sa principale épouse dailleurs, Cotota.
etait chrétienne et Rubrouck la vit suivre les offices de la semaine sainte.
Ceei pour raison de santé, en attendant la venue de qu elque am bassade qui voyagerait
plus lentem ent.

Cf. J. Dauvillier, G u illa u m e de R u b ro u ck et les com m u n a u té s chaldéennes d Asie centrale


au M oyen-A ge dans L O r ie n t syrien, II, 1957, p, 223-242; A.-D. Von den Brincken, E in e chrisM-
c h e W e U c h m n * von Qara Q o r u n , W ilh e lm von R u b ru ck O. F. M. u n d der N e s to ria n is m u s . dans
A rc h iv fu r K u ltu rgesch ich te, L III, 1971, p. M 9 .

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I-A ( O N O D f í li'. M O N íiO L E ET LES MISSIONS

Au fond, cct am bassadeur m algrc lui, 1'uri des très rares missionnaires
du Moyen Age à nous a v o ir laissé la description de son labeu r personnel,
avait réalisé ce que d'autres auraient voulu ou avaient espéré faire : se n lre -
tenir de sujets religieux avcc le Khan lui-mòme, et négocier avec les prélats
nestoriens de la c o u r m o n g o l e . . . Et encore n'était-il pas mandaté pour ce
faire.
La m êm e fortunc devait étre réservée au Dominicain David d Ashby,
envoyé p ar le légat T h om as Agni de Leritino a H ülàgü lors de la descente de
celui-ci en Syrie m u sulm an e : chargé de sonder les intentions des M ongols
à 1’égard des Francs et de les détourner d attaquer les Etats latins, il devint
1un des familiers de n i-K h a n , qui lui laissa entendre que ses sympathies a
1égard du christianisme pourraient le m ener jusqu au baptême, et de son
successeur Abaqa, et ceci pendant de longues années68.
L'effort des missionnaires paraít s’étre ralenti pendant les années 1256­
126469, ou la menace d une nouvelle offensive des M o ngols paraissait se
dessiner sur toutes les frontières de la chrétienté. II allait repren dre dans
des conditions différentes au temps d'Urbain IV.
Toutefois, les missionnaires étaient loin d'être les seuls à avoir volon-
tairement choisi de se rendre chez les Tartares. A côté des chrétiens dépor*
tés, artisans épargnés lors de la conquête pour être envoyés dans les mines
ou dans les villes, esclaves altribues à des maitres qui les avaient em m enés
dans leurs apanages, qui ont été parfois de précieux auxiliaires p o u r les
premiers missionnaires (R ubrouck fait un bel éloge de G uillaum e Boucher,
qui le seconda de tout son pouvoir), d a u tre s Francs avaient trouvé a
s e m p lo y e r dans 1'empire mongol. Déjà, en 1241, on avait eu la surprise
d arrêter en Autriche un messager (ou un espion) à la solde des M ongols
qui, Anglais de naissance, établi en Terre Sainte après avoir été banni de sa
patrie, vagabondant à travers 1'Orient après s’être ruiné au jeu, avait fini par
se mettre au service des Tartares, quelque part en Asie centrale70. Tcl autre,
comme le Théodule qui se fit passer pour un am bassadeur du légat Eudes

** Cf. infra, p. 101.


69 En 1258, ce p e n d a n t, une bu lle C um hora undecim a, est p ro m u lg u é e en fa v e u r des
D om in icain s et d e s F ra n c is c a in » p a rla n t cn m ission ; e lle vise l'O rien t, m ais ne p e rm e t aucune
p récision (S b a ra lea , II, 285; R ip o ll, I, n " 3 l l : la g ra p h ie ca p tiv o ru m apud T u rcos d e la pre-
m ière d e ces é d itio n s d o it ê tr e lue apud Tartaros, c o m m e dans la se c o n d e ). II ne s’agissait
plus, en tou t cas, d e m ission s a u p rès d'u n so u vera in d é te rm in é.
70 L e ré c it d e ses a ven tu res fig u re dans la le ttre d ’Y ve s d e N a rb o n n e r e p ro d u ite dans
Math. Paris, éd. Lu ard, IV. p. 270-277. II «e ra it cu rieu x q u e le B asile, fils d un Anglais. né en
H on grie, q u e R u b ro u c k co n n u t á K a ra k o ru m , eút été son fils.

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r

84 m PAPAI/TÉ ET LES MISSIONS D O R IE N T AH M O Y P N AC.E

de Cháteauroux, netait peut-ètre qu'un vulgaire escroc 1 Mais d;»uti,.N


sengagerent com m e mercenaires dans les a rm é c s m o n goles nous cn r,.((
contrerons en Chine c o m m e en Perse - tandis qu e des m archands p.utaK,n|
sur les routes de 1'Asie, à la recherche de profits de toute sorte \ sans IléR(|
ger ceux qui allaient trouver à s'em p loy er aup rè s des M o n gols cornnn*
interpretes, scribes ou agents de Tadministration m ongole. Maichands, |t.s
deux Vénitiens M affeo et N icolo Polo, qui revinrent d u n long sejour tiaiis
1’em pire mongol (1261-1269) p ar 1'Orient latin, firent savoir au légat p«iniih
cal, Tedaldo dei Visconti, q u ’ils rencontrèrent à Acre, qu e le successeur de
Mòngká, son frère Qubilai, s était enquis aup rè s d eux de la rcligion des
Francs et les avait chargés de d e m a n d e r au pape 1envoi de cent homines
instruits73: la paiza d or dont ils étaient porteurs les accréditait en qiialitc
d 'a m b assa d e u rs74. Le légat s’intéressa à cette requète; mais c est sculcnient
après son élévation à la dignité pontificale qu avant de quitter 1’Orient il
donna aux deux Vénitiens, q u a c c o m p a g n a it leur fils et neveu Marco, deux
Dominicains, le célèbre G uillaum e de Tripoli et N icolas de Vicente, pom
faire la route avec eux jusqu à la résidence du Khan. Les deux frères prè-
cheurs, cependant, apprenant 1’a p p ro c h e des troupes du sultan Baibais qui
infestaient alors les frontières mongoles, auraient, selon M a rc o Polo, pre-
féré renoncer à leur voyage ( 1271)75.

71 N é á A cre, se disant ele re, se faisant a p p e le r R a v m o n d . il a b a n d o n n a la mission


d ’A n d ré d e L on g ju m ea u , d o n l il faisait pa rtie, a p rès s ê t r e p r o c u r e d e s I n s t r u m e n t s dc mu>i
que. II vin t à la c o u r m o n g o lc . sc d o n n a n t p o u r un e n v o y é du lég a t E u d e s d c Cháteauroux ct
ayant p e rd u en ro u te ses lettre s d e c ré a n c e . M ò n g k á lui c o n fia u n e le t t r e p o u r le roi dc
F ran cc. d e s ca d e a u x p o u r celu i-ci, la paiza d o r qu i la c c r é d it a it c o m m e am b assa d eu r. Mais.
passant à N ic é e , il vo u lu t a b u s e r e g a lc m e n t Jean V a ta tz è s q u i le d é m a s q u a e l lc lit jeter cn
p r is o n ; R u b ro u c k eut co n n a issa n c e d e c e tte a v e n tu r e à son r e to u r. (S in ic a Fr., I, p. 253-254)
11 Cf. L u c ia n o P ctech , U s m archan d s ita lien s dans 1‘e m p ire m o n g o l, d a n s J o u rn a l Asialique.
250, 1962, p. 549-574.
7) II c o n v ie n t d e n o te r q u e le fr è r e d e Q u b ila i, A riq -b ü k à - d o n t G u illa u m e B ou ch er était
I es c la v e — r e s ta it lc m a itre d e la M o n g o lie o ú il a va it é té p r o c la m é K h a n ) il c o n s e rv a i! Kara
k o ru m . R u b ro u c k la v a it ir o u v é re s p e c tu e u x du c h ris tia n is m e . b ie n q u i l 1'eüt en te n d u donner
une le ç o n d c c o u r to is ie à son c o m p a g n o n . 1’a r m é n ie n S e rg e . q u i s e t a it m o n tr é in ju riei»
e n v e r s d e s M u su lm an s.

74 N o u s n a v o n s au cu n e ra is o n d e d o u t e r du t é m o ig n a g e d e M a r c o P o lo (il existait deu*


paiza, q u a lifié e s d c « t o l a d o r o - , d an s les b ie n s d e s P o lo d é c r it s p a r les inventaires après
d é c è s ). O n sait c e p e n d a n t q u e le khan M õ n g k à s e ta it a p e r ç u d e c e q u e les m a rch a n d s

essa ya ien t d e se fa ire p a sser p o u r a m b a s sa d e u rs , d e fa ç o n à jo u r d e la paiza et d es a v a n ta g e s


c o rr e s p o n d a n ts (u sa g e d es rela is, r é q u is itio n d e v iv r e s ) au lie u d e se c o n t e n t e r d e la simpk
tamgha.
” M a r c o P o lo fa it éta t d e s ca d e a u x , d e s le ttre s , e n v o y é e s p a r le p a p e au Khan. et dc*
p o u v o ir s c o n c e d é s aux d e u x r e lig ie u x ; o n a m is son r é c it en d o u te . L a c h r o n o l o g i e cn »

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LA CONQUÊTE M O N G O L E ET LES MISSIONS 8>

Quelques années après, les envoyés de 1'Il-Khan de Perse, Jacques et


Jean Vassali, des Géorgiens, firent état des rumeurs qui couraient en Iran
ou en G éorgie sur le baptêm e de Qubilai, en 1276-12777í\ La nouvelle était
sans doute erron ée : Qubilai, s'il avait des sympathies certaines pour le
christianisme - il était, lui aussi, fils d une chrétienne et, au cours des pre-
mières années de son règne, laissa une influence considcrable au Syrien
'Isâ, qui en profita p o u r o p p r im e r les Musulm ans - devait se laisser impré-
gner p ar 1'atmosphère bo u d d h iq u e ; et cest avec lui que la dvnastie mon-
gole, désorm ais installée à Khanbaliq (Pékin) et non plus à K arak orum
longtemps restée aux mains d ’un compétiteur, passa au bouddhism e. Mais
les vraisemblances, en ces premières années, n etaient pas à écarter, et
Nicolas III fut convaincu.
Aussi décida-t-il 1’envoi d ’une importante mission, constituée de Fran-
ciscains, dont trois notables théologiens, lecteurs dans les provinces de
Bologne, de Tuscie et de la Marche d Ancône, les frères G érard de Prato.
Antoine de P arm e et Jean de Sainte-Agathe, accompagnés de deux d is c r e tin .
Des privilèges exceptionnels leur étaient concédés, et ils étaient chargés
d une lettre à Qubilai, lui exposant les éléments de la doctrine chrétienne,
et le félicitant de son baptême. En cours de route, ils devaient inviter 1II-
Khan A b a q a à se convertir lui aussi. Et ils avaient la possibilité de sa d join -
dre des frères de leur ordre, de conférer 1habit de celui-ci à des personnes
idoines, de réconcilier avec 1’Eglise catholique les archevêques et évêques
d autres rites
II n'a longtem ps pas été possible d'idcntifier cette mission à celle qui
reçut un laisser-passer conservé aux archives du Vatican. parce que l o n
croyait q u e ce laisser-passer émanait de 1'II-Khan Argun et datait de 1291.
En fait. il é m a n e d 'A b a q a et peut donc être daté, selon la concordance du
calcndrier m on g ol et du calendrier julien. soit de 1267, soit de 1279 . II est

soigneusement vérifiée. e, mise en rappor. avec les dépl«enjen.s


M H L a u ren l, Grégo.re X e, M arco M o (1269-1271), dans Eco le franç. de Rome. Milanges
dúrckéologie el d'histoire. t. LVI1I. 1941-1946, p. 132-144. 75 t in?) dans
’ • Ch.-V. Lan glois et Ch K oh ler, Lemes inédiles concem an, les Cro,sades (1275-1307) dans
Rihl f i a ru ,„c i tt 1S91 d 56 et suiv. - L eu r re to u r fu r re ta rd e par suíte de 1e le c tio n
B M Ecole des Charles. L II 189 p. 5 6 e l su ^ avait reçus. C f. Soran2o. II
d un nouveau pape, N icolas III, succédant a

0Pat° M r PH 23<;S X X X II d 210 (G é r a r d d e P ra to éta it un am i de jeu n esse d e S a lim b e n e ).


M G H , SS, X X X II, p. 2 l 29Q Ier 22 a vri, 1278) ^ 5
71 Ree N ic I I I n° 232-238, (Sbaralea, III, P- ***> ' . __
lellres p oritificales ne d o n n en l les noms c,ue de cinq Fran cis c a in , Esl-ce SaUmbene <,u. a c m

â ,0 " V l é. l Cn Ti. w. C le a v e s , T ro is d ocam erus m o n g o ls des a rcH i.es secre.es Varicanes.


dans H a rv a rd J o u rn a l o f c s ia tic studies, XV, p. 43

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„„ u PAPAUTÉ ÉT LES M ISS.O NS DOR1ENT AU M O Y E N-AG E
oo
mission d e v ê q u e s ( m ar-hasia) dirigée p a r un pcrsonnage
accorde « a une mis (B a r A eirqu n ).., selon les term es ut.lisés par

qUp n“ ^ PL-aSSimilation des envoyés du pape. dotés de pouvoirs excep.


r V d e s évèques ne sem ble pas à e xc lu re »'. Aussi croyons-nous püu.
tionnels, a de q . mission de G é ra r d de Prato qui benéficia de
V° Írsaa“ ^ n d u T Et l t s som m es tentés de pen se r que ce documenl
(adressé au gouverneur m ongol d'Asie m in e u re ) perm it à la m.ss.on de sen
etourner en Europe. ayan, peu.-être appris d ’A b a q a q u e son oncle navai,
pas ernbrassé le christianisme. voire après a v o .r ete p o h m e n l econdu.te par
1’Il-K h an 82. Les pouvoirs accordés p ar Nicolas III en vue e cons i uer en
Tartarie une église unie à R om e n a v a ie n t certainem ent pas ete utilises.
Quelques années devaient encore d e c o u le r avant qu un nouveau mes-
sage de Qubilai, transmis par 1’Il-Khan Argun, réclam ât à n ou veau 1envoi
de missionnaires latins. Le choix que fit N icolas IV du Franciscain Jean de
Montecorvino, investi d'une légation apostolique, tom bait sur un mission­
naire déjà expérimenté que le pape munissait de lettres de recommanda-
tion et de pouvoirs auprès de tous les princes qu il était susceptible de ren-
contrer (Tem pereur d Ethiopie aussi bien qu e le khan Q aid u, qui dominait
alors le Turkestan), ainsi que p o u r les patriarches, a rch evêqu es, évèques et
prélats de toutes les églises orientales. La g u e rre qui éclata en 1287 entre
Qaidu et Qubilai, laquelle décida les Polo à p re n d r e la voie de mer pour
aller de Chine en Perse, le décida lui aussi à o p te r p o u r la voie de mer, par
le golfe Persique et 1'Océan Indien. Son départ, en juillet 1289, ouvrait une
nouvelle période de 1'histoire des missions m édiévales. E n m ê m e temps, il
marquait la fin de 1'époque oú la Papauté pouvait c a re s s e r 1’e s p o ir de faire
a m e n e r le K han des M o n g ols à la foi et, avec lui, les p e u p le s d e son empire.

b) La m ission chez les Tartares du n o rd

La division en grands c o m m a n d e m e n ts des é lé m e n ts de 1'empire mon­


gol qui faisaient face au m o n d e latin rem ontait a u x a n n é e s antérieures à

P. Pelliot, dans Comptes rendus de iAcadém ie des Inscriptions el Belles-Lettres, 1922,


p. 53.
“ B. R ob erg, Die Tartaren auf dem 2. K on zil von Lyon, 1274 ( A n n u ariu m historiae concilio-
rum, V, 1973, p. 279, n. 214), a ra p p o rté ce d o c u m en t à 1'époque d e 1267, tou t e n re c o n n a issa n t

qu il ne se relie à aucun fait connu à c e tte date.


« S alim bene é c r i t : rever si sunt itaque fratres m inores a Tatlaris valde sospiles. el >nul'“
dicebant de eis. Qu ils fussent sains et saufs ne p ro u v e pas q u e le u r m issio n ait été un
su ccès...

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LA CONOUÊTIÍ MONGOLE k l LES MIVSIONS 87

1240, quand Õgódài avait remis a Bafu le commandement de 1'arméc qui


opérait sur la Volga, en Crirnée, a la frontiere polonaise et hongroise, et à
Cormaqan celui de 1’armée doril Baiju lut le chef apres lui. Toutefois, cest
seulement avec larrivée de Hiilàgü au sud de la Caspienne que se dessine
vraiment la séparation des deux ernpires : celui de la Horde d ’or, que les
Occidentaux différencienl mal de celui de la Horde Blanche situé plus à
l’Est, et celui des Il-Khans qui gouvement l Azerbaijan, les deux Iraq, le
Khorassan et 1’Asie mineure, depuis leurs résidences voisines de Tabriz et
de la steppe du M o gh a n M\
Pour les Latins, 1’empirc mongol avait jusque la représenté une entité
unique, et nous venons de voir que. bien apres 1260, ils essaient encore
datteindre directement le grand-khan par dela les territoires soumis à ses
parents. Mais la différence entre* la politique suivie per les Tartares du
Nord et par ceux de Perse, donne vite une allure différente aux missions
qui continuent à se proposer la conversion des uns et des autres, tandis que
les perspectives antérieures a 1240 - conversion des Musulmans. négocia-
tions pour 1'Union - réapparaissent peu a peu. Certes, la découverte des
Nestoriens d Asie centrale, et la présence de nombre dA rm éniens sur les
routes de celle-ci et au Qipéaq, font que les tentatives du n io n nont plus
seulement pour théâtre les partes orientales, tandis que, jusqu à leur islami-
sation, les Mongols représentent au nord comme au sud de la mer Noire,
des « p a ie n s » à évangéliser. Reste que les deux parties de 1’empire mongol
vont, par la force des choses, présenter aux missionnaires des conditions
assez voisines de ce qu'elles étaient avant 1'arrivée des Mongols; mais il fau-
dra plus d ’un demi-siècle pour que ceci soit parfaitement sensible.
La mission du Qipéaq a-t-elle commencé au moment oú Rubrouck
essayait d o b te n ir de Sartaq le droit de séjourner dans ses terres pour y
prêcher, ou bien est-ce en 1258, ou plus tard, que les premiers missionnai­
res y eurent accés? La question a déja été posée84; elle ne comporte pas dc
réponse précise : un évêque franciscain évoquait en 1322 les quelque qua-
tre-vingts ans depuis lesquels les Frères Mineurs évangélisaient cette
région85. Ceci laisserait entendre que, dès le lendemain de 1’expédition des

” Cf. B e rto ld Spuler, D ie Goldene Horde. D ie M on g olen in Russland, 1223-1502, 2 ' éd.,
W iesbaden, 1965; Die M on g olen in Ira n, 2* éd., B crlin 1955. - N ou s e m p lo ie ro n s co u ra m m en t
lc nom d e Q ipôaq p o u r d ésign er la Tcirtaria Aquilonaris, le pays soum is à la H o rd e d ’Or.
M Cf. Spuler, D ie Goldene Horde, p. 232-233.
*5 G olu b ovich , III, p. 48. - Les p riv ilèg es co n céd és en a vril 1258 aux Franciscains, ct en
m èm e tem ps aux Dom inicains, son l conçus cn term es très généraux. Les nom s des Tartares,
des G ran ds-H ongrois, des captifs ch ez les Tartares figu rent à cò té de ceux des Ethiopiens,

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88 I Â PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D'ORIENT AU MOYEN-AGE

Mongols cn Hongrie et com m e sur les traces de I arm ée qui se repliait


entre le Don et la Volga, les missionnaires franciscains auraieni repris |a
tâche interrompue par les Dominicains de Comanie, ce qui est peu viaisem-
b labi e. Rubrouck ne signale pas avoir rencontré dc religieux latins à Sol-
daya, ni ailleurs; Plancarpin n'avait rencontré, en 1247-1248, d a u tre s Latins
que les quelques marchands q u ’il signale à Kiev.
Mais il est probable que Tobstacle que voyait R ubrou ck à la rcception
de missionnaires en pays tartare, était moins décisif qu il ne le cioyait; la
confirmation, par 1'Arménien Jean, de la nouvelle du baptêm e de Sartaq
était encourageante86. Aussi nous parait-il vraisem blable d admettre que le
travail missionnaire avait repris dès 1258.
D ’autant plus q u ’en 1278, le ministre provincial des Franciscains de
Hongrie était à mêm e de signaler au pape Nicolas III les nombreuses
conversions opérées par les Franciscains résidant chez les Tartares; le
pape, se préoccupant de permettre aux religieux de recevoir les ordres
sacrés, envisagea de rétablir un siège épiscopal détruit par les Mongols et
dans le diocèse duquel il n'y avait plus ni évêque, ni habitants catholiques
depuis plus de quarante ans : il s’agissait évidemment de 1'ancien évêchè
des Comans. Il ne sem ble d a ille u rs pas que le légat pontificai, Philippe de
Fermo, ait donné suite à ce projet87. Mais le fait qu'il s'agit de religieux
venus de Hongrie, et le projet lui-même, font apparaitre cette mission fran-
ciscaine chez les Tartares, com m e la résurrection de la mission de Coma­
nie.
Seulement, la Hongrie n 'allait pas rester longtemps la base des mis­
sionnaires, m êm e si beaucou p de ceux-ci, et des plus notables, allaient res­
ter h on gro is88. Les relations de voisinage entre H on grois et Mongols, bien
que traversées de quelques conflits armés, ne sont pas à e x c lu re 89, et il était

N ubiens, In dien s, Sarrasin s etc. Quant à ceu x c o n c é d é s en fé v r ie r 1258 au x F rères Prêcheurs


p a r r in te r m é d ia ir e du p r o v in c ia l d e P o lo g n e p o u r é v a n g é lis e r les R u sses et les «p a ie n s », ils
p eu ven t v is e r les L ith u a n ien s c o m m e les T a r t a r e s .. .
** Les d é ta ils d o n n és par le «c h a p e la in d e S a r ta q » : la g u é ris o n m ira c u le u s e de ce der­
nier, o b te n u e pa r les p r iè re s des A rm én ien s, le b a p tê m e d e 50.000 T a rta res , sont évidemment
sujets á c a u tio n ; ils fig u ren t dans la Vila lnnocentii IV (B a lu z e , Misc., V II, p. 398).
’ 7 Reg. N ic. I I I , n° 183 (S b a ra lea , III, 347). P e u t-être la c la u se d e la le ttre pontificale,
o rd o n n a n t de s assu rer d e 1’e x is te n c e d e r e v e n u s s u f f i s a n t à un é v ê q u e , ne com portait-ellc
pas d e ré p o n s e fa v o r a b le .. .
" T e l le cu sto d e Ladislas. a u teu r d e la le ttre q u e nou s a llo n s citer.
** N o s tex tes nous fo n t p a rto u t c o n n a itre , p o u r une é p o q u e p o s té r ie u r e , la ro u te reliant
Sarai, Astrakh an ou C affa à la P o lo g n e m é r id io n a le (L w ó w , C r a c o v ie ) Cf Spuler. op- cit >
p. 401-402.

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LA CONQUÊTE MONGOLE ET LES MISSIONS 89

certaincment possible d atteindre les résidences des princes mongols a par­


tir des cols des Carpathes. Mais, depuis le milieu du siècle au moins. les
Occidentaux avaient pris 1'habitude de navigucr sur la mer Noire - les mis­
sionnaires dominicains destinés à la Grande-Hongrie n’auraient- ils pas eux-
mêmes, bien avant 1240, pris la route dc mer de Constantinople á Matrega?
Rubrouck, déjà, débarque à Soldaya, en Crimée, pour se rendre auprès
de Sartaq; et il a été précédé par des marchands qui ont quitte Constanti­
nople avant luiyo. Mais, très vite, cest Caffa qui devient le port que fréquen-
tent le plus souvent les Occidentaux : un représentant du khan Bàrkà auto-
rise vers 1266 les Gênois à établir un entrepót dans un terrain qu il leur
concédait dans cette ville oü, bientôt, on voit instrumenter les notaires
gènoisy|. Les missionnaires allaient suivre la mème route, et la Crimée
devient p o u r eux le chemin normal vers les territoires de la H orde d or. Et
le prem ier document qui émane des missionnaires latins du Qipcaq (si l’on
en excepte la lettre déjà citée du ministre provincial de Hongrie que nous
ne connaissons que par la réponse pontificale), la lettre de frère Ladislas,
custode de Gazaria - ce terme désignant la Crimée et surtout sa partie
m éridionale<,2 - a été écrite à Caffa, le 10 avril 1287; elle était adressée au
frère Laurent, envoyé par les Franciscains de Tartarie auprès du ministre
général, p o u r lui donner des nouvelles95.
Celles-ci étaient fa v o ra b le s : une « impératrice», Yailaq, femme de
Nogai, avait été amenée, lors de sa visite du couvent franciscain de Solgat -
la capitale m ongole de la Crimée (Eski-Krim) - à se faire instruire dans la
foi, et elle avait reçu le baptème dans la ville de Q ir q y e r oü elle avait fait
édifier un baptistère. Ce baptème, très solennel, administré par Ladislas et
par le gardien du couvent de Caffa, avait suscité la jalousie des prélats et

90 S o ld a y a avait un m o m en t été o c cu p ée par les Tu rcs Selju qides, après la co n q u ête


q u ils a va ien t ré a lis é e d e S in ope, sur la c ô te sep ten trion a le d e 1’Asie m in eu re; et une rou te
S in o p e-S old a y a est c ité e pa r R u b rou ck (cf. Cl. Cahen, Le com m erce anatolien au début du
X I I I * siècle dans M élanges L ou is Halphen, p. 94-95).
’ ■ B ratian u Rech erch es su r le com m erce génois de la m er N o ire au X I I I * siècle. Paris, 1929,
p. 205- S p u le r o p c it p. 392 et 611; M. B alard, Cênes et lO u tre -m e r, I, Les actes de Caffa du
notaire L am berto di S am bu ceto 1289-1290. Paris-La H aye. 1973 (D o c u m en ts et rech erch es sur
I e c o n o m ie d es pays b y z a n tin s .. . et leu rs rela tio n s c o m m e rc ia le s au M oyen -A ge, X II).
En d e h o rs d e la Gazaria (c e n om est tiré d e celu i des K h azars), le t a t goth restait vassal
du K han (la c a p ita le de la G o th ie étant au X V ‘ siè cle T h é o d o ro , alias M an gu p). Les M o n g o ls
sé ta ie n t su rtou t éta b lis dans la step p e du N o rd . a u tou r d e S olgat (cf. B retsch n e.d er, Mediae-
vai Researches fro m ce n tra l A sia tic sources, L o n d res 1888. II, p. 84).
« T e x te dans G o lu b o v ic h , II, p. 444. Les év én e m en ts qui y sont ra p p ortés datent so.t de

1286, soit d e 1287.

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90 LA PAPAUTP. BT I ILS M ISSIONS D O H IH N T Ali M O YEN AGE

des clercs arméniens et grecs c|iii étaient cependant présenls. Un notah|t.


mongol, fils d ’un «comim iudanl dc mille». s’était lui aussi lait baptiser, e-n
un lieu qu'on a identifié à Vicina, aux bouches du D a n u b e 1
'4; ct dautres
baptêmes avaient eu lieu.
De ce fait, le nom bre des résidences Iranciscaines était déjà important:
des couvents s’élevaient dans les villes côtières de Soldava (celui-là est
attesté dès 1280) et de Cafla (attesté en 1287 et 1289); un autre à Solgai;
probablement un quatrièmc à Sarai, la lettre de Ladislas citant un ancien
gardien de ce couvent; des locu, simples résidences sans doute, à Qirq-ycr
et à V icu m ou Vicina9S.
Ladislas faisait part du décès de ccrtains m em bres de la mission:
1'ermite Tlieu, le Franciscain Urbain, qui était revenu du nestorianisme au
catholicisme, le clerc Nicolas, qui gardait avec 1’crmite une chapelle Saint-
Nicolas, enfin 1’interprète de Ladislas, le Hongrois K a rich in u s . Ceei lui don-
nait 1’occasion de réclamer 1'envoi de nouveaux missionnaires.
Parmi ces succès, il en était un qui était particulièrement significatil: la
construction du couvent de Solgat, de son église et de son clocher, avait
suscité une vive opposition de la part des Musulmans du lieu, qui avaient
détruit 1'église et la cloche. Les Franciscains en avaient appelé à la cour de
Sarai, d ’oú le frère Moíse était revenu trio m p h a n t: l'« e m p e r e u r » Tòla-Buqa
et son m entor Nogai avaient dunné raison aux Franciscains, envoyé un
représentant qui, bien que musulman lui-mème, s’était fait précéder d une
croix et avait ordonné de reconstruirc 1'église en y plaçant trois cloches au
lieu d u n e 96.
N o gai était converti à l lslam; néanmoins la loi m ongole exigeait le res-
pect de toutes les religions. Et les Franciscains de Khazarie expérimen-
taient déjà ce qui marquait la nouveauté de la situation missionnaire : alors
que, dans les dominations musulmanes, la sonnerie des cloches était inter­

,4 L e texte porte Vicum el P elliot u exprimé' qu elques réserves sur 1’identification avec
Vicina ( Notes sur l'histoire de la Horde d'Or, p. 77-78): e n c o re byzantine au X I I I e siècle. cette
v ille n aurait été occu p ée par les M ongols q u ’en 1336-1338 (V. Laurent, Le métropolite de
Vicina Macaire et la prise de la ville par les Tartares, dans Revue hist. du sud-est européen,
X X III, 1940, p. 225). Un « c h ilia r q u e » m on gol n'aurait don c pu y résid er en 1286. Sur l’identin-
calio n de Vicina (G olu bovich , II, p. 572-573), v o ir aussi V. Laurent, Un évêque fantôme ou la
Bitzina taurique, dans Echos áOrient, X X V III, 1939, p. 101-103 et C. C. Giurescu, The Genoese
and the Lower Danube in the X l l l 'h c. dans Journal of Econom ic history, V. 1976. p. 588.
,s Du m oins savons-nous qu'il y avuil un locum à V icina en 1334. Sur les villes de Crimée
ou les m issionnaires étaient étublis, cf. S. Szyszm an, Les inscriptions funeraires découvertes
p a r Abraham Firkowicz, dans Journal Asiatique, C C X L III, 1975, p. 231-264.
94 L a ffa ir e était d ailleurs loln d 'è tre term in ée. Cf. infra, p. 158.

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IA CONQUÊTE MONGOLE ET LES MISSIONS 91

dito, ct inleidile aussi la prédication aux musulmans, les souverains mon­


gols, mème musulmans, laissaient cette prédication libre. Et la femme de
Nogai elle-mème se laisait baptiser.
loutelois, la lettre de 1287 nous met déjà en présence d ’une forte pré-
dominance musulrnane en pays Qipcaq. La dynastie régnante elle-mème -
après avoir pcnché du côté du christianisme avec Sartaq, puis du còté
musulman avec Bàrkà, qui avait, semble-t-il, fait quelque prosélytisme, mais
était mort au bout de peu d années (1256-1267) - restait fidèle aux ancien-
nes croyances mongoles; mais elle n’hésitait pas a frapper monnaie en
employant des lormules musulmanes97. Parmi ses sujets «m o n gols», ou de
statut mongol, les chrétiens netaient pas rares; mais les Tartares du
domaine de la Horde d ’Or étaient surtout des Turcs, souvent plus ou moins
islamises. Les Comans, absorbés dans la masse tartare, comprenaient déjà
des éléments musulmans dont le prosélytisme navait pas été sans alarmer
Grégoire IX dès 1231gH; les Bulgares de la Volga et bien d autres prati-
quaient 1’Islam. Les progrès de cette religion allaient être un facteur dont
les missions du OipCaq devraient tenir compte.
D ’autrc part, la lettre de Ladislas nous met également en présence des
rivalites entre confessions chrétiennes pour attirer à elle les Mongols, sou­
verains ou notables. S il est question d'un Nestorien revenu à l union, Ladis­
las parle aussi de la jalousie de 1’archevêque des Arméniens et des Grecs.
Ces derniers, q u ’il sagisse des éléments byzantins qui avaient pu se mainte-
nir dans 1’ancienne Khazarie byzantine, ou des Russes, désormais sujets de
princes tributaires des Mongols, et jouissant de ce fait des avantages que
leur reconnaissaient la loi mongole, avaient très vite entrepris d'amener les
Tartares à la f o i : un évêché avait été fondé à Sarai dès 1265; les bonnes
relations nouées dès le temps de Bàrkà avec 1'empire grec de Constantino-
ple avaient permis à levèqu e Theognoste. persona grata à la cour du khan,
d e t re envoyé à Byzance et on enregistra de nombreux baptêmes, dont celui
d u n prince tartare (1298)". Quant aux Arméniens, il semble que, dès avant

•» S p u le r op c it p 211-219. Sur les circonstances de la d h é sio n de B árká à 1’islam, nous


nous pe. m etto n s d c r e n v o y e r à n otre édude. La con version de Berke e, les débuts de 1'islamisa-
„ o n de la H orde d O r, dans Revue des ètudes islamiques, 1967. p. 173-184 : le K h w a rezm - qu,
relevait de la H o rd e d O r - y jo u e un rô le capital.
- Raynaldus A,m ales ecclesiastici, 1231, § 40 (achat de Com ans ch rét.ens rédu.ts en
escU \age pa r d es «S a r r a s in s » qui les d é to u m e m e n t de fo>)-
^ S n u ler o p c it p 231 Cf. Philaret (d e T c h erm g o v), Geschichte der K irch e Russlands,
trad. B lum enth al, F rancfort 1872. I, p. 155-158. - Un basqaq reçoit le baptêm e dès avant 1262,
et les co n vera ion s se font n om b reu ses vers 1301.

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92 I A PAPAUTÉ ET LES MISSIONS U O KIRNT AU MOYEN AGE

la conquête mongole, ils aicnt commencc ü sc répandre au long dc la ruu,


qui, par la Crimée ct à travers la Comanie, attcignait la Hongrie. Leurs col/
nics sont, au X IV C siècle, très importantes cn Crimée, mais sans doute auss
dans bien d a u tre s régions du Qipéaq - nous les retrouverons dans |’ a s, .
centrale, ou la pierre tombale d ’un évêque arménien, datée de 1 324-132S
été découvertc dans le cimetière chaldccn dc Pispek, comme cn Extrêmc
Orient et leur installation en Pologne est egalement précoce : ils curent
dès avant 1356 un évèché à L w ò w 100. On leur connait des évèques a Sarai
un archevôquc à S o lg a t101. Et, dès 1254, c etait un elere arménien qui ctaii
venu annoncer à Alexandre IV le baptcinc dc Sartaq, dont il se disait le eha-
pclain, en laisant état des prières des Arméniens auxquels le prince mongol
aurait dú sa guérison m iracu leu se 11,2. Le prosélytisme arménien auprès des
M o n g ols était fort a c t i f : Rubrouck avait pu constater 1’ard eur de 1’apostolat
du moine Serge auprès de M õngká et, si ce dernier reçut effectivemment lc
bapteme, com m e 1’affirme Haython, c'cst un évêque arménien de la suite
du roi Héthoum l er qui le lui aurait administre. Les Franciscains n etaient
donc pas les seuls à essayer de gagner les princes m ongols : on les verra
même, en 1323, dénoncer les «schism atiqucs et h érétiqu es» comme les
pires ennem is des missions latines103. Il ne faudrait pas pour autant trans-
fo r m e r cette rivalité en lutte perm anen te: au baptèm e de Yaílaq, les «frè­
res s e p a r é s » assistaient.
Les Franciscains avaient obtenu d ’un khan, qui doit être Mòngkà-
T c m ü r (1267*1280), successeur de Bãrka, un ja rliq qui fut renouvelé par

100 Féjer, C od ex d ip lo m a tic u s H un gariae, IV, 1, p. 307; Sdislaus O bertynski, Die Florentmer-
U n io n d e r p u ln is ch e n A rm en ie r, dans O rie n ta liu ch ristia n a , X X X V I, n° 96, sept. 1934, p. 42 et
suiv.; D. C h w olson, S y ris ch -n e s to ria n is ch e G ra b in s c ltrifte n aus S e m irjestie, dans Mém. Acad.
im p é r. S u in t-P e te rs b o u rg , 7e série, t. X X X V III, n °8 , 1890, n ° 100, p. 24 et p. 60 (un couvent
a rm én ien au sud d e I'Issyk-K ou l?). Cf. J. D auvillier, Les A rm én ie n s en C h in e et en Asie centrale.
dan * M é la n g es D e m ié v ille , II, 1974, et Y. D achkevych, Les A rm é n ie n s à K ie v ju s q u a 1240, dans
R e v u e des études a rm én ien n es, X -XI, 1974-1976.
101 Sur la littéra tu re religieu se des A rm én ien s du Q ip ía q , cf. E dm und Tryjarski, Die iweite
B rie f des P a u lu s an d ie K o r in lh e r in a rm e n o -k ip tc h a k is c h e r V e rs io n u n d seine Sprache, dans
A lta ica c ollecta . B e rich te u n d V o rtra g e d e r X V I.P .I.A C ., hggb. W . Heissig, W iesbaden 1976,
p. 267-344. Ces Arm éniens, qui a d o p tèren t un d ia le cte turc m êlé de form es slaves, sont sans
d o u te en gra n d e p artie des con vertis.
102 S u pra , p. 88; le v ê q u e B o g o s de Sarat c ité avant 1321 (B u lla r iu tn fra n cisca n u m , V,
p. 445). L a r c h e v ê q u e arm én ien du Q ip ta q , Arakiel, ra m en é à 1'Union en 1321 : G o b u l o v ic h .
III, p. 45; E lien n e, a rc h ie p is c o p u s S o lk a te n s is : Reg. B e n o it X I I , 2906 (1340). Sur lévèquf
a rm én ie n d c Caffa, infra, p. 158-159.
,0’ B ihl et M ou le, D e d ua bus e p is to lis F. M. T a rla ria e A q u ilo n a r is a n n o 1323, dans A rt 1
v u m fra n cis c. hist., X V I, 1923, p. 110-112.

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LA CONQUETE MONGOLE ET LES MISSIONS

deux de ses successeurs, Toqtai (1291-1312) et Ozbàg (le 30 mars 1314)'*.


Les «sa c e rd o te s latini qui suo more fratres minores vocantur» recevaient
1 exemption du service militaire, des corvées de charroi et de toute forme
d impôt, con form ém en t à la règle générale poséc par G engis-Khan10'. Le
privilège spécifiait également que le khan prenait sous sa protection leurs
églises et leurs cloches - ces cloches qui devaient, peu après, susciter le
conflit que nous avons évoqué Ce document assurait aux missionnaires
une situation régulière dans 1'empire mongol de Qipcaq.
La «T a rt a rie du N o r d » n etait cependant pas seulement pour les Latins
un terrain d ’apostolat. C était aussi le domaine que parcouraient des mar-
chands de toute race, parmi lesquels. à còté de Musulmans comme cet al-
Karbalãi qui fut un des informateurs d ’al-’Umari, on trouvait des Arméniens
et des Italiens. Le khanat de Qipcaq lui-méme, et les territoires soumis aux
princes tributaires, leur offrait de riches ressources, depuis les fourrures
qu on allait chercher chez les Mordves ou les Baskirs, jusqu au poisson
séché de la région du Don et du Kouban, et sans oublier les esclaves dont
nous a u ron s à reparler. Mais il était aussi le point de départ des routes
menant vers 1'Asie centrale, ces routes que décrivent les récits des voya-
geurs et les m anuels à 1’usage des marchands. De Caffa ou de Soldaya, sur
la côte sud de la Crimée, ou de la Tana, à 1’em bouchure du Don dans la mer
d ’Azov, partait la route qui, par les principales résidences des khans, la
Nouvelle-Sarai et Sarai, gagnait Saraicik, sur 1'Oural, d ’oü on pouvait se ren-
dre soit à Urgenj, sur l'Amu-Darya, et de là vers la Perse, soit à Otrar, sur le
Sir-Darya, et de là ou bien vers 1’Afghanistan et les Indes, par Samarkand,
ou bien vers la D zoungarie et la Chine, par A lm aligh 106.

B ih l et M o u le , T ria nova d ocu m enta de m ission,bus F. M. Tartariae A quilonaris. dans


A rch fr hist X V II 1924 p 65 et suiv. L a u te u r du p riv ilè g e est a p p elé C u lu k ; P. P e lliot a
m o m r é q u e ce nom pouvait é .re lu n de ceux que porta M òngka T e m ü r : en effet le t e ,te du
privi/egium d õ z b à g . dont nous avons la traduction. le qualifie de progennor nos,er (No/es sur

1'hist. de la H o rd e d'Or. p. 58-61).

i» s T L T m c í cf K L ech . Das M o n g o lis c h e W ehreich. A l V m a r i D u s u t l m g der m on go-


lis ch cn fteicA e! , W ie s b a d e n ,968 (A s.a tisch e F o rs c h u n g e n 22, p ,42. 6;
W. Heyd, H is .o ire du com m erce du U v a n ,. trad Furcy Raynaud U tp rtg ! « » W P ^
253 - L P e te c h Les m a rch a n d s ita lien s dans Ie m p ir e m o n g o l; B. íSpuler. op. c t p 388-40<? . 4 13
415 6 1 1613 et c a rte p 638. V o ir aussi le g u id e à 1'usage des m arch an ds pu bl.e pa r R. Bau-
5, 611-613, et ca rte. p. O c c d e n ta u x avec les pays d 'O rien t au Moyen-Age. Pom ts de
tier, Les rela tio n s e c o n o m iq u e s des U ccta e n # . j . lO cé a n In d ien
vue „ d o c u m e n », d a n s SociéUs e, compagnus de com m erce en O rten. e, dans lO c n n ,n d ,n .
Paris 1970 (B ib l. gén. d e 1’ E c o le d es H. E tu des), p.

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94 IJK PAPAUTÉ ET LE S M I S S I O N S D O R I E N T AU M O Y I . N A».»

La p ré se n c e d e s m a r c h a n d s ne p o u v a it q u a t t i r c r les m is s io n n a iie s , qui


trouvaient en eux un a p p u i c e r t a i n '07; toutefois, la d e s s e r l e d e s chapelles
fré qu e n té e s p a r les Latins de p a ss a g e n avait d e r é e lle i m p o r t a n t e q u e la ou
les m a rc h a n d s résid aien t en g r a n d n o m b r e et d e fa<,on p e r m a n e n t e . Bien
entendu, u n e ville c o m m e Caffa, o u o n ne c o m p t a pas rnoin s d e d e u x cou-
vents fran ciscain s à p a rtir de 1320, à còté d e n o m b r c u s e s a u t r e s c o m m u ­
n autés de rite latin, sans p a r le r d e s é g lis e s d a u t r e s rites, a p p a r a it com m e
une v é ritab le c o lo n ie latine, avant m è m e d e p a s s e r s o u s le c o n t r o le politi-
qu e des G ê n o i s 108. Mais, si les re la tio n s e n tre m i s s i o n n a i r e s et m arch an ds
sont couran tes, au point q u e le m a itre d e s D o m i n i c a i n s B é r e n g e r d e Lan-
d o r r e doit d é p lo r e r q u e les p r e m ie r s en trent en a s s o c ia t io n d a fla ir e s avec
les s e c o n d s 109, il n'en reste pas m o in s q u e 1 'activité e s s e n t ic llc d e ceux-ci
ré sid e d a n s la p ré d ic a tio n a u x In fid èles. C e n était pa s p o u r ío u rn ir de s cha-
p e lain s a u x m a r c h a n d s que le m in istre g é n é r a l des F ra n c is c a in s, frère
B o n a g r a z ia , avait e n v o y é en tre 1279 et 1284 un g r a n d n o m b r e d e ses Ireres
a d p a rte s in fid e liw n A q u ilo n a r e s M0.
II n e s t pa s su rp re n a n t q u e les ré s id e n c e s fr a n c is c a in e s s'éch elon n en t
au lo n g d e s ro u te s q u e suivent les m a rc h a n d s . Si n o u s p r e n o n s les listes des
c o u v e n t s et de s s im p le s ré s id e n c e s { lo c a ) q u i furen t d r e s s c e s au X I V 1’ sie-
c l e m , n o u s les v o y o n s n o m b r e u x s u r la côte su d d e la C r i m é c : a S o ld a y a et
à Caffa, p lu s tard à C i m b a lo ( B a l a k l a v a ) et K a ra s u . S u r la r o u t e qui menait

107 Cf. Jean d e H ild e s h e im , De gestis triu m regum (d a n s G o lu b o v ic h , II, p. 5 1 3 ): me reatores


de Lom bardia et a liis terris. . . trahunt h o s ordines ad illa s partes et eis. . claustra fundanl. Dans
un tr a ité a v e c le khan d e P ers e Abu Said, les V é n itie n s fo n t s tip u le r le d r o il p ou r les Iran
La tin i d a v o ir leu rs c h a p e lle s : L. d e M a s-L a trie, P riv ilè ge c o m m e ra a l accordé en 1320 a la
ré p u blique de Venise par un ro i de Perse, d an s Bibl. E co le des Charles, X X X I , 1871, p. 72.
Cf. R. L o e n e rtz , La Société des frères pérégrinants, p. 30-34.
I0* L es testa m en ts p u b liés p a r M. B a la rd , en 1289-1290, ne c o n n a is s e n t e n c o r e q u e I cglise
S a in t-F ra n ço is des F ra n cisca in s et l'h o s p ic e Saint-Jean. C o m p a r e r a v e c c e lu i d ’O b e rto de
P a sa m o rte, d e 1348 (éd . R. B a u tier, op. cit., p. 321-322). Cf. aussi B ra tia n u , Actes des notaires
gênois de P é ra et de Caffa. B u c a re s t 1927. S u r la s itu a tio n d e C a ffa , cf. R. B a u tier, op. cit.,
p. 273-278. U s M u su lm a n s y é ta ie n t très m in o r ita ir e s : Ib n B a to u ta h , Voyages. II, p. 357.
R e ic h e rt. Litterae encyclicae, p. 313. - N o t r e c o n fr è r e R. B a u tie r n o u s a sign a lé un acic
ou I on v o it le D o m in ic a in T h o m a s M a n ca so la , à la Tan a, en r e la tio n s c o m m e r c ia le s avec un
m a rch a n d d e P laisan ce, sa v ille n atale, R o b e r t o d e R ip a lta (c f. infra, p. 162, n. 145).
110 M a ria n o d e F lo re n c e , C ontpendium c h ro n ic o ru m FF. M in ., d a n s A rch iv u m francisc. hist-,
II, P
p. 465.
in
R e g r o u p é e s p a r G o lu b o v ic h , II. p. 238-273. L e De lo cis /ralruw M m „ r u ,n e, praedicato-
ru m in Tartana. a n té rie u r à 1318, est é d ité p. 72.

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U CONQUÊTE MO NGO LE ET LES MISSIONS 95

des bouches du D anube à la Crimée, on trouve ceux de Vicina el ceux, plus


tardifs, de Moncastro ( A k k e r m a n ) e t Ylice; à l interieur de la Crimée, sur
la route de Sarai, ceux de Solgat et de Qirq-yer; d autres sur la côte du Kou-
ban ct d i 1Abkhazie, ne nous retiendront pas ici. Mais nous trouvcrons dès
1320 des résidcnces sur la route qui mcnc vers lc pays des Mordvcs ct des
BaSkirs, à Ükàk et à V e le r qui est peut-ètre B o l g h a r " '. Et. sans parler du
couvent de Sarai qui existe dès 1286, on voit d autres postes de mission à
Astrakhan, à A k sa ra i114, à Urgenj, à Almaligh, sur la route de la Chine.
On est moins bien renseigné sur les résidences dominicaines, en
dehors des couvents de Caffa et de la Tana : trois autres existaient vers
1320. Et le fait q u ’un traité entre Venise et la Horde d ’Or ait été traduit du
turc ( « c o m a n » ) par un Dominicain polonais résidant à la Tana, en 1333,
atteste que les Frères Prècheurs, aussi, sadonnaient à lapostolat auprès des
indigènes. Peut-ètre cependant leur installation est-elle tardive (ils ne
paraissent pas encore dans les actes reçus par les notaires gênois en 1289 et
1290) " 5.

1,2 La fo r m e M a vro c a s tro , co u ra m m en t reçue, n'esl par la fo rm e o rig in c llc : on tro u ve


dans nos tex tes M a lvoca stro, M oncastro, vo ire, dans un d o cu m cn l de 1351, M ahoca stro - à c ô te
d e U rcin a q u i est V icin a {A tti delia società ligu re di storia pátria, X X V III, p. 558). Cf. D esim oni,
N u o v i studi s u lla tla n te L u x o ro , dans Atti delia società ligure, 1868, p. 247; Bratianu, Recherches
s u r le c o m m e rc e gên ois de la m er N o ire au X I I I * siècle, Paris 1929, p. 246. L 'id c n (ific a tio n avec
A k k erm a n (C e ta le a A lba), été m ise en d o u te par J. B ro m b erg , Du nouveau sur les princes de
T h e o d o ro - M a n g o u p en G oth ie crim éen n e ( B yzantinaM etabyzantina. 1, 1946, p. 70-71), du fait
q u e c e tte v ille est d o n n é e c o m m e en «G a z a r ie » et que ce nom design e la p a rtie m érid io n a le
d e la C rim c e. En fait, l’ex p ression parait être e m p lo y é e aussi p o u r d é fin ir la p o rtion du litto-
ral de la m e r N o ir e c o m p r is e en tre le D anube et le d é tro it d e K ertch .
" J P e llio t, N otes sur 1’hisL de la H ord e d'Or, p. 137, note.
1,4 Un lo c u m de Acsaray fig u re en 1390 co m m e relevan t de la cu stod ie de Sarai dans le
L ib e r c o n fo rm ita tu m d e B a rth é le m y d e Pise ( A rch iv . Francisc. hist., IV, p. 556-557; G olu bovich ,
II 272). G o lu b o v ic h p r o p o s e d 'y re c o n n a itre la N o u v e lle Sarai (T s a re v), tandis qu e Saray
serait la V ie ille S a ra i (S e litre n n o y é , près d A stra k h a n ) (II. p. 541-542). C eei est très douteu x, la
Saray de nos d o cu m en ts, ré s id e n c e des khans du X I V ' siècle étant certa in em en t la ville fon
d é e par B árk à et non la ré s id en ce d e Batu. Aq-sarai (le palais b lan c) est un nom assez
répandu. Faut-il s u p p o s e r q u ’il c o rre s p o n d ra it ici au co u ven t Saint-Jean près Sarai, que citen t
les listes plus a n cien n es (II, 267-268) et qu i est absent du L ib e r c o n fo rm ita tu m ? Un texte a rm é ­
nien su g g ère p lu tôt 1’id e n tific a tio n d ’«A k h s a ra y qui est en tre Astrakhan et K a z a n . avec la
V ie ille S a ra i oú des gen s d'A n i au raien t été d é p o r té s (M . Cazacu et K. K évon ian , La chute de
Caffa en 1475____dans Cahiers du m ond e russe et s o v iitiq u e , X V II, 1976, p. 516, 527, 528). Un
c h e f m o n g o l ré s id e en 1356 à Acsaray (L A rm e n o -V e n e to , p. 154).
" s R. L o e n ertz, La société des Frères Pérégrinants, p. 89-102; L. de M as-Lotrie, Pnvtlèges
com m ercia u x, dans Bibl. E co le des Chartes, 1868, p. 584.

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96 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D’ORIENT AU MOYEN-AGE

De cet apostolat, quelques lettres donnent une description très


v i v a n t e " 6 : le frère Johanca, hongrois, écrivait en 1320 du pays des BaSkirs
au ministre général en opposant la vie des frères vivant dans les cloitre$i
qui prêchaient, administraient les sacrements, et rachetaient des captifs, à
celle des frères qui sétaient adaptés à la vie errante, castra Tartarorum
sequendo. Avec trois compagnons, un Anglais et deux Hongrois, il était parti
p o u r la Baàkirie, oú les basqaq mongols, paiens mais frottés de nestoria-
nisme, les avaient accueillis avec une faveur qui contrastait avec 1 hostilité
du prince local, mahométan, qui les avait un m om en t fait incarcérer, pour
avoir invectivé M ah om et; des seigneurs baskirs, qui avaient fréquenté les
Franciscains à Sarai, dem andaient des missionnaires. Et un gouverneur
m on g ol du pays de Sibir (la région du Tobol, pays fertile et froid, oú l'on
allait en traineau attelé de chiens), avait dem an de à ses collègues du pays
baskir, l’envoi de deux des quatre religieux latins vivant dans leur gouver-
nem ent p o u r rép on dre à un m ouvem ent de conversion inauguré par un
clerc russe, en leur promettant de leur construire des églises. Et Johanca se
plaignait de n a v o i r pu rép on dre à toutes ces invitations, appelant de nou-
ve a u x m issionnaires (de préférence, p o u r des raisons linguistiques, des
Anglais, des Allem ands ou des H o n g r o i s )117. Une autre lettre, adressée en
1323 aux cardinaux, aux prélats de 1'Eglise rom ain e et au chapitre général
des F rères mineurs, parlait d'un religieux allem an d qui, en suivant un
« c a m p » , sous l'habit tartare, avait baptisé toutes les familles, enlevant qua-
tre-vingt-treize idoles. Cette lettre aussi faisait appel à des missionnaires, de
p r é fé re n c e H on grois, Allem ands et Anglais, puisque les plus nombreux à
r é p o n d r e à ces appels, les Français et les Italiens, avaient trop de peine à
a p p r e n d r e la langue t u r q u e .. . " 8. En 1321, on signale le b a p tê m e á'Estokis,
d o m in u s to tiu s B a s c h a rd ia e : Joha n ca avait donc o b te n u de nouvelles
c o n v e r s i o n s " 9.
La prédication assurée p a r des religieux qui adop taien t la vie nomade,
en se dép laçan t au rythme de leurs ouailles, se m b le a v o ir eu un grand suc-
cès. Ces Frères, établis dans des lo c a m o b ilia in p a p ilio n ib u s , dont on recen*

114 U n e le t t r e d 'H u g u e s P a n z ie ra d e P ra to (1312) n e n ou s est pa s p a r v e n u e : A r c h iv u m fra­


tru m p ra e d ica to ru m , II, p. 630.
" B ih l et M o u le , T ria n o v a d o c u m e n ta .. . , d a n s A rch iv . franc. h is t , X V I I , 1924, p. 55 -71 "
La d e s c r ip t io n d e la S ib é r ie r a p p e lle c e lle du « pays d e s T é n è b r e s » d ’Ib n B a to u ta h (éd. Defré
m e ry , II, p. 399-402) q u i est la « t e r r e d o b s e u r i t é » d e M a r c o P o lo . L e c le r c russe qui aura*1
b a p tis é les S ib é r ie n s se s e ra it c o n s id é r é c o m m e t r o p ig n o r a n t p o u r les in stru ire.
" * B ih l et M o u le , D e d uabus e p is lo lis . . . . d a n s A rch iv. fran c. hist., X V I, 1923, p. 89-112-
G o lu b o v ic h , II, 73.

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LA C O N Q U Ê T E M O N G O L E RT LES MISSIONS 97

sait cinq dans le L ib e r H is to ria ru m de Jean Elemosyna, en 1335, autremcnt


dit vivant sous la tente et se déplaçant en utilisant les chariots des n ôm a­
des, auxquels ils administraient les sa c re m e n ts'20, constituaient l’élément le
plus original des missions de Tartarie A q u ilo n a ire 121.
L autre trait original consistait dans 1’achat de jeunes esclaves par les
couvents; dans cet e m p ire du Qipèaq oú le com m erce des esclaves était si
répandu et si actif qu e m ê m e les parents, prétendait-on, vendaient leurs
e n fa n ts122, c'était là un p rocédé couram m ent utilisé (on sait que les Mame-
lüks d ’Egypte achetaient svstématiquement des adolescents appartenant
aux p eu ples de cette région, p o u r les élever dans 1’Islam et y recruter leurs
soldats). Convertis au christianisme, ils recevaient la cléricature, certains
devenaient convers ou m èm e frères dans 1’ordre franciscain. Et, dans ces
missions oú la question des langues se posait avec acuité, les Franciscains
pouvaient ainsi disp oser de catéchistes ou d'interprètesl23.
La connaissance des langues parlées dans le dom aine oú ils étaient
appelés à prêcher, et tout particulièrement du turc, apparaissait, dans les
lettres que nous avons citées, com m e essentielle pour les missionnaires du
Qipcaq. R u brou ck , qui avait dü passer par des interprêtes (en encore avait-
il eu la chance de trouver Guillaum e B ou ch er à la cour mongole!), soupirait
après 1 ’em p loi de bons interprêtes. II était plus simple de familiariser les
religieux avec la langue turque. On sait comment un Franciscain espagnol,
envoyé en Tartarie, fait en 1335 un séjour au couvent de Sarai p o u r y
a p p re n d re cette la n g u e 124. Mais le principal témoignage de 1'effort des mis­
sionnaires dans ce domaine, reste le Codex cum anicus, qui parait avoir été

120 G o lu b o v ic h , II, p. 107.


121 II n est m a lh e u re u s e m e n t pas p ossib le de sa vo ir à q u el m o m e n t c e tte fo rm u le fut
a d o p té e , et dans q u e lie m es u re e lle se d é v e lo p p a . Peu t-ètre ne fit-elle son a p p a ritio n qu e
dans les p r e m iè r e s a n n ée du X IV * siècle.
122 K. Lech . op. cit., p. 140-145; Ch. V e rlin d e n , La c o lo n ie vénitienn e de Tana, centre de la
traite des esclaves au X I V • siècle et au début du X V • siècle, dans S tud i in o n o re di G in o Luzzato,
M ilan 1950 II p. 1-25 et Aspects de 1’esclavage dans les colo n ie s m édiévales italiennes, dans
H om m a g e à L u c ie n Febvre. t. II. Pa ris 1953, p. 91-103; H eyd , op. c it , p. 556-563.
121 C e s t a in si q u e Jean d e H ild e sh e im , parlan t des m arch an ds italiens, e c n t : et ipst m erca-
tores a d d u cu n l secu m de diversis terris et locis ju venes pueros, lin gu is diversis eruditos, quos tra-
d unt o rd in ib u s, q u i tu n c ab eis n o n possunt a lien are vel apostatare (G o lu b o v ic h , II, 153). Cf.
A. Van d en W y n g a e rt, M éthode d a p o s to la t des m ission naires des X I I I ' et X I V « siècle en Chine,
dans la F ra n ce fran cisca in e, X I, 1928, p. 176-177; et N o e S im onu t. I I m etodo d eva ngelizza zion e
dei F ra n cis ca n i tra M u s u lm a n i e M o n g o li nei secoli X I l I X IV , M ilan o, 1947 (Diss. theol. R o m e,
A n g elicu m 151), p. 104 et suiv.
124 G o lu b o v ic h . IV, p. 244 et suiv.

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98 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

rédigé en 1330, et que connaissent bien les linguistes125. Constitué d'un gl0s.
saire latin -persan -turc, dabord classé a lp h a b é tiq u e m e n t, puis par
m a tiè re 126, d e lém e n ts de grammaire, de textes turcs qui sont les commen-
taires des évangiles, des hymnes notés, des prières, et complété par un glos-
saire turc-allemand, ce co d e x peut nous apparaitre com m e la préfiguration
du travail lexicographique auquel les missionnaires de 1 époque moderne
ont consacré tant de leurs efforts. II contribue à donner ses caractères par-
ticuliers à la mission du Qipèaq laquelle, dès le X I I I e siècle comme au
début du X I V e siècle, s'adresse avant tout aux « p a íe n s » et tend à constituer,
pa rm i eux, des com m unautés chrétiennes dont les missionnaires sont
l’âme.

c) La m is s io n de Perse au tem ps des Il-K h a n s

A la différen ce du Qipcàq, constitué très tôt en khanat quasi autonome


au profit de la m aison de Jõéi, fils ainé de Gengis-Khan, les partes Orientales
de 1 ’e m p ire m o n g o l restèrent longtemps sous la dom ination directe du
K h a n s u p r ê m e 127. Un com m an dan t en chef, Cormaqan, puis Baiju, résidait
au sud d u Caucase; un com m issaire du grand khan, Àlèigidâi, puis Argun,
p r é p o s é à la levée des tributs, s était installé à Tabriz, la Géorgie et la Tur-
q u ie seljuqide, vassalisées, étaient souvent divisées entre des souverains
rivau x; les Etats m u su lm a n s d'Iraq, de la Djéziré, d u Fars, le royaume chré­
tien d 'A r m é n ie s'étaient soum is aux conquérants tout en gardant un peu

La d a te c o m m u n é m e n t a d o p té e (1303) a é té c o r r ig é e d e fa ç o n fo r t ingén ieu se par


M VI D r im b a (S u r la d a ta tio n de la p re m iè re p a rtie du Codex cu m a n icu s . co m m u m ca tio n pre-
s e n té e à la 17* r é u n io n d e la P. I. A C., B a d H o n n e f, 1974). L e fa c -s im ilé du Codex a ete pubhe
p a r les s o in s d e K a a r e G rtfn b e ch , C od ex cu m a n icu s . Cod. M a rc. Lat. D X L I X , C op en h a gu e
M o n u m e n m lin g m ru n , As,ae maioris, I). Cf. aussi G. G y ü rfíy . A propôs du
d a n s A naleca Csoma de Ktírõs, (Blbliolheca o n e n u h s hungartca, V ). B u d a p e s t 1942, p. II10 ■
B ib lio g r a p h ie d a n s D. S in o r, In tr o d u c tio n à le tu d e de lE u r a s ie cen tra le , W ie s b a d e . -

p. 104-105. Cf. G o lu b o v ic h , p. 1-28.


• » L 'im p o r t a n c e d u v o c a b u la ir e p r o p r e aux t e r m e s c o n c e rn a n t 1 « é p i c e n e » et les
re s a fa it p e n s e r à c e r ta in s a u teu rs q u e le C od ex a va it p o u r d e s tin a ta .r e s d e s marchan,
1'ou vra ge, é c r it ad h o n o r e m D e i et s a n cti J o h a n n u evangeliste, a p p a ra it c o m m e essen

rCll8| 7 ,N o u S avons e s s a y í d c p r é s c n lc r u n e s y n lh è s e d e s ré s u lla ts a cq u is p a r la


c e q u i c o n c e r n e le s relations d c la P a p a u lc e . d e s M o n g o ls d e P e rs e , * P « ' a le m "
d o m a in e p o liliq u e , d a n s noire c o m m u n ic a lio n au colloque International ’ ’ ,Won
c h a m iè r e , M u m lio n s e , c o m in u ité , sur C h r t m n s e, M o n g o ls m< c o n d e . la d (e r
g o ls de Perse d ans la seco n d e m o ú i i du X I I I ■ s.èele. E t nous nous pernnet ons aus*:
notre a r tic le , T h e M o n g o ls a n d lh e Franks, d a n s J o u r n a l o f A s,an htslory , II I, 1909. p.

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LA CONOIJP.TI'. MONUOI.E ET LF.S MISSIONS 99

plus d autonom ie (I Arm énie avüil réussi â se faire exempter des lourdes
prestations de la « p o s t e » m o n g o le )12". Mais tout cela avait changé du jo ur
ou M ò n g k á m onta sur le tròne. l/atlribution à son frère Hülagü, en 1251,
des territoires com pris entre 1'Amu-Darya et 1’Egypte, en qualité de viee-roi
(Il-Khan), laissait en lrev o ir non seulement la fin du régime précédent, mais
1’extension de la conquête; si le roi Héthoum était venu lui-même apporter
au grand-khan la prom esse de son aide (1254-1255), Hülagü, qui se déplaçait
lentement, au rythme des véritables migrations que représentait la marche
d u n e « h o r d e » , atteignait en 1256 le pays des Assassins du Mazandéran dont
il détruisait la principauté. Le patriarche de Jérusalem se rendait alors
auprès d'A lexan dre IV pour lui exposer ses craintes129; les Mongols, cepen­
dant, assistés de leurs vassaux, arméniens, géorgiens ou musulmans, détrui-
saient B a g d a d et supprim aicnl le khalifat (février 1258), conquéraient la
H au te-M ésop otam ie (1259) avant de faire tom ber Alep, Homs, Damas et
Nap lou se (m ars-avril 1260).
M a lg ré les dévastations et les excès qui accompagnaient 1'invasion, la
chute des dom inations m usulm anes oppressives faisait exulter les chrétiens
indigènes, tout heureux de trouver des coreligionnaires parmi les chefs de
1’arm ée conquérante, ct retrouvant la liberté de leur culte, grâce aux nou-
veaux m aitres qui les employaient volontiers130. Le catholicos chaldéen de
Bagdad, 1'archevêque syrien d'Alep, navaient pas été les derniers à faire
acte d o b é d ie n c e . Et le prince d'Antioche Bohém ond VI, que son beau-père
le roi d 'A rm én ie avait convaincu de se joindre aux Mongols, non content de
se faire ren d re les territoires perdus par ses ancêtres (en particulier Latta-

Q u an d P la n c a rp in re c e v a it d e G üyük H n v ita tio n à fa ire a cte d e sou m ission (1246) les


e n v o y é s du k h a life d e B a g d a d e l d es rois de G é o rg ie en re c e v a ie n t autant (B a r H eb raeu s,

Chron. eccl. I, p. 525). „ . .


124 R o d e n b e r g E p is to la e s a e cu li X I I I , III. P 415 (12 fé v r ie r 1257). Sur un tex te qui avait
cou ru peu a u p a ra va n t (1251/1253) dans lO r ic n t latin, a n n on ça n l une n o u v e lle invasion d u n
p eu p le m y s té rie u x , se d o n n a n t p o u r 1'exécuteur des ch âtim en ts a p o c a ly p tiq u e s cf. n o tre arti-
cie, Une lettre c o n c e rn a n t lin v a s io n m o n g o le ? ( B ib l. E c o le des Charles, C X IX , 1961, p. 243-245)
c o rr ig é et c o m p lé t é dans nos U ltim a tu m s m on gols et lettres apocryphes ( C entral Asiatic Journal,

X V II, 1973, p. 221-222).


D e m ê m e q u e les m e m b r e s d es a u .re s m in o ri.é s . ju iv e s ou sh, u e s - C t . F . e y C h r í-
tiens syriaques en „e Francs el Mongols. dans O riM a lia chm ,. analeca. n » 197J 974. p. 334-34L
T o u te fo is . les C h r é d e n s q u i c o n .r e v le n n e n , à la lo i im p .to y a b le m e n . c h a t .e s ;
tels ceu x d e T e k rU (D O hsson. H is lo ire des M on g ols. III, p. 270). Su r I e v o lu u o n d e 1a tti.u d e
des M o n g o ls à 1e g a r d d e s c h r é .ic n s du P r o c h e - O r ie n , cf. Fiey,
U s M o n g o ls V o ir aussi B. S p u le r. Le ch ris lia n is m e chez les M o n g o ls . « X I I I - s .ic U , dans 1274.

année cha rn ière.

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100 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

kié), faisait célébrer dans une mosquée de Damas transformée en église, la


messe en rite la t in ... et se faisait excomm unier par le légat pontificai, indi-
gné tant de la soumission du prince aux M ongols (un résident mongol s’ins-
talla à Antioche) que de la réinstallation dans sa capitale, du patriarchc
grec Euthyme, alors excommunié par le patriarche latin131.
Car, si les Latins d'Antioche avaient opté pour les Mongols, ceux du
royaume de Jérusalem, invités à se soumettre, s étaient décidés à résister à
c e u x -c i: ils laissérent le passage à 1’arm ée des M am elü k s qui battirent et
tuèrent à ’Ain Jalüd le chef du contingent laissé par Hülàgíi en Syrie, le nes-
torien Kitbuqa (3 septembre 1260)132. La Papauté les encourageait dans
cette attitude, ne pouvant imaginer que les envahisseurs étaient animés en
Orient d'intentions différentes de celles que l'on prêtait à leurs congénères
qui assaillaient alors 1’Europe de l'E s t 133.
On sait m aintenant 134 que 1’attitude des barons francs était moins
ferm e qu il le s e m b la it : dès 1'arrivée des M o ngols en Syrie, ou peu de
temps après, le légat Thomas Agni de Lentino s'était décidé à envoyer des
D om inicains auprès de 1'11-Khan. Et Hülàgü, initialement peut-être assez
mal disposé envers les F ra n c s135, avait accepté de prom ettre la restitution
au ro y a u m e de Jérusalem des terres conquises sur celui-ci p ar les Musul­
m ans (c o m m e il 1'avait fait p o u r Antioche), p ro b a b le m e n t en échange de la
reconnaissance de sa suprématie et au moins d'un traité d alliance. Ce qui
a m e n a H ü lá g ü à envoyer au pape, sans doute en 1263, des ambassadeurs
qui furent interceptés par le roi de Sicile M anfred, à 1exception d un clerc

131 R. G ro u sse t, H is to ire des C roisades et du roy a u m e fra n c de Jérusa lem , t. III, Paris 1936,
p. 577 603; C l. C ah en , La S y rie d u N o r d à 1'époque des Croisades, p. 685. L e x c o m m u n ic a tio n
d e v a it ê t r e le v é e le 26 m a i 1263. Cf. aussi Cl. C ah en, op. cit., p. 703-705.
132 M a th . Pa ris, éd. L u a rd , V, p. 654 (R õ h r ic h t, G e s ch ich te des K ó n ig r e ic h s Jerusalem,
p. 9 1 0 ); H.-F. D e la b o r d e , L e ttre des C h rétien s de T e rre -S a in te à C h a rles d 'A n jo u , dans Rev.
O r ie n t latin , II, 1894, p. 207; R e c u e il des H is to rie n s des Croisades, H ist., O cc., II, p. 636; G régoire
d A k a n t , H is to ry o f the n a tio n o f the archers, éd. B la c k et F ry e , d a n s H a rv a rd J o u rn a l o f Asiatic
studies, X I, 1949, p. 349.
133 L e g e n e ra le n e g o tiu m E cc le s ia e c o n tra T a rta ro s est c it é au c h a p itr e g é n é r a l d es Cister­
c ie n s d e 1261, Cf. J. R ic h a rd , T h e M o n g o ls a n d the Franks, p. 51-52.
134 G r á c e a la d é c o u v e r t e p a r I'a b b é B o r g h e z io du t e x t e é t a b li p a r le n o ta ire Richard,
in ie r p r è t e d e T Il-K h a n , à 1’in te n tio n d u c o n c ile d e L y o n , m a in te n a n t é d it é p a r B. R o b erg , Die
T a rta re n a u f d em 2. K o n z il v o n L yon , 1274, d a n s A n n u a r iu m hist. c o n c ilio r u m , V, 1973, p- 241*
302. N o u s a v o n s d e n o t r e c ô t é r e n d u à U rb a in IV la p a t e r n it é d u b r e f E x u lta v it c o r nostrum,
d a n s L e d é b u t des re la tio n s e n tre la P a p a u té et les M o n g o ls de Perse, d a n s J o u r n a l Asiatique,
1949, p. 291-297.
m D a p r c s un p a ss a g e d e R a& id-al-D ín q u i é v o q u e s o n in t e n t io n d e c h a s s e r ceux-ci des
r iv e s d e la M é d it e r r a n é e , e x p r im é e en 1257 (J. R ic h a rd , C h ré tie n s et M o n g o ls au c o n cile , p. 33)-

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LA CONíJUP/rU M O N GOLE ET LES MISSIONS 101

hongrois qui parvint auprès d Urbain IV. Celui-ci lut ainsi cn mesure dc fèli-
citer le prince m ongol des espoirs dc conversion q u ’on lui laissait entre-
v o ir ’36.
Le principal agent dc cc retournemeni de situation, le Dominicain
anglais David d Ashby, chapclain dc Thomas Agni, accompagnait les
envoyés de 1 Il-Khan au concile de Lyon. Lc rapport présenté au concile
nous a p p ren d comment Hülàgü accucillit ires íavorablement les envoyés
du légat; David bénéficia de conversations intimes, au cours desquelles le
chef m on gol lui révéla ses sentiments lavorables au christianisme, et ses
bonnes intentions envers les Latins. II scmblc que, depuis son arrivée
auprès de 1Il-Khan jusqu'cn 1274, David d Ashby dem eura auprès de
Hülàgü et de son successeur Abaqa, assistam a leurs campagnes, et en
tirant des enseignements q u ’il consigna dans un opuscule, Les faits des Ta r­
tares, a u jo u rd ’hui malheureusement p e r d u 117.
II ne saurait ici être question de suivre dans ses détails 1'histoire dc la
politique des Il-Khans dans leurs rapports avec les Chrétiens d O ccid en t138.
Leur désir de venir à bout de la résistancc que leur opposaicnt les Mame-
lüks d ’Egvpte, rebellcs aux invites à la soumission et, de surcroit, cham-
pions d un Islam tendu dans la lutte contre les Mongols destrueteurs du
khalifat abbasside, les amenait à souhaiter la coopération des Latins. Mais
1’effondrement de la puissance militaire des Etats latins d ’Orient et du
royaume d'Arménie, réalisé entre 1263 et 1272 par les campagnes du sultan
Baibars, et facilité par la guerre qu'Hülàgü et son successeur Abaqa
devaient soutenir contre le khan de Qipcaq, ne leur laissait d a u tre
concours possible que celui des souverains de 1’Europe occidentale eux-
mêmes, sous la forme d une croisade. Lengagement pris par Hülàgü, de
restituer la Ville Sainte et 1'ancien royaume de Jérusalem aux Latins était la
base de 1’accord - Ghazan s'y tenait encore en 1299-1301 Et les Latins,

* -------------------

• 116 Si ce tte lettre (le b r e f E xu lta vit c o r nostrum ) parait bien d a ter de 1264, la date d e la
m ission des D om in icain s auprès de Hülàgü reste plus vague.
157 C lo vis B runel, D avid dAshby, auteur m éconnu des « Faits des Tartares», dans Rom ania,
L X X IX , 1958, p. 39-46. C'est M. B runel qui a id e n lifié 1’auteur avec le D om inicain. chapelain
du p a tria rch e d e Jérusalem et son en vo y é auprès de Hülàgü.
■3* A 1'article classiqu e d ’A bel Rém usal, M étnoires sur les relations des princes chrétiens et
' spécialement des rois de France avec les em pereurs m ongols (M é n i de 1'lnstitut, Académie des
Inscriptions, V III, 1824) en gran d e p a rtie ren o u velé par J.-B. Chabot, Notes sur les relations du
roi A rgoun avec 1'Occident (dans Revue de 1'Orient latin, II, 1894, p. 566-638. - C itè ci-après Cha­
bot, Notes), et au livre de synthèse de B. Spuler, D ie M on golen in Iran, 2* éd., B erlin 1955,
notam m ent p. 224-235, nous noua p crm elto n s de join d re nos articles cités ci-dessus, p. 98.

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1

102 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IE N T AU M O Y E N -A G E

surtout sous 1’im pu lsion d u p a p e G r é g o ir e X 139, qui c o n v o q u a le second


concile de L y on en vue de la c ro isa d e et y vit p araitre des envoyés tarta­
r e s 140, étaient eux-aussi en principe prêts à cette c o o p é ra tio n , qui se révé-
lait b e a u c o u p plus diíficile à réaliser qu a concevoir.
Ce climat de p ré p a ratio n à une c o o p é ra t io n étroite (d an s leurs rap-
ports, les O ccid en taux fam iliarisés avec le m o n d e m o n g o l vont ju sq u a
signaler les e rre u rs p s y c h o lo g iq u es à éviter au c o u rs de c a m p a g n e s m e n é e s
en c o m m u n ) se révèle p a r d'incessants éch a n g e s d 'a m b a s sa d e u rs, et par des
m anifestations de b o n n e volonté, qui créaient des co n d itio n s très favora-
bles aux activités missionnaires.
L e s p o i r de g a g n e r les Il-K h a n s e u x -m ê m e s à la foi ch rétien n e n’était
pas le fait des seuls Latins. De fait, nous savons q u e les dynastes mongols
établis en Perse étaient perso n n e lle m e n t acquis au b o u d d h is m e : un seul
d e n t r e eux, T à k ü d ã r (1282-1284), passa à l’Islam ; et ceci suscita une vio­
lente réaction oú il devait périr, tandis qu e le g ra n d -k h a n Q u b ila i marquait
sa p r é fé r e n c e p o u r son rival A rgun en renvoyant à celui-ci, avec un diplome
d investiture, son con seiller chrétien, le c é lè b re 'Isa, Syrien fixé en C h in e 141.
D es p a g o d e s et des couvents bou d d h iste s s élevèrent en Iran, et les reli­
g ie u x b o u d d h is te s (les b a xites) sont con n us des m issio n n a ire s latins142.
Mais, o u tre le u r respect de la tolérance édictée p a r la loi gengiskhanide, les
Il-K h a n s subissaient 1 influence d ’ép o u se s ou de m è re s chrétiennes, soit
nestorienn es, soit byzantine c o m m e la D e sp in a-K h a tu n , M a r ie Paléologue,
é p o u s e d ’A b a q a , qui fit c ré e r un évêché grec à T a b r i z 143. Et il n e s t pas exclu
q u au m o in s Hülágii, si 1 on en croit le d o u b le t é m o ig n a g e d e 1'Arménien
V a rta n et de D a v id d Ashby, ait songé à r e c e v o ir le b a p tê m e . II n est pas
im p o ssib le, c o m m e on 1 a parfois avancé, q u e les so u v e ra in s m on gols, isolés
avec le u rs tro u p e s au m ilieu de p o p u la tio n s ne p ra tiq u a n t ni le boud­
dh ism e, ni le ch am a n ism e , aient pu s o n g e r à s a p p u y e r s u r 1’élém ent chré­
tien, e n c o re n o m b r e u x d an s les rég io n s c a u c a sien n e s et m ésopotam iennes

l3v V. L a u r e n t, I m c ro is a d e et la q u e s tio n d O r ie n t sou s le p o n tific a t de G r é g o ir e X , dans


R e v u e hist. d u S u d -e s t e u ro p é e n , X X I I , 1945, p. 106-137.
140 B. R o b e r g , art. cité, et n o s C h ré tie n s et M o n g o ls au c o n c ile .
1 1 La le t t r e d A rg u n au p a p e (1 2 8 5 ) est r e m a r q u a b le p a r le s o u c i q u e m a n ife s te l’Il-Khan
d e m o n t r e r la r é g u la r it é d e so n in v e s t it u r e (C h a b o t , N o te s , p. 570-571). S u r 'Isa, cf. P. Pelliot,
C h ré tie n s d'A sie c e n tra le et d 'E x trê m e O rie n t, d a n s T o u n g pao, 1914.
142 S u r le b o u d d h is m e c h e z les M o n g o ls d e P e r s e . cf. M o n n e r e t d e V illa r d , I I lib ro delia
p e re g rin a z io n e . . . d i frate R ic o ld o da M o n te c r o c e . R o m e 1948, p. 47-54; B. S p u le r, M o n g o le n in
Ira n , p. 179-181, 184.

B a r H e b r a e u s , C h r o n ic o n s y ria cu m , p. 261; Jean B. P a p a d o p o u lo s , U n e lettre de Grè-


g o ir e C h on ia d es, é v é q u e de T a h riz, d a n s M é la n g e s Ch. D ie h l, 1930, t. I, p. 257-262.

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LA C O N Q U Ê T E M O N G O L E ET LES MISSIONS 103

oü ils résidaient, au m om en t oú ils étaient aífrontés à un Etat qui se disait


« l e m p i r e de 1 'Is la m »144. En tout cas, les papes ne cessèrent, dans leurs let­
tres, d'inviter les Il-K hans à e m b ra ss e r le christianisme : dans le bref E x u l-
tavit de 1264, U rb a in IV chargeait le patriarche de Jérusalem de baptiser
Hülágü si celui-ci donnait suite à son projet de conversion. En 1278, N ic o ­
las III chargeait G é r a r d de Prato et ses com pagn on s d a d m in is tre r le b a p ­
tême à A b a q a après s’être assurés de ses intentions. En 1288, Nicolas IV
envoyait à A rgun un exposé de la foi chrétienne, en 1'invitant à recevoir le
baptême, sans attendre p o u r cela d avoir pris Jérusalem (car on lui avait
fait entendre que l’Il-K han voulait se faire baptiser dans Jérusalem prise
avec le con cou rs des c h ré t ie n s )145.
Jean de M o n te c o rv in o n a y a n t rapporté à R om e que des affirmations
des bonnes intentions d ’Argun, Nicolas IV renouvelait en 1289 son envoi
d’un a brégé de la foi et d u n e invitation au b a p t ê m e 146. Cette fois, ril-K h a n
jugea nécessaire de préciser q u i l navait pas em brassé la foi chrétienne,
comme le croyait son c o r re s p o n d a n t 147.
Argun faisait allusion à 1’insistance des sollicitations dont il était 1objct
de la part du pape, qui se référait à 1 'exemple du père et du grand-père de
1’11 -Khan p o u r 1'inviter à suivre leurs traces en recevant le baptême, et à
Tespèce d ’irritation dont témoignaient les lettres pontificales. II essayait de
faire admettre à son correspondant la convergence des exigences m orales
du christianisme et des «o r d r e s du ciei é t e r n e l » 148, et sexprim ait ainsi.
«Maintenant, disant que je ne suis pas entré dans le silam (c est-à-dire . que
je n'ai pas reçu le baptêm e), tu toffenses et tu te livres à des pensées (de
m écontentem ent); (mais), si uniquement on prie le Ciei éternel et si l’on
pense com m e il sied de le faire, nest-ce pas comme si 1’on était entré dans
le s ila m ? ». Il apparait donc q u a u x yeux de 1’11 -Khan, lad h ésion au christia-

144 On sait en e ffe t q u e te lle éta it la d é n o m in a tio n o ffic ie lle de l e t a l d es M a m elü k s d o n t


le sou verain é ta it en p r in c ip e le K h a life . d e p u is son o r ig in e et surtout dep u is Im s ta lla tio n au
Caire par B aib ars d un * A b b a s s id e ». - Sur c e tte p e rsp e ctive , cf. St. Runcim an. >1 htstory o f the

Crusades, III, C a m b rid g e 1954, p. 313.


145 Sbaralea, IV, p. 6-7 (le p a p e é c riv a it en m êm e tem ps à deu x « r e i n e s » en les fe lic ita m
de leur fid é lité à la fo i c h ré tie n n e et en les in vita n t a la rép a n d re). Cf. C habot, Notes, p. 581­
585.
p. 88; C h a b ot, Notes, p. 595-599.
147 Cf. A. M o sta e rt et F. W . C lea ves, T ro is docum ents ^ n g o l s d e s archtves secrètes Vattcci-
nes, dans H arva rd J o u rn a l o f A siatic Studies, X V , 1952, p. m ai ,
- - Les gens en trés dans le S ila m ( - b a p tisés) et q u , c o m m e vous. ont “
B . __ _ _ K à ia re lie io n et aux o rd re s du C iei e te rn e l et du
sincere et sont purs, ne c o n tre v ie n n e n t pas a ia rengiun
Misiqa ( - du M e ss ie) *.

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104 H PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O R IE N T AU MOYEN-AGE

nisme n etait pas indispensable, et il manifestait clairement qu il n etait Pas


aussi disposé à cette adhésion que 1 affirmaient tant de gcns autour de lyj
Nicolas IV n'en récidiva pas moins, en aoüt 1291, en chargeant scs
ambassadeurs, les Franciscains G uillaum e de Chieri et Mathieu de Chieti,
de lettres p o u r l’Il-Khan 1'exhortant à nouveau au baptèm e, et le félicitant
d avoir laissé baptiser un de ses fils — K h a rb an dá, le futur khan Olgaitü -
qui aurait reçu le nom de Nicolas, précisément en 1’h on n e u r du pape ' ^ ;
une autre lettre, destinée au baptisé, lui recom m an d ait de rester fidèle aux
traditions m ongoles; d autres, adressées à ses deux frères, les invitaient à la
foi; deux reines, « A n ic h o h a m in i» (U ru k -K h a tu n ) et Dathani-Khatun,
étaient, elles, incitées à décider ceux-ci à se convertir. Et le pape écrivait en
m èm e temps à tous ceux qui, dans Tentourage d ’Argun, pouvaient agir en
ce s e n s 150.
Argun était mort avant de recevoir ce message, et ses successeurs Gai-
khâtu et B áidü ne firent que passer sur le trône. On sait qu e Ghazan, pour
triom p h e r de Bãidü, et eu égard à 1'importance croissante des éléments
musulm ans, dut se décider à e m brasser 1’Islam en 1295; le jeu n e «Nicolas»
passa lui aussi au m a h o m é ta n is m e : si les échanges d a m b a s s a d e s et de let­
tres ne cessèrent pas entre les papes et les khans de Perse - désormais
indépendants du grand-khan s’ils furent m ê m e particulièrem ent actifs
pendant la cam p a g n e de Syrie oú Ghazan fit app el aux Latins pour venir
o c c u p e r la Terre-Sainte (à Iaquelle il avait peut-être do n n é le Pisan Zolo de
Anastasio p o u r g o u v e r n e u r )151, 1'espoir de convertir les dynastes mongols
p a r 1 'envoi de messagers chargés d e x p o s é s de la foi (d o n t ils avaient mis­
sion, n ou s 1 avons déjà vu, d e xpliqu er les termes p o u r convaincre leurs
interlocuteurs) devait être abandonné.
P o u r p a rv en ir au résultat espéré, les papes avaient aussi essayé de sti-
m u le r le zèle des fem m es chrétiennes des Il-K hans ( c e s t sans doute Uruk-
Khatun qui avait fait baptiser son fils sous le nom de Nicolas). Ils avaient
aussi eu recou rs aux Latins e m ployés p a r les Il-Khans. Ceux-ci, en effet,
avaient à le u r service des in te rp rêtes: Rychaldus, qui faisait partie de
1'ambassade interceptée en 1264, et de celle d e 1274, était in te rp re s Latino-

u * L es é c n v a in s o n e n ta u x m e n tio n n e n t ce m ê m e b a p tè m e , m a is d o n n e n t au baptisé le
n om d e T h e o d o s io s . Cf. P e llio t, « f s o l le P is a n », dan s J o u r n a l Asiat., 1915, II, p. 495-497.
150 S b a ra lea , IV, p. 277-285. - C est en m ê m e te m p s q u e le p a p e a n n o n ç a it à Argun la

l t Cre 61 U PrÍSC dC Cr° ÍX du r o i d 'A n g le te r r e . S u r to u t ce la , cf. G. S o ra n z o , // p a p a to .. •.


p. 207-297, et C h a b o t, N o te . . .

m J. R ic h a rd . ts o l le Pisa n : un a v e n tu r ie r fra n c g o u v e r n e u r d u n e p r o v in c e m o n g o le ?. dans


C e n tra l A s ia tic J o u rn a l, X IV , 1970, p. 186-194.

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LA C O N Q U Ê T E M O N G O L E ET LES MISSIONS 105

rum et sans doute identiquc au senha lutinu s dont 1’absence avait a m e n é


A baqa à e n voye r au pape une* lettre écrite en mongol, sans traduetion 1 s’.
Nicolas IV écrivait en 1288 une lettre aux interpretes d A r g u n ; en 1289 et
1291, à un person n a g e qui sem ble du plus haut rang, Zolo de Pise, qui
devait être le parrain, ou le gouverneur, du jeune « N i c o l a s » et dont Rasid
al-Din a dit la haute position a la cou r m o n g o le 153. Car il existait, à còté des
m ercenaires e m p lo y é s c o m m e arbalétriers ou c o m m e marins en com pa-
gnies organisées, des aventuriers qui avaient cherché fortune à la c o u r de
1'II-Khan, pa rfois après avoir fait du com m erce dans ses Etats - à la
manière de M a r c o P o l o 1’’4 - . On pouvait escom pter leur dévou em en t à la
cause de la chrétienté et du christianisme.
C e s t pa rm i eux que les princes m ongols choisissait certains de leurs
envoyés aux cou rs chrétiennes, tant parce q u ils pouvaient s e n tr e te n ir
directem ent avec leurs compatriotes, que pour se concilier la sym pathie de
ceux-ci. Et des Chrétiens de rites orientaux étaient eux aussi choisis p o u r
cette d e rn iè re raison. Salom on, « g a r d e de la Sainte Eglise de Dieu en notre
c o u r», en 1268, ou Sabadin, l'un des envoyés d Argun en 1288, sont dits
a rch a on , le mot m on gol cirka 'ün, venant du grec apxTiyoç, désignant un
chrétien, d o r d i n a i r e n e s t o r i e n E t le v è q u e Barçauma, en 1288, était bien
le m ieux choisi p o u r prouver les sympathies chrétiennes d Argun. Mais,
quan d les M o n g o ls chargés d une ambassade auprès du pape n'étaient pas
chrétiens, ils ne faisaient pas dc difficulté a se laisser baptiser - tels ceux
qui reçurent solennellem ent le baptême au concile de 1274, ou bien les
c o m p a g n o n s de Buscarei de Gisolf, Zagan et Kourji, qui furent baptisés en

152 E. T is se ra n t, U n e lettre de l'Il-K h a n de Perse Abaga adressée en 1268 au pape Clérnent IV ,


dans M éla n ges L e fo rt (M u s é o n , L IX , 1946, p. 547-556). C lém en t IV a va it é c rit à A b a q a p o u r
1'avertir q u e nul n ’a va it su lirc sa le ttre (1267).
143 L e p a p e é c r it aussi à d es C h rétien s in d igen es. tel le m é d e c in d e 1’11-Khan, S u ffre d d in .
Jean d e B on a stro, a u tre d e s tin a ta ire des le ttre s d e 1289 et 1291, fig u re d é jà en 1288 p a rm i les
in terp rè te s. Cf. n o tr e a r tic le c ité sur Is o l le Pisan.
IM C es p e r s o n n a g e s son t su rto u t co n n u s par leu r e n v o i c o m m e m essa gers. Cf. L P etech ,
Les m archan d s ila lie n s dans Vem pire m on gol, p. 561-564. S u r les a rb a lé tr ie rs latin s e m p lo y é s au
siège d 'H é r a t : J. R ic h a rd , A b o u t an a c c o u n t o f the battle o f H attin, dans S p e cu lu m , X X V I I, 1952,
p. 173-174. S u r les m a rin s g ê n o is q u ’A rgu n c h a rg e a d 'in t e r c e p t e r le c o m m e r c e e n tr e 1'Inde et
1'Egypte, J. R ic h a rd , Les n a v iga tio n s des O ccid en ta u x su r lO c é a n In d ie n et la m e r Caspienne,
dans S ociétés et co m p a g n ie s de c o m m e rc e en O rie n t et dans iO c é a n In d ie n (A c te s du 8C c o n g rè s
in tem , d ’hist. m a r itim e ), Paris, 1970, p. 359-360.
Jam es H a m ilto n , L e texte tu rc en caracteres syriaquei du g ra n d sceau c r u c ifo r m e de M a r
Yahballaha I I I , d an s J o u rn a l Asiatique, C C L X , 1972, p. 163-164. _

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106 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O R IE N T AU M O YE N -A G E

1289 sous les nom s d ’André et D o m i n i q u e 156. Et le p re m ie r d e n t re eux


devient lui aussi l'un des destinataires des lettres pontificales. ..
Le passage de Ghazan à 1’Islam fut ressenti en Occident c o m m e un évé
nement grave : si I'on suit 1'interprétation de M. D u p ré-T h eseid er, les capi.
tufa fid ei écrits à 1'instigation du p ap e B o n ifa c e V I I I p a r 1'Augustin Gilles dc
Roíne, à I’intention du T a rta ru s m a jo r qui voulait c h ris tia n a m to lle re fidein
seraient un do cu m en t é la b o r é à 1 'occasion de la m ission dominicaine
envoyée en pays infidèle, avec la b u lle Im m a c u la ta le x D o m in i du 10 avril
1299157. De fait, la conversion du khan entrainait en p r in c ip e celle de ses
sujets, du m oins de ses sujets « m o n g o l s » : n ou s savon s q u e les M ongols de
1e m p ire de Perse reçurent 1'ordre de se faire m u su lm a n s , ce qui eut pour
résultat pa ra d o xa l le passage dans 1'e m p ire m a m e lü k d e tout un contingent
d Oirat, partisans de 1'11-Khan Baidu, ren v e rsé p a r G h azan , lesquels refu-
saient au m oins provisoirem en t cette c o n v e rsio n f o r c é e 158. M a is les sympa-
thies chrétiennes des souverains n'étaient pas éteintes, et Jean X X II, en
1321, écrivant à A bu -S aid ( B oyssetha n), adressait en m ê m e te m p s une lettre
à un é m ir chrétien, fidèle à Rome, du n o m d e C o th u lo to g a , certainement
m o n g o l ou turc. Ce person n age tém o ign e d e 1'existence de qu e lq u e s élé-
m en ts restés chrétiens dans 1'aristocratie m o n g o l e 159.
L u n des avantages que le régim e de to lé ran c e de s Il-K h a n s avait assu-
res aux m issionnaires, c etait la possibilité de p r ê c h e r a u x M u su lm a n s en
pays à p r é d o m in a n c e m usulm ane, c a r on p o u v ait c o m p t e r à 1 'occasion sur
1m te rv e n tio n des M o n g o ls chrétiens tout d isp o sé s à r é p r i m e r énergique-

154 A b e l R ém usat, ouvr. cité, p. 362-381.

Eugênio Dupré-Theseider, B o m / a cio V I I I e l a z io n e m is s io n a r ia . dans G la u b e Geist Ges-


chtchte. Festschrift für Ernst Benz L e id e n 1 9 6 7 n a c■ • < .
qui, selon nous. ne saurai, être queGhazan) « • « « * » * » du des.ina.aire

p. 219-222^™' ^ ^ $Ullam ' m m ,o u H ,rad Qua,remère, II, 2. p. 29; cf. B. Spuler. op. cit.

T o Z fH - Z Z J l l ” 4Sí : Fm,eS' V! 1 2’ P S8- S- le nom dc . Co.hulo.oga. (Ou.lugh-


d“Í campar„c d ' Z ,Z t P' 69' 70: <»>‘'“ gh-Shâh, dans les réci.s
lude dont fil preuve G hazan í r Cotholossa. RaSid al-Dln signale dailleurs la mansué-
qui furent autorisés i ouittr ' 1 prelres ^ “ ^^histes, contraints à embrasser llslam.
de Rashid ad-Din I p 1861 ^*1*-e*at> S voulalenl fenier (Qüatremère. Histoire des Mongols
Ongüt Sara et décrit Dar P “ P Íé e " 1298 « » * * * roi ^

J t i é t : r r t esyH
e- ■paris- m
i-p t *
m

pourrait penser que la traditinn H.c l “ ° " 1 chritienne- Beyrouth, 1955, p. 81), on
liot, R e c h e rc h e s s u r les c h ré tie n s tfA s ie c e n ‘ r j ! «W
copie en Asie orientale. ^80-282, penche pour la reahsation de cette

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L * COSQl/ETE MONGOLE ET l ES MISSIONS 107

ment les infractions a la tolé ran c e 160. Lc Dominicain Ricoldo Pennino de


Montccroce, originairc de Florence. arrivant à Tabriz vers 1288, put v
séjourncr pres de six mois ct y prècher, par lc tmchement d ’un interprete,
cn arabe, avant de se rendre à Bagdad oú il ctudia 1'lslam, freqüenta les
M usulm ans p o u r lesquels il eprouva d ailleurs beaucoup de sympathic, en
cherchant à les convertir, sans grand succès du reste. II dut bicntòt sc
consacrer aux captifs latins reduits en esclavage à Acre ou à Tripoli ct ven-
dus à B a g d a d 161, en attendant que la réaction musulmane dc 1295, qui
s'accom pagna de destruetions d eglises, dc transformations d edificcs reli­
gieux en m osq u é e s ou en étables - celle de Tabriz devint une ecolc corani-
que - et d un n o m b re considérable d abjurations de la part de chretiens
orientaux, le contraignit à la fuite. Au cours de celle-ci, d ailleurs. assailli
par deux M o n g o ls islamisés, il leur échappa avec peine et dut se déguiser
en c h am elier p o u r continuer son vovage : c ’est en Occident q u ’il écrivit son
Im p ro b a tio A lc o ra n i, son C ontra S a rracenos et A lco ra n w n et son L ib e llu s ad
n ationes o r ie n ta le s '* 2.
Déjà, semble-t-il, la courte islamisation de 1’Ilkhanat sous Tàküdãr avait
perm is aux fanatiques de relever la téte; le Franciscain Antoine d Arménie
fut alors martyrisé à Selmas, près d'Urmia, en 1284,f''. Mais, par la suite,
prècher contre M ahom et équivaut à un arrèt de m o r t : des Franciscains qui,
à Erzincan en Anatolie, avaient tenu à le faire et s y obstinèrent malgré la
longanimité du qãdi, furent mis à mort le 15 mai 1314IM.
S'il n e s t pas certain que la liberté de prcdication aux Musulm ans ait
donn é de gran ds résultats, les missionnaires latins trouvèrent plus de satis-

i»o L es K u r d e s m u su lm a n s se v o ie n t e m p èch és d e m o le s te r leu rs vo isin s ch ré tie n s;


lo r s q u ils assassin en t un p a tria rc h e ja c o b ite . 111-Khan e n v o ie c o n tr e eux T ic o ilu g u m christia-
n u m H u n n u m c u m c o p iis (B a r H eb ra e u s . Chron. Syriacum , I. 620).
L e m o t io n q u i l re s s e n tit à la n o u v e lle d e la ch u te d 'A c re ap p a rait dans ses E p istolae ad

ecclesiam triu m p h a n te m . . . . . . „ n
U go M u n n c r e l d e V illa rd , La v il*. op ere e le viaggi d i trate R ic o ld o da M o n le cro ce . O.P.
ÍO rie n la lia c h ris .ia n a p e n o d ic a , X . 1944. p. 227 e, suiv ) ; II lib r o delia p e re g rin a z io n e n e lle pa r,,
(fO rie n te di lra ,e R ic o ld o da M o n .e C roce, R o m e . 1948 (In stt his.. FF.PP.. D .s se rta o o n e s h .s.o n -
eae, X III). U L ib e r p e re g rin a ,io n is est édité par U u re n t. P ere g rin a ,o re s m ed n aev, q u a ,u o r.
p. 103 et suiv ) ; les Uttcrae, p a r R õh rich t (R evu e de lO r i e n ü a m A l p 262_2M). Sur \e Ubellus.
cf. A D ondaine, R ico ld ia n a . dans A r c k F r a t , P ra e d . X X X V I I . 1967 p. 137.142 et .62-170
M aria n o de Floren ce. C o m p e n d iw n c h r o n ic o r u m FF.M M . dans A r c k F ra n c h u L 11.
p. 465-466 Une liste d es m artyrs franciscains fait m o u n r à cette date en erse
brando de Floren ce. qu e M aria n o d on n e com m e m o rl en T artan e Aqu.lona.re iM o n u n ,e n ,a

franciscana, p. 527; G o lu b o v ic h , I, P- 429).


* Le p alria rch e arm én ien les m it au n om bre des samts (G olubov.ch, II. p. 61-68).

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108 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU M O Y E N AGE

faction du còté de l'union des Eglises. De 1258 à 1295, les Eglises orientales
connurent une période de prospérité exceptionnelle, enrichies par la faveur
de leurs coreligionnaires m ongols et délivrées des contraintes que leur
imposaient les M u s u lm a n s 165. André de Lon g ju m e a u avait exprimé en 1253
ses craintes de voir le christianisme oriental étouffé par la mauvaise
volonté des princes m usulm ans à accepter le rem placem ent des évê-
q u e s 166: cinq ans après, ces craintes n'étaient plus de mise.
P o u r les Chaldéens, 1'arrivée de S im éon R abban -ata c om m e représen-
tant du Khan, la nomination d ’un person n age chargé - tel le Salomon de
1268 — des affaires des chrétiens à la c o u r de 1’Il-Khan, avaient marqué le
débu t d ’une ère nouvelle. Le catholicos D enha (1266-1281) fut protégé par
A b a q a et reçut du khan M ò n g k á un grand sceau d or, qui le qualifiait
c o m m e représentant de tous les c h ré tie n s167. Il put resse rre r les liens de
son siège prim atial avec les Eglises ch aldéennes « d e 1'extérieur», nommant
des m étropolites p o u r la Chine, le Tangut et enfin en 1280, p o u r le pays des
Õ n güt et des K ’i-tan 168. Et c e st ce d e rn ie r qui devait être élu pour le rem-
placer, le 24 février 1281, sous le nom de Y a h b a llá h â III.
N é au pays des Õngüt, M ark o s était venu au Proch e-O rien t avec son
am i B a r ç a u m a p o u r faire un pélerinage à Jérusalem ; le catholicos, en fai­
sant de lui un métropolite, et le synode, en 1 elisant catholicos, pensaient
bien attirer sur leur Eglise les faveurs des princes m ongols. A b a q a et Argun
lui a c co rd è re n t en effet toute leur protection. Quant à B a rçau m a, pourvu
des fonctions de « v i s it e u r » d ’Orient, avec rang d ’évêque, il fut choisi par
A rg u n p o u r aller en a m ba ssa d e a u p rès d u pape. On connait assez le récit -
ou plutôt 1 'a b r é g é du récit, m alh e u re u se m en t p e r d u - de son voyage en
O c c i d e n t 169. II visita R om e, Paris et B o r d e a u x avant d 'ê tre reçu par le nou-

165 Cf. Fiey, Chrétiens syriaques entre Croisés et Mongols, dans Orient. Christ. analecta,
C X C V II, 1974, p. 336-339; R. Grousset, L e m p ire des steppes, p. 442-444; H. C ord ier, Le Christia-
nisme en Chine et en Asie centrale sous les Mongols, dans T ’oung pao, X V III, p. 49-113. Le catho­
lic o s D enha p réten d m ê m e fa ire je te r au T ig re un n es to rie n d e T e k rit qui avait embrasse
1'Islam (B a r H ebraeu s, Chron. Syr., p. 571; J. M. Fiey, Chrétiens syriaques sous les M ongols, p- 35
et passim).
166 D a p r è s la b u lle Athleta Christi d ’In n o c e n t IV.
167 C e s t ce sceau qu i fut re p ro d u it p o u r son su ccesseu r et qui a é té étu d ié par J. Hami
ton, a r l cité ( Journ. As., C C L X , 1972, p. 155-170).
161 J. D a u villier, Les provinces chaldéennes «d e 1'extérieur» au Moyen-Age, passim.
169 H istoire de M a r Jabalaha I I I, trad. C h ab ot, dans Revue de 1’Orient latin, t. II et j ’
E. A W allis B u dge, The monks o f K ublai Khan, L o n d res, 1928; R. G rousset, Histoire des Crois^
des, III, p. 707-723. La v ie des d eu x re lig ie u x ju s q u ’à le u r d é p a rt p o u r la M ésopotam ie a
é tu d ié e p ar P ellio t, « M à r Y a (h )b hallàhâ, R ab b a n Saum à et les p rin ces õ n g ü t ch rétien s», an

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l-A CO N OUÊTE M ON GOLE ET LES MISSIONS 109

veau pape Nicolas IV (1288). Et nous avons montré comment, apres avoir
été interrogo p a r les cardinaux sur la foi de son Eglise, ct après avoir célé-
bré la messe en présence du pape, ceux-ci considérèrent 1’Eglise orientale
et son catholicos c o m m e dans l'union avec 1’Eglise romaine, le pape
envoyant une tiare et un anneau à Yahballâhã avec une bulle confirmant
son autorité sur la hiérarchie et les fidèles de son Eglise - exactement
c om m e on 1’avait fait p o u r les Arméniens et les M a r o n it e s -. Q u a n t à B a r­
çauma, il se fit faire un sceau avec légende latine ( Barbazom a Thartarus
o rie u ta lis a rc h ie p is c o p u s ) et sassocia à des évèques latins pour concéder
des in d u lg e n c e s170.
Paradoxalem ent, c'est à Rome même, et à 1’occasion d ’une ambassade
qui n a v ait pas en príncipe d o b je t religieux, que 1’union de 1'Eglise chal-
déenne et de 1’Eglise rom aine avait été conclue. Nicolas IV Ia confirma par
une lettre datée du 7 avril 1288171. Et Jean de Montecorvino, revenant à
R om e après avoir visite le catholicos, 1’année suivante, faisait état de I iden-
tité des vues de Yah ballàh à III et de son en v oyé172.

R e clierch e s s u r les ch rétien s d’Asie centrale. p. 237-288; sur la vie du ca th olico s. cf. J. M. Fiey,
C hrétiens syriaques sous les M ongols, p. 39-40, 43 44, 58-60. 67-73, 75-79.
>’ o J. R ic h a rd . La m ission en E u ro p e de Rabban Çauma et IV n io n des Eglises, dans X II.
C o n v e e n o V o lta O rie n te e O ccid ente nel w edioevo. Rom a. 1957 (A cca d e m ia dei L in c ei), p. 162­
167 Cf M H La u ren t. Rabban Saumâ, ambassadeur de Ill-K h a n Argoun. et la cathedrale de
V e ro li (1288). dans M él. d a rch . et dhist. de VÈcole franç. de Rome, 1958, p. 331-365 : Barçaum a,
a vec d a u tres é v è q u e s latins (et grees-unis) scelle une lettre d in d u lgen ce c o lle c t.v c p o u r les

v is ite u rs d e la c a th é d ra le d e V ero li. . , .


m U d iffé r e n c e e n tre les term es u tilisés par B ar Çaum a dans sa rela t.o n et ceu x d c la
le ttre du p a p e à Yaulahae. episcopo in partibus orien tis avait frappéSJ. B C h abot (N otes. p. 557­
580 et 587 588) nous a vo n s rem a rq u e (cf. n otre art.cle c.te plus haut) qu e la d.scussion des
, . . ■ . . |n r..: ,.n (r e le p rélat ch ald éen et les cardinau x avait p o rte sur la p rocession
p o in ts litig ie u x c t .m a ndant si R o m e avait bien id e n tifié le «c a th o lic o s des ch rétien s
“ f r auquel, par e ™ , ple. «
d O n e n t . a vec p r e tro u v é e (C h a b ot, Notes, p. 599). C ep en d an t la m ission com -
1289 sans fa .r e allu ston à I u n .té r e l r o u ^ ^ ^ ^ d c . nesto
p re n a it au tn o.n s d e u » U U » ^ ^ c h a ld é e n . c f |a ,e llr e d es Vassan au ro i d A n g le -
n e n . p o u r d é s ig n e i c ^^ n esto rien » qui va a ch eter des gerfa u ts en N o r v è g e pou r
‘* T . ' L e T * T c t a r « « U l , 1891, p, 56-57). Le pape, qui fait allusion à la p résen ce de
1‘ 11-Khan ( B i U B c o h des sou m is à Y a h ballàhâ, parait s en être rem is â c e u « i pou r
F rè re s M in eu rs ans t ^ ^ d o u te est-ce Jean de M o n te c o rv in o qui prit les con tacts
é c la ir e r les p o in ts d o u t e u x - p r o fes sio „ d e fo i qui n e s t pas sp écialem en t réd igé e
en visa gés et tl s e b o r n e á y ^ ^ ^ qu .lm p|icllem en t |a |e tlr e c o n fir m e la u to r ité de

v i ú S T »% T c le r u s p c p u lu s M s u b je c i. c e qui c o rre s p o n d à l a ffirm a tio n d e la Vie de

Mar Jahballàhà. c hald éen parait ôtre en tré en rela tion s avec les Latins, puisque
G u i l Z V d e C h " . t S d e C h ieti em p o rta ien t une lettre adressée ^

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1 ,0 LA PAPAUTÉ ET LES M IS SIO NS D O R I E N T AU M O Y E N AC.E

Cependant, R ic old o de M ontecroce, design e pnr la maitre e •


1’O r d r e des D om inicain s et muni p a r le pape d u n e bulle Cum
c im a lui donnant les p o u v o irs habitueis aux religieux partant cn
m is s io n 173, arrivait à M o sso u l en 1289, et y trouvait un rex c iv ita ti\ de
chrétien, « m a i s n e sto rie n », R ic o ld o prèch a devant lui, sans obtenir
ch an ge de rite (n o n m u ta v it r itu m ) ce qui peut nous a m e n e r à nous d * qUtl
d e r qu e lle s étaient les exigences d u D om in ic a in sur ce p o in t 174
quoi, ayant gagn é B a g d a d - oú il trou va des c o n frè re s et bien acciTír
p a r le clergé chaldéen, il s’avisa de p r è c h e r contre N estoriu s dans la cath>'
d r a le : on 1'expulsa, en purifiant d e rriè re lui 1 ’église à 1 ’eau de rose. 1 | a|[
p o rt e r ses d o lé a n c e s à « l a r c h e v ê q u e de la c it é » (sans doute un coadjuteur
d u cath olicos) qui, touché p a r le d é v o u e m e n t des missionnaires, venus de si
loin p o u r le salut de leurs frères, le u r offrit u n e église p o u r y célébrer a
c o n d itio n de s'abstenir de prècher, ce qui ne pouvait con v en ir au Domini­
cain.
Là-dessus, Y a h b a llà h á arriva dans son siège primatial, venant sans
d o u t e de M a ra gh a , ou d ’A rb è le s (p rin c ip a le ville ch rétienne du Nord de
1 Iraq, o ú le catholicos D e n h a avait c o m m e n c é à faire une sorte de «place
d e süreté » et qui avait 1 'avantage de le laisser à p ro x im ité de la cour mon­
g o l e ) 175. R ic o ld o po rta le d ébat devant lui, et le catholicos convaincu

nata. C h a b o t estim ait que celu i-ci n était autre qu e Barçaum a, qu e B u scarei de G isolf appclait
« R aban atta, e v e s q u e n e c to r in », P e llio t 3 estim e qu e ce R abban-ata ne pouvait ètre identique
à B arçau m a, pu isqu e deu x lettres d iffé re n te s leu r sont ad ressées (R e v . Or. chréi.. XXIV,
p. 281). La q u a lité d e n o b ilis v ir con ven a n t p lu tôt à un laic, il a su ggéré q u ’ il pouvait s agir du
c h r é tie n « S a b a d in » . Ou bien y aurait-il eu con fu sio n à la C u rie?
173 C e tte bulle, qui n a pu ju squ ici ê tre id en tifiée , serait sclo n nous c e lle du 3 septembre
1288 (R e g . N ic . IV , n °6 1 1 ) qu i n ’a pas été re p ris e dans le B u lla r iu m ordinis Praedicatorum
C e ei s a c c o r d e r a it b ien a vec les dates p ro p o s é e s p ar M o n n e re t d e V illa rd . Il libro delia pere-
g rin a z io n e , p. 15 (d a p r è s M an d o n n et, R ic o ld o de M o n te -C ro c e , p é le r in de Terre-S ainte el mis-
s io n n a ir e en O rie n t, dans R e v u e b ib liq u e , II, 1893), p o u r le v o y a g e en G a lilée en novembre-
d é c e m b r e 1288, le re to u r à A cre au d éb u t d e 1289, le d ép a rt p o u r l'Aías en mars (il était à
S ivas a p rès le 27 a v ril 1289, d ate d e la ch u te d e T r ip o li d o n t il a p p rit la n ouvelle dans cette
v ille ). M a is il faut a d m e ttre qu 'il ne sera it a r riv é à A c re q u e n o c to b r e et non pendant l'été
p ré c é d e n t. Au d éb u t d e 1288, d a ille u rs . il avait é té d é s ig n é c o m m e le cteu r pou r le c o u v e n t de
F lo re n c e , et son v o y a g e n eta it d o n c pas e n c o re en visagé.
174 O n p e u t se d e m a n d e r q u e l é ta it à c e t t e d a te , le g o u v e r n e u r « m o n g o l » d e Mossoul qui
é t a it n e s t o r ie n : M a s u d , fils d 'A 'là m a l-D in Y a cq ú b , le q u e l é ta it e f f e c t i v e m e n t chrétien, avait
é t é a s s a s s in é a v a n t 1’a r r iv é e d e R ic o ld o , le 4 a v r il 1289 : J. M . F iey , Assyrie chrétienne. I, ®e'
r o u t h , 1965 ( R e c h e rc h e s p u b lié e s s o u s la d ir e c tio n de l ’/ n s titu t de L e ttre s O rientales. XX II). p
85. S o n s u c c e s s e u r a u r a it é t é un A r m é n ie n (C h r é tie n s s y ria qu e s s o u s les M o n g ols , p- 51-57)-
175 Fiey, A ssyrie c h ré tie n n e , I, p. 77-91.

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LA C O N Q U Ê T E M O N G O L E ET LES M IS S IO N S 11 1

declara qu il n adhérait pas à ce que la doctrine de Nestorius pouvait avoir


dh é ré tiq u e ; il laissa le Dominicain disputer avec ses adversaires qu il
conlondit, en dépit des reproches de son clergé qui 1'accusait d ’ètre un
« F r a n c » 176. Des chrétiens, conquis par les prédications dominicaines, vin-
rent se confesser aux religieux latins.
Ce conflit éclaire assez bien la situation réelle. Si la reconnaissance de
la primauté rom aine ne faisait guère de difficultél77, la doctrine «nesto-
riennc» sur la dualité des natures du Christ - que tous les Chaldéens, sans
doute, connaissaient mal ou ne partageaient pas, lorsqu ils nétaient pas
rom pus aux controverses doctrinales avec les théologiens d autres rites (ce
devait être en particulier le cas des «N e s to r ie n s » d Asie centrale et
d E x t r c m e -O r ie n t )178 - restait celle à laquelle adhérait le clergé chaldéen,
que suivait la masse des fidèles. L ’adhésion à la profession de foi du Siège
apostolique, qu avait donnée le catholicos, ne signifiait pas une adhésion
semblable, de la part de toute 1'Eglise dont il était le chef. Et la tâche mis­
sionnaire qui se dessinait devant Ricoldo et devant ses émules, excellents
théologiens ro m pu s à la dialectique, revenait à faire pénétrer la doctrine
orthodoxe plus profondém ent dans les milieux chaldéens.
D ’autres, après Ricoldo, revinrent à la charge; Yahballáhã III envoya à
nouveau au pape raffirmation de son adhésion à 1unité de la foi et de la
reconnaissance de la primauté pontificale en 1302, puis en 1304, lorsque le
Dominicain Jacques d'Arles-sur-Tech lui apporta la nouvelle de 1'accession
de Benoit X I au trône p on tificai: en félicitant le nouveau pape, le catholi­
cos rejetait expressément les erreurs de N estorius179.

I7‘ Lassé des persécutions qui suivirent la conversion des Mongols à 1’Islam, Yahballáhã
ne dcmanda-t-il pas au khan de le laisser repartir en Orient. ou bien s e n aller - au pays des
Francs »?
D. Emmanuel, Doctrine de 1'église chaldéenne sur la primauté de Saint Pierre, dans Rev.
Orient chrétien, I, p. 137.
i» c f o liv ie r de Paderbom . H ist Damiatina. ed. Hoogeweg, p 266 Apud AMiochmm com -
liluti Nestorinos diligenler examinavimus. qui dicun, se credere duas na,uras uni,as m per-
sonà Chrisli e, beatam V irg in em matrem Dei e, hominis confitentur. ac ipsam e, Deum e, hom,-
nem pepensse. quod Nestorius negavit Utrum autem sic corde credunt. s,c ore con/uenlur. Deus
novit. Cf. A. D. Von den Brincken, Die •Nalionesi, p. 315-316. .
,. u a y n a id u . Annales. IV, p. 383 (Le texte esl reproduit par Chabot. dans Revue de
1'Orienl lalin U p. 631-637); Allaner. Dominikanermissionen. p. 61-63; Loeneru, La societé des
Prires Piriennanls, p, 161-162. C esl .u r ces deux lettres, que devait publler le cardinal Ttsse-
rant avec une étude malheureusem ent perdue (cf. E. Tisserant. dans D ic o n n a .rc de Theolog,e
calhoiique, XI, p. 211). qu est a p p o s i le sceau du catholicos <J Hamilton, t e , e » e ,urc e„ ca ,a c
,ires syriaques du grand sceau cruciforme de Màr Yahbollthà III, dejà cite).

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112 LA PAPAUTÉ ET LES M I S S I O N S D O R I E N T AU M O Y E N AGE

L évêque syricn de Tabriz, Denys, avait eu de son côté de nombreux


entretiens avec les Franciscains de T a b r i z : il avait affirmé, dans une leitre
de 1287, sa soumission au pape et son adhésion à 1'enseignement de l’Eglis
ro m ain e ; N icolas IV l’en rem ercia p a r ses lettres de 1288, et de nouveaux
échanges de lettres intervinrent en 1289 et 130218°. Quant au patriarche
jacobite, qui avait fort bien accueilli Jean de M on teco rvin o en 1288, il reçut
en 1289-1290 une nouvelle lettre pontificale contenant profession de foi et
invitation à 1’u n i o n 181. Ricoldo, lui, lors de son passage à Mossoul, à peu
près à la m ê m e date, eut une discussion p u b liq u e avec le «p atriarch e» (le
m a p h ria n G ré g o ire III Bar-Ç aum a), lequel résidait au couvent de Mar-
Matta.
Là aussi, les Dom inicains avaient été reçus p ar les moines, qui étaient
a lo rs trois cents, « c o m m e des anges et non c o m m e des h o m m e s», mais on
avait ch e rc h é à les dissuader de prècher. Un évêque avait pris la parole
c o n tre eux au cours d'une dispute théologique oü, bien entendu, Ricoldo
1'emporta. T o u jo u rs est-il que le m aph rian remit aux religieux une profes­
sion d e foi, écrite de sa main, oú il reconnaissait la coexistence de deux
n atu res d an s la personne du Christ, et qu'il autorisa les Dominicains à prè­
c h e r su r une place publique, ce q u i l s firent en arabe, lui présent. Mais il
a p p a ra it q u e tout un parti persista dans l’affirm ation de son monophy-
sisme, et su p p o rta assez mal les adhésions recueillies p a r e u x 182.
R ico ld o , - qui avait égalem ent pris la p aro le dans la synagogue de Mos­
soul, en réduisan t son contradicteur au silence, si on l'en croit - s adressa
en ou tre aux Maronites, qui avaient un archevêché à Tekrit. Ici aussi, il prê-

leu C e s lettres posent un petit p r o b l è m e : le siège de T a b riz avait été réuni à celui du
m o n a s tè r e de M ãr M atta en 1 155, et D enys n'est c o n n u c o m m e é v ê q u e de Tabriz que de 1277
à 1290, oü il fut re m p la c é pa r un Iwànis : J. M. Fiey, Assyrie chrétienne, II, p. 340, 352-353. -
C h a b o t s é t a i t d e m a n d é si D en ys n etait pas un é v ê q u e g rec {Notes, p. 586); mais c e s t en syria­
q u e qu'il é crivit au pape. Cf. Sbaralea, VI, p. 9 et 84; G o lu b o v ic h , Epistola syria Dyonisii epis-
copi Taurisiensis, d ans Arch. franc. hist., XIX, 1926, p. 351-352.
"" S b a ra le a . VI, p. 83; J. B. C h a b o t, Notes, p. 630-637, r e m a r q u e q u e la lettre en question
n a pas d ú ê tre re m ise au p a tr ia r c h e p r o p r e m e n t dit ( l e P. V an d en W yngaert a supposé que
M o n t e c o r v in o était passé pa r A n tio ch e - ville a lo rs ru in ée - p o u r la remettre), mais au
m a p h ria n , a lo rs G r é g o ir e B a r-H e b ra eu s, qui résidait au c o u v e n t d e Mar-Matta, près de Mos
soul; u n e lettre était a d r e s s é e « a u prêtre, son frè re» q u i serait son futur s u c c e s s e u r . **
g o ire I I I B a r ç a u m a . T o u tefo is. B a r- H e b r a e u s m o u ru t en 1286 (cf. J. M. Fiey, Les diocèse* w
* nw phrianat» syrien, 619-1860, th è se de d o c t o r a t en histoire, Dijon, 1972, ronéot.) ce qui rc
d ra it d ifficile d a d m e t t r e qu il avait re çu la visite d u m issio n n a ire franciscains en 1288- • -
IH2 Le m a p h ria n , c e tte fois, était c e r ta in e m e n t G r é g o ir e III, q u i allait d a i l l e u r s qu
M ar-M atta p o u r T a b riz de 1293 á 1298.

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LA CONQUÊTE M O NGOLE ET LES MISSIONS 1I 3

cha si11 Ics points controversés de la doctrine dc ses hòtes, en prenant pour
ciblc lc inonothélismc, et il obtint de 1'archevéque une profcssion de foi ct
une déclaiation d obéissance au Saint-Siège1M.
Ainsi Ricoldo, à la différence d ’autrcs religieux, apparaissait moins
comme un ambassadeur chargé de remettre Ics lettres pontificales aux pré-
lats orientaux184, que comme un redoutablc polémiste, qui suscitait dc
scrieux rcrnous au sein des communautés qu’il visitait, pour que les adhé-
sions qu il rccucillait fussent sans ambiguité. Les pouvoirs que lui avait
conicrcs une simple bulle Cum hora undecima lui permettaient ainsi de
s adresser a la fois aux dignitaires des Eglises orientales, à leur clergé et á
leurs ouailles.
La conversion de la Perse mongole à 1’Islam avait mis fin à 1activitc de
Ricoldo dc Montccroce. Celui-ci, nous 1’avons vu, avait quitté précipitam-
ment le pays pour revenir en Occident. Mais les missionnaires latins ne tar-
dèrent pas à y rcapparaitre. Cest ainsi que nous apprenons que des Fran­
ciscains, auxquels Boniface VIII adressa la lettre Inter caetera desideria en
1296, vivaient chez les Tartares d ’0 rien tIH\
En 1299, un groupe de Dominicains était envoyé par le même pape
avec la lettre hnmaculata lex Dom ini dans tous les pays d'Orient et d Occi­
d e n t186. Et, en 1300, un autre Dominicain, Jacques d Arles (-sur-Tech) allait
visiter les hauts prélats orientaux, en revenant d'une mission en Arménie; il
y retournait en 1304187. En 1307, cest une mission nombreuse qui était
coníiée à l evêque Guillaume de Lydda, qu Edouard II d Angleterre recom-
mandait à 1'empereur des Tartares, au pape et au roi d 'A rm én ie: accompa-
gné de nom breux religieux, Dominicains comme lui, ou d autres ordres, il
devait essayer de convertir les infidèles avant la croisade, en leur prêchant
la foi chrétienne, pour que le bras séculier nintervienne qu ap rè s 1echec

" J Laurent, Peregrinatores medii aevi quatuor, p. 126.


1,4 C e s t ainsi que Jean de Montecorvino emportait en Orient, en juillet 1289, des lettres
pour les patriarches, archevêques, évèques et autres prélats des Eglises jacobite, armén.enne,
géoreienne éthiopienne et nestorienne, et pour les souverains des pays qu .1 trayersera.t.
■» II leur confère les mêmes privilèges q uaux C r o is é s : Reg. Bom f VIII, n» 1306; Sbara-

ICa’ ^ R i n d l II 58 II sagit de Sanche de Boleyna, Guillaume Bernard, Bem ard Guille et


leurs com pagnons mais c e s t en Tunisie q u o n rctrouve Sanche (U»eneru, socülé des Frè.
r ^ Pérégrinants, p. 41. note). Cf. E. Dupré-Iheseider, Bonifácio VI I I e lazione nusstonana, cite

P 106- „ .,. ,4 ,
117 Sur sa carrière missionnaire, cf. Loenertz, ibtd., p. .

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114 LA PAPAUTÉ ET LES M IS SIONS D’O R IENT AU MOYEN-AGE

du glaive spirituell88. On ignore quelle suite eut cette initialive - quj. Qq^
fois, ne venait pas de la Papauté
Les missionnaires avaient-ils dépassé les limites des territoires soumis
aux Tartares? L ’apparition, en 1245, du nom des Indiens et des Ethiopiens
dans les bulles Cum hora undecima, parmi ceux des peuples oü pouvaient
se rendre les missionnaires, peut n a v o ir aucune signification particu-
liè re 189. Par contre, la lettre de Clément IV au maitre des Frères Prêcheurs,
alors H u m bert de Romans, en date du 8 février 1267 fait état de 1envoi chez
« le s Tartares, les Ethiopiens, les Indiens, les N ubiens et les Sarrasins des
pays d'Orient et du M id i» d u n frère Vasinpace, qui avait déjà plusieurs fois
visité ces contrées et pour lequel le pape demandait des com pagnons190. \\
sem ble donc que, dès lors, un missionnaire latin ait atteint la voie du golfe
Persique que dautres, marchands, mercenaires com m e les marins gênois
de ril-K h a n Argun ou missionnaires, allaient em prun ter après lui. La men-
tion des partes M eridionales montre que 1'Afrique orientale elle-mème est
alors entrée dans les perspectives de la m issio n 191.
On sait seulement que 1'archevêque et 1'empereur d ’Ethiopie figuraient
p arm i les personnages auxquels Jean de M ontecorvino était recommandé,
en 1289. M ais celui-ci et son compagnon, le D om inicain Nicolas de Pistoie,
lorsqu'ils s'em barquèrent effectivement sur le golfe Persique, se rendirent
seulem ent dans 1’Inde, oú M ontecorvino prêcha et baptisa pendant treize
m ois; son com p ag n on Nicolas y mourait. Et il ne sem ble pas que le Francis-
cain ait alors pensé à se rendre en Ethiopie, encore qu'il ait affirmé avoir
reçu une invitation de la part des Ethiopiens à venir dans leur pays ou à y
en v o yer des m is sio n n a ire s: c e s t en direction de la Chine q u i l sembarqua
en 1292. Par contre, p ro b a b lem e n t avant 1315, le D om inicain Guillaume
A d am et son confrère R aym ond Etienne ont bien navigué sur 1'Océan
Indien, relâché à Socotora, alors p eu plée de c h ré tie n s192, et atteint 1’Ethio-

l#(l Rymer, Foedera, I, 2, p. 100-101 (30 novembre 1307). Cette lettre a été datée par erreur
de «vers 1277» par Rõhricht, Regesta regni hierosolymitani, erreur reprise par le P. Streit dans
sa Bibliotheca missionum. Cf. infra, p. 143-144.
189 Sbaralea, I, 360. Von den Brincken, Die *Nationes», p. 270.
190 Ripoll, I, 482; Altaner, p. 63.
191 Cf. J. Richard, Les premiers missionnaires latins en Ethiopie, dans Atti dei Convegno
internazionale di studi etiopici, Roma 1959, p. 323-329 (Accademia dei Lincei); Les m issionnaires

latins dans l‘Inde au X IV ’• siècle, dans Studi veneziani, XII, 1970, p. 231-241.
192 Dauvillier, Les provinces chaldéennes «de 1’Extérieur», p. 277. Marco Polo signale un
archevêque, et Guillaume Adam mentionne les chrétiens habitant dautres iles de 1’ O c é a n
Indien (nos Navigations des Occidentaux sur l'Océan Indien et la mer Caspienne, p 360-361)-

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LA C O N Q D Ê T E M O N C O L E ET LES M IS SIO NS 115

pie. Mais nous ne possédons pas de traces d ’un échange de lettres ou de


professions de foi avec la hiérarchie ecclésiastique de ce pavs - pas plus
que de 1 Inde, dont les Chrétiens relevaient d ailleurs du catholicos chal-
déen.
Un certain n om bre d ’établissements permanents des o rdres mendiants
sont connus en pays mongol, ou sous domination mongole, dans les p a rte s
O rienta les. Si 1on met de côté 1'Arménie, dont nous avons parlé plus haut,
on sait que le couvent dominicain de Tiflis existait encore au m om ent du
retour de Rubrouck, en 1254. Les Géorgiens étaient considérés c o m m e unis
à Rome - Nicolas IV, en recomm andant M ontecorvino au roi Dimitri et à
1 archevêque Abraham , en 1289l93, les exhorte à conserver 1'union, et félicite
ce d e m ie r des «n o m b r e u x traits éminemment louables de votre z è le » dont
le même Montecorvino, qui avait vraisem blablem ent visité la G é o rg ie en
1288, lui avait rapporté le témoignage. L ’envoi d'une autre lettre annonçant
la venue de Guillaum e de Chieri et de Mathieu de Chieti, en 1291, ne fait
pas davantage allusion à la présence des Dominicains, qui ne s’était p ro ba -
blement pas m a in ten u e 194. Par contre, Ricoldo cite une résidence dom ini-
caine à Sivas, nceud comm ercial important et doté de b o n n e heure d ’un
consulat, mais cette résidence disparut assez v ite 195; de même, à B agd ad ,
avaient-ils peut-être une résidence temporaire. Les Franciscains avaient
également une résidence à Sivas - les cloches de leur église auraient été
détruites vers 1277-1280 par les M u su lm a n s196 — qui est qualifiée de c o u ­
vent, en 1292, lorsque 1'ordre décida de le laisser indépendant de la pro-
vince de T erre Sainte, qui comprenait la Petite-Arménie. II est p r o b a b le
que, dès lors, des Franciscains étaient également établis à d e m e u re à T ab riz
(on a vu que c e s t eux qui étaient en relations avec 1evêque Denys), ville
dotée d u n e importante colonie m archande latine197, et on connait é ga le ­
ment leur résidence à Selmas (Salam astrum in Perside) près d ’Urm ia, o u ils
eurent un martyr en 1284l98. On peut constater que, c o m m e en Qipéaq, ces

1.3 Tamarati, Hist. de leglise géorgienne, p. 431-434.


1.4 Loenertz, La société. . . , p. 193.
195 Ibid, p. 172 et 137, n. 8.
1.6 ° . Van der Vat, Conventus O.F.M. in Sebaste circa a 1280?, dans Arch. francisc. hist.
XXV, 1932, p. 99-100; Monneret de Villard, I l libro delia peregrinaiione, p. 83-84.
1.7 L. Petech mentionne (p. 560-561) une convention stipulant le paiement dune dette
entre deux Gênois à Sivas ou à Tabriz, en 1280.
I9* Selmas, détruite par un tremblement de terre en 1930, correspond à peu près à Dil-
man, 1'actuel Sahpur, au Nord-Est du lac de Rezaye. Un évêque chaldéen y réside (cf. Encycl.
rn' ^ 121); Loenertz, La société. .., p. 189. II ne faut pas confondre cette ville

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116 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IE N T AU M O Y E N -A G E

résidences permanentes se trouvent le long des grandes routes suivies par


les marchands : celle de Trébizonde à Tabriz, par Tiflis ou par Selmas; celle
de l'Ai'as à Kayseri, Sivas, Erzincan, Erzerum, Maku, Selmas et Tabriz. p|Us
loin, les routes que connaissaient les voyageurs latins, vers le golfe Persi-
que, 1’Afghanistan ou Urgenj, n''étaient sans doute pas fréquentées de fa çon
suffisamment intensive p ar des Latins p ou r assurer la vie d ’une commu-
nauté religieuse de leur rite. La situation, ici, changera au X I V e siècle.

*
★ *

La conquête - très provisoire - de la Syrie p ar les Mongols, en 1260,


avait m odifié de façon profonde les conditions dans lesquelles sexerçait
1'activité missionnaire.
En faisant disparaitre les dynasties musulmanes, aiyübides ou mème
seljuqides, auprès desquelles les religieux de la prem ière moitié du XIIIe
siècle avaient trouvé un accueil courtois, et parfois des raisons, générale-
m ent peu fondées, d e s p é r e r des conversions : les grandes missions du type
de celles qui furent envoyées aux souverains m usulm ans en 1233 ou 1245
devenaient impossibles. Et les Mamelüks, qui se substituèrent à ces souve­
rains, n etaient pas prêts à réserver le m êm e accueil aux missionnaires.
En provoquant, à court terme, la disparition des Etats latins au sein
desqu els un certain prosélytisme avait pu s’exercer p arm i les Musulmans. Il
se peut qu e 1'évêque de Tortose Mansel, dont Boniface V III disait q u ’il avait
prêché la foi « a u x infidèles de diverses n ations» ( apud infideles diversarum
n a tion u m ) ait été un des derniers à d év e lop p e r 1’apostolat dans son dio­
c è s e 199. Désormais, seuls 1'Arménie cilicienne et Chypre gardaient leur indé-
pendance, mais sans avoir une population musulrnane importante sur leur
territoire.
E n ouvrant des perspectives nouvelles à 1'apostolat, d u n e part du fait
que les Il-Khans étaient favorables aux chrétiens et que l’on pouvait espé-
í rer les gagner eux-m êm es au christianisme - à la faveur des négociations
m enées en vue d'une croisade qu'ils appelaient de leurs vceux -, de 1'autre
de fait que la tolérance m on gole rendait possible la prédication publique
aux M u su lm a n s eux-m êm es et les manifestations extérieures du culte chré­
tien . C e s t ainsi que les missionnaires purent pén étrer aussi p r o fo n d é m e n t

avec 1’ancienne Amastris du Pont, «Samastro» dans les portulans, qui eut plus tard son évê
que latin.
,w Reg. Boniface VIU, 306 (1295).

j
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L * CONQUÊTE M ONGOLE ET LES MISSIONS J 17

dans 1Asie que les m archands occidentaux; et les contacts pris avcc les
c e s es g ises orientales en vue de réaliser 1’union des Eglises cn furent
d autant facilites. L Océan Indien ouvrait désormais les routcs dc 1’Afriquc
orientale, de 1 Inde et de 1'Extrême-Orient.
En m em e temps, une doctrine missionnaire setait définie, que l'on
peut retrouver sous la plum e de Dominicains com m e sous celle de Francis­
cains. H u m b e rt de Romans, tant dans son traité D e o ffic iis o r d in is que dans
son encyclique de 1255, définit les deux points essentiels de son pro-
gramme de la façon suivante : élaborer des traités destinés à arm er les mis­
sionnaires d argum ents susceptibles de convertir « les nations barbares, les
paíens, les Sarrasins, les Juifs, les hérétiques, les schismatiques et autres,
qui sont hors de 1 E g lis e »; enseigner les langues dans lesquelles il convien-
drait de prècher, ceci par 1'envoi des religieux destinés aux missions dans
les provinces voisines des pays à évangéliser200. Et la S u m m a c o n tra G e n tile s
de saint Thom as d'Aquin pourrait représenter un des tra cta tu s dont la
rédaction était recom m andée, s'il ne semblait pas plutôt destiné à combat-
tre 1averroism e chrétien - tandis que d autres ceuvres du docteur dom ini­
cain ( C o n tra e r r o r e s G r a e c o r u m ; D e ra tio n ib u s fid ei c o n tra S a ra cen o s, G ra e-
cos et A r m e n o s ) sapparenteraient davantage au type d opuscules auquel
pensait H u m b e rt de R o m a n s201.
Vingt ans plus tard, le D e S ta tu S a rra c e n o ru m de Guillaum e de Tripoli,
fruit d'une expérience missionnaire vécue chez les Musulmans, propose des
m odes de form ation p ou r les religieux appelé à prècher aux infidéles : il ne
sagit pas seulement d a p p re n d r e leur langue, mais de se pénétrer des
méthodes qui permettront de les convaincre. Guillaume recom m ande d evi-
ter de recourir à la force, certes, mais aussi aux disputations si en vogue au
début du siècle. II se déclare aussi hostile à cette forme de provocation qui
entraine le martyre. Et cest sur la connaissance de 1’Islam et de la doctrine

200 In s tr u c tio n e s m a g is tri H u m b e r ti de o ffic iis ord in is , d an s B. H u m b e r ti de R o m a n s o p e ra de


vita re g u la ri, éd . J. J. B e r t h ie r , R o m a e 1889, t. II, p. 187-188 ( D e o ffic io m a g is tri o rd in is , C irca
G e n tile s) et p. 293 (e n c y c liq u e d e 1255 su r 1 'en s eig n e m e n t d e s l a n g u e s ) : et id e o c u ra n d u m est
ei ut s e m p e r in o rd in e s in t a liq u i tra cta tu s c o n tra e rro re s e o ru m , in q u ib u s fratres e x e rc ita re se
valeant c o m p e te n te r; et u t a liq u i fra tres id o n e i in s u d e n t in lo c is id o n e is a d lin g u a s a ra b ica m ,
hebra ica m , g ra e c a m et b a rb a ra s addiscendas. L a le t t r e d e 1255 in c ite le s v o lo n t a ir e s à se fa ir e
c o n n a itr e d u m a it r e g é n é r a l, d e fa ç o n à ê t r e e n v o y é s en T e r r e S a in te, en G r è c e et d a n s les
au tres p r o v in c e s v o is in e s d e s p ays h a b ité s p a r les in fid é le s .
201 Cf. J. H e n n in g e r , S u r la c o n tr ib u tio n des m is s io n n a ire s à la co n n a is s a n ce de 1’O r ie n t . . . ,
dans N Z M W , IX , 1953, p. 171 n., c ita n t le P. M . G ra b m a n n , D ie S c h r ift D e r a tio n ib u s fid e i ( S c h o -
lastik, X V I I , 1942, p. 187-216).

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118 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IE N T AU M O YE N AGE

m u s u lm a n e qu'il a p p u ie sa p ro p re m é th o d e d e con versio n en releva


le C o ra n les thèm es qui peuvcnt servir à un m issionnaire pour sa d
tra tio n 202.
R ic o ld o de M on tecro ce, re d o u ta b le d is p u te u r cependant, a rédigé |u
aussi un véritable m an u el à l'usage d es m issio n n aires dans son Libellus
n ationes o rien ta les q u e le P. D o n d a in e a m is à sa juste p la c e 201. On constat*
avec intérêt q u e notre m issionn aire se refu se à toute condamnation dc
p rin cip e à 1’é g a rd des Eglises jac o b ite o u nestorienne, que le pape n a pas
d é c la r é e s h é ré tiq u e s 204.
Les R egu la e generales destinées au x m is s io n n a ire s 205 comprennent la
re c o m m a n d a t io n de ne jam ais p rê c h e r p a r interprête, 1’interprète étant
g é n é ra le m e n t i n c a p a b le de rendre les argum en ts du missionnaire
(R u b r o u c k en avait fait 1'expérience). II faut qu e celui-ci connaisse à fond le
texte m ê m e des Ecritures, sans se con ten ter des exp o sition es familières aux
é c o le s occidentales, les O rien taux n a y a n t au cu n e raison de s e n tenir aux
textes retenus d an s ces recueils. II convient d e bien s’in fo rm e r des posi-
tions d oc trin a le s de ch a q u e « s e c t e » et de se g a r d e r de les ju g e r hérétiques
en bloc. L es divergen ces rituelles sont p arfaitem en t lé g it i m e s : trop de Frè­
res p e rd e n t leu r tem ps à discuter des rites liturgiques, alo rs que 1’Ecriture,
en p osan t en principe q u ’une foi u n iq u e ré p o n d a it à la croyance au même
Dieu, n'avait pas p arlé de 1'unité d an s les rites. En fin la discussion ne devait
in te rv e n ir q u a v e c les m ajores de c h a q u e E g l i s e : les sim ples fidèles n etant
pas assez versés dans la doctrine, risquaient tout au plus de se scandaliser
d e tels débats, et il fallait respecter leu r simplicité.
R ic o ld o ajoutait à ces règles des conseils m o r a u x : les Orientaux étant
très sen sibles à une hum ilité m ê m e affectée, le m issio n n aire devait éviter
toute affirm a tio n de su p é rio rité et p a r le r avec ré v é re n c e et humblement.
E n fin un p ré d ic a te u r ne devait se la n c e r dans la tâche missionnaire
q u a p r è s s etre é p r o u v é l u i - m ê m e : 1'amour d e Dieu, seul, devait lui servir
de guide, et a u be soin j u s q u a u supplice.

202 V o i r l'im p o r ta n t a r tic le d e M. V o e r z io , Fra G u g lie lm o da T rip o li, orientalista donteffl-


ca n o n el sec. X I I I , dan s M e m o rie dom enicane, 71, 1954, p. 73-113, 141-170, 209-250 et 72. 1 » -
p. 127-148, s p é c ia le m e n t p. 141-170, 209-230 e t d a n s la d e m iè r e liv ra is o n (o n notera
1'auteur s e m b le ig n o r e r le t u d e d e P. T h r o o p , C riticism o f the Crusades). .
203 A. D o n d a in e , Ricoldiana. Notes s u r les aeuvres de R ic o ld o da M ontecroce, dans ArchW ^
fra tru m praedicatorum , X X X V I I , 1967, p. 119-179, p a r t ic u liè r e m e n t p. 137-142. Le texte e
é d ité , p. 162-170.
P. 142.
205 P. 168-170.

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L \ CO NQUÈTE M O N G O L E ET LES MISSIONS 119

Raymond Lull, enfin, parait marqué par 1’enseignement d H u m b e rt de


Romans . ne e voyons-nous pas commencer par écrire, en état d'inspira-
tion, un livre contre les infidèles avant de fonder, en 1274, le couvent de
Miramar oú treize Franciscains apprennent 1'arabe en vue de convertir les
Musulmans ^ . En 1292, quand il écrit son Tractatus de modo convertendi
infideles, il n a pas changé de méthode : il recommande de dresser la liste
des sectes et de composer des traités adaptés à chacune d ’entre elles, de
former les futurs missionnaires à la connaissance des langues dans les stu-
dia qu il voit établis à Paris, à Rome, en Espagne, à Gênes et à Venise (en
raison des relations de ces villes avec les Tartares), en Prusse, en Hongrie, à
Caffa, en Arménie et dans le Taurus207. Et son abondante production
revient sans cesse sur cette question : le roman de Blanquerna imagine un
monastère oú cinquante Tartares résideraient avec vingt moines, pour leur
apprendre leur langue, et d'ou trente Tartares convertis, partiraient avec
cinq religieux pour aller convertir à leur tour le grand-khan . .. 208.
Mais Raym ond Lull, bien que surtout familiarisé avec TAfrique musul-
mane, s'intéressait aux missions d Orient dont il était parfaitement
inform é209. Très sensible au danger de voir les Tartares se convertir à
l l s l a m 210, il exprime dans sa Petitio ad Coelestinum V sa conviction que la
conversion de ceux-ci au christianisme, ne peut être le fait que des chré­
tiens orientaux : « i l conviendrait que 1'Eglise ralliât les schismatiques et les
unit à elle, ce qu'on peut faire par la discussion . . . , parce qu’avec eux on
pourrait plus facilement détruire les Sarrasins et avoir alliance et amitié
avec les Tartares. II serait encore souhaitable que 1'Eglise fit son possible
pour convertir les Tartares par la persuasion; ceci serait facile, puisquils
n’ont pas de religion et q u ils permettent qu’on prêche la foi du Christ dans
leur terre, et que quiconque le veut, peut se faire chrétien sans craindre sa
se ig n e u rie»2" .

10(1 R. S u g ra n y e s d e F ran ch , R a y m o n d L u lle, d o cte u r des m issions, avec un c h o ix de textes


traduits et annotés. P r é fa c e d e J. P. d e M en a sce, S c h ó n e c k -B e c k e n rie d , 1954 ( N e u e Z e its ch rift
fü r M is sion sw issen sch a ft S u p p lem en ta , V ), p. 29-34.
207 Ibid ., p. 134-135.
20‘ Ibid ., p. 103-104.
2lN R a y m o n d es t d a ille u r s c o n v a in c u de la n é cessité d e la c ro is a d e : S u g ra n y e s d e F ranch,
E is p ro je c to s de creu a d a en la d o ctrin a m is s io n a l de R a m o n L u ll, dan s E tu d io s L u lia n o s . IV,

1960, p. 275-290.
2.0 C f le L iv r e des c in q sages, é c r it en 1294, q u i m et en sc èn e un G rec, un N e s to n e n , un
Jacobite, un M u su lm a n . un L a tin . e t le T ra cta tu s de m o d o c o n v e rte n d i ( R a y m o n d L u lle . d o c te u r
des m issions, p. 137). G o lu b o v ic h , I, p. 373 et suiv.
2.1 C o n v e n ire t e tia m q u o d E ccle s ia re cu p e ra re i schism aticos, et illo s stbt u m re t q u o s potest

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1

120 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D’O R IE N T AU M O Y E N -A G E

Raymond Lull écrivait ainsi en 1294; la conversion des Mongols de


Perse à 1'Islam en 1295 annonçait la fin de 1'état de choses auquel il sc réfé-
rait. La croisade menée en com m un avec les Tartares n allait restcr conce-
vable que pendant une dizaine d'années e n c o r e 212; c est avec la conclusion
de trêves marchandes entre Õlgaitü et 1 Egypte que s annonce la paix défini-
tive, réalisée en 1323. Mais 1'idée que les chrétiens orientaux seraicnt les
meilleurs propagandistes du christianisme au près des infidéles, avait déjà
amené 1’Eglise latine à m ultiplier ses dém arches en vue de 1 Union des Egli­
ses, point de départ d u n e entreprise missionnaire com m une. Connaissant
m ieux les Eglises orientales, les missionnaires de la fin du X IIIC siècle
découvrent qu'il leur appartient de réveiller leur zèle et de les unir plus
intimement à 1'Eglise de Rome, tandis que l'expérience des missions du
Q ip caq fait apparaitre la nécessité de fo n d e r des églises latines en pays de
mission.

recuperare cum disputatione . . . quia cum illis melius possent destrui Sarraceni et haberi partici-
patio et am icitia cum T a rta ris ... Etiam esset conveniens quod Ecclesia faceret suum posse ad
con qu irend u m Tartaros per disputationem, quae con qu isitio est facilis quia non habent legem, et
quia p erm ittu n t in illo ru m terra praedicari fidem Christi et etiam qu icum qu e vult potest esse
Christianus absque tim ore d o m in ii Raymond fait ici allusion à cette impossibilité de prècher
en pays musulman que remarque Fritz Blanke, Die M oham m edanerm ission im Mittelalter, dans
M issionsproblem des Mittelalters und der Neuzeit, Zurich et Stuttgart, 1965, p. 77-88.
212 Notons qu a 1’occasion de la conquête de la Syrie par Ghazan, Raymond s'empressa de
passer en Chypre d’oü il entendait se faire envoyer en Syrie; mais il dut revenir à Gênes (Ray­
m ond Lulle, d octeur des missions, p. 43-45).

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TROISIÈME PARTIE

LA NAISSANCE D’UN ÉPISCOPAT


MISSIONNAIRE ET LES MISSIONS
DANS LES EMPIRES MONGOLS
DU NORD, D ASIE CENTRALE
ET D’EXTRÊME-ORIENT

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L a d iv is io n d e s p ay s d e m issio n d O rien t en d e u x g ra n d s secteurs s était
révélée d e p u is lo n g te m p s : au N ord de la M e r N o ire, les m issio nn aires
s a d re s s a ie n t e s s e n tie lle m e n t à des p e u p le s p aíen s qu'il s'agissait d a m e n e r
à la foi c h ré tie n n e , p u is d e d o t e r d une o rgan isation ecclésiastique perm et-
tant un tra v a il d a p o s to la t en p ro fo n d e u r . A u Sud, c ’est p a rm i des p e u p le s
déjà c h ristia n isé s o u b ie n au m ilie u des Sarrasins, p ra tiq u e m e n t im p e rm é a -
b les à la p r é d i c a t io n ch rétien n e, q u e s'exerce le l a b e u r m is sio n n a ire ; sa u f
exception , il vise à r a p p r o c h e r les Eglises orientales d e 1’E glise de R om e,
1'évangélisation d e s M u s u lm a n s rep résen ta n t un o b je c tif secon d aire. T ou te-
fois, d e p u is 1'invasion d e la Syrie p a r les M o n go ls, la P a p au té et ses en v o yés
d o m in ic a in s et fra n c is c a in s avaient p u e sc o m p te r la c o n v e rs io n d es p rin ce s
m o n g o ls et d e 1'aristocratie tartare à la foi chrétienne. M a is a u d é b u t d u
X I V e siècle, il v a d e v e n ir é vid en t q u e cet e sp o ir est vain, d u m o in s dan s
1'ancien d o m a i n e d e s Il-K h an s. L a p ré d ica tio n catholique, de ce fait, p r e n d
d an s ces c o n t r é e s u n e a llu r e assez d ifféren te de ce q u 'e lle est d an s les pays
so u m is a u x M o n g o l s s e p t e n t r i o n a u x : e m p ire d u gran d -kh an, kh an ats d e la
H o r d e d ' O r et d u T u rk esta n .
II est a sse z n a t u r e l q u e ce soit d an s les pays d u N o r d q u e se soit fait
jo u r p o u r la p r e m i è r e fois la nécessité de c r é e r un e n c a d r e m e n t d io c é sa in
p o u r d o t e r les « n o u v e lle s p lan ta tion s de la f o i » d e rite latin d es o rg a n is m e s
in d is p e n s a b le s à l e u r vie religieuse. C e qu i est plus curieux, c e s t le d é t o u r
p a r le q u e l la P a p a u t é fut a m e n é e à d é c id e r d e cette c r é a t i o n : la lointaine
C hine allait f o u m i r à C lé m e n t V 1'occasion de m ettre s u r p ied u n ép isc op a t
m is s io n n a ire a p p e l é à d ^ m p o r t a n t s d é v e lo p p e m e n ts.
Celui-ci, b ie n e n te n d u , ne d oit pas n o u s faire o u b li e r q u a u X I I I siècle,
et a n té rie u re m e n t , d e s é v ê c h é s avaient été érigés p artou t oú des con ver-
sions n o t a b le s é taien t i n t e r v e n u e s : chez les B altes et chez les Finnois
c o m m e c h e z les C o m a n s , les p a p e s d u X I I I e siècle avaient d élim ité d e s dio-
cèses, v o ir e d e s p r o v i n c e s ecclésiastiques, n o m m é des évêques, e n c o u ra g é
la m ise en p la c e d e s r é s e a u x p a ro is sia u x . N é a n m o in s la créatio n d evech es

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124 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT Al) MOYEN AGE

dans 1 'em pire mongol, rarement liée à la conversion des prine


nant les territoires oú s’clevaient les cités épiscopales, allait r
une institution originalc'.

I - LE S PAPES D U X I V ‘ S IÈ C L E
E T L ’O R G A N lS A T IO N D E S M IS S IO N S

A partir du second quart du X I I I e siècle, la tâche missionnaire, dans le


pays d ’Orient, était deven u e c o m m e le m o n o p o le des deux grands ordres
mendiants, D om inicain s et Franciscains. Les moines, Cisterciens ou Pré
montrés, qui avaient travaillé à 1’évangélisation des peu ples baltes ou slaves
d u ra n t le X I I e et au débu t du X I I I e siècle, paraissent déso rm a is s e ffa c e r et
il est de fait que leur règle ne prévoyait pas ce type d ’activité. On peut
c e p e n d a n t r e le v e r occasionnellem ent la participation des Cisterciens2, ainsi
q u e d a u t r e s religieux apparten an t à la g ra n d e fam ille des Mendiants - Car­
mes, E rm ite s de Saint A u gu stin 3 au la b e u r m issionnaire. Cclle des laics
n etait pas à négliger non plus : les Latins de K iev à qui écrivait Grégoire
IX, les «in t e rp rê t e s du roi des T a r t a r e s » au x q u e ls les pap es de la fin du
X I I I e siècle re c o m m a n d a ie n t les envoyés a u p rè s de s Il-Khans, les mar­
c h a n d s et les aventuriers ne se désintéressaient pas de 1 evangélisation
C e s t ainsi q u e les frères Polo s'étaient faits les e n voyés du grand-khan
a u p r è s d u pape, ap rè s lui a v o ir su ggéré le d é sir de d e m a n d e r des mission­
na ire s à celui-ci, et les envoyés de G ré g o ire X à Q u b ilai. C e s t ainsi que Maf-
fe o P o lo et son n eveu M arco, d é c o u v ra n t à F u g iu (F o u -t c h é o u ) des hommes
qu i p ra tiq u a ie n t u ne religion qui n etait ni 1’Islam , ni 1’idolâtrie, ni le culte
d u feu, s a v is è re n t d'y recon n aitre une su rviv a n c e d u n christianisme prê-

1 A I'étu d e d e C. Eubel, Die wahrend des 14. Jhdts im Missionsgebiet der Dominikaner und
Fransiskaner errichteten Bisthümer, dans Ehses, Festschrift zum elfhundertjàhrigen Jubüàum des
deutschen Campo Santo in Rom, F re ib u rg im B reisgau , 1897, p. 170-195, s a jo u te désorm ais
c e lle d e D. G io r g io F ed a lto , La chiesa latina in Oriente, vol. I, V e ro n a , 1973 (S tu d i religiosi, 3),
oú « l a ch iesa latin a nei te r r ito r i di m is s io n e » est e n v is a g é e aux p. 375-500.
2 Cf. 1'autorisation a c c o r d é e le 2 ao ü t 1373 p a r G r é g o ir e X I à R o g e r H erietsham , Cister-
cien du m o n a s tè re d e B o x le y , dans le K en t, d e p a rtir c h e z les In fid é le s avec douze autres
m o in e s p o u r p r è c h e r et p o u r les in stru ire dans la f o i : Arch. Vat., Instr. misc. 6258 ( Papal Let-
ters, IV. 106).
3 O n lit dans le De gestis t r i u m regum (c ité p a r G o lu b o v ic h , II, p. 1 5 3 ): Fides christiana
que ibidem (= en T a r ta r ie ) per infideles fuit oblita, n unc per Fratres Minores, Praedicatores,
Augustinos, Carmelitas et alios doctores de n ovo coepit reflorere. Les C a rm es eurent des cou-
ve n ts en O rie n t (P é r a ); d es A u gu stin s fu re n t é v è q u e s en pays d e m ission .

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LA NAISSANCE D'UN ÉPISCOPAT MISSIONNAIRE 125

ché plusieurs siècles auparavant - avec la pratique de la loi chrétienne et le


c ant u psautier - et parvinrent à convaincre leurs chefs de sa d re sse r au
bureau es c rétiens de K hanbaliq po ur s’y faire inscrire, ce qui aurait per-
mis de aire reconnaitre com m e chrétiennes plus de sept cent mille famille
de la Chine du S u d 4. N éanm oins ces interventions restent sporadiques, et
limitées à une prem ière dém arche vers la christianisation5: la táche d'ins-
truction et la desserte spirituelle restent le fait des missionnaires apparte-
nant au clergé, et celui-ci est pratiquement constitué par les deux grands
ordres mendiants.

a) Le rô le des o rd re s dans la p rép a ra tion et Tencadrem ent des m ission n a ires

D om inicains et Franciscains eurent donc à organiser les missions, cha-


cun de leur còté. Et 1action des maitres généraux des premiers, des minis­
tres g énéraux des seconds, est très sensible. Ainsi c'est H u m bert de Romans
qui d e m a n d e au chapitre général de prom ouvoir 1’étude des langues orie n ­
tales parm i les Frères Prêcheurs, et qui désigne des m issionnaires6; c'est
Bon agrazia qui envoie des Frères Mineurs au Qipcaq com m e en Egypte; et
c ’est aux chefs des deux ordres que sont adressés les rapports des prieurs
ou des custodes. C e s t à eux également que s'adresse la Papauté lorsqu elle
décide 1'envoi de religieux que font désigner le maitre général ou le minis­
tre général.
M is à part le cas des religieux envoyés en ambassade, et qui échappent
à 1'o bservation des règles habituelles, ceux qui prêchent en pays de mission
sont assujettis à 1 ’obéissance envers le gardien ou le prieur du c o u v e n t : nul
ne peut p rê c h e r sans 1 'autorisation de son supérieur, et on voit mêm e un
Franciscain désireux de recevoir le martyre en dem ander licence à son g a r­
d ie n 7. Les prieu rs relèvent eux-mêmes du prieur provincial; les gardiens,

4 M a r c o P o lo , T h e D e s c rip tio n o f the w orld, éd. M o u le et P e llio t, L o n d res, 1938, p. 53-54.


P e llio t a id e n t ifié c e s « c h r é t ie n s » à des M a n ich éen s, d o n t des é lé m e n ts paraissen t a v o ir sur-
vécu au F o u -K ie n au X V I I * s iè c le e n c o r e ; M o u le pen sait p lu tôt à des N e s to r ie n s (P . P e llio t,
Alotes o n M a r c o P o lo , éd . L H a m b is, II, Paris, 1963, p. 726-728).
5 L e r é c it d e la c o n v e r s io n d es K e r à it p a r B a r H eb ra e u s é v o q u e un p rocessu s d e ce
g e n r e : le r o i a y a n t eu une vision , ce sont d es m arch an d s c h ré tie n s qu i le p ersu a d en t
d 'e m b r a s s e r le c h ris tia n is m e , et les re lig ie u x e n v o y é s par le c a th o lic o s qu i I in stru isen t et le
ba p tisen t a v e c son p e u p le . Supra. p. 96. un é p is o d e a n a lo gu e oú le r ô le d in itia te u r d e la
c o n v e rs io n r e v ie n t à un c le r c russe, les F ran ciscain s étant a p p e lés en su ite p o u r in s tru ire le

p e u p le d é c id é á d e v e n ir c h ré tie n .
4 B. R c ic h e r t, L itte ra e encyclica e, p. 16, 88; R ip o ll, I, p. 482.
7 C ec i d a p r è s Jean d c W in te rth u r, C h ro n ico n , p. 207 {a gu a rd ia n o su o lic e n tia m p e tit et

o b tin u it u t s a n g u in e m m in u e re posset).

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126 LA PAPAUTÉ ET LES MIS SIONS D O R I E N T AU M O YEN-ACE

d'un custode, lui aussi soumis au ministre provincial. Et c'est ainsi qu’un
religieux désireux de prêcher aux infidèles doit être envoyé par sa provinc
d ’origine à 1’une de celles qui ont charge des missions, et désigné par le res
ponsable de celle-ci pour telle station missionnaire ou pour telle randon
née en pays infidèle. On se plaint d ailleu rs parfois que les provinciaux se
débarrassent de sujets indésirables en les envoyant en pays de mission-
mais c'est au contraire sur la capacité et sur la solidité de la formation que
les encycliques et les bulles pontificales insistent8.
La réglementation la plus complète à cet égard figure dans la grande
bulle Ut ig itu r de Benoit X II adressée aux Frères M in e u rs9: il est interdit
aux ministres généraux d e n v o y e r des frères en pays infidèle sans avoir eu
connaissance des résultats de 1'enquête menée sur eux par les ministres
provinciaux. Les partants devaient avoir été au préalable examinés sur leur
foi et sur leur Science par les provinciaux, assistés de frères d iscreti : il fal-
lait en effet n'envoyer aux infidèles aucun religieux entaché d ’erreur ou de
superstition dans sa foi, ou soupçonné de mauvaise vie. Et les ministres
provinciaux se voyaient interdire d ’envoyer des frères aux infidèles sans'
passer p a r le ministre général.
L e n c y c liq u e du maitre des Dominicains B é re n ge r de Landorre (1312)
spécifie elle aussi que les frères destinés aux missions doivent être des
volontaires, aptes à cette tâche, et qu'on doit avoir au préalable recueilli le
tém oignage des prieurs de leurs couvents et de leurs provinciaux sur leur
vie et sur leur rép u tation 10.
La préparation des missionnaires à leur tâche nous est moins bien
c o n n u e " . Le p rieur Philippe, en 1237, c om m e les Franciscains du Qipcaq
au débu t du X I V e siècle soulignaient 1'importance de la connaissance des
langues orientales; R ubrou ck avait d éploré 1'insuffisance de son interprète
à ex p o se r la foi chrétienne, et Ricoldo, dans ses Regulae generales, insistait

8 Golubovich, III, p. 162-163 (1310); B u lla riu m Franciscanum , V. p. 286, n°572; B. Rei-
chert, Acta capitulum generalium O.P., I, p. 290 ( Priores provinciales in suis provincialibus capi-
tulis fratres m oneant el inducant ut vadant ad gentes p ro earum con ve rsion e . . . et si quos solide
religionis et alias ad h oc ydoneos in ven erin t eos lice n cie m et cum litteris suis mittant - 1298).
et II, p. 191 (1329).
’ Eubel, B u lla riu m franciscanum. VI, 38 (28 novembre 1336): De fratribus autem ad partes
infidelium p ro praedicatione verbi d ivin i m ittendis . . .
B. Reichert, Litterae encyclicae m agistrorum generalium , Rome, 1900 ( Monumenta ordi
nis F. P. histórica, V), p. 317.
11 La meilleure étude est celle de Noe Simonut, II metodo devangelizzazione dei Francês-
ca n i ira M u su lm a n i e M o n g o li nei secc. X III-X IV , Milano. 1947, p. 39 et suivantes.

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I-A NAISSANCE D UN ÉPISCOPAT MISSIONNAIRE 127

sur la ncccssitc p o u r les missionnaires d ’être en mesure de prêcher eux-


memes dans la langue de leurs a u d ite u rs'2. Roger Bacon avait, de son còté,
consacre tout un développem ent à Im anité de discuter avec les Orientaux
si I on ignore leur langue, et recom m an dé d'apprendre le grec, 1'arabe,
1 hébreu « p o u r la conversion des i n f i d è le s » 13.
En face de cette nécessité reconnue, deux attitudes avaient été adop-
tées. L u n e consistait à faire venir en Occident des jeunes gens sachant les
langues des pays de mission po ur leur donner une formation th é o lo g iq u e :
c est à cette lin que les papes Innocent IV et Alexandre IV avaient fondé des
bourses a u p rè s de I Université de P aris14. Bérenger de Landorre stipulait de
son coté, en 1312, qu e les jeunes gens sachant les langues orientales q u o n
enverrait laire leu r théologie seraient reçus et entretenus aux frais des p ro­
vinces dom in icain es de Provence, de Tuscie et des deux L o m b a r d ie s 15.
L autre attitude revenait à inviter les religieux occidentaux, désireux de se
consacrer aux missions, à apprendre les langues orientales. H u m bert de
Romans, en déplorant que trop peu de frères acceptassent de se plier à ces
études, recom m andait en 1255 à ses confrères qui se sentiraient prêts à étu-
dier 1 ’arabe, I hébreu, le grec ou «q u e lq u e langue b a rb a re », à se rendre en
Terre Sainte, en Grèce ou dans quelque province voisine des pays infidè­
le s 16. Des écoles de langues orientales, et surtout d a ra b e, existent bien en
Occident et l on sait que Raymond Lull en fonda une à M ir a m a r 17. Mais il
semble que 1'usage le plus courant était d e n v o y er les missionnaires en pays
de mission, oú ils se formaient à la connaissance des langues dans le pays

lz A. D on d a in e, Ricoldiana, dans A.F.P., X X X V II, 1967, p. 168. Cf. supra, p. 118.


11 De u tilila te gratnm aticae, dans The «o p u s m ajus» o f R oger Bacon, éd. B ridges. t. III. L o n ­
dres, 1900. p. 115-120.
14 L in s titu tio n d e b o u rses p o u r la fo rm a tio n th é o lo g iq u e d e clercs o rig in a ire s d 'O ricn t
(D e n ifle et C h a telain , C h a rtu la riu m universitatis Parisiensis, I. n°* 180. 181, 324, 527) ne doit
pas é tre c o n fo n d u e a v e c c e lle d e ch a ires d e langues orien ta les : cf. B. Altaner, D ie H eran bil-
dung eines ein heitn isches K le ru s in der M ission des 13. und 14. Jhdls, dans Z eitsch rift fü r M is­
sions- u n d R eligionsw issen sch afl, X V III, 1928, p. 193-208.
15 B. R e ic h e rt, L iltera e encyclicae, p. 319.
16 Ibid.. p. 19-20. , ,
17 Un e n s e ig n e m e n t de 1’a ra b e à l'in te n tio n d es m ission n aires dans un studium speciahsé
« t r é a liu de b o n n e h e u re en E sp a g n e; le c o n c ile de V ie n n e d é c id e en 1311 la c ré a tio n d e
chaires d e lan gu es o r ie n la le s à Paris. O x fo rd . S alam anque. B o lo g n e e l en Curte (D e n .fle el
Chatelain. o u v r. cilé , II, n - 695, 777. 786, 857) et c e tte d íc is io n fut su ivie d e real.sattons par-
tielles. Sur c e t .e im p o r ta n te qu estion , q u i a fait notam tnent l o b je t d e plusteurs etu des de
Berthold A lta n er. n ou s nou s p e rn te .to n s d e r e n v o y e r * n otre a r i.d e , le n s e .g n e m e n , des W
sne, orien ta les O ccid e n t au M oyen Age. i p a ra itre dans R evue des etudes ,sl<,mu,ues. I. X L IV .

1976, p . 149-164.

O O U I II IL.VJ U J W U I I I O V / U I II I U I
128 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

même, comme le prévoyait H u m bert de Rom ans et com m e Pascal dc Vito


ria le faisait, en 1335, en séjournant au couvent franciscain de Sarai, p0lir
apprendre le t u r c 18.
A 1'origine, Dominicains et Franciscains, lorsqu'ils sadonnaient à
1'apostolat, continuaient à être pris dans les cadres norm aux de leurs
ordres. Les Franciscains relevaient des couvents répartis entre les provin-
ces de Syrie et de R o m a n ie 19, et leurs voyages en pays infidèle ou schisma-
tique n'étaient considérés que com m e des déplacem ents autorisés par leurs
supérieurs, provinciaux, custodes ou gardiens des couvents. Pour les Dorni-
nicains, cest également aux provinces de G rèce et de Terre Sainte
qu apparten aien t les couvents disséminés dans les Etats latins d ’Orient -
tels, p o u r la Terre Sainte, ceux de Jérusalem ou de Nicosie et occasion-
nellement, établis dans les Etats étrangers à la chrétienté latine, comme
ceux de Tiflis ou de Péra (ce d e m ie r fondé après la rep rise de Constantino-
ple par les Byzantins)20. Mais dans les deux ordres, il app aru t assez tôt quil
était difficile da ffe cte r des religieux uniquem ent ch argés de tâches mis­
sionnaires à des couvents de type normal, et à les faire d é p e n d re des insti-
tutions régulières d u n e province franciscaine ou dom inicaine. A côté des
couvents prennent place des loca, qui peuvent être con sidérés comme des
résidences ou des postes de mission. Et ces établissem ents sont désormais
détachés des provinces p o u r être reg rou pés dans des ressorts nouveaux :
les vicairies franciscaines, la société dom inicaine des F rères Pérégrinants.
Du ministre général des Frères M in e u rs relevaient, probablement
depuis une date de peu antérieure à 129221, et sans d o u te après une courte
p é rio d e oú put exister un vicaire général unique p o u r 1’e n se m b le des pays
soum is aux M ongols, les deux vicaires de T a rta ria A q u ilo n a r is et de Tartaria

-r ^ * ° ^ k ° y ic h , IV, p. 244 et suiv. S u r la p r é p a r a t io n d e s m is s io n n a ire s , cf. Christian


W . T r o ll, D ie C h m a m is s io n im M itte la lte r, dan s F ra n z is k a n is ch e S tu d ie n , X L I X , 1967, p. 39-42.
19 C f. O d u lp h u s Van d e r Vat, D ie A nfa nge d e r F ra n z is k a n e rm is s io n e n u n d ih re Weiterent-
w ic k lu n g im N a h e n O rie n t u n d in den m o h a m m e d is c h e n L a n d e rn w à h re n d des 13. Jhdts,
W e rl, 1934.

, q . . 2.Õ R ' L ° e " ertZ ' U s o ciété des F rè re s P é ré g rin a n ts . E tu d e s u r 1'O rient d o m in ic a in , I, Rome,
37 (a c o m p le t e r p a r La S o cié té des F rè re s P é ré g rin a n ts de 1374 à 1475. E tu d e s u r 1'Orient
m m ic a in , II, dan s A rc h iv u m fra tru m P ra e d ic a to ru m , X L V , 1975, p. 107-145). C e tte im portante
e tu d e et c e lle du P G o lu b o v ic h su r les v ic a ir ie s fr a n c is c a in e s . n o u s d is p e n s e r o n t den trer
dan s le d e ta il. L o r d r e fra n c is c a in a v a it d a b o r d c r é é d e s « p r o v i n c e s . . n o n seu lem ent en
y rie . m a is en e r é r i e . p a r la su ite, c e lle - c i se t r a n s fo r m e e n « v i c a i r i e d e M a r o c » .
i • _ an n ee' * d é c id é d a t t r ib u e r le c o u v e n t d e S iv a s a u x fra trib u s cotntnoranii-
bus in te r T a rta ro s sive in Pe rs id e (e t n o n p lu s à u n e d e s d e u x p r o v in c e s d e R o m a n ie ou de

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LA NAISSANCE D'UN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 129

o n e n ta lis La prem ière vicairie comprit en définitive les deux custodies de


Sarai et de Khazane, celle-ci comprenant dès 1287 plusieurs couvents ou
loca. Dans la seconde, on trouve les trois custodies de Constantinople, de
Trébizonde et de Tabriz. Vers 1320-1330, une troisième vicairie, celle du
Cathay, avait été détachée de la première pour couvrir tout le territoire de
l’Extrême-Orient et de la Haute-Asie22.
Cette organisation parait moins stricte à la fin du X I V e siècle. En 1406,
le pape avignonnais, Benoit XIII, rappelle que les Frères Mineurs avaient
un vicaire p o u r châtier et gouverner les religieux de Caffa, de Péra et des
autres partes O rie n ta le s - il ne s'agit plus ni de la custodie de Khazarie, ni
de la viça ria A q u ilo n a r is 23 —. Boniface IX, le pontife romain, écrivant au cus­
tode de Sarai, le 7 janvier 1401, le qualifie de visiteur a latere du ministre
général dans la vicairie de Russie, dans une lettre ou la conversion des Kai-
tak du Daghestan est attribuée aux fratres m inores de societate peregrin a n -
tiu m n u n c u p a ti24. Trois ans après, le même pape sadresse « a u vicaire du
ministre général et aux frères de 1’ordre des Mineurs dits de la Société des
Pérégrinants, résidant à L w ó w pour évangéliser fidèles et infidèles et faire
connaitre la vérité de la foi catholique aux schismatiques » 25, ce qui établit
un parallèle étroit avec 1’institution dominicaine de la Societas peregrina n-
tiu m également dotée d ’un siège à L w ó w (Lam burga), tout en écartant l’idée
d une société qui aurait réuni les Dominicains et les Franciscains mission­
naires 26 : il sem ble plutôt que les Frères Mineurs avaient adopté vers la fin
du X I V e siècle, et pour un temps sans doute limité, le système utilisé depuis

« G o lu b o v ic h , II. p. 238-265.
23 Fontes, X I I I , 2, n° 88; K. Eubel, D ie avignonesische Obedienz der M e n d ik a n ten ord en .. .
zur Z eit des G rossen Schism as, dans les Quetlen und Forschungen de la G òrresgesellsch aft, I, 2.
1900, n° 1046.
24 Fontes, X III, 1. n° 103 (E u b el, B u lla riu m francisc., VII, n» 339 - ou la lectu re et custo­
diam est fa u tiv e ; le reg istre d e la ch a n c elle rie p o n tifica le p o rte bien et custodi).
25 Fontes, III. 1, n° 132.
24 On r e n c o n tre très fré q u e m m e n t ch ez les auteurs actuels la m en tion de cette societas
co m m u n e aux deu x ord res. N ou s avons seu lem en t rencontré, dans une indu lgen ce a cco rd ée
aux b ie n fa iteu rs des églises saccagées par Tam erla n ( Fontes, X III, 1, n° 58) la m ention des
fratres pra e d ica to ru m et m in o ru m ordinis, societatis p ereghn an tium nuncupati (19 aoút 1398). A
notre sens c e tte ex p res sio n in d iqu e seu lem en t qu e le pape regardait à ce tte date les m ission­
naires de í ’un ou de Tautre o r d r e c o m m e se définissant par la p p a rte n a n ce à une societas
percgrin antium . L e t is t e n c e c t Ih is to ir e d c c e ttc institution 4 lin té r ie u r de lo r d r e franciscain
ont été éta b lies par A. G ro etek en . E m e m iU elaLerUcke M issio n s gcs d h cto ft, dans Z e m c k n ft fUr
U is s U m tw is M s c k a t, II. IW 2 . p. 113: e lle paratt é tre née au tem ps d e B on ,fa ce IX et a vo.r eu
Pour ressort e s s e n ti.lle .n e n l la Russie, Ia C alicie. la P o d o l.e et la V o!hyn,e. Appu yée par une

con frérie, e lle est e n c o re c ité e en 1421.

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I 30 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

environ un siècle par les Frères Prècheurs. Lc 15 d é c e m b re 1409. enfin. f ;re.


goirc X II instituait un «arch ivicaire d é p u lé par le Siège apostolique dans
les vicairies de Russie, de Tartarie A qu ilon airc et O rie n ta le», lui soumettant
de surcroit, en 1411, les «provin ces»» de P é r a 27. Cette unification dc tout |e
territoire confiée aux m issionnaires sous la u to rité d un unique vicairc peut
fort bien s'expliquer par les circonstances : le G ra n d Schism e d ’Occident
incitait le pape à contrôler directem ent les religieux en pays dc mission.
Chez les Dominicains, la constitution de la S o cie ta s fra tru m peregrinou-
tiu m p r o p te r C h ris tu m in te r gentes parait av oir été plus tardive que 1'institu-
tion des vicairies missionnaires des Franciscains. Elle répondait au mème
b u t : détacher les missions du cadre provincial, de façon à leur assurer un
recrutem ent plus étendu, en les rattachant directem ent à 1’autorité du mai­
tre de 1'ordre. D eux couvents, ceux de Péra et de Caffa, fon dés en 1298 ou
peu après, et auxquels s’ajoutaient ensuite ceux de T r é b iz o n d e et dc Chio,
étaient soum is à 1’autorité du vicaire général de la Société, et servaient de
base à 1'activité missionnaire. L'encyclique du m aitre g é n é ra l Bérenger de
L a n d o r r e au vicaire général et aux autres m e m b re s de la Société, datée du
20 o c to b re 1312, précisait dans quelles conditions devait être gouvemée
c e l l e - c i : le vicaire général s’associait les d is c re c io re s fra tres d ic te societatis,
qui ne constituent cependant pas un chapitre provincial, p o u r prendre des
o rd on n a n c es, désigner des vicaires particuliers là o ú la c h o se serait néces-
saire; le vicaire général recevait le droit de p re n d r e des religieux partout
oú il lui sem blerait bon, à qu e lq u e s exceptions près, de r e c e v o ir des indigè-
nes des pays de mission dans lo r d r e , de c o r rig e r et m ê m e de renvoyer à
le u r provin ce d o r i g in e les frères défaillants. .. E n fin c ’est aux frères des
couvents de Caffa et de Péra q u ’il appartenait de se r é u n ir p o u r élire un
n o u v e au vicaire général, dont 1 election devait être c o n fir m é e p a r le maitre
de l o r d r e 28.
L a Société des Frères P érégrinants fut s u p p r im é e en 1363, à la suite du
chapitre général qui d é c id a de rattacher à la p r o v in c e de G rè c e les cou­
vents de Péra, Caffa et T ré b iz o n d e qu i lui servaient de b a s e 29. A ce moment,
les m issions d o m in ica in es de G ra n d e -A r m é n ie avaient c é d é la place aux

27 N o m in a tio n d e M ic h e l d e M o n te c u c ito ( F o n te s , X I I I , 1, n ° 150) - G r é g o ir e X II, aban-


d o n n é p a r le m in is tr e g é n é r a l, r e m p la ç a it a lo r s c e lu i- c i - . L e m ê m e es t d it en 1411 in spirttua-
lib u s v ic a riu s in Pera et p r o v in c iis suis p r o e ccle s ia C o n s ta n tin o p o lita n a ( i b i d , n° 152).
2" B. R e ic h e r t, L itte ra e e n c y c lic a e . . . , p. 313-320. S u r le s in s titu tio n s d e la societas, leur
d é v e lo p p e m e n t , n ou s r e n v o y o n s à R. L o e n e r t z . La s o c ié té des F rè re s P é ré g rin a n ts , p. 1-37.
29 L e q u a t r iè m e c o u v e n t, C h io , a v a it é t é r a tta c h é à la G r è c e d è s 1352. Cf. R e ich e rt, Acta
capitulorum generalium, n °4 0 1 .

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i
LA NAISSANCE D UN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 131

religieux de 1'ordre arm énien des Uniteurs, et la nécessité d'une structure


spéciale p o u r accueillir des Frères détachés auprès des infidèles et des
schismatiques, tout en continuant à appartenir à leur province d ’origine,
pouvait ne plus apparaitre évidente; les missionnaires et les D om inicains
de Péra et Caffa firent appel au pape p o u r obtenir confirm ation de leurs
privilèges, et U rb a in V dut adapter ceux-ci à la situation de ces deux villes,
ou 1'autorité appartenait effectivement à des gouverneurs gênois et la sou-
veraineté à des princes non-catholiques (22 septem bre 1364)30. Une dizaine
d a n n é e s plus tard, la S ocieta s était rétablie dans des conditions qu 'a éclai-
rées un récent article du P. L o en e rtz 31. G régoire XI, ayant restauré la hié-
rarchie é piscopale latine en Arm énie et fait appel à des m issionnaires d o m i­
nicains p o u r c o lla b o re r avec les Uniteurs d'Arménie, plaça ceux-ci sous
l’autorité d 'u n «v ic a ire du maitre général en Arm énie et dans les pays
d 'O rie n t», qui retrouvait les prérogatives de 1'ancien vicaire des Pérégri-
nants (avril 1374). Mais, arrivés à Péra, les Dominicains prirent contact avec
1 ’e m p e r e u r byzantin et ces contacts furent assez prom etteurs p o u r q u ’ils ne
poursuivent pas leur v o y a g e : le vicaire, Elie Petit, fit état de ce q u ’il était
indispensable de ren d re aux missionnaires les quatre couvents qui leur ser-
vaient de ba se de départ, et ainsi de restaurer 1'ancienne S o cie ta s P e re g ri-
n a n tiu m , ce qui fut fait par une bulle du 28 janvier 1375. En 1378, le pap e lui
incorpora les couvents de « R u s s i e » et Valachie, et notam m ent celui de
L w ó w qui devint le chef-lieu de la société. Celle-ci vécut ju squ a la chute de
Constantinople, puis fut dissoute en 1456 p o u r être rétablie dès 1464.
Ainsi 1’o r d r e dom inicain conserva-t-il 1’organisation particulière de ses
missions qui fut m êm e un moment, nous 1’avons vu, imitée p ar les Francis­
cains.

b) L e rô le de la pa p a u té

La co m p é te n ce des ord re s religieux en matière d e n v o i, de répartition,


de controle de 1'activité des missionnaires est donc bien établie, et les let­
tres des Franciscains du QiqÒaq au ministre général suffiraient à attester sa
réalité, autant qu e les interventions des chapitres généraux de 1 ordre
Dominicain dans Torganisation des missions. M ais la papauté gard e un rôle
essentiel dans la tâche apostolique. C e s t ainsi q u u n e bulle de 1288 adres-

,u Fontes, X I, n° 70-71. .
n R. J. L o e n e r tz , La S o cié té des Frères P é rè g rin a n ts de 1374 à 1475. E tu d e s u r lO r t e n l d on u
nicain, II.

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132 LA PAPAUTÉ ET LES MIS SIONS D ORIENT AU M O YE N AGE

scc aux Frères Mineurs in te r T a rta ros c o n s titu ti précise q u ’ils s'y trouvent
m a n d a to vel o rd in a tio n e seu lice n tia a u t p e rm is s io n e Sedis apostolica^n *
autrcment dit que ceux-là même qui n'ont pas été directement investis
le pape de leur mission, l'ont été par leurs supérieurs en vertu d ’une autor^
sation pontificale. Les légats en Terre Sainte, en Grèce, en Hongrie ont
joué un rôle essentiel dans les tentatives dapostolat chez les peuples non
chrétiens ou non soumis à 1'Eglise romaine : bien des bulles pontificales
leur ont été adressées à cette fin, au X IIIe siècle surtout. Les missionnaires
eux-mêmes (entendons les religieux envoyés chez les infidèles à charge de
les convertir) sont parfois dotés expressément des pouvoirs d'un légat, tel
Jean de Montecorvino, en 1289, Odoric de Pordenone, entre 1320 et 1330
ou Jean de Marignolli, au milieu du X I V e siècle33. De Francon de Pérouse
fondateur du couvent de Caffa et premier vicaire général connu de la
Société des Pérégrinants, le nécrologe du couvent de Pérouse écrit qu'il fut
envoyé « personnellement et nommément par le seigneur pape Boni­
face VIII com m e son légat et nonce spécial, avec de larges privilèges»34. Or
nous possédons le texte de la bulle du 10 avril 1299 qui était adressée à
F r a n c is c o P e ru s in o , ainsi q u a dix-huit autres Dominicains, tous nommé­
ment désignés : le pape les qualifie bien de n u n c ii n o s tri et leur confère des
privilèges : ceux-ci nexcèdent pas ceux qui figurent dans bien dautres bul­
le s 35.
Ainsi le statut de légat apostolique a-t-il pu apparaitre comme celui qui
était conféré aux missionnaires, ou au moins aux chefs de groupe; cest ce
qui explique que dans son encyclique de 1312, Bérenger de Landorre spéci-
fie que les Frères envoyés in te r gen tes par le souverain pontife resteront
soumis à la correction du vicaire général des Pérégrinants, sauf disposition
expresse figurant dans leurs bulles36.
R om e avait un moyen de contrôler les agissements de missionnaires,
sans passer par le canal des maitres des ordres : c etait la nomination
d'inquisiteurs de la foi. Si l'on en croit un nécrologe, c est le Dominicain
A n dré delia Terza qui aurait été p r im u s in q u is ito r in te r in fid eles et Sarace-

VI, 10.
B u lla r iu m fra n cis ca n u m ,
,J Golubovich, III, p. 90-91, etc.
54 R. Loenertz, L es missions dominicaines en Orient a u X I V ' siècle et la S o cié té des Frères
P é ré g rin a n ts ,dans A F.P., II, 1932, p. 66-67, avec la correction menlionnée dans La société des
F re re s P é ré g rin a n ts , p. 35, note 1.
” Bulle Im m a c u la ta le x D o m i n i : Fontes, V, 2, n° 127 (Ripoll, B u li O .P., 11, 68).
56 L itte ra e e n cy clica e , p. 317.

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LA NAISSANCE D UN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 133

nos] le P. Loenertz a révoqué cette assertion en doute37. Selon cci autcur, il


n v a pas de raison p o u r supposcr q u o n ait créé un inquisitcur anlérieurc*
ment à la désignation par Clément VI, donc entre 1342 et 1352, du Sien-
nois(?) Philippe B ind us de In c o n tris , Dominicain du couvent de Péra,
comme inquisiteur en Romanie. En 1359, Innocent VI étendit ses pouvoirs
à la Tartarie, à la Perse et à la Comanie, oü beaucoup de chrétiens «erraien l
contre la foi catholique». II ne semble donc pas que la nomination dc cet
in q u is ito r haeretica e p ra vita tis ait été liée aux troubles qui agitèrent 1'Eglise
catholique de Perse sous Jean X X I I : Philippe écrivait en 1359 un traité sur
la procession du Saint-Esprit qui visait évidemment les doctrines grec-
q u esJs. G régoire X I confia les mêmes fonctions à Jean de Gallo; puis, en
1381, U rbain VI décida de diviser le ressort qui avait été confié à ce d e m ie r
en t r o i s : Russie et Valachie, Arménie et Géorgie, Grèce et Tartarie relcve-
raient désorm ais de trois inquisiteurs, dont le pape abandonnait d ailleurs
la désignation au maitre général des Dominicains ou à son vicaire en
Orient39. Mais à la mort d André Arm enus, nommé inquisiteur en Tartarie et
en Grèce le 8 d é c e m b re 1389, cest Boniface IX qui désigna son successeur,
Lucas de B o z o lo de P é ra 40. Les trois ressorts devaient être réunis vers
143141.
Toutefois tous les inquisiteurs d'Outre-Mer n'étaient pas pris dans
1’ordre des P r è c h e u r s : le 29 décem bre 1375, Grégoire XI, constatant que
les pèlerins de T erre Sainte comprenaient bon nom bre d'hérétiques, et
redoutant leur influence, donnait au provincial de Terre Sainte de 1'ordre
franciscain les fonctions et le titre á ’in q u is ito r haereticae p ra vita tis en Terre
Sainte, en Syrie et en E gypte42. Il est vrai qu'à cette époque ces trois
régions n'étaient pas à proprem ent parler des pays de mission.

17 L o e n e r tz , La S ociété, p. 36, n ote. Si l’on cro y a it d e v o ir re te n ir c e tte in d ica tion , il fau-


drait a d m e ttr e q u ’il n ’y eu t pas c o n tin u ité e n tre la d ésig n a tio n d ’A n d ré d e lia T e rza et c e lle d e
P h ilip p e de In c o n tris .
38 Fontes, X , n ° 127; R. J. L o e n e rtz , F rère P h ilip p e de B in d o n In co n tris , O P., du c o u v e n t de
Péra, in q u is ite u r en O rie n t, d an s A.F.P., X V III, 1948, p. 256-280, à q u o i on peut a jo u te r
Th. K a e p p e li, D e u x n o u v e a u x o u vra g es de Fr. P h ilip p e In c o n tr i de Péra, O.P., ib id , X X I I I , 1953,
P 161-183. - On p eu t n o t e r q u e n 1353, In n o c e n t V I d em a n d a it à le v ê q u e d e C affa d e p rocé-
d er c o n tr e les fra tic e lli ( F o n te s , X, p. 2 7 ): il ne s e m b le pas q u ’à c e tte d a te il y ait eu un in q u i­
siteu r en fo n c tio n d a n s c e d io c è s e , q u i a p p a rte n a it é v id e m m e n t à la T a rta rie.
Jv R. L o e n e r tz , La S ociété, p. 74-76; R ip o ll, II, 299. , . ,
40 Fontes, X I I I , 1, n ° 79. La n o m in a tio n d 'A n d r é « d e C a ffa * ava it été d é c id é e pa r le v ic a ir e
des F rères P r è c h e u r s et c o n fir m é e p a r le p a p e : R ip o ll, II, 310.
41 L o e n e r tz , La S ociété, p. 67.
43 F on tes X I I n° 185. Aussi, lo r s q u e saint Jacques d e la M a rch e, F ran ciscain , d é jà p o u rv u
du titre d m q u is íie u r (s u r so n v ic a r ia t d e B o sn ie. cf. A. M atan iè, d a n s A r c k Francisc. h is t,

bcannea oy uam bcanner


134 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

Si les inquisiteurs veillaient à la pureté de la doctrine, non seulement


des ouailles, mais aussi des évangélisateurs, leur rôle restait réduit. Dès |a
fin du X I IIe siècle, il était apparu indispensable d'inform er exactemcnt la
papauté de 1'état des missions et de la qualité des missionnaires : Nicolas IV
avait confié en 1291 à deux Franciscains, Guillaum e de Chieri et Mathieu
Chieti, une enquête sur la situation des religieux des différents ord res sc
trouvant dans les partes Tartaricae, sur leur vie, sur leurs mceurs, et d’en
faire rapport à leur retour43. Ce qui peut nous remettre en mémoire
d a u tre s rapports qui furent rédigés à la dem ande du Saint-Siège, mais sans
doute à 1'occasion des visites de missionnaires, rapports dont le plus remar
quable est sans doute le L iv re de ies ta t du g ra n t Caan, de Jean de Cori44.
La papauté intervient fréquemment, par exem ple en demandant aux
supérieurs des ordres ou aux chapitres généraux de désigner des religieux
p o u r les envoyer en mission, soit dans un but précis, soit plus généralement
p o u r prêcher aux infidèles. C e st directement au pap e que s’adressent ceux
qui désirent obtenir l’envoi de missionnaires - tels les frères Polo au temps
de G ré g oire X -. Et de m êm e q u ’Innocent IV avait écrit au provincial de
France p o u r dem a n d e r que des frères partent chez les T a rta re s45, ou Clé­
ment I V à H u m bert de Romans po ur solliciter Ia désignation de frères
« c a p a b le s et z élés» p o u r accom pagn er Vasinpace dans les partes orientales
et m e rid io n a le s *6, on voit Jean X X I I d e m a n d e r au chapitre des Frères Prê-
cheurs réuni à Toulouse 1’envoi chez les paíens de cinquante frères au
moins, pourvu q u ’ils soient dans la force de 1age (1328)47, et Grégoire XI,

U I I , 1960. p. 111 et su iv.) d e m a n d e à p a r tir en O rien t, E u g è n e IV p e u t-il lu i d o n n e r pouvoir


d e x e r c e r ses fo n c tio n s dans les r é g io n s oú so n o r d r e a c o u tu m e d a v o ir d es inquisiteurs. et
aussi, c o m m e su p p léa n t, dans c e lle oú ces fo n c tio n s so n t n o r m a le m e n t a ssu rées par les Frè­
res P r e c h e u r s (5 a v r il 1441 ): W a d d in g , A nnales M in o r u m , X I. p. 100.
41 V o l u m u s . . . de statu re lig io s o ru m in eju sdem m o r a n tiu m p a rtib u s c e rtilu d in e m plenam
h a b e re ; d is c re tio n i veslrae p e r apostoltea s crip ia m a n d a m u s q u a ten u s, c u m in partibus fueritis
supra dictis, de statu vitae et c o n v e rs a tio n i r e lig io s o r u m ip s o ru m tam v e s tri q u a m a lioru m ordi-
n u m q u o ru m c u m q u e , n o n p e r in d a g a tio n e m s o le m n e m , sed alias, d ilig e n te r ca u le el sollicite
m d a g a re c u re tis p le n iu s verita iem , et q u o d in v e n e ritis in h a c parte, n o b is p e r vestras litte ra s ...
fid e h te r in tim e tis (G o lu b o v ic h , I, 354-355; F ontes, V, 2. 110).
44 Q u i fu t e c r it « p a r un a r c e v e s q u e q u e on d it 1 'a rc e v e s q u e S a lte n s is au com m ant du
pape eh a n X X I I * d e c e n o m » (é d . J a cq u et, d a n s J o u r n a l A s ia tiq u e 1830 p 59)
4> G é r a u d d e F ra c h e t ( V ita e fra tru m O. P., éd . B . R e ic h e r t, p. 150 e t su iv.) a d écrit l'émo-
tio n s u s c ité e p a r c e tte lettre .
46 S u p ra , p. 114.

4 R ip o ll, B u li. O. P., II, 178 (n e c ju v e n e s , n e c a n tiq u i).

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LA NAISSANCE D UN ÉPISCOPAT MISSIONNAIRE 135

en janvier 137448, écrire au maitre général du mêm e ordre en faisant état dc


ce que certains des missionnaires désignés pour la Grande-Arménie tiédis-
saient, p o u r lui d e m a n d e r de réunir en chapitre les religieux des provinces
d Aragon, d Espagne, de Toulouse, de France, de Provence, des deux Lom-
bardies, de R om an ie et de Grèce, de façon à les inciter à persister dans leur
intention, à lever les obstacles que 1 on mettait à leur départ, et à les pour-
voir du nécessaire49.
Les papes interviennent également à la dem ande de certains mission­
naires, en autorisant ceux-ci à em m ener avec eux des religieux de leur
ordre - sans préciser s ils sont habilités à passer outre aux réticences des
supérieurs de ces relig ie u x 110 ils leur fournissent des recommandations,
tant auprès des souverains chrétiens ou non-chrétiens qu auprès d autres
autorités51. Ils se préoccupent enfin de leur donner les moyens matériels de
faire leur voyage, de s’équiper, de bâtir des églises, etc. Les concessions
d indulgences vont en ce sens 52; mais on voit aussi Urbain V c o m m u e r en
1369 le vceu de pélerinage en Terre Sainte de la comtesse de S erbie en une
aum ône de mille ducats p o u r les Franciscains partant en Tartarie ad p ra ed i-
cand am paganis fidem c a th o lic a m ^ . Et la Cham bre apostolique, elle aussi,
supporte sa part de 1'aide que les papes accordent aux missionnaires et aux
«n o u v e lle s plantations de la f o i » 54.

4" L e m ê m e pa p e. le l cr m ars 1376, a p p ren an t qu il y a à R o m e d e n o m b re u x relig ieu x ,


P rê c h e u rs et M in eu rs , d é s ire u x de p a rtir p rê c h e r aux in fidèles, d e m a n d e au v ic a ir e g é n é r a l
de R o m e d e c h o is ir vin g t-cin q vo lo n ta ires , d e leu r fa ire o b te n ir lice n ce d e leu rs su p é rieu rs et
de les fa ir e p a r tir o u tr e -m e r oú ils a u ron t le d ro it d e co n stru ire q u a tre lieu x d e le u r o r d r e ,
ainsi q u e d e s o r a to ir e s a v e c c lo c h e r et c im e tiè re (G o lu b o v ic h , V, p. 213).
49 Fontes, X II, 97 (17 ja n v ie r 1374).
50 A in si, en 1363, 1’a rc h e v ê q u e d e M a la zg erd est a u torisé à e m m e n e r vin gt D o m in ic a in s
en A r m é n ie ; le v ic a ir e d e T a r ta r ie A q u ilo n a ire, d o u ze Fran ciscain s dans sa v ic a irie , en 1372­
1374; à la su ite d e la n o u v e lle d e la c o n v e rs io n d e plus d e 20.000 p erso n n es aux pays d es
Ru thèn es, d es L ith u a n ie n s et d es T a rta res, le F ranciscain Jean d e P o lo g n e est a u to ris é à
e m m e n e r d e ses c o n fr è r e s , en 1410 ( F on tes, X I, 48; X II, 28 et 122; X I I I , 1, 151).
51 A in si les F ra n c is c a in s p a rta n t en T a rta rie sont-ils rec o m m a n d és, en 1369, au b a y le
vé n itien d e T a n a et aux p o d e s ta ts g ê n o is d e Péra, C h io et C affa ( Fontes, X II, 173; G o lu b o v ic h ,
V, p. 144). A c e la s a jo u te n t, b ien en ten d u , les d e m a n d e s d a p p u i (p a r e x e m p le , au m êm e, p o u r
les c h ré tie n s d es M o n ts C a s p ie n s p e rs é c u té s : id., 162).
52 Jean d e Z iq u ie , a r c h e v ê q u e d e M a tre g a , e x p o s e ainsi qu il a b e s o in d a rg e n t p o u r b à tir
des é g lis e s en Z ic h ia et r e ç o it d U rb a in V le d r o it d e c o n c é d e r des in d u lg en ces aux fid è le s qu i
l'y a id e r o n t ( F on tes, X I, 25-25b) - ainsi q u e c e lu i d e c r é e r des o ffic e s d e n o ta ire s a p o s to liq u es.
autre s o u rc e d e r e n tr é e s fin a n c iè r e s ( i d ) .
53 Fontes, X I, 175.
54 Cf. O. V an d e r Vat, Expensae cam erae ap ostolica e p ro m ission ib u s FF. M M . in te r T a rta ros
annis 1318-1353, dans A F H , X X X I , p. 538-540 (a ch a t d e liv re s p o u r la v ic a ir ie d e C athay,

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136 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIO NS D O R IE N T AU M O YE N-AG E

Les missionnaires, en d e h o rs des p o u vo irs exceptionnels dont nous


allons parler, pouvaient avoir besoin d'éclaircissem ents, en matière théolo-
gique ou disciplinaire, en vue de leurs con versation s avec les Orientaux
L'histoire des p o u rp a rle rs avec les A rm é n ie n s devait révé ler la difficulté de
suivre une politique cohérente. C etait e n co re à R o m e qu'il fallait sadresser
p o u r avoir des éclaircissem ents de ce genre. M ais ici, le Siège apostolique
fut long à c o m p r e n d r e la spécificité de l'effort m issionnaire, dans un
m onde dont le X I I I e siècle n ’avait que p r o g r e s s iv e m e n t découvert
Tampleur, et à se d o te r d u n o rg an e spécialisé. N o u s a v on s dit que Rabban
Ç a u m a avait ren con tré des h o m m e s fort bien disposés, m ais fort mal infor-
m és des particularités de sa p r o p r e Eglise. R a y m o n d Lu ll avait vainement
suggéré, dan s sa P e titio R a y m u n d i ad C o e le s tin u m V, la désign ation d u n car­
dinal qui eüt été ch argé d'a ssu re r la continuité de la p o litiq u e missionnaire
d e la P a p a u t é 55. Et si l'on se résolut, sous U r b a in V, à c o m p i le r un registre
de n e g o tiis T a r ta r o r u m et a lio r u m in fid e liu m , ite m fides A r m e n o r u m à partir
des d o c u m e n ts con serv és dans les archives pontificales, c'est sans doute
q u e le m a n q u e d'un tel instrum ent de travail était a p p a r u à q u e lq u e s clercs
spécialisés oc c a sio n n e lle m e n t dan s cette m a t i è r e 56.
A p lu sie u rs reprises, des m ission naires avaient d ü X I V e siècle, on vit à
p lu s ie u rs rep rise s des m ission n aires se r e n d re en C u rie « p o u r avoir une
d é c la ra tio n su r certains articles de la f o i » 57. Et le p a p e G r é g o ir e XI, le 5
n o v e m b r e 1373, se d é c id a à n o m m e r, p o u r r é s o u d r e les difficu ltés qui arrê-
taient les m issionnaires, une c om m issio n com posée de six docteurs en

1338; d e v ê te m e n ts p o u r d e jeu n es T a rta re s en tran t dans l'o rd re , en 1318; frais d e voyage de


m is sio n n a ire s J érô m e d e C s ffâ i N ic o la s dc M o lc in o et ses c o m p a g n o n s , cjui re ço iv en t 1.500
flo r in s à le u r d ép art. en 1338; Jean d e M a rig n o lii, qu i en r e ç o it 50 à son r e to u r ); K. Schaefer,
D ie A u s g a b e n d e r a p o s to lis c h e n K a m m e r u n te r J o h a n n X X I I , P a d e rb o rn 1911, p. 544, 705, 801,
et D ie A u s ga b e n des ap. K a m m e r, P a d e rb o rn 1914, p. 77, 321, 524, 703 (1338-1358). En 1375,
Jean, é v ê q u e d e T ab riz, r e ç o it 60 d u cats p o u r son r e to u r en G ra n d e -A rm é n ie , et chacun des
D o m in ica in s qu i 1'accom pagnent, vin gt ( F o n te s , X II, 150); en ju in 1385, Jean d e France, évê­
q u e de T ab riz, O. P., partant en G ra n d e -A rm é n ie p r o fid e c a th o lic a p re d ic a n d a , a reçu 260
d u cats (A rch . Vat., C o lle c to ria e , 129, f° 175).
G o lu b o v ic h , I, p. 373 et suiv. Cf. aussi S u g ra n y e s d e Fran ch , R a y m o n d L u lle , d o cte u r des
rnissions, p. 72. Dans son ro m a n d e B la n q u e rn a , il m o n tr e l'e ffic a c ité d e 1'in terven tion pontifi-
cale ainsi é c la iré e , en su p posan t q u e les T u rc s re fu sa n t d e la is s e r p r è c h e r q u a tre religieux
qu i a v a ie n t a p p ris le tu rc dans le u r pays, le c a rd in a l in fo r m é d e c e fa it agit au près du pape.
le q u e l e n v o ie d es cad ea u x au s e ig n e u r d es T a rta re s q u i o n t su b ju gu é la T u rq u ie et qui
c o n tra in t ses sujets à la is s er les re lig ie u x p r è c h e r à le u r gu ise (p . 114-115).
Sui ce re c u e il (R e g . Vat. 62), cf. Julcs G ay, L e p a p e C lé m e n t V I et les affaires d ’OricnU
p. 8-10.
57 L o e n e rtz , L a S o c ié té , p. 127-128.

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LA NA1SSANCE DUN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 137

théologie : trois évêques (Ceoffroy, de Quimper; François, de Cavaillon:


Gautier, de Glasgow), deux pénitenciers apostoliques (Guillaume Romain
et o n en o ) et le Frére Isnard, régent au collège dominicain d'Avi-
gnon. Cette commission était chargée dexam iner les questiones dubiae qui
lui seraient soumises par «ceux qui prêchent la parole de Dieu parmi les
infidèles, hérétiques et schismatiques»5*. Aussitòt, les Franciscains de
Corse, de Bosnie et de Russie sadressaient à elle59; les pays doutre-m er
appartenaient également à son ressort.
Lobjectif restait limité. Cette congrégation de propaganda fide avant la
lettre n avait de compétence que théologique, et elle vécut peu de temps,
d autant plus que le Grand Schisme survint peu après60. Mais sa constitu-
tion témoigne de ce que le besoin d'un organisme propre aux missions
avait fini par se faire sentir.

c) Les orig in es d'un episcopal m issionnaire

A la différence des missions antérieures au X 11Ie siècle, celles qui


avaient pris pour objet la conversion des peuples des partes orientales et
m eridionales, comme de la Tartarie Aquilonaire et du lointain Cathay, ne
s’appuyaient pas sur une organisation ecclésiastique préétablie : ces mis­
sions n avaient pas, habituellement, bénéficié de 1’appui d u n souverain pré-
cédemment acquis au christianisme, ni d un épiscopat constitué par Rome
aussitòt cette conversion réalisée. On avait encore vu, au milieu du X IIIC
siècle, la papauté créer des évêchés en pays ruthène ou chez les Iatvagues,
sitôt le ralliement des princes à la foi romaine acquis; ces évêchés n'avaient
vécu que quelques années, tout comme celui des Comans, mais c est dans le
cadre de ces diocèses que s etait exercée 1’action évangélisatrice.
Chez les Tartares, comme chez les souverains plus ou moins considérés
comme schismatiques61, oú sexerçait lactivité des missionnaires domini­
cains ou franciscains, le cadre diocésain était inexistant, ou du moins, les
évêques, archevêques ou patriarches n étant pas soumis à Rome, il n était

4* Reg. Vat. 265, f° 80v°. Le 22 juin 1372, à la dem ande du vicaire franciscain de Bosnie,
une com m ission d e th éolo gien s dom in icains et augustins avait été créée. qui ém it une décla-
ration sur des points dou teu x ( Fontes, X II, 34-34a). E lle préfigurait la com m ission de 1373.
” Reg. Vat. 265, f ° ‘ 60, 62, 69-71. Le P. L oen ertz nous a signalé a v o ir vu, aux archives de la
Societas p eregrin a n tiu m à L w ów , un instrum ent ém anant de cette com m ission, scellé du sceau
de ses six m em bres. . ■
60 Le libellus de notilia orbis (éd. Kern. p. 119) se plaint en 1404 de I m d .fféren ce de la
Curie aux dem an d es des m issio n n a ires. La com m ission de 1373 avait certainem ent disparu.
Sur la c o n ce p tio n q u e n avaient les Occidentaux. cf. A , D. Von den B rincken, Die
■Nationes ch ristia n oru m o rie n ta liu m ».

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138 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

d a u c u n appui p o u r eux. D'autre part, ceux que 1'Eglise romaine avail th


gés de prêcher sa foi appartenaient normalement, nous 1'avons vu à cie f
o rdres religieux de récente création, l’un et 1'autre marquês par la reche*
che de la pauvreté et, à ce titre, considérés c om m e «m en dian ts». Ainsi d
simples prêtres, astreints à o b s e r v e r une règle rigoureuse, se voyaient cha
gés d'évangéliser les pays orientaux. On avait pu espérer, au temps de Gré
goire IX ou d'Innocent IV, un ralliem ent rapide et sincère de la part des
prélats orientaux et de leu r clergé; l'expérience n'avait pas été décisive Et
la con version des « i n f i d è le s » se voyait, p o u r une grande part, confiée aux
religieux des o rd re s mendiants.
Ceux-ci se trouvaient, dès le début, obligés de solliciter des « privilè
g e s » , c ’est-à-dire des dérogation s à leu r règle. Les frères Mineurs devaient
vivre d a u m ô n e s , po rte r 1’habit de leur ordre, avoir le visage rasé; dès leur
p r e m ie r envoi au M aroc, en 1226, il leu r fallut ob te n ir le droit de porter la
b a rb e , de revêtir des habits non « r é g u li e r s » , d 'e m p o r te r de 1'argent avec
e u x 62. Ce sont là des dispositions qui furent sans cesse reprises63; mais un
R u b r o u c k , parti p o u r la c o u r de Sartaq sans avoir été p o urvu de privilèges
pontificaux, eut b e a u c o u p à sou ffrir en traversant l’Asie pieds nus dans ses
san d a le s et vêtu d 'u n e sim ple r o b e de bu re - tandis que Plancarpin pouvait
a d o p t e r le c o stu m e m o n g o l et q u e Ricoldo, plus tard, revêtit 1’habit d’un
c h a m e lie r p o u r é c h a p p e r à ses persécuteurs - . En ce qui concerne ces privi­
lèges m ineu rs, les o r d r e s pouvaient a c c o rd e r e u x-m ê m e s des dérogations.
Ainsi B é r e n g e r de L a n d o r r e autorise-t-il les P érégrin an ts à se servir pour
le u r p r o p r e usage de ce qu'ils auron t acquis; à e m p o r t e r avec eux 1’argent
n é ce ssa ire à le u r voyage; à se d é p la c e r lib re m e n t; à ne pas célébrer réguliè-
re m e n t la m e sse ; tout ceci ne relève qu e de la règle de 1'ordre. Le maitre
général, d ’ailleurs, constatait avec regret les a b u s au xq u e ls ces privilèges
e n tra in a ie n t certains F r è r e s 64.

t2 Prcssuti, Reg. H o n o r i i I I I , 2, n° 5865; F on tes, III, n° 199.


63 Cest ainsi qu'en 1365 Urbain V autorisé les clercs de Caffa à laisser croitre leur barbe
et leurs cheveux du fait qu'ils habitent in p a rtib u s in fid e liu m n a tio n u m et a lio r u m hereticorum
e t s c is m a tic o ru m (Golubovich, V, 112).
64 Ils amassent de 1’argent et le confient à des marchands; ils s’en procurent en absolvam
les «marchands d'Alexandrie» - c'est-à-dire ceux qui se livraient au commerce avec 1’Egypte
au mépris des prohibitions pontificales et de l’excommunication qu’ils encouraient ils vont
sans compagnons, g ir o v a g i et v a g a b u n d i, sans avoir eu de permission spéciale de leurs supe
rieurs; ils portent des vêtements qui les singularisent, usent de viande absque evidenri necesst
late, se mélent daffaires commerciales avec les marchands, nobservent pas le silence, évitent
de cohabiter avec leurs confrères et s autorisent même (du moins à Péra) à modifier les usa
ges liturgiques (encyclique de 1312 : L itte ra e e n c y c lic a e , éd. Reichert, p. 314-315).

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LA NAISSANCE D UN ÊP1SCOPAT MISSIONNAIRE 139

Mais les papes seuls étaient en mesure d accorder d autres privilèges et


de concéder aux missionnaires désignés par leurs soins ou sur leur ord re
des pouvoirs qui excédaient leur statut de simples prêtres, voire qui leur
permettaient d echapper aux obligations pesant sur tous les fidèles; ces pri­
vilèges font 1'objet de bulles dont le préam bule com mence le plus souvent
par les mots C um hora undecim a. La plus ancienne d'entre elles a été expé-
diée à 1'occasion du départ en pays m usulman du Dominicain Guillaum e de
Montferrat (19 janvier 1237)65. D a u tre s devaient suivre, en grand nom bre,
et 1’énum ération des peuples auxquels étaient envoyés les missionnaires à
qui étaient elles étaient remises - énumération qui correspondait, au début,
à ceux que visait la mission en question, mais qui devint pratiquement inva-
riable depuis le milieu du X II Ie siècle - a depuis longtemps retenu 1atten*
tion, du fait q u o n peut ainsi connaitre le domaine de plus en plus étendu
dans lequel s’exerçait le labeur missionnaire66.
Mais c est la nature des privilèges, lesquels vont en s accroissant et en
se précisant, tandis que la longueur des textes s'accroit dém esurément, qui

65 Fontes, III, n °2 1 0 . Dès 1233, les Franciscains partant ch ez les G é o rg ie n s et en pays


m usulm an ou in fid è le r e ç o iv e n t des p o u voirs, à la v é r ité peu éten d u s (le d r o it d e co m m u n i-
q u e r a v e c les in fid é le s : ib id , n° 163; Reg. G ré g o ire IX , n° 1220). La b u lle A etern i pa storis
q u e m p o r t e G é ra rd de P ra to en 1278 ( Fontes, V, 2, n ° 2 4 ); la bu lle Im m a cu la ta lex fu lm in é e
lors du d é p a r t d e F ra n c o n d e P é ro u s e et d a u tr e s D om in icain s en 1299 (ibicL, n° 127); c e lle
qui éta it d e s tin é e à N ic o la s B on et, Jean d e M a rig n o lli et leu rs c o m p a g n o n s en 1338 ( F on tes,
V III, n° 32), etc., ne d iffè r e n t g u è re des b u lles Cum hora undecim a.
66 Cf. le c o m m e n ta ir e qu i a c c o m p a g n e le d it io n de la b u lle du 21 m ars 1245 dans Fontes,
IV, 1, n° 19, et su rtou t 1'ouvrage de M elle V on den B rin ck en , D ie « N a tion es c h ris tia n o ru m
o rie n ta liu m * , au n o m d es d iffé r e n ts p eu p les c o n c e m é s . - Ces listes v a n e n t d a n s le d é ta il (d e s
gra p h ies a b e rra n te s s’y g lissen t: le n om des M o sso u lita in s - M o s s o liti en 1245 - d e v ie n t M os-
celin i, M o lc liti, M o c h iti, M o sceliti, M o ci, M osteliti, v o ir e Agolestici'.) D e 1233 à 1238, o n m en-
tion n e les te r r e s d e s S arrasin s et des Paíens, a u xqu els s a jo u te n t en 1239 (p o u r les F ra n c is ­
cains), les G recs, B u lga res, C o m a n s; en 1245, s’y a d joig n en t, à la suite d e s p re m ie rs , les E th io-
piens, S yrien s, Ib è re s, Alains, K h azars, Z iqu es, Ru thèn es, Jacobites, N u b ien s, G é o rg ie n s , A r m é ­
niens, In d ie n s et M o sso u lita in s. Dans les b u lles a c c o rd é e s aux D om in ica in s, en 1253, le n o m
des T a rta re s fig u r e e n tr e c e lu i d es K h a za rs et des Z iqu es, et, à la fin, s a jo u te n t les H o n g r o is
de G r a n d e -H o n g rie et les c h ré tie n s ca p tifs c h e z les Tarta res. La liste est d è s lo rs à p e u p rè s
s té ré o ty p é e , a v e c la d is p a r itio n é v e n tu e lle d e c e rta in s n om s (c e s t ainsi q u e c e lu i d es Syrt
s effa ce, re m p la c é , du fa it d une c o n fu s io n , p a r ce lu i des S c y t h e s : c e lu i d es Z iq u e s d is p a ra it
é g a le m e n t : en 1307, le n o m d e s S ic h i se su bstitu e à celu i d es S y ri et des Z ic h i, p o u r se trans-
fo r m e r en su ite en S cyth ae) tan d is q u e les V a la q u e s a p p a ra issen t é p is o d iq u e m e n t, à c ô té d es
Com ans, dan s une b u lle d e 1288 ( R egistre de N icolas, IV, n » 611). II est é v id e n t q u e le seul
souci d es réd a c te u rs, d a n s la m e s u re ou ils ne se b ç r n e n t pas à r e c o p ie r un te x te a n té rie u r,
est d ’h a b ilite r les d e s tin a ta ire s à a g ir dans tou s les pays des «n a t io n s q u i ne sont pas en c o m -
m union a v e c le s iè g e a p o s to liq u e •, n on d e p r é c is e r les pays o ü ils se r e n d r o n t e ffe c t iv c m e n t.

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]4 0 la PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

doit nous retenir ici. Le pape se substituait aux évêques diocésains pour
autoriser les missionnaires à prêcher, à baptiser, à confesser, à relever les
excommuniés des sanctions qu ils avaient encourues; il les autorisait à
absoudre les pénitents des irrégularités, à réconcilier ceux qui setaient
séparés de la foi, à recevoir les ordres sacrés des prélats catholiques, à
bénir même, là oú il n’y avait pas d e v ê q u e en com m un ion avec le Saint-
Siège et à condition d etre prêtres, les vêtements sacerdotaux, les pales et
les corporaux : tel était len se m ble des pouvoirs accordés en 1237. Dès 1245,
Innocent IV précisait que ses envoyés pouvaient fréquenter les excommu­
niés67, conférer la tonsure et les premiers ordres mineurs, confirmer les
clercs revenant à 1’Eglise romaine dans les ordres qu'ils avaient reçus, don-
ner des dispenses pour 1'ordre et le mariage, a b sou dre les apostats et les
meurtriers de clercs, permettre aux convertis de conserver leurs femmes
malgré des parentés prohibées par les canons, ju g e r les causes matrimonia-
les, fonder des églises, les pourvoir de curés, bénir les cimetières, commuer
les vceux, concéder des indulgences68.
Le D ire c to riu m apparatus, qui a été récemment retrouvé et qui date de
la fin du X IV e siècle, lorsque ces pouvoirs ont atteint toute leur ampleur,
permet de savoir dans quelles conditions elles s e x e rç a ie n t 69. II nous suffira
d ’indiquer ici que, dotés de ces pouvoirs, les missionnaires assimilés à des
légats du Saint-Siège exerçaient des prérogatives norm alem ent dévolues
aux évêques : la bénédiction des vêtements liturgiques, des autels et de
leurs ornements, des cimetières, la fondation ou la réconciliation des égli­
ses, la nomination de desservants, le privilège de con serv er leur caractère
clérical aux m em bres des clergés schismatiques, m êm es mariés, le droit de
confier aux néophytes la tonsure et les ordres mineurs, 1’octroi dmdulgen-
ces (jusqu à quarante j o u r s . . .). On pouvait m êm e voir de simples prêtres
confirm er des archevêques et évêques ram enés à 1’Union, après avoir véri-
fié qu ils avaient été consacrés selon les règles c a n o n iq u e s 7®.

*7 Ils p e u v en t c o m m u n iq u e r a v e c les C h ré tie n s n on unis à R o m e in v e rb o cib o et officto,


m ais ne p eu ven t pas c é lé b r e r dans leu rs é g lis e s lo r s q u e ce lle s -c i son t sises in terra fidelium
(b u lle du 22 m ars 1244 : Fontes, IV, 1, n° 8).

61Fontes, IV, 1, n“ 19 (S b a ra lea , I, 36 0); la s s im ila tio n d e s m is s io n n a ir e s aux légats est


in d iq u e e par le fait qu ils p e u v e n t d o n n e r d is p e n s e in illis casibus in quibus s o le n t legati Sedis
apostolice dispensare.
M Athanasius M atanic, B u lla m is s io n a ria * C u m h o ra ja m u n d e c im a . ejusque juridicum
« ire c to riu m apparatus*, dans A F. //., L, 1957. p. 364-378 ( d a p r è s les b u lles a cco rd ées aux

ocT o b r^ n T l) 11 j3nV,er 1239’ 21 mafS 1245‘ 19 aVrU l258, 13 aOÜt l291, 23 juUlet 13° 7, 23
70 Dans les lettre s a d res sée s à G é ra rd d e Pra to, le 5 a v r il 1278. le p a p e lui accord e ce

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141
LA NAISSANCE D UN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE

Ces pouvoirs ne devaient être qu exceptionnels. Nous savons que les


papes de la première moitié du X IIIC siècle avaient délibérément créé des
sièges épiscopaux dans les pays nouvellement, et souvent partiellement,
convertis à la foi chrétienne: Livonie, Prusse, Comanie, pays lithuaniens.
Aussi n'est-il pas surprenant q u e n 1278, apprenant les conversions réalisées
par le ministère des Franciscains au pays de Qipõaq, le pape Nicolas III
semut à la pensée q u '« i l n'y avait dans ce pays aucun évêque catholique
qui püt prom ouvoir ces frères aux ordres sacrés». Ayant appris qu « i l a
existé une cité très avancée dans le territoire tartare, et qui a été détruite
par ces mêmes Tartares, oú, depuis plus de quarante ans, il n'a résidé ni
évèques, ni autres habitants catholiques», il invitait son légat en Hongrie,
1'évêque Philippe de Fermo, à s'enquérir de la réalité de cette information,
et de savoir si on pourrait attribuer à levêque qu ’on y établirait « d e s reve-
nus relevant du Saint-Siège»71. II s’agissait de faire revivre le diocèse des
Comans; mais il ne semble pas qu’il ait été donné suite à ce projet.
En aucun pays musulman, même en Turquie oú les mercenaires latins
avaient pourtant été fort nombreux jusqu'en 1243, la papauté ne parait
avoir jugé nécessaire d ’adopter la formule qui avait été retenue pour l’Afri-
que du Nord, oú Grégoire IX avait élevé un Franciscain à 1'épiscopat sous
le titre d 'episcopus M arrochitanus (ou d'évêque de Fez), en lui attribuant
essentiellement pour fidèles les mercenaires composant la m ilitia christiana
du sultan du Maroc, mais en escomptant aussi la conversion des infidèles72.
Dans les partes orientales, oú les conversions de Musulmans ou de M on gols
par les soins des religieux latins n'avaient jamais été très nombreuses, et oú
les fidèles du rite latin restaient très dispersés, en petits groupes de m a r ­
chands ou d'aventuriers, la création de diocèses de ce même rite ne s'impo-
sait pas com m e elle s etait imposée dans les Etats latins d ’Orient, dotés de
véritables colonies occidentales. L o b je t principal netait-il pas, de ce còté,

pouvoir, mais en reconnait le caractère exorbitant, et lui recommande de recourir plutôt, à


cette fin, au ministère dun évêque ou archevêque quil sassocierait (Fontes, V, 2, n° 25).
71 Fontes, V, 2, n° 27 (Sbaralea, III, 347-348). Le pape recommandait au ministre provin­
cial de Hongrie que le baptême soit conféré aux Comans convertis selon le rite de leglise
romaine (ibid., n° 28).
7Í Lenvoi de missionnaires dominicains et franciscains au Maroc en 1225-1226 (Pressuli,
Reg. Honorii III, n° 5527 et 5836) a pour but la prédication, la conversion et le baptême des
infidèles; Honorius III envisage dès 1226 quun ou deux dentre eux soient élevés à lepisco-
pat. Sur 1'avenir de cette institution, cf. A. Lopez, tos obispos de Marueccos, dans Archivo
Ibero-Americano, XIV, 1920, p. 399-502; E. Tisserant et G. Wiet, Une lettre de Valmohade Mur-
au pape Innocent IV, dans Hesperis, VI, 1926, p. 28-53.

■ II I Vy I
J
142 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

d a m e n e r à 1'union les ressortissants des Eglises orientales. tant que lCs


M usulm ans restaient rebelles à la prédication chrétienne? Et, ici, les mis-
sionnaires agissant en tant que légats ne suffisaient-ils pas à recevoir les
actes d'union et à les transmettre à Rome, dans la mesure oú ils n agissaient
pas en vertu des pouvoirs à eux conférés p o u r c on firm er les prélats orien-
taux dans les dignités qu'ils avaient acquises?
Le Dom inicain André de Longjum eau, cependant, était revenu de sa
seconde a m bassade auprès des M o n g o ls avec des informations qui lui per­
mettaient de suggérer la création d'évêques latins en pays mongol ou
m u sulm an : selon lui (c'est-à-dire, probablem en t, selon les chrétiens orien­
taux qu'il avait rencontrés ou qui, c o m m e David et Marc, chrétiens de Mos­
soul envoyés p a r Álgigidãi en am bassade auprès de saint Louis, avaient fait
route avec lui), le khalife de B a g d a d et d'autres princes musulmans entra-
vaient les nom inations épiscopales p o u r affaiblir les chrétientés mésopota-
miennes. C e s t ainsi qu'Innocent IV fut am ené à inviter son légat en Orient,
E u des de Chàteauroux, à faire consacrer des Dom inicains et des Francis­
cains c o m m e évèques p o u r suppléer à la carence de prélats orientaux, dans
les sièges laissés vacants. La bulle Athleta C h risti du 20 février 1253 ne
parait d a ille u r s pas avoir été suivie d'effet73.
Dix ans plus tard, le l cr aoüt 1263, U rbain IV envoyait au patriarche
latin d'Antioche un Dom inicain anglais, W illia m Freney, déjà élevé à 1'épis-
copat, p o u r lui c o n férer un archevêché ou un évêché « i n A rabia vel Media
sive Armênia, patriarchatui Antiocheno non subditae sed ecclesie Romanae
su b je c ta e ». Le titre qui lui fut confié, celui de « R a g e s de M é d ie » fut tout
sim plem en t pris dans la N o tic e des évêchés relevant d'Antioche oú figurait
un a rc h ie p is co p a tu s Edessensis sive Rages M e d o ru m . M ais il semble que le
nouvel «a rc e v e sk e de R a ge s», qui revint dès 1265 en Angleterre, était
chargé essentiellement d'un e mission diplom atiqu e auprès de 1'Eglise
d ’A r m é n ie 74. II s'en acquitta avec succès - nous savons dailleu rs quil
connaissait plusieurs langues et q u i l était c irc u m s p e c tu s el eloqu en tia com-
m e n d a b ilis on pourrait r a p p r o c h e r sa nom ination de la suggestion de

71 Fontes, V, 1, n° 86 (S b a ra le a , I, 651). Cf. J. R ic h a rd , La Pa p a u té et les m issions catholiqlieS


en O rie n t au M oyen-A ge, d an s M él. arch. et hist. de l'E c o le de R om e, 1941-1946, p. 258-260. Cf.
aussi G. F e d a lto , La chiesa latin a in O riente, I, p. 400.
74 J. R ic h a rd , Deux évèques dominicains, agents de ÍU n ion arménienne au Moyen-Age. dans
A F. P., X I X , 1949, p. 255-260 ( « W illia m F ren e y , a r c h e v ê q u e d E d e s s e » ). II n ’est pas exclu q u<?
c e p e rs o n n a g e , a va n t d e n tr e r dans 1’o r d r e d o m in ic a in , ait é té m ê lé aux rela tio n s entre a
C u r ie et le r o i H e n ry I I I (cf. la r é im p r e s s io n d e ce t a rtic le , Orient et Occident au Moyen-Age
contacts et relations, L o n d r e s 1976, p. X X I-2 6 5 ).

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LA NAISSANCE D UN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 143

Rubrouck, rec om m a n d an t que l'on chargeât des évêques, plutôt q u e de


simples religieux, des négociations dip lo m a tiq u e s75. Mais il n’était question
ni d u n diocèse d'Edesse, ni d u n diocèse de « R a g è s » .
En 1278, c e s t p o u r une autre raison que Nicolas III envisage 1'envoi
d'évêques en pays de mission : chargeant G érard de Prato et ses con frères
franciscains d a m e n e r les M o n g o ls au baptêm e et les prélats orientaux à
1'union, il les invite, c o m m e nous venons de le voir, « à pren dre avec eux un
des évêques ou archevêques catholiques, dans la grâce et la c o m m u n io n du
siège apostolique, p ar le ministère duquel il serait plus aisé de réaliser ce
qui requiert la dignité épiscopale», - un prélat oriental ram en é à 1 ’union
des Eglises pouvant d'ailleurs rem plir ce r ô le 76- . Une fois de plus, rien ne
permet de penser qu un évêque de 1 ’Orient latin, ou dailleu rs, ait accom pa-
gné les Franciscains à la cour de 1'11-Khan de Perse.
II n est pas possible de savoir en quoi ont pu consister les activités de
1’évêque de Tortose M ansellu s dont une lettre de Boniface VIII fait m ention
et qui auraient eu p o u r théâtre les pays des Infidèles : missions diplom ati­
ques? fonctions pontificales au Service des missionnaires? Le texte est trop
laconique p o u r nous en inform er77.
Un évêque nous est encore connu pour avoir été associé à un projet
missionnaire : c ’est encore un prélat titulaire d'un siège d ’Orient latin, le
Dominicain Guillaume, évêque de Lydda, au sujet duquel le roi E d o u ard
d'Angleterre écrivait au pape et au souverain mongol de Perse, le 30 novem-
bre 1307. Edouard, préparant une croisade, estimait qu avant de passer aux
opérations de guerre, il convenait d appeler les Sarrasins à se convertir; et
Guillaume devait partir pour réaliser ce projet avec un important gro up e
de Franciscains et de Dominicains. Parmi les objectifs qui lui étaient propo-
sés, figurait la conversion des sujets du khan mongol de Perse au christia-
nisme78. On peut douter de 1'accueil qu ’Õlgaitü, personnellement converti à

75 C ’est la co n clu sion d e son récit de v o y a g e : « il ne m e sem ble pas so u h a itab le q u ’un
autre F rère s e n a ille ch ez les T a rtares co m m e je la i f a i t . . . . mais, si le seign eu r pape . . .
en voyait un é v ê q u e a vec des m arqu es d 'h o n n e u r . . . il p ou rrait leu r d ire ce q u ’il v e u t».
74 . . . A ut assum endi u n um de catholicis archiepiscopis vel episcopis gratiam et c o m m u n io -
netn Apostolicae sedis habentibus, cujus m in istério possitis liberiu s exequi circa negociu m supra-
dtcium quae p on tifica le re q u iru n t officium , ac illa p er eum quem re co n cilia ri p e r \>os vel assum i
c o n iig e rit. .. exercere (Fontes, V, 2, n° 25).
77 Reg. de Boniface V I I I , n° 306 : c est dans la bu lle d union du siège de T o rto s e à celu i de
Fam agouste q u 'il est fait allusion à ce qu e 1’é v êq u e avait p rèch é la foi apud infideles diversa-
rum nationum (13 ju ille t 1295).
71 Rym er, Foedera, 3* éd., La H aye 1739, 1. 2, p. 101 : Ad hec ad vestram accedunt presen-
iiam rehgtosi, honesti et littera ti v iri ut p o p u lu m vestrum ad fidem catholicam . . . reducant et ins-

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144 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

1’Islam, ct ses sujets, eux aussi passés à la foi musulrnane, auraient res-
l'évêque et à ses com pagn on s; mais nous ignorons tout de la suite 1 / 1
projet™. e Cv
M êm e si G uillaum e de Lydda était parti po ur 1’Orient, il reste au -
i * m mv u n
évêque n avait été consacré, entre 1253 et 1307, p o u r occuper effectivemen
un siége correspondant à un diocèse constitue en dehors des pays soumis
1'autorité des princes chrétiens d ’Orient. W illiam Freney avait été revètu d
caractère épiscopal et p o urvu d u n titre qui était celui d'une cité archiépis
copale authentique, située en pays soum is aux in fid è le s : mais il ne parait
avoir été chargé de gou vern er un peuple chrétien, mème dispersè Au
mieux, M ansel de Tortose et G uillaum e de Lydda, prélats dotés d ’un titre
épiscopal qui était encore résidentiel p o u r le premier, déjà in partibus infi.
d e liu m p o u r le second, ont pu être associés à des équipes missionnaires, si
1'idée retenue p a r Nicolas III lors du départ de G éra rd de Prato, en 1278
avait pris qu elqu e corps. Mais ce n'est pas certain, et la participation d’évè-
ques à des tàches missionnaires reste, en Orient, extrèmement limitée.
Le X I V C siècle allait voir la papauté adop te r une attitude beaucoup
plus hardie; 1'épiscopat missionnaire, si peu important au X III e siècle en
de h ors de la form ule traditionnelle retenue dans les pavs baltes ou ruthè-
nes, allait connaitre le plus étonnant des développements, et cela sous
1’influence des évènements et non du fait d ’une évolution institutionnelle
consciente.

II - L A C R É A T I O N D E L A R C H E V Ê C H É D E K H A N B A L I Q ET SES SUITES

C e s t une aventure exceptionnelle qui devait susciter la mise en place


d 'u n e hiérarchie épiscopale dans les pays de mission relevant de 1’empire

tru a n l in eadem, ac ad s u m e n d u m b e llu m c o n tra d etestabilem M a c h o m e ti sectam habilitem et


in fo rm e m .
79 La liste é p is c o p a le d e L y d d a s’ in te r r o m p t a p rè s 1307; m ais on v o it c ite r parmi les pre-
lats q u i a ssisten t aux o b s è q u e s du c o m te O th e IV d e B o u r g o g n e , e n s e v e li à Cherlieu le 3 mai
1310, un é v ê q u e d e « L e y d e » q u i d o it ê t r e id e n tiq u e à G u illa u m e (e d . C lerc, Histoire de la
F ra n ch e -C o m té , t. II, p. 15). - Dans le C h r o n ic o n o rd in is F. P., d 'A n to in e d e S ien n e (Paris 1585).
est c ité un fra te r C h ris tia n u s antistes q u i c u m q u a tu o r re lig io s is p r o C h risto D o m in o fuit « iü
d a n i B a b y lo n ia e m ilitib u s tru cid a tu s, d u m illis in p a rtib u s e v a n g e lic u m sem en disseminavieram
(p . 1 3 1 ): il s e m b le s a g ir d e c e t é v ê q u e d o m in ic a in , sans d o u te a u x ilia ir e du patriarche
tio c h e O p iz o , q u i fut m a s s a c ré lo rs d e la p ris e d ’A n tio c h e , en 1268 (C l. Cahen, La Syrie
N o rd , p. 663). C e n e ta it pas un é v ê q u e m is s io n n a ire .

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LA NAISSANCE D lIN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 145

m o n g o l : la naissance en Extrême-Orient d une com m unauté chrétienne


d obédience romaine, dans des conditions tout-à-fait inattendues.

a) Jean de M o n te c o r v in o et la m ission de C hine

L envoi du Franciscain Jean de Montecorvino, originaire de la province


de S a le rn e 80, au grand-khan Q u bilai se plaçait dans une perspective déjà
familiére : Qubilai, qui avait fait connaitre son désir de recevoir des reli­
gieux latins p ar 1'intermédiaire des frères Polo, puis de 1’11-Khan Abaqa,
avait renouvelé cette dem an de par l’intermédiaire du nouvel Il-Khan
Argun; N icolas IV décida de lui donn er satisfaction81. Une fois de plus, la
papauté espérait a m e n e r à la foi le grand-khan et a m o rc e r de la sorte la
conversion de 1'ensemble de ses sujets; mais Nicolas IV pensait aussi à
ren ou veler les dém arch es déjà plusieurs fois tentées par la papauté auprès
des prélats des Eglises orientales - Montecorvino lui-même revenait d une
mission aup rès du roi d'Arménie et de son Eglise, du patriarche des Jacobi-
tes, des catholicos, de 1'évêque de Tabriz. . . Aussi notre Franciscain était-il
chargé de lettres pontificales qui étaient à la fois des lettres de recom m an -
dation, des invitations à em brasser la foi chrétienne po ur des princes m o n ­
gols (Q ubilai, Qaidu, Argun), à entretenir ou à prom ou voir 1'union des Egli­
ses p o u r des princes chrétiens (le roi d A rm é n ie et les siens, le roi de G é o r ­
gie, l’e m p e r e u r d'Ethiopie) ou des prélats - le patriarche des Jacobites et
son frère, les catholicos des Nestoriens, des Géorgiens, des Arméniens,
la r c h e v ê q u e d'Ethiopie, 1’évêque (jacobite) de Tabriz, etc.82. II est douteux
que le Franciscain ait été chargé d a p p o r t e r toutes ces lettres à leur destina-
taire : la lettre à Q aid u évoque un voyage par les passes de Dzoungarie, cel­
les destinées aux Ethiopiens, un voyage par m e r . .. Elles lui avaient sans
doute été rem ises afin qu'il püt profiter de son passage p o u r travailler
auprès des uns ou des autres, et q u ’il obtint partout un accueil favorable.
En tout cas, parti de Rieti en juillet 1289, avec un com pagn on qui m ourut à
Camerino, il em pru n ta la route qui par la Cilicie et par Sivas, menait à
Tabriz. Là, app ren an t que la guerre avait repris entre Q u b ila i et Qaidu, il
prit la route d u G olfe Persique, non sans avoir em m ené avec lui deux com-
pagnons, le D om inicain Nicolas de Pistoie et le m archand Pierre de Luca-

80 C ip r ia n o S ilv e s tri, La vera patria d i G io v a n n i da M o n te c o rv in o , R o m e 1954.


" L e t t r e du 13 ju ille t 1289 ( B u lla riu m francisc., V I. 85; Fontes V, 2, 87).
«2 S u r c e d o ssie r, cf. B u lla riu m fra n cisca n u m , V I, 83-88; L a n g lois, Les registres de N ic o ­
las IV , n° 2218-2244; C h a b o t, N o te s s u r les rela tion s du r o i A rg o u n avec iO cc id e n t, d an s R evu e
de 1‘O rie n t latin , II, 1894, p. 592 et su iv.; Fontes, V, 2, n" 83-89.

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146 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IE N T AU M O Y E N -A G E

longo. On s é jo u m a q u elqu e temps dans l’Inde du Sud : quelques ba •>


m a rq u è re n t ce séjour, qui fut fatal à Nicolas. Reprenant la m er après \
m ois d m te rru p tio n , Jean de M on tecorvin o parvint à Khanbaliq à la
1293 - O u b ila i devait m o u rir le 18 février 129481. ln
II est dou teu x que, si Q u b ila i avait vécu, M ontecorvino eüt obtenu d
lui cette a dh ésio n à 1'Eglise rom ain e que l’on espérait en O c c i d e n t l’o C
tation prise p a r la dynastie qui régnait à K h an baliq en faveur du boud
d h ism e thibétain était déjà trop a ffirm é e 84. Q ue M ontecorvino ait été bie
reçu et en to uré d'égard, tant p a r Q u b ila i que p a r son successeur Temii
c e s t très p r o b a b le ; il y eut cependant des gens, appartenant à la c o m m u
nauté nestorienne, p o u r accuser le Franciscain d 'avo ir assassiné N ic o la s de
Pistoie p o u r s'e m p a re r des lettres qui authentifiaient son titre de légat et
des c a d e a u x destinés au grand-khan.
C e s t qu e les rap po rts entre M on tecorvin o et le clergé nestorien prirent
très ra p id e m e n t une allure tendue. Le missionnaire se refusait à accepter
les déviation s de ceux qu'il regardait c om m e chrétiens de nom seulement-
les autres supportaient m al cette attitude, et l'on alia ju sq u 'à détruire nui-
ta m m e n t 1'église bâtie p a r le Franciscain85. Là-dessus, celui-ci parvint à
o b t e n ir le ralliem ent à 1'Eglise rom ain e du prince ongüt Kõrgis, qui régnait
s u r la ré g io n qu e les Occidentaux appelaient le Tendue (au to u r de KoSang-
T o q t o ) 86. M on teco rv in o, dès 1294, fut ainsi am en é à se rendre dans le

83 Cf. A. V a n d e n W y n g a e rt, Jea n de M o n t c o r v in , O F. M ., p r e m ie r é v ê q u e de Khanbaliq


(P e k in g ), a. 1247-1328, L ille 1924 (r e p r is d e L a F ra n c e fra n c is c a in e , V I, 1923, p. 135 et suiv.); le
m ê m e a u te u r a é d ité les d o c u m e n ts c o n c e rn a n t M o n t e c o r v in o au 1.1 d es S in ic a franciscana.
Cf. aussi C h ris tia n W . T r o ll, D ie C h in a m is s io n in M it te la lte r (d a n s F ra n z is k a n is ch e Sludien,
X L V I I I , 1966, p. 109*150, et X L IX , 1967, p. 22-79) et Jean R ich a rd , E s s o r et d é clin de 1‘Eglise
c a t h o liq u e de C h in e a u X I V e s iè c le (d a n s B u lle t in de la S o c ié té des M is s io n s étra n gères de Paris,
2 ' s érie , n ° 134, 1960, p. 285-295).
84 Cf. P. D e m ié v ille , L a s itu a tio n r e lig ie u s e e n C h in e a u te m p s des Y u an, dans Oriente
p o lia n o , R o m e 1957.
85 S u r c e tte a ttitu d e , cf. A.-D. V o n d e n B rin c k e n , D ie « N a tio n e s . . . », p. 316-317.
84 S u r K ó r g is (G e o r g e s ), cf. A. C. M o u le , C h ris tia n s in C h in a , p. 191; L. H am bis, Le Chapi-
tr e C V I I 1 d u Y u a n C he, L e y d e 1954, p. 23-27. L e n o m q u e lui d o n n e 1 e v a n g é lia ir e cop ié pour sa
soeur S ara, alia s A r a u u l, sou s la fo r m e m u tilé e « G a n t u . . . u . . . », a é té in te rp ré té par Pelliot
n o n c o m m e son n o m tu rc, m a is c o m m e la tr a n s c r ip tio n d e son titre ch in ois, K a o - t'a n g - * a n g

( R e c h e r c h e s s u r le s c h r é tie n s d ‘A s ie c e n t r a le e t d 'E x tr ê m e -O r ie n t, p. 260-263, 280-282). L a t t i t u d e


r e lig ie u s e d e c e d y n a s te a é té d is c u té e p a r L. C a r r in g to n G o o d r ic h , W e s te rn e rs and Central
A s ia n s in Y u a n C h in a , d a n s O r ie n t e p o lia n o , p. 1-22 : il p a ra it a v o ir té m o ig n é en vers les cl*551'
q u e s c h in o is d u n e d é v o t io n p r o c h e du n é o -c o n fu c ia n is m e , c o m m e d a ille u r s d ’autres Ongu>
issus d e fa m ille s c h r é tie n n e s (d a u tre s fu re n t te n té s p a r le m a n ic h é is m e , le b o u d d h i s m e ,

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LA NAISSANCE D'UN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 147

royaum e Ongüt oú il organisa une chrétienté de rite latin, bâtissant une


église qu on a p rop osé de reconnaitre dans les ruines d un édifice religieux
retrouvé à O lo n -S ü m e 87, traduisant 1'office religieux dans la langue du pays,
et baptisant de son p ro p re nom le fils de Korgis. Mais celui*ci périt en 1298
sous les cou p s d u khan de Djagataí, et Jean dut a b a n d o n n e r le Tenduc.
Rentré à K h anbaliq, il bénéficia de 1'aide de L u c a lon g o et put ainsi
bâtir une église; il prêcha aux «T a r t a r e s » , dont un assez gran d n o m b r e se
convertit; il fo n d a un couvent franciscain q u ’il peu pla d esclaves rachetés
par lui, auxquels il apprit le latin et le plain-chant et qu il éleva aux o rd re s
mineurs. Le chiffre de quatre mille baptêm es administrés entre le 8 ja n v ier
1305 et le 13 jan vier 1306 donne une idée de 1’a m p le u r de cet a p o s to la t88.
Jusqu en 1306, M o n te c orv in o était resté seul, avec le dévou é L u c a lo n g o ; un
autre Latin, un chirurgien lom bard, qui s établit à K h a n b a liq en 1303, ne fit
que lui susciter des difficultés. Aussi, dans deux lettres qu il écrivit à ses
c onfrères de Khazarie, en 1305 et 1306, réclamait-il de 1'aide; un Franciscain
a llem an d le rejoignait en 1306; mais les missionnaires dom in icain s et fra n ­
ciscains envoyés auprès de lui (car il avait construit un couvent à 1'inten-
tion des F rères Prêcheurs à côté de celui qui était destiné aux M in e u r s )
furent arrêtés p ar la guerre, en 1306; on ne sait ce qu il advint de ceux q u e
voulait lui e n v o y e r en 1307 le prieur dominicain de Tabriz. Seulem ent, la
lettre de 1306 devait avoir des répercussions auxquelles M o n te c o rv in o était
loin de s’attendre. M ontecorv in o s’était séparé de la voie suivie par ses pré-
d é c e s s e u r s : les m e m b re s des Eglises orientales devant être ra m e n é s à
1 'unité de la foi deviendraient les évangélisateurs de leurs co m p a trio te s res-
tés infidèles. Le contact qu'il avait eu avec le clergé nestorien, dont déjà
R u b r o u c k dé p lora it 1'ignorance, la simonie et 1’ivrognerie, l’avait-il d issu adé
de persister dans cette v o ie 89? Toujours est-il qu e son but avait été, dès la
fin de la p re m iè re année de son séjour, de fo n d e r une chrétienté de rite

ta o is m e ). S u r le T e n d u c (d io c è s e d e O n g ), cf. J. D a u v illie r, Les p ro v in c e s ch a ld éen n es »d e


le x t é r ie u r • au M oyen -A ge, p. 301 et suiv.
17 N. E n ga m i, O lo n -S ü m e et la d é co u v e rte de le g lis e c a th o liq u e ro m a in e de Jean de M o n t-
c o rv in , dans J o u rn a l A siatique, C C X L , 1952, p. 155-168; cf. aussi K a z u o E n ok i, N e s to ria n c h ris -
tianity in C h in a in the M e d ie v a l p e rio d , d a n s L O r ie n le c ris tia n o nella s to ria delia c iv iltà , R o m e .
Accad. d e i L in c e i, 1964.
•• S u r c e tt e m é th o d e , cf. les c o m m e n ta ir e s d e Ch. W . T r o ll, a rtic le cité, t. X L I X , p. 22-79, et
d e A. V a n d e n W y n g a e r t, M é th o d e d 'a p o s tola t des m is s io n n a ire s du X I I I * au X V I* s iè cle en
Chine, dans La F ra n c e fra n cisca n e, X I, 1928, p. 163-178.
w A.-D. V o n d e n B r in c k e n , E in e c h ris tlic h e W e ltc h ro n ik vo n Q ara Q o ru n u W ilh e lm von
R u b ru ck , O F M , u n d d e r N e s to ría n is m u s , dans A r c h iv f ü r K u ltu rg e s c h ic h te , L III, 1971, p. 1-19,
so u lig n e la d iffé r e n c e d e s a ttitu d e s.

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148 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

latin - même si, à la façon des saints Cyrille et Méthode, il avait traduit
l'office en turc pour le mettre à la portée de ses ouailles90. Cest donc une
Eglise latine de plusieurs milliers d ames dont 1'Occident avait appris l'exis
tence en 1307.
La réaction du pape Clément V fut de donner à cette nouvelle chré
tienté un encadrement de type normal, en constituant dans 1 ’empire mon­
gol un archevêché et une province ecclésiastique. Habituellement, de telles
créations intervenaient lorsque les souverains avaient fait acte dadhésion à
la foi catholique : le pape n’hésita pas à anticiper sur la conversion du
grand-khan.
Nous n'avons pas le texte de la bulle instituant 1'archevêché de Khan­
baliq (Cam baliensis), mais seulement celui des bulles concemant les évê-
ques suffragants de 1’archevêque91. Ce dernier devait avoir dans sa juridic-
tion la totalité de 1'empire des Tartares ( cu ra m et s o llic itu d in e m animarum
ex iste n tiu m in toto d o m in io T a rta ro ru m ) avec toutes les prérogatives atta-
chées au titre archiépiscopal. Six suffragants lui étaient d o n n és92, tous fran­
ciscains (André de Pérouse, Nicolas de Banzia, G érard Albuini, Ulrich de
Seyfnestorf, Peregrino de Castello et Guillaume de V ille n e u v e ): ils rece-
vaient la consécration épiscopale des mains de trois cardinaux, et cest eux
qui étaient chargés de consacrer leur archevêque et de lui remettre le pal-
liu m Le pape leur conférait les privilèges habituellement reconnus aux
Franciscains partant dans les terres des « Sarrasins, paiens et autres infidè­
les», mais il ne leur donnait pas de titre épiscopal; les six nouveaux évê-
ques portaient seulement le titre d 'e p is co p i in d o m in io Tartarorum , Clé­
ment V s en remettant sans doute à Montecorvino du soin de leur confier
un diocèse et une cité épiscopale.
On sait que le voyage fut l o n g : un des six, G uillaum e reçut en 1308
1ord re de partir en Tartarie, ce qui prouve qu il était resté en arrière; en
1318, il était de nouveau à Avignon, et on le transféra en 1323 au siège de
S avo n e 93. Ulrich et Nicolas m oururent dans 1'Inde; les trois survivants

90 II r é c la m e dans ses le ttre s 1’e n v o i d e liv r e s et d e tra d u c tio n s en oú igou r.


Vl R egestum Clem entis papae V., n° 2216 à 2221, 2300 et 2301 (23 ju ille t 1307). Cf. Giorgio
F ed a lto, Lm chiesa latina in O riente, I, V e r o n e 1973, p. 413-415 et 423-425.
92 Ils éta ie n t p ro m a jo ri a n im a ru m salute in a d ju to riu m h u ju s m o d i com m isse ipsi fra,ns
Joh a n n is s p ecia liter deputati.
v’ G u illa u m e avait reçu en 1313 d es le ttre s du ro i d A n g le te r r e le recom m an d an t au
khan. M ais on r e lè v e son n om dans d es le ttre s d ’in d u lg e n c e d o n n é e s à A vig n on en 1316, 131 *
1318, 1319, 1320, 1321 et 1322 ( ü rk u n d e n b u ch d er Stadt H alberstadt, éd. S ch m id t, I, p 309; H &
sisches Ü rku n d en bu ch , ed. W yss, I, 2, 251; ed. R e im e r, II, 218; Regesten z u r Geschichte der

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LA NAJSSANCE D UN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 149

furent à même de donner la consécration épiscopale à Montecorvino


lorsqu'ils arrivèrent à Khanbaliq, en 1313. Mais déjà, sans doute averti du
décès des deux prélats morts en route, Clément V avait-il consacré trois
autres évêques in dom inio Tartarorum, Jérôme de Catalogne et Pierre de
Florence (20 décembre 1310) ainsi q u u n frère Thomas dont on ne sait rien
de plus (19 février 1311)94.
La situation q u ils avaient trouvée à leur arrivée n etait plus celle de
1306. Entre temps, Montecorvino avait pris contact avec les éléments du
peuple alain déportés par les Mongols en Extrême-Orient, oü ces Cauca-
siens (qui avaient déjà participé aux Grandes Invasions du V e siècle et que
les missionnaires hongrois avaient rencontrés en 1236 non loin de la Cas-
pienne)95, avaient apporté une importante contribution à la conquête de la
Chine; leurs chefs y avaient reçu des dotations96.
Chrétiens de rite grec, en dépit d'une ignorance religieuse que les
témoins saccordaient à trouver effroyable97, ils sétaient vu refuser par les
Nestoriens d'être admis à leur communion et se trouvaient de la sorte pri-
vés d u n encadrement que les missionnaires latins pouvaient leur apporter.
Montecorvino était entré en rapport avec eux et n’eut pas de peine à les ral-
lier à 1'Eglise romaine, eu égard à la conformité dogmatique des deux com-
munautés. Et ainsi ces quinze mille ou trente mille âmes apportaient à
1’Eglise latine de Chine un élément particulièrement important.

chõfe von Constanz, ed . L a d e w ig et M ü ller, 3671, 3754, 3773, 3482; A A SS.. M ai V, 205) - et
m êm e, a p rè s son tra n s fe rt à S a v o n e : A A SS., Jun. I, 336; K essel, A n tiqu iia te s m onast. S. M a r-
tin i M a jo ris C o lo n ia e p. 286 (1326) et Quix, G esch ichte der Stadt Aachen, II, 21 (1328). II est p ro -
b ab le q u 'il n a v a it pu se jo in d r e à ses c o n fr è r e s en 1307, et q u i l fu t a lo r s r e m p la c é p a r
A n d re u c c io d'A ssise. II n a u r a it é té c o n s a c ré q u e n 1308, et, ses c o é v ê q u e s éta n t d é jà p a rtis
(A n d re u c c io m o u ru t dans 1'Inde), a tten d it u ne o c ca sio n qui ne se p ré s e n ta pas.
94 R egestu m C lem en tis papae V, t. VI, n° 7480, 7481, 7482. Ce q u e nou s sa vo n s d u d e stin
des é v ê q u e s sacrés en 1307 p r o v ie n t d 'u n e le ttre d 'A n d ré d e P é ro u s e, d a té e d e 1313 (c f.
M ou le, C h ristians in China, p. 191; G o lu b o v ic h , II, p. 115, n. 3 ); P ie r r e d e F lo r e n c e n e les a va it
pas e n c o r e re jo in ts en C h in e.
” Cf. la le ttr e d e 1'évêqu e T h é o d o r e d ’A lanie, qu i r e n c o n tra v e rs la m ê m e d a te ses ou ail-
les depu is le v o is in a g e d e K h e rs o n , en C rim é e, ju sq u a so ix a n te é ta p e s plus à 1’est, d a n s la
step pe d e « S c y t h ie * et ju s q u a u x c o n fin s du pays d es Ib è r e s ( P a lro lo g ie G recqu e, C X L p 392­
397).

** P e llio t, C hrétiens d'Asie cen tra le . . . . dans T o u n g pao, 1914, p. 64; M a r c o P o lo , éd. Pau-
thier, p. 165.
97 A.-D. V o n d en B rin c k e n , D ie • N a tio n e s . . . », p. 126-131; J. D a u v illie r, B y ia n tin s, X I,
1953, p. 72 et suiv. Les m is s io n n a ire s h o n g r o is d e 1236 et R u b ro u c k son t d a c c o r d p o u r a ílir-
m er q u e les A lain s ne fa isa ien t au cu n e d iffic u lté à a d m e ttre la p rim a u té p o n tific a le .

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150 LA PAPAUTÉ ET LES MIS SIONS D ORIENT AU M O Y E N AGE

A còté des « T a r t a r e s » baptisés, dont le n om bre dépassait dix millc ,


des Alains ralliés à 1’Eglise latine, d ’autres éléments constituaient lc pcupl.
placé sous la crosse de M ontecorv in o : M. Dauvillier a attiré 1’attention sur
le cas des Arm éniens - transplantés par les M o n g o ls ou bien attirés par |c
c o m m e rc e - : c e s t une riche Arm énien n e qui fit construire la grande êglisç
catholique de Zayton (Ts'iuan-tchéou) et le couvent attenant; d autres à
Khanbaliq, faisaient également bâtir une église à 1 'intention de Montecor­
vino, et P eregrin o de Castello précise qu e c e s t 1'archevêque latin qui avait
perm is à toutes les petites com m u n au tés non-chaldéennes de se regrouper
et de ne pas passer p a r les exigences des Nestoriens, qui - Rubrouck 1’avait
déjà r e m a r q u é - prétendaient o b lig e r les autres chrétiens à se faire rebapti-
ser p o u r les accueillir dans leurs églises98. D a u t r e s - Russes, Tcherkesses.
etc. ont pu égalem ent se rallier à la c o m m u n au té latine, essentiellement
« c h alc éd o n ien n e », p o u r des raisons analogues.
En fin les Latins eux-mêmes, bien qu e certainem ent m oins nombreux,
n ’étaient pas à négliger. La récente découverte des pierres tombales des
d e u x enfants d u m a rc h a n d gênois D o m in iq u e Ilioni, m orts en 1342 et 1344,
à Yan g-tch éou , le Ja m ca i des Latins, a perm is de connaitre la présence de
fam illes la t in e s " ; marchands, m ercen aires et aventuriers ont fréquenté la
Chine, et en particulier Khanbaliq, Jamcai et Zayton; 1'exemple de Luca-
lo n g o tém o ign e de 1'appui q u ’ils pouvaient d o n n e r aux missionnaires dont
ils attendaient des secours re lig ie u x 100.

J. D a u v illie r , Les A rm é n ie n s en C h in e et en Asie c e n tra le au M oy en-A ge, dans Mélanges de


s in o lo g ie offerts à M . P a u l D e m ié v ille , t. II, P a ris 1974, p. 1-17 (B ib l. d e 1’ In stitu t d es Hautes Etu­
d e s c h in o is e s , X X ). - M o n t e c o r v in o s 'é ta it « c o n s a c r é a u x A rm é n ie n s . laissant 1eglise des
L a tin s au x a u tre s F r è r e s » , s e lo n P e r e g r in o .
V9 K . E n o k i, o u v r. cité, p. 65 et pl. V (p ie r r e s to m b a le s e n la tin , a v e c d e s fig u res gravées de
s ty le c h in o is à su jet c h r é t ie n ); F ra n c is A R o u le a u , T h e Y a n g c h o w la tin tom b ston e as a land­
i m a rk o f m e d ie v a l c h ris tia n ity in C hina, d a n s H a r v a r d J o u r n a l o f A sia tic studies, X V II, 1954,
p. 345 et su iv.; R. S. L o p e z , M a rch a n d s ita lie n s en C h in e (C .f. Acad. ln s c r., 1977, p. 455).
100 R a p p e lo n s le s p r in c ip a le s é tu d e s su r les m a r c h a n d s o c c id e n t a u x : L u c ia n o Petech, Us
m a rc h a n d s ita lie n s dans le m p ir e m o n g o l, dans J o u r n a l A sia tiqu e, CCL, 1962, p. 549-574,
R. S. L o p e z , V en ezia e le g ra n d e lin e e d e lle s p a n s io n e c o m m e r c ia le n e l s e co lo X I I I , dans La
c iv iltà v e n e zia n a d ei s e c o lo d i M a r c o P o lo , F lo r e n c e 1955, p. 39-82, et N u o v e lu c i s u gli Italiaiu
E s tre m o O rie n te p r im a d i C o lo m b o , d a n s S tu d i C o lo m b ia n i, III, 1952, p. 337-398; M ich el Balar^.
Les G ê n o is en A sie c e n tra le et en E x tr ê m e -O r ie n t au X I V e s iè c le : u n cas excep tion n el, dans
n o m ie s e t s o cié te s a u M o y e n -A g e (M é la n g e s Ed. P e r r o y ), P a ris 1973, p. 681-689. D a u tre s que e
m a r c h a n d s ita lie n s o n t p ris la r o u te d u C a th a y . à c ò t é d u lé g e n d a ir e v o y a g e d e Jean de
d e v ille , o n p e u t c it e r c e lu i, trè s r é e l, d u B a r g a d in d e M e tz , a m i d e P h ilip p e d e M ézières, q
s e r v it p lu s ie u r s a n n é e s d a n s la g a r d e d u g ra n d -k h a n . Q u a n t au c o m p a g n o n d e M on tecorv

)
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LA NAISSANCE D UN ÉPISCOPAT MISSIONNAIRE 151

La vie de cette com m unauté catholique nous est connuc par les lettres
des évèques André de Pérouse (1313) et Peregrino de Castellu (1318).
comme par les relations de voyage et notamment celle d ’Odoric de Porde-
none, qui déposa à Zayton les reliques des martyrs de Thâna, traversa Jam-
cai et admira, à Khanbaliq, la faveur dont jouissait Montecorvino, bénéfi-
ciaire de pensions impériales et adm is à donn er sa bénédiction au g r a n d -
khan lors des expéditions de celui-ci (1326-1328).
Quelle place y tenait 1institution épiscopale? Trois évèques étaient
arrivés en 1313 et avaient consacré la rc h e v ê q u e ; un quatrièm e les avaient
rejoints. O r nous constatons que trois d entre eux finirent par se fixer à Z a y ­
ton, ce port du Fou-kien oú arrivaient les navires venant de l inde qui trans-
portaient les marchands, et d ’oú partait la route menant par Hang-tchéou
et Yang-tchéou à Khanbaliq. G érard Albuini en fut fait évêque par M o n te ­
corvino dès 1313; Peregrino le rem plaça vers 1317 et, après sa mort (7 ju il­
let 1323), André de Pérouse, qui s’était installé en 1317 dans un ermitage
voisin de la ville, en devint à son tour é v ê q u e 101. Les suffragants de M o n t e ­
corvino n avaient donc pas pris possession chacun d un siège é p i s c o p a l :
évèques sans titre précis, il ne leur était pas apparu nécessaire de diviser
entre eux le territoire de la province de Khanbaliq pour constituer des dio-
cèses. La mission du Cathay, en effet, s’articulait essentiellement a u to u r des
résidences franciscaines; le vceu de Montecorvino, de recevoir aussi des
Dominicains, n avait pu se réaliser — Jourdain de Séverac, qui accom pagn ait
quatre Franciscains partant p o u r la Chine, en 1320, d e m e u ra dans 1’In de
après le m artyre de ses c o m p a g n o n s 102 Chaque couvent, si nous en
jugeons p ar le cas de Zayton, avait sa vie assurée par des fondations, tandis
que les évèques, auxquels le grand-khan assurait une rente de cent florins
d o r p ar an, vivaient avec leurs f r è r e s : les m archands latins o u a rm é n ien s
se fixaient, durant leu r séjour, à proximité de 1 etablissement fra n c is c a in 103.

M. Petech (p. 553) p ro p o s e de v o ir en lui un Vénitien, P ietro Lon go, (fils ) de Luca, au lieu
d un Gênois.
101 On sait qu e la p ie rre to m b a le portant le nom d'A n dré de P érou se a é té re tro u vé e lors
de la d estru ction des m urs de Ts'iuan-tchéou, la date étant très m u tilée (John Foster, Crosses
bom the walls of Zaitun, dans Journal o f Royal Asiatic Society, 1954, p. 1-25). M. H am bis (Les
cimetières de la région de Zaiíon, dans Comptes rendus Acad. des Inscriptions, 1960, p. 213-221) a
proposé d e lire cette date 1330. Sur 1’em p la cem en t de la résid en ce fran ciscain e de Zayton, cf.
K- Enoki, op. cit., p. 63.
I0J T rois au tres F rères M ineurs, Aaron, Pons et B ertran d de Tou louse, p ériren t eux aussi
dans l'O céan Indien, avant 1329 (G o lu b o vich , II, 69-72). Sans dou te se ren daien t-ils en Chine.
103 A Zayton, ils d isp o sa ien t d'un fon d o u k et d ’un bain.

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152 la PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

En dehors des villes dotées de ces résidences - Khanbaliq, Zayton JarT


peut-être Quinsai (Hang-tchéou) et Lancerny (Lin-tsin au Chan-toung)
n'existait sans doute pas de postes de mission, et les chrétiens dissém
étaient probablem en t desservis par des prêtres de leur nation, alains S
arméniens, que les évêques ordonnaient et que les Frères Mineurs •U
taient à 1'occasion. Malheureusem ent, cet aspect de la vie des chrétienté
nous échappe, com m e nous échappe 1'organisation de la vicairie de Cath
qui se plaquait en pratique sur 1 ’archidiocèse de K h a n b a liq 104.
Lo rsq u e m ourut Jean de M ontecorvino - sans doute plus près de 13 }q
qu e de 1328 - , il ne survivait p ro b a b le m e n t aucun des évêques ordonné.
p a r Clément V , et il ne sem ble pas q u ’ils aient été r e m p la c é s105. Rjen nc
parait avoir été prévu p o u r la succession de 1'archevêque : cest seulement
le 8 se ptem bre 1333 que Jean X X II, inform é de son décès, désigna un nou
vel archevêque, le Franciscain Nicolas, qu'il re c o m m a n d a aux princes tarta­
res, au grand-khan et au roi de Corée, qui lui aussi, aurait été touché par la
p rédication la tin e 106. Nicolas ne reçut ses frais de voyage (cent florins) qUc
le 11 juin 1334; le 23 septembre, il obtenait un sauf-conduit et des lettres de
r e c o m m a n d a tio n du roi Robert de N a p l e s 107. Il n atteignit le khanat de Dja-

,<M L e De locis fratrum m inorum et predicatorum in Tartaria (G o lu b o v ic h , II, 72) comptait


q u a tr e loca fra n c is c a in s au C ath a y; c e c i à u ne d a te c o m p r is e e n tr e 1302 et 1318; un texte plus
ta r d if, é n u m é r a n t les ré s id e n c e s fra n cis ca in es , a jo u te exceptis locis Indie et Cathaie quorum
num erum vicarius ignoraf, v e r s 1334, la v ic a ir ie d e K h a n b a liq o u C a th a y est créd itée de qua­
tre loca (ibid., 238-254). Un te x te d e 1385 (ibid., 255) d o n n e tr o is c u s to d ie s et neuf loca pour
K h a n b a liq ; p e u a p rès , on est r e v e n u à tro is loca (ib id , 257). II ne fa u t pas o u b lie r que Zayton
est r e g a r d é c o m m e fa isa n t p a r tie d e 1'Inde m a je u re , et q u o n p e u t d iffic ile m e n t fixer les limi­
tes d e la v ic a ir ie v e r s l’O u est. Cf. p. 273 : in magna Tartaria, juxta contratam Millestorces, fratres
habent plura loca ; c e tte « c o n t r é e » , m a l d é fin ie , es t c e lle o ú O d o r ic situ e la résidence des
A ssa ssin s - AJamut, la fo r t e r e s s e du V ie u x d e la M o n ta g n e , se t r o u v a it dans 1’Elbourz, non
lo in d e K a z v in - . La G r a n d e T a r ta r ie d o it d o n c c o r r e s p o n d r e au x s te p p e s situées entre le
r iv a g e m é r id io n a l d e la C a s p ie n n e e t les m o n ta g n e s d e 1’ A sie c e n t r a le ; les postes en question
d o iv e n t p lu tô t ê t r e r e c h e r c h é s e n tr e la C a s p ie n n e et le la c B a lk a c h , d a n s le ressort de la
v ic a ir ie d e S a r a i (infra, n. 157).
105 O n a cru q u e 1 'a rc h e v ê q u e d e S u lta n ie h a v a it a s s is té à ses o b s è q u e s , sur la foi du Livre
de lestat du grand caan oú l’on lisa it « à s o n o b s è q u e . . . v is trè s g ra n t m u ltitu d e de gen**
d a n s 1 é d itio n p r o c u r é e p a r d A v e z a c et d e B a c k e r ; c e lle d e J a c q u e t r e m p la c e vis par vinrent
(p . 69). Cf. L o e n e r t z , La Société, p. 184-185.
J. R ic h a rd , Un texte latin du X I V e siècle concernant la Corée, d a n s Actes du X X I ‘ Congrè*
des Orientalisies, P a ris 1948, p. 349-350 (à c o r r i g e r d a p r è s L. H a m b is . Notes sur 1‘histmre de
Corée à 1'époque mongole, d a n s T 'o u n g pao, X L V , 1957, p. 151-218). .
107 B u lla riu m Francisc., V, 1037-1040, 1043, 1057 ( Fontes, V I I , n ° 138); G.-M- MonU' 3J}
Cario I a R oberto d Angiò, T r a n i 1936, p. 32. P lu s ie u r s m is s io n n a ir e s r e ç u r e n t le 14 février
un s u b s id c p o u r p a r tir ad partes Cataye - et p a r m i e u x F e r n a n d d e Buitrago et Jacques e

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LA NAISSANCE D U N ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 153

gatai qu 'en 1336 : aussi avait-on com m en cé en Chine à s'inquiéter. Les chefs
des Alains écrivirent au pape une lettre collective (11 juillet 1336) à laquelle
le khan T o g h a n T e m iir joignit ses prop re s lettres, pour d e m a n d e r l’envoi
d u n successeur de M o n t e c o r v in o 108.
Les envoyés - deu x G ênois et 1'Alain Thogay - parvinrent à Avignon en
1338, et la lettre du grand-khan fit une grande im p r e s s io n 109. Le pape
Benoit X I I estim a q u il convenait de répon dre avec un certain é c l a t : il dési-
gna qu atre a m b a ssadeu rs, avec rang de légats pontificaux, et les ehargea de
cadeaux p a rm i lesquels figurait un grand cheval, ce «c h e v a l céle ste» qui
im pressio n n a vivem ent la c ou r de K h a n b a liq 110. Mais on peut noter que ces
«lé g a t s » , m ieu x fournis d a r g e n t que 1’expédition précédente (la C h a m b re
leur rem it quinze cents florins) et voyageant avec plus d a p p a ra t, n avaien t
pas reçu de p o u v o irs exceptionnels, po ur autant q u ’on puisse en conclure
de la b u lle qui leu r fut remise. Eux aussi cheminèrent lentement - ils
s e m b a r q u è r e n t à N a p le s en 1339, séjournèrent à Almaligh le temps néces-
saire à la restauration de 1’église détruite par les Musulmans, à Ha-mi le
tem ps q u ’il fallut p o u r convertir quelques Tartares et entrèrent à K h a n b a ­
liq, oú ils furent reçus magnifiquement, en 1342. Jean de Marignolli, qui
nous a laissé des souvenirs de son voyage épars au milieu de sa chroni-
q u e 111, G r é g o ir e de H o n g rie et Nicolas de M o la n o furent défrayés de toutes
leurs dépenses, sans préjudice d u n e pension impériale, et retenus trois ou
quatre ans à K h a n b a liq : le grand-khan ne les laissa repartir que moyennant

rence (celui qui devint évêque de Zayton et mourut en 1362?); sans doute est-ce à ce moment
qu’on avait appris la mort de 1 archevêque.
"» G olubovich IV p. 250-251 (les noms des chefs Alains ont été retrouvés en transenp-
tion c h in o is e d a n s le Y u a n C h e ; P e llio t. Chréúens Í A s ie c e n r n l e . . p. 641 et suiv ).
• » C f la c h r o n iq u e d e Jean d e W in te rth u r (p. 152): selon lui, le « ro i d e s T a r t a r e s .. ayant
é té c o n v e r t i p a r sa fe m m e . e lle -m è m e a m e n é e à la fo i par les F rères M in eu rs, au rait d e m a n d e
au p a p e d e s d o c te u r s p o u r c o n v e r t ir son p eu p le, et B enoit: X I I aurait d e s ig n e à c e tte fin cm-
q u a n te F r è r e s L e s d e u x e n v o y é s g ê n o is du khan éta ien t G u illa u m e
S a v ig n o n e (s u r ce lu i-c i. cf. M . B ala rd , Les C i n o s en As,e cen trale ; S ch afer. D,e Ausgaben
p. 77 fle n o f, X I I . U , m s d o s e s , éd V id a l. I. n " 1870-1873). Ils a va ien t p n s la v o te d e m er. e .

par J S 1« w . * " «■ **•«* T « A,>M v


Kl, lr I0A8 D 33-40 D autres cadeaux étaient destines au Khan de QípCaq.
l,
Kulturgeschichte, L, 1968, p. • é essentiellement à la Bohême oú il termina
^ e x tr a its d e c e , . e c h r o n q u e c o n « c r é e esse, ^ ^ ^ du P . V an d e W y n .

sa vie, concernant ce voyage. ont ét u n iv e r 5a lh ist0 n s c h e n V o r s le llu n g e n des J o h a n n v o n


gaert Cf. A.-D. Von den B n n c en, ... IL 1967 p 297-339. Cf. aussi H. Franke, D ie
Marignola OFM, dans Archiv fUr Kullurges . ■ chinesischen Literatur, dans Asten. Tradi-
C c s a n d s c h a fl des J o h a n n v o n M a r ig n o la in S p ie g e l d e r
tio n u n d F o rts c h ift. F e s ls c h r ifl f ü r H o r s l H a m m it v c h . p. 117-134.

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«

154 l > PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

Ia promesse que le Siège apostolique enverrait en Chine un évêque fra


cain revêtu des pouvoirs d'un légat. C e s t donc que 1'archevêaue vr nCIS
_______ ________ I_________r? .___________________________ M NlCoU
n'avait pas pu rejoindre son siè g e 112. Et nous ne savons pas quelle suite h*
donnée à la dem ande de 1’e m pereu r m o n g o l : ce n'est q u ’en 1370 que Ul
nouvelles lettres décidèrent le pape à désigner un archevêque ^
Cosm e de Sarai, qui refusa sa nomination, et ensuite un Franciscain a 1
professeur de théologie à O xford et à Paris, G u illaum e du P r é 113 Ce ^
dant, nous avons la trace de 1'existence d ’une hiérarchie ép iscop ale
Cathay avant cette nomination, puisque c'est en 1362 que le Franciscain
Jacques de Florence, évêque de Zayton, fut martyrisé par les Musulmans
tandis q u i l traversait le D ja g a t a i" 4. II n e s t donc pas exclu, soit que Nicolas
ait fini par atteindre Khanbaliq, soit q u u n nouvel archevêque et des évè
ques, ou au moins un évêque, aient été envoyés après le retour de Mari-
gnolli, en 1353, et assuré 1’encadrement de la mission du Cathay pendant
une quinzaine dan n ées.
G uillaum e du Pré, en m êm e temps que le titre archiépiscopal, avait
reçu les fonctions de vicaire du ministre général des F ran ciscain s au
C a t h a y 115; il parait avoir atteint son siège, p o u r y trou ver une situation nou­
velle : la révolte qui avait pris naissance en Chine du Sud (les Mongols
avaient perdu Zayton dès 1360) avait chassé le grand-khan de K h an b aliq en
1368, et certainement refoulé dans la steppe divers éléments de la commu-
nauté catholique - les Alains, qui devaient survivre sous form e de la tribu
m ongolisée des Asud; les Tartares c h ristian isés- . Mais, contrairement à

D u m o in s lit o n sous la p lu m e d e M a r i g n o l l i : illi solos cognoscunt sacerdotes, et putant


papam semper talem sicut fuit ilte Jeronimus papa qui misit eis legatum, quem sanctum venero,,
tur Thartan et Alam, fratrem Johannem de Monte C o rv in o : c e c i s e m b le e x c lu re que des évè-
q u es et un a rc h e v e q u e s o ie n t a rriv é s e n tr e tem p s . II c o n v ie n t d a ille u r s d e ne pas oublierque
a P e s te N o .r e s é v u p r é c is é m e n t dans 1’A sie c e n tr a le e n 1338-1339 e t q u e la m ission de Nicc
las p e u t lu. a v o ir p a y e trib u t. - N o to n s que. a p r è s a v o ir q u itté K h a n b a liq . M a rig n o lli séjouma
a ssez lo n g te m p s a Z a y to n p o u r y fa ir e fo n d r e e t b é n ir d e u x c lo c h e s p o u r les églises du lieu.

c is c VI 078a n « ? “ r 7 7 d\ PrÍ a n d lhe T artars> ^ n s A F H , L X . 1967. p. 210-213; Buli. Fra»


F r è re s d a D r è I rh ° U * P 149 61 SU' V' G u illa u m e a u ra it e m m e n é avec lui soixante
ou p L l ô t c e fe d , ‘ C h r o n ,q u e d e s X X I V G é n é r a u x ». O n p e u t se d e m a n d e r si sa désignation-

à m e t tr e e n ra n . 7 ^ ‘ er * ° 69 (F e d a U o - ^ * * * " ■ '■ P 433) ’ ^


r e m p llc e H e s f T T ' t n o m b r e u x F r a n c is c a in s e n p a ys d e m ission. destines *
1369 (G o lu b o v ic h aI t a n e su P e n e u r e * . d o n t la p lu p a r t é ta ie n t m orts. en décem **
u o y tC jo Iu b o vich , V. p. 144; Fontes, X I, 173-174)
114 G o lu b o v ic h , V, p. 92 ( « i n M e d ia e i m p é r i o » ) ,

de C a th a y 'a ™ ™ * * F r a n ç o is d e P u iK- ^ 30 d é c e m b r e 1371. c o m m e vicaire


de C a th a y . ,1 s a gu en r e a l.te d un v ic a ir e d 'A q u tlo n a ris (G o lu b o v ic h , V, p. 160).

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LA NAISSANCE D UN EPISCOPAT MISSIONNAIRE

une opinion souvent exprimée, la nouvelle dynastie, celle des Ming, ne


recourut pas à une xén oph obie systématique, pas plus q u e lle n'envisagea le
repli de la Chine sur elle-m êm e (c e s t elle qui organisa au X V C siècle des
expéditions maritimes dans 1’Océan Indien). En tout cas, et q u e lq u e s réser-
ves que l'on puisse faire sur la présence d'un évêque franciscain à Lin-tsin
jusqu'en 1387 " 6, il est certain que le L ib e llu s de n o titia o rb is fait état de ce
qu'un archevêque de K hanbaliq, du nom de Charles de France, « avait vécu
dans ce pays et fait b e a u c o u p p o u r 1'augmentation et 1 ’h o n n e u r de la
f o i » 117. II était alors mort depuis longtemps, sans avoir été r e m p la c é ; et le
pape Jean X X III, en 1410, se décida à lui d o n n e r p o u r successeur, en q u a ­
lité d a d m in istrateu r, le m êm e Jean III de Sultanieh qui avait écrit le L ib e l­
lus (et qui devait m o u rir à L w ó w en 1412)118.
La vie de 1'archidiocèse de K h an baliq s'était ainsi c o n fo n d u e avec celle
de la mission des deux Chines, le Cathay et le Manzi; les institutions pré-
vues p ar Clém ent V, très originales en ce q u e lle s laissaient toute latitude à
1’arch evêqu e p o u r organiser sa province, paraissent av oir été insuffisantes
en ce qui con c e rn e la désignation des évêques et 1’élection de 1 ’a rc h e v ê q u e
- encore que la disparition de la bulle de fondation nous e m p ê c h e d'être
affirm atif sur ce point. Il sem ble q u ’on ait dép en d u entièrem ent de l'a rrivé e

116 On se r é f è r e d ’o r d in a ir e (G o lu b o v ic h , III, p. 393-394) à R o m a n e t du C a illa u d , D é c o u -


verte des to m b e a u x de d eu x m ission n a irey fran cisca in s du X IV * siècle, d a n s C o m p te re n d u des
séances de la S o cié té de G é o g ra p h ie de Paris, 1893, p. 3 9 : nou s a vo n s pu r e c o u r ir , g r â c e à I’o b li-
g ea n ce d e M . A. V a u c h ez, au te x te d e la le ttre du P, José - M. V ila à M a r c e llin o d a C iv e z z a (28
fé v r ie r 1892), p u b lié e d an s L e M is s io n i francescane in Palestina ed in a ltre r e g io n i delia terra , II,
8, 31 a o ü t 1892, p. 475-481. P a rla n t du F ra n cisca in B ern a rd , c o m p a g n o n d 'O d o r ic , 1’a u te u r
é c rit q u 'il a pu lir e c e n o m d e B e rn a rd su r u ne é p i t a p h e : « E sto n o m b r e s o lo se r e c o n o s c e e n
una p ie d r a s e p u lc r a l a d o s leg u a s d e L in zin co u . En este lu g a r se v e n d o s s e p u lc r o s , u n o d e
esto p a d r e y o t r o d e un o b is p o , q u e n o se p u e le p e r c ib ir el n o m b r e p u e s q u e lo s e s c r it o s hal-
lados en una b o te lla c e r c a d a c o la c r e al to c a r lo re s ta ro n p o lv e r iz a d o s . En o tr a p e q u e n a c a ja
d e b r o n c e se e n c o n t r o un a n illo e c ru z p e c to r a l en q u e esta b a g r a v a d o el s e llo d e N . P. san
F ra n c isc o q u e p o r la fo r m a m a n d a d a a e x h a m in a r r e m o n ta al s ig lo 13. En la p ie d r a q u e s e g u n
uso d e los C h in e s e s se p o n e en la c a b e z o n d e i s e p u lc r o y q u e p o r su a n tig u e d a d e s te d e v id id a
en m u ch as p a rte s s o lo se ve s e r e n te r a d o al a n o 1387 ». N o u s a v o u o n s q u e la p r é c is io n d e ce
ra p p o rt, la d é c o u v e r te , o p é r é e d ep u is, d e s p ie r r e s to m b a le s d e T s 'iu a n -tc h é o u e t d e Y a n g -
tch éou (q u i, m a ç o n n é e s dan s d e s m u ra ille s , é ta ie n t m o in s d é g r a d é e s ), n ou s in v it e r a ie n t à
a c c e p te r 1’h y p o th è s e q u 'il s a g ir a it b ie n d e to m b e s d e r e lig ie u x la tin s d u X I V * s iè c le . q u e lq u e
r é s e rv e q u e l'o n p u isse fa ir e su r la le c tu r e d e la date. P. P e llio t. C h ré tie n s d'A sie c e n t r a le .. . ,
P 643, p en sa it c e p e n d a n t q u 'il s'a g issa it d u n e «c o n fu s io n c e r t a in e » . - O n sait d 'a u tr e p a rt
q u ’une B ib le du X I I I * s iè c le (o u du X I V e ?) a v a it é té r e t r o u v é e en C h in e.
1,7 Ed. K e m , p. 120-121.
" * R. L o e n e r tz , É v ê q u e s d o m in ic a in s des d e u x A rm én ies, dan s A FP, 1940, p. 158 e t su iv.

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156 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D OR1ENT AU MOYEN-AGE

de missionnaires venus dOccident, et de la désignation de nouveau


ques par la papauté; toutefois la présence des légats, entre 1342 et n ^
1349, avait sans doute permis de pallier 1'absence d’un archevèqUe °ü
Charles de France succéda à Guillaume du P r é " 9, ce fut peut-ètre à p *
rieur de la province que se fit 1 'élection du premier. In,é-

b) Les évêchés du Q ipcaq et du Djagatai

Mais la province de Khanbaliq ne se réduisait pas aux seuls pays j


Cathay (la Chine du N ord et la Mongolie), de Manzi (la Chine du Sud) e*t
aux régions voisines. Lors de sa définition, elle s étendait à tout l’empire
des Tartares, ce qui pouvait com prendre également le Qipõaq, le Djagatai
voire la Perse mongole. Or, dès la fin du X I I I e siècle, le khanat de Qiptaq ej
les territoires voisins avaient été pénétrés par les missionnaires latins
ceux-ci passaient donc sous la juridiction du nouvel archevêque120.
On a vu que les six suffragants de Jean de Montecorvino avaient pris le
chemin qui passait par les côtes de 1’Inde p o u r se rendre en Chine. La
route, bien connue des missionnaires com m e des marchands, qui partait
des ports de Crimée et traversait les khanats de Qipcaq et de Djagatai se
révélait en effet longue et souvent coupée par les guerres entre princes
mongols. Mais les trois évêques désignés en 1310-1311 suivirent-ils le mème
itinéraire que leurs devanciers?
Les rapports entre les Latins et les Tartares du Qipcaq venaient d etre
troublés par les représailles du khan Toqtai contre les Gênois, qui s’étaient
vu obligés d evacuer leur com ptoir de Caffa et dont les biens à Sarai
avaient été saisis (1307-1308); le gardien du couvent franciscain de Caffa,
François du Bourg, avait été t u é 121. N éanm oins les contacts entre les khans
de Qipcaq et 1’Occident n'avaient pas été rom pu s de façon durable, et il
n'est pas exclu que les évêques désignés en 1310-1311 pour être suffragants
de K h a n ba liq aient été chargés de négocier avec le khan. Toqtai n'était pas
m usulm an - 1’adhésion de son oncle B à rk à à 1'Islam navait pas entraine
l'islamisation de la famille gengiskhanide qui régnait au Qipcaq - Et nous

119 II ne sau rait è tr e ex clu q u e Jean I I I d e S u lta n ie h ait d o n n é par in a d v e rta n c e e


d e C h a rle s au fra n ça is G u illa u m e du Pré, b ie n q u ‘ il a ffir m e a v o ir b ien connu ledit a
F ra n c e qu a n d il était jeu n e.
120 S u r les m ission s du Q ip éa q , cf. B. S p u le r, D ie G o ld e n e H orde, p. 232-241. j
121 Cf. B. S p u ler, D ie G o ld e n e H ord e, p. 84. - E st-ce à c e tte o c c a s io n que périt auss
gat, P ie r r e le P e tit (B ih l et M o u le , De duabiu, epistolis, d an s A FH , X V I, 1923, p 89)-

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I A NAISSANí |< U'UN P.PISCOPAT MISSIONNAIKK I S7

app ren on s que le roi des Tartares Coktoganus. sa mère Thoduthiliu. sa


fem m e Kcrley, ses Iils Georges, Curamas, et Abuscan em brassèrent la foi
catholique et revurenl le baptème, en m êm e temps que plusieurs chefs
m o n g o ls ,22.

L identiíication de Tot|lai a Coktoganus n ’est pas a s s u ré e ’n ; les sources


franciscaines postérieures comptent parmi les souverains qui se firent reli­
gieux ftater Johanncs, (inundam rex et im pcrator Tartarorum, et parlent de la
translation du corps du « b ie n h e u re u x frère Jean, jadfs roi des T a rta re s».
dans le couvent Saint-Jean de Sarai, trente ans après sa mort; mais un autre
texte m entionnc dans le couvent de Sarai le sepulchrum Coktogani filii impe-
ra toris14 : on pourrait supposcr que c ’est un fils de Toqtai qui fut baptisé et
non ce dernier. Mais lo q ta i mourut dès le mois d aout 1312; les deux aines
des fils du converti abandonnèrent la foi chrétienne p o u r se concilier les
chefs m o n g o ls - ils n en lurent pas moins mis à mort par leur cousin Õzbag,
qui devint khan. Seul le plus jeunc, Abuscan (Abusqa), conserva son inclina-
tion p o u r le cath olic ism c l2\
Jérôm e de Catalogue et ses com pagnons avaient-ils jo u é un ròle dans
cette conversion? N o u s 1’ignorons, et nous ignorons si le reto u r en faveur
des Gênois, autorisés à s ctablir de nouveau à Caffa, leur est du, aussi bien
que la confirm ation par õ z b a g des privilèges accordés aux Frères M in e u rs
p ar ses prédécesseu rs (20 mars 1314)126. Nous savons seulement que, tandis
que Pierre de Florence gagnait la Chine, Jérôme resta en arrière. II recons-
truisit une église à Calía; consacrc absque titulo alicujus ecclesie et destiné
ad partes Tartarorum ad prcdicandum, il prend de lui-même le titre d 'episco-

122 G o lu b o v ic h , II. p. 170-177.


121 P e llio t, N o te s s u r íh is t o ir e dc la H ord e d 'O r (CEuvres p o sth u m es, II, 1950), p. 71 et n 3 •
« l a q u e s tio n d e ces c o n v e r s io n s de T o k ta i et d e ses tro is fils au c a th o lic is m e . . . m é r ite un
e x a m e n m in u tie u x : les n om s ca d re n t m al, e l les fa its co n n u s se m b le n t c o n tr a ir e s ; m ais il fau-
d ra p e s e r les te r m e s d e la le lt r e très p re c is e p u b lié e p a r B ih l et M o u le d an s A FH , X V 1923
1 1 1 ».
124 M a n u m e n ta fran cisca na, cd . B re w e r. p. 539; G o lu b o v ic h , II, p. 61-72.
125 B. S p u le r, D ie g o ld e n e H ord e, 2C éd.. p. 85-87 et 586, r a p p o r te la su c c e s s io n d e T o q t a i
d 'a p rè s les a u teu rs m u su lm an s, d u n e m a n iè re oú n ’a p p a ra it pas la v e r s io n d o n n é e p a r la le t­
tre fr a n c is c a n e é d it é e p a r B ih l e l M o u le . D e duabus epistolis. D ans c e tte d e r n iè r e , c e s t b ie n
l'« e m p e r e u r » d é fu n t q u i est d o n n é c o m m e éta n t m o rt c h ré tie n , et c e c i ne s’a p p liq u e r a it q u 'à
T o q ta i lu i-m è m e . Q u an t à AbuSqa, on le r e g a rd a it c o m m e 1'h éritier p r é s o m p t if d e son c o u s in
O zbàg, et c e c i e n tr e te n a it les e s p o ir s d e s m iss io n n a ires. M a is il fau t n o te r q u e c ‘est en 1321
q u e Jean X X I I 1’ in v ita it à im ite r sa fe m m e en r e c e v a n t le b a p tè m e ( F on tes , V III, 53, o u B u li.
F ra ncisc., V, 4 5 0 ); en 1322 q u 'il le fé lic ita it d e sa c o n v e r s io n (Fontes, V II, 56).
126 Supra, p. 93.

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158 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIONS DORJENT AU MOYEN AGE

p u s Caffensis q u a n d il se trouve à Péra, en 1317127. Le 26 février 1318, il obte-


nait de Jean X X I I I erection de le g lis e Sainte-Agnès de Caffa en cathédrale
et la création d ’un vaste diocèse allant de la ville b u lg a re de V a m a jusqu'à
Sarai su r la Volga, et de la m e r N o ir e aux pays russes. Ainsi le pape recon-
naissait-il à Jérôme, sans p re n d r e 1'avis de 1 ’a rch ev êqu e de Khanbaliq, Ja
juridiction su r un territoire c o rre sp o n d a n t au ressort de la province de
K h a n b a liq à 1'Ouest de la V o l g a 128.
Jérôm e repartait aussitòt p o u r son diocèse, nanti d'une som m e de cin-
quante florins et d u n e lettre p o u r le khan Õzbág, q u e le p ap e priait dauto-
riser à n o u v e au les sonneries de cloches, c o m m e il 1 'avait prom is en 1314,29.
II se rendit certainem ent à Y o rd u d'Ò zbág, d 'o u il revint en 1321 à la cour
pontificale avec des inform ation s et aussi en d e m a n d a n t 1 'aide du pape
p o u r faire rec on n aitre son autorité p a r ceux qui résidaient dans «lem p ire
des T artares d u N o r d »; il soutenait une c on troverse avec les Dominicains
(1322), et ne repartit peut-être q u e n 132313°.
Ce qui avait décidé de la création de le v ê c h é de Caffa ne nous est pas
con n u. Il ne s'agissait pas seulem ent de d esservir une colonie d'Occiden-
taux : C a ffa apparaissait c o m m e le point de départ des missionnaires, et
Jean X X I I le rappelait en 1321 m . Et l'une des tâches essentielles du nouvel
é v ê q u e devait être de m ain ten ir dans l'Un ion les représentants des autres
Eglises, p o u r autant qu'ils avaient accepté cette u n ion - car une lettre d un
m issionnaire, datée de 1323, r a p p e lle qu e les sch ism atiques et les héréti­
q u e s sont les pires ennem is des p ré d ic ate u rs la t in s 132. Si Jean XXII, en
1318, avait écrit à 1’a rc h e v ê q u e et aux prêtres a rm é n ie n s d u diocèse de
C a ffa p o u r se féliciter de le u r u n ion avec 1'Eglise ro m a in e , il lui fallut en
1321 le u r écrire à n o u v e au p o u r les sou ten ir dans le u r conflit avec un «fils
de la p e r d itio n », 1'évêque T h a d d ée , qui se t a it fait sa c re r évêqu e de Caffa

127 F e d a lto , La chiesa latina, p. 441-442.


128 Fontes, V II, 2, n ° 8.
I 129 B u li. fra n cis c., V, 318 (28 m a rs 1318); u n e a u tre b u lle r e n d u e à la d e m a n d e de J é r ô m e
p r o s c r iv a it les m a r ia g e s m ix te s p o u r les Pisan s, V é n itie n s e t G ê n o is ( F o n te s , V II, 2, n ° 9 ); une
a u tr e é ta it a d r e s s é e aux A r m é n ie n s d u n o u v e a u d io c è s e (n ° 10).
,}ü L 'a ffa ir e d e s c lo c h e s n e ta it to u jo u r s p as r é g lé e , et Jean X X I I s o llic ita d e n o u v e a u
Õ z b à g ; le p a p e é ta it in fo r m e d e s d iffic u lt é s a v e c les A r m é n ie n s et d e s e s p o ir s q u 'o n fon d ait
su r A bu S qa ( F o n te s , V II, 2, 49, 50, 51, 53, 5 6 ); su r les d iffic u lt é s a v e c l e s D o m in ic a in s , cf. G olu
b o v ic h , III, p. 48-50. J é r ô m e é ta it sans d o u t e v e n u c h e r c h e r d e s r e n fo r ts : cf. la b u lle Cum hora
u n d e c im a du 23 o c t o b r e 1321 ( F o n te s , V II, 2, n ° 48).

151 B u l i fra n cis c., V, 449.


1,2 B ih l et M o u le , D e d ua hu s ep istolis.

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LA NAISSANCE D UN ÉPISCOPAT M ISSIONNAIRE 159

par le catholicos d'A rm én ie et qui importunait aussi bien 1’a rc h e v é q u e


arménien de Crim ée qu e Jérôme. A Sarai, un ep is co p u s A rm e n o ru m , B og o s,
avait suscité les pires difficultés à Ie v ê q u e du lieu, Etienne, q u ’il avait
obligé à quitter la v i lle 133. L ’union arm énienne était d o n c un des p rin c ip a u x
soucis de 1 evêqu e latin, surtout du fait q u u n e ém igration a rm é n ie n n e
importante s était dirigée vers la Crim ée et vers le reste du Q ipcaq. La solu-
tion trouvée ailleurs, qui consistait à désigner un évêque p o u r les A r m é ­
niens dans le m ê m e diocèse que 1 evêque latin, devait d a i ll e u r s être finale-
ment reçue, et les Arm éniens continuèrent à avoir leur a rc h e v ê q u e a Sol-
g a t 134. On peut d a ille u r s se d e m a n d e r si les difficultés de 1321 n'étaient pas,
en fait, des difficultés internes dans la com m unauté arm énienne, 1'élévation
de Jérôm e au rang d ’évêque latin de Caffa s’étant réalisée en a c co rd avec
1'archevêque arménien, que R om e considérait c o m m e un prélat uni p a r la
doctrine et le rite à 1’Eglise catholique (on le pressait seulem ent d'intro-
duire dans la célébration de la messe 1’union de l’eau et du vin). La-dessus,
le catholicos de Sis aurait directement désigné deux évèqu es au moins,
Th addée à Caffa et Paul à Sarai, sans passer par 1’a rch evêqu e : d ou les
conflits, qui devaient quelques années plus tard être apaisés - au point qu e
Thaddée, recon n u c o m m e évêque de Caffa pour les fidèles de rite a rm é-
nien, devait, après un séjour en Cilicie oú Rom e 1’avait envoyé c o m m e é v ê ­
que de Gorhigos, revenir à Caffa en qualité d évêque po ur les fidèles de rite
latin c o m m e de rite a r m é n ie n 135.
La m ention de 1'évêque de Sarai Etienne, en 1321, pose d ailleurs une
q u e s t i o n : s’agit-il d un évêque latin, ou d ’un évêque arm én ien ? Nous
serions tentés d 'o p te r p o u r le deuxième terme de raltem ative. Certes, on

Fontes, V II, 2, n° 10. 49. 50, 51. T h a d d é e d e va it b ie n tô t se r é c o n c ilie r a v e c J é rô m e , et


res te r episcopus Caphensis de E rm e n is en a tten d an t d ê tr e tra n s fé ré à G o r h ig o s (1328), pu is d e
re v e n ir à C a ffa c o m m e é v ê q u e latin en 1334 (J. R ich a rd , D eu x évèques d o m in ica in s . agents de
iU n io n arm én ien n e, dans AFP, X IX , 1949, p. 260*265); B o g o s - ou Paul - episcopus A r m e n o r u m
in im p é rio T a rta ro ru m lu s b e ct est fé lic ité en 1329 d e son r e to u r à l’ U n ion ( Fon tes, V II, 2.
n° 112).
1.4 L a r c h e v ê q u e S olkatensis E tien n e, q u i é c r it au p a p e ct q u e celu i-c i in v ite en 1340 á res-
s e rre r 1’u n ion ( Fon tes, V III, 51) est sans d o u te un su ccesseu r d e 1’a r c h e v ê q u e A ra k ie l c it é
en 1318.
1.5 Cf. infra, p. 208. Un p r iv ilè g e du ro i d ’A rm é n ie p o u r les S ic ilie n s a été tra d u it en 1332,
á Sis, par T h a d d é e , episcopu s O ccich en sis (lir e C u rch en sis) : cf. C a r m e lo T ra ss elli, S u g li E u r o -
P ti in A rm ên ia a p ro p o s ito di un p riv ile g io e di una n o v e lla dei B o cca ccio , d an s A r c h iv io s to r ic o
italiano, C X X II, 1964, p. 471-491. Su r les A rm é n ien s d e C affa, cf. B ratian u , R e ch e rch es s u r le
com m erce gênois dans la m e r N o ire au X I I I • siècle, Paris, 1929, p. 227-228; M. B ala rd , Gênes et
lO u tre m e r, I, Les actes de Caffa du n o ta ire L de Sam buceto, Paris et La H a ye, 1973, passim.

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16 0 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IE N T AU M O Y E N A G E

pourrait supposer que, dès avant 1321, R o m e aurait re liré au diocèse J,


Caffa la v ille de Sarai qui lui avait été don n ée en 1318, en égard à 1'iinpor
tance du couvent franciscain de cette ville - qui devait m êm e se dédoubl >
par la suite. Cette création nous sem blerait cependant prém aturéc : un évé
ché latin n'est attesté à Sarai q u ’en 1352136.
L ’im portan ce de Sarai était d o u b le : la ville était une place de com
m erce très active, elle était aussi la résiden ce du khan, et les lettres des
Franciscains m ontrent que, par exem ple, les seigneurs de Ba§kirie qui vien-
nent à la co u r im p éria le en p rofiten t p ou r d em a n d er des missionnaires1^
Les espoirs que l'on fondait sur 1’accession d'Abu§qa au tròne, en 1323
en core, s e ffa c è re n t par la suite. Vers 1339, des élém en ts hostiles à L'Is!am
que professait le khan Õzbág, auraient essayé de fa ire p é rir celui-ci dans
F in cen die de son palais; 1'attentat échoua, et, m algré la pression de certains
M usulm ans qu i auraient voulu en ren d re les ch rétien s responsables, le
khan contin ua à rester fa vo ra b le à ces d e r n ie r s 118. Son fils ainé, Tina-bàg,
a va it p o u r c o n se iller un Franciscain, E lie de H on grie, dès 1338. Sa bienveil
la n ce p o u r les ch rétiens inquiétait Ibn-Batuta, et, lo rs q u ’il succéda à son
père, en 1340, il en voya E lie auprès du pape. La p e rsp e ctive de son adhé­
sion au ch ristianism e était-elle en core à en visa ger? L e Q ipcaq n’avait plus
alors les contacts étroits avec Ia T ran soxian e qui a va ien t jo u é un grand rôle
dans la fo rm a tio n m usulm ane d ’un Bãrká, et il était peut-être encore possi-
ble q u e le poids des ch rétiens soum is aux M o n g ols du Q ip caq - Russes,
Com ans, etc. - entrât en ligne de c o m p t e 139, M ais T in a-b ag fut assassine dès
1342, et son successeur G anibàg (1342-1357) se m on tra un Musulman beau­
c o u p plus con va in cu q u ’Õ zbàg lui-m êm e, et plus p o rté aux mesures de
c o e r c it io n 140; on sait q u a u s sitô t après son a vèn em en t, il s’en prit aux éta-
b lissem en ts latins d e son em p ire, détru isant ceu x d e C rim é e et assiégeant

1,6 G olu b ov ich . V. 69 et G. Fed alto, La chiesa latina, p. 443 et 457 o n t op té pour reconnai-
tre en E tie n n e un év êqu e latin. Le P. L o en ertz s e t o n n e { La société, p. 103, n .69) de cette
« c o in c id e n c e é tra n g e » q u u n év êqu e a rm é n ie n de S a ra i s a p p e lle E tie n n e en 1330, et un évê­
que fra n cisca in d e la m êm e ville p o rte le m êm e nom en 1321. D eux év êqu es latins seulemenl
sont sü rem en t co n n u s à S a ra i : les F ra n c isca in s T h o m a s (1352) et A lbert (1357).
111 L ech, Das Mongolische Weltreich, p. 146; B ih l e l M oule, Triú nova documenta.
131 G olu b ov ich , IV, 226 (Le pape fé lic ite Ôzbàg d’a v oir é ch a p p e à 1'attentat et de sêtre
re fu sé à p e rs é cu te r les c h ré tie n s d ont tro is se u le m e n t av aien t p a rticip e au com plot).
139 Buli. Francisc., VI, n " 97, 124, 2 14; Ibn B a tu ta , éd. et trad . D efrem ery et S a n g u i n e t » , I ■

383, 389, 397. Tai-D üla, fem m e d Õzbàg, se m o n trait fa v o ra b le au cle rg é russe (Pelliot ^0
sur 1‘Histoire de la Horde d'Or, p. 101-102). S p u le r Die goldene Horde, p. 239. (
14,1 Õzbàg se m b le a v o ir é lim in é les b o u d d h iste s d ès son av è n e m e n t. Cf. B. Spuler, Di«
dene Horde, p. 218, 224. Supra, p. 106, n, 159.
LA NAISSANCE D UN ÊPIS< OHAI M IS M O N N A lkli 161

même Caífa - un testament placcntin dc 1347 dorm e c o m m e bcncficiaires,


avec les quatre couvents franciscains ou dom in icain * dc* Caífa, les églises ct
les couvents de Cim balo, Soldaya, Saint-Jacqucx dc Solgat et Kara-Su. qu il
était alors nécessaire de r e c o n s t r u ir c 141 ct sans doute com m en çan t à
faire reculer le christianisme au profit dc 1'l s l a m 142.
Aussi est-il difficile de mettre en rapport la création d ’un cvcchc latin à
Sarai avec un m om en t précis de 1'histoirc des relations entre les F ran cis­
cains et les princes m ongols. La prédication aux Tar tares devait d ailleu rs y
être difficile. du fait des p ro g rès que l'Islam avait rcaliscs dan s les m ilieux
mongols sous 1'influence d ' Õ z b à g : un Franciscain hongrois, Etienne de
Nagy-Varad, ayant prêché pu bliqu em en t ct attaquc 1’Islam tut contraint à
abjurer et, s'étant repris, fut mis à mort à Sarai même, dès 1334, et le cas ne
fut sans doute pas i s o lé 143.
D a u t r e s évêchés latins firent leur apparition, le long de la route q u e
suivaient les m archands. Celui de la Tana, ou õ z b a g autorisa le t a b lis s e -
ment d un c o m p to ir vénitien en 1332, mais ou Franciscains ct D o m in ic a in s
avaient établi des résidences dès avant 1318, a pu n ctre crigé qu aux envi-
rons de 1343; mais il se peut qu il ait existe a u p a ra v a n t 144. Cet é v ê q u e se
consacrait-il avant tout à desservir la colonie latine de 1’cndroit, ou avait-il
une táche m issionnaire? N o u s som m es mal rcnscigncs sur cc point; cepen-
dant, les q u e lq u e s indications que nous possédons sur le couvent d o m in i ­
cain de la T a n a nous permettent d'y relcvcr, en de h ors dc la présen ce en

141 L es c o u v e n ts d e C affa , S o ld a y a , C im b a lo , Kara-su et K h e rs o n so n t c ité s d a n s le De


locis (a va n t 1318). L e te s ta m e n t en q u e stio n , c o n s e rv e aux a rc h iv e s d e 1’h ò p ita l d e P la isa n c e,
nous a é té c o m m u n iq u é p a r M. R.-H. B au tier, qu i I a a n alysé d a n s Uts re la tio n s é c o n o m iq u e s
des O ccid e n ta u x a vec les pays d O r ie n t au M oy en Age, p u b lié d an s S o cié té s et c o m p a g n ie s de
C o m m e rc e .. . . p. 321-322.
142 Ib n B atu ta, op. cit., III, p. 357, d o n n e la r é g io n e n tr e K e rtc h et C a ffa c o m m e h a b ité e
par « c e u x . . . q u i a p p a r tie n n e n t à la n a tio n c o n n u e sous le n om d e K iíd ja k et q u i p r o fe s s e n t
la r e lig io n c h r é t ie n n e ». A S a r a i m ê m e , le v o y a g e u r avait r e n c o n tr é d e s M o n g o ls , en p a r tie
seu lem en t islam isés, d e s Q ip é a q , d e s T c h e rk e s s e s , d es Ru sses et d e s G re c s c h ré tie n s , e t d e s
« A s s » (A la in s ) m u su lm a n s (p . 357).
145 L em m en s, D ie H e id e n m iss io n e n , p. 57; M o lla t, Registres de Jean X X I I , n ° 63 644 et
63 892 (u n F ran ciscain , Ja cq u es d e P is to ie , s est fa it m u su lm a n ct d é s ir e r e n t r e r d a n s son
o rd re ; d eu x D o m in ic a in s en o n t fa it au tan t, au Q ip ía q ).
144 E len a S k riin s k a ja , S to ria delia Tana, d an s S tu d i v cn e iia n i, X , 1968, p. 3-46; G. F e d a lto
° P cit., p, 438-439, 459. La d a te d e 1343 (q u i est aussi c e lle d e 1’é m e u te q u i e n tr a in a la d e s tru c
tion du c o m p to ir p a r G a n ib à g , d o n t le su ccesseu r, B e r d ib á g d e v a it r e n o u v e le r en 1358 les p ri
vü èges c o n c é d é s à V e n is e ) est c e lle d e la c o n c e s s io n p a r le Sénat d e V e n is e du d r o it d e c o n s
íru ire une é g lis e au co n s u l d e la T a n a ; il en e x is ia it sans d o u te a u p a ra va n t d a n s les r é s id e n
Ces des F rères, et un é v ê q u e a v a it pu y ê tr e in stitu é.

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162 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D’ORIENT AU MOYEN AGE

1332 d' un frère Dominique, Polonais, qui savait le turc qipòaq, celle d’
frère Bandino Marzi, qui résidait à la Tana en vue d'y évangéliser les Tart^
res et les p a ie n s145.
D autres évêchés, missionnaires avant tout, ont été érigés à des dat
que nous ignorons également - il nous faut nous contenter denregistrer
1’existence d'évêques titulaires de ces sièges, non seulement à Sarai mais
dans des localités situées à l'est de la résidence d e s khans de la H o rd e -d ’Or
sur la route du Cathay, à Urgenj et à Almaligh. Le prem ier de ces évêchés
existait avant 1340, date oú apparait un Franciscain, Mathieu, episcopus
O rgathensis, et il était encore pourvu d'un évêque, Guillaume, en 1393,4é • le
second avait été érigé avant 1328, date de la mort, survenue près de Pavie
de 1’évêque Carlino de Grassis, dont le successeur, Richard de Bourgogne
était en charge en 1338 et mourut martyr en 1339147.
N o u s serions ici en présence d ’évêchés institués en Asie centrale, dans
1'espace vide qui séparait le Cathay de cette région de la M e r Noire oú une
population chrétienne aussi nom breuse que bigarrée et 1’espoir d amener à
la foi les Tartares et leurs souverains avaient am ené Jérôme de Catalogne à
p r o v o q u e r la naissance de 1evêché de Caffa. Les sièges d ’Asie centrale
répondaient-ils à des objectifs différents? Le cas d'Alm aligh permet
d e s s a y e r de discerner les conditions dans lesquels ils vivaient, et ce grâce à
la relation du martyre des Franciscains de 1339 et à la lettre de l'un deux,
1'Espagnol Pascal de V ito ria 148. La lettre de Pascal de Vitoria a 1'intérêt sup-
plémentaire de nous faire connaitre la formation d u n missionnaire. Ce
Franciscain espagnol, parti d ’Occident en 1334, avec un compatriote149,
passa p a r la Tana p o u r atteindre Sarai, tandis qu e son compagnon conti-
nuait jusqu a Urgenj. Le séjour au couvent de Sarai lui permit dapprendre

145 T h o m a s M a n casola d e Plaisance, O P. (e v ê q u e d e S a m a rk a n d ), s'en ga ge à consigner


aux m ain s d e B a n d in o M arzi, p o u r le tem p s oú il s é jo u rn e ra à la Tana. une som m e de cin-
q u a n te livres, en c o m m a n d e du m arch an d p la c e n tin R o b e r t o d e R ip alta, d em eu ra n t à la Tana
A rc h iv e s d e I H o p ita l de P laisan ce, 1330; sig n a lé p a r M. B a u tie r). S u r D om in iqu e. cf. Mas-
La trie, P riv ilè g e s c o m m e rcia u x , dans B.E.C., 1898, p. 585.
g o lu b o v ic h , IV, p. 310; F ed a lto , p. 495, L a 'r é s id e n c e fr a n c is c a in e i O rg a n tc prope r e i *
n em M ,lie s ,o rc e est c ilé e p a r B a r th e le m y d e P is e ; Pascal d e V it o r ia y sé jo u rn a qu elqu e temps.
seul c h ré tie n a v e c un s e r v ite u r ziqu c.
147 G o lu b o v ic h , III, p. 343; IV, p. 252-253 et 310-311.
■ « S in ic a Fra nciscan a, I, p. 501 et suiv., 527-528; cf. G o lu b o v ic h , III, p. 422 et IV. p. 244.253.
7 G ü n sa lve T restarn a . q u i re v in t en O c c id e n t et fu t c h a r g é p a r le pape, en 1338, dappor-
t e r a la v ic a ir ie d e C a th a y d es liv r e s (b r é v ia ir e , d o c trin a l. g r a m m a ir e s e t c . ) : Schãfer, Die Aus­
gaben, p. 75.

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LA NAISSANCE D UN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 163

le turc; aussitòt après, son v ic a ire 150 1 ’envoya avec un serviteur indigène (un
Zique) à Saraicik, puis à Urgenj oú il entreprit de d ém on trer à des qàdi la
fausseté de la doctrine coranique, ce qui lui valut d'être « t o u r m e n t é » (sans
doute bâtonné). Puis, quittant la v iça ria A q u ilo n a ris p o u r celle de Cathay, il
arriva à Almaligh, p ro b a b le m e n t en 1336, et sadjoignit aux Franciscains qui
y étaient é t a b lis ,51.
Mais cet établissement était-il ancien? Carlino de Grassis était mort, en
Occident, en 1328. Or, si le khan de Djagatai Darmasirin avait em brassé
1'Islam, ce qui n'était sans doute pas une condition favorable à 1’établisse-
ment d ’un couvent latin dans sa capitale, son successeur, Canksi, se m ontra
au contraire très bienveillant p o u r les chrétiens, qui avaient à Alm aligh un
archevêché de rite chaldéen. N ous avons une lettre à lui adressée p a r le
pape (13 juin 1338) p o u r le rem ercier d a v o i r donné à 1’évêque franciscain
un terrain p o u r y bâtir un couvent, ainsi que d avoir reçu avec faveur
1'archevêque de K h a n b a liq Nicolas, qu'il avait autorisé à construire et à
réparer des églises, ainsi q u a prêcher lib rem e n t152. On peut se d e m a n d e r si
ce n est pas précisément à 1 ’occasion du passage et du séjour de 1 ’archevè-
que, v raisem blablem en t en 1336, que ce dernier, profitant des bon n es dis-
positions du khan, releva la cathédrale d ’Almaligh oú il laissa un évêqu e -
Richard de B o u r g o g n e quelques Frères, un de ses interprètes enfin dont
M arignolli nous a p p ren d la présence.
Le couvent prosp é ra : un des religieux, François d Alexandrie, o p é r a
sur le khan lui-m êm e une guérison miraculeuse et fut chargé p ar lui d ele-
ver son fils. M ais CankSi mourut, et Almaligh fut disputé entre descendants
d ’Õ gõdai et descendants de Djagatai (quatre khans se succédèrent de 1338 à
1342); l’un des premiers, Ali, qui était un derviche, fit saccager le couvent
oú périrent 1'évêque, trois frères (François, Pascal et le Provençal R aym on d
Raphi), trois c o n v e rs (le P roven çal Pierre Martel, 1’Italien L a u re n t

150 Sans d o u te le v ic a ir e d e C athay, q u e Pascal ava it r e n c o n tr é « i n v iç a r ia O r ie n t a li» .


151 S in ic a Fra n cisca n a , I, 501; G o lu b o v ic h , II, p. 244. L e c a ra c tè re v iv a n t d e c e tte r e la tio n a
am en é le P. I. O m o e c h e v e r r ia à en tir e r un liv r e à p e in e « r o m a n c é » sur les m iss io n s d ’Asie, A
la som bra de G e n g is -K h a n , M a d rid , Ed. C isn ero s, 1960.
152 G o lu b o v ic h , IV, p. 253. Cf. aussi la le ttr e d e B e n o it X I I re c o m m a n d a n t au khan d e D ja ­
gatai N ic o la s B o n e t, M a r ig n o lli et leu rs c o m p a g n o n s ( B u li Francisc. V I, n “ 97). - La c h ro n o lo -
gie d es khans d e D ja g a ta i p r é s e n te d e s d iffic u lté s q u i on t a ttiré 1’a tte n tio n d e P e llio t. R e c h e r-
ches s u r les ch ré tie n s d'Asie cen trale, p. 47-48, n. 1 et 2. K àpàk , m o r t v e rs 1327, a u ra it eu p o u r
su ccesseu r A lg ig id a i, fils c o m m e lu i d e D uw a, a ttes té en q u a lité d e s o u v e ra in p a r d e s tex tes
ch in ois d e 1327 et 1329. D a r m a iir in est a tte s té en 1331 et 1332; CankSi est c o n n u p a r d e s
m on n a ies d e 1335 et 1338.

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164 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

cTAncône, un frère originaire sans doute de Chine du Sud - Indus - qUi était
1 ’interprète de 1 'archevêque), ainsi q u u n marchand gênois, Guillaume de
Modène. Les autres chrétiens - sans doute les convertis latins, mais peut-
être aussi des membres de la vieille chrétienté chaldéenne locale - aposta-
sièrent153.
Ali disparut à son tour; les légats pontificaux nommés en 1338 (et pour-
vus d'une recommandation auprès de CankSi) arrivèrent à Almaligh oú ils
furent bien reçus, autorisés à prêcher et à baptiser; Marignolli put recons-
truire 1'église, acheter un terrain pour bâtir un couvent, bénir les fonts bap-
tismaux, et il laissa quelques Frères avant de repartir po ur la Chine à la fin
de 1341. Nous ignorons d'ailleurs si le passage à 1’Islam du khan Tughluq
Temür, vers 1350, laissa subsister la résidence franciscaine et si un évêque
avait remplacé Richard de B o u r g o g n e 154.
Dans la mesure oú les convulsions du khanat de Djagataí laissent dis-
c e m e r ses limites155, il apparait q u ’Almaligh, principale résidence des
khans du « Mogholistan », relevait effectivement de la métropole de Khan­
baliq, alors qu'Urgenj, oú 1’établissement des Latins fut sans doute encore
plus éph é m è re 156, peut avoir relevé de la vicairie de Tartarie Aquilonaire,

133 R elatio du m artyre : Sinica franciscana, I, p. 510 et suiv.; réc it d e Marignolli, dans
S inica franciscana, I, p. 527-528. Ces év èn e m en ts eu ren t lieu 1’a n n ée q u i p récéd a Tarrivée de
ce dern ier, don c sans d o u te en 1339, sinon en 1340. O n co n state, su r les stèles des cimetières
ch rétien s pu bliées par C h w olson , la p p a r itio n d e n om s m u su lm an s qu i paraissent témoigner
dc co n version s forcées, du m oins à PiSpek (D. C h w olson , S y risch n estoria n isch e Grabinschriften
aus Sermrjetschie, dans M ém oires de 1'Académie im p éria le des S ciences de Sam t-Petersbourg, 7*
série, t. X X X V I I I , n° 8, 1890). A Alm aligh, c e rta in es p ie r re s to m b a le s chrétiennes datent
de 1368.

154 La presen ce du nom d A lm aligh dans les listes d e c o u v e n ts fran ciscain s plus tardives
n a p ro b a b lem en t pas de va leu r d écisive. Cf. V. R o n d e le z , Un évêché en Asie centrale au X IV
siècle, dans N Z M W , VI, 1951, p. 1-17.

La ca rte ch in oise c o m m e n té e pa r B re ts c h n e id e r, M ed ia eva l Researches, II, p- 26 et


suiv., attri ue au anat d e Djagataí, en 1331, le pays o u íg o u r, B ech b a lig , Karakhodjo, Djam-
bahgh, A lm aligh, le pays des Q arlu q, Uch T u rfa n . K o u tch a , K a ch ga r, K h ota n . le Turkestan et
U rgenj le Ferghana, K h od jen d . Ta ch k en t, la T ra n s o x ia n e (O tra r, Sam arkand, Bukhara). I«
Badakchan, Thus, K a b o u l et Ghazna. Cf. Lech, op. cit., p. 116.
Les m archan ds y passaient c e p e n d a n t (su rto u t qu a n d la ro u te du sud devint moins

r , « c T " " ’ ^ ran cesch in o d * N o d " . “ sera it m è m e ru in é en m enant joyeuse * *


U rgenj (R L op ez, V e n e m e fe s w „ i , Hnee . . . p. 52) en 1362, tandis qu e peu après l » « *
cu m pa^n ie de C o v a n n i Lü redan, reven a n t d e r in d e , tro u v e d a n s c e tte v ille un Barbarig» 1 *
con sen t a lui p re te r d e I argen t (ibid., p. 53 et suiv.).

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LA NAISSANCE D UN ÊPISCOPAT MISSIONNAIRE 165

sans qu on puisse discerner la part de 1’archevêque de Khanbaliq dans la


désignation des évêques qui y parurentl57.
Le cas de levêché de Caffa est plus complexe. En 1318, les lettres de
Jean X X II érigeant cette ville en cité épiscopale ne font pas allusion à
1’archevêché de Khanbaliq : cependant, à la même date, la bulle R e d e m p to r
noster créant la province de Sultanieh précise bien que 1’empire de G azaria
(le Qipcaq) fait partie de celle de Khanbaliq. En 1358, désignant Conrad de
Pregren tia pour succéder à l Arménien Thaddée, Innocent VI précise que
1’église de Caffa relève n u llo m ed io de 1’Eglise de R o m e 158 (encore que. nous
allons le voir, Caffa eüt entre temps été rattaché à la métropole de Vospro).
On retrouve la mention de la dépendance de Caffa envers Khanbaliq en
1391 et en 1401 (et ce. en dépit de la création de la métropole de S a r a i)159.
En fait, comme l’a relevé le P. Loenertz160, la création d'un archevêché
à Khanbaliq pour 1’ensemble du ressort de 1'empire mongol regardé
comme unitaire ne répondait pas à des conditions géographiques et politi-
ques dont, évidemmcnt, Clément V ne pouvait être parfaitement informé.
Les succès étonnants remportés par Montecorvino, créant une commu-
nauté chrétienne de rite latin ou du moins d ’obédience romaine au siège
même de la puissance du grand-khan, pouvaient faire apparaitre comme
répondant à une nécessité évidente 1'implantation à Khanbaliq de la métro­
pole créée pour 1’empire mongol tout entier - mais les évêques envoyés à
Montecorvino s'étaient vu affecter aux seules villes dotées de postes mis­
sionnaires du Cathay et du Manzi II avait faliu un hasard pour q u ’au lieu
de rejoindre son archevêque, Jérôme de Catalogne se fixât à Caffa et y fit
naitre un diocèse. Des autres sièges épiscopaux créés dans cette immense
province, deux - Sarai et la Tana - appartenaient encore au monde de la
Mer Noire, en contact avec 1’Occident; les autres - Urgenj, Almaligh - ont
eu une existence semée d eclipses, au hasard des circonstances favorables
et des changements politiques particulièrement dramatiques au Djagatai.

157 Dans sa lettre. Pascal d e V ito r ia parait in d iq u e r q u il a en fin a ttein t la v ic a ir ie d e


Cathay quand il a r r iv e à A lm a ligh .
15' Fontes. X, 110.
,5V Fontes. X III, 1, 19a; G. F ed a lto, La chiesa latina, I. p. 446, r e lè v e dans c e tte b u lle d e 1391
la m en tion du ra tta c h e m e n t d e I é g lis e d e C affa à 1'archevêché d e G ên es m e tro p o lita n o ju re,
Ce qui a tteste bien la c o n fu s io n qu i rég n a it dans les esprits.
160« II n'en est pas m o in s vrai q u e la su b o rd in a tio n des é v êc h és du K ip è a k à la m é t r o p o le
fran ciscain e d e C h in e eut une g ra n d e in flu e n c e sur les d estin ée s de la h ié ra r c h ie la tin e dans
les c o lo n ie s d e la M e r N o ir e . T o u t d a b o r d , e lle em p ê c h a la c o n stitu tio n d u n a rc h e v ê c h é d an s
c e n tre le plus in d iqu é, c'est-à -d ire à C a f f a . .. » (L a société, p. 110-111).

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166 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D OR IENT AU M OYEN-AG E

Cette dernière région avait-elle pu fournir une meilleure assise à la h *


rarchie épiscopale latine? Les pierres tombales des cimetières du Semiret
chié et de la vallée de 1’I li161 nous font connaitre une chrétienté nombreuse
bien assise, appartenant au rite chaldéen dans une région oú précisément
les missionnaires latins ont fait leur apparition. Mais les Latins d'Almaligh
ont-ils cherché à nouer les relations cordiales avec ces « Nestoriens», 0u
bien 1'incompréhension réciproque sest-elle manifestée comme elle le fit
en Chine? Les Latins se sont-ils surtout consacrés à essayer de gagn er les
«T a rta re s » au christianisme, sans placer 1’union des Eglises au prem ier
rang de leurs préoccupations? Rien ne nous permet de savoir si, au khanat
de Djagatai, les missionnaires ont connu des succès spectaculaires. Dail­
leurs, les khans se sont succédés selon un rythme c h a o tiq u e : õgõdàides
contre djagataides, promusulmans contre anti-musulmans, sont en lutte
presque incessante, et les Franciscains d ’Almaligh ont payé de leur vie 1'une
des convulsions de 1'empire. Quant aux chrétiens locaux, eux aussi ont été
affrontés à 1’exigence des conversions forcées.
Or, c est sur ces marches de Dzoungarie que reposait la cohésion de la
province de Khanbaliq. Dès 1318, Jean X X I I avait regardé comme indispen-
sable la création d'une province correspondant à 1'empire mongol de Perse
et m ordant largement sur «1'empire des Tartares du m ilieu». Il avait alors
m aintenu 1'appartenance de la G a z a r ia à Khanbaliq. On peut se demander
s il n ’aurait pas été sage, à cette époque, d ériger Caffa - ou Sarai - en
archevêché pour mieux coordon ner 1’action missionnaire en Tartarie Aqui-
lonaire. II a semblé suffisant au pape de créer un évêché à Caffa. Quelques
années plus tard, il nest pas impossible que le m êm e pape ait cherché à
trouver une autre solution au problèm e qui se posait ainsi de la possibilité
de maintenir la Tartarie Aquilonaire et la Chine dans le mêm e ensemble.
Mais ce fut, nous le verrons, dans une perspective nouvelle : Clément V
avait, en 1307, essayé d organiser une hiérarchie dan s le cadre de 1'empire
m ongol; Jean X X II, en 1318, fut am ené à p rendre conscience de la rupture
de 1'unité de cet em pire; le même pape, en 1333, allait envisager une organi-
sation qui ne reposât plus sur 1'existence de cet em pire, c o m m e si laban-
don progressif de 1espoir de gagner au christianisme la dynastie régnante
et, par elle, la population d e 1'empire, suscitait un rem a n iem e n t de cette
hiérarchie.

A p c r ^ u d e n s e m b le p a r T . W . T h a c k e r , A n e s to r ia n g ra v e s to n e fr o m C en tra l Asia |fl


G u lb e n k iu n M u s e u m , d a n s D u r h a m U n iv e r s ity J o u r n a l, 1967, p. 94-107; cf. D auvillier, L*s pr
v in ce s ch a ld é e n n e s *d e 1 'E x té r ie u r » a u M o y e n -A g e , p. 286-291, 304-312.

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QUATRIÈM E PARTIE

L/ARCHIDIOCÈSE DE SULTANIEH:
LES MISSIONS DANS LES
« PARTES
ORIENTALES ET MÉRIDIONALES »
ET L’UNION ARMÉNIENNE

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erom e e Catalogne, le prem ier évêque de Caffa, faisait remarquer en
qu e es Franciscains jouissaient d u n e antériorité certaine dans le
dom ain e des missions chez les Tartares, q u ils y avaient fondé quarante
eglises et qu ils com ptaient neuf martyrs au cours des années qui venaienl
de s écouler, alors que les Dominicains navaient fondé que cinq résidences,
toutes situées près de la mer, et ne groupant pas plus de quinze religieux1.
La situation dans 1archidiocèse de Khanbaliq était telle en effet que les
missions pouvaient y apparaitre com m e presque exclusivement franciscai-
nes.
L a création de la province de Sultanieh peut apparaitre dans une cer­
taine m esu re c o m m e une réponse à ce quasi-monopole des Frères Mineurs
dans les partes A quilon a res et au C a t h a y : elle allait être confiée aux seuls
D o m in ic ain s - en c o re que les Franciscains y fussent, ici aussi, nom breux
M ais ce caractère particulier à la province en question ne se x p liq u e pas
tant p a r la rivalité des o rdres que par les caractéristiques déjà anciennes
des m issions dan s les partes orientales. Au X II I e siècle, nous 1’avons vu, les
m issions d 'O rie n t étaient davantage tournées vers la recherche de 1’Union
des Eglises q u e vers la prédication aux infidèles. Au X I V e siècle, ce trait
p articulier se maintient; et les archevêques de Sultanieh finiront par a p p a ­
raitre c o m m e tout particulièrem ent attachés à 1’Union arm énienne qui
p rend à cette é p o q u e une im portance considérable.

I - LA P R O V IN C E D E SU L T A N IE H

a) La fo n d a tio n de la p ro v in c e

L a p ro v in c e d e Sultanieh apparaissait, à un archevêque d e la fin du


X I V ' siècle, c o m m e ayant été fo n d é e à la suite des succès acquis dans la

■ G o lu b o v ic h , III, p. 48, 50 (J é r ô m e s é le v a it c o n tr e 1’a c c u s a lio n d h é ré s ie p o rté e c o n tre


son o r d r e e n fa is a n t é ta t d e s s e r v ic e s ren d u s p a r celu i-ci dans les m ission s).

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170 LA PAPA UTÉ ET L E S M I S S I O N S D O R I E N T AU M O Y E N A G E

recherche de 1'Union avec les Arm éniens. M ais la critique serrée de


tions dans lesquelles celle-ci se réalisa, à laq uelle se sont livrés en C° n^‘'
lier les PP, Loen ertz et V a n den O udenrijn, a p e rm is d ecarter cette Pk ^ ÍCu*
tio n 2. L ’A rm én ie fut, au départ, assez en m a rge des préoccupatio
aboutiren t à la création de ce n ouvel a rc h e v êc h é; la u to rité reconniT ^
les A rm én ie n s au catholicos résidant à H ro m g la , puis à Sis, ne rendait ^
nécessaire la désignation d ’un a rc h e v ê q u e latin ayant juridiction sur ^
Le P. L oe n ertz a mis en éviden ce le rô le joué, à Torigine de cette6^
tion, p a r le D o m in ic a in G u illa u m e Adam , qui écrivit à Tintention du
son De m od o Saracenos extirp a n d i au re to u r d 'u n voy age m i s s i o n n a i r e ^
1avait m e n é en Perse et, à travers 1'Océan Indien, j u s q u e n Ethiopie ( 13^
1317)3. D e cet ouvrage, et d u D ire c to riu m ad passagium faciendum \ le nape
pouvait c o n c lu re à Tim portance de la tâche évangélisatrice qui restait à
a c c o m p l i r : « n ou s qui so m m es les vrais chrétiens, lisait-on dans le Directo
riu m , n ou s ne so m m e s pas la dizième, pas m ê m e la vingtièm e partie» des
h o m m e s 5. Et il révélait 1'existence dans l'Inde, à Socotora, dans les Laquedi-
ves et en Ethiopie, de toute une population, qui p ou rrait être ramenée ou
a m e n é e à la foi et qui aiderait c o n sid é ra b le m e n t les Occidentaux en pre-
nant 1’Egypte à revers lors de la croisade à venir.
L es m aisons des D om inicains et des Franciscains étaient relativement
nom breuses - les prem iers avaient, vers 1312, trois «lie u x » à Tabriz
M a r a g h a et D ehikerkan, tandis qu e la viça ria O rien ta lis des Frères Mineurs
allait c o m p r e n d r e ceux de Tabriz, Sultanieh, Tiflis, P orsico, Carpi* et Sei-

2 R. L o e n e r tz , La Société des Frères pérégrinants, p. 142; D e r « Libellu s de notitia orbis», éd


K e rn , p. 114.

. * R ‘ L ®e n e r t z ’ ld ’ P- 138* C f- C h - K o h le r , D ocum ents relatifs à G u illau m e Adam, archevêque


de Sultanieh. dans Mélanges p o u r servir à Ih is to ire de VOrient latin, II, P aris 1906 p. 475-515),
et 1 in tr o d u c tio n d e c e t a u te u r à 1 e d itio n du De modo, d an s Rec. hist. Crois. D o cu m e n ts armé■
mens, t. II. G u illa u m e é ta it un F ra n ça is du M i d i ; il é tu d ia it la t h é o lo g ie à C on d om en 1302
(C. D ouais, Acta ca p itu loru m p ro v in cia liu m O. P., T o u lo u s e , 1894 p 471)
4 C e lu i-c i est-il 1’oeuvre de Raym ond E tie n n e , qui a c c o m p a g n a it G uillaum e Adam,
c o m m e le p en se le P. L o e n e r tz (La Société, p. 63, n. 26) o u d e G u illa u m e lui-m èm e, comme
a d m e t M e lle V o n d e n B n n c k e n (D ie «N a tio n e s *, p. 6 4 )? Cf. Ch. K o h le r, Quel est /'auteur du
trecto n u m ad passagium faciendum, d an s Revue de lO rie n t latin, X I I 1911 p. 104-111.
s Doc. Arméniens, II, p. 383.

6 C es d e u x n om s, d o n t le p r e m ie r p a ra it a v o ir é té tra n s c rit Pisauith dans la liste de Pau


in d e V e n is e p a r su ite d u n e c a c o g r a p h ie (G o lu b o v ic h , II, p. 72, 265-268), nous paraissent cor-
re s p o n d re le p r e m ie r à B o rç k a ou Y e n i y o l (a n c ie n n e s fo r m e s Parsch at, B o rtch is keui), sur le

^ ° UC ^ C0^ ^ ar *ec^u e * ro u te d ’A rtv in à B a to u m tr a v e rs e la chaine pontique-


le s e c o n d a G a rp i o u K ’h arp i, su r le K h a sa k h , a fflu e n t d e 1'Araxe, au n o rd -o u est d'Erivan (cf
• am t- artin , M em oires historiques et géographiques sur lA rm én ie, Paris, 1818-1819,1, P-40 ct

J
LARC HIO IO CÊSE DE SULTANIEH 171

mas, Karakilissc et Erzerum. Trcbizondc et Simisso. répartis entre 1‘A/er-


bcijan, la G ran de-A rm én ic et la còtc méridionale dc la m er N o i r e 7 - c ’etait
là les bases p o u r un apostolat auqucl la création d une hierarchie devait
donner une nouvellc vigucur.
C o m m e p o u r Khanbaliq, la province de Sultanieh allait recevoir p o u r
chcf-licu la capitale d un khanat m ongol dont on ne pouvait plus guere
escompter, vingt ans après le passage de Ghazan à 1’Islam, voir le souverain
em brasser la foi chrétienne avec tout son peuple; mais, ici, nous ne
connaissons pas de succès notable des missionnaires qui expliquent la fon*
dation. Le p ré a m b u le de la bulle R e d e m p to r noster, du l cr avril 1318. se
borne à é v o q u e r 1'importance de la cité de Sultanieh qui était. on le sait. la
ville fondée p a r les Il-Khans, sous le nom m ongol de Q u n g h u r-ò lò n g
[C o n g o rla u u m ) p o u r être la capitale de 1’em pire m ongol de Perse. Le pape
conférait à Francon de Pérouse, alors vicaire de la S ocieta s P e re g rin a n tiu m
- la cure des âm es de tous ceux qui habitaient «le s pays sou m is à le m p e -

114), oú M e k h ita r d ’A b a ra n sig n a le la p ré s e n c c de n o m b re u x A rm é n ie n s c a th o liq u e s et d o n t


le p rin c e est l'un d e s d e s tin a ta ire s d une le ttre d e Jean X X I I (M A. Van d e n O u d c n rijn , Lin~
guae ha icun ae s crip to re s O .P., p. 223; Fontes, V II, 2, 115). L es id e n tific a tio n s p r o p o s é e s p a r
G o lu b o v ic h , P o r t o P isan o su r la m e r d 'A z o v p o u r P o rs ico -P isa u tíh , le C arpi d e s p o rtu la n s (c a p
K e r p e p rè s d e 1 'em b o u ch u re du S a k a rva ) p o u r Carpi, ne paraissen t pas p o u v o ir ê t r e rete-
nues.
7 C e tte liste d e ré s id e n c e s fig u re p o u r la p r e m iè r e fo is dans le De lo cis (G o lu b o v ic h , II.
p. 72), pu is d an s le S tatus v ic a ria ru m o rie n ta liu m (B r itis h M u seum , t o d . N e r o A 9; G. G o lu b o ­
vich, II, p. 265) et d an s la liste d o n n é e par Pau lin d e V en ise ( ibid ., p. 268) d o n t 1’o r ig in e d o it
être d iffé r e n t e ( S o ld a n ia y fig u r e sous le v o c a b le m o n g o l d e C o n g o rla u u m ) et ou P é ra e t T h es-
sa lo n iq u e son t a ttr ib u é s à la Tarta ria on e n ta lis . C e tte liste da te d e s e n v ir o n s d e 1334. Q u an t a
ce lle d e B a r th é le m y d e Pise (ib id , p. 272-273), e lle ne d o n n e plus les n om s d e S elm a s, K a ra k i-
lissé, P o r s ic o et C a rp i. m ais a jo u te à 1e n u m é ra tio n c e lu i d A k h a lzik h é ; e lle aussi c o n s id e r e la
cu stod ie d e C o n s ta n tin o p le c o m m e a p p a rte n a n t à la v iça ria O rien ta lis, à c ò té d e c e lle s d e
T a b riz et d e T r é b iz o n d e (1390). - L e re g n u m Yveriae, oú se situ a ien t d e u x loca fra n c is c a in s ,
est ra tta c h é à la v iç a ria A q u ilo n a r is : il ne s agit d o n c p r o b a b le m e n t pas d e la G é o r g ie , m a is
soit d e la c ô te a b k h a ze , so it d 'u n pays au n o rd du C au ca se (in fra , p. 184, n. 55). - L e t a b lis s e -
m ent d es F ra n c is c a in s à K a r a k ilis s é (M a k u ) a du se fa ir e lo rsq u o n t c o m m e n c é leu rs r e la ­
tions a v e c 1 'a rc h ev êq u e Z a c h a rie d e S a in t-T h a d d ée . Q u ant aux D o m in ic a in s , il c o n v ie n t d e
r e m a rq u e r la p r o x im it é d e leu rs tro is r é s id e n c e s : T a b riz , v ille d e s m a rc h a n d s et c a p ita le d e s
H-khans ju s q u à la c o n s tr u c tio n d e S u lta n ie h p a r O lg a itü ; M a ragh a , 1'une d e s r é s id e n c e s d e
ceux-ci (c e lle o ú H ü là g ü a v a it fa it b â tir son o b s e r v a t o ir e ), m ais aussi s iè g e du c a t h o lic o s ch al-
déen au te m p s d e Y a h b a lla h a I I I (S p u le r, D ie M o n g o le n in Ira n , p. 332, 218-223, 4 4 0 ); D e h ik e r-
kan (D e h -e -K h w â r e q â n , a u jo u r d ’hui A za r-S h a r), è u ne q u in z a in e d e k ilo m è tr e s d e T a b r iz su r
la ro u te re lia n t c e tt e v ille á M a ra g h a , n e ta it sans d o u te pas s e u le m e n t un d e s lie u x q u ’a ffe c -
tio n n a ien t les p r in c e s m o n g o ls (H ü là g ü fu t e n te r r é p rè s d e l à ) : un p r é la t o r ie n ta l y rés id a it-il.
qui ju s tifia it la p r é s e n c e a u p rè s d e lui d u n g r o u p e d e c o n s e ille r s la tin s ?

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p

172 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R I E N T AU M O Y E N -A G E

reur des Tartares de Perse, aux princes Q aidu et Duwa, aux róis dEth*
et des In des», c'est-à-dire « à partir du mont Barrarius et au delà'0^
l’O r ie n t »f ceci sans vouloir porter préjudice à la concession faite p a r r ^
ment V aux Franciscains d ’un archevêché in partibus Tartarorum don 1

limites seraient fixées par le m êm e mont B a rra riu s 8 : tout ce qui s‘etend
de là jusqu a Péra, ainsi que 1'empire de Cathay et celui de Khazarie re ***
rait du ressort de cet archevêché. En príncipe, donc, le Djagatài était ret'^
à K h an baliq p o u r être rattaché à Sultanieh; nous verron s comment cet^
décision fut réalisée. Francon recevait lui aussi six suffragants. ordonnés
p a r les soins du pape, et qui étaient chargés de lui con férer la consécration
épiscopale : il était exempté de Tobligation de se ren d re à la Curie pour
recevoir le p a lliu m (deux de ses suffragants, G u illa u m e Adam et Géraud
Calvet, devaient lui remettre le dit p a lliu m ).
P o u r que « p a r défaut de pasteur, cette nouvelle plantation ne souffre
pas », tout était prévu p o u r le rem placem en t de 1’archevêque. Les F rères du
couvent dom inicain de Sultanieh ou, éventuellement, ceux du c o u v e n t de la
cité dans le diocèse de laquelle il serait mort, con voqueraien t dans les six
m ois les suffragants qui procéderaient à Télection du nouveau m étropoli-
tain, le consacreraient et lu i conféreraient le p a lliu m d u défunt, nonobstant
1’usage général d e n t e r r e r cet ornem en t avec le prélat qui 1’a v a it porté.
R o m e serait prévenue ensuite, la rc h e v ê q u e , p ro p te r lo c i distantiam, pericula
m aris et terre, expensas et alia que de necessitate ipsum o p o rte re t subire, étant
dispensé de se rendre à la Curie p o u r re ce v oir le p a lliu m .
L o r ig in a lit é de cette institution tenait à ce q u e le «c o u v e n t de 1’église
c a t h é d r a le », au siège m étropolitain aussi b ie n q u e d an s chaqu e évêché suf-
fragant, jou ait le rôle d ’un chapitre cathédral, q u e ce soit en convoquant les
évèq u es p o u r 1election ou en adm inistrant le te m p o r e l pendant la vacance
du siège; le p rie u r d om in ic ain était assim ilé à un d o y en de chapitre.
D a u t r e part, l a r c h e v ê q u e et ses successeurs restaient soum is à la correc-
tion d u m aitre g én éral de l’O r d r e ou d e son vicaire (le vicaire de la Societas
P e re g rin a n tiu m ) assim ilés à des vicaires d u Siège apostolique, jusqua la
d ép osition exclusivem ent, l a r c h e v ê q u e ayant les m ê m e s pouvoirs à legará

KQui s i d e n t i f i e so it à la chaine Pontique, s o i t plutôt au Caucase Occi dental , les «monts


Caspiens» correspondant au Caucase oriental: cf. Jourdain de Séverac, M ira b ilia , p. 39. qu»
compte 40 jours de voyage de Sivas aux Monts Caspiens et vingt-trois du B a rra riu s à Tabru-
L Ararat (3apa0ucEv de certains textes grecs - Patr. Gr. CVII, 349) est hors de cause. n ’é t a n t
qu à cinq étapes de Tabriz. Cf. Pelliot, Recherches sur les chrétiens d'Asie centrale et dExtrè^t
Orient, p. 223-224, n. 3 .

IMI
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l a r c h id io c ê s e d e s u l t a n ie h 173

de ses suffragants; et les mêmes dispositions étaient étendues à 1’archevé-


que de K hanbaliq.
Caractéristique aussi de 1’aspect original de cet archevêché mission­
naire apparait 1 interdiction aux archevêques et évèques d ’user du p a lliu m
ou des autres insignes de leur dignité en dehors des partes oú s'exerçait
leurs fonctions : de nom breuses dérogations devaient par la suite être
concédées à ces prélats9.
La création d un archevêché et d une hiérarchie, incorporant organi-
quem ent les couvents dominicains comme, dans la province de Khanbaliq,
les couvents franciscains — mais il restait loisible au métropolitain de pour-
voir les sièges épiscopaux de personnes étrangères à 1’o r d r e 10 n’en lais­
sait pas m oin s aux missionnaires des pouvoirs étendus. Le l er mai 1318,
Jean X X I I confirmait les privilèges accordés par l ordre dom inicain à la
S ocieta s P e re g rin a n tiu m , et à ses membres, et accordait à ceux-ci le droit
d a b s o u d re les clercs coupables de simonie, et de conférer des indulgences
(les évèqu es ayant la possibilité de donner cent jours din d u lg e n c e, 1 ’arche-
vêqu e un an, les prêtres quarante j o u r s ) 11. Clément VI devait c o n firm er à
nouveau, en 1333, les grâces et privilèges concédés par les maitres de
1'ordre aux Frères Prècheurs p r o C hristo p eregrin a n tib u s, en étendant leurs
po u vo irs quant aux mesures à prendre à 1'égard des infidéles et schismati-
ques reven u s à 1'union ou convertis à la f o i 12; Innocent V I recevait une sup-
plique des Prècheurs partant chez les Infidéles, et U rbain V confirmait en

* L e te x te d e la b u lle R e d e m p to r n oster a été p u b lié p a r K. E u b el, D ie w à h ren d des 14.


Jhdts im M is s io n s g e b ie l d er D o m in ik a n e r un d F ra n zisk a n er e rrich te te n B istüm er, dan s Festsch rift
zu m e lfh u n d e rtja h rig e n J u b ila u m des D eutsch en C am po S a n to in R om , hggb. v. Ehses, F r ib o u r g
en Br., 1897, p. 191-195, et dans K o h le r , D o cu m e n ts relatifs à G u illa u m e Adam, p. 482-489; co m -
m e n té p a r L o e n e r tz , La société, p. 138-141. - D é r o g a tio n s : à F ra n c o n d e P é ro u s e , a p rè s sa
d é m is s io n , p o u r q u 'il p u isse u ser de ses in sign es apud G re cos et infideles ( Fon tes, V II, 2, 72; l er
ju in 1323); à l e v ê q u e d e T iflis , ve n a n t en O c c id e n t (2 ju ille t 1346; id . IX , 73). Cf. aussi Fontes,
X III, 1, n ° 102 k, 108 a, 108 k, 126 i . . . ). - En p rin c ip e , é v è q u e s et a r c h e v ê q u e s re s ta ie n t
a s tre in ts à v is it e r les lim in a , à d es in te r v a lle s é l o i g n é s ; C lé m e n t V I en d is p e n s e 1 a r c h e v ê q u e
G u illa u m e , e n 1343 ( F o n te s , IX , 24).
10 La b u lle R e d e m p to r n o s te r e n v is a g e le ca s oü la r c h e v ê q u e d e K h a n b a liq a u ra it in s titu é
d es é v è q u e s d a n s le r e s s o r t n o u v e lle m e n t a ttr ib u é à S u lta n ieh , et c e lu i o ú la r c h e v ê q u e d e
S u lta n ie h a g ir a it d e m ê m e d a n s le re s s o rt d e K h a n b a liq , en s o u m e tta n t ces é v è q u e s au
m é t r o p o lit a in d e la p r o v in c e o ú ils se tro u v e r a ie n t.
11 A lo r s q u e, d a n s le r e s te d e la c h ré tie n té , seu ls les é v è q u e s et a rc h e v ê q u e s se v o y a ie n t
a u to ris é s à a c c o r d e r d e s in d u lg e n c e s , n e x c é d a n t pas q u a ra n te jo u r s p o u r les p re m ie rs .
12 Fon tes, V II, 2, 129-140 (d r o it d e r e b a p tis e r les b a p tisé s lo r s q u ’il y a va it d o u te su r la
v a lid ité d u b a p tè m e , d e c o n fé r e r d is p e n s e à ce u x q u i é ta ie n t m a rié s à d e s d e g r é s p r o h ib é s ).

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1

174 m PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

1362 tous ces privilèges13. Deux ans plus tard, le 22 septembre 13 ^


même pape, après avoir reçu une nouvelle supplique, procédait à r ex
des privilèges de Jean X X II et apportait un certain nombre de préci$jnen
quant à ceux-ci, qu'il confirmait cependant dans leur en se m ble : il stiPu^n&
que, dans les terres oú il n’y avait pas d'évêque catholique, les Fr 3,1
avaient le pouvoir d a c c o r d e r aux clercs les dispenses que les légats ponttò
caux étaient en droit d'accorder; que ce droit était réservé aux évèques
oú existait un d iocèse14.
Les rapports existant entre la hiérarchie dominicaine de la province de
Sultanieh et la Societas P e re g rin a n tiu m expliquent sans doute pourquoi une
définition du chapitre général de 1349 donne à celle-ci le titre de SocietQs
fra tru m p e re g rin a n tiu m p ro p te r C h ristu m in Perside et Á fric a 1S; mais, conti-
nuant à avoir pour base les couvents de Caffa, Péra et Chio, et les privilèges
conférés aux Frères concem ant les pays d '« A q u i l o n » comm e ceux d’Orient
ou du Midi, il apparait bien que les deux ressorts ne se confondaient pas
même si plus d'un vicaire de la Societas fut appelé à occuper le siège de
S ultan ieh 16. Néanmoins 1’archevêque restait seul à pouvoir décider, avec le
conseil de ses évèques suffragants, de 1 ’organisation diocésaine. II lui appar-
tenait « d'ériger en des lieux rem arquables de sa province des sièges épisco-
p a u x » et de pourvoir ceux-ci « d e v ê q u e s et pasteurs». Les six suffragants
qui lui avaient été donnés, et qui avaient déjà reçu leur consécration, furent
donc répartis par les soins de Francon de Pérouse. Et, en 1330, son succes­
seur Jean de Cori devait se voir attribuer un autre privilège exorbitant:
celui de transférer ses suffragants d'un siège à un autre lorsquils navaient
pas pris possession du premier, en particulier parce q u i l leur était impossi­
ble de 1'occuper - droit théoriquement réservé au Saint-Siège17.

13 Fontes, X I, 5 (22 n o v e m b r e 1362).


14 Fontes, X I, 70-71 : la p lu p a rt des p o in ts m is en d o u te c o n c e m a ie n t la prétention des
re lig ie u x à jo u ir des p r iv ilè g e s en q u e s tio n à C a ffa et à P éra , c e q u U r b a in V écarta. Ces privi-
lé g e s sont r e n o u v e lé s en 1374 (R ip o ll, p. 280).
15 R e ic h e rt, Acta capit. ge n e ra liu m , II, p. 331.
16 F ra n c o n d e P é ro u s e lu i-m é m e ; son s e c o n d s u c c e s s e u r Jean d e Cori, vicaire de la
s o c ié té en 1325, a rc h e v ê q u e en 1329; Jean d e L u n b e llo d e P la isa n ce, d a b o r d vicaire (D. ^
zer, D ie Tabu la p r iv ile g io r u m O P. des F ra n cis cu s P ip in u s , d a n s A F. P., 1940, p. 255), p u is arche-
v é q u e cn 1349.

" Fontes, V II, 2, n » 119. G. F e d a lto (L a chiesa latina, p. 476) ra tta c h e cette décision * |»
n é c e s s a ire re m is e en o r d r e d e la p r o v in c e a lo r s d é s o r g a n is é e . II se peut d ’ailleurs Que
S a in t-S ièg e ait é té a tte n tif à d e s s itu a tio n s c o m m e c e lle d e S m y rn e , d o n t il fa »u t e »
t r a n s fé r e r le s iè g e à T iflis.

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L ARCHIDIOCÈSE DE SULTANIEH 175

Six évêques avaient été désignés en 1318 : deux Français du Midi, Guil­
laume Adam et G érau d Calvet de M o n tpellier18; un Bolonais, Barthelemy
da Poggio; un Siennois, Barthelemy Abagliati; Bernardin de Plaisance et
Bernard Moret. Le choix des sièges qui leur furent attribués est assez révé-
lateur de ce que représentait alors cette province qui, dans 1'esprit du pape
et de ses informateurs, s'étendait sur 1'Anatolie orientale, la Mésopotamie,
la Perse et le Turkestan, 1'Inde et 1'Ethiopie.
L'archevêque, à Sultanieh, restait au contact de la cour mongole, celle
du dernier des Il-Khaniens, Abu-Saíd, auquel Jean X X II devait écrire à deux
reprises, en 1321 et 1322, 1'invitant encore à cette date à em brasser la foi
chrétienne, mais aussi à maintenir son amitié avec le roi de France - car les
perspectives de la croisade étaient alors loin d'être absentes de 1 'esprit du
pap e ’9 Les dispositions d Abu-Said étaient sans doute bienveillantes,
mais sans aucune perspective de conversion20. Et une lettre de 1321 écrite
aux moines arm éniens de Saint-Thaddée, à divers personnages de Tabriz,
de Sultanieh, de Maragha, de Dehikerkan, de Selmas et de Tiflis, fait état
des vexations qu'ils subissaient : parmi eux, un C othulotoga (Qutlugh-togha),
un Argon, un Barac, peuvent représenter certains de ces M ongols christiani-
sés qui auraient, tant bien que mal, maintenu leur foi en dépit de la con ver­
sion forcée des M o n g ols de Perse à 1’Islam 21. II ne semble donc pas que les
espoirs de Jean X X I I dans un développement de 1’apostolat auprès de ces
demiers aient pu aller très loin. Mais 1'archevèque latin, à Sultanieh, re p ré ­
sentait un am b a ssa d e u r permanent du pape auprès du khan de Perse, rôle
non négligeable. Et il pouvait trouver des ouailles dans les m archands
latins, les m ercenaires au Service mongol, et nouer des relations avec les
prélats orientaux. Cependant, il est douteux que Sultanieh ait offert un
champ aussi favorable à I'apostolat que le faisait Khanbaliq.
Quatre des six suffragants de Sultanieh se virent assigner, pour siège,
une des villes situées sur la route de l’Aias à Sultanieh qui était encore, en

" Etudiant en t h é o lo g ie à A v ig n o n (1297) et M o n tp e llie r (1 3 0 2 ): C. D ouais, Acta capit.


Provinc. O. F.P., p. 412 et 470.
19 Fontes, V II, 2, n ° 53 (L e t t r e s à Mussaid, e m p e r e u r des T a rta res et à «Z o p a n B e lig a r
B eg i* - 1'émir C o p a n ) et n ° 58 (à Boyssethan, e m p e r e u r des T a rta res ).
Sur le p r iv ilè g e q u i l a c c o r d a en 1320 aux V én itien s. d on n an t aux « f r a r i L a tin i» le d r o it
con stru ire d es o r a to ir e s d an s les v ille s d e son em p ire , cf. 1 a rtic le d e M as-Latrie, dans Bibl.
£c Charte%, X X X I , 1871, p. 72.
21 Fontes, V II, 2, n ° 52 ( B u li F ra ncisc., V, 452). Q u tlu gh -togh a (q u i d o it ê tr e d iffé r e n t du
Tjço tlu g u s ch ristia n u s H u n n u s c ité p a r B a r-H e b ra e u s au tem p s d e H ü làgü - A ssem ani, B ib lio -
ca onentalis, II, p. 321), A rgu n et B a ra q sont d es n om s m o n g o ls ou turcs.

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176 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AC.E

1318, le chemin normal po ur atteindre la Perse mongole, et oü se trou


vaient à la fois des colonies m archandes latines et des loca dominicain
Sivas, Tabriz, Dehikerkan et M aragh a - on notera que les personnages au
quels Jean X X I I témoignait sa sympathie en 1321 résidaient précisém »
dans ces localités. Ici aussi, les colonies latines assuraient un soutien aux
missionnaires et promettaient ainsi un caractère du rable à leurs établisse
ments.
En ce qui concerne Sivas (Sébaste de Cappadoce), un doute subsiste
sur 1’identité du Bernard, ep iscop u s Sebastensis, transféré à 1’archevéché de
Naxos en 1330, et de Bernardin de Plaisance, suffragant de Sultanieh22. Sj
B e rn ardin fut bien affecté à Sivas, il ne serait pas impossible que les deux
évèques Jacques (n o m m é en 1330) et Jacques de Nicosie, dominicain ch\-
priote n om m é en 1346, aient eux aussi résidé au moins temporairement
dans cette ville23. Toutefois celle-ci, résidence habituelle des «émirs de
R o u m », gouvern eurs m ongols de 1’Anatolie centrale, perdit certainement
de son im portance com m erciale avec la ruine de l’Aias et lorsque les diffi.
cultés qui opposaient les Gênois aux Tchopaniens, successeurs des Il-Kha-
niens, rendirent le séjour de T abriz délicat p o u r les marchands euro-
p é e n s 24.
Les trois autres sièges sont tous trois en Azerbeijan. A Tabriz, Barthé-
lem y Abagliati eut p o u r successeur en 1329, après une vacance plus ou
m oin s longue, G uillaum e de Cigiis, lequel entra en conflit avec les Francis­
cains du couvent local - et du voisinage - lorsque ceux-ci adhérèrent avec
éclat aux doctrines des Spirituels et allèrent j u s q u à refuser de reconnaitre
1’autorité de G u illa u m e ; incidemment, ce conflit perm et de connaitre le
n o m b r e relativement élevé des Prèch eurs et des M in e u rs établis à Tabriz” .

22 L e P. L o e n e r t z (L a société, p. 172) id e n t ifie S é b a s te à Sivas. M a is 1 e v è c h é Sebastensis


est a s tre in t d a n s les liv r e s c a m é r a u x à u ne ta x e d e 58 flo rin s , ta x e d o n t les évêch és mission­
n a ire s s o n t e x e m p té s . O n p e n s e ra it p lu tô t à 1e v ê c h é d e S é b a s te en P a les tin e, lieu de péleri-
n a g e q u i p o u v a it a v o ir d es b ie n s en O c c id e n t et p o u r c e la ê t r e a s tre in t à la taxe. II peut avoir
e x is té d e u x é v ê c h é s h o m o n y m e s , m ais o n d o u t e q u e d e u x e v è q u e s du m è m e nom les aient
d é te n u s en m è m e tem ps.
2’ L e D o m in ic a in a lle m a n d d é s ig n é en 1362 p a ra it a v o ir é té d e s tin é à ètre un Weihbis-
ch o f. Cf. G. F e d a lto , op. cit., p. 485.
24 L. P e te c h , Les m a rch a n d s ita lie n s dans 1'em pire m o n g o l, p. 569; M. B ala rd , Les Gênois en
A sie c e n tra le et en E x trê m e -O rie n t, p. 685-687.
S u r ce c o n flit, q u i fla m b a it en 1332, et q u i n 'é ta it q u e 1’é c h o d e la lu tte en tre Jean XXII
et le m in is t r e g é n é r a l M ic h e l d e C é s è n e , cf. G o lu b o v ic h , III, 424-451 et 291; IV, 378, 381 -388;
L o e n e r t z , La société, p. 156-157, 190-193. II se p r o lo n g e a it so u s C lé m e n t V I, qui o r d o n n a it en
1344 aux fid è le s d e G r a n d e -A r m é n ie et d c P e r s e d e m e t t r e un te r m e aux a g is s e m e n ts des
h é r é t iq u e s ( B u l i F ra n c., V I, 270; F on tes, IX , 42 ) et, e n 1346, o r d o n n a it à la r c h e v ê q u e d e Sulta

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L ARCHID10CÊSE DE SULTANIEH 177

Après 1335, François Cinquini de Pise (qui mourut de la peste dans sa


patrie en 1348), Rostaing Clapier (n o m m é en 1349) et Jean de Rouen (1374­
1383) résidèrent à peu près certainement eux aussi à Tabriz.
Le prem ier évêque de Dehikerkan, G é ra u d Calvet, m ourut à T abriz en
1322; il ne fut rem placé q u e n 1329 par B e rn a rd de G u a rd io la qui se rendit
bien en pays de mission, mais revint ensuite en Avignon, Le successeur de
Bernard, Gautier de la Chapelle, gagna-Ml en 1349 D e h ik erk an ? 26. Rien
n est moins sur car, dans cette ville moins importante, si proche de Tabriz,
le couvent dom inicain avait sans doute cessé d'exister de bon n e heure.
Quant à Maragha, si les Dominicains s'y étaient fixés dès la fin du X I I I e
siècle, cest parce que le catholicos chaldéen Yahballãhà III y avait fixé sa
résidence auprès de 1’11-Khan. Cette résidence perdit de son intérèt qu an d
le khan gagna Sultanieh et quand les Kurdes enlevèrent au catholicos sa
place de süreté d ’Arbèles; Yahballãhà y mourut en 1317, mais ses succes-
seurs regagnèrent Bagdad, oú 1’archevêque de Sultanieh maintenait en co re
un frère en 1400, sans doute com m e résident auprès de ce p ré la t27. M ais
Barthélemy de Poggio - qui ignorait encore en 1328 la langue arménienne,
dans laquelle il devint par la suite un maitre - et ses confrères avaient
opéré un n o m b re appréciable de conversions autour d ’eux, sans doute en
ralliant à la foi rom aine des Chaldéens, peut-être aussi en gagnant à 1’Evan-
gile des Kurdes, des Turcs ou des M ongols non encore islam isés28: Jour-
dain Cathala, qui visita les postes de mission de cette région vers 1328, éva-
lue à cinq ou six cents le n om bre des baptisés de Sultanieh, et à un m illier
ceux de Tabriz; il en compte également environ un millier à M aragha, ce
qui pouvait justifier le maintien d ’une résidence dominicaine avec son évè-

nieh d a g ir c o n tre l'a r c h e v ê q u e d e S éleu cie, Pons, qui avait écrit c o n tre 1’a u to rité d e 1'Eglise
rom aine une Postilla sur 1'évangile d e saint Jean et 1’a vait tradu ite en a rm é n ien ( B u l i Franc.,
VI. 381; Fontes, IX , 83. Cf. G o lu b o v ic h , IV, p. 381). En 1332, le F ranciscain G u illa u m e S au rat
sen était pris à un d o c te u r a rm é n ien qu i sou ten ait l'in fa illib ilité p o n tifica le.
24 Le P. L o e n e r tz nous a sign a lé la p résen ce de B ern a rd à Sis le 6 ja n v ie r 1332 (so n titre,
Diacoregan, est d é fo r m é en A g ro g o re n .). Cf. L oen ertz, La société, p. 160-165. En c e qu i
concerne G au tier. il reçu t ses b u lles le m ê m e jo u r q u e 1'évêque d e T iflis B e rtra n d C o lle t (28
janvier 1349), ce qui parait in d iq u e r q u il en ten d a it p a rtir lui aussi p o u r 1'Orient. Cf.
G. Fedalto, La chiesa latina, p. 484. G erau d C alvet serait m o rt en o d e u r d e sain teté. d a p r è s
Amonin d e Sienne, C h ro n ico n o rd in is F.P., Paris, 1585, p. 183.
2' Der L ibellu s de notitia orbis, éd. K ern , p. 118. Est-ce pa r les év è q u e s d ’A ze rb eija n q u e le
contact était aussi m ain ten u a vec le m ap h rian ja c o b ite , qu i reçu t une le ttre du pape en 1330
(Ripoll. II, 190)?
u Cf. infra. C e s t sans d o u te p o u r a v o ir p rêch é aux M usulm ans qu e le F ran ciscain W il-
lam W arden fut b rü lé pa r les Sarrasins à Selm as en 1342 (M o n u m e n ta franciscana, p. 528).

àcannea oy uam ^canner


178 LA PAPAUTÉ ET LES M I S S IO N S D O R I E N T AU M O Y E N -A G E

que. N ous savons toutefois que Barthélem y acheva sa vie chez les Armé-
niens de Qrnay; ses successeurs ont également pris intérêt aux affaires
arm éniennes et l'on peut se d e m a n d e r dans quelle m esure ils restèrent atia.
chés à M aragh a m ê m e 29.
Les deux autres suffragants désignés en 1318 s'établirent en dehors de
la route déjà citée. B e rn a rd M oret devint évêque de Sébastopolis d'Abkha-
zie (S a v a sto p o li)30, lieu fréquenté depuis longtem ps par les marchands
gênois, c om m e par les missionnaires (d eu x Franciscains y auraient été mas-
sacrés par les Grecs en 1288), et dont le seigneur, un Géorgien, manifestait
son intention de participer à la croisade contre les Turcs. Est-ce la présence
d une résidence dom inicaine entretenue p a r les Gênois, ou la bienveillance
de ce prince, qui décidèrent de la fixation du siège épiscopal dans cette
ville - p ro b a b lem e n t située au nord du mont B a r r a r iu s ? - En tout cas, une
lettre d u successeur du prem ier évêque, adressée aux prélats du royaume
d ’Angleterre (1330) donne une idée de ce pouvait être la vie d u n évêque
dans une cité de la côte caucasienne : assistant, sans p o u v o ir intervenir, à
un trafic d ’esclaves qui arrachait des jeunes gens chrétiens à leur patrie
p o u r les livrer aux M usulm an s (ou à d'autres chrétiens), il vivait dans la
p auvreté et 1'isolement. La bienveillance du seigneur de la ville lui avait
d o n n é une église et un cimetière p o u r sa petite c o m m u n a u té romaine : ceci
lui avait valu 1'hostilité de 1'évêque géorgien du lieu. Grecs, Musulmans,
Juifs avaient à trois reprises détruit 1'église31.
Pierre G éra u d exprimait ainsi ce qu avait de difficile la situation des
m issionn aires latins dans un pays oú la population chrétienne n’était pas
m inoritaire, et oú le roi se montrait bien intentionné. L a présence d'un évê­
que, la possession d'une église dotée des droits paroissiaux, mettaient la
c o m m u n a u té d 'obé d ien c e rom ain e en m arge de la com m un auté domi­
nante; le ralliem ent des Orientaux à 1’unité de la foi et à la primauté
ro m a in e n ’en était pas facilité; et l'hostilité de 1’évêque géo rgien n'a rien de
surprenant.
Pierre G é ra u d eut-il des successeurs résidents? La série épiscopale ne
n ous est connue, après lui, qu'en 1388 et dans les années suivantes, quand

2* M irabilia, p. 40.
w La « S é b a s t o p o lis la g r a n d e » d o n t p a rle le m o in e E p ip h a n e, v e rs 1015, dans sa Vie de
saint André (Patr. Graec., C X X , p. 222, 242); 1’a n tiq u e D io scu ria s, à p r o x im ité de Sukhum i Un
a r c h e v ê q u e a u to c é p h a le g re c y ré sid a it (Patr. Graec., C V II, 332, 393).
11 Cf. L o e n e rtz , La société, p. 131-134, d a p rè s K u n stm a n n , Studien iíber M arino S anud o.
P ie r r e G eraldi é ta it-il un su jet du ro i d 'A n g le te r r e (b r ita n n iq u e ou a q u ita in )?

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L A R C H I D I O C È S E DE SU LT A N IE H 179

Savastopoli était entré d a n s 1em pire g ê n o is de la m er N oire. Mais le lien


organique reliant le siège d Abkhazie à celui de Sultanieh sem ble être reste
fort tén u 32.
Quant au sixième des évèques suffragants de Sultanieh, le fam eux G u il­
laume Adam, c est à Sm yrne q u ’il s'était fixé; et 1’appartenance de cette ville
à 1’empire des Tartares ne peut nous apparaitre que com m e très problém a-
tique. Byzantine en principe, gènoise en fait, la ville pouvait certes posséder
une résidence dom inicaine, c o m m e elle avait une église g ê n o is e 33. Mais, à
nos yeux, c est d u fait de Tintérêt passionné que 1’auteur du De m odo Sara-
cenos extirpandi é prouvait p o u r la croisade et parce q u ’il s etait associé à la
«c ro is a d e » de M artin o Z a c c a r ia 34 que le siège épiscopal latin de Sm yrne
prit naissance - p o u r bien peu de temps du reste, car les Turcs paraissent
s’être em parés de la ville en 1320. II ne restait plus à G uillaum e Adam q u ’à
reprendre le chem in d'Avignon, oú il se trouvait en 13 22 35.
C e st précisém en t à ce m om ent que son confrère Francon de Pérouse
résignait son archevêché, non p o u r rentrer en Occident, mais p o u r conti-
nuer son apostolat « p a r m i les Grecs et les Infidéles». Jean X X I I délia alors
Guillaume A d a m de son lien avec 1'evêché de Smyrne et le transféra sur le
siège de Sultanieh, sans se p ré o c c u p e r de le rem placer à Sm yrne (6 octo b re
1322). M ais le D om in ic ain restait avant tout attaché au m onde égéen et à la
lutte contre les Turcs. II ne rejoignit pas Sultanieh et Jean X X I I le transféra

12 S a v a s to p o li a v a it é té ra tta c h é en 1333 à I e p h é m ê r e a rc h e v ê c h é d e V o sp ro . Les G ê n o is


prirent p o s s es sio n d e la v ille en 1366 (?) et en fu ren t chassés p a r les A b k h a zes en 1455
(A Vigna, Codice d ip lom á tico delle co lo n ie tauro-ligure, I, dans Atti delia società ligure di storia
patria, VI, p. 317). On c o n n a it les é v è q u e s su ivan ts : R o b e rt H yn tle s h a m (1388-1389), Gothus,
auquel s u c cè d e n t B e r th o ld Voli, puis N ic o la s P asseck (1401); Jean, Paul Francisci (1428), Jean.
G eorges d e Regibus (1450). Paul é ta it un F ra n cisca in d e C affa, sans d o u te résid an t. Q uant à
G eorges a p rés la ch u te d e la v ille , il se fit r e c o n n a itre la p ossession d une é g lis e au d io c è s e d e
Turin (H ü n tem a n n , B u li Franc., I, 1372 et II, 291).
31 G. H o fm a n n , L a rciv e sco v a d o di S m im e , dan s Orientalia christiana periódica, I, 1935,

p. 434-466.
34 Cf. De modo, d an s Doe. A rm , II, p. 537-538. N o to n s qu e, le 5 ju ille t 1318, le p ap e c o n fir-
°ia it aussi un é v ê q u e d ’ E p h è s e (L o e n e r tz , Im société, p. 62-63).
15 K o h le r, D ocum . relaL à G. Adam, p. 29-32; L o e n e rtz . La société, p. 72-73. La d a te d e la
chute de S m y rn e re s te d is c u té e : H e y d la d a ta it d e 1300; J. H. M o r d tm a n (Izm ú r, dans E n c y c l
Islam, 1« éd I I 604) la r e p o r t a it à 1320. E n tre 1318 et 1323, le p a tria rc h e g re c de C o n stan t.n o -
Ple tran sférait à C h io le m é t r o p o lit e d e S m y rn e . la v ille é ta n t d ep u is d é jà lo n g te m p s aux
mains des « B a r b a r e s » (M ik lo s ic h et M u lle r, Acta patriarchatus Constantinopolitani, M C C C X V -
W«X 7 / , I, V ie n n e . 1860, p. 92). A p a r tir d e 1345, la c ita d e lle m a ritim e ayan t é té re c o n q u .s e un
^ c h e v ê c h é latin fu t é r ig é à S m y r n e (E u b e l, H ierarchia, I. p. 480). Cf. G. F e d a llo . op. cit., p. 479­
480.

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180 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

à nouveau, cette fois sur le siège archiépiscopal cTAntivari en Dalmatic, en


132436. Et le pap e ne se pré oc c u p a pas de désign er un nouvel archevêque
p o u r Sultanieh.

b ) La n o u v e lle p r o v in c e de S u lta n ie h

Ainsi est-ce seulem ent en 1328-1329 q u e Jean X X I I s intéressa à nou­


v e a u à la provin ce de S u lta n ie h 37, à la fois p o u r la do ter d un nouvel arche­
v ê q u e et p o u r la réorganiser, sur le conseil, p ro b a b le m e n t, du vicaire de la
S o c ie ta s P e re g rin a n tu m , Jean de Cori, et de m issionnaires revenus à Avi-
g n o n d e pays éloignés oú ils avaient o bte n u de be a u x succès dans leur apos-
tolat, T h o m a s M a n c a so la de Plaisance, Jourdain Cathala de Séverac et Jean
de Floren ce.
Jusqu à la p ro m o tio n de Jean de C ori au siège de Sultanieh, la province
en q u e stio n n avait pas fait 1 'objet de décisions particulières du Siège Apos-
tolique, si l'on en excepte la lettre avisant le cath olicos des Arméniens que
1 'arch evêque (a lo rs G u illa u m e A d a m ) était ch arg é de p rê c h e r aux Armé­
n ie n s d e 1’e m p ire de Perse, sans e m p ié te r sur 1o b é d ie n c e que ceux-ci
d e v a ie n t à le u r c a th o lic o s 38.
E n ce qu i c o n c e rn e 1’a rc h ev êch é lui-m êm e, vacant d e p u is 1324, il rece-
vait p o u r titulaire, le 9 aoüt 1329, le vicaire de la S o c ie ta s Peregrina ntium
lu i-m ê m e , Jean de Cori, do nt n ous savons q u i l avait reg a g n é sa province
dès 1333 (il intervint d an s le conflit entre les S piritu els et le vê qu e de
T a b r i z ) 39. O n sait aussi q u e c e s t à lui q u o n attribu e d é s o rm a is le Livre de
Y E s ta t d u g r a n t caan, qu i parait a v o ir été r é d ig é entre 1330 et 1334 à la
d e m a n d e d e Jean X X I I , et fournit u n a p e r ç u d e n s e m b l e de 1etat des mis­

s i o n s 40.

36 G u illa u m e é ta it e n c o re à A v ig n o n le 2 o c t o b r e 1323; il fu t tra n sfé ré à Antivari le 26

o c t o b r e 1324. . . . a A
37 C e s t le 9 m ai 1328 q u ’il é c riv a it au c h a p itre g é n é ra l d es D o m in ica in s pou r demanaer
1 'en voi d e c in q u a n te F rè re s c h e z les G e n tils (R ip o ll, II, 178), c e qu il avait d éjà fait en 1318,
lo rs d e la c r é a tio n d e S u lta n ieh ( id , 143). La b u lle Gratias agintus du l er o c to b re 1329 aux
a r c h e v ê q u e s , é v ê q u e s et F rè re s p a rta n t en m is s io n (id , 184), r e p r e n d les term es de celle u

le r m ai 1 3 1 8 (id , 136). . .
38 Fontes, V II, 2, n ° 71 ( l er ju in 1323). C e s t le m ê m e jo u r q u e le p a p e con ced ait a
d e P é ro u s e le d r o it d 'u s e r d es o r n e m e n ts p o n tific a u x : il est v ra is e m b la b le qu il a ' al
in fo r m e p a r 1'ancien a r c h e v ê q u e d e la s itu a tio n d es A rm é n ie n s d e G ran d e-A rm ém e. ^
39II est tr a ité d an s u n e le ttre d e ille qui dicitur episcopus Soltaniensis (G o lu ovic ,

p. 448-449). . ijjflfújnf.
40 La tr a d u c tio n fra n ç a is e s eu le en est c o n s e r v é e (é d . Jacqu et, dans Jou civezza,
1830, p. 59-71). On en a v a it a ttrib u é la r é d a c tio n à G u illa u m e A d a m (Marcellino a

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LARCH1DIOCÊSE DE SULTANIEH 181

Le successeur de Jean, G u illa u m e 41, attesté en 1343, avait-il été élu par
ses suffragants, c o m m e le prévoyait la bulle R e d e m p to r n o s te r? Nous 1’igno-
rons; mais nous savons que le Siège Apostolique dut à nouveau intervenir
en 1349 : le D om inicain Jean de Leom in ster présenta à Clément VI une sup-
plique 1 inform ant de la disparition de presque tous les missionnaires de la
province, tant du fait de la peste q u au trem en t, et notamment de 1’archevê-
que et de plusieurs évèques - il ne restait plus, dans les quinze résidences
de la province, que trois religieux - et lui faisant part de la dem a n d e des
chrétiens de v o ir en voyer de nouveaux missionnaires. C'est alors que le
pape désigna c o m m e archevêque le vicaire de la Societa s P e re g rin a n tiu m ,
Jean de L u n b e llo , en m êm e temps qu'il donnait des évèques aux sièges de
Tiflis et de D e h ik erk an (9 jan vier 1349)42. Et, en 1368, c'est encore R o m e qui
dut intervenir p o u r transférer sur le siège de Sultanieh 1'archevêque de
Khilat, T h o m a s de T a b r iz 43. Par contre, lo rsq u il apprit la mort de Thom as,
Grégoire X I ch arg e a les évèques de Maragha, Tabriz et Nakhidjevan d elire
son successeur (29 ja n v ier 1375)44.
C ’était là la p r o c é d u r e n o r m a le 45; mais c’est encore une décision du
Siège A p ostoliqu e qui transféra au siège de Sultanieh, le 27 aoüt 1398, l'évê-
que Jean de Nakhidjevan, en 1’autorisant à e m m en er avec lui vingt reli­
gieux. Cet arch evêqu e, le troisième du nom de Jean, était un Italien. II fut

S to n u u iiiv e rs a le d elle m is s io n i francescane, I, R o m e , 1857, p. 65 ); e lle a é té r e n d u e à Jean p a r


M o u le, C h ris tia n s in C hina, p. 249, n. 8.
41 Cf. L o e n e r tz , La société, p. 169
« IbuL, p. 37, 194-197.
43 S u r 1’ id e n t ific a tio n du s iè g e Galadensis, cf. J. R ich a rd , La papauté et les m ission s c a th o li­
ques en O rie n t au M oy en -A ge, d a n s M él. E c o le franç. de R om e, 1941-1946, p. 263-266.
44 C et a r c h e v ê q u e se ra it-il le F ra n ç o is, a rch ie p is co p u s Saltarensis, c ité en 1389 (L o e n e r t z ,
La société, p. 170)? L e s tro is é v è q u e s en q u e s tio n a va ien t é té p o u rv u s d e le u r s iè g e le m ê m e
jo u r (7 a v r il 1374), ta n d is q u 'u n v ic a ir e du m a itre g é n é ra l d es F r è r e s P rê c h e u rs éta it d é s ig n é
p o u r 1'A rm é n ie . L e P. L o e n e r t z a m o n tr é c o m m e n t, à c e tte date, a p rè s a v o ir laissé aux U n i­
teurs a rm é n ie n s le so in d e s m is s io n s d e G ra n d e -A rm é n ie , la P a p a u té et 1 'ordre d o m in ic a in en
re p rire n t le c o n tr o le , en d é ta c h a n t d es F r è r e s P rê c h e u rs a u p rè s d e s c o u v e n ts a rm é n ie n s et
en ren d an t u n e n o u v e lle fo is à la h ié r a r c h ie é p is c o p a le la tin e ses c a d re s c o m p le ts : la restau -
ration d e la S o cie ta s P e re g rin a n tiu m suit d e p rè s (L a S ociété, p. 147, Les m ission s d o m in ica in e s
en O rient, dans A.F.P., II I, 1933, p. 30 et su iv.; La S o cié té des Frères P é ré g rin a n ts de 1374 à 1475,

dans A.F.P., X L V , 1975, p. 107-145).


45 M a is e lle la issa it la C u r ie d a n s 1 'ig n ora n ce : aussi est-ce en ra is o n d e la m o rt d e T h o ­
mas, su rv e n u e au m o in s t r e iz e an s p lu s tôt. q u e C lé m e n t V I I c o n fé r a la r c h e v è c h é à D o m in i-
que M a in fr o y d e R o s iè re s -a u x -S a lin e s , un L o r r a in q u i n e q u itta pas la L o r r a in e (F e d a lto , op.
c *i; p. 477). C e s t a lo r s q u a p p a r a is s e n t d e s é v è q u e s S olta n ien ses q u i fu re n t s e u le m e n t d es
titu laires, c r é é s p a r les p a p e s d e R o m e : cf. Fontes, X I I I , 1. n ° 11, 102g, 108k, 126f et i. 168.

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182 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IE N T AU MOYEN-A(iP.

a m b a ssa d e u r de T a m e rla n a u p rè s de s so u v c ra in s oc c id e n ta u x ct écrivit le


L ib e llu s de n o titia o rb is , en 1404. O n le voit p r e n d r e le titre d a rc h e v ô q u e
« d e tout 1’O r ie n t», et il im ag in a de se faire é g a le m e n t co n fére r, en 1410, |c
titre de K h a n b a liq ; m ais il m o u ru t p e u a p rè s (en 1412) sans avoir rejoint
son d io c è s e : ses successeurs, des A rm é n ie n s-U n is, élus p a r les religieux de
1 ’o r d r e des Uniteurs, n'y p a ru re n t pas non plus, s e t a n t éta blis à C a ffa 46. Le
L ib e llu s de N o titia o r b is ne d o n n e pas d 'in fo r m a tio n s u r ce q u e pouvait être
la c o m m u n a u t é c a th o liq u e de S ultan ieh m êm e, oú Jo u rd a in Cathala avait
con n u c in q à six cents fidèles; il signale se u le m e n t la p ré se n c e d'un Domi­
nicain à B a g d a d oú se trouvaient des cath oliqu es, la b o n n e volonté du
p a tria rc h e syrien d e M o s s o u l en vers 1’Eglise latine, la p r é s e n c e de catholi­
q u e s et de F rè re s P rê c h e u rs dan s le K u r d is t a n 47. Le g o u v e r n e m e n t gênois,
p o u r a p p u y e r sa d e m a n d e de transfert d u siège a r c h ié p is c o p a l à Caffa, en
1431, disait q u e Sultan ieh n'était plus a c ce ssib le a u x c h ré tie n s et habitée
se u le m e n t p a r les in fid è le s 48. Le p a p e n'en m aintint pas m o in s le titre, et le
ressort th éorique, de S u lta n ie h 49.
En m ê m e tem p s q u ’il créait un n ou ve l a rc h e v ê q u e , Jean X X I I désignait
p lu s ie u rs é v ê q u e s p o u r les sièges déjà institués de la p r o v in c e : Guillaume
de C ig iis p o u r T a b riz (21 aoü t 1329); B e r n a r d de G u a r d io la p o u r Dehiker-
kan, P ie rre G e ra ld i p o u r S av a stop oli (11 se p te m b re , 9 aoüt 1329) - tandis
que, le 19 o c t o b r e 1330, B e r n a r d in de Plaisance était tra n sfe re d e Sebaste
(S iv a s ) à N a x o s et r e m p la c é p a r un J a c q u e s - . Le 9 a o ü t 1329, le pap e déci-
dait é g a le m e n t d e r e m p la c e r le siège é p is c o p a l d e S m y rn e , d e v e n u inacces-

46 A. K e m , D er « Libellus de notitia o rb is » Johannes I I I. (de G alonifontibus?) O. P., Erzbis-


chofs von Sulthanyeh, d a n s A.F.P., V I I I, 1938, p. 82-123; S ilv e s t r e d e S a c y , M ém oire sur une cor-
respondance inédite de Tamerlan avec Charles VI, d a n s Mém. Acad. I. et B .-L , V I, 1822, p. 470 et
su iv. (e n v o i d e Johannes m ar hasia Sultaniensis, e n m a i 1403, p a r T a m e r la n au r o i; led it Jean
é ta it v e n u a u p rè s d e 1 e m ir missus ab aliquibus Francis ( il a v a it é t é c h a r g é d e le ttr e s à Venise
et à G ê n e s et e n é ta it r e v e n u a v e c d e s m e s s a g e s ); H. M o r a n v illé , M ém oire sur Tamerlan et sa
cour, d a n s Bibl. Ec. Charles, L V , 1894, p. 433-464. C f. R. L o e n e r t z , Évêques dom inicains des deux
Arménies, d a n s A F.P., 1940, p. 258 e t su iv. J ea n I I I a v is ib le m e n t e s s a y é d e fa ir e r e c o n n a itr e à
s o n s iè g e la p r im a u t é s u r 1’A s ie m o n g o le , y c o m p r is la C h in e , l’ E t h io p ie e t 1'Inde.
47 E d . K e m , p. 1 1 8 : le patriarcha, q u i d icitu r cathelech, e s t-il le m a p h r ia n s y r ie n ?
4* lo r g a , Notices et extraits p o u r servir à 1'histoire des Croisades au X V * siècle, P a ris et Buca-
res t, 1899-1915, I, p. 544. - V. M . F o n ta n a , M onum enta dom inicana, R o m e , 1675, p. 217, m en­
t io n n e a la d a te d e 1347 un A n to in e , a r c h e v ê q u e d e Sultania, o ú se t r o u v a ie n t ja d is vingt-cinq
é g lis e s c h r é t ie n n e s e t o ú il n 'e x is te p lu s q u e q u e lq u e s fid è le s . c o m m e a u te u r d u n traité
c o n t r e T ls la m .

49 C f. L e O u ie n , Oriens christianus, II I, 1 3 7 9 : e n 1524 m e u r t à S e n s un F ra n c isc a in , Jean


d e M e d in a , episcopus Sudensis in Media sub archiepiscopo Soltaniensi.

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rI

L A R C H 1 D I0 C Ê S E D E S U LT A N IE H 183

sible, p a r u n n o u v e l é v ê c h é établi à Tiflis et H’p H a ^ ,


deux autres villes. Sam arkand et Q u i l o n » 8 episcopales

C é t a it là d o n n e r à la provin ee d e Sultanieh toute lextension prévue


p a r la b u lle R e d e m p to r n o s te r d e 1318, qui lui avait attribué. avec 1 'em p ire
des T artares d e Perse. les territoires relevant d e Q a id u et de D u w a , autre-
ment it e an at e Djagatai, et I In de - 1 Ethiopie n'ayant pas en co re reçu
d ' é v ê q u e s - L a t t r i b u t i o n d e la G é orgie, oü se trouvait Tiflis, à la province
de S ultan ieh p a raít assez régulière, si l o n adm et que les g é o grap h es du
temps n avaient pa s u n e c o n c e p tio n très nette de ce qu'était dans la réalité
le m o n s B a r r a r iu s qu i fo rm a it du côté du n ord la limite de la province en
q u e s tio n 51.
Quant à deux autres sièges, qui auraient érigés égalem en t par
Jean X X I I , a u t é m o ig n a g e de Dietrich de Nyem , dont celui dA k h a lz ik h é , il
est très d o u t e u x q u ils aient réellem ent été créés à ce m o m e n t 52; nous
a u ron s 1o c c a s io n de re v c n ir su r ces créations. T ou jou rs est-il q u e les nou-
velles n o m in a t io n s et é re c tio n s de sièges ont fait 1 ’objet d ’un g ra n d n o m b r e
de lettres, r e c o m m a n d a n t les n o u ve au x évèques aux souverains et aux c h ré ­
tiens de le u rs diocèses, et q u il serait surprenant qu e deux évêchés n aient
fait, eux, 1 ’o b je t d a u c u n e de ces lettres.
E n ce q u i c o n c e r n e la G éorgie, oú les Frères Prècheurs avaient lo n g ­
tem ps m a in t e n u un c o u v e n t à Tiflis, des contacts existaient dès le d é b u t du
X I V e siècle (u n d e s F ran ciscain s m artyrisés à Th an a en 1321, q u e les textes
disent tantôt A r m é n i e n et tantôt G éorgien , est a p p elé D em etriu s de Tiflis);
les G é o r g ie n s , très attachés au pélerin a g e des Lieux Saints, se m ontraient
fort zélés p o u r la c ro isa d e , tout en s etonnant de la légèreté avec laqu elle

50 E u b el, D ie w a h re n d .. . ; L o e n e rtz , La s o cié té . . p. 140, 168.


51 L e re s s o rt d e la G é o r g ie suscitait d a ille u r s é g a le m e n t des d ifficu lté s dans 1’E glise grec-
que : le m é t r o p o lit e d ' A l a n i e - e t . S o t e r i o p o l i s (P itzo u n d a ), releva n t de C o n stan tin op le, reven di-
quait e n tre 1347 et 1356 la ju r id ic tio n sur tou t le Caucase; en 1364, il o b ten a it gain d e cause.
Le c a th o lic o s d e G é o r g ie se c o n s id é ra it c ep en d a n t c o m m e releva n t du p a tria rc a l d A n tioch e,
et assistait e ffe c t iv e m e n t en 1365 au s y n o d e qu i élut le p a tria rch e P acôm e. L ’Alanie, c e p e n ­
dant, éta it r e v e n d iq u é e p a r la r c h e v ê q u e d e K h e rs o n , n o u v elle m e n t é le v é au rang d e m etro-
p o lite (M ik lo s ic h et M u lle r, op. cit., I, 258, 356, 463, 475, 477 et II, 67, 541).
51 T an gi, Pttpstllche K a m leia rdn u n gen . p. 30, c ité p a r G. Fedalto, U ch.eso lanna. p 472.
473: la liste des évêchés relevan. de Sultanieh dans ce texte comprend Tabru, Savastopoh.
M aragh a N a k h id je v a n , Arghnens,s. T iflis , S eb a ste e . A kh alzikh e. Si T ifh s y re m p la c e Sm yrn e.
R ÍI4 , n u m n K ije v a ., s r o ( W r I J ;s DOUrra it ê tre D eh ik erk a n (Diacoroganus, Dttaroga-
on serait te n te d e s u p p o s e r qu Argionensis p o u rra n c i . . . . , vv« la u te u r
nus D ia g o rw n u s A irogoren sis. etc.). L e le x le en q u e s tio n est d u d eb u l du X V s iè c le . la u te u r
se di, pTeTe “ nMnformé de la créa.ion de deux sièges ajou.es pos.eneuremem par
Jean X X II , m a is il ne c ite pas ses sou rces.

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184 l a PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU M O Y E N At.F

les rois d ’Occidcnt leur annonçaient leur prochain départ - ci ne partaicnt


ja m a is - .
En 1321. Jean X X II avait chargé deux Franciscains. le vicaire d ’Oricn,
Pierre de Turre, et le custode de Tabriz, Jacques de Cam erino, d une miv
sion en Arménie et en Géorgie : une lettre avait été spécialcment adress**
au roi Georges, à ses barons. p o u r leur a p p o rte r une piotession dc foi cl
leur proposer éventuellement la réunion d un concile général en vue
réaliser 1’union des Eglises54. On ignore quelle suite fut donnée du cote
géorgien à cette proposition. De même, les indications du De locis fratrum
m in o ru m et p re d ica to ru m in Tartaria, signalant l existence d un locurrt fran-
ciscain à Tiflis, dans la «T a rta rie o r ie n t a le » et de deu x autres in ) veria (l’uri
d eux ayant été le théâtre de la conversion du roi de ce pays) relevant de la
«T a rta rie A q u ilo n a ir e », et ceci avant 1318, paraissent faire de 1 « I b é r ie » un
pays distinct de la Géorgie, mais sans d o n n e r d indications precises sur
cette contrée oú Tapostolat des M in e u rs aurait été fr u c t u e u x 5S.
C e s t toutefois un Dominicain, Jean de F lore n ce — missionnaire qui
avait porté en 1318 le p a lliu m à Francon de P é r o u s e - , dont le travail sc
révéla assez fructueux p o u r qu'en app ren an t q u e de n om b reu se s àmes
avaient été gagnées par les Prêcheurs, le p ap e se décidât à 1’élever à 1epis-
copat, en érigeant Tiflis en évêché. Il le munissait de lettres p o u r le roi de
G éorgie, invitant celui-ci à 1’Union, ainsi q u e p o u r d iv e rs princes (Solagay et

51 D o m in i reges F ra n cia e fre q u e n te r reges o rie n ta le s c o m m o v e r u n t c o n tra Sarracenos, postea


n o n v en ien tes eos dirnettebant in trib u la tio n e g u erra e , é v riv a it G e o r g e s V au roi de France en
1332-1333. S ed d icatis s ib i quod, q u a n d o m a re tra n s iv e rit, s ta tim ne v id e b it ad sau m beneplaa-
tu m c u m X X X m ilib u s a rm a to ru m (G o lu b o vic h , III, 415). Les le ttre s d e P h ilip p e V I avaient étc
a p p o rté e s à T iflis par les Franciscains A le x a n d re 1’A n gla is et R ic h a rd M acier. venus du cou­
ven t de Tabriz. Sur la b ra v o u re des G éorgien s, cf. Jourdain , M ir a b ilia , p. 60.
54 Fontes, V II, 2, n° 46 (15 o c to b r e 1321; B u li. F ra n c is c ., V, 441). Cf. in fra , p. 203. Cf. aussi
Tam arati, L e g lis e g é o rg ie n n e des o r ig in e s ju s q u a n o s jo u rs , R o m e , 1910, p. 438-440.
55 G o lu b o vic h , II, 72. La p résen ce d e F ra n cisca in s à T iflis est très p ro b a b le . L 'Yveria est
c o n s id é ré e c o m m e « p r o p r e m o n tes C a s p io s » dans un te x te sign alan t le m e u rtre p a rle s héré-
tiqu es des Fran ciscain s C on rad d e S axe et E tie n n e d e H o n g r ie ( A r c h iv u m fran cisca n u n t histo-
n c u m , II, p. 465-466); il est d iffic ile d e p r é c is e r d a v a n ta ge. P au lin d e V e n is e é crit que ces deux
re lig ieu x p r o fid e ab A la n is in te rfe c ti su n t, ce q u i re n d d o u te u x q u e le lieu du m artyre se situe
à S a v a s to p o li d ’A b k h azie c o m m e 1é c r it L. L e m m e n s , H e id e n m is s io n e n , p. 46-47. Les Francis­
cains au raien t a m en é à la fo i un ro i d e c e pays et fo n d é d e u x r é s id e n c e s in re g n o Yveriae ; ce
« r o y a u m e » peut se lo c a lis e r soit sur la c ô te d e la m e r N o ir e , soit, c o m m e la mention des
Alains p o u rra it le s u ggérer, dans la ré g io n sise au n o rd du C au case, à p ro x im ité du pays des
O ssètes qu i re p ré s e n te n t le ra m ea u m é r id io n a l du p e u p le ala in - le q u e l était établi au
M o y en -A g e d ep u is le C au case ju s q u a u x s te p p e s e n tr e la C a s p ie n n e et la m e r d’Aral-

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L A R C H ID IO C Ê S E DE S ULTANIEH 185

Amir S arkis d e Tiflis, c e u x de C a rp i et d 'A liq u is )5b. Jean de Floren ce aurait


traduit p lu s ie u rs livres d u latin en géorgien, travaillant ainsi à la réduction
des sch ism atiqu e s; m ais il s e m b le aussi qu il se soit intéressé aux A r m é ­
niens de la ré g io n d e N a k h id je v a n et du couvent de Qrnay, avant de m o u r ir
à Péra en 1347S7. II ne fut r e m p la c é qu'en 1349 p a r un autre D om inicain ,
Bertrand Collet, dont, ainsi q u e de ses successeurs, on ign ore s ils résidè-
rent en G é o r g i e - la p lu p a rt e x e rcèren t les fonctions d 'é v êq u e s auxiliaires
dans des d io c è s e s a lle m a n d s (e n 1425, toutefois, c e s t un A rm é n ie n -U n i qui
fut n o m m é à cet é v è c h é ) 58. O n constate m ê m e q u e n 1370, c'est un a rc h e v ê ­
que titulaire d u siège d e S a lo n iq u e qui s etait ren du en G é o rg ie et y rep ar-
tait avec vingt-cin q F ran ciscain s p r o p ro p a g a tio n e c a th o lic e fid e i; il est ten-
tant de r a p p r o c h e r cette m ission (con fiée à un prélat in p a rtib u s, ce qui est
e xception n el) d e c e lle s qui avaient existé avant 1 ’institution des é v ê q u e s
résidant en p a v s de m i s s i o n 59. Tiflis n’en était pas m oin s la ré sid en c e de
religieux fra n c is c a in s et dom in icain s, à la fin du siècle, et il en était de
mêm e p o u r A k h alzik h é, autre cité géorgien n e qui parait a v o ir eu un é vê ch é
d o b é d ie n c e r o m a in e à la fin d u X I V e ou au débu t d u X V e siècle, m ais do n t
on ne con n ait a u c u n titu la ire 60. La question se pose d a i ll e u r s de sa v o ir si
ces relig ie u x s a d r e s s a i e n t a u x seuls G é o rg ie n s ou peut-être d a v a n ta g e a u x

*• B u l i F ra n c is c . é d . E u b e l, V, 828 ( F o n te s , V II, 2, n ° 4 6 ); c e s n o m s so n t en p a r t ie c e u x d e s
d e s tin a ta ire s d e s le t t r e s d e 1321 (c f. aussi Fontes, V II, 2, n° 111 et 115). L 'A m ir S arkis, a p p e lé
M tsserqu is s e ig n e u r d e T iflis , d a n s d e s le ttr e s d e 1329, est-il le p e r s o n n a g e d e c e n o m q u i fu t
le p è r e du v a r t a b e d G r é g o ir e d e T h a te v , n é en 1346 (J. M e c e ria n , H ist. et inst. de 1'Eglise a rm è -
n ie n n e p 291P D a u t r e s le t t r e s s o n t a d r e s s é e s re g i C h o ra tice n s i, re g i Rassiae, a r c h ie p is c o p o
Rassiae il n o u s s e m b le d i f f i c i l e d e n e pas r e c o n n a itr e d a n s ces n o m s c e u x d e s r o is d e C r o a t ie
et de R a s c ie c e q u i la is s e s u p p o s e r q u e J ean d e F lo r e n c e é ta it c h a r g é d e q u e lq u e m is s io n
dans les B a lk a n s a v a n t d e r e g a g n e r la G é o r g ie . L é r e c t i o n d e l e v ê c h é d e T if lis fit l o b j e t d e
deu x le ttr e s c o n s é c u t iv e s <9 a o ü t 1329 e t 6 f é v r i e r 1330); la p r e m iè r e s e u le fa it a llu s io n au
tra n s fc n du s iè g e d e S m y m e à T iflis (c f. T a tn a ra ti, o p a , 442-444) . . . .
” L o e n ertz Lu s o cié té , p. 173 175; M . A. V a n d e n O u d e n n jn . V m te u rs e t d o m tm c m n s
d Arménie, d a n s Oriens christianus, X L II, 1958, p. 110 et suiv.
'• C e e i la is s e r a it-il s u p p o s e r q u e , p a r a llè le m e n t a u n e su c c e s s .o n d e v e q u e s m p a rttb u s
s é jo u m a n t en O c c id e n t , d e s é v ê q u e s a p p a r te n a n t à l o r d r e d e s U n .te u rs se s e r a te n t s u c c é d é

" ° " c ò l L b o l k h ! ’ v ! l 5 5 T(L 'a r c h e v ê q u e e n q u e s tio n , le F ra n c is c a in A m o in e , a v a it é t é e n t r e

" mp: rò ; u “Té/ciTm a Z T m ilZ i m n n e, à Akhalzikhé, en .373


G o lu b o v ic h . II, • C |- t V ] ! aU |0 r is e la S o c ié t é d e s F r è r e s P é r é g n n a n t s à
et 1 390, p o u r le s M in e u r s ,; e n B 8 Z O e n t e n ^ ^ ^ y n a u trc d e n o b le h o m m e

c e v o ir d e u x lo t a , un a v ie n o n e s is c h e O b e d ie n z d e r M e n d ik a n te n o rd e n s , n ° 185). -

D. F ^ a t " ( p ^ T n o t e ) p o s e ' l . q u e s t io n d e l id e n t ific a t io n d e I e v è c h é A c h o icz u ch te n s is , c it é

dans un se u l P r o v in c ia le .

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186 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IE N T AU M O Y E N AGE

Arm éniens61. On peut rem arquer que si les lettres données aux évO
nom m és en 1329 recom m andaient le seul Jean de Florence «a u x c h r é t **
catholiques de la cité et du diocèse de Tiflis», le pape recommandait 1 * ^
que de Dehikerkan aussi aux princes géorgiens, aux chrétiens des mcT*
A lbors et Caspiens; et Guillaume, évêque de Tabriz, était lui aussi reco^
m andé à ces d e r n ie r s : la délimitation du cham p d action de chacun d’
í eux
restait donc v a g u e 62.
L'inclusion du khanat de Djagataí - «1'em pire des Tartares du milieu»
dans la province de Sultanieh avait été décidée en 1318; nous avons vu qUe
cette décision de príncipe n'avait pas em pêché les Franciscains de la pro.
vince de K h an b aliq et des vicairies de Cathay et de Tartarie Aquilonaire de
fo n d e r des évêchés à Urgenj o u à Almaligh, qui se trouvaient sur la route
m enant de Caffa et de la Tana à K h an baliq. Mais, s'il était courant, à partir
d'Urgenj, de g agn er Delhi par G h a zn a 63, il n ’était pas moins normal de sui-
vre, à partir de Tabriz ou de Sultanieh, la route qui, p a r Bukhara et Samar­
kand, rejoignait les passes de la D zoungarie ou de K a c h g a rie 64: la Tran­
soxiane était ainsi en relations suivies avec 1'Azerbeijan, centre de la pro­
vince d e Sultanieh, et il ne faut pas s'étonner de voir les missionnaires
d om in ic ain s fréq u e n te r cette région.
Celle-ci, d ep u is la mort du khan D u w a (1306), était passée successive-
m ent à ses d eu x fils E sen -b u q a et K à p à k (m o rt vers 1326), lesquels avaient
m ainten u 1'attitude traditionnelle de la dynastie gengiskhanide, en matière
religieuse, ce qui ne pouvait q u 1
' être fa v o ra b le aux chrétiens de rite chal­
d éen et sans d oute aussi melkite, qui habitaient dans leurs Etats65. On sou
tenait q u e 1’ancêtre de la dynastie, Cagataí, avait reçu le baptême66. Et

61 C o n ta rin i, d an s Traveis to Tana and Persia d e J. B a r b a r o et A m br. Contarini, trad.


W . T h o m a s e t S. A. R o y e t éd . p a r L o r d S ta n le y o f A ld e r le y , L o n d o n , H a k lu y t Society, 1873,
p. 138, c ite à T iflis , en 1475, d e n o m b r e u x c a th o liq u e s , p a r m i le s q u e ls d es Arméniens.
62 Cf. R ip o ll, II, 183, 188, 189, 190; M o lla t, Jean X X II, n ° 4 7 552 à 47 559, 47 587, etc.
63 Cf. le v o y a g e d e L o r e d a n e t Q u e r in i c ité p a r R. S. L o p e z , Veneiia e le grandi lirtee
dellespansione com m erciale. . . , p. 53 et su iv.; L. P e te c h , Les marchands italiens dans l'emp're
mongol, p. 559.
64 C e s t l ’ itin é r a ir e q u e p a ra is s e n t a v o ir s u iv i le s fr è r e s P o lo et le u r fils et neveu, qui pa*
s è r e n t p a r la G r a n d e - A r m é n ie et T a b riz , te l q u il se la is s e d is c e m e r p a r 1’o r d r e des chapitres
du liv r e d e M a r c o P o lo .
65 D a u v illie r , Les provinces chaldéennes « de 1’e x té r ie u r » . . . , p. 282-284; - Byzantins d k ,e
centrale et d'Extrême-Orient, p. 68-70.
66 C e tte tr a d itio n , r e c u e illie p a r M a r c o P o lo (é d . M o u le -P e llio t , p. 143-146) a été repn*c
d an s son Liber Historiarum p a r J o h a n n e s E le m o s y n a e n 1335 (G o lu b o v ic h . II. l0 7 ): QSalflJ
m a itr e d e la g r a n d e v ille d e Summachra o ü le s c h r é t ie n s s o n t n o m b re u x , se convertit, co

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L ARCHIDIOCÊSE DE SULTANIEH ,8 7

1'adhésion à 1’Islam de d e u x khans, B u r a q (1270) et Talika (1309) n a v a it pas


entamé cette attitude. Le frère d e K ãpàk , Âlgigidai, qui a c cé d a au trô n e en
1327 - il devait d a i l l e u r s n être accepté q u e p a r une partie d u khanat -
parait a v o ir b ie n accueilli la p rédication des Dom inicains, et, se lo n nos
informateurs, e m b r a s s a le ch ristian ism e; il fit bâtir à S a m a r k a n d u n e église
dédiée à saint Jean-Baptiste, et, ap rè s son a v è n e m e n t 67, en v oya au p a p e des
lettres q u e p o rtaien t d e u x D om inicain s, d ont l'un était frè re T h o m a s M a n -
casola.
Ce d e r n ie r n était pas u ne figure sans r e l i e f : issu d ’une d e s plus nota-
bles familles de Plaisance, il était entré dans Tordre des Frères P r è c h e u r s et
fut envoyé d a n s la p r o v in c e de G rè c e ; en 1309, le chapitre g é n é ra l lui infli-
gea une sévère p é n ite n c e parce qu'il s'était reb e llé contre le v icaire de sa
province et s était fait d é s ig n e r lu i-m êm e c o m m e v ic a ir e 68. S an s d o u t e -
1 histoire de 1 O r d r e t é m o ig n e q u e le fait n;étant pas e xcep tion n el — le trans-
féra-t-on à la S o c ie ta s P e r e g r in a n tiu m p o u r se d é b a r r a s s e r d 'u n re lig ie u x
peu docile. En tout cas, il d é p lo y a une g ra n d e activité dont t é m o ig n e 1’éten-
due du territoire s u r le q u e l Jean X X I I devait lui c o n fie r 1'autorité é p i s c o ­
pale l o r s q u i l érigea, le 13 aoüt 1329, S a m a rk a n d en é v ê c h é 69. Le p a p e le
recom m an dait a u x n é o p h y te s des khanats de la H o r d e d 'O r et du Djagatai,
mais aussi a u x Alains, a u x M a lg h a y ti et aux H o n g r o is de G r a n d e - H o n g r i e .
Lh abitat des p r e m ie r s reste imprécis, p u is q u ’ils n o m a d isa ie n t su rto u t
entre la M e r N o i r e et la Caspienne, mais qu e des élém ents d e ce p e u p l e
avaient été e n tra in é s p a r les M o n g o ls loin de leur pays d 'o r ig in e : o n p e u t
néanmoins les lo c a lis e r au n o rd de la m e r C a s p ie n n e 70. P o u r les se c o n d s, il

truit une gra n d e é g lis e S ain t-Jean -B aptiste que les Sarrasins veu len t d é tru ire a p rès sa m o rt.
Sur cette oeuvre, ric h e en in fo rm a tio n s sur 1'Orient, cf. A.-D. V on d en B rin ck en , D er «O rie n s
christianus» in der Chronik des Johannes Elemosyna O.F.M., dans X V III. Deutscher O rientalis-
tentag Vortràge ( Zeitschrift der Deutschen Morgenlandischengesellschaft, s u p p lé m e n t II, 1974),
p. 63-75.
67 Sur c e t a v è n e m e n t, cf. Ib n B atou tah , III, 31, 40-43 : le v o y a g e u r m u su lm an a ffir m e qu e
Kápàk avait é té assassiné p a r son fr è r e D arm aSirin et q u ’À lèigid ài, un « in f id è le » , a v a it é té le
prédécesseur d e ce d e r n ie r ; p a r c o n tre Jourdain, Mirabilia, p. 62, é crit im perium de Dua et
Caydo, quondam de Capac et m odo de Elchigiday. Sur c e tte succession, supra, p. 163, n. 152. Le
pape écrit à ÀJgigidài en le titran t « e m p e r e u r des T artares en K horassan, T u rk esta n et H in-
doustan» (R ip o ll, I, 187; 2 n o v e m b r e 1329), p o u r lui a n n o n ce r 1'envoi d es m is sio n n a ire s et lui
envoyer une p ro fe s s io n d e fo i ( Fontes , V II, 2, n ° 20).
élt R eich ert, Acta capil. gener. O.P., II, p. 42.
69 Thom as fut p o u rv u d e cet é v ê c h é le 21 aoüt.
70 A. D. V o n d en B rin ck en , Die « Nationes christianorum o rien ta liu m *, p. 126-131. U ne c o lo ­
re alaine s e ta it-e lle é ta b lie au K h w â re z m ? Cf. J. D au villier, Byzantins d’Asie centrale et
d Extrfme-Orient, dans Revue des études byzantines, X I, 1953, p. 76.

o u a i m c u L^y w a i i u u a i n ic i
188 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IE N T AU M O Y E N -A G E

a été p ro p o sé de voir en eux des Melkites, c ’est-à-dire des chrétiens de rite


grec - ceux qui avaient eu un catholicos à R om agyris, q u e lq u e part à proxi-
mité de Tachkent ceux q u e 1'historien H ay th o n a p p e lle S o ld a in s et loca-
lise dans le K h w a re z m , et q u o n a su ggéré d ’identifier à de s S ogdien s de rite
byzan tin 71. Quant aux troisièmes, ils n ous ra m è n e n t à cette G rande-H ongrie
q u e les D om in icain s du X I I I e siècle avaient essayé d a t te in d r e . Cette fois, ils
apparaissen t avec b e a u c o u p plus de précision : Jean X X I I écrivit à leur
c h e f J ere ta n n y en le félicitant de sa c o n v e rs io n et en le rem ercian t des let­
tres qu'il lui avait écrites p o u r lui d e m a n d e r un évêqu e, n on sans faire allu-
sion à ce q u e ce prince se rattachait à la fam ille des rois de H o n g r i e 72.
O ú T h o m a s M a n c a s o la avait-il re n c o n tré ces H o n g r o is ? II est évidem­
m ent difficile de tirer parti des d o n n é e s trop im p ré c ise s des missionnaires
d u X I I I e siècle, p o u r a ffir m e r q u e ceux-ci h abitaien t q u e lq u e part à proxi-
m ité de la B a à k irie actuelle, entre O r e n b u r g et U f a 73; il n e s t pas exclu que
les « G r a n d s H o n g r o i s » aient été eux aussi re fo u lé s vers l’est à la suite de
1’in va sion m o n g o le . M a is leu r association aux A la in s 74 n o u s a m è n e à penser
q u e les D o m in ic a in s avaient éte n d u le u r activité a u x ste p p e s situées au
n o r d d e la m e r d'AraI et j u s q u a u x a b o r d s de 1’O u r a l 75. II est d o u t e u x que le
c h e v a u c h e m e n t de s limites dio c é sa in e s entre les sièges d e Samarkand,
d 'U r g e n j o u d e S arai ait p résen té q u e lq u e difficulté, les m issio n n a ire s res-
tant très p e u n o m b r e u x et agissant a u p r è s de g r o u p e s d isp ersé s. Dailleurs,
en r e p a rt a n t p o u r 1'Orient, T h o m a s M a n c a s o la e m m e n a it à la fois des Frè­
re s P r ê c h e u r s et de s F rè re s M in eurs.

71 J. Dauvillier, Byzaniins d ’Asie centrale et d’Extrêm e-Orient, p. 67-69; A. D. Von den Brinc-
ken, op. cit., p. 146-152 (qui rappelle que Golubovich avait identifié levêché Semiscatensis à la
ville de Mesched). - L'identification des S old in i avec les Sogdiens n’a pas été acceptée de
façon unanime: cf. 1274, année charnière, p. 10 1 . Quil sagisse de Melkites (de chrétiens
« impériaux»), le fait est fort possible; mais il est douteux que 1'empereur de Byzance ait été
traité de « sultan », même en pays de langue arabe ou persane.
72 Ripoll, II, 184 (29 septembre 1329). Le texte n'a pratiquement pas été retenu par les
auteurs qui ont traité de la Grande-Hongrie; voir cependant Pelliot, Recherches sur les chré­
tiens d'Asie c e n tra le . .., p. 118, n. 1 .
73 Cf. V. Minorsky, HudUd al- 'Alam (E. W. Gibb Memorial, new series XI), London, 1937,
p. 317-324, qui donne la région d'Ufa comme 1'habitat des Magyars dès le Xe siècle. Cf. aussi
supra, p. 29.
4 A moins que les Alains cités ici ne soient un groupe séparé de la masse de ce p e u p le
75 On noters que les Franciscains du Qipéaq avaient dès 1320 atteint le pays des Baskirs,
et que leurs lettres ne font aucune allusion à la Grande-Hongrie.

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L AR C H ID 10C É SE DE SU LTANIEH 189

L e v ê q u e d e S a m a r k a n d s etait mis en route au printem ps de 1330;


nous savons q u i l p assa à Sarai, puis à la T a n a 76. Mais, à son retour, il ne
retrouva plus son protecteur. Àlgigidai et son frère D uwa-Tem iir, qui lui
aurait succédé, avaient été évincés p ar un de leurs frères, Darmasirin,
lequel prit le n o m d Ala al-D in en em brassan t 1’Islam (vers 1331). Et cette
conversion s a c c o m p a g n a d e la destruction des églises chrétiennes et des
synagogues ju iv e s; nous ig n o ro n s si la nouvelle cathédrale Saint-Jean-
Baptiste eut le m ê m e sort. D a rm a sirin fut d ’ailleurs bientòt élim iné à son
tour (vers 1334) p a r un G e n g isk h a n id e venu de 1’1-li et non acquis à lls la m ,
Buzun, qui a u to risa chrétien s et Juifs à rebâtir leurs te m p le s77; Canksi, qui
remplaça B u z u n re n v e rs é p a r une réaction musulm ane, fut précisém ent le
protecteur de 1 é v ê q u e d A l m a li g h : il y eut sans doute qu elqu es années pen-
dant lesquelles la vie d e la c o m m u n a u té catholique du Turkestan redevint
possible. N o u s savon s seulem en t que 1’évèque de Sam arkand réap p arut le
12 aoüt 1342 à A v i g n o n 78; il disparait ensuite. II n e s t pas exclu q u i l ait rega-
gné 1’O rien t; n o u s a v o n s retro uvé en 1359 la trace du passage à Avignon
d'un episcopu s S eniscatensis d u nom de Jean, qui n est pas con nu d a i l-
leurs79. Q u a n t à la c o m m u n a u té catholique de Sam arkand, survécut-elle
longtemps? C lav ijo a b ie n recontré dans cette ville, en 1405, des chrétiens :
Arméniens, Jacobites, G rec s catholiques. Mais les déportations d ’artisans
réalisées p a r T a m e r la n p o u r p e u p le r sa capitale avaient pu, à cette date,
amener à S a m a r k a n d des élém ents qui n appartenaient pas à la p op u la tion
autochtone. T a n d is q u e les « G r a n d s H o n g r o is » disparaissent de l’h isto ire 80.

76 Sur son départ et les dons que lui fit le pape, cf. G. Fedalto, La chiesa, p. 496; sur son
séjour à la Tana, supra, p. 162.
77 Ibn Batoutah, III, 47. Cf. Barthold, Caghatai, dans Encycl. Islam, l*re éd., I, 883; 2' éd.
(revu par J. A. Boyle), II, p. 3-4.
78 Daprès des lettres d'indulgences collectives du 12 aoüt 1342 (Fedalto, p. 497). Est-ce à
son retour que se répandit le bruit dune persécution déchaínée «en Perse» contre les non-
musulmans, qui aurait couté la vie à un évêque et à seize Franciscains, et que Jean de Winter-
thur enregistre à la date de 1341 (Chronicon, p. 172-173)?
7» Mecklemburgisches Urkundertbuch, XIV, n" 8575 (lettre d indulgence collective, 20 mars
1359). La liste épiscopale donnée par Eubel sous le titre de Semiscaten (Hierarchia, I, 445)
comprend les évèques de Simisso - Paul, Benoit et 1’Arménien Thomas. Une lettre donne en
•343 le nom de frère Henri d’Apolda, episcopus S. Matensis (J. Schultze, Klõster. .. der Stadt
Kassel, p. 295); il sagit en fait dun évêque Lavatensis, qui exerçait les fonctions de Weihbis-
chof au diocèse de Mayence.
•° Narrative of the embassv of Ruy Gonzalez de Clavijo. éd. Cl. R. Markham, London, 1859,
P. 171.

o u a i 11 i c u u y o a i i i ü u a i i n c i
190 L A PAPAUTÉ ET LES M I S S I O N S D O R IE N T AU M O Y E N -A G E

L e x te n sio n à 1'Inde des activités missionnaires, dans le ressort dc S


tanieh, n a v a it égalem ent rien que de très normal. Les Latins du XIII* -
cie, et notam m ent le D om inicain Vasinpace, avaient occasionnellement f r
quenté la péninsule indienne; les côtes de celles-ci, qui produisaient 1°
perles et sur les b o r d s desquelles on récoltait le poivre, étaient depuis des
siècles prises dans un réseau com m ercial qui explique comment des com
m un autés chrétiennes s etaient établies depuis le Gujerat ju s q u à la côte de
C o ro m a n d e l oü se trouvait le tom beau de saint Thomas, célèbre dans toute
la chrétienté - et 1'Eglise chaldéenne avait implanté des métropoles dans
1'Inde elle-m èm e, dans les iles de 1’Insulinde, c om m e à So co tora81. Pour les
Latins, d ’autre part, la route du Cathay passait elle aussi le long des còtes
indiennes, et M ontecorvino, avant M arco Polo, avait séjourné dans la pénin­
sule - d 'o u il s'était e m b a rq u é p o u r la lointaine Chine Les évèques
en vo yés p o u r le se c o n d er en 1307 avaient eux aussi em prunté cette route-
m ais aucu n m issionnaire latin ne sem ble s être installé dans 1’Inde à titre
p erm an ent.
C e s t au c o u rs d'un voyage qui devait les m en er en Chine q u ’un groupe
de cinq m issionnaires - quatre Franciscains, dont un frère lai géorgien, et
un D o m in ic a in - d éb a rq u è ren t à Thãna, dans l’ile de Salsette, au début de
1321, et s'y livrèrent à des travaux apostoliques au près des chrétiens indigè-
nes, p ra tiq u em e n t livrés à eux-m êm es du fait du caractère épisodique de
leurs relations avec le clergé c h a ld é e n 82. Tandis que le Dominicain, Jour-
dain C athala de Séverac, était à Sôfala, ses c o m p ag n o n s se trouvèrent
e n train és d an s une argum entation avec les M u su lm a n s et, ayant blasphémé
c o n tre le Prophète, furent c o n d a m n é s au feu. Le martyre de Thomas de
T o le n tin o et d e ses con frères (avril 1321) eut p o u r conséquence de fixer
1’activité de Jourdain dans l ' « I n d e m in e u r e » oú il se consacra au service
d e s chrétien s indigènes, peut-être aussi à p rê c h e r aux paiens - mais sans
d o u te en s a b s t e n a n t de p rédications p ubliques, lesquelles, sous le régime

*• B. E . Colless, The traders of the pearl; the mercantile and missionary activities of Perstan
and Armenian Christians in South-East Asia, dans Abr Nahrain, IX, 1969-1970, p. 17-38; X, 1970­
1971, p. 102-121; XI, 1971-1972 et XIII, 1972-1973, p. 114-135; J. Dauvillier, Les p rovin ces chal­
d éenn es..., p. 277, 312-315. Cf. aussi E . Tisserant, Eastern Christianity in índia, ad apted by
E . R. Hambye, S.J., London, New York, Toronto, 1957.
H Nous nous permettons de renvoyer ici à nos deux articles, Les navigations des Occt ^
taux sur 1'Océan Indien el la mer Caspienne (X I I e-X V e siècles), dans Sociétés et compagn,e5•
commerce en Orient et dans 1'Océan Indien, (Bibliothèque générale de 1'Ecole Prat,<í<ue^ í;
Hautes-Etudes, VIC section), p. 353-363, et Les missionnaires latins dans 1’Inde au XIV ‘ 51
dans Studi veneziani, XII, 1970, p. 231-242; cf. aussi R. Loenertz, La société, p. 176- 182.

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L 'A R C H ID I O C Ê S E DE S U L T A N IE H 191

oppressif des sultans de Delhi qui venaient de passer à la conquête du Guje-


rat et du Dekkan, étaient p ro b a b le m e n t périlleuses. Au bout de qu elqu es
années, le m issionnaire, qui avait envoyé deux lettres à ses confrères p o u r
essayer d o b t e n i r des renforts, abandonna 1’Inde m ineure pour l in d e
majeure, en se fixant au M ala b ar, dans le royaum e de Quilon. Là, une popu-
lation chrétienne n o m b re u se, riche et encadrée p ar sa p ro p re aristocratie,
labsen ce de la d om in a tion m usulm ane, le passage de m arch ands euro-
péens ou a r m é n ie n s 83 représentaient autant de facteurs favorables à la p r é ­
dication. Jourdain en profita, et revint en Occident en 1328 p o u r obten ir
des en c o u rag e m en ts et recruter des com pagnons; c'est alors q u i l écrivit
ses M ira b ilia qui décrivaient à la fois les merveilles de 1'Inde et les p e r s p e c ­
tives qui s’ou vraien t à la m issio n 84.
D'autres m issio n n aires 1'avaient-ils rejoint? C e s t possible; m ais nous
ne so m m es pas renseignés sur ce point par le récit de voyage du Francis­
cain O d o ric d e P o rd en on e , lequel avait sans doute passé q u elq u es ann ées
en Orient avant de g a g n e r 1’Inde, oú il exhum a les reliques des m artyrs de
Thãna, qu 'il e m p o r t a avec lui en s'em barquant sur 1'Océan Indien et q u i l
déposa d an s 1’église d u couvent franciscain de Zayton, en 1326 : O d o ric les
aurait sans d o u te laissées à Q uilon s’il y avait trouvé un établissem ent de
religieux latins. O d o ric et ses com p agn on s (Jacques d ’Irlande, B e r n a r d et
Michel de V e n ise ), bien que dotés des pouvoirs de légation que le p ap e
accordait aux m issionnaires, ne sem blent pas s etre consacrés à une tâche
m issionnaire définie, et leu r voyage sassim ile à une p eregrin a d o p ro p te r
Christ um plus q u à une entreprise d apostolat85. Mais le récit de ce voy age —
qui s a c h e v a en 1330, a p rès un retou r p a r la route des steppes d ep u is K h a n ­
baliq - attira certain em en t l'intérêt sur 1’Inde plus encore que les lettres et
les M ira b ilia , c e p e n d a n t si riches d e x p é rie n c e missionnaire, de Jourdain de

Séverac.
Jean X X I I d é c id a d elever égalem ent Quilon au rang d évêché, et d e n
p ou rvoir le c o u r a g e u x m issionn aire (9 aoút 1329), q u ’il re c o m m a n d a au sul-

•> J. D a u v illie r, Les A rm éniens en Chine et en Asie centrale au Moyen-Age, d an s Mélanges

Demiéville, p. 3-4 du tiré à part. .


- Ed. C o q u e b e r t d e M o m b r e t. d an s R ecu eil de voyage, e, m ém o,res.V J p. 17-64 (s u r c e t te
td itio n et la r é é d itio n d e C n rd ie r. cf. R. L o e n e rtz , U société. p 77 n. 60). L es M „ a b ,l,a o n t
êté traduits et commentés par Yule (London, Hakluyt Society, .
“ H C o r d ie r Les voyages en O n e n l du b. frère O d o n c de Pardenone, P an s. 1891 (R e c u e il de
vo yat es e, 2 Z cu m en .s k S u r ses c o m p a g n o n s , cf. G o lu b o v ic h , I I L 393-394. L e De Terra
Sancta d O d o r i c est é d it é d an s J. C M . L a u ren t. Peregrinatores medn aevi quatuor. L e ip z ig .

•864, p . 145-158.

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192 LA PAPA UTÉ E T L E S M I S S I O N S D O R I E N T AU M O Y E N AG E

tan de Delhi, aux chrétiens du G ujerat et du K onkan, aux Nascarini et -


d om in u s N a s ca rin o ru m du M a la b a r, aux M olep h a ta n i de la côte de Coro
m a n d e i : 1’In de entière lui était c o n fié e 86.
Sans d o u te Jourdain reprit-il en 1330 la route de son diocèse. Une
église S a in t-G eo rge s des Latins nous est c o n n u e à Q u ilo n par les souvenirs
de voyage d 'u n autre légat pontificai, Jean de M arignolli, qui y séjourna
qu atorze mois, lib é ra le m e n t p en sion n é p a r les princes indigènes en sa qUa.
lité d e légat d u pape, et qu i fit é le v e r u n e croix en so u v e n ir de son passage;
il d é c o r a 1'église de peintures (1346-1347?). Mais, s'il m entionne les reli-
gieu x latins établis à Quilon, M a rig n o lli ne p arle pas de l évêque. Un episco­
pus C olu m ben sis d u n o m de Jacques est cep e n d a n t cité dans les lettres
d ’in d u lg e n c e d o n n é e s à Avignon en 1363-1364: il peut s agir du successeur
de J o u r d a in 87.
O n sait qu'il faut écarter la m ention d 'u n é vêq u e de Dongola, en Nubie,
q u e les anciens auteurs avaient cru re le v e r en 132888. L'attribution à la pro­
vince de Sultan ieh du ressort de 1'Ethiopie, qui se justifiait p a r le fait que ce
d e r n ie r pays n'était accessible aux Latins qu e p a r m e r et au départ de
1'Inde, ne parait pas en effet s'être traduite p a r des relations effectives89.
V a sin p a ce , peut-être; G u illa u m e A d a m et R a y m o n d Etienne, certainement,
a u x e n v iro n s de 1313, ont pu se re n d re en Ethiopie. Montecorvino, auquel
le p a p e avait d o n n é des lettres p o u r 1’e m p e r e u r de ce pays et pour son
a rch e v êq u e , les a peut-être fait p arv en ir à leu r destinataire; il fait état de ce
q u 'il a été invité p a r les Ethiopiens à a lle r d an s leu r pays - était-ce quand il
séjourn ait dan s 1'Inde plutôt q u a K h a n b a l i q ? - . J ou rd ain d e Séverac enten-
dait lui aussi p asse r en Afrique, et reçut des lettres de recommandation
p o u r T e m p e r e u r d ’Ethiopie. M ais il n ’a pas été p o s sib le de trouver trace
d 'u n étab lissem en t de religieux latins, au X I V e siècle, dan s ce dernier pays.
Passé 1329, de n ouvelles créations de sièges intervinrent-elles dans la
p ro v in c e d e Sultanieh? D ietrich d e N yem , au tem ps d u G ran d Schisme,
insòrait d an s son P ro v in c ia le les n o m s des évêchés d ’Akhalzikhé, de Nakhid-

86 A. M e r c a t i, M on u m en ta vaticana veterem d iocesim C o lu m b e n s e m .. . respicien 1 >


R o m e , 1923.
87 N o s M issionnaires latins dans 1’lnde, p. 238. .
88 L e Q u ien , O riens chr., III, 1413 ( episcopus D ancalae). Cf. M . A. V an d en Ouderijn,
que d o m in ica in fr. Barthélemy, fond ateur supposé d u n co u v e n t dans le Tigré au XFV‘ siècle, *
Rassegna di studi etiopici, V, 1946, p. 7-16. . n
8V N o u s n o u s p e r m e tto n s d e r e n v o y e r à n o tr e a r tic le , Les prem iers missionnaires
E th io p ie ( X I I €- X lV e siècles) d an s Atti dei con ve gn o in ternazionale d i studi etiopici (Ro>^a
R o m a , 1960, p. 323-329 (A c c a d . d e i L in c e i, P r o b le m i a ttu a li d i s c ie n za e d i cultura, Qua
n ° 48).

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L A R C H I D I O C È S E DE SU LT A N IE H 193

jevan et d 'A rg io n e n s is c o m m e suffragan ts d u siège de Sultanieh. D u p r e ­


mier, nous 1’avon s vu, n ou s ne savon s r i e n 90. D u dernier, n o u s s o m m e s ten-
tés de pen se r q u e le v o c a b le a été d é f o r m é : on p o u rrait r a p p r o c h e r ce m ot
du titre que portent d e u x évèques, O d d o in u s , A rz e n o m e n s is e p is co p u s , trans-
féré à Chio en 1343, et un A r z o lo n ie n s is e p is c o p u s qui, c o n jo in te m e n t avec
1’arch evêqu e de Sultanieh, était c h a rg é de ré g le r un d iffé re n d re la tif à l’évê-
ché de la Tana, en 137091. M a is ce nom, qui é v o q u e celui d 'E r z e r u m (A rs e -
ron), serait celui d 'u n siège a rm é n ie n qui avait ses titulaires, et O d d o in u s
n etait c e rta in e m e n t pas un Arm énien . Le p r o b lè m e reste d o n c e n t ie r 92.
Quant à N a k h id je v a n , il s a g it p re s q u e c ertain em en t ici d u n é v ê c h é
arm énien à 1’o r i g i n e : c'est un Arm énien, T h o m a s de ía h o u k , q u T n n o c e n t V I
en p o urvu t en 1356 - le siège étant vacant p ar la m ort d ’un Jean m a is en
le con sidéran t c o m m e su ffragan t de S u lta n ie h 93. A son successeur, Jean,
désigné en 1374 et tra n sfé ré en 1377 à C a f f a 94, G r é g o ir e X I d o n n a p o u r rem -
plaçant un D o m in ic a in français, Jean de G aillefontaine. Et, q u a n d B o n i ­
face I X tra n sfé ra à Sultan ieh le successeur de ce d e r n ie r - un Jean
e n c o re 95 - il le r e m p la ç a p a r divers personnages, à peu prè s tous é tr a n g e r s
à 1'Orient 96 m ais do n t l'un parait a v o ir rejoint son siè g e 97. Tout ceci é v o q u e

90 S u p ra , p. 183 e t 185.
91 E u b e l, H ie ra rc h ia , I, p. 185; F ontes, X I, 195. D ans la lis te d e s é v è q u e s d 'A r g o s ( A r g o li-
cen. : H ie ra rch ia , p. 106), E u b e l a fa it fig u r e r le D o m in ic a in C o n r a d F la d e r , p o u r v u d e c e s iè g e
á la m o r t d ’un Jean, p a r B o n ifa c e IX , le 29 n o v e m b r e 1395. E n fait, c 'e s t c o m m e é v ê q u e A r g io ­
nensis q u 'il fu t d é s ig n é , e t il est c o n n u , c o m m e s u ffra g a n t d e S tra s b o u rg , so u s le t it r e d 'A r g io -
rensis e p is co p u s ( N o u v e lle s aeuvres in éd ites de G ra n d id ie r, II I, A lsatia sacra, I, éd . I n g o ld , C o l­
mar, 1899, p. 17 et su iv.). S a n s d o u t e est-ce en se s e rv a n t d e la lis te r e p r is e p a r D ie t r ic h d e
N y em q u e le s iè g e a v a it é t é p o u r v u , p a r les p a p e s d e R o m e , d é v è q u e s titu la ir e s .
n R a p p e lo n s q u e n o u s a v o n s e n v is a g é (su p ra , p. 183) qu A rg io n e n s is a it pu ê t r e u n e c a c o -
g ra p h ie p o u r D ia g o rg a n e n s is .
91 Fontes, X , p. 133 (12 a v r il 1356). M a r tin V m a in tin t c e tte d é p e n d a n c e en 1419.
94 Fontes, X I I , 2 1 8 : le n o u v e l é v ê q u e d e C a ffa d e v a it p r ê t e r s e r m e n t e n t r e les m a in s d e
l a rc h e v ê q u e d e S a in t-T h a d d é e . d e s é v è q u e s d e N a k h id je v a n et d e T a b r iz .
w D o n t le P. L o e n e r t z a d é m o n t r é q u ’il é ta it d is tin c t d e Jean d e G a ille fo n t a in e ( É v è q u e s
d o m in ica in s des d e u x A rm é n ie s , p. 258-268).
H E tie n n e P ie r r e d e S e c z h e w , O.F.M ., p o u r v u le 20 o c t o b r e 1400 (F o n te s , X I I I , I, n° 95),
resida sans d o u t e e n H o n g r ie (il e n re ç u t la u t o r is a t io n en 1418: E u b e l, B u l i F ra n c is c ., V I I ,
1983). Et u n e b u lle d e 1401 a u t o r is é I e v ê q u e d e N a k h id je v a n à r é s id e r h o r s d e s o n d io c è s e ,
que d é tic n n e n t le s I n fid è le s (F o n te s , X I I I , 1, 108a).
91 U ne n o m in a t io n à 1'hA pital d e P é r a es t c o n fié e le 11 a o ü t 1403 a u x a r c h e v ê q u e s d e
G^nes, d e M y t ilè n e (M e c h ilin e n s is , q u e 1’é d it e u r d e s Fontes, X I I I . 1, 131 p r o p o s é d ’id e n t i f i e r à
M a lin e * q u i n e fu t é r ig é e n a r c h e v è c h é q u 'a u X V I * s iè c le ) e t à 1 'év èq u e N a ch v a n e n s is . C e lu i-c i
*la it-il le D o m in ic a in L o u i » G o m e z , d o n n é e n 1403 c o m m e s u c c e s s e u r à F r a n ç o is d e T a b r iz ,
que la b u lle d e 1400 c o n s id é r a it c o m m e r é s ig n a t a ir e (F o n te s , X I I I , I, I 2 6 h )?

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194 LA PAPAUTÉ ET LE S M I S S IO N S D O R I E N T AU M O Y E N - A G E

une série épiscopale latine, relevant de Sultanieh - encore qu'au temps dc


Martin V on découvre que des évêques arm éniens, de 1'ordre des Uniteurs,
ont pris possession de cet évêché La question de savoir si ce siège aurait
été créé par décision du pape ou de 1'archevêque, p o u r des évêques latins,
ne nous parait pas c o m p orter de réponse a ff ir m a t iv e : à nos yeux, c’est en
1356 que le pape, voulant p o u rv o ir T h om as d 'un siège épiscopal situé en
Grande-Arménie, se com porta c o m m e s'il s'agissait d'un siège latin98.
S'il ne se décida pas à ériger des sièges épiscopaux, en dépit des pou­
voirs à lui conférés p ar la bulle R ed e m p tor noster - il est vrai que ces pou­
voirs devaient paraitre exorbitants à des canonistes habitués à voir la
Papauté décider de telles créations, et en ce sens les bulles de Clément V et
de Jean X X I I étaient allées très l o i n - , 1’arch ev êq u e de Sultanieh navait
sans doute pas hésité à p ou rv oir les sièges vacants, ou à con firm er des élec-
tions. A Maragha, lorsque m ourut B arth élem y da Poggio (1333), un Guy de
Cortona fut pourvu de 1’évêché : Avignon 1'ignorait si bien que, Iorsquon
institua le 7 avril 1374 un nouvel évêque de M aragha, c e s t le nom de Bar­
thélemy qu'on donna au prélat d é c é d é " . N o u s aurions là un de ces évêques
- il nous a semblé en rencontrer d ’autres - qui avaient été choisis et consa-
crés dans la province sans intervention du Siège Apostolique, com m e 1’avait
prévu Jean X X II.
II se peut que le controle du Maitre général des Frères Prêcheurs et de
la Societas Peregrinantium , tel que 1’avait prévu la bulle R edem ptor noster,
ait été atténué par Jean X X I I lui-même : Jean de Cori obtint en 1330 le pri­
vilège d etre éventuellement relevé d e x c o m m u n ic a tio n o u d'interdit par
1 un de ses suffragants, et d ’agir de m êm e à leur e n d r o it 100. M ais la province
resta 1'apanage des Dominicains qui pourvurent pratiquement, pendant
tout le X I V e siècle, à tous les sièges épiscopaux. C ep end an t la collaboration
des deux ordres — com prom ise en 1332-1333 p ar le conflit survenu à Tabriz
entre les Franciscains du couvent local ( q u i l fallut finalement disperser) et
le v ê q u e dominicain, contre lequel ils prêchaient dans 1unique église de la

S u r c e tte liste é p is c o p a le , cf. M.-A. V a n d e n O u d e n r ijn , B is h o p s a n d a rc h b is h o p s o f Naxi-


van d a n s AFP, V I, 1936, p. 161-216.

99 P r o v is io n de G u illa u m e , évêqu e de M a ragh a ; cf. R. L o e n e r t z . La société, p 163:


G. F e d a lto , op. cit., p. 484. S ans d o u t e e s t-c e G u illa u m e q u e c o n c e r n e la le t t r e d e G ré g o ire XI
a ses v e n e ra b ilib u s fra trib u s M a rra g h a e n s i e t N a c c h o a n e n s i e p is c o p is c e te ris q u e fra trib u s O.P■ ad
p a rte s A rm e n ia e m a jo ris p r o p te r C h ris tu m p e r e g r in a n tib u s , d u 13 f é v r i e r 1375 ( A rch iv u m fra­
tr u m praed., III, 49).

IW G . M o lla t, Reg. de Jean X X I I , n ‘ 4 8 2 1 5 . L a r c h e v è q u e r e c e v a it a u ssi le d r o it d e régulari-


s e r les e n tr é e s en p r é la t u r e ir r é g u liè r e s (n ° 4 8 5 1 5 ) .

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L A R C H I D I O C È S E D E S ULT A NIEH 195

ville fut effective . non seulement Jourdain de Séverac s’était associé à


Thomas de Tolentino et à ses confrères, mais ce sont à la fois des Prêcheurs
et des M in eurs que Jean X X I I voulait, en 1329-1330, envoyer en Géorgie,
dans 1Inde ou au Turkestan. Et les couvents et loca franciscains de la vicai­
rie d Orient c om p re n a ie n t encore en 1373, dans le ressort de la custodie de
Tabriz, quatre « l i e u x » : Tabriz, Erzerum, Tiflis et Akhalzikhé, sans com p ter
ceux de la côte p on tique; cinquante ans plus tôt, il avait existé un couvent à
Sultanieh; et il en a p resqu e certainement existé un dans 1'Inde au temps de
M arign olli101.
Ce que n avait pas prévu Jean X X II, ce sont les développem ents de
1’Union arm énienne. N o u s verrons que, dès les premières années de 1’arche-
vêché de Sultanieh, 1’archevèque arménien de Saint-Thaddée (M a k u ) eut
son rôle à jo u e r dans la vie de la province. Celle-ci tendit bien vite à asso-
cier étroitement les uns aux autres Latins et Arméniens, ce qui lui d on n a
une c o u le u r très particulière. Les missions de 1'Inde, du Turkestan et peut-
être m èm e de G é o rgie apparaissent ainsi com m e plus tournées vers la
conversion des infidèles, celles d'Azerbeijan et de Grande-Arménie, vers la
réalisation de 1’U nion des E g lise s102.

II - L ’U N I O N A R M É N I E N N E ET SES V IC IS S IT U D E S :
U N I O N D E SIS ET U N I O N DE Q R N A Y

L etablissem ent en Perse d u n e hiérarchie catholique de rite latin allait


avoir sur l'U n io n des Eglises des conséquences inattendues. N on point que,
du côté des C h a ld ée n s ou des Syriens, les choses aient é v o l u é : c o m m e au
X IIIe siècle, les Latins se ffo rce n t den treten ir de bons rapports avec les
chefs de ces Eglises, et surtout des S y rien s,(b - on est moins renseigné en
ce qui con cern e les successeurs de Yahballãhà III tandis que les efforts
des religieux p o u r extirper les erreurs qu ils relevaient dans la foi des ouail-
les de ces prélats, aboutissant ici ou là à faire passer des Nestoriens ou des

101 G o lu b o v ic h , V, 193; II, p. 265. t


10-2 Un a r c h e v ê q u e p a ra it a v o ir eu une v is io n très vaste du ro le qu il etait appele a jo u e r,
bien au -dela d e . h o rix o n s a r m é n ie n » o u persans : c est Jean III. 1au teu r du U M t u s de nom ,a
o,bis. „ d é lir e u x d e r é a lis e r 1'unité d es te rrito ir e s d e m ission sous la cro sse de I .a r c h e v ê q u e

“ * Jean X X I I é c r it au m a p h ria n syrien (1329 : Fontes. V II. 2. 115); Jean I I I d e S u ltan ieh dit
les b on n es d is p o s itio n s du p a tria rc h e syrien d e M ossoul, etc.

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196 l a paPAUTÊ ET LES M IS SIONS D O R IE N T AU M O Y E N -A G E

Jacobites dans 1’Eglise latine, suscitaient des fric tio n s "” . M ais c e s t du cóté
des Arm éniens que la situation se trou va en tièrem en t m odifiée.
Jusqu au début du X I V C siècle, en effet, les efforts de la Papauté p0Ur
réaliser 1’union des Eglises latine et a rm é n ie n n e se taie n t tournés vers |e
royaum e d'Arménie, oú la dynastie roup én ien n e, puis la dynastie héthou-
mienne, restaient vaille qu e vaille fidèles aux a c c o rd s de 1199. Dans le
dom ain e ecclésiastique, le parten aire avec lequ el se nouaient les conversa-
tions était le catholicos qui, d ’Ani, son siège primitif, s était transféré à
H rom gla, puis à Sis, liant ainsi son destin à celui d u ro y a u m e arménien.
M ais R om e n'avait pas cherché à réaliser 1'union plus en profondeur, bien
que discernant chez ses interlocuteurs des réticences qu i venaient en fait
de ce qu e le royaum e de Petite Arm énie ne représentait, en Cilicie et dans
le Taurus, q u ’une fraction - la seule restée in d é p e n d a n te - de tout un
m o n d e arménien.
D ans la haute vallée de 1'Euphrate et de ses affluents, com m e dans
celle de 1'Araxe, sur les plateaux des lacs de V a n et d 'O u rm ia , sur la côte
pontique, quelle que fut la dom ination qui s'exerçait - g ou vern eurs mon­
gols, ém irs turcs, seigneurs géorgiens ou a rm é n ien s la G ra n d e Arménie
rassem blait la masse la plus n o m b re u se du p e u p le arm én ien , et surtout un
n o m b r e im portant de couvents et de sanctuaires o ü se maintenait la tradi-
tion dont les vartabed étaient les dépositaires, et q u ’ils n enten daien t pas
soum ettre aux concessions que les nécessités politiqu es ou les conversa-
tions avec les religieux latins incitaient les rois, les cath olicos ou les barons
de Cilicie à accepter. Et leur influence se faisait sentir aussi bien en Petite-
Arm én ie qu e dans la diaspora arm énienne, q u e celle-ci se fut dirigée vers la
Palestine ou vers la Crim ée et le Qipcaq, ou en co re vers l'Asie centrale.
Le fait nouveau allait être la prise de contact directe des Latins d'Azer-
beijan avec les m onastères de G ra n d e -A rm é n ie : de ce fait, le problèm e de

lw ^ n 1326, Jean X X I I in v ite le p a tria r c h e d e J é ru s a le m à e x t ir p e r les e r r e u r s que profes­


s e m d e s N e s to r ie n s et d es J a co b ite s du r o y a u m e d e C h y p r e ( F o n te s , V II, 2, 89). L e biographe
d e saint P ie r r e T h o m a s fa it a llu s io n aux e x h o r ta tio n s q u e c e d e r n ie r , a lo r s léga t pontificai
d an s ce ro y a u m e, y p r o d ig u a aux p r ê tr e s grecs, n e s to rie n s , a r m é n ie n s et autres, en laissanl
s u p p o s e r q u e ceu x-ci les a v a ie n t r e ç u e s a v e c re c o n n a is s a n c e , c e d o n t n ou s ne som m es pas
très sürs en ce q u i c o n c e r n e les p r e m ie r s ( T h e life o f s a in t P e te r T h o m a s by P h ilip p e de Mèiiè-
res, éd. J o a ch im S m et, R o m e 1954, p. 93-94, dans T e x tu s et stu d ia h is tó r ic a carm elitana, II)
T o u te fo is , la c o e x is te n c e d es rite s sou s le r é g im e d e 1'Union p a ra it a v o ir é té à peu près réali­
sée dans c e p ays . cf., to u jo u rs aux a p p r o c h e s d e 1360, le r é c it d e s p r o c e s s io n s organ isées par
le lég a t et la liste d e ceu x q u i y p a r tic ip e n t ( ibicL, p. 100) et la p r é s e n c e d e s ch e fs des c o m m u ­
n au tés o r ie n ta le s aux s y n o d e s p r o v in c ia u x , a tte s té e p a r les C o n s titu tio n e s N icosienses (Mansi,
X X V I, co l. 311-392).

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197
L ARCHIDIOCÊSE DE SULTANIEH

IHjnion, tout en restant posé aux rois et aux catholicoi de Sis, allait être é ga­
l e m e n t soulevé en Grande-Arménie. Creusé plus profondément, sans doute,
il n'en fut pas rendu moins complexe; dau tan t que, dans la d ia s p o ra a r m é ­
n i e n n e , il faut tenir com pte de celle qui s etait dirigée vers ITtalie, et qui

allait vivre de ce fait en pays latin.


Les Arméniens d lt a lie apparaissent dès 1254, lorsque le pape accorda
sa protection à 1'hôpital Saint-Jean des Arméniens de R im in i105. Mais c e s t
avec 1ecroulement des états latins d'Orient que les réfugiés semblent être
arrivés plus n o m b re u x : le 6 janvier 1301, Boniface VIII donnait à 1'archevê-
que des Arméniens de Jérusalem, Basile, qui fréquentait la Curie depuis
1295, 1'administration d u n couvent au royaume de S ic ile 106. Clément V, a
son tour, eut à se préoccu per des moines venus d Arménie : les religieux
arméniens de la Montagne Noire, de 1'ordre de saint Basile, reçurent en
1307 1'autorisation de construire à Gênes une église, Saint-Barthélemy, qui
fut enrichie d 'in d u lg e n c e sl07. Et les d o m u s A r m e n o r u m de M o n ta n e a N ig r a
ord in is S a n c ti B a s ilii se m ultiplient: en 1308, à Padoue, Clément V autorise
le frère David à bàtir une église, avec son cimetière oü pourront se faire
ensevelir les religieux, leurs familiers, et les pélerins a rm é n ie n s108; concé-
dant des indulgences à Saint-Mathieu de la Porta Sant Angelo de Pérouse, il
précise que les moines arméniens qui y vivent se sont enfuis devant les
ennemis de la foi chrétien ne109. Puis les «Arm éniens de la M ontagne N o i r e »
prennent le nom de «P a u v re s frères arméniens de 1'ordre de Saint-Basile » :
on les trouve à Parme, à Pise, à Ancône, à Orvieto, à Florence, à Rimini, à
Bologne (prieuré du Saint-Esprit), à Naples, à Salerne, etc.110.
A 1’archevêque Basile succèdent dautres prélats arméniens, égalem ent
réfugiés en Occident. L un d eux, Arakiel (A p o s to lu s ') , titulaire du siège

105 L es A rm é n ie n s d e R im in i b é n é fic ie n t d u ne a u tre b u lle en 1291 ( F o n te s , V, 2. n ° 114).


Sur 1’h is to ire d e s r e lig ie u x a r m é n ie n s d 'Ita lie , cf. M A . Van d e n O u d e n rijn , L in g u a e h a ic a n a e
scriptores O.P. c o n g re g a tio m s F ra tru m ü m to r u m et F ra tru m A r m e n o r u m o r d in is s a n c ti B a s ili
cura m are c o n s is te n tiu m , B e r n e . 1960, p. 245-295.
I0* Fontes, V, 2, n ° 131 (c f. aussi V II, 1, n ° 3 - R egestu m Ciem . V, I, 327 : il é ta it m o r t a v a n t
í 306). Son sceau : S ig illo g r a p h ie de l O r ie n t latin , p. 86-87.
,#7 Par C lé m e n t V : R egestu m , II, 1663, IV, 4264 (Fontes, V II, I, 13, 16, 3 5 ); p a r Jean X X I I

(Fontes. V II, 2, n ° 5 et 13) etc.


,0" Reg. Ciem . V., II. 2763-2764.
Iw Id , IV, 4309 (23 ju in 1309). II s a g it d o n c d e m o in e s ayant fui les c o u v e n ts d e la M o n t a ­
gne N o ire. sans d o u te lo r s d e lin v a s io n d e s M a m e lü k s en C ilic ie e t d e la p r is e d e H r o m g la .
110 Un F r e r e C a rapet d e m a n d e en 1346 à c o n s tr u ir e u n e c h a p e lle p o u r les A r m é n ie n s à

Ayignon ( F on tes, IX , 91).

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1

LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O R IENT AU MOYEN-AGE

archiépiscopal de N ic o p o lis 111, se trouve à Avignon dès le 25 avril 1331 ct sc


fait con céder en comm ende, en 1334, un prieuré basilien d ’ltalie. Mais en
1340, Benoit X II s’inquiète des agissements de cet archevêque, qui se pcr
met d o r d o n n e r des prêtres latins, dans le diocèse de Naples, «b ie n qu’i|
n a it pas été baptisé lui-même selon la form e de 1 'E g lise »112. Mais trois
autres évèques arm éniens avaient déjà fait lo b je t de poursuites, en 1338
c était Pierre, « s e disant archevêque de Jérusalem et N azareth», qui vivait
dans la région de Padoue; Ezechiel, autre Arménien, se donnant pour son
vicaire et vivant près de Florence; Athanase, ep iscop u s V eriensis, sans doute
arm énien lui aussi, et agissant dans la région de R o m e " 3.
Deux autres prélats, résidant ceux-là auprès de la Curie, Nersès de
M alazgerd et Jean David, archevêque d ’Edesse, se font con fier par le mème
B en oit X I I 1administration de prieurés arm éniens d lta lie , et Clément VI
n o m m e un prieur p o u r celui de Bologne, à leur r e c o m m a n d a t io n m .
Dès lors se dessine une organisation : lorsque le p rie u r des Arméniens
de Sienne, Thoros, part pour Chypre, un « prieur général des Arméniens en
Italie», D om iniqu e de N o rd ra ch , lui donne un successeur. Ce qui suscite les
protestations des religieux que Clément V I accepte (1348) " 5. Mais, en 1355,
la création d u n prieur général est dem andée à Innocent VI par les prieurs
de Genes, Rome, Milan, Salerne, Ancône, Bologne, Padoue, Sienne, Pérouse,
R im im et V e n is e 116; le pape exauce leur dem an de (30 juin 1356), mais en
exigeant que le prem ier prieur général soit pris dans 1’o r d r e dominicain et
que, désormais, les «A rm é n ie n s deçà la m e r » suivent la règle de saint
Augustin et les constitutions des Frères Prêcheurs : autrem ent dit, les Basi-

V ille d e la P r e m iè r e A rm é n ie, d o n t les ru in es o n t é té r e t r o u v é e s à Purk, près d Ende-


res, en\ iro n 150 km au N ord -O u est d E rzincan.

/ ví/T toVr ! ' 45°am


êmCl6ttrefigUreparerreurà,adatedu11mars ,321'dansFon-
1 aóii sd f l aUtSS’ ? r/, ,a ,re ^ S a in t G e o rè es de H aguena u, éd . H anau er. Strasbourg.
1898. p. 5 4 A la m o rt d A rak.el, le siè g e d e N ic o p o lis est a ttrib u é à d es é v è q u e s latins non-rési-
d e n n e ls .F e d a lt o . U chiesa latina, p. 493. Le c o lo p h o n d u n lib e rc u lu s de a rticu lis fidei et de V II

tra UU T a rm ? n ,en P a r T h a d d é e d e C affa, n ou s a p p re n d que ce livre


i a a ie et q u e celu i-ci s eta it fait b a p tis e r selon la fo r m e d e 1 ’ E glise rom aine en
p re n a n t le n om d e R a y m o n d (L in g u a e haicanae scriptores, p. 181)

P ie r r l' ^ * patentes> éd. V id a l et M o lla t, n ° 6430-6432; Fontes, VIII, 34


en 1341 t'r A arc^ teP ,sc° P us A rm m o r u m q u e c ite le te s ta m e n t d u n e A rm é n ie n n e de Venise

a p i o l P * P 2 1 2 213)? Un T h ° m a s- é v ê ^ u e d e s A rm é n ie n s d ltalie, meurt


a F e ro u s e en 1385 ( i d , l e d d 75)
' “ Fontes. IX , 18 e t 34

r . nf. » | . ’ ! * ' 1^ et ^ m ê m e p a p e é ta it in te r v e n u en fa v e u r d es A rm én ien s de Fio­

'* F o J e s . X° 60UPa" ° n m a ‘ SOnS P a r F' 0 r e n ,Ín « * “ • 7« -

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199
L A R C H ID IO C Ê S E DE SULTANIEH

liens d ltalie sont invités à se s o u m e t t r e à la m ê m e règ le que les Uniteurs


^ A r m é n i e " 7.
Les Arméniens d ’Italie pouvaient servir d ’informateurs aux Latins'
mais des incidents révélateurs s etaient produits à leur propos qui expli-
quent ceux que nous rencontrons en Arménie. En 1312, Clément V avait éte
obligé d'intervenir p ou r rem édier aux excès de zèle de 1’inquisiteur Robert
de Santo Valentino, lequel avait fait arrêter le prêtre arménien Léonard
Samuel, fondateur d ’une église arménienne à Casale Fasioli, au diocèse de
Siponto, et confisquer les biens de cette église, sous prétexte que «le s dits
Arméniens, dont on sait qu'ils observent des rites différents, mais c ep e n ­
dant non contraires à la foi orthodoxe, des autres chrétiens, conservaient
leurs rites et par là erraient dans la f o i » 119. De 1'archevêque A p o s to lu s , on
disait qu ’il navait pas été baptisé selon la forme de 1'Eglise; des incidents
survinrent plus tard à Bologne, qui amenèrent des « re b a p tê m e s ». Les
mesures prises contre Pierre, Ezechiel et Athanase font état de ce qu ils
s'opposent au rapprochement entre les usages latins et arméniens, et su r­
tout de ce qu'ils traitent de rénégats leurs coreligionnaires qui acceptent le
baptème selon la forme de 1'Eglise rom ain e120. Et l'on pourrait faire des
constatations analogues à Chypre, oú les Arméniens vivaient aussi dans un
Etat à prédom inance latine121.

1,7 Fontes, X, 77; su r to u t cela, cf. M.-A. V an d e n O u d en rijn , Les c o n s titu tio n s des F rè re s
Arm éniens de S a in t B a sile en Ita lie, R o m e , 1940 ( O rie n ta lia ch ristia n a analecta, C X X V I ) ; cf.
aussi L in g u a e h a ica n a e scriptores, loc. cit. En 1398, B o n ifa c e I X c o n fie la r é fo r m c d e s A rm e -
niens d lta lie à 1’a r c h e v ê q u e d e P ise et à un D o m in ic a in ; il le u r c o n c è d e les p r iv ilè g e s d e s F r è ­
res P rè ch e u rs e t les s o u m e t à la v is ite du m a itre g é n é r a l d e ceu x -ci (R ip o ll, II, 372 et 376). Ils
ne co n tin u e n t pas m o in s à se r é c la m e r d e la r è g le d e saint B asile. Cf. un a c te d e le u r g é n é r a l,
Paul de B e n tiv o g lio , q u i c è d e en 1440 aux F ran ciscain s la m a is o n du S a in t-E s p rit d A n c ô n e ,
désertée d e p u is q u a r a n te ans (H ü n te m a n n , B uli. Franc., I, 48 9); m ais c e u x d e B o lo g n e se
disent en 1426 U n ite u rs (R ip o ll, 11,669).
" • B alu ze, V ita e p a p a ru m A v in io n e n s iu m , éd. G. M o lla t, Paris, 1916, I, 238 : A r m e n i fu e r u n t
delati a q u ib u sd a m fra trib u s q u i in Ytalia v o c a n tu r fratres A rm en i, q u i d ic ti fra tres d ic u n t se esse
conversos et recte s e n tire de ca th o lic a fide.
Ilv R egestu m C le m e n tis V, V II, 8610.
120 Fontes, V I I I. 57, § 7 6 . Cf. aussi IX , 11, et supra, p. 198. - L ' A r m é n ie n P ie r re , n é en
G ran de-A rm én ie, est r e b a p tis é sous c o n d itio n , et la r c h e v ê q u e d e G ê n e s est c h a r g é d e lu i
don n er la c o n fir m a t io n et les o r d r e s sacrés {B e n o it X I I , Lettres closes et patentes, n ° 6 9 2 6 ; 8
juin 1338).
121 Ils y a v a ie n t un é v ê q u e et, à F am a gou ste, d e p a u vres c le r c s a rm é n ie n s a v a ie n t fo n d é
ur» m on a stère, S a in te -M a rie -la -V e rte , q u e Jean X X I I p rit sous sa p r o t e c tio n ( F on tes, V II, 2
n° 7 ). En 1334, 1’é v è q u e G e o r g e s N o re g h e s , q u i a va it été p o u rv u d e son s iè g e d e v è q u e d e s
A rm éniens d e C h y p r e p a r l'a r c h e v ê q u e d e N ic o s ie , re n o n c e à se p r é v a lo ir d e c e t t e p r o v is io n

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200 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IE N T AU M O Y E N AGE

L'histoire des A rm é n ie n s d ’O ccid en t atteste d o n c 1’adhésion de ceux


à 1 ’U n io n ; elle révèle aussi q u e les d iffé re n c e s d e rite et de discipline ^
m a n q u a ie n t pas de susciter des incidents, a n a lo g u e s à ceux que nous
re t r o u v o n s en pays de mission.

a) L 'A r m é n ie et R o m e a v a n t la c r é a tio n de i o r d r e des V n ite u rs

Avec le X I V e siècle, le r o y a u m e a rm é n ie n d e Cilicie était entré dans


u n e p é r io d e difficile de son histoire. Jusque là, associé aux Etats latins de la
côte syro-palestinien n e a u x q u e ls les C r o is a d e s a p p o rta ie n t des secours
interm ittents, et p ro té g é p a r les M o n g o ls , il avait pu m a in tenir son indépen-
d a n c e face a u x M a m e lü k s c o m m e aux beg tu r c o m a n s des m arches de Cara-
m an ie. D é so rm ais, la protection m o n g o le lui faisait défaut - le guet-apens
o ú p é rire n t les rois H é t h o u m II et L é o n I V en 1308 le prouvait Quant
a u x C roisa d e s, elles restaient le g ra n d espoir, et les auteurs de projets, si
n o m b r e u x a u d é b u t du X I V e siècle, ne m a n q u e n t pas d a s s o c ie r les Armé­
n ie n s a u x e x p é d itio n s q u e p ré parait 1'Occident; m ais cet e sp o ir tardait à se
r é a lis e r et, su r place, les seuls se c o u rs q u e l'on p o u vait e s p é r e r venaient du
r o y a u m e de Ch yp re, intim em ent associé à la Cilicie, m ais aussi parfois en
d iffic u lté s avec elle (les A rm é n ie n s avaient s e c o n d é 1'usurpation d ’Amaury
d e L u sig n a n , p rin c e de Tyr, et le roi H e n r i II, un tem p s captif en Arménie,
le u r en g a r d a r ig u e u r a p rè s sa restauration, su rv e n u e en 1310).
L A r m é n i e était en droit de c o m p t e r su r les s e c o u rs de l'Occident; en
d e h o r s de la c o m m u n a u t é d e religion, des liens fam ilia u x unissaient les
H é t h o u m i e n s aux dynasties o c c id e n ta le s - ce qu i eut p o u r conséquence de
fa ir e d 'u n e b r a n c h e des L u sig n a n s de C h y p r e les héritiers de la dynastie
n a t i o n a l e 122 L a P a p a u té p r é p a r a it en liaison avec les rois d Arménie une
n o u v e lle c r o i s a d e 123. En attendant elle m u ltip liait les secours de toute
n a t u r e l24.

e t d e m a n d e à r e c e v o ir , so u s c o n d it io n , le b a p t ê m e et 1 'O rd re s e lo n la fo r m e de 1’Eglise
r o m a in e , et se fa it c o n s a c r e r p a r d é lé g a t io n d u p a p e , p o u r m ie u x m a r q u e r sa soumission au
S ie g e A p o s t o liq u e ( F o n te s , IX , 41 ). C e s t là, s e m b le -t-il, un ca s e x c e p tio n n e l. - II existait égale­
m e n t un é v é q u e d e s A r m é n ie n s d e C a ffa et, e n 1342, C lé m e n t V I d o n n e un é v ê q u e aux Armé­
n ie n s d e P é r a ( F o n te s , IX , 4).
122 W . H. R ü d t d e C o lle n b e r g , T h e R u p e n id e s , H e th u m id e s a n d Lu sign a n s. The Structure oi
th e A n n e n o -C ilic ia n dynasties, L is b o n n e , 1963 (C a lo u s t e G u lb e n k ia n fo u n d a tio n armenian
lib r a r y )
m II s u ff it d e c i t e r le n o m d H a y to n , q u i p r é s e n t a un p r o j e t d e c r o is a d e à Clément V.
124 L e 7 a o ü t 1307, un m a n d e m e n t d e la C h a m b r e a p o s t o liq u e à B ic c io dei Francesc
1 'in vita it a fa ir e v e r s e m e n t d e s d r o it s (n o t a m m e n t d e d é p o u ille s ) q u e le Saint-Siège a f f e c t a it

la d e fe n s e d e 1 'A rm é n ie (In s tr . M is c . 4 1 5). C f. Y . R e n o u a r d , U n e e x p é d itio n de c é ré a le s d e s ot

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L A R C H ID IO C É S E DE SULTANIEH 201

L ’A rm é n ie a p p a ra is sa it ainsi c o m m e un avant-poste, p a r tic u lie r e m e n t


exposé, de la C h rétien té face a u x T u rc s et aux Egyptiens, et il im p o rta it a u x
rois d A r m é n i e de ne pas c o m p r o m e t t r e leurs re la tio n s a v e c les Papes. T o u -
tefois, certains A r m é n ie n s se d e m a n d a ie n t si, en a b a n d o n n a n t cette s itu a ­
tion et en accep tan t de se fa ire le t rib u ta ire d u sultan, le petit r o y a u m e ne
gagnerait pas u ne plu s g r a n d e tra n q u illité : ce point de vue, d e p lu s en p lu s
largement r é p a n d u a u fu r et à m e s u r e q u e s 'é c o u la ie n t les a n n é e s sa n s
qu'une c ro is a d e v é rit a b le se fut m ise en route, tan dis q u e les é p r e u v e s d u
royaum e ne faisaient q u e s’a g g ra v e r, devait p e s e r lui aussi s u r les r e la t io n s
latino-arm éniennes.
L union entre Église latine et Église arménienne, p ro c la m é e en 1199 et
réaffirmée par H é th o u m II en 1288, avait laissé subsister des points de dés-
a ccord 125. Un concile, c o n v o q u é p ar le catholicos G ré g o ire V II et tenu à Sis
en 1307, s efforça de les éliminer, en alignant les usages a rm é n ie n s s u r ceux
de 1Église rom aine, qu e ce fut en acceptant de c é lé b re r la fête de N o é l le 25
décembre et les fêtes des saints au jo u r occurrent de 1'année liturgique, o u
en décidant de m é le r de 1'eau au vin du calice avant la con sécration ,
comme le faisaient les Latins (ce qui éliminait tout so u p ç o n de m o n o p h y -
sism e)126. Ce qui n a l l a pas sans susciter une vive opposition, argu an t d e ce
q u e n opérant la réun ion des Eglises, on avait «d é tru it la d iscip lin e d e
notre Illu m in a te u r». Le roi Oshin et le catholicos Constantin III d u re n t dis-
soudre p a r la force une réun ion des opposants, à Sis m êm e, en 1309-1310.
Et les A rm én ie n s qui vivaient en d eh ors des territoires so u m is au roi
de Cilicie paraissent a v o ir ignoré ou com battu les décrets d u c o n c ile :
larch evêq u e de Jérusalem, Sarkis, sem ble d etre p ro c lam é c ath o lic o s lui-
même, avec l a p p u i d u sultan; les couvents de G ra n d e -A rm é n ie n a p p l i q u é -
rent sans d oute pas plus les décisions de 1307 que les A rm é n ie n s de C r im é e
et du Q ipéaq au x qu els Jean X X I I devait dem an d er, en 1318 et plus tard
d accep ter de m ê le r de l'eau au vin destiné à la C o n s é c r a t io n 127.

ks en Arménie par les Bardi pour le compte de Benoit X II (1336) dans Mél. Ecole franç Rome
I936, p. 287; J. Richard, Documents chypriotes des archives du Vatican, Paris, 1962 p 34 49
(Bibl. arck et hist. de l'inst. fr. de Beyrouth, 73); etc. "
,M Supra, p. 51-53.
124 Tournebize, Hist polit. et religieuse de 1’Arménie, I, p. 309-310; Documents arméniens I
P LXX et 465. ’ ’
127 Tournebize, p. 311; Supra, p. 159. Etienne Orbélian a inséré dans son Histoire de la
tounu le texte de la lettre par laquelle son maitre, le vartabed Isaíe Nòeci, dénonçait les
ecrets du concile de Sis (Vanden Oudenrijn, Linguae haicanae scriptores, p 21-22) C
decrets furent rcpris en 1316 par un autre concile, réuni à Adana. - En ce qui concerne Jér^
®a em, la situation resta complexe, le nouveau catholicos (alias patriarche arménien de Jéru

ocan n eu u y u am o ü an M fcM
202 LA PAPA UTÉ ET L E S M I S S I O N S D O R I E N T AU M O Y E N AGE

C ep e n d a n t, les relations entre R o m e et l'Arm énie restaient actives D


1307 à 1311, elles sont d o m in é e s p ar le nom d'un cousin du roi Osh‘ *
H é t h o u m de G orig h os, qui devait finir par entrer dans 1’ordre des Prémon
trés et qui est surtout connu, sous le n om de Haython, p ou r avoir écrit U
fle u r des h istoires de la terre d'Orient\ avec lui 1’Eglise d ’Arménie apparait
com m e p arfaitem en t en c o m m u n io n avec celle de R o m e 128. U obtenait
d a v o i r des F ran ciscains a u p rès de lui, c o m m e jadis le roi Héthoum I I ' » et
c o m m e le d e m a n d a it le roi O shin; il faisait c o n fé re r par Clément V au
c a th o lic o s le droit d a c c o r d e r les dispenses de m ariage (131l ) 130.
Si 1'influence franciscaine p ré d o m in ait dans le royaum e, les Domini­
cain s n 'en étaient pas absents. R a y m o n d Etienne s’y rendit certainement en
1318, à la d e m a n d e de Jean X X I I ; il écrivit dans le D ire cto riu m ad passa-
g iu m fa cie n d u m q u e la con version des Arm én ien s paraissait dictée par
1 'o p p o rtu n ism e et m a n q u e r de sincérité; il constatait en effet que les enga-
gem ents p ris en 1199 (con cessions de monastères, de cathédrales aux
Latins, de c h â te au x à 1’Eglise) n ’avaient pas été tenus, et notamment que les
je u n e s A r m é n ie n s ne recevaient pas d ’enseignem ent d u latin. A la demande
d u p ap e , lui et son c o m p a g n o n obtinrent la p ro m e sse d e la création d eco-
les latines, ainsi qu e de couvents d om in icains et franciscains; il semble
q u ’a v ec le tem p s certaines de ces p rom esses se ré a lis è re n t131 : la fondation
d u n e n o u v e lle m a iso n d om in ic ain e intervint en 1327132.

s a le m ) se c o m p o r t a n t à 1'occasion c o m m e s u b o r d o n n é à c e lu i d e Sis. L u d o lf de Sudheim


a f f i r m e q u e, v e r s 1350, l '« é v ê q u e a r m é n ie n d e J é r u s a le m » o b é is s a it à R o m e (Lau ren t, Peregri-
natores m e d ii aevi quatuor, p. 352). Cf. J. M é c é ria n , H istoire et institutions de 1'Eglise armé­
n ienne, B e y r o u t h , 1965, p. 115 (R e c h e r c h e s p u b lié e s sous la d ir e c tio n d e 1’Institu t de Lettres
o r ie n t a le s , X X X ) .
128 D o cu m e n ts arm éniens, II, p. X X I I I - L V I I . L e n t r é e d e H a y th o n c o m m e con vers chez les
P r é m o n t r é s p r o v o q u a d a ille u r s u n e ré a c tio n d e c e rta in s A r m é n ie n s : Isaie N ò eci lui adressa
u n e le t t r e d e r e m o n tr a n c e s ( Lin gua e haicanae scr., p. 21).
129 S u r c e u x -c i, cf. G o lu b o v ic h , I, p. 341 (p a r m i eu x fig u ra it T h o m a s d e Tolentino, qui
d e v a it m o u r ir en 1321 m a r ty r à T h â n a ).
130 R egestum C lem entis V, n ° 7199-7202 ( Fontes, V II, 2, n ° 44). En 1298, B o n ifa c e VIII, tout
en a c c e p ta n t d e r e n o u v e le r u n e d is p e n s e a c c o r d é e p a r le c a th o lic o s , a v a it p réc is é que le pape
s e u l p o u v a it a c c o r d e r d e s d is p e n s e s p o u r le tr o is iè m e d e g r é d e c o n s a n g u in ité ( Fontes, V, .

n° , 2 4 ) " • f Mollat
151 D o cu m e n ts arm éniens, II, p. 487-488. S u r la m is s io n d e R a y m o n d E tienne, cl. ’
Jean X X I I , n ° 8202 (R ip o ll, II, 142; Fontes, V II, 2, n ° 15). - L es é c o le s latin es en Arm enie nous
r e s t e n t in c o n n u e s : cf. L o e n e r tz , La société, p. 188. T o u te fo is , en 1346, il est question ^
A r m é n ie n (s u iv a n t le r ite r o m a in ), Harabetus, q u i a v a it c o n fié ses fils Jean et Raym on
é c o lâ t r e s la tin s d e T a rs e , e t q u i o b t in t p o u r e u x d e s b é n é fic e s ( F o n te s , IX , 86).
L e c h a p it r e g é n é r a l a u to r is e c e tte a n n é e là la c r é a tio n d ’u n e m a ison « e n Arm
(R e ic h e r t , Acta capit. gener. O . P , II, p. 172); il s a g it b ie n du r o y a u m e d e C ilic ie, car cette

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L A R C H I D I O C É S E DE SULT A NIEH 203

pendant q u e ces n é go c ia tio n s se déroulaient, une a m b a s s a d e a r m é ­


nienne était à A vignon . L é v ê q u e Jacques de G aban , 1'interprète du roi
d Arménie, rep résen tan t ce dernier, et d eu x chevaliers v sé jo u rn ère n t asse/
longtemps; ils rep a rtire n t c h arg é s de p r iv ilè g e s 133. M ais Jean X X I I soule-
vait un n o u v e au p r o b l è m e : 1 é v ê q u e devait faire sav oir au roi qu'il existait
encore des d é s a c c o r d s entre les d e u x Eglises - n otam m e n t le p o u v o ir
reconnu en A r m é n ie a u x sim p les prêtres de d o n n e r la c o n firm a tio n et de
bénir les saintes huiles - . U n e p ro fe ssio n de foi, é la b o r é e p a r la curie, avait
été c o m parée à celle q u e Jacques avait a p p o rté e avec lui (le p a p e insistait
en particulier su r ce q u e lui seul pouvait d o n n e r toutes les d isp e n se s en
matière m atrim on iale, et q u e c était de la Papauté qu e proc é d a it le p o u v o ir
des patriarches). Jacques avait accepté cette profession de foi; il était invité
à la présenter au cath olicos en de m a n d a n t à celui-ci de tenir la foi et le rite
de 1’Eglise r o m a i n e 134.
Dès son retour, O sh in et le patriarche renvoyèrent au p a p e u n e n ou -
velle am bassade, avec à sa tête le chancelier du royaum e, Sarkis d e S i s l3S.
Mais c e st en o c t o b r e 1321 q u e le pap e prit la décision de c o n fie r à d e u x
Franciscains, le vicaire d ’Orient, Pierre de T u rre , et le custode de Tabriz,
Jacques de C a m e rin o , une m ission dont 1'ampleur et la nature rap p e lle n t
celles qui avaient été envoyées en Orient p a r les papes du X I I I C siècle
(1’évêque Jérôm e de Caffa partait en m êm e temps q u ’eux p o u r le Q ipcaq,
chargé de lettres p o u r les Arm én ien s de Khazarie et de Sarai, c o m m e p o u r
la cour de la H o r d e d 'O r). N o u s avons déjà rencontré les lettres q u ’ils
emportaient p o u r le roi de G é o rg ie et p o u r ses barons, p o u r A b u -S a id et
Copan, p o u r de n o ta b le s chrétiens d 'A z e rb e ija n 136. Ils en e m p ortaien t aussi
pour la r c h e v ê q u e de Saint-Thaddée de Caraclesia (o u de M a k u ), Z a c h a rie

son du ii r e le v e r d e la p r o v in c e d e T e r r e S a in te. C e tte c r é a tio n es t-e lle en r a p p o r t a v e c 1’a u to-


nsation d a v o i r d e s D o m in ic a in s a v e c lui, a c c o r d é e au c o m te d e G o r ig h o s (in fra , p. 208,
n. 156)?
115 Jacques é ta it à A v ig n o n d è s 1317 ( U rk u n d e n b u ch des Landes o b den E n n , V, 627) et
encore en m ai 1318 ( H essisch es U rk u n d e n b u ch , I, 2, 251). S u r ses d é p e n s e s , c e lle s d e l in ter-
Prète G r é g o ir e S e g u ilic i et d e leu rs c o m p a g n o n s , cf. H. K . S c h a e fe r, G eldspend en d e r p à p stli-
c^en K urie, dans O rie n s ch ristia n u s , IV, 1904, p. 183-187 : e lle s son t r é g lé e s le 10 a v r il 1318.
h d u lts : M o 11at, Jean X X I I , n ° 5640-5642.
134 Fontes, V II, 2, n ° 20 (le t t r e au r o i O sh in, d a té e du 29 a v r il - de 1319 ou de 1318?)
Le c h a n c e lie r S a rk is re ç u t u n e a llo c a tio n d e la c h a m b r e p o n tific a le le 26 s e p t e m b r e
•320; une autre, le 16 ju in 1322; en m a i et a oü t 1323, d a u t r e s a m b a s sa d e u rs son t à la C u rie
9 eldsP L‘nden, ib id ). S a rk is b é n é fic ie d u n in d u lt p o u r lui et d u n e in d u lg e n c e p o u r le g l i s e
Saint-Serge d e Sis en ju ille t 1319; le r o i O shin, le l * r m ai 1320 (F on tes, V II, 2, n° 25, 26, 33).
" ‘ Supra, p. 184.

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U4 ^ PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

M anuélian, ancien m oine de Zorzor, qui était regardé com m e exaro


catholicos en G ra n d e -A rm én ie »” Jean X X I I invitait celui-ci à adon t^ Uu
usages de 1’Eglise rom aine en ce qui concernait 1'Eucharistie (1'adH^
d eau dans le calice) et 1’Extrêm e-Onction; mais il ne 1’en c o n s i d é r a h 0"
moins c o m m e un prélat en parfaite union avec le siège de Rome II ^
conférait le pouvoir, en m êm e tem ps q u ’au vicaire des Frères Prèche U*
au custode des Frères M in eurs dans 1'empire tartare de Perse, de réco* **
lier les prélats vivant dans cet em pire et qui auraient été pourvus i r r é ^ iU
rem ent de leur siège, et de ren ou veler la consécration de ceux * ■
n a u r a ie n t pas été régulièrem ent o r d o n n é s 138. En de h ors de consolations
sacriste V artan et aux m oines de S ain t-T h a d d é e 139, les deux Franciscain11
em portaien t aussi des lettres p o u r les arch evêqu es d'Aghtàm ar et d'i4rgue
m az (le catholicos des Agh ou ans) et p o u r les évèques, archiprêtres et varta
b ed de G ran de-A rm én ie, auxquels le p a p e envoyait une profession de foi en
les invitant à 1’U n i o n 140; un m oin e arm énien, Jean de Zorzor, qualifié de

3 Cf. P. P e llio t, Z a c h a rie de S ain t-T h a d d ée et Z a c h a rie S éfêd in ia n , dan s R evue de 1'histoin
des re ltg to n s , C X X I, 1942-1943. p. 151-154 (à p r o p o s d e la v is ite q u e fit Jou rdain Cathala de
S e v e r a c à c e t a r c h e v ê q u e ). Z a c h a rie S é fê d in ia n é ta it a lo r s c a th o lic o s du siège d Aghiàmar
(d o n t les r e la tio n s a v e c le s iè g e d e Sis s 'é ta ie n t a m é lio r é e s d e p u is q u e le catholicos Gré­
g o ir e V I I a v a it le v é 1 e x c o m m u n ic a tio n t r a d itio n n e lle d e son riva l, a va n t 1307: Tournebize
p 307-308). Un t r o is iè m e c a th o lic o s é ta it c e lu i d e s A lb a n ie n s o u A gh ou an s. p eu p le origineUe-
m e n t d is tin c t d e s A rm é n ie n s . - Q u an t à Z a c h a rie d e S a in t-T h a d d é e . alias Z aq a ria Manouelian
Q o r q o r e t z i, il p o r t a it le titre d e 1’a r c h e v ê c h é d ’A rd az.
158 F on tes, V II, 2, n ° 47 (15 o c t o b r e 1321) et 54 (22 n o v e m b r e ); idem dans BulL Francisc.
éd. E u b e l, V, 440 et 451.
,M I b i d , n ° 52.
140 Ib id e m , n ° 55 (cf. a u ssi G. F e d a lto , La chiesa latina, p. 490-491). A 1’ex c e p tio n des deux
c a t h o lic o i d A g h tã m a r et d e s A gh ou an s, titr é s a rc h ie p is c o p i, tou s les p ré la ts destinataires de
c e t t e le t t r e so n t d its e p is co p i, et o c c u p e n t d e s s iè g e s situ és d a n s la h a u te v a llé e de 1’Euphrate,
le s b a ssin s d e s lacs d e V an , S e v a n et O u rm ia , la v a llé e d e l’A ra xe. C e son t Zacharie d^rgií
(A rg e à , s u r le la c d e Van, auj. E r c is ); Jean d e N o ra v a n s (N o r a v a n k , e n S io u n ie - cf. Etienne
O r b é lia n , d a n s so n H is to ire de S io u n ie , éd . J. S a in t-M a rtin , M é m o ire s , II, p. 169); Etienne Thai-
s a ir (q u i s e r a it E t ie n n e O r b é lia n lu i-m ê m e , d é s ig n é p a r son p a tro n y m e , T e rsa íd j, et non par le
n o m d e s o n s iè g e , T a th e v , m é t r o p o le d e la S io u n ie - m a is sans d o u te était-il m ort depuis
1309); J a c q u e s d e S a n c to B a r th o lo m e o (A g h p a g , p r è s d e S e lm a s - il est d é s ig n é com m e évêque
d e S e lm a s d a n s les a c te s du c o n c ile d A d a n a , e n 1314); Z a c h a r ie d e N a c h io a n (N akhidjevan);
T h a d d é e d e P a ta v ia m (s o it P a k a ra n , p r è s d ’A k h a lk a la k i, s o it P a k a va n , à 1’ou est de Dofcubava-
z it ); N e r s è s d e V u a n a v a n iz (V a n é v a n , au s u d -o u e s t d u la c d e S e v a n ); S abas de Acpada (Hagh
p a d , e n t r e le K u r e t le la c d e S e v a n ); les é v è q u e s d A sta ra t (A s h d a ra g , p r o v in c e de Pakrevan .
s e lo n S a in t-M a r tin , M é m o ire s , I, p. 438), C a r n i (K a r n i, p r è s d e D v in ; ib id , p. 41), Arzeron (Erz
r u m ). P a p e rt (B a ib u r t ), A rzen gu (E r z in c a n ), Cars ( K a r s ) e t P itr ia c o en q u i M. G érard D e d e >a n .
q u e n o u s r e m e r c io n s d e l a i d e q u il a b ie n v o u lu n o u s a p p o r t e r p o u r ces identifications, p1"^

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L 'A R C H ID IO C Ê S E DE SU LT A N IE H 205

docteur en théologie, et ses disciples, étaient félicités de leu r ad h é sio n à


1'U n ion 141.
II se m b le ainsi qu en 1321, Jean X X I I s’était d é c id é à to u c h e r directe-
ment les chefs sp iritu els des A r m é n ie n s de G r a n d e -A r m é n ie et de C rim é e .
Pour les prem iers, c est g râ c e à Z a c h a rie de S a in t-T h a d d ée qu il pensait y
parvenir; et ce sont les F ra n c isca in s - ils avaient installé u n e r é s id e n c e à
Saint-Thaddée, a u p r è s de 1a r c h e v ê q u e 142 qui étaient les p r in c ip a u x ins-
truments de cette entreprise. Mais, lo rsq u il se d é c id a à investir 1’a rc h e v ê -
que de Sultan ieh de la re s p o n sa b ilité de ces d é m a rch e s, Jean X X I I écrivit
au catholicos C o n sta n tin et au roi L é o n V, p o u r le u r r a p p e le r q u e les p a p e s
avaient a rra c h é « a u x t é n è b r e s et à 1’o m b r e de la m o r t » , « l e s p e u p le s de
Basse-Arménie » en les ra m e n a n t à 1’Eglise rom aine, et q u il co n ve n ait d a g i r
ainsi à 1'égard des « A r m é n ie n s de 1'empire de Perse » lesquels, bien q u e pla-
cés sous 1o b é d i e n c e d u catholicos, étaient sépa ré s de la d o c trin e d e 1’Eglise
de Rome. II d e m a n d a it au roi et au cath olicos d e n v o v e r d e s lettres et des
messagers d e fa ç o n à a id e r 1’a rc h e v ê q u e - G u illa u m e A d a m - à c o n v e r t ir

pose d e r e c o n n a it r e le c o u v e n t d e P e tr o s k a , au c a n to n d e H a b a n d , q u e c it e E t ie n n e O r b é lia n .
La m ê m e m is s io n e m p o r t a it u n e le t t r e du 16 o c t o b r e 1321 p o u r Is a i vartah ed, c ’e s t- à - d ir e
pou r le c é lè b r e Is á ie N á e c i, q u i v é c u t d e 1284 à 1338 d an s le m o n a s t è r e d e G a y le - t s o r d o n t il
fit le c e n t r e d e s é t u d e s a r m é n ie n n e s (J. M e c e r ia n , H is to ire et in s litu tio n s de 1 'E glise a r m é ­
nienne, p. 289-290; L in g u a e h a ic a n a e s crip to re s , p. 21-22). II a p p a r a it q u e le s c o n t a c t s p r é c é -
d e m m e n t é t a b lis a v e c 1 'a r c h e v ê q u e d e S a in t-T h a d d é e et les r e lig ie u x d e Z o r z o r a v a ie n t p e r -
mis d e b ie n c o n n a it r e la s itu a tio n e n G r a n d e -A r m é n ie .
141 E u b e l, B u l i fra n cis c., V, p. 213, n ° 7. S u r Jean d e Z o r z o r et ses t r a d u c tio n s , c f. L in g u a e
haicanae s crip to re s , p. 181. - L e c o u v e n t d e Z o r z o r ( C o r c o r ) a é t é id e n t ifié p a r d e n o m b r e u x
auteurs a v e c le c é lè b r e c o u v e n t d e S a in t-T h a d d é e , s itu é au S u d -O u e s t d e M a k u . C e t t e id e n ti-
fica tion est lo in d e t r e a s s u ré e , et le D r J.-M. T h ie r r y , d o n t o n c o n n a it le s t r a v a u x su r le s
anciens m o n a s tè r e s d u V a s p u r a k a n , a b ie n v o u lu n ou s d ir e q u il p r o p o s e p o u r Z o r z o r un s ite
plus s e p te n tr io n a l, d a n s la v a llé e d u Z a n g m a r tch a i. L i d e n t i f i c a t io n d e Z o r z o r a v e c K e ç u k -
le « K i s s o u k » q u e T a v e m i e r ( V oy a ges en Perse, I, 4) p la c e « a u x fr o n t iè r e s d u C o u r d is t a n e t d e
1’A s s y r ie », au lie u d u m a r t y r e d e s a p ô t r e s B a r t h é lé m y et M a th ie u , e t q u e P. B e d ik ( C e h il
sutun, V ie n n e . 1678, p. 383-384) a p p e lle G h ezu gh , le K e ju t d e la c a r t e d e H . B. F. L y n c h . A r m ê ­
nia. T ra veis a n d studies, L o n d o n . 1901, I, o ú il e s t r e p r é s e n t é im m é d ia t e m e n t à 1’o u e s t d e
M aku - a é té p r o p o s é e p a r le P. V a n d e n O u d e n r ijn ( L in g u a e h a ic a n a e scr., p. 29 e t 4 5 ).
142 L e lo c u m fr a n c is c a in d e C a ra cle s ia est c it é d a n s le D e lo c is (G o lu b o v ic h , II, 7 2 ) e t le s
F ran ciscain s se fla t t a ie n t d a v o i r r a m e n é à 1’u n io n le p r im a t d e G r a n d e - A r m é n ie , Z a c h a r ie ,
c o m m e ils 1 'avaien t fa it e n 1288 p o u r le r o i d A r m é n i e , ses p r é la ts et s o n p e u p le {ib id ., 73; c f.
D ocu m en ts a rm ., II, p. 620). N o t o n s q u e n 1314, t r o is r e lig ie u x (A n t o in e d e M ila n , F r a n ç o is d e
P e tr io lo et M o n a ld o d 'A n c ô n e ) a v a ie n t é té m a r t y r is é s p a r le s M u s u lm a n s à E r z in c a n , d a n s d e s
c o n d itio n s q u i fir e n t 1 'a d m ira tio n d e s A r m é n ie n s (ib id ., 69 et s u i v . ) : u n p r é t r e a r m é n ie n é ta it
leu r socius.

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208 LA PAPAUTÉ ET LES MIS SIONS D OR IENT AU M O Y E N AGE

unissait le siège à le g lise gênoise de 1'Aias (2 juillet 1320). puis séparait les
deux siè g e s '55. Cette séparation résultait de la décision du pape de creer cn
Arm énie deux nouveaux sièges épiscopaux, cette lois destinés tant aux
Latins q u ’aux Arméniens, sans doute en tenant com pte de la ícalite dc
1’Union. En 1322, le com te de Gorhigos, O s h i n '50, avait d e m a n d e à Jean
X X I I d e r i g e r sa ville en siège épiscopal, et le pape avait alors coniic au
patriarche de Jérusalem le soin d e n q u ê t e r sur cette d e m a n d e ; il semble
que la décision fut prise en 1328, v raise m b la b lem e n t à la requète de
1’ancien évêque arm én ien de Caffa, devenu D om inicain, Thaddée, qui
devint après le m ois de m ars 1328 ep is co p u s C u rq u en sis. O r c est le 17 octo-
bre 1328 q u e le pap e érigea 1’Aias en cité épiscopale, en désignant pour
o c c u p e r ce siège un Franciscain, Nicolas, qu il donnait p o u r é v ê q u e A n n ettis
et L a tin is d e g e n tib u s in c iv ita te et d io ce s i A y a c ie n s is ^ 1. II était précise que
N icolas serait suffragant du catholicos d A rm énie; la situation etait proba*
blem en t identique en ce qui concerne T h a d d ée ,58. En érigeant ces sièges,
Jean X X I I agissait dans le royau m e d ’Arm énie c o m m e il I aurait lait en
Occident; m ais il rom pait avec la tradition qui, partout en Orient latin,

s e p t e m b r e 1344 su r la r e q u è te du r o i G u y d ’A r m é n ie ( C lé m e n t V I, L ettres c lo s e s . . . , 1086). Bar-


t h é le m y d e T a b riz , O.M ., q u i su cc éd a à ce d e r n ie r , é ta it p e u t-è tr e un A r m é n ie n (G o lu b o ­
vich , V, 72). Jean P o n h y e r lu i-m êm e, d é s ig n é en 1366, é ta it p a rti en 1363 p o u r la T e r re -S a in te
(ibicL, V, 88). C e s t c e p e n d a n t a v e c lui q u e c o m m e n c e la s é r ie d e s a r c h e v ê q u e s n on resid en -
tiels.
,5' L e s iè g e d e M is is é ta it va ca n t d e p u is lo n g te m p s (le d e r n ie r titu la ir e , P ie r r e d A d r ia .
é ta it m o r t à A c r e en se ren d a n t à la C u rie - d o n c avan t 1291); le C o n s ta n tin q u i a p p o rta à
R o m e en 1306 d e s n o u v e lle s a la r m a n te s d ’A r m é n ie é ta it sans d o u t e un A r m é n ie n (R eg
C iem . V, I, 748). T h o m a s , D o m in ic a in , é lu p a r le c h a p itr e en 1320, eu t b e a u c o u p d e p e in e à se
fa ir e r e m e t t r e le g lis e d e 1’A ias (A rch . O rie n t latin , I, p. 266-267; M o lla t, Jean X X I I , 16 143).
A p r è s 1328, o n r e n c o n t r e un E tie n n e , a r c h e v ê q u e d e M a m is tra , e n v o y é d u r o i d A rm é n ie
(S c h a e fe r , D ie A u s g a b e n .. . J o h a n n X X I I , p. 237 et 532) q u i p r e n d d a n s u n e le t t r e du l er se p ­
t e m b r e 1332 le titr e d a r c h ie p is c o p u s Ayacensis (R e g e s te n z u r G e s c h ic h te d e r B is ch õ fe v. Cons-
tanz, éd . C a r te llie r i, II, 4307). L e s iè g e fu t r e le v é , c o m m e titu la ir e , en 1345 (H ie r a r c h ia , 1, 324).
156 A lo r s r é g e n t d u r o y a u m e , il b é n é fic ie d e d iv e r s in d u lts (F o n te s , V I I , 2, n ° 4 2 ; M ollat,
Jean X X I I , 25043-25044) n o ta m m e n t d u d r o it d a v o i r a v e c lu i d e u x F r è r e s P r è c h e u r s .
157 J. R ic h a rd , D e u x é vèq u es d o m in ic a in s , agen ts de 1 'lln io n a r m é n ie n n e au M o y en -A ge, dans
A F P, X I X , 1949, p. 260-266; Fon tes, V II, 2, 108. N ic o la s e n tr a e n c o n flit a v e c le r o i L é o n V p o u r
a v o ir v o u lu r e b a p t is e r u n e G é o r g ie n n e , d a m e d e la r e in e (D o c . A r m , II, 618). U n N ic o la s , epis­
c o p u s Axiensis, A xisiensis, A yaciensis, a p p a r a it d a n s d e s le t t r e s d m d u l g e n c e d e 1347 et 1364
(P ie k o s in s k i, C o d e x d ip lo m . M a lo p o ls k i, I, 264; F. G a s p a r o lo , M e m o r ie s to r ic h e d i Sezze Alessan-
d rin o , II, p. 45 ; M e c k le n b u rg is c h e s U rk u n d e n b u c h , X I V , 9 3 1 3 ); cf. a u s si p. 224, n. 228.
158 C e p e n d a n t, d é s ig n a n t un é v ê q u e C o lco s s e n s is le 26 ju in 1370, U rb a in V le considérait
c o m m e s u ffr a g a n t d e l a r c h e v ê q u e (la t in ) d e T a r s e : F on tes, X I, 201.

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L A R C H I D I O C È S E DE S U L T A N IE H 209

rc>servait à un Latin le siège épiscopal, en lui donnant c om m e vicaire un


évêque de rite oriental, p o u r les O rientaux unis vivant dans le d io c è s e 159.
Quelques années plus tard, Clém ent VI procédait également à la dési-
gnation de prélats p o u r des sièges situés dans le royaum e d Arm énie; mais
ceci dans le cadre d une plus vaste entreprise de relèvement de sièges. Le 7
aoüt 1345, il pourvoyait aux archevêchés d ’Anazarbe, M am istra et Séleucie;
|es deux prem iers furent respectivement attribués à un Prém ontré et à un
Augustin qui furent tous d eux appelés à servir d'auxiliaires dans des diocè-
ses occidentauxl60; le troisième, à un Franciscain d u nom de Pons, dont
1'activité missionnaire s'était m a rq u é e par la traduction du rituel latin en
arménien, et qui devait ensuite écrire dans la m êm e langue une Postilla
super evangelium beati Johannis qui encourut les censures du pape. O n a pu
supposer qu'il résidait à S a in t-T h a d d é e 161. Mais rien ne perm et de penser
qu'il exerça une juridiction effective sur le siège de Séleucie (Selefké),
encore qu'il ait été pou rvu de successeurs a rm én ie n s162.
Or, 1'année suivante, c ’est encore un missionnaire, le Franciscain Anto-
nin d'Alexandrie, qui fut p ou rv u d'un autre siège archiépiscopal relevant du
patriarcat d ’A n tio c h e 163 et en pays de peuplement arménien, celui d ’Hiéra-
polis (M anbi|), le 31 juillet 1346164. Et, cinq jours auparavant, le Franciscain

l<g En 1307, à T a r s e , o n t r o u v e un é v ê q u e a r m é n ie n et un a r c h e v ê q u e la tin ( D o c u m . A rm .,


I. p. L X X ). Cf. le c a s d e C a ffa .
140 E u b el, H ie ra rc h ia , I, 87 et 339. A n a z a rb e a va it un é v ê q u e a r m é n ie n (e n 1307-1314:
D ocu m ents a rm ., I, L X X ; e n 1341, B e n o it X I I é c r iv a it à 1 'a rc h e v ê q u e d 'A n a z a r b e e n m ê m e
tem ps q u ’à d a u tr e s p r é la t s la tin s et a r m é n ie n s , et E tie n n e , a r c h e v ê q u e d A n a z a rb e , r é p o n d en
1342 : Fontes. V I I I, 56 e t 59). S u r M a m is t r a (M is is ), cf. supra, p. p ré c é d ., n. 155.
141 G o lu b o v ic h , IV , p. 381-388. P o n s, q u i é ta it e n c o r e à A v ig n o n le 5 d é c e m b r e 1345 ( R e g e s -
ten zu r G e s c h ic h te . . . C on sta n z, II, 6431), fu t c e n s u r é le 31 ju ille t 1346 ( F o n te s , IX , 83; E u b e l,
B u li F ra n cisc., V I, 381). C f. L in g u a e h a ica n a e s crip to re s , p. 257.
142 Un B a s ile , m o r t a v a n t 1360; Is a ie A s la n i (12 o c t o b r e 1360), q u i d o n n e u n e in d u lg e n c e à
Vienne, le 14 n o v e m b r e 1361 (U h lir z , Q u e lle n z u r G e s ch ic h te d e r Stadt W ien, II, 1, p. 142); un
T h éod ore, a u q u e l s u c c è d e M a r tin S te p h a n i, A r m é n ie n d e I o r d r e d e s U n ite u rs (25 ju ille t 1370),
lequel d e v a it en 1376 ê t r e a u t o r is é à a g ir p o n t ific a le m e n t d a n s les d io c è s e s e s p a g n o ls , sans
doute à la su ite d e la p r is e d e S e le fk é p a r le s E g y p tie n s . S es p r o v is io n s ( F o n te s , X I , 2 0 3) so n t
a cco m p a g n é es d e le t t r e s a u x s u ffr a g a n ts et au p e u p le du d io c è s e , c o m m e p o u r un a r c h e v ê ­
que ré s id e n tie l.
141 On p o u r r a it n o t e r a u ssi q u e C lé m e n t V I p o u r v u t un A rm é n ie n , Jean D a v id d e Z o r z o r ,
du siège d E d e s s e e n 1344 ( F o n te s , IX , 18). M a is ic i il s a g it d u n s iè g e p o u r v u n o r m a le m e n t
d Un titu la ire, le p r é d é c e s s e u r é ta n t m o r t en 1342 au p lu s ta rd (in fra . p. 211).
,M E u b el, H ie ra rc h ia , I, 275. C lé m e n t V I e x p o s e d a n s u n e le t t r e e n c y c liq u e d u 17 m a rs
,348 (C lé m e n t V I L e ttre s closes, n ° 1605) q u e c e d e r n ie r , a ya n t v é c u v in g t-c in q an s p a r m i les
in fid èles d o n t il a v a it c o n v e r t i u n c e r ta in n o m b r e à la fo i. 1'avait p le in e m e n t in fo r m é d e la
s*tuation e x is ta n t en E g y p t e e* d a n s les p a y s s o u m is au su ltan : le p a p e c o n c lu t en m v ita n t les

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21 0 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IE N T AU M O Y E N -A G E

arménien Daniel de Tabriz, que nous retrouverons, avait reçu k* titre


d arch ev êq u e de Bosra - autre siège relevant d'Antioche, mais comm e chef-
lieu de la province d ’Arabie, donc uniquement titulaire II semble que, en
faisant revivre tous ces sièges m étropolitains165, Clément VI ait repris 1'idce
qui avait présidé à la restauration de 1’archevêché d'Edesse au profii dc
William F re n e y : donner à des missionnaires un titre épiscopal ou archié-
piscopal leur assurant plus d ’autorité en pays de mission. N ous ne croyons
pas qu'on puisse voir dans le relèvement des sièges d'Anazarbe, Mamistra,
Selefké ou Hiérapolis un essai d en c ad re m e n t nouveau des chrétientés
arméniennes unies à R om e; mais ce relèvement n est peut-être pas sans
signification p o u r 1’histoire des évêchés missionnaires.
Les tractations des années 1318-1321 semblaient avoir réglé le conten-
tieux latino-arménien, en ce qui touchait du moins les relations entre Rome
et le catholicat de Sis. Le pape considérait 1’Arménie com m e revenue à
1'Union, alors que les Arméniens estimaient qu'au prix de quelques conces-
sions rituelles, la concordance des deux confessions de foi avait été recon-
nue sans q u ’ils aient eu à aban don ner leur tradition nationale : c’est ce qui
ressort des lettres de Jean X X I I de 1321. Mais cest en Arm énie même, et
plus précisément en Grande-Arménie, que se dessina une tendance, sur
laquelle nous aurons à revenir, à rom pre avec le passé de 1'Eglise armé­
nienne, considérée com m e étant tombée dans les erreurs monophysites,
p o u r em brasser sans réserve la foi et les usages de 1'Eglise ro m a in e 166. Deux
évêques, celui d ’Orm, Nersés Balientz (Palenç), et celui d 'Erzerum (Theoto-
polis), Sim éon Bech, s en vinrent de Grande-Arm énie en Cilicie pour expo-
ser au catholicos leurs doutes quant à la validité de leur consécration,
c om m e à celle des baptêmes et des ordinations célébrés selon la forme
reçue dans 1 Église d Arménie. Ce qui suscita une vive réaction du catholi­
cos Jacques II, personnellement acquis à 1'Union, mais attaché aux tradi-
tions de son église. Selon Nersès, il fut interdit aux deux évêques de célé*

fid è le s à d é p lo y e r leu r zè le p o u r la lib é ra tio n d e la T e r r e Sainte. A n ton in avait probablem ent


vécu à Jérusalem , m ais o n ne peu t a ffir m e r q u ’il fut g a rd ie n du M o n t-S io n com m e 1'écrit
G o lu b o vic h , IV, 397-398. II p artait peu a p rès p o u r 1'A n gleterre (n ° 1608), et on le trouve en
1349 en Espagne, avant q u il soit tra n sfé ré au s iège d e D urazzo.
165 L a rc h e v ê q u e d E desse fit acte d e m é tr o p o lita in en d on n a n t 1’é v ê c h é d e H arran (Carro-
nensis), vacan t p ar la m o rt d un S alo m o n , au fra n cisca in T h ib a u d ou Tealdus ( Fontes reru m
austriacarum, X X IV , 74), q u 'il fit c o n s a c re r p a r un sien d élé g u é . L e p a p e c o n firm a cette nomi-
n ation irré g u liè re en é criv a n t au ro i et au p eu p le d 'A rm é n ie , le 13 n o v e m b re 1363 (G o lu b o
vich, V, 97).

166 N o u s au ron s 1o cc a s io n d e d is c e rn e r la p art qu i re v ie n t dans c e tte attitu d e aux Domi­


nicains, d u n côté, aux A rm én ie n s d e l e c o l e d e Q rn ay, d e 1’autre.

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L A R C H ID IO C Ê S E DE S U L T A N IE H 211

brer la messe c on fo rm ém e n t au rite latin, et 1'évêque d Orni fut em pri-


sonné; selon ses contradicteurs, ce sont d a u tre s raisons qui am enèrent le
catholicos à p ren d re des sanctions à son endroit et à lui interdire de reve-
njr dans son é g lis e 167. Après un an et dem i de séjour forcé à Sis, N ersès p a r­
vint à gagner Chypre, puis, après un nouveau délai, Avignon.
Est-ce Nersès qui p ro v o q u a en Occident 1'agitation dont nous avons
parlé - et qui suscita les agissem ents des prélats arm éniens d'Italie que
Benoit X II ordon nait de faire arrêter en n ove m bre 1338168? N o u s avons
le témoignage d'un frère Jean, venu de G rande-Arm énie, qui avait entendu,
dans un couvent de Tuscie, Nersès p rè ch e r (avant 1342 en tout cas) q u o d
ontnes fra tres A r m e n i d e b e r e n t re b a p tiz a ri, a lio q u in ta n q u a m h e r e t ic i c a p e r e n -
tur - de fait, un certain n o m b r e de religieux basiliens arm én ie n s furent
arrêtés et détenus à A vign on en 1340-1342169 l'intéressé se fit a lo rs re b a p -
tiser par un ab b é, m ais apprit p a r la suite que le pape avait re c o n n u q u e la
forme sous laq u e lle il avait été baptisé était parfaitement v a l a b l e 170. N e r s è s
se fit charger d e 1’e x am e n de la foi arménienne, et reçut à ce titre une pen-
sion p on tific ale 171; le 9 o c to b re 1338, il avait obtenu de B en oit X I I d 'être
reconsacré, sous condition, en qualité d'archevêque de M alazgerd, et revêtu
du p a l l i u m ,72. U n autre arch evêque arménien, Martin, titulaire d u siège
d Edesse, fréquentait en m ê m e temps la Curie oú il m ou ru t avant 1342,73.

167 D a p r è s la R e s p o n s io A r m e n o r w n ( F o n te s , V III, p. 213), N ersès au rait é té a c c u s e r a u p rè s


du cath olicos le p e u p le d u c h à te a u d e H a n g a et du v illa g e d e S a h a p d e p r o fe s s e r d e s e r r e u r s ;
Jacques II fit e n q u ê te r au p a ys en q u estio n , p a r la r c h e v ê q u e d e K o n y a , et le ju g e m e n t a y a n t
été fa v o ra b le aux a ccu sés, N e r s è s au rait é té c o n tra in t à s e n fu ir. - On a d m e t d o r d in a ir e q u e
Nersès B a lie n ts (P a le n ç ), fu tu r a r c h e v ê q u e d e M a la zgerd , est id e n tiq u e au tr a d u c te u r d u
Liber h is to r ia r u m d e M a r tin d e T r o p p a u q u i a c h e v a son ceu vre en 1348 et qu i se d it c a n o n ic i
latini g ra d u m ad eptu s, s a c e rd o s q u a m v is in d ig n u s (e t n on pas a rc h e v ê q u e , c o m m e o n s’y s e ra it
attendu). L e P. V a n d e n O u d e n r ijn a r e m a r q u é q u e c elu i-ci se d it o r ig in a ir e d e Sis, a lo r s q u e
la rc h e v ê q u e s e ra it n é d an s u n e d es v ille s d e la c ir c u m fe r e n tia d e M a la z g e rd (D oc. A r m ., II,
P 634; la u te u r d e la R e s p o n s io lu i d o n n e b ie n le n o m d e B a lo ). II rè g n e d o n c p o u r le m o in s
quelque in c e r titu d e à c e t é g a r d ( L in g u a e h a ic a n a e s c rip to re s , p. 210-212).

168 S u p ra , p. 198-199.
,M Schaefer, D ie A u s g a b e n d e r a p o s to lic h e n K a m m e r , p. 114 (cf. aussi 139, 241).
170 Fontes, IX , 11 (2 o c t o b r e 1342).
171 C eci à p a r t ir d u 8 ja n v ie r 1340, sans d o u te lo rs d e l a r n v e e d e 1 a m b a s s a d e c it é e p lu s
lo>n. et ju s q u a u 6 d é c e m b r e . Il c o n tin u e e n s u ite à r e c e v o ir une p e n s io n - c o m m e le c t e u r
d arm én ien ? K. H. S c h a e fe r , art. cité, p. 112, 138, 157, 230, 262, 285.
,7Í Fontes VIII 60 il est p r é c is é q u e N e rs è s a v a it é té c o n s a c ré p a r d e s é v è q u e s c a th o li-
puis e n v o y é 'p o u r ê t r e c o n fir m é ad quendam vocatum ca th olicon residentem in m in o r i
Ses adversaires lui contes.ent le titre darchevèque de Malazgerd.
"> Daprès les lettres de provision de son successeur, Jean Dav.d. mome de Zorzor, qui
r« 'd a un certain temps en Curie (30 mai 1343; Fontes, IX, 18).

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212 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R I E N T AU M O Y E N -A G E

Ainsi le soin d e x a m i n e r la rectitude de la foi et de s usages de 1’Eglise


d 'A rm é n ie avait-il été confié à un a d v e r s a ir e d é c la r é du p a tria rc h e Jacques.
O r 1’Arm énie, très é p r o u v é e p a r 1'invasion m a m e lü k e de 1336, avait besoin
de secou rs de 1’O cciden t et, a p rè s q u e lq u e s d i f f ic u lt é s 174, le roi Léon V
en voya à A vignon d e u x a m b a ssa d e u rs , le c h e v a lie r T h o r o s M ik ailen tz et le
Franciscain Daniel, qui furent reten us assez lo n g t e m p s à la Curie. Le pape
en e xpliqu ait les raisons dans u n e lettre au roi L éon , d a té e du l er aoüt
1341 : in fo rm é des « e r r e u r s e x é c r a b le s » qui avaient c o u rs d a n s les deux
A rm énies, il avait o r d o n n é une en q u ête et fait r é d ig e r un lib e llu s q u e ses
en voyé s a p p o rte ra ie n t p o u r en p e rm e ttre la disc u ssion en syn ode. Et il invi-
tait le roi à r e c e v o ir le D écret et les Décrétales, a u t r e m e n t dit à soumettre
1'Arménie au droit c a n o n iq u e la t in 175.
P r é p a r é p a r N e rs è s et reçu p a r le c a rd in a l d'Albi, B e r n a r d , le lib e llu s en
question, qu i était intitulé Fid es A r m e n o r u m , fut e n v o y é au c a th o lic o s et aux
a rc h e v ê q u e s de Sis, Saint-Thaddée, Anazarbe, T a rse et Sultan ieh . II ne com-
p re n a it pas m o in s de cent dix-sept articles, accu san t les A rm é n ie n s - à
1'exception des A r m e n i r e u n iti - de n 'a c c ep te r ni le F ilio q u e , ni le con cile de
C h a lc é d o in e , de p r o fe s s e r le m on op h ysism e, d e ne p a s c r o ir e à la transmis-
sion d u p é c h é o rigin ei; on leu r rep ro ch a it de r e b a p t is e r c e u x q u i avaient
r e ç u le b a p t ê m e selon le rite grec o u latin. O n rec on n a issa it bien que
1 'u sage d e m ê le r l'eau au vin d u calice avait été introduit d e p u is trente ans
en P etite-A rm én ie et vingt-cinq en G ra n d e -A rm é n ie , m a is o n relevait les
p r o p o s de c eux qui affirm aient q u e c'était là u n e s é d u c tio n diabolique,
c o m m e les e rr e u r s p rofessées p ar un va rta b e d de la p r o v in c e d'Arges, Me-
khitar. L 'a u t e u r insistait su r ce qu e les A r m é n ie n s de G ra n d e -A rm é n ie
c o n s id é ra ie n t le u r église c o m m e a p o s to liq u e (d u fait d e sa fo n d a tio n par
1'apôtre T h a d d é e ) et q u e seuls les v a rta b e d ven an t de G ra n d e -A rm é n ie
étaient c o n sid é ré s c o m m e des m aitres en C i li c i e 176; il signalait 1’existence
d e s d e u x catholicoi de s A g h o u a n s et d 'A gh tãm ar, d o n t 1'autorité diminuait
c elle d u cath olicos résidant à Sis. II mettait en fin en d o u t e q u e 1'union for-
m u lé e en 1288 eüt reç u a lo rs u ne a d h é sio n u n a n im e , et relevait les opposi-
tions qui s'étaient manifestées.

174 B aluze, V ita e p a p a ru m A v e n io n e n s iu m , nouv. éd . p a r G. M olla t, I, p. 221 : les A rm é n ien s


e o d e m a n n o (1336) fu e ru n t s u p e ra íi et p la n itie m a m itte n te s p e te b a n t m o n la n a m , sperantes subsi-
d iu m E c c le s ie et regis P h iíip p L C e s t alo rs qu e le sultan e x to rq u a d u r o i le serm en t dont
B e n o it X I I le re le v a (s u p ra , p. 207).
175 F on tes, V III, 55. C e s t le l er aoü t 1341 q u e son t p ayés les frais d e T h o ro s et de D aniel
( D ie A usgaben, p. 138).
176 T an d is qu e le ro i et les n o b le s a c c ep ta ien t d a u t r e s m a itres : sans d o u te les D om im -
cain s et les Franciscains.
-

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L ARCHIDIOCÈSE Dfc SU1 TANIEH 2H

Cc long texte, assez con fus du re s t e '77, suscita im m édiatem ent une
(iposte du catholicos Jacques II, qui envoya au pape sa profession de f o i ,Tt.
panicl de Tabiiz, I un des a m b assa d eu rs, avait écrit lui-m êm e une
réponse179. q u * se m b le bien avoir servi de docum ent de travail au synode
que réunit en 1342 le n ou veau catholicos Mekhitar, ct qui rassemblait avec
les archevèques de Sis, Tarse, Anazarbe, Kayseri, K onva et Sivas de n o m ­
breux évèques, d es abbés, des archiprètres, des prètres et des maitres. Cette
réponse rcprenait article p a r article le libellu s des E rro re s itvpositae A m ie-
nis et les réfutait, en affirm ant que l’on avait considéré c o m m e la doctrine
commune à 1 Eglise a rm én ie n n e des opinions isolées, voire con dam n ées. et
que les agissem ents contraires à la discipline ecclésiastique étaient é ga le ­
ment des actes in dividuels et rép rouv és p ar 1'Eglise1d0. L union des Eglises
était un íait réel et accepté p a r t o u s 181. Et, p o u r faire connaitre ces conclu-
sions, une g ra n d e am bassad e, com prenan t un chevalier, G rég o ire de Sar-
giis, le lecteur du couvent franciscain de Sis, Daniel de Tabriz, et d eu x é v è ­
ques, Jean de M e d z q a r et Antoine de T ré b iz o n d e ,82, arriva à Avignon en
1344; elle y sé jou rn a j u s q u e n 1346183.

177 E d ité d a n s F o n te s , V I I I , 57, a v e c les a u tr e s p iè c e s d u d o s s ie r .


17' Fon tes, V I U , 58 (a v a n t la fin d e 1341).
179 E d it é e d a n s R e c u e il des h is to rie n s des cruisades, D o c u m e n ts a rm é n ie n s , II, p. 559-650.
par M a s -L a tr ie e t S c h e ffe r , q u i y o n t jo in t en a n n e x e d e s e x tr a its d e la r é p o n s e d u s y n o d e .
C ette R e s p o n s io a d e r r o r e s im p o s ita s A rm e n is n est d a ille u r s pa s d a t é e ; e lle p o u r r a it a v o i r é t é
éc rite lo r s d e T a m b a s s a d e d e 1344, á la q u e lle D a n ie l p a r tic ip a it é g a le m e n t . - II n 'e s t p a s sa n s
in térèt d c r a p p r o c h e r d e c e lo n g d é b a t la n a ly s e q u e d o n n e le P. T e k e y a n d e s c o n t r o v e r s e s
en tre G r e c s et A r m é n ie n s au t e m p s d e T h e o r ia n o s et d e N e r s è s d e L a m p r o n . L e s G r e c s a u ssi
avaien t m is e n d o u t e la c h r is t o lo g ie a r m é n ie n n e . r é c la m é l u n ific a t io n d e s d a t e s d e s fê t e s
c é lé b r é e s p a r le s A r m é n ie n s a v e c le s leu rs, d e m a n d é 1 'ad d ition d e a u au v in d u c a lic e , to u t e n
p ré sen ta n t d 'a u t r e s e x ig e n c e s ; e u x a u ssi p r a tiq u a ie n t le r e b a p t è m e (P . T e k e y a n , C o n tr o v e r s e s
c h ris to lo g iq u e s en A r m é n o -C ilic ie , d a n s O rie n t. ch ris t. a n a l, 124, 1939). II s e m b le q u e c e s o it e n
m ilieu a r m é n ie n q u e l'é c h o d e c e s c o n t r o v e r s e s se s o it c o n s e r v é , p o u r se r a v i v e r au c o u r s d u
X IV « s iè c le .
IS0 Fon tes, V I I I , 59.
m D a n ie l d e T a b r iz t é m o ig n e a v o i r v u lu i- m è m e le c a t h o lic o s c é l é b r e r la f ê t e d e N o è l et
c o n s a c r e r p u b liq u e m e n t a v e c d e 1’e a u m è lé e au v in d u c a lic e (D o c . A r m , II, p. 5 9 2 ); il a f f i r m e
que N e r s è s a im p u t é a u x A r m é n ie n s d e s u s a g e s p r o p r e s au x T h o u n d r a k it e s o u «fils du
s o le il», s e c te d e la n g u e a r m é n ie n n e d e la r é g io n d e M a la z g e r d (p . 643).
182 L e t it r e d u s e c o n d d e c e s é v è q u e s , q u o n t r o u v e so u s d e s f o r m e s v a r ié e s ( T r e b e s o n e n -
etc.), e s t é c r it T ra p e s s u n d e n s is d a n s u n e le t t r e d 'in d u lg e n c e o ü fig u r e a u s si J ea n M e s c h a -
rensis, d u 1 " s e p t e m b r e 1344 ( C o d e x d ip lo m a tic u s B ra n d e n b u rg e n s is , X X V , 21 0).
,IJ P a ie m e n t d e fr a is a u x q u a t r e a m b a s s a d e u r s e t à le u r i n t e r p r ê t e : D ie A u s g a b e n , p. 263,
285. 321. F o n te s , I X , 45 ( l e t t r e au r o i G u y, d u 11 s e p t e m b r e 1344). C f. T o u r n e b iz e , p. 347-388,
658-670 - q u i d a t e le c o n c ile d e S is d e 1344 e t le c o n s id é r é c o m m e a y a n t é t é te n u p a r C o n s -

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214 LA PAPAUTÉ ET LE S M I S S I O N S D O R I E N T AU M O Y E N AGE

L e s disc u ssion s q u i s 'e n g a g è re n t a lo r s ne n ou s sont pas connues. Mais


le 31 a oü t 1346, C lé m e n t V I d o n n a it acte a u c a th o lic o s M e k h it a r de ce q Uc
les a m b a s s a d e u r s s’étaient p o rté s t é m o in s des e ffo rts qui seraient faits pour
c o r r i g e r les e r r e u r s d o c t r in a le s et disciplin aires, et avaient d e m a n d é de sa
p a rt 1'envoi d u D é c re t et d e s D é c r é t a l e s l84. II c h arg e a it d e u x légats, les évè­
q u e s d e G a è te et de C o ro n , d a c c o m p a g n e r l a m b a s s a d e , en le u r confiant la
m is s io n d 'e x a m i n e r d e s livres a r m é n ie n s p o u r en e x t ir p e r les erreurs, et de
fa ire ten ir u n s y n o d e à cette fin. II le u r d e m a n d a it aussi d e faire établir en
A r m é n i e des m a is o n s re lig ie u se s d o r d r e s latins - D o m in ic a in s, Francis­
cains, C a r m e s , A u g u s t i n s 185 Q u a n t a u x a m b a s s a d e u r s , il le u r témoignait
sa sa tisfaction en élevan t D a n ie l de T a b r iz à 1'archevêché d e B o s r a (26 juil­
let 1346); le n o u v e l a rc h e v ê q u e , qu i était en m ê m e te m p s investi des fonc­
tion s d e v ic a ire d u m in istre d e s F ran ciscain s p o u r T A r m é n i e 186, reprit en
s e p t e m b r e la ro u te de C ilicie avec 1'é v ê q u e de M e d z q a r .
L 'A r m é n i e avait g r a n d b e s o in d'assistance - et, d è s le m o is de septem­
b r e 1349, u n n o u v e l a m b a s s a d e u r , le c h e v a lie r C o n sta n tin C rem a n en s, était
à A v ig n o n , q u 'il ne quitta q u ’en s e p t e m b r e 1351,87. U n d e s légats pontificaux
( l ’a u t r e était m o rt), 1’é v ê q u e de C o ro n , avait r e n d u c o m p t e de sa mission en
a f fi r m a n t q u e le roi, le c a th o lic o s et le p e u p le d A r m é n ie « s'écartaient en
b e a u c o u p d e po in ts d e la vérité d e la foi c a th o liq u e ». Aussi C lém en t VI, le
16 s e p t e m b r e 1350, chargeait*il 1'évêque de P a p h o s d e fa ire p a rv e n ir 6.000
f lo r in s a u r o i C onstantin, m ais aussi d 'o b t e n i r d u roi et d u catholicos des
d é c la r a t i o n s p ré c ise s s u r les poin ts li t ig ie u x ,88. Et un an p lu s tard, lui ren-

tantin II - et J. Gay, L e p a p e C lé m e n t V I et les a ffa ires d O r ie n t , Paris, 1904, p. 132-150. Sur


1'intervention possible d ’autres é v è q u e s dans cette discussion, in fra , p. 224, n. 228.
184 F o n te s , IX, 105; ces livres étaient d e m a n d é s à 1‘é vê q u e de Paphos (ib id l, 107).
185 Ib id -, 92, 100, 101; le p a p e leur d onnait le p o u v o ir d ’a u to ris e r de simples prêtres à
co n firm er.
186 S u r la vie de c e m oine de Saint-Thaddée, d e ve n u Franciscain, cf. Golubovich, IV,
p. 332-362; Pelliot, Z a c h a r ie de S a in t-T h a d d é e , p. 153. - Jean de M e d zq ar bénéficia d ’indults
p o u r lui et p o u r ses p ro té g és ( F o n te s , IX, 85, 86); il sem ble q u ’il s etait fait rebaptiser sous
co n d itio n , et il obtint p o u r lui-même, p o u r R e n ier B alian d ’Arm énie, d o y e n de la Sainte-Sion
à Jérusalem , et N ersès de Gragga, le d ro it de c o m m u n iq u e r ave c les Arméniens non-unis
(ib icL , 88). - Q uant à Antoine d e T rébizo n d e, il se fit tran sférer en 1345 à un siège de Sardai-
gne (Eubel, H ie r a r c h ia , 2e éd., I, p. 493); T o u rn ebize, p. 674, ra tta ch é à c e s prom otions léléva
tion au sièg e a rc h iép isc o p a l d 'H ie ra p o lis du F ranciscain Antonin d'Alexandrie, m i s s i o n n a i r e
mal c o n n u (ci-dessus, p. 209).
187 D ie A u s g a b e n , p. 417, 437, 469. Jean D ardel le c o n n a it sous le nom de Constantin Car
silly (D o c . A rm ., II, p. 29-30). . ^
188 C es r e c o g n itio n e s s u p e r a liq u ib u s in q u ib u s ab e iu s d e m fid e i d is c re p a n t v erita te devai
ê tre ré d ig é e s par l a r c h e v ê q u e d e Nicosie ( F o n te s , IX, 176).

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L A R C H ID IO C Ê S E DE SULTA NIEH 215

voyant son a m b a s s a d c u r , il d e m a n d a i t au roi d o b t e n i r d u l í i l h o l i i u s de s


réponses c la ire s s u r un c e rta in n o m b r e d e poin ts qu i restaient o b s c u r s
dans la lettre q u e ce d e r n i e r avait fait p a r v e n ir au S iè g e A p o s t o l i q u e 1*9. II
était qu e stion d e s r e b a p t è m e s : les lé g a ts avaien t fait s a v o ir q u e tout A r m é ­
nien qui d o u t e r a it d a v o i r été b a p t is é v a la b le m e n t de vra it a v o ir la p o ssibi-
lité d ê t r e b a p t is é à n o u v e a u , s o u s c o n d itio n , se lo n le rite r o m a in ; le c a t h o ­
licos avait r é p o n d u q u il n y avait p a s lie u d a d m i n i s t r e r à n o u v e a u le b a p ­
tême à q u i c o n q u e 1 avait r e ç u s e lo n le rite a r m é n i e n et q u en cas d e d o ute,
on p o u rra it fo rt b i e n d o n n e r le b a p t ê m e s o u s c o n d it io n se lo n ce rite. M e -
khitar se re fu sa it d o n c à v o i r i m p o s e r le rite r o m a in à ses o u a i l l e s 190.
En 1353, I n n o c e n t V I a p p r i t q u e les lettres d e C lé m e n t V I au c a t h o li­
cos n a v a ie n t p a s p u ê tre t r a d u it e s en a rm é n ie n , faute d in t e rp re t e s q u a li-
fiés q u o n n avait p u t r o u v e r ni en A r m é n ie , ni à C h y p re . Aussi le p a p e c h ar-
gea-t-il 1a r c h e v ê q u e d e M a l a z g e r d , q u e devait a c c o m p a g n e r le p r i e u r p r o ­
vincial d e s D o m i n i c a i n s d e T e r r e Sainte, G u i ll a u m e B o n e t, d 'a l l e r lu i-m ê m e
en A r m é n i e pour effe c tu e r cette t r a d u c t i o n 191. E n t re tem p s, d a ille u rs,
1'ancien c a t h o l ic o s J a c q u e s II, re n tré en grâce, était v e n u à A v ig n o n , c e q u i
avait sa n s d o u t e p e r m i s d e c l a i r e r la C u r i e 192. N e r s è s , en tout cas, partit
p o u r 1’O r ie n t ; n o u s s a v o n s q u ’il m o u r u t d a n s l'ile de C h y p r e , laissant au col-
lecteur d e la C h a m b r e a p o s t o l i q u e u n a n n e a u et un petit s c e a u d ' a r g e n t 19J.
II n e s t p a s e x c lu q u e la d i s p a r i t i o n d e ce p e r s o n n a g e ait r e n d u b e a u c o u p
plus aisé le d i a l o g u e e n tr e la P a p a u t é et 1’A rm é n ie . . .

,IWT rès lo n g te xte, d a n s F o n te s , IX, 192 (cf. aussi 190), du 19 s e p te m b r e 1351. Le c a th o li­
cos avait r e c o n n u 1’E g lise d e R o m e c o m m e se u le ca th o liq u e, a yant la se u le vraie foi, le seul
baptêm e, le se u l a c c è s au s a l u t : on lui d e m a n d e s'il cro it q u ’il n ’y a pas de salut en d e h o rs
d e lle . II a v o u a it le p a p e c o m m e v ic a ire du C h rist et lui p ro m e tta it o b é is sa n c e , sa u f les d ro its
de son é g lise; o n lui d e m a n d e s ’il c o n s id è r e les p ro v in c e s s o u m ise s à 1'apótre T h a d d é e
c o m m e re le v a n t d e la ju r id ic t io n d e P ierre et de p r é c is e r c e q u ’il e n te n d par ju rid ic tio n du
Saint-Siège (a v e c un q u e s t i o n n a ir e très détaillé). Etc.
1,0 II y a v a it e u v in g t p o in ts su r le s q u e ls les légats avaien t a p p o r té d e s in s tr u c tio n e s .
C e t a it d é s o r m a is a u x p r é la ts c h y p r io t e s (p a tria rc h e d e Jérusalem , a r c h e v ê q u e d c N icosie,
é vêq u es d e P a p h o s et L im a s so l) q u e le p a p e s en r e m e tta it p o u r la suite d e s d iscu ssio n s.
191 F o n te s , X, 20 ( l cr o c t o b r e 1353) et 59 (18 ja n v ie r 1355); 1'a m b a ssa d e u r d es A rm é n ie n s
était un B o lo n a is : D ie A u s g a b e n , p. 522 (10 ja n v ie r 1353).
,M T o u r n e b iz e , p. 686. Cf. M. A. V a n d e n O u d en rijn , d a n s O r ie n s c h r is tia n u s , XLIII, 1959,
P 113-114.
,VJ Instr. m isc. 4594, f° 15, 16 v° (1361-1363). Un a u tre Uniteur, D o m in iq u e , fut p o u rv u le 26
avril 1363 d e 1 'a r c h e v ê c h é d e M a la z g e rd (E u b el, H ie r a r c h ia , I, p. 324; F o n te s , XI, 20 et 28); il
fut a u to r is é à e m m e n e r v in g t fr è r e s P r ê c h e u rs en G ra n d e-A rm én ie , le 8 o c t o b r e ( F o n te s ,
XI, 48).

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216 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R I E N T AU M O Y E N AGE

M a is ce d ia lo g u e était d é s o r m a is 'bien réduit. Le roi Constantin III


m o u r a it en 1363 d a n s un clim at d e crise. D éjà son accession à la couronne
avait été p r é c é d é e p a r 1 'assassinat de son p r é d é c e sse u r, G u y de L u s ig n a n
victim e de l'hostilité de n o m b r e u x A r m é n ie n s à 1'avènement d'un Latin sur
le trô n e cilicien. P e u avant sa m ort, le con c ile d e Sis, tenu en 1361, avait été
m a r q u é p a r u n e réa c tio n c o n tre les u sa g e s latins, n o ta m m e n t contre 1'addi-
tion d e a u au vin d e la c o n s é c r a t i o n 194. En 1374, c'est à n o u v e a u un Lusi­
gn an , L é o n VI, qui accé d a it au trône, et la c h r o n iq u e de Jean D ard el nous
p e r m e t d e c o n n a it re le clim a t d 'a n t a g o n is m e rituel d a n s lequel se produisit
cet a v è n e m e n t 195. Etant p e r s o n n e lle m e n t d e rite latin, L é o n refusa de se
fa ir e s a c r e r p a r le c a th o lic o s P a u l Ier; il entendait r e c e v o ir l onction royale
d e s m a in s d 'u n d e s D o m in ic a in s q u i 1'avaient a c c o m p a g n é , 1’évèque de
N e b r o n . Il fallu t discuter, et, fin alem en t, L é o n V I fut sacré d e u x f o i s 196. Son
a v è n e m e n t , su rv e n a n t p e u a p r è s le d é b u t de la c r o is a d e de P ie rre Ier de
C h y p r e , c o ín c id a it avec le p a ssag e d e G o r h ig o s sou s 1'autorité de ce der­
n ie r, c e q u i p o u v a it ne pas p la ire à tous les A r m é n ie n s ; en m ê m e temps, les
M a m e l ü k s c h e r c h a ie n t à é lim in e r la b a s e q u e le petit r o y a u m e pouvait
o f f r i r à u n e c ro is a d e , et n o m b r e d ’A r m é n ie n s r e g a r d a ie n t le u r roi latin
c o m m e u n o b s t a c le à u n a c c o r d avec le sultan. F in alem en t, a b a n d o n n é par
les « fa u x A r m i n s » et p a r le cath olicos, L é o n dut se r e n d r e aux Egyptiens, et
le r o y a u m e d i s p a r u t ainsi en 1375. L ’U n io n n'avait p a s été d é n o n c é e ; elle
su rv iva it, m a is d a n s d e s c o n d itio n s très différen tes, le ca th olic os étant
d é s o r m a i s p l a c é s o u s 1 'a u to rité d u sultan.
D 'u n b o u t à l'autre, c e p e n d a n t, 1'histoire d e 1'Union a rm é n ie n n e vue
p a r le r o i d e C ilic ie et le c a th o lic o s était restée d a n s la lign e d e s accords de
1199 et d e 1288 : r e c o n n a is s a n t la p r im a u t é r o m a in e et la ju rid ic tio n ponti­
ficale, s a u f à lim it e r celle -c i d a n s so n a p p lic a tio n , les A r m é n ie n s conser-
v a ie n t le u r s rites et a c c e p ta ie n t de r e c h e r c h e r u n e h a r m o n is a t io n dans la
fo rm u la tio n d e l e u r C re d o a v e c les d o c t r in e s d e 1'Eglise catholique. Les
in s ista n c e s d e la P a p a u t é a v a ie n t a m e n é , a v e c p lu s o u m o in s de su c c è s 197,
1 e li m in a t io n d e c e rt a in s u s a g e s q u i p o u v a ie n t p r é s e n t e r d e s relents de
m o n o p h y s i s m e , o u m a r q u e r d e s d i s c o r d a n c e s a v e c 1'Eglise latine au contact

1.4 T o u m e b i z e , p. 696 et suiv.


1.5 Urbain V le r e c o m m a n d a it aux a rc h e v è q u e s , évè q u es, n o b le s et autres du royau
d 'A rm é n ie ( Fontes, XI, 73).
196 C h r o n iq u e de Jean Dardel, d a n s Docum ents arméniens, II, p. 65-66. ^
II ne faut pas n é g lig e r les a ss ertio n s ré p é té e s de c e u x qui d é n o n ça ie n t la d,ss,m “ * ar.
d e s A rm é n ie n s, a d o p ta n t s e u le m e n t en a p p a r e n c e les c o n c e s s io n s faites à Rome. C . a
c h e a r m é n ie n n e d e 1330 a u p r è s d e s B y z a n tin s : M iklosich-M ueller, I, n° 71-72.

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L A R C H I D I O C Ê S E DE SU LTA N IE H
217

de Iaquelle vivaient les A rm é n ie n s. M a is 1'Eglise de Cilicie et ceux qui sui-


vaient ses erre m e n ts, n o t a m m e n t a u t o u r de Z a c h a rie de S aint-Thaddée,
peut-être sou s 1 in flu e n c e d e s Franciscains, pouvait sc c o n s id é re r c o m m e
fidèle à ses rites n a tio n a u x. Le conflit suscité p a r Nersès, et qui c o m p liq u a
pendant pres d e vingt a n s les r a p p o r t s arm éno-latins, tém oignait c e p e n d a n t
de 1'existence d un a u tre c o u ra n t d a n s le m o n d e a rm é n ie n : les A r m é n i e n s -
Unis, d é sireu x e se o n d r e d a n s 1 É g lise universelle, ne m on tra ien t pas la
même vo o n *e ^ n ia in te n ir les rites traditionnels. Et, lo rs q u e N e rs è s o p p o -
sait 1 E g ise e ran e -A rm é n ie , s c h is m a t i q u e l98, à celle de Petite-Arm énie,
il négligeait cet a spect p a r t i c u l i e r : c est en G ra n d e -A r m é n ie q u e se trou-
vaient ceux qu i s a c n fia ie n t le p lu s v o lo n tie rs les usages a r m é n i e n s . . .

b) «A r m é n ie n s -U n is » e t F rè re s U n ite u rs

L histoire d e s F rè r e s U n ite u rs ( O u n ito r q ) est sans doute, g râ c e a u x tra-


vaux d u P. V a n d e n O u d e n r i j n 199, l’un des m o m e n ts les m ie u x c o n n u s d e
1histoire d e s m is s io n s m é d ié v ale s. Elle se places d a n s la p e r s p e c t iv e d e
1Union des Eglises, so u s 1 aspect d 'u n e « la tin isa tio n » sans c o m p r o m i s .
T a n d is q u e le g r o u p e d e M a k u , sous 1'impulsion de l a r c h e v ê q u e Z a c h a ­
rie, se m ettait à 1'école d e s F ra n c isca in s et d é velo pp ait, avec Jean de Z o r z o r ,
une f o r m e d e sy n th è se d e la p e n sé e latine et de la tradition a r m é n ie n n e , u n
autre co u ve n t, d e f o n d a t io n p lu s récente, celui de Qrnay, n o n lo in d e N a k -
hidjevan, s’in té re ssait lui aussi à la pe n sé e latine. Le fo n d a te u r, Jean de
Qrnay, n e v e u d 'u n b a r o n a r m é n ie n qui protégeait le cou ven t, d is c ip le d u
va rtabed Isaie q u i e n se ig n a it à G ayletsor, en S io u n ie - d o n t il avait fait u n
centre d 'é t u d e s m o n a s t iq u e s , c o m p a r a b l e a u x u nive rsité s o c c id e n ta le s , en

191 Illi de Armênia m in ori . . . sunt de ecclesia majoris Armenie (D oc. Arm., II, p. 592).
1,9 A c ó té d e 1'article d é jà ancien de Tournebize, Les Frères Uniteurs, d ans R evu e de
1'Orient chrétien, X X II, 1921-1922, p. 145-161, 249-279, p rennent place c e u x du P. M.-A V a n d en
Oudenrijn, The monastery of Aparan and the Armenian writer fra Mxifarit, d an s AFP, I, 1931,
P- 265-308; Bishops and archbishops of Naxivan, ibid, VI, 1936, p. 161-216 (à c o m p lé t e r p a r
R- Loenertz, E vêqu es dominicains des deux Armènies, ibid, X, 1940, p. 275-278); Uniteurs et
dominicains dArm énie, d a n s Oriens christianus, XL, 1956, p. 94-112; XLII, 1958, p. 110-133, et
XUII, 1959, p. 110-119; L e « S o u r Petrosi * . . . , cité plus loin; Das Offizium des hl. Dom inikus des
Bekenners im B revier der ostarmenischen Fratres Unitores, Rom e, 1935 (Institutum h isto ric u m
FF-PP., D is se rta tio n e s histo ricae, IV); Eine armenische Uebersetzung der Sum m a Theologica des
hl Thomas, d a n s D ivu s Thomas, 1930, n° 3, p. 245-278; Eine alte armenische Uebersetzung der
Tertia pars der theologischen Sum m a des hl. Thomas von Aqutno, B ern e, 1955; et su r to u t Lin-
%uae haicanae scripiores, d éjà cité, o ú figure un a p e rç u h istorique su r les Uniteurs.

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218 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O R IENT AU M OYEN-AGE

restant très attaché aux traditions arm éniennes, qu il défendait contre les
influences latines 200 —, se mit en rapport, en 1328, avec 1 évêque de Maragha
Barth élem y da Poggio, lequel était un th éologien et un philosophe
c o n n u 201. B arth élem y vint à Qrnay, en 1330, à 1’occasion de la réunion d ’un
synode réuni dans ce couvent p o u r étu dier les doctrines latines; c est ce
synode qui p ro c la m a ce qu 'o n a appelé 1'Union de Q r n a y 202.
Le su périeu r de Q rnay et ses moines, com plètem en t acquis aux doctri-
nes latines, offrirent en 1331 leur m onastère à 1 'o rd re dominicain, dont plu-
sieurs prirent 1’habit. Et, sous 1'influence de B a rth é le m y da Poggio et d u n
autre évêqu e dom inicain, Jean de Florence, évêqu e de Tiflis, Qrnay devint
un centre d'études de théologie et de philosophie; les traductions d ouvra-
ges latins en arm én ien se multiplièrent, notam m ent sous la plum e de Bar­
thélem y - qui m ourut dans ce couvent, en 1333 - : la Bible, le missel, le bré-
viaire dom inicain, la S u m m a c o n tra G en tile s de saint T h o m a s d Aquin et
b ie n d autres traités furent ainsi mis à la disposition des religieux armé­
niens, qui découvraient avec enthousiasm e la richesse et la rigu eu r de rai-
son n em en t des philosophes et des théologiens d ’O c c id e n t 203.
Q rn a y n était pas le seul centre oú se développait une pareille activité
d e traduction - en Petite-Arménie, le v ê q u e dom in icain T h a d d é e et le futur
a rc h e v ê q u e franciscain de Séleucie, Pons, traduisaient en arm én ien l'un
l'office dom inicain, 1'autre le rituel latin, tandis qu e le prince B o h é m o n d de
L u sig n a n traduisait en latin le rituel arménien, dont D aniel de T abriz faisait
de sa part h o m m a g e au Saint-Siège en 1341204 m ais le caractère systéma-
tique de ces traductions mérite d'être souligné. Enfin un m a n u e l à 1’usage

200 Mais Isaíe nad m ettait pas les idées monophysites. On a vu que Jean XXII lui avait
adressé une profession de foi en 1321.
201 Un autre évêque latin, Barthélem y de Tabriz, avait déjà discuté avec le v ê q u e armé­
nien de Tabriz, en 1321, et il en est question dans une lettre d’Isaie à cet evèque (L in gua e hai­
ca n a e scr., p. 22).
202 U n ite u rs et d o m in ic a in s d 'A rm é n ie : étude des m em bres et des travaux du synode.
203 Cf. une lettre de Guillaume Saurat, lecteur franciscain à Maku, qui annonce à son cor­
respondant qu'il «enlèvera Thomas du coeur» des Arméniens : Loenertz, La société, p. 191. Le
P. Van den Oudenrijn a relevé une parfaite identité entre les traductions en arménien altri-
buées à B arthélem y da Poggio et celles d o u v r a g e s latins en éthiopien attribuées au pseudo-
B arthélem y de Tivoli, évêque de Dongola ( L e v ê q u e d o m in ic a in fr. B a rth é le m y , fo n d a te u r sup-
p o s é d un c o u v e n t dans le T igré . dans Rassegna d i stu d i e tio p ic i, V, 1946. p. 7-16). Des colophons
datés de 1334, 1337, 1340, 1344, figurent dans les manuscrits conservés.
i04 G olubovich, IV, 333-334 : dans ce dern ier cas, il s’agissait sans doute de mettre à la dis­
position du pape ce rituel pour faciliter 1’étud e des co n ve rg en ce s entre les deux liturgies
B o h ém o n d devait être peu après assassiné avec son frère, le roi Guy, en 1342.

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L AR CH ID IO C ÊSE DE SULTANIEH 219

des controversistes( le «G la iv e de P ie r re », sortait du scriptorium de


Qrnay205-
L ’enthousiasme du g ro u p e de Q rn a y allait assez loin p o u r q u e n 1337
on s y décidât à a b a n d o n n e r la liturgie traditionnelle p o u r la liturgie latine.
£t une quinzaine de couvents s associèrent en 1344, dans une congrégation
qui prit le n o m °*e F r è res Uniteurs.
Le zèle des A r m e n i re u n iti, p o u r e m p lo y e r une expression de Nersès
Balientz (dont 1 a p p a r t e n a n c e à 1o r d r e dom inicain est souvent affirm ée
sans être a b s o lu m e n t certaine), allait si loin qu ils scrutaient les usages
arméniens p o u r y d é p is te r les traces de m onophysism e. Or, pendant les dis-
cussions entre A r m é n ie n s et Byzantins déjà, au X I I e siècle, la validité de la
formule utilisée p a r les p r e m ie r s p o u r le ba p tê m e avait été mise en doute
par les s e c o n d s 206; en 1333, cette question apparait p o u r la p re m iè re fois
dans les registres d e la ch an c e llerie pontificale, lorsque les Frères P rê ­
cheurs en m ission d e m a n d è r e n t au p a p e et obtinrent de lui le droit de
conférer à n o u v e a u le b a p t ê m e , sous condition, à ceux qui avaient reçu un
baptême dont la validité était d o u t e u s e 207. Les ordinations firent 1’objet de
critiques a n a lo g u e s . Et l’on peut se d e m a n d e r si celles-ci ém anaien t des
Dominicains é ta b lis a u x côtés des m onastères arm éniens, ou des A r m é ­
niens eux-m êm es.
L 'in flu e n ce d u g r o u p e de Q r n a y dépassait sans doute les couvents : en
1342, il est q u e s t io n d e s n o m b r e u x fidèles professant la foi c ath oliqu e selon
le rite de 1 'église r o m a in e , en se séparan t des schism atiques et des infidèles,
pour lesquels on avait bâti à S elm a s une église N o t r e -D a m e de C o n s o la ­
tion208. U n e c o m m u n a u t é a r m é n ie n n e de rite latin tendait ainsi à se d é fin ir
en G r a n d e -A r m é n ie à c ô té d e s A r m é n ie n s restant fidèles à la liturgie et a u x
coutumes n a tio n a le s, q u i p o u vaien t, avec le catholicos de Sis et son exar-
que résidant à M a k u , être en u n io n avec 1’Eglise de R om e. II est inutile
d insister su r les d a n g e r s q u e présen tait cette situ ation 209.

205 Cf. M.-A Van d en O udenrijn, L e « S o u r P e t r o s i», v a d e -m e cu m p o u r les m is s io n s a s ia tiq u e s


du X I V * siècle, d an s N e u e Z e it s c h r if l f ü r M is sio n s w is s e n s ch a ft, I, 1945, p. 161-168.
204 T o u m eb iz e, p. 236-238. La questio n du re b ap têm e a été traitée par Van den Oudenrijn,
The m on a s te ry o f A p a ra n .
207 Fontes. VII, 2, 139 (3 o c to b r e 1333; bulle F id e liu m n o v e lla p la n ta tio ).
m i b i d , IX, 5 (18 juillet 1342 : 1 e d ite u r identifie la c iv ita s S a la m a s t à Amastris du Pont;
nous y re co n n aítrio n s plutôt Selm as). Le pape d o n n e une ind ulgen ce à ceux qui la visiteront,
a la priere d u n fre re A b ra h a m de G rande-Arm énie. Un Arménien in c o r p o r a tu s e t u n itu s E c c le -
siae R o m a n a e ( i b i d , 86) n ’est-il pas aussi un A rm énien de rite latin?
2(* Dans les q u e stio n s p o sé e s au ca th o lic o s en 1351 figure c e lle -c i: les A rm énien s qui
observent le rite ro m a in agissent-ils bien ?

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220 LA PAPAUTÉ KT LES M IS S IO N S D O R I E N T AU M O Y E N A M

Les Uniteurs, a p rè s la mort de Jean de Qrnay, franehissaiem un nou­


veau pas. Jean avait placé ses m on astères sous le c on tròle des Frères l»rc.
cheurs, dont q u elqu es-u n s devaient ré sid er dan s e h a q u e couvent et iissistcr
aux chapitres g é n é r a u x 210. Deux religieux, Eleu thòre (A w a g t ê r ) et Thomas
de Jahouk vinrent à Avignon, p o u r sou m ettre à Innocent VI les constiiu-
tions des fra tres de M a jo r i A rm ê n ia u n ito r e s n u n cu p a ti, qu e le pape
a p p r o u v a le 31 ja n v ie r 1356. Le n ou vel o r d r e était assujetti a la legle de
saint Augustin et aux constitutions des F rè re s Prêch eurs, c h aq ue couvent
étant so u m is à un prieur, et la ré u n io n des prieu rs élisanl un gouverneur.
Les U n iteu rs se voyaient placés sous 1’autorité du m aitre général des Freres
P rêch eurs, qu i avait, sur eux, ainsi q u e le vicaire g é n é ra l de la Société des
F rè re s P érégrinants, droit de visite211. Q u e lq u e s m o is plus tard, les Basi-
liens d'Italie, n ou s 1'avon s vu, étaient à leu r to u r o r g a n isé s sur le modele
d e s U n i t e u r s 212. Il restait aux Uniteurs à b é n é fic ie r d e s privilòges dont jouis-
saient les D o m in ic a in s de la Société des P éré g rin an ts : U r b a in V les leur
a c c o r d a le 20 n o v e m b r e 1362, ce qui achevait d a s s i m i l e r la siluation cano-
n iq u e d e s re lig ie u x latins et a rm é n ien s u n i s 213.
A van t 1356, les pap es avaient oc c a sio n n e lle m e n t p o u r v u à des sièges
a r m é n ie n s en y p ré p o s a n t des Basiliens, tel Jean David, m o in e de Zorzor,
fait a r c h e v ê q u e d 'E d e s s e en r e m p la c e m e n t d ’un M a rtin m ort à la Curie
s o u s le pontificat d e B en oit X I I (le siège d ’E d esse étant sans d o u te residen-
tiel p o u r les A rm é n ie n s bien q u e 1’a rc h e v ê q u e ait vécu en Occident), en
1343214. En 1353, trois a rc h e v ê q u e s sont p o u r v u s p a r In n ocent VI de sièges
en G r a n d e -A r m é n ie . Deux B a s i l i e n s : Z a c h a rie M a rc h a rt, qui remplace
Z a c h a r i e M a n u e l ia n à S a in t-T h a d d é e ; Jean, m o in e à G o lp , succédant (en
v e rt u d u n e r é s e r v e sp éciale de C lé m en t V I ) à un G r é g o i r e s u r un siège voi-
s i n 215. A K hilat, q u e n o u s c ro y o n s re c o n n a itre sou s la l o r m e Galadensis,

210 Loenertz, La société, p. 143-147, a élu cid é les relations entre Uniteurs et Dominicains,
en e xp liq u an t le fait qu e Q rnay n était pas entré totalem en t dans 1’o rd re par ce que les Armé­
niens ne p o u v a ien t r e n o n c e r ni à 1’usage de la viande, ni à la pro priété foncière, qumterdisait
la règle d o m in ica in e.
211 Ripoll, II, 246 (Fontes , X, 73). S u r les ra p p o rts e n tre Uniteurs et Dominicains, cf. les
r e m a r q u e s de Loenertz, La société, p. 146-150. En 1381, 1 electio n du g o u v e rn e u r est soumise à
c o n firm a tio n pa r le m aitre général, et 1’o rd re d es Uniteurs placé d ans la situation d une «pro­
v in c e d o m in ic a in e» , c o m m e I a m o n tré le P. Loenertz.
212 Ripoll, II, 248 ( Fontes, X, 77). Supra, p. 198-199.
2,3 Fontes, XI, 4.
2M Fontes, IX, 18, 34, 63; la bulle est ad ressé au clergé, au peuple, aux suffragants.
215 Fontes, X, 15. La p ro m u lg a tio n de cette réserve est sans d o u te en rapport avec la pre
s e n c e à la C u rie d e d e u x m o in e s du d io c è se en question, qui b é n é fic ière n t d indults pontifi-

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L'ARCHI D IO C È S E DE S U LT A N IE H 221

c’eSt un D o m in ic a in , T h o m a s d e Tabriz, qu i r e m p la c e le B a silie n C yriaque,


pourvu de ce siège en 1351 p a r C lé m e n t V I 216.
Après 1356, ce ne sont p lu s q u e de s U n iteu rs qu i sont n o r m a le m e n t
pourvus de sièges a rm é n ie n s. T h o m a s de Jahouk lui-m ém e, qui avait pré*
senté au p a p e les con stitution s d u n o u v e l ord re , fut fait é v ê q u e de Na-
khidjevan217, et ce siège, s a u f lo rsq u 'il a p p artin t à Jean de G a ille fo n ta in e et
au futur Jean III d e Sultan ieh , fut d é s o r m a is p o u r v u d ’U n ite u rs : en 1419, le
pape recon n u t au c o u v e n t de s U n ite u rs de N a k h id je v a n les d ro its d u n c h a ­
pitre diocésain, ceci incluan t 1’élection de 1'évêque. A Nersès, c e s t un Uni-
teur, D o m in iq u e , qui su ccéd ait en 1363 su r le siège a rc h ié p is c o p a l de
Malazgerd.
Le siège de S a in t-T h a d d é e , n ous 1’avon s vu, passait aux U n ite u rs qui
avaient g a gn é le c o u v e n t d e Zorzor, dès avant la fin du X I V e siècle. En 1423,
le siège de S u lta n ie h lu i-m èm e, siège latin ju s q u e là, était p o u r v u d ’un Uni-

caux ( F o n te s , X. 24); étaient-ils venus d em an der au pape d ’intervenir dans cette n o m in a tio n ?
Le siège dont il s a g i t est dit A p a m ie n s is (à lire A p a u n e n sis ? Les deux lectures sont po ssibles :
cf. Reg. Av. 122 f° 5 7v°-5 8 et Reg. Vat. 224 f° 89); on ne peut retenir 1’identification tradition-
nellc avec A p a m é e de Syrie. qui avait alors un archevêque titulaire, O rto lf d Alzenbruck,
lequel vivait au d io c e s e de Passau (Eubel, I, 94; Uhlirz, Q u e lle n z u r G e s c h ic h te d e r S ta d t W ie n ,
II, 1, p. 111 et 170). En effet, il s a g it bien d ’un siège résidentiel, la bulle de provision étant
complètee par les lettres habituelles au clergé, au chapitre, au peuple, aux vassaux du prélat,
ainsi qu au so u v era in du lieu, désigné com m e étant n o b ilis v ir K a r o c h , d o m in u s Asiae (que
nous n avons pu identifier avec certitude). Nous penchons donc p o u r re co n n aitre d an s cet
archevêché un siege ép isc o p a l arm énien qui nous est connu d a u t r e part, celui d Apahuniq,
canton situé d ans la vallée su p érieu re du Murad-su, au nord de M alazgerd (très p ro c h e par
conséquent du d io c è s e de Saint-Thaddée). - Le monastère Saint-Grégoire de G o lp est cité
dans un c o lo p h o n de 1450 sous le nom de K o lb alias Sukias-vank, avec le vo ca b le d e saint
Grégoire lll lu m i n a t e u r (nous d e v o n s cette indication au Dr Thierry). Son e m p la c e m e n t n e s t
pas connu, mais la bulle le place au d iocèse de Saint-Thaddée.
214 Le p r é d é c e s s e u r d e Cyriaque, Jean, est cité dans une d édicace de R ichard Fitz-Ralph à
Nersès de M alazgerd et à frère Jean, e le c to C la te n s i in A rm ê n ia m a jo r i ( O r ie n s c h n s tia n u s ,
X L ln 1959 p 1 10-119); le d io c è se M e s s in en s is oú se trouvait le m onastère a u q u el apparten ait
Cyriaque est sans d o u te celui de Misis plutôt que celui de Messine. Cf. notre article, La
papauté et les m is s io n s d O r ie n t a u M o y e n -A g e , cité supra, p. 181. Thom as, D om in icain a r m é ­
nien. appartenait-il au g ro u p e de Q rnay? II sem ble plutôt q u i l s a g is s e d u n A rm énien entré
dans l o rd re d es F rères Prècheurs. - L’identification traditionnelle de ce siège avec « Galaad,
en Transjordanie ou en Arabie P étrée-, dépendant d Alexandrie. vient d u n e notation de la
Chambre A po sto lique (O blig alio n es et Solutiones, t. XXXII, f» 1 17) oú C yriaque est dit e p is c o -
Pus G o la c e n s is in p a tr ia r c a tu A le x a n d rin o , tandis que Thom as est bien dit a r c h ie p is c o p u s G a la -

densis.
w Son c o m p a g n o n E le u lh è re d cven ait le prem ier g o u v e rn eu r des Frères Unileurs. T o u s
deux a u ra ie n . p è ri d a n s un naulrage, le 14 avril 1358 ( t . ngua* haicanat scrip,ores. p. 29).

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222 PAPAUTÉ FT LFS MISSIONS IVOKIFNT Al MOYI S M .l

teur, auquel succeda en 1425 un m oin e du couvent d A p a r a n . Thom as; |4.


siege de Tiflis passait aussi en 1425 à un religieux du m è m e o rd re c‘est
dire q u e 1'assimilation des A rm é n ie n s-U n is aux Latins etait complete. lc
transíert d un Jean de Tabriz, Uniteur, du siège de N a k h id je v a n a celui de
Caffa en apportant la pre u v e (1377)2**. A Caffa, d ailleurs, le couvent domi-
nicain de Saint-Nicolas était passé aux Uniteurs, qui en firent c om m e lc
chef-lieu de leur o r d r e 219.
En fait, les Freres Uniteurs s'étaient à peu près substitues aux Dumini-
cains d e la m ission d Arm énie. A 1’exception de la langue - Schiltberget les
a en te n d u s c é lé b r e r en arm é n ien - ils étaient parfaitem en t assim iles au rite
latin, et m ieu x placés q u e des étrangers p o u r agir en m ilieu a r m e n ie n 220.
T o u te fo is une réaction se manifestait dès le m ilieu d u X IY V siècle. L e v c q u e
de Tiflis Jean de Florence, particulièrem ent attentif à l’U n io n armenienne
(il avait re m p la c é a u p rè s du g ro u p e de Q rn a y B a r th e le m y d a Poggio), avait
signalé a C lé m e n t V I qu e des schism atiques s'efforçaient de d é to u rn e r les
fid e le s de 1’Eglise r o m a in e 221.
G r é g o i r e X I avait été attentif au scan dale q u e suscitait in te r populares
1'usage des rebaptèm es, très largem ent c o n fé ré par les Un iteu rs et les
D o m in ic a in s, c o m m e du reste ailleurs p ar les Franciscains, ainsi qu e celui
d e s réo rd in ation s. En 1370, à 1'intention des F ranciscains de Chine, il avait
défini u ne fo r m u le m oins choquante. Il 1’imposait, le 6 m a rs 1374, aux
D o m in ic a in s, au m om en t oü il adressait à ceux-ci une série d e lettres qui
intéressaient la G ra n d e -A rm é n ie 222. Le b a p tê m e p ar p ro v isio n rempla^ait
ainsi le r e b a p té m e ; mais il n'est pas certain q u e ceci ait suffi à apaiser les
rancceurs. En tout cas, un m o u v e m e n t a u q u e l présidait le va rta h e d Malachic
d e C r im é e se dessina vers 1380: on restaura les étu des th é o lo g iq u e s selon
la tradition a rm é n ie n n e ; on p e rsécu ta les A r m é n ie n s de rite latin, en les
chassant de leurs c o u v e n t s 223.

2,1 Cf. M. A. V a n d e n O u d e n r ijn , U n ite u rs e l D o m in ic a in s d A r m é n ie . L o r d r e des Uniteurs


d a n s O rie n s c h ris tia n u s , 1959.
2IV R. L o e n e r t z , La société, p. 105-108 et 197-198.
220 L e s F ra n c isc a in s , d e le u r c ô té , n e m a in t e n a i e n t q u e l e u r r é s i d e n c e d ’ E r z e r u m , ainsi
q u e c e l l e d e T iflis, q u i p o u v a it aussi a g ir su r les A r m é n i e n s . - L e P. L o e n e r t z a a v a n c é que lc
d é v e l o p p e m e n t d e la c o n g r é g a t i o n d e s U n ite u r s p o u v a i t a v o i r su s c ité la p r e m i é r e suppres-
s io n d c la S o cie ta s P e re g rin a tiu m , les A r m é n i e n s a y a n t p r is la p l a c e d e s D o m in ic a i n s dans les
m is s io n s .
221 F on tes, IX , 74 (11 j u i l le t 1346).
222 R i p o l l , II, 279 (51 b a p tiza tu s es, n o n te re b a p tizo , sed si n o n d u m b ap tiza tu s e s . . . ; si o rd i­
n a l us es rite, n o n te re o rd in o , sed s i . . . ) ; cf. G o l u b o v i c h , V, 149 e t suiv.
221 L h i s t o ir e d e c e t t e p e r s é c u t i o n a é t é r a c o n t é e p a r M e k h i t a r d A b a r a n ( L in g u a e haica-
n a e s c rip io re s . p. 224-227); à A p r a k o u n i k , M a l a c h i e d e C r i m é e fait j e t e r en p r is o n le v a r t a b e d

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L 'A R C H ID IO C È S E DE SU LTA N IE H 223

D'autres v a rta b e d e ssayèren t de t ro u v e r un terrain d e n t e n t e ; m ais il est


certain que les Uniteurs, qu i à le u r a p o g é e 224 affirm aient c o m p t e r sept
cents religieux rép a rtis en tre c in q u a n te couvents, p e rd ire n t b e a u c o u p de
terrain à la fin d u X I V e siècle et au d é b u t d u X V e siècle, p o u r des raisons
d'ailleurs oú le conflit t h é o lo g iq u e et d isciplin aire ne tenait peut-être pas
toute la p l a c e 225.
L en treprise d e s U n ite u rs pré se n te un intérêt p a r t i c u l i e r : elle tém o ign e
de la réalité d u n e p é n é tra tio n c u ltu re lle qui n ’a rien de su rp re n a n t — le
prestige de la sc o las tiq u e o c c id e n ta le était à son plu s haut point - à partir
du m om ent o ú les A r m é n ie n s sé t a ie n t effectivem ent mis à étu d ie r les écrits
occidentaux. M a is cette p é n é tra tio n avait été très loin, a m en an t les reli­
gieux du g r o u p e d e Q r n a y à r é c u s e r ces m ê m e s usages a rm é n ie n s q u e les
prélats de Cilicie s'effo rç aie n t de justifier et de m a in tenir tout en tém oi-
gnant de le u r fidélité au p a p e et de leu r ad h é sio n à la foi de 1’Eglise de
Rome.

Sarkis et ses d i s c i p l e s ; à G o l p , le v a r t a b e d J a cq u e s est m is à m o r t ( T h e m on a s te ry o f A p a ra n ,


p. 285); les a d v e r s a i r e s d e 1‘ U n io n se f é l i c i t e n t en 1379 du g r a n d n o m b r e d e c o u v e n t s q u i
aba n d o n n en t 1'Union d e Q r n a y ( L in g u a e h a ica n a e s crip tores, p. 33). En c o n s é q u e n c e , le s U n i ­
teurs o b l i g é s d e q u i t t e r l e u r c o u v e n t s o n t a u t o r is é s en 1381 à p a ss er da ns 1'ordre d o m i n i c a i n
(Ripoll, II. 300). C e t t e r é a c t i o n s a c c o m p a g n e d 'u n r e n o u v e a u d e s étu d es , c e t t e f o is a u t o u r d u
couvent d e T a t h e v q u i p r e n d la p l a c e d e Q r n a y c o m m e s u c c e s s e u r d u c e n t r e « u n i v e r s i t a i r e »
de G a yle-tsor.
224 S e lo n M e k h i t a r d ’A b a r a n , le s r é g i o n s les p lu s t o u c h é e s p a r le m o u v e m e n t d 'U n i o n
étaient Sis et so n t e r r i t o i r e ( l a C i l i c i e ) , 1’A n a t o l i e a r m é n i e n n e (S iv a s e t le « p a y s d e R o u m » ) ,
Caffa et la C r i m é e , S e lm a s , M a r a g h a , T a b r i z et S u lta n ie h , 1'Ernèak et la p r o v i n c e d e N a k h i d je -
van, sur les d e u x r i v e s d e l’A ra x e . - D e s d i f f i c u l t é s se p r o d u is e n t q u e l q u e f o i s ; t e l es t le ca s
d un fr è r e S e t h d A r m é n i e . O n n o u s d it q u e c e d e r n ie r , é l e v é d a n s le r it e a r m é n i e n , v a r t a b e d ,
s était c o n v e r t i v e r s 1368 et a v a it fa it d e s c o n v e r s io n s . O n lui in t e r d is a it d e p r ê c h e r ; G r é ­
goire X I o r d o n n e à 1 e v ê q u e d e C a f f a d e lui f a c i l i t e r so n e n s e i g n e m e n t (12 m a i 1 3 7 7 ): Fon tes,
XII, 224.
“ 3 Cf. M. A. V a n d e n O u d e n r ijn , T h e m o n a s te ry o f A p a ra n (à p r o p o s d e la c a r r i è r e d e M e ­
khitar d ’A p a ra n , d i s c i p l e à la f o i s d e M a l a c h i e et d e S a r k is d A p r a k o u n ik , q u i r e s ta it e n rela-
tions a m ic a le s a v e c le D o m i n i c a i n P i e r r e d 'A r a g o n , le q u e l c o n t in u a it la t r a d i t i o n d e s t r a d u c ­
tions d a r m é n i e n e n la tin ). S c h i l t b e r g e r , n o u s 1’a v o n s vu, t r o u v e e n c o r e d e s U n it e u r s à M a k u ;
dans la s e c o n d e m o i t i é d u X V e siè cle , les v o y a g e u r s v é n it ie n s , B a r b a r o , C o n t a r in i, Z e n o , n e
citent g u è r e q u e le c o u v e n t d e C a g ri et, a u t o u r d 'A la n g ia c a la i - c e s t - à - d ir e d e la f o r t e r e s s e
d E r n t a k o u A lin d ja k , q u i c o n t r ô l a i t la v a l l é e d e r A lin d ja - t c h á i et o ü S a r k is d ’A p r a k o u n i k
avait é té e m p r i s o n n é - o n z e v i l l a g e s a r m é n ie n s - c a t h o liq u e s , a v e c le u r é v ê q u e (c e lu i- c i p o r t a i t
le titre d e N a k h i d j e v a n e t r é s i d a i t h a b i t u e l l e m e n t à A b a r a n ), c e q u i c o r r e s p o n d à p e u p r è s à
situ ation q u e n o u s d é c r i t T a v e r n i e r ( Les s ix voyages de J. B. T a v e rn ie r, Paris, 1712, I, p. 55-
S6), le q u e l vis ita e n c o r e les c o u v e n t s d e Jahou k, A b a ra n , A p r a k o u n ik et Q r n a y à la fin du
X V I I « s iè c le : B a r b a r o e t C o n t a r in i, T ra v e is to T a n a a n d Persia, L o n d o n , H a k l u y t Soc., 1873, I,
P 92, 124-125, II, p. 52. A li n d ja k est-il Y A liq u is d e s le t t r e s d e 1329 (s u p ra , p. 185)?

i i i n m u i—

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224 LA PAPAUTÉ ET LES M IS SIO NS D O R I E N T AU M O YEN-AG E

Lexistence, au sein de la province de Sultanieh, d'une nation armé­


nienne travaillée par le levain de 1'Union sous sa form e la plus complete -
1 ’adhésion au rite latin de langue a rm é n ien n e - , parallèlem en t à la réalisa-
tion plus ou moins étendue de 1'Union sous la form e esquissée au X III* siè­
cle, à la fois dans cette province et en d e h o rs d e l l e 226, posait un problèm e
difficile. Le catholicos de Sis avait été re c o n n u par R o m e c o m m e chef spiri-
tuel de tous les Arm énien s; par le fait de 1’u n ion rituelle, b o n n om bre de
ceux-ci n ’étaient-ils pas passés dans 1'o b é d ie n c e des prélats « l a t i n s » - dont
plusieurs étaient d u reste des Arm éniens-unis? II est difficile de tirer parti
des provision s d evêques et d ’arch evêqu es décidées p a r le Siège apostoli-
q u e : en effet, le je u des réserves pontificales donnait à la Papauté le droit
de p o u r v o ir aux sièges vacants p a r transfert, o u p a r d écès en c o u r romaine,
ou p o u r d'autres raisons. Les papes d Avignon n'ont certainem ent pas
pensé, lo r s q u ’ils désignaient les évèques ou des a rc h e v ê q u e s p o u r des siè­
ges arm én ien s, e n tre p re n d re sur la juridiction du cath olicos 227 : ils agis-
saient de m ê m e dans le ressort de tous les prim ats ou patriarches. Pas
dava n tag e ne peut-on so n g e r à d re sse r une liste de s évêch és ou archevê-
chés en u n ion avec le Siège Apostolique : des n o m s a p p a ra is se n t ici ou là,
au h a s a r d 228, qui tém oignent de ce q u e tel prélat recon n aissait les préroga-

226 La C ilic ie , e n effe t, r e le v a it d e la p r o v i n c e d e T e r r e S a in t e d e s o r d r e s d o m in ic a in et


fr a n c is c a in .
227 O n p o u r r a i t se le d e m a n d e r q u a n t o n lit, da n s la b u lle c o n c e r n a n t N e r s è s B alientz, que
c e lu i-c i a v a it é t é c o n f i r m é p a r « q u e l q u u n q u ’o n a p p e l l e c a t h o l i c o s . . . » (su p ra , p. 211), Me-
k h i t a r d A b a r a n r e l è v e c e p e n d a n t les e n c o u r a g e m e n t s q u e le c a t h o l i c o s J a c q u e s avait donnés
au x U n ite u rs .
221 P a r e x e m p l e , Jean d e M e d z q a r o b t ie n t d u p a p e , e n 1346, un in d u lt p o u r fra te r Stepha-
nus, a rm e n u s, a rc h ie p is c o p u s N ic h e n u s (F o n te s , I X , 84). N o u s a v o n s r e t r o u v é c e Stephanus,
N ic e n . a rc h ie p is c o p u s . da n s u n e le t t r e d ’in d u l g e n c e c o l l e c t i v e d o n n é e à A v ig n o n , le 15 o c to b r e
1346, e t q u i a é t é d é c o u v e r t e p a r M. N o i r j e a n da n s les A r c h i v e s d e l a n c i e n é v è c h é d e Bâle, à
P o r r e n t r u y . II y est a s s o c i é à N e r s è s d e M a l a z g e r d , N ic o l a s d e 1'Aias et T h a d d é e d e Caffa. La
p r é s e n c e d e c e s q u a t r e p r é la t s d ' A r m é n i e - a v e c l e s q u e ls f i g u r e B e n o i t , é v ê q u e d e Simisso,
d o n t le s u c c e s s e u r d e v a i t ê t r e un A r m é n i e n — au m o m e n t o ü o n d is c u t a it en C u r i e des errores
im p o s ita e A rm e n is é t a it- e lle f o r t u i t e ? E n to u t cas, il n o u s s e m b l e p o s s i b l e d ’ i d e n t i f i e r le siège
N ic e n u s a v e c c e lu i d e B d s c h n i o u N ik (à 1o u e s t du lac d e S e v a n ) , un d e s q u a t r e siè g e s archié-
p is c o p a u x d o n t les t itu la ir e s a u r a ie n t e u le p r i v i l è g e d e c o n f i r m e r 1 e l e c t i o n du catholicos
s e lo n T h o m a s d e M e d z o p h ( T o u r n e b i z e , A rm é n ie , co l. 3 2 2 ); l a r c h e v ê q u e E t i e n n e p a rait bien à
c e t t e d a t e r a l lié à I U n io n . - Q u a n t à Jean, é v ê q u e V a h rn a rte n s is , c o n s t i t u é le 25 m ai 1389
v i c a ir e du m a i t r e d e s F r è r e s P r è c h e u r s s u r les U n it e u r s d ' A r m é n i e , G é o r g i e et Perse, son
s iè g e r e s te i n i d e n t i f i a b l e ; le P. L o e n e r t z a p e n s é à A n a z a r b e , m a is e n r e c o n n a is s a n t les diffi-
c u lt é s d e c e t t e i d e n t i f i c a t i o n ( I m s o cié té des F rè re s P é r é g r in a n ts de 1374 à J475, p. 118); on
p o u r r a i t aussi p e n s e r à u n e m a u v a i s e g r a p h i e p o u r N a k h i d j e v a n (N a c h v a n e n s is ) si l'évêqu e
Jean, t it u la ir e du s iè g e en 1385, n e p a r a is s a it ê t r e u n O c c i d e n t a l e t n o n un A r m é n ie n .

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L A R C H I D I O C È S E D E S U L T A N IE H 225

tives ro m a in e s . Sans doute faut-il c o n c lu re que 1’u n io n avec 1'Eglise


romaine fut très l a r g e m e n t resse n tie d a n s le m o n d e a rm é n ie n d u X I V e siè-
cje il est d iffic ile d e tre p lu s précis.

*
* *

De m ê m e , n o u s 1 a v o n s vu, a p p r é c i e r la vitalité des fid e liu m n o v e lla e


p la n ta tio n e s d a n s la p r o v i n c e d e S u lta n ie h se révèle difficile. Les sièges
ép isc op a u x o n t p u ê tr e p o u r v u s d e préla ts résiden ts plus lo n g te m p s q u e
nous ne le s a v o n s p a r les se u ls registre s d e la c h a n c e lle rie pontificale, d u
fait du je u d e s é le c t i o n s et d e s p r o v is io n s a rc h ié p is c o p a le s. L e s v o y a g e u rs
qui, c o m m e J o u r d a i n , O d o r i c o u M a r ig n o lli, sont passés à tra ve rs la p r o ­
vince d e S u l t a n i e h 1’o n t fait d a n s la p r e m iè r e m oitié d u siècle, et ont sou-
vent été trè s d is c r e t s . L e d e r n i e r n o u s p e rm e t d e n tr e v o ir la vie très ré e lle
de la m i s s i o n d e 1'Inde v e r s le m ilie u d u s i è c l e : l’indice vaut d ’être retenu.
Faut-il le g é n é r a l i s e r p o u r autan t? N o s textes ne n o u s le p e rm e tte n t pas,
sans n o u s 1 ’i n t e r d i r e . . .

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CINQUIÈME PARTIE

LES MISSIONS DANS LES PAYS


DE LA MER NOIRE ET DU CAUCASE
ET LA FIN DES MISSIONS MÉDIÉVALES

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La création, p a r C lé m e n t V et Jean X X I I, des provinces de K h a n b a liq
et de Sultanieh avait institué d eu x h iérarchies épiscopales con çues respec*
tivement pour a s s u re r la vie des fid eliu m novella e pla n la tion es dans
1’em pire des M o n g o l s d u N o r d et d u Cathay et dans 1'empire des M o n g o ls
de Perse a u q u e l étaient adjointes les partes m erid ion a les qui b o rd a ie n t
1’Océan Indien. L e s d e u x p ro v in c e s s’organisèrent sur des m o d è le s assez
différents; il est vrai q u e les questions q u e u r e n t à a ffron te r les archevê-
ques, les évèq u es, et les m issio n n aires étaient n otablem en t différentes. T a n ­
dis q u e n E x t rê m e -O rie n t les Alains d ép o rté s p ar les M o n g o ls form a ie n t un
solide n o y a u à la n o u v e lle chrétienté, qui n a v a it pas trouvé de terrain
d en ten te av ec 1'Eglise c h a ld é e n n e locale, les D om in icain s et Franciscains
du P ro c h e -O rie n t avaient trouvé en face d'eux une chrétienté a rm é n ie n n e
que la d é c o u v e r t e d e la p en sée latine jeta vite dans une ferm en tation d ’o u
sortirent d es te n d a n c e s diverses. P a r contre, les M o n g o ls q u e l'on avait
espéré c o n v e r t ir au X I I I e siècle se révélèrent bientôt inaccessibles à la p r é ­
dication c h ré tie n n e , n o n sans qu e des résultats spectaculaires aient été
acquis avan t 1350 d a n s les khanats de Q ip c aq et de Djagataí.
II n'en reste p as m o in s q u e ces d eu x provinces, d u n b o u t à 1’autre, res-
tèrent m is s io n n a ire s en ce sens qu e les sièges des a rch e v êc h és et des évê-
chés avaient été im p la n té s dan s des Etats qui n'étaient pas g o u v e rn é s p a r
des Chrétiens, ou du m o in s p a r des Chrétiens en u n io n avec 1'Eglise
rom âin c ’ les c o u v e n ts q u i form a ie n t 1assise de ces p ro v in c e s se vou aien t
essentiellem ent à la p ré d ic a tio n p arm i les infidèles, o u p a rm i les schism ati-
ques, et à la d e s se rte sp irituelle de c o m m u n a u té s de néop hytes; m ê m e si
un p eu p a r to u t d e s c o lo n ie s latines, constituées de m a rc h a n d s surtout,
a pportaien t l e u r a p p u i a u x re ligieu x qui leur assuraient un m in im u m de vie

spirituelle.
L a situation allait être b e a u c o u p plus c o m p le x e d an s un e r é g io n qui
s é m a n c ip a p ro g re s s iv e m e n t, m a is assez vite, d u c o n tro le m o n g o l . les rives
de la M e r N o i r e et le C aucase. Ici, les m issions se p ro lo n g è re n t p lu s tard
q u a ille u r s - elles e u re n t à s o u ffrir d e 1'invasion de T a m e rla n , m ais elles y
survécurent Et s u r les rives d e la M e r N oire, 1'union des E glises p r o c la m é e

>—' V -» ■ ■■ ■ V I K_# ¥ v/ ■ ■ ■ >—' V -» w < I I ■ l V y ■


23 0 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU M O Y E N AGE

au concile de Florence connut des réalisations effectives, tandis que d ’intré


pides m issionnaires se dépensaient p o u r parvenir au m êm e résultat depuis
la Perse ju sq u a l’Ethiopie et dans le Proche-Orient, écrivant ainsi un der-
nier chapitre de l’histoire des m issions d'Orient au Moyen-Age.

I - L E S P R O V I N C E S D E V O S P R O , SA R A I E T M A T R E G A .
L E S M IS S IO N S D A N S LE S PAYS D E LA M E R N O IR E
ET D E LA M E R C A S P IE N N E

L o r s q u e C lém en t V et Jean X X I I avaient créé les provin ces de K hanba­


liq et de Sultanieh, ils avaient vo u lu tenir com p te de 1’e m p ire mongol, en
p r in c ip e unitaire et dont le souverain résidait dans la p re m iè re de ces vil­
les, puis de 1 'existence des pa rtes o rie n ta le s et m e rid io n a le s qui réunissaient
avec 1'empire m o n g o l de Perse des pays plus éloign és e n c o re - l inde et
1’E t h io p ie En fait, si la province de Sultanieh allait se r é v é le r à peu près
v iab le, e n c o re q u e les liens de Q u ilo n et de S a m a r k a n d avec la métropole
se soien t sans d o u te rare m e n t matérialisés, la p rov in ce de K h a n b a liq était
d é m e s u r é e et, dès 1318, Jean X X I I reconnaissait à l’é v ê q u e Jérôm e de Caffa
un vaste diocèse correspondant à peu prè s aux p o sse ssio n s de la
H o r d e d 'O r.

a ) La p r o v in c e de V o s p r o et les évêch és de la M e r N o ir e

C a ffa était, s u r la m e r Noire, le p rin cipal c o m p t o i r gênois, et 1’activité


d ’un notaire, en 1289-1290, perm et de se r e n d re c o m p t e de T im portance du
r é s e a u c o m m e r c i a l qui y aboutissait : Vicin a et M o n c a stro , su r la côte ouest
d e la m e r N o ir e , C im b a lo , Soldaya, S olgat et V o s p r o en C rim ée , la Tana et
M a t r e g a s u r la m e r d'Azov, la C o p a , S av a sto p o li et B a t u m su r la côte cauca-
sienne, T r é b iz o n d e , Cérason te, S im isso et S in o p e su r celle de 1'Asie
m in e u re , étaient en relation s constantes avec ce g r a n d port, sans parler
n a t u r e lle m e n t d e C o n s ta n tin o p le et d e Péra. Le s con tra ts reç u s p ar Lam-
b e i t o di S a m b u c e t o té m o ig n e n t d e la c o n sc ie n c e q u e l’on avait dès lors de
l’unité d e ces rives d e la m e r N o ire , d o n t r h o r i z o n s'arrêtait à la Bouche
d 'A v ie ( A b y d o s ) 1. L e s Byzan tin s en avaient eu c o n s c ie n c e eux aussi, et tout

1 Cf. la c a r t e d o n n é e p a r M . B a la r d , G ê n e s et l'O u tr e -m e r , I, Les a ctes de Caffa du notaire


L a m b e r t o d i S a m b u c e to . 1289-1290, P a r is e t la H a y e , 1973. C f. a u ssi G. I. B r a t ia n u , Im m e r N oire
des o r ig in e s à la c o n q u ê te o tto m a n e , M u n i c h , 1969 ( S o c i e t a s a c a d ê m i c a d a c o r o m a n a , Acta his­
tó rica , IX ).

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L E S M IS S IO N S D E LA M E R N O I R E E T D L C A U C A S E 231

.1 domaine a v a i l finí par r e l e v e r du pa tria rch e d e C o n s ta n tin o p le , m ê m e


I o r q u e 1'arrière-pays d é p e n d a ít d e c e lu i d A n t i o c h e 2. Les Latins allaient
é° re a m e n é s à en te n ir c o m p t e en m a t iè r e ecclésiastiqu e.
T o u t e f o i s , les p e r s p e c t iv e s d e Jean X X I I restaient e x c lu s iv e m e n t m is­
s io n n a ir e s , L o r s q u i l avait é r ig é C affa en év êc h é, c e n'était pas à 1'intention
j eS résidents de r i l e latin, m ais p o u r d o n n e r à 1'évêque J é r ô m e le siège à
partir duquet se d é v e l o p p e r a i t s o n a c t io n é v a n gé lisa tric e, Or, avant 1333,
deux D o m i n i c a i n s , F ra n ç o is d e C a m e r in o et 1'Anglais R icha rd , éta ien t venus
p rèch er la foi c a t h o liq u e à V o s p r o (1’a n tiq u e P a n tica pée, a u jo u r d ’hui
Kertch). La ville avait p o u r s c ig n e u r un c h e f alain du n o m d e M ille n u s , qui,
comme son peuple, a p p a r te n a it au rite g r e c 3. II fut c o n v a in c u p a r la prédi-
cation d o m in ic a in e . r e c o n n u t la p r im a u t é ro m a in e, et e n tr a in a 1’a d h é s io n
dun prince v o isin v e n u à V o s p r o , le « r o i d e s Z i q u e s » Versacht. L e s c o n v e r -
sions se m ultipliant, les d e u x D o m in ic a in s p riren t la r o u te d ’A v ig n o n p o u r
exposer la situ ation à Jean X X I I et d e m a n d e r d e 1’aide. A r r iv é s le 28 a v r il
1333. ils o b tin r e n t q u e le p a p e é c r iv it au c h a p itr e g é n é r a l d e le u r o r d r e
pour que l’on d é sig n â t d e s m issionna ires, et, le 5 ju illet, Jean X X I I d é c id a it
d e r ig e r en m é t r o p o l e la c ité d e V o s p r o , dont Ia c a t h é d r a le se rait d é d i é e à
1’archange S a in t-M ich ei, F ra n ç o is de C a m e r in o étant pourvu du t itr e
d a r c h e v è q u e 4. Q u ant à son c o m p a g n o n , il était fait é v ê q u e du s iè g e d e
Kherson, qui é v o q u a it p o u r l e s Latins 1'exil d e saint C lé m e n t et so n a p o s to -
lat, et Jean X X I I le r e c o m m a n d a i t au r o i des Z iq u e s 5.
L 'a v e n ir d e c e s d e u x siè g es pa rait a v o i r été lim ité. L e p a p e p r o f it a it d e
lé x p é r ie n c e des d e u x D o m in ic a in s p o u r les c h a r g e r de n é g o c ie r , à le u r pas-
sage à C on s ta n tin o p le , a v e c 1 'em p e reu r byzantin. Ce q u i les a m e n a à r e v e n i r

1 Cf. Patrol. Gr., CVTI, 3 5 3 : le re s s o r t d e C o n sta n tin o p le c o m p re n a it 1'Abasgie, la C ol-


chide, la C a p p a d o ce ; o r le p a tr ia r c a l d’A m io ch e e x e rç a it son a u to rité su r ('A rm én ie e t s u r la
Géorgie (Ib é rie ). L es L a tin s n e p a ra is se n t p as a v o ir te n u c o m p te d an s c e tte ré g io n d e 1’orga-
nísation e c c lé sia stiq u e g r e c q u e , d e v e n u e d 'a ille u rs m é c o n n a is s a b le d ep u is q u A n d ro n ic II
avait m u ltiplic les m é tro p o le s a u to c é p h a le s.
1 Les Alains é ta ie n t é ta b lis en C rim é e p e u t-ê tre d è s le X I C s iè c le . s’il fau t r e c o n n a itr e e n
eux |es S a rm a te s q u e le m o in e E p ip h a n e av ait re n c o n tr é s á T h é o d o s ia (C affa) : Patr. Gr.,
CXX, p. 243. L e v ê q u e d 'A lanie T h é o d o r e a v ait p ré tc n d u le s ré g ir, c e q u e 1’a rc h e v ê q u e d e
Kherson lui re fu sa it, e stim a n t q u e le r e s s o r t d e 1'évêché d 'A lanie ne c o m p re n a it p as le s A lains
de la p resqu 'ile {Patr. Gr,, C X L , p. 392, 393, 397). Un é v ê c h é g re c p a rtíc u lie r av ait é té c r é é
pour les Alains d e C rim é e (M ik lo s ic h e t M u ller, Actü patr. Constantinopol., II, p. 67).
"C f. R. L o en e rtz, La société, p. 126-128.
! La c a th é d ra le de K h e rs o n d e v a it ê tr e d é d ié e à s a in t C lé m e n t. - S u r les Z iq u es, e t le u rs
rapports avec les C irc a ss ie n s, c f. infra, p. 247. La b u lle d e c r é a tio n (R ip o ll, II, 197-199) lo c a lis e
Kherson en G o th ie , e t V o sp ro e n K h a z a rie .
232 LA PAPAUTÉ ET LES M IS S IO N S D O R IEN T AU M O YE N -AG E

à Avignon p o u r ren d re com p te de ces conversations (1335-1336); repartis


p o u r 1’Orient, l'un d e u x au moins, R ichard de K herson, revenait à Avignon
les 8 avril et 13 mai 13386. Q u e devinrent, entre temps, les Alains de V o sp ro
et les Ziques de K h erson? Le P. Loenertz a su pp osé q u e ces deu x petites
principautés avaient disparu, et il est fort possible qu e le khan de Qipcaq
Gani-bàg, qui devait détruire la Tan a en 1343 et assiéger Caffa peu après
(1345-1347)7, ait mis fin à 1'au tonom ie des quelques-un s des chefs chrétiens
du littoral et des m ontagnes de C r i m é e 8. N o u s savons seulem ent que
1’archevêque et 1'évêque ne reparurent plus en O ccident a p rè s 1336 po ur
l’un, 1338 p o u r l’autre, et qu'ils n'eurent pas de successeurs, ce qui peut
in d iq u er q u i l s m ou ru ren t en Orient.
La bu lle d erection de V o s p ro en m étrop ole avait défini une nouvelle
province ecclésiastique, en lui attribuant les diocèses de K h e rso n , Caffa,
Savastopoli, T rébizon de et Péra. On a rem a rq u é avec raison qu e cette défi-
nition passait sous silence la juridiction qui appartenait th éoriquem en t à
1'archevêque de K h a n b a liq sur Caffa, à celui de Sultanieh su r Savastopoli,
sans p a rle r des droits du patriarche latin de Constantinople, th éoriqu es sur
Trébizon de, effectifs sur Péra. Il faut d'ailleurs r e m a r q u e r que, ju s q u e n
1333, aucun texte ne cite les évêchés latins de T réb iz o n d e et de Péra.
Ce d e rn ie r parait avoir été institué presque a u s s it ô t : un Dom inique,
e p is co p u s Perensis, participe, étant à Avignon, à des c on cessio n s d ’indul-
gence entre 1336 et 13399, et il est difficile de ne pas v oir en lui un suffra­
gant désigné p a r 1'archevêque de V o s p r o et sans doute co n sa c ré p ar le
pape. M ais il est aussi vraisem blable qu e cette création suscita de vives
oppositions. L o rsq ue le pape institua en 1339 un n ou ve au patriarche de
Constantinople, H enri (celui qui devait périr pendant la croisad e de
S m y m e , en 1345), ce dernier fit-il prévaloir les droits de son patriarcat sur

6 L e t t r e s d m d u l g e n c e : X. M o ssm a n n , C a rtu la ire de M u lh ou s e. I, n° 184; J. Schultze, K lõ s -


te r ... d er Stadt Kassel, p. 60; Regesten zu r G esch ichte. . . Consianz, 4482; K. W u tk e , Codex
d ip lo m a ticu s Silesiae, X X X , n° 6082; Fontes re ru m b e m e n s iu m , VI, 220. - L o e n e r t z La société
p. 129-130.
7 S o ra n zo, I I papato, 1'Europa cristia n a e i Tarta ri, p. 484-485.
* Oú se m a in te n a ie n t j u s q u à des Goths, d e p a r le r a lle m a n d (A. A. V a s ilie v , T h e G oths in
the Crim ea, C a m b rid g e , Mss., 1936 (M o n o g r a p h s n° 11). d o n t la ca pita le, T h e o d o r o ou Man-
gup, est dès 1360-1362 aux m ain s des se ig n eu rs grecs. Cf. J. B r o m b e r g , D u n o u ve a u s u r les
prtnces de T h e o d o ro -M a n g o u p , dans Byzantina. M etabyzantina, I, 1946.
9 Regesten z u r G e s ch ich te . . . Constanz, n° 4506 (19 aout 1336), 4519, 4535, 4550, 6547 et
suppl. 158 (4 ju ille t 1339); Bibl. Ec. Charles, L X X X I V . p. 124; K W u tk e, op. cit., X X X , 6092;
M eck lem b u rgisch es Ü rk u n d en b u ch , IX , 5833, etc.

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r

LES M I S S I O N S D E LA M E R N O I R E ET DU CA UCA SE 233

péra, ou existaient d e s é g lise s latines, un c o u v e n t fran ciscain et un couvent


dominicain?10. T o u j o u r s est-il qu e, lo r s q u e C lé m e n t V I d o n n a un é v ê q u e
aux Arm énien s d e Péra, le 18 ju illet 1342, il n est pa s q u e stio n de 1'évêque
latin du d io c è s e , so n s u c c e ss e u r, en 1376, doit o b é is s a n c e au p a tria rc h e
com m e étant 1 ’o r d i n a i r e d u d i o c è s e " .
C est sans d o u t e à 1 o c c a s io n d e la c ré a t io n d e la n o u v e lle p r o v in c e q u e
fut érigé 1é v ê c h é latin d e T r é b i z o n d e - ville d o té e d u n e im p o r ta n t e c o lo n ie
gênoise An toin e, é v ê q u e T re b o s o n e n s is , e n v o y é d u roi et d u ca th olic os
d'Arménie à C lé m e n t V I en m ê m e te m p s q u e 1'évêque de M e d z q a r , était
proba b le m e n t u n Latin, p u i s q u ’en 1345 il fut tra n sféré à u n é v ê c h é de Sar-
daigne : il fa u d r a it a d m e t t r e q u e ch assé de son siège - o ú existait u n m o n a s-
tère fran ciscain d e p u i s 1289, et o ú A n d r é d e lia T e rz a avait f o n d é en 1315 u n
couvent d o m i n i c a i n 12 - p a r les é m e u t e s anti-latines de 134313, A n to in e avait
gagné la C icilie a u m o m e n t o ú les A r m é n ie n s se p r é p a r a ie n t à e n v o y e r le u r
ambassade. S o n s u c c e s s e u r serait le C a r m e M ath ieu , qui ne qu itta p a s le
diocèse de C a m b r a i, o ú il m o u r u t en 1 3 5 9 '4; c ’est a lo rs q u e le siège d e T r é ­
bizonde p a s s a à C o s m e , p e r s o n n a g e q u e n ous r e t r o u v e r o n s : m is s io n n a ir e
franciscain d u Q ip c a q , il s é jo u r n a trois ans à Avignon, avant de se fa ire
transférer s u r le siè ge d e S a r a i 15. O n re tro u v e un é v ê q u e d u n o m de L o u is,
un autre d u n o m d A le x a n d re , qui l’un et 1’autre paraissen t a v o i r v é c u en

,u L o e n e r t z , L a s o cié té , p. 38-47; G u a l b e r t o M a t t e u c c i, U n g lo r io s o c o n v e n t o s u lle r iv e d ei


B o s fo r o : il S. F r a n c e s c o d i G a ia ta . . . . c. 1230-1697, F ir e n z e , 1967 ( B i b l i o t e c a d i s t u d i f r a n c e s -
cani, V I I ).
11 E u b e l, H ie r a r c h ia , I, 109; F on tes, I X , 4 e t 29 ( i n d u l g e n c e p o u r l e g l i s e N . D. d e s A r m é ­
niens d e P é r a ) ; X I I , 186 ( d é s i g n a t i o n d e G r é g o i r e S is cu s c o m m e é v ê q u e , 7 j a n v i e r 1376), 198
(a b s o lu tio n d e p l u s i e u r s m a r c h a n d s d e Péra, q u i a v a i e n t c o m m e r c é a v e c A l e x a n d r i e ) . C f. L o e ­
nertz, La s o cié té , p. 59-61. - E n 1417, les q u a t r e é g lis e s d e P é r a r e l è v e n t d u p a t r i a r c h e ; o n c i t e
c e p e n d a n t e n 1429 un d i o c è s e d e P é r a (E u b e l , B u l i F ra n c is c ., V I I , 1847).
12 G o l u b o v i c h , I I I , 184 et IV, 313; L o e n e r t z , La société. p. 98-99.
11 S o r a n z o , op. cit., p. 496-497.
14 L e p a p e lu i c o n c è d e d e s b é n é f i c e s . e n c o n s t a t a n t q u i l n e p o u v a i t v i v r e d e s r e v e n u s d e
«on é v ê c h é , s it u é in p a r tib u s G re c ia e . Cf. E u b e l, H ie ra rc h ia , 2« éd., I, 493; B u l i F ra n c is c ., V, 356
( Fontes, I X , 7 2 ); D o m U. B e r l i é r e , L es é v êq u e s a u x ilia ir e s de C a m b ra i a u x X I I I • et X I V • siècles,
dans R e v u e b é n é d ic tin e , X X , 1903, p. 249-263 ( o n n e c o n n a í t p a s e x a c t e m e n t la d a t e d e sa p r o -
m o t io n à 1 'é p is c o p a t, a n t é r i e u r e à o c t o b r e 1345). E n m ê m e t e m p s q u ’A n t o i n e v i v a i t un é v ê q u e
a rm é n ie n d e T r é b i z o n d e , E t i e n n e , q u i assistait e n 1342 au c o n c i l e d e S is (D o c . A m u , I, L X X I ) .
15 Cf. G. F e d a l t o , L a ch iesa la tin a , p. 457-458 ( q u i r a p p e l l e d a p r è s G o l u b o v i c h , V, 92-93, la
c a r r iè r e a n t é r i e u r e d e C o s m e d e Z i q u i e ) . C o s m e d o n n e d é jà d e s i n d u l g e n c e s e n n o v e m b r e
1359 ( S c h m i d t , U r k u n d e n b u c h des H o c h s tifts H a lb ersta d t, 399) e t le 10 j u i n 1361 ( G e s c h ic h ts -
freund, X X I V , 202). II n 'y a pas lie u d e d o u t e r d e 1 'id e n tif ic a tio n d u s iè g e T r a p h a s o n e n s is :
« « P r o , p. 213, n. 182.

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236 LA PAPAUTÉ ET LES M IS SIO NS D OR IENT AU M O Y E N AGE

L 'é v êc h é d isp aru t sans d o u te au plus tard lors de la prise de Samsún par les
O ttom an s, en 140125. Plus à 1'ouest, 1'antique Amastris, devenu S a lm a s tro
eut é g a le m e n t des é v è q u e s 26: on voit en co re citer en 1450 le v ê q u e Salntas-
tre n s is qui perdit son siège lo rsq u e les T u rcs s'em p a ré ren t dc la ville
en 146127.
S u r la côte o c c id e n ta le d e la M e r N o ire , enfin, on voit paraitre des évè­
q u e s de L ic o s t o m o (p r è s de Kilia, à 1 'em bou ch u re d u D a n u b e , o ú les G ê n o is
a v a ie n t u n c o n su la t d è s 1332), de Vicina, su r le D a n u b e , de C eta tea -A lb a
(A k k e r m a n ), d e V a m a . Un D om in icain , T h o m a s W a ley s, e p is co p u s Lycosto-
m en s is, est cité en A n g le t e r r e à la date de 136 2 28. U n Franciscain, Louis,
e p is c o p u s V ic in e n s is , est p ré se n t au sacre d 'u n autre é v ê q u e à Cracovie, en
1371 29 - ce q u i ne sau rait s u r p r e n d r e q u a n d on con n ait les rap p orts de la
P o l o g n e a v e c les p a y s de la M e r N o ire . Le siège de V a rn a , peut-être attribué
à u n D o m i n i c a in , Jean, a u x ilia ire de 1'évêque d e Liège (1360) - rem placé en
1393 p a r u n a u t r e D o m in ic a in , N ic o la s Steynacker, W e ih b is c h o f à P a s s a u -
fut e f f e c t iv e m e n t o c c u p é p a r un frè r e B o n if a c e de S u rd is , d e Caffa, electus
e t p r e c o n iz a t u s e p is c o p u s V a m e n s is , tran sféré en 1394 a u siège de S o ld a y a 30.
Quant à Akkerm an (M o n c a s t r o ), cette ville située à l’e m b o u c h u r e du
D n i e s t r d o n n e s o n n o m à p lu s ie u rs é v è q u e s A lb ic a s tre n s e s qui, en 1391,
1414, etc., e x e r c e n t les fo n c tio n s po n tific a le s d a n s les d io c è s e s a lle m a n d s 31.

2' E u b e l , I, 4 4 5 ; R e g . V at., 217, f ° 82. U n e i n d u l g e n c e d o n n é e p a r B e n o i t , ep is co p u s Sim i-


s ie n s is , d a n s R e g e s te n z u r G e s c h ic h t e . . . C on sta n z. II, 4771 (2 0 f é v r i e r 1346). L e v ê q u e Sim iso-
n is c i t é d a n s V i g n a , C od . d ip l., II, 1, p. 689 (1 4 7 0 ) es t c e r t a i n e m e n t u n é v ê q u e g r e c . Cf. G .d e
J e r p h a n i o n , S a m p s ô n e t A m is o s : u n e v ille à d é p la c e r de 900 k m , d a n s O r ie n ta lia christiana

p e r ió d ic a , I, 1935, p. 257-267.
26 L a l i s t e d ’ E u b e l , H ie r a r c h ia , I, 431, n e c o m p r e n d d e 1399 à 1425 q u e d e s non-résiden-
tiels; en 1430 a p p a r a i t le F r a n c i s c a i n M a r c d e P é r a . M a is , e n 1429, le d i o c è s e d e S alm astro
r e ç o i t la v i s i t e d u n c o l l e c t e u r ; le s é v è q u e s r é s i d e n t i e l s e x i s t e r a i e n t d o n c , in c o n n u s des servi-

ces de R om e.
27 V i g n a , C o d d ip l., II, 2, p. 134, 700.
21 E u b e l , H ie r a r c h ia , I, 290, c o n f o n d c e t é v ê c h é a v e c c e l u i d e L a m b r e n s is e t y v o i t L w o w
( L e m b e r g ) , p a r c e q u u n T h o m a s , e p is c o p u s L a m b e r g e n s is , é t a i t à L o n d r e s e n 1362. Cf. Stubbs,
R e g is t r u m s a cru m a n g lic a n u m , app. V. - S u r la l o c a l i s a t i o n de L i c o s t o m o . cf. G o lu b o v ic h ,

II, 558.
19 E u b e l , I, 189. . .
10 E u b e l , I, 5 1 6 e t 522 ( V a r n e n s is e t V e r n e n s is ) ; A V i g n a , C o d ic e d ip l., II, 2, 721. •

n e r t z , L a s o c ié té , p. 120. • .
31 C f. G . B r a t i a n u , R e c h e r c h e s s u r V ic in a e t C e ta te a -A lb a . C e t t e v i l l e , a p p e l é e aussi
tro (e t n o n M a v r o c a s t r o : cf. A tla n te id r o g r a f ic o , p. 2 4 7 ), e s t l e B i a l g o r o d d e s R u t h e " ^ olé te
E u b e l , I, 8 0 ( e t 2 * é d . s u b v e r b o A lb ic a s t r e n .) e t s u p ra , p. 95 n. L e F r a n c i s c a i n A n g e e p

y a v a i t é t é t u é p a r l e s B u l g a r e s a v a n t 1323.

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LES M ISSIO N S DE LA M I;.R N O IRE ET DU CAUCASE
237

II n esl pas mutile de ra p p ro e h e r ces n o m s d é v ê c h é s de ceux des cou­


vents que n o u s c o n n a isso n s. La vicairie franciscaine d O rie n t dans sa custo­
die de T réb iz o n d e . com prenait les loca d e Trébizonde, Simisso et Sinope la
vicairie d Aquüonans, dans sa custodie d e Khazarie. en d e h o rs des couvents
de Caffa, ceux de Soldaya, Solgat. Cim balo, Kara-Su. ainsi que Moncastro
Vicina - qui disparaissem des listes après 1334 - et Ylice, qui apparait p o u r
la première ois en 137332. Ces deux custodies se modèlent pratiquement
sur le dom aine qui avait été alloué à la province de V o s p r o 33. O r nous cons-
tatons que la plupart des lieux ou existaient des couvents (Trébizonde,
Simisso, Soldaya, Solgat, Cim balo, Moncastro, Vicina) ont été dotés d ’un
évêché dès le X I V e siècle. Par contre, il apparait des évêques dont le titre
ne parait pas c o rre sp o n d re à une ville dotée d un établissement permanent
de religieux (P agropoli, Licostomo, peut-ètre V a m a ) 34 : on peut se d em an ­
der si la p ro m o tio n de religieux à ces sièges ne répondait pas à 1’habitude,
combattue p a r la Papauté mais très répandue, de créer des évêques titulai-
res destinés à servir d auxiliaires aux prélats occidentaux.
Quoi qu il en soit, la M e r Noire est, dès le milieu du X I V e siècle, bordée
d évêchés latins. Certains doivent leur existence à 1’archevèque de V o sp ro ;
d autres ont p u être créés au fur et à mesure que les villes passaient sous le
controle de la thalassocratie génoise. Mais dans quelle mesure ces évêchés
sont-ils encore des évêchés missionnaires?
II est inutile d ’insister sur le caractère cosmopolite des villes de Crim ée
- et, à un m o in d re d egré sans doute, des autres comptoirs de la M e r Noire.
Lorsqu'en 1289-1290 L am berto di Sambuceto instrumentait à Caffa ou dans
les villes voisines, on rencontrait dans les actes des Grecs, des Alains, des
Russes, des Ziques, sans p arler desclaves circassiens, abkhazes, mongols,
etc. Ibn Batuta avait été très frappé, vers 1340, de ce m êm e caractère35; il

12 A 1 ' e m b o u c h u r e d u D n i e p r ; les G ê n o i s y a v a ie n t d e s é t a b li s s e m e n t s d è s 1381. et a ch e -


tèrent le c h â t e a u a u x T a r t a r e s ; le s V a la q u e s le le u r p r ir e n t en 1448 : A tla n te id ro g ra fic o , p. 124;
Iorga, N o te s e t e x tra its , d a n s Rev. O r. lat., IV, p. 37, n ° 3; V ign a , C o d d ip l., I, 307.
w L e s D o m i n i c a i n s , o u t r e le u r s c o u v e n t s d e C a f fa et T r é b i z o n d e . on t-ils eu d a u t r e s r é s i­

d e n ce s? cf. L o e n e r t z , L a so cié té . p. 91-100.


14 L e ca s d e S a l m a s t r o est plu s d é lic a t, e n rais on d e la c o n f u s i o n p o s s ib le e n t r e c e t t e
ville et c e l l e d e S e l m a s • u n c o u v e n t d e c e n o m a p p a r a it dans la c u s t o d ie d e T a b r i z e n 1334
e n c o r e ; il s a g i t sans d o u t e d e S e lm a s . Q u a n d la v ille c ô t i è r e r e ç u t un é t a b lis s e m e n t g ê n o is .

des r e lig ie u x s’y é t a b l i r e n t - i l s ? , . ....


35 c f a u ssi M a r i g n o l l i • Caffa u b i m u lta r u m s e cta ru m s u n t c h ris tia n i, o u S c h i l t b e r g e r : « d a
s i t K n , v i l e r l e y C r i s t e n , r ò m i s c h e r , k r ie c h ie s c h e r , a r m e n i s c h e r u n d S u r ia n . . . sans p a r l e r
^ Juifs e . d e s p a i e n s ; P e r o T a f u r c i . e . R o x o s , M . g r e l o S e A b o g a s o s e C e r c a x o s e B u r g a r o s e
A rm ê n io s e J t r a ^ d i v e r s a s n a ç i o n e s d e c r i s t i a n o s . (é d . J im e n e z d e la E s p a d a , M a d r i d , 1874,

P 162).

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238 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

est évident que, dans une ville oú ne s’exerçait pas une domination musul-
mane, le prosélytisme chrétien pouvait s’exercer à 1’endroit des infidèles, et
le zèle des catholiques p o u r l'union trouver un é c h o 16. En particulier. les
esclaves am enés des pays paiens, m usulm ans ou schismatiques représen-
taient un catéchuménat d a c c è s relativement aisé, et à un m oindre degré,
les autres villes présentaient les m èm es possibilités d évangélisation. En ce
qui con cern e les esclaves, dont le bassin de la M e r N o ire fournissait
1'Egypte et bien d'autres marchés, nous avons vu que 1'évêque de Savasto­
poli dép lorait en 1330 de voir livrer tant de chrétiens aux Sarrasins; dans
les com p toirs gênois, il sem ble que les évèques se soient fait reconnaitre
des prérogatives qui limitaient cette possibilité : les esclaves qui venaient se
ré fu g ie r dans les com ptoirs en question étaient rem is aux prélats qui, s'ils
acceptaient d 'e m b ra s s e r la foi catholique, les faisaient rem ettre en liberté,
interdisant de vendre à des non-catholiques, ou d u m oins à des non-chré-
tiens, les esclaves chrétiens. Ceci allait j u s q u a u droit de visiter les navires
partant p o u r l'Egypte ou la Turquie, de façon à e m p ê c h e r le départ desdits
esclaves. O n sait en tout cas com bien de Russes, Tcherk esses ou autres
chrétiens ont été vendus à Alexandrie ou dans d ’autres pays m usulm ans:
cela fait d o u te r de 1'efficacité com plète de ces m e s u r e s 37.
. Ainsi, u ne activité d apostolat aup rès des infidèles ou des schismati­
q u e s 38 reste-t-elle possible; elle est cependant liée à 1'exercice des fonctions
d o r d i n a i r e d 'u n diocèse latin, m êm e si ce diocèse p o ssède relativement
p e u de ressortissants de rite latin, c o m m e ce fut le cas p o u r la plupart de
ces villes.

36 N o t a m m e n t a u p rè s d e s A rm é n ie n s , d e plus en plu s n o m b r e u x d a n s la ville, oü nous


a v o n s r e n c o n t r é les A rm é n ien s -u n is.
37 R. L o e n e r t z , L a société, p. 121-122: d is c u s s io n d e s t e x t e s r e la tifs au x é v è q u e s de Sol­
d a y a (1455) et d e C a f fa (1470). L e v ê q u e p o u v a it-il in t e r d i r e la v e n t e à d e s in fid è le s (v o ire à
d e s s c h is m a tiq u e s , si l'o n r e t ie n t les p la in te s d e s G r e c s d e C a f fa ) d e s c h r é t i e n s d e quelque
r i t e q u e c e fut, o u s e u le m e n t d e s c a t h o li q u e s ? M a r t in V, r a p p e l a n t les i n t e r d ic t io n s de Nico­
las IV, e x c o m m u n i e en 1425 c e u x qui, da ns les d i o c è s e s d e C a f fa et d e la Tana, et dans les
p a y s vo isin s, e n l è v e n t d e s Z iq u es , d e s Russes, d e s Alains, d e s M i n g r é lie n s , d e s Abhkazes, bap-
tisés s e lo n le r it e g r e c , p o u r en fa ir e d e s e s c la v e s ; C a lix te I I I in siste là-dessus, en 1456 (Coc-
q u e lin e s , B u lla r iu m R o m a n u m , III, 2, 454 et 3 , 7 8 ); le c o n c i l e du L a tr a n d e 1179 avait dèja
i n t e r d i t d e v e n d r e d e s e s c la v e s c h r é t ie n s ( R o m a n o s et a lio s C h ris tia n o s ) au x Sarrasins (Mansi,
S a c r o r u m c o n c ilio r u m , X X I I , p. 230). S u r la v is ite d e s n a v ir e s , cf. Io r g a , N o te s et extraits, 1,
p. 566 (1434). - V o i r aussi Ch. V e r lin d e n , Aspects de 1'esclavage dans les c o lo n ie s m édiévales ita-
lie n n e s , d a n s H o m m a g e à L u c ie n Febvre. E v e n ta il de 1'histoire viva n te, II, Paris, 1953, p. 91-104.
31 C ec i, b ie n e n te n d u , à c o n d i t i o n d ' é v i t e r les e x c è s d e z è le a u x q u e ls les co n su ls gên o is se
m o n tre n t fort h o s tile s .. .

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LES M ISSIONS DE I.A MER NOIRE F.T DU CAUCASE 239

pes 1364, d a ille u r s , U rb a in V avait tiré q u e lq u e s c o n sé q u e n c e s de


cette situation. D a n s une b u lle a d re ssé e au maitre des Frères P rêch eurs et
aux archevèques de N ic o sie et de P a t r a s ’9 - dans le territoire d e sq u e ls se
trouvaient la p lu p a rt des couvents des provinces de T e rre Sainte et de
G re ce , qui su ccéd aien t à la Société des Frères Pérégrinants su p p rim é e
J a n n é e preced en te - le p a p e se pron on çait sur la requête à lui présen tée
par les D o m in ic a in s « p é r é g r i n a n t » chez les M usulm an s, les paiens et les
peuples schism atiques, et n otam m en t ceux de Caffa et de Péra. Ces reli­
gieux d e m a n d a ie n t à jo u i r des privilèges consentis p a r Jean X X I I a la
Société des P éré g rin an ts; U r b a in V constatait q u e Péra et Caffa n'étaient
pas a p ro p re m e n t p a r le r des terres de m issio n 40, et restreignait les p ré ro g a -
tives des F rères en question, tout en leur reconnaissant le droit d e c o m m u -
niquer avec les in fid è le s et les schismatiques, qui habitaient les terres oü ils
étaient e n v o y é s 41.
Ainsi, née d une initiative m issionnaire - la création des sièges d e V o s ­
pro et K h e rso n à 1'intention des p eu ples de rite grec ra m e n é s à 1'Union des
Eglises su ccéd an t à celle des sièges de Caffa et de Savastopoli, institués
pour la c o n v e rs io n des T artares et la réduetion à l'U n ion des p e u p le s d 'A b -
khazie - la h ié ra rc h ie c ath oliqu e des b o r d s de la M e r Noire, d ’a b o r d c o u lé e
dans le m o u le de la provin ce de Vospro, puis p r o b a b le m e n t assujettie
directement au siège apostolique, ou peut-être à 1'archevêque d e G ênes,
devint-elle en définitive une hiérarchie adaptée à 1 ’existence de 1 ’e m p ir e
gênois de la M e r N o ire . Progressivem ent, les G ê n o is avaient aequ is toute
1'autorité p o litiq u e à Caffa, puis au voisinage de cette ville. En 1365, ils
setaient assu rés de S o ld a y a et de la côte voisine; en 1380, les T a rta re s
reconnaissaient le u r autorité sur la C rim ée littorale. Ailleurs, par de s
accords avec les Tartares, les Valaques, les Géorgiens, les G re c s o u les
Turcs, ils s’étaient é g ale m en t assurés de com p toirs p ra tiq u e m en t in d é p e n -
dants des d o m in a tio n s locales, et ce réseau de possessions se maintint, m al-
gré q u e lq u e s p e r t e s 42, j u s q u a u m ilieu du X V C siècle et m ê m e j u s q u e n 1475.

" F o n t e s , X I, 70-71 (22 s e p t e m b r e 1364).


** L e p a p e sait q u e c e s v ille s, b ie n q u e d o t é e s d e g o u v e r n e u r s g ê n o is , so n t sous la s o u v e -
raineté du ba sileu s et d u kh an, c o m m e ce la a p p e r t du c o u r s d e s m o n n a i e s e t d e l u s a g e d e
•«-urs b a n n ie r e s . M a is il sait aussi q u e C a ffa a un é v ê q u e c a t h o liq u e , et P é r a p lu s ie u r s ég lis e s .
41 Sans les a u t u r is e r à a b s o u d r e les m a r c h a n d s la tins q u i fr é q u e n t e n t A le x a n d r ie , ni les
c,er t s latins e x c o m m u n i é s . II p r é c is e q u e les p o u v o ir s , n o r m a l e m e n t a tt r ib u é s aux léga ts, n e
Peuvent ê t r e e x e r c é s p a r les F r è r e s P r ê c h e u r s q u e là oü il n ’y a pas d é v è q u e s d io c é s a in s .
A p r e s la p e r t e d e S i n o p e (1401), c e s t c e lle d ' Y l i c e (1455) et d e S a v a s t o p o li. la m ê m e
année. En 1458, o n é c r i t e n c o r e : s u n t in m a r i p o n lic o u ltra C apham a lie n o b ile s civ ita te s d it io n i

14
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240 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O RIENT AU MOYEN AGE

O r les autorités gênoises ne se désintéressaient nullement des questions


religieuses dans leurs d o m a in e s de 1'ancien Pont Euxin.
S c h iltb e rg e r avait connu, vers 1410, trois évèques à Caffa, un latin un
grec et un a r m é n ie n 43. La R é p u b liq u e souhaitait en 1431 1’érection dc Catla
en archevêché, en arguant dc ce qu e cctte cité était dans ces parages la
« c o l o n n e de la C h r é t i e n t é » 44; en 1440, elle proposait au patriarche arme-
nien de ven ir se fixer à Caffa, u rb e m c h ris tia n is s im a m - en envisageant éven-
tuellem en t de faire pression su r lui p a r la saisie de ses re v e n u s4S la nomi­
nation d 'u n é vê qu e grec p ré o c c u p e b e a u c o u p elle aussi la Republique et,
a p r è s 1453, la B a n q u e de S a in t-G e o rg e s 46. En ce qui con cern e levêqu e latin
d e Caffa, on a fait pression en 1440 p o u r q u e fut rap id e m en t désigné levè-
q u e Jacques C a m p o ra , en raison de la récente réu n ion à 1'Eglise romaine
d e s G re c s et des A rm én ien s; mais, en 1455, on se plaint qu e «s o u s pretexte
d 'é t e n d r e la foi c a th o liq u e », il m oleste les autres nations, et surtout les
A rm é n ie n s, qu i form en t la majorité de la p o p u la tio n : on insiste auprès du
p a p e p o u r q u ’il soit r e m p la c é 47. Le choix des é v è q u es est donc une affaire
q u i intéresse le b o n o r d r e dans les c o m p to irs gênois.
L 'a n c ie n n e provin ce de Vospro, qui s'était m o d e lé e sur 1’em pirc gênois.
s e s t ainsi tra n sfo rm é e en un en se m ble d'évêchés et de couvents qui desser*
vent les c o m p t o irs gênois. Et qui disparaissent en m ê m e temps que ces
c o m p t o i r s eux-m êm es. A près 1475, il subsista à Caffa, et à Caffa seulement
sem ble-t-il, des élém ents catholiques. Privés d evêques, ils n eurent d'autre
r e s so u rc e , p o u r a v o ir les prêtres ind ispen sables à le u r vie liturgique, que de

n o s tre s u b jecte. v id e lic e t S a m a s tru m , S o ld a ia m et C im b a lu m . (V ig n a , C o d dipl., I, p. 818). Cf.


B r a t ia n u , La M e r N o ir e des o rig in e s à la c o n q u ê te o tto m a n e, p. 274-275 et passim.
41 Ed. N e u m a n n , p. 106.
44 I o r g a , N o te s e t extraits, I, p. 544.
45 A c o n d i t i o n q u e les « c h e f s d e s A r m é n i e n s » se r a llie n t à c e t t e i d é e (ib id , 111, p. 62). -
D ifficu lté à p ro p o s du «v e s c o de C a f fa d e E rm e n i» (1 4 7 4 -1 4 7 5 ): C o d dipl., II, 2, p. 118.

186, 196. . .
46 L / é v é q u e g r e c , q u i a u ra it é t é i m p o s é à ses c o r e l i g i o n n a i r e s m a l g r é leu rs constitutions.
m e u r t en 1468; les p r o t e c t e u r s d e m a n d e n t au x c o n s u ls e t à l e v ê q u e latin d e faire élire son
s u c c e s s e u r , q u e le p a p e r e v ê t i r a d e sa d ig n it é . B e s s a r io n r e c o m m a n d e l a rc h e v ê q u e d Ama
sée, P a c ô m e , q u i m e u r t e n r o u t e (1470). S ix t e I V fin it p a r n o m m e r N i c o la s d e Caffa eveque
F u lle n s is - c e s t - à - d i r e d e P h o u llo i, a u t r e v i l l e d e C r i m é e - a v e c j u r i d i c t i o n sur les Grecs <-
S o l d a y a et d e C a f f a : V ig n a , C o d dipl., II, 1, p. 554, 564, 581, 689, 836, 873.
47 I o r g a , N o te s et extra its, II I, p. 62; V ig n a , C o d d ip l., I, p. 365, 369-378, 816, 893. u
te n e n s d e J a c q u e s est in v it é à c e q u e c u m r e lig io s is illis G re c is et A rm e n is ita hum a ne se
u t n u l l u s . . . q u e r e la m d e fe n e possit. S u r le s é v è q u e s d e S o ld a y a , V ig n a , I, p. 347; de im -

II, 1, p. 676.

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LES M ISS IO N S DE LA M ER N O IRE ET DU CAUCASE 241

faire acheter sur les m archés d esclaves de Constantinople des prêtres


catholiques raflés p ar les pirates ou capturés par les T u rc s 48.
La province toute entière avait pratiquem ent cessé, dès la fin du X I V C
siècle - com m e U rb ain V 1’avait constaté en 1364 p ou r Caffa - d etre un ter­
ritoire de mission. Elle fut cependant, au lendemain de 1'Union de Florence,
un des lieux oú se réalisa effectivement TUnion des Eglises.

b) L'archevêché de Sarai

Chronologiquem ent, la naissance de la province ecclésiastique de Sarai


se place après celle de la province de Matrega, qui l’a précédée de treize
ans. Mais il sem b le logique de ra p p ro c h e r cette création de celle de la p r o ­
vince éphém ère de V o s p ro dont, sur bien des points, elle parait p re n d re la
suite.
A 1'origine de cette création, nous ne trouvons pas un évènem ent qui
ait frappé 1'imagination des contemporains, tel que la nouvelle des conver-
sions réalisées p a r Jean de M ontecorvino, le ralliement à 1’Eglise ro m ain e
des rois des Alains et des Ziques, ni même la révélation d ’un n o u v e a u
champ d'apostolat. II sem b le que, cette fois, ce soit une réflexion su r les
conditions de vie des chrétientés de Tartarie qui ait été le facteur essentiel
de la création d ’un nouvel archevêché.
Le p erson n age principal est, ici, un Franciscain, frère C o sm e de Ziquie,
qui avait exercé son activité, avant 1359, dans les pays de mission - il avait
eu 1’occasion d ’y re n d re aux m archands vénitiens des services qu i le rendi-
rent persona grata a u p rè s de la Sérénissime R ép u b liq u e - . O n sait c om -
ment, en 1359, il fut élevé à le v ê c h é de T ré b iz o n d e 49. De 1359 à 1362, il
résida à Avignon, et il est possible qu'il ait été durant ce tem ps un des
conseillers d u p ap e Innocent V I p o u r les affaires d ’Orient, c o m m e du
ministre général des Franciscains auqu el il a pu suggérer la division d e la
vicairie de T artarie A q u ilo n a ire entre les deux custodies d e C affa et de
Sarai. De son activité avignonnaise, nous connaissons surtout u n e b u lle d u

n R. Loenertz, Le origini delia missione sescentesca dei Domenicani in Crimea, d a n s Archi-


vum Fratr. Praed., V, 1935, p. 27. Le P. Loenertz, qui a bien vo u lu nous d o n n e r c e tte r é fé re n c e ,
n«us é criva it: « m o d e de p ro visio n d u n o ffice ecclésia stiq u e non p ré vu par le Codex juris
eanonici! »,
49 Fedalto, La chiesa latina, p. 439, 457-458 et 465; sur 1’im possibilité qu il ait s u c c é d é d è s
>345 a le v ê q u e Antoine, cf. supra, p. 233; il ne po rte pas le titre d e v è q u e d ans les le ttre s q u e
*c sénat de V en ise e n v o y a à son p ro p o s au pape et aux card in a u x le 2 avril 1356, ta n d is q u 'il
désigné sous so n titre é p isc o p a l d ans celles du 28 avril 1360, et a r c h ié p is c o p a l d a n s c e lle s
1368 (Fedalto, op. ciL, p. 439).

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242 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIONS [>'OKIENT AU MOYEN-AGE

17 ja n v ie r 136150, qu'il obtin í du pape, el qui décidait d élever au rang cie


fêtes d o u b le s celles de saint Nicolas, de saint Antoine ct de saint Georges,
partic u liè re m en t vé n éré e s p a r les O rientaux, à 1'intention des néophytes de
T artarie A qu ilon aire.
Le 14 juillet 1362, In n ocent VI translérait I e v ê q u e de Trébizonde au
siège de Sarai, a lo rs vacant, en érigeant ce siège en archevêché. La b u lle '1,
m a lh e u re u se m e n t, ne d o n n e a u c u n e indication su r le ressort de la nouvelle
provin ce, ni su r les évêch és qui lui étaient ratta c h é s1
’2. On pourrait penser
q u e la d é c isio n d u p a p e visait en p r e m ie r lieu à d o n n e r un titre archiépis-
c o p a l à u n e p e rso n n a lité ém inente, íort a p p ré c ié e de la R é p u b liq u e de
Venise, sans q u e se joignit à ccttc p ro m o tio n une réo rg a n isa tio n de la hié-
r a r c h ie en pays de mission. Mais, cn fait, cette réo rg a n isa tio n ne pouvait
m a n q u e r d'intervenir.
D 'a b o r d , en raison des distances séparan t 1'a r c h e v ê q u e de Khanbaliq
d e ses suffragants. En q u e lq u e s mois, un é v ê q u e d u Q ip c a q pouvait gagner
A v ig n o n et en re v e n ir; il fallait plus lo n g te m p s p o u r qu u ne lettre écrite par
ses so in s parvin t à son m étropolitain , au lointain Cathay. On ignorait
e n c o r e q u e le d e r n ie r é vê qu e de Zayton avait péri, cette année-là, en traver-
sant la D z o u n g a r ie ; m ais on savait q u e la poste m o n g o le n existait plus, elle
q u i avait p e r m is au g ran d-k h an de g o u v e r n e r 1 ’e m p ire au tem p s oú celui-ci
était u n itaire : les relation s entre K h a n b a liq et S arai étaient désormais
qu asi-inexistan tes.
D a u t r e part, la c réation de la p rovin ce de V o s p r o , en 1333, m êm e si, ici
aussi, elle n a v a i t peut-être pas fait l o b j e t d u n e étu d e a p p ro fo n d ie , témoi-
gn ait d e la nécessité qu e l'on avait ressentie, soit à la Curie, soit en pays de
m ission , d e r e g r o u p e r les postes de m ission de la M e r N o ir e en un ensem­
b le g o u v e r n é p a r un prélat résidant d a n s la zone g é o g r a p h i q u e dont cette
m e r fo r m a it le centre. L a K hazarie, n o tre C rim ée , ne po u vait continuer à
d é p e n d r e d u n a rc h e v ê q u e éloigné, résid an t en pays infidèle, quan d pro-
g re s s iv e m e n t les G êno is, et aussi les Vénitiens, y avaient des intérêts et des
é ta b lis s e m e n t s qu i exigeaien t q u e les d e u x r é p u b l iq u e s pussent prendre
c o m m o d é m e n t contact avec la Papauté.

,0 F o n te s , X , 135; G o l u b o v i c h , V, p. 92.
51 F o n te s , X , 146 ( B u lla r iu m fra n c is c a n u m , éd . E u b e l, V I, 825).
52 O n p o u r r a i t s u p p o s e r q u e la b u lle d é f i n i s s a n t le s li m i t e s d e la p r o v i n c e , n a pas éte
c o n s e r v é e ; m a is les d i f f i c u l t é s q u i i n t e r v i n r e n t a v e c 1 'a r c h e v ê q u e d e M a t r e g a , en raison de ce
que le s é v è q u e s ig n o ra ien t d e q u i ils é t a i e n t le s s u ffr a g a n ts , p a r a is s e n t in d iq u e r q u e t

n a v a i t pas e x is t é .

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LES M ISSIO N S DE LA M ER N O IR E ET DU CAUCASE 243

Sarai, enfin, était b ien effe c tiv e m e n t la capitale de 1’e m p ir e de la H o r d e


d'Or. A p o rté e d e la Tana, point e x tr e m e de la n avigation latine, cette ville
que le khan B á r k á avait ch o isie c o m m e p rin c ip a le r é s id e n c e 53, po ssédait
depuis lo n g te m p s u n e et m ê m e d e u x églises franciscaines, un c o u v e n t; elle
était fré q u e n té e p a r les m a r c h a n d s italiens et a rm é n ie n s ; elle po u vait se rvir
de centre aux m issio n s ré p a rtie s d a n s toute la T a rta rie A q u ilo n a ir e , q u e ce
fut en Bask irie, s u r la rou te d e s ste p p e s o u aux a p p r o c h e s d e la R ussie kié-
vienne54.
Il est difficile d e sa v o ir si le n o u v e l a rc h e v ê c h é devait c a lq u e r sa défin i-
tion territoriale s u r la ré p a rtitio n des cou ve n ts franciscains. J é rô m e d e
Pise, à la date de 137 3 55, distin g u e les d e u x c u sto d ie s d e K h a z a r ie et d e
Sarai; n ou s c o n n a is s o n s d é jà la p re m iè re , q u i s etendait d é jà j u s q u ’à Y lic e
sur le D n ie p r ; la s e c o n d e c o m p re n a it, avec celui de Sarai, les c o u v e n t s d e la
Tana, d'A k sarai, d ’A stra k h a n (A g ita rc a n ), d ’Ü k à k (l'actuel Uvek) près de
Saratov, M a g e r q u i est peut-être le M e n g ia r d e M a r c o Polo, K u m u k et T a rk i
(T a rch is), au D a gh estan , M a m u c c i, enfin U rg e n j et A lm aligh . M is à p a rt les
couvents d u D a gh e sta n , c e u x d u K o u b a n et de la ste p p e k a lm o u k e , q u i
étaient v r a i s e m b la b l e m e n t sou s la ju r id ic t io n de 1'archevêque d e M a t r e g a ,
faut-il a d m e t tr e que l'a rc h e v ê q u e de S a ra i étendait la sie n n e d ep u is
1'embouchure d u D n i e p r j u s q u 'a u x T ien -C h an ?
Ce qui est certain, c'est q u e C o s m e en ten dait ré g ir les é v ê c h é s d e K h a ­
zarie : en 1363, c e s t à lui q u e furen t c o m m u n iq u é e s les b u lle s d e l e v ê q u e
de C i m b a l o 56. L é v ê c h é d e la Tana, q u e le fu tu r a r c h e v ê q u e avait f r é q u e n t é
assidüment avant so n é lé v a tio n à 1'épiscopat, lui tenait à c o e u r : il faisait
valoir ses d r o its s u r lui d è s 1362, ce qui a m e n a it des d iffic u ltés a v e c 1'arche-
vêque d e M a t r e g a q u i d e m a n d a it à U r b a i n V de d é lim it e r les d io c è s e s d e la
Tana et d e M a p p a ( A n a p a ) 57. L e siège de la T a n a était a lo rs vacant, et trois
évèques (r e le v a n t d e M a t r e g a ? ) p r é te n d a ie n t la d m in i s t r e r . C o s m e se fit

5J La S a r a i d e B a t u se t r o u v a i t s u r le c o u r s i n f é r i e u r d e la V o l g a , e n a m o n t d 'A s t r a k h a n ;
celle d e B à r k à ( l a « N o u v e l l e S a r a i » , à 1 'e m p l a c e m e n t d e la v i l l e d e T s a r e v ) b e a u c o u p p lu s
haut sur le c o u r s d u f l e u v e , n o n l o i n d e T s a r i t s y n ( V o l g o g r a d ) . C e s t la N o u v e l l e S a r a i q u i fu t
le siège d e s m i s s i o n s f r a n c i s c a i n e s . C f. B . S p u l e r , D ie G o ld e n e H o rd e , p. 266-270, et s u p ra ,
P 95. n. 114.

' 4 La R u s s ie se t r o u v a i t en d e h o r s d e la p r o v i n c e d e S a r a i c o m m e d e c e l l e d e K h a n b a l i q
° u du d i o c è s e d e C a f f a : 1 'é v ê c h é d e K i e v , f o n d é e n 1320, n e r e l e v a i t p a s d e s m é t r o p o l e s d e
Tartarie.

” Golubovich, V, 193.
56 G o l u b o v i c h , V, p. 109-110; E u b e l , B u li. F ra n c is c ., V I, 922 a, (20 n o v e m b r e 1364).
57 Fontes, X I , 9-10 (1 9 j a n v i e r 1363).

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244 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D'ORIENT AU MOYEN AGE

d o n n e r p ar le pape 1 ’administration de ce diocèse, sa vie durant (28 avril


1370)58. On voit m êm e C o sm e sen tre m e ttre aup rès du Pape (il était dc
retour en Occident dès 1368) en faveur des chrétiens des monts Caspiens,
dont U rba in V r e c o m m a n d a la protection au consul gênois de Caffa, b ie n
que les «m o n t s C a s p ie n s » ne fussent pas de sa p r o v in c e ” .
Ce qu e nous ignorons, c'est si 1'archevêque C o sm e était bien introduit
auprès des khans m on gols; il est vrai que le khanat de Q ip é a q etait alors
disputé entre les G engiskhanides de la H o r d e d ’O r et ceux de la Horde
Blanche. Le séjour de C o sm e à la T a n a peut s e x p l i q u e r aussi bien par la
difficulté de résider à Sarai que p a r le désir d u n prélat fort apprécié des
Vénitiens de bén éficier des revenus d un diocèse oú la p o p u la tion dorigine
occidentale était relativement n o m b re u se et ric h e 60.
Q u a n d C o sm e était à la Curie, semble-t-il, on apprit la vacance du siège
de K h a n ba liq , et 1'idée vint soit à notre archevêque, soit à 1'entouragc pon­
tificai, de transférer 1'archevêque de S arai sur le siège é p isc o p a l du Cathay.
N o u s ignorons, une fois de plus, dans quelles con dition s on se décida à
a n n u le r la provision de Cosme, qui resta à S arai tandis q u e G u illa u m e du
Pré partait p o u r P é k in 61.
O n souhaiterait surtout savoir ce qu e fut 1'activité de s missionnaires
d an s la provin ce de Sarai, que ce soit a u tou r des résid en ces de la basse
V o lg a ou plus loin vers 1'est, parm i les tribus o ú les Franciscains du début
d u X I V e siècle avaient obtenu des résultats si prom etteu rs. M a is il faut nous
ré s ig n e r à savoir qu e les vicaires de 1'ordre en Tartarie A q u ilo n a ire se suc-
cédaient régulièrem ent, em m enant avec eux un certain n o m b r e de leurs
c o n f r è r e s 62. Et qu'en 1392 les Franciscains R o g e r d ’A n g le terre et Ambroise
de S ienne apportaient au pape une p e titio ém anan t d u vicaire de Tartarie et
des Frères, exposant le g ran d n o m b r e des c o n v e rsio n s réalisées et deman-

58 Fontes, X I , 195; G o lu b o v ic h , V, p. 94; cf. F e d a lto , La chiesa, p. 459-460. C e s t au patriar­


c h e d e G r a d o , à 1 'a rc h ev êq u e d e S u lta n ieh , à 1 'évêq u e A re z o lo m e n s is q u e le p a p e con fia it le
so in d e fa ir e e x é c u t e r sa d é c is io n .
59 Fontes, X I, 162. II n'est pas e x c l u q u e C o s m e l u i- m ê m e ait é t é d ' o r i g i n e tch erk esse ou
du m o in s c a u c a s i e n n e ( o n 1'appelle C o s m e d e Z iq u ie ).
60 Cf. E le n a C. S k r íin s k a ja , S to ria d elia Tana, d a n s S tu d i ve n e zia n i, X, 1968, p. 3-46.
61 A n n u la tio n , le l er m a r s 1370; n o m i n a t i o n d e G u illa u m e , le 10 m a r s : E u b e l, Buli. Fratt-
cisc., VI, 1078-1079 ( F o n te s , X I , 186).
D é p a r t d e F r a n ç o is d e Puig, en 1371, a v e c d o u z e f r è r e s ( F o n te s , X I I , 28), suivant le
d é p a r t, en 1369-1370, d e s F r a n c is c a in s F r a n ç o is d e T e r n i, A n t o i n e e t Paul d e B orgo-San-Sep ol-
c r o , etc. p o u r la T a rta ria s u p e r io r ( G o l u b o v i c h , V, 144-146). Cf. aussi G o l u b o v i c h , V, p. 160, 213
( d é p a r t d e v in g t - c in q v o l o n t a i r e s a u t o r i s é e n 1376).

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I

LES M IS S IO N S DE LA M E R N O IR E ET DU CAUCASE 245

dant des renforts . vin gt-quatre Frères M in e u rs furent à n ou veau autoriscs à


partir63.
Là-dessus survenait 1 invasion de T am erlan, en lutte contre ToqtamiS.
purant 1 hiver de 1395-1396, le c o n q u é ra n t transoxianais rasait Astrakhan,
détruisait Sarai don t les habitants étaient m assacrés et dévastait les rives
de la M er d Azov. P arm i les p y ra m id e s d e c ad avres décapités, aux pieds et
aux mains coupés, qu i m a rq u è re n t son passage à Sarai, c o m b ie n de m em -
bres de la c o m m u n a u té chrétien ne figuraient-ils? La T ana m ê m e était rui-
née et resta lo n g te m p s déserte.
Toutefois 1é p r e u v e n'anéantit pas totalem ent la m ission d u Qipõaq. On
ne parle plus de 1'archevêché de Sarai, dont les négociations entre G ê n e s et
la Papauté ne font pas m ention : Jean III de Sultanieh a pu s'établir à C affa
et jouer, sans a u c u n e difficulté, le rôle d u n m é tro p o lita in 64.
Il est v r a is e m b la b le q u e C o s m e était mort en 1382; du m oins un e p is c o ­
pus Ta n en sis, le D o m in ic a in C onrad, agissait-il cette année-là c o m m e auxi-
liaire de 1'évêque de C on stan ce - ce qui laisserait entendre qu e 1’adm inis-
tration consentie à titre v ia g e r à 1’arch evêque de Sarai en 1370 avait pris fin
par le décès d e ce d e r n ie r et q u ’U rb a in V I lui avait d on n é un s u c c e s s e u r65.
De fait, si le n o m d e S a ra i disparait de nos listes é p isc o p a le s66, le siège d e la
Tana allait rester o c c u p é p a r des évèques, norm alem ent résidents. C e s t
ainsi qu'en 1398 B o n ifa c e IX désignait 1'évêque de la Tana, con jo in tem en t
avec celui de Caffa et avec 1'archevêque de Sultanieh, c o m m e c o n se rv a te u r
des privilèges consentis aux Frères U n iteu rs67. Un Mathieu, qui n ou s est
inconnu, puis le D o m in ic a in Antoine de Levanto, que re c o m m a n d a it sa
connaissance des lan gues du pays (1422), le Franciscain N icolas de T ro ja
(1425), un certain François, le Franciscain Basile de B o lo g n e (1439-1456) et
finalement le D o m in ic a in M ath ieu de Pontrem oli (1464) se succédèrent

G o l u b o v i c h , V, p. 301.
64II n e s t p a s c e r t a i n , d a i l l e u r s , q u e n 1362 C a f f a a it fa it p a r t i e d e la p r o v i n c e d e S a r a i;
1évêq u e n o m m é e n 1358 n e m o u r u t q u e n 1376, e t sa s u c c e s s i o n fu t r é g l é e p a r un t r a n s f e r t
(Fedalto, op. cit., p. 4 5 0 - 4 5 1 ): c e c i n o u s e m p ê c h e d e s a v o i r si les b u l l e s fu r e n t c o m m u n i q u é e s
à Sarai.
65 E u b e l, H ie r a r c h ia , s. v. T a n e n (c f . R e g e s te n z u r G e s c h ic h t e . . . C on sta n z. 6648). II e s t év i-
demrnent t o u j o u r s p o s s i b l e q u u n s iè g e , n o n - r é s i d e n t i e l , a it é t é p o u r v u d u n t i t u l a i r e d a n s
•gnorance d e d é c i s i o n s a n t é r i e u r e s .
** L e v ê c h é d e la T a n a r e l é v e d i r e c t e m e n t d u S a in t - S iè g e e n 1425 ( E u b e l, B u li. F ra n c is c .,
1656 et 1664), c e q u i s e m b l e b i e n c o n f i r m e r la d i s p a r i t i o n d e l a r c h e v è c h é d e Sarai.
47 Fontes, X I I I , 71.

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246 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIONS D O R IE N T AU M O YEN AGE

jusqu a la disparition du com ptoir, qui avail rcpris vic aprcs Ics dévasia
tions de T a m e r la n 68.
II existait encore une custodie de Sarai en 1401, et une vicairie dc Tar
tarie A qu ilon aire en 1410. Et on peut sans d o ute r e tro u v e r un évêché, mis­
sionnaire sans contestation celui-là, dont la création pouvait remonter au
temps de 1'archevêque de Sarai, dans un siège a u q u e l était prom u cn 1434
un prêtre de L w ó w , Pierre de L o m bertz, p o u r s u c c é d c r à un évêque du
nom de Jean : Pierre est dit e p is co p u s te rra e S a rm a ta ru in in AstrahanM
Astrakhan était effectivement le siège d un e résid en c e franciscaine, attcstée
en 1373 et 1390; la ville s'était rap id e m en t relevée a p rè s le sac dc 1395 et
avait re m p la c é S ara i c o m m e place de c o m m e r c e - elle devait être une des
p re m iè re s à voir réap paraitre les m ission naires c a th o liq u e s au X V I I C sic-
cie - , avant de deve n ir à la fin du X V e siècle la capitale d ’un khanat tartare
auton om e. La présence d'un évêqu e latin à A strakh an tém oignerait dune
lo n gu e survie des chrétientés im plantées dans la rég io n de la Volga infé-
rieu re p a r les m issionnaires latins et peut-être des efforts de larchevêque
C o sm e p o u r d o n n e r plus de vigu e u r aux m issions dan s la province dc
S a r a i 70.

c) Jean de Z iq u ie et les c a th o liq u e s du Caucase

L a création par Clém ent V I de la provin ce de M a t re g a n est pas sans


r a p p e le r celle de la province de K h a n b a liq p a r C lé m en t V. Ni 1’une ni
1 autre ne doit son origine à la con version d un souverain, annonciatrice de
celle de son peuple, c o m m e cela avait été le cas p o u r les créations plus
anciennes, m ais bien aux résultats p ro m e tte u rs de 1’action évangélisatrice
d un m ission naire exceptionnel. Jean de Ziquie, c o m m e Jean de Montecor­
vino, allait se v oir con fier le soin de con stru ire u n e église dan s un vaste ter-
ritoire oü il avait c o m m e n c é à c o n q u é r ir de s âmes. T outefois, dans le cas de

•» Cf. L o e n e r t z , U société, p. 124-125; F e d a lt o . La chiesa, p. 459-460. B a s ile qui avait été


i n t e r p r e t e d e s A r m é n i e n s au c o n c i l e d e F lo r e n c e . fut t r a n s f é r é e n 1456 au siè g e a rc h ié p is c o -
pa l C a n s e n e n sis ( d e C y rr h u s ). II r é s id a it c e r t a i n e m e n t d a n s s o n d i o c è s e : N i c o l a s V confie, en
1450, 1 e x a m e n d u n e d i s c o r d e s u r v e n u e à C a f fa a u x é v è q u e s d e la Ta n a , S a lm a s t r o et Soldaya
( igna, C o d d ipl., II, 2, p. 700). - N o t o n s q u e B a r b a r o a e n c o r e r e n c o n t r é à la Tana, en 1486,
d e s F r e r e s M i n e u r s : il c i t e un F r a n c is c a in q u i a v a it fait e n t r e r d a n s s o n o r d r e un jeu n e Cir
c a ss ien q u il a v a it r a c h e t é ( T ra v e is to T a n a a n d Persia , trad. T h o m a s et R o y . p. 7).
Eubel H ie ra rch ia , II. 248. La r o u t e d e t e r r e , à t r a v e r s la P o l o g n e et la M o ld a vie, se
su bst.tu a it a la r o u te d e m e r ; les r a p p o r t s e n t r e la P o l o g n e e t A s t r a k h a n so n t d o n c normaux
A n o t e r s e u le m e n t q u e S c h i lt b e r g e r , q u i est p a ss é p a r A s tra k h a n , n y sig n a le ni évêque,
ni c h r e t ie n . J 6

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I
L.ES MISSIONS DE LA MER NOIR E ET DU CAUCASE 247

Matrega, la nouvelle province ne devait pas se m o d eler sur une form ation
oütique - ni m êm e avoir, c o m m e celle de Vospro, le support des com p-
rnirs fréquentés par les Occidentaux.
La zone dévolue à la nouvelle province était constituée par ces régions,
aU n o r d du Caucase, 011 vivent des peuples apparentés, mais parlant des
lang ue s différentes et attachés à des religions différentes. Dans le K ou ba n ,
d o m i n a i e n t les Ziques, q u i l est parfois difficile de distinguer des Tcherkes-
seS7i Voisins des Alains, dont les séparait la steppe, et s etendant j u s q u a u
D a g h e s t a n que peuplaient les Kaítak, tribu lesghienne en cours de tartarisa-
tion72, les Ziques avaient été convertis au christianisme sous sa form e
byzantine, mais - si l'on en croit les Latins - la négligence des G re c s les
avait laissés r e t o m b e r dan s l idolâtrie, et 1’Islam faisait des p ro g rè s sensi­
bles parmi e u x 73. II existait cependant des évêchés grecs : la Ziquie form ait
un diocèse dont le chef-lieu avait été Matrega, qui avait longtem ps été une
ville byzantine; au X I V e siècle, la Ziquie et Matrega avaient ch acun e leu r
métropolite74.
Quant aux Latins, ils avaient pris pied sur la côte du K o u b a n d ’assez
bonne heure. Les M o n g o ls avaient soumis la Ziquie avant 1240; ils sem blen t
avoir inféodé M a tre g a à une famille gênoise, bien en c o u r a u p rè s des II-
Khans de Perse, les Ghizolfi, dont un m embre, Buscarei de Gisolf, avait été
envoyé p ar 1'Il-Khan en Eu rope, et qui figuraient parmi les p rin cipau x com -

71 Les co n tra ts, passés à Caffa, d is tin gu en t les esclaves de p ro g e n ie Zycha d e c e u x q u i s o n t


de progenie ja rca x ia . C o n s ta n t in P o r p h y r o g é n è t e d o n n e la Z iq u ie c o m m e c o m m e n ç a n t à v in g t
milles d e M a t r e g a et s e t e n d a n t, su r tro is cent m illes, j u s q u a N ic o p s i; e lle b o r d e la K a s a q u i e
(pays des K a s s o g u e s - c est le n o m q u e les Russes d o n n a ie n t aux T c h e r k e s s e s ) : De a d m in is ­
trando im p é rio d a n s Patr. G r., C X I I I , p. 333; cf. N. Banescu. La d o m in a tio n b yza ntine à M a tra -
ch a .. p 6 L e n o m d e s Z iq u e s a p p a r a it d è s 1245 dans les b u lles C u m h o ra u n d ecim a .
« B a rth o ld , D aghestan, da n s E ncycl. Islam , I * " éd., I, p. 910-915; 2« éd.. r e v u e p a r A. B en -
nigsen II p 86-91 E E ic h w a ld , M ie G e o g ra p h ie des Kaspischen M eeres, B e r l m 1838; P. P e llio t .
U prétendu v o c a b u la ire m o n g o l des K a íta k du Daghestan. dans Jou rn . Asiat.. C X X . p. 279 e t
suiv. Le n o m d e s C a tla cc h i se r e n c o n t r e dans les c a rte s du X V I * s iè c le ; C o n s ta n t in P o r p h y r o ­
génète co n n a ít d é jà le u r c a p it a le , K u m u k ( K h a m o u k h : P a t r Gr., C X I I I , p. 419).
” JL D ir r Cerkesses, da n s E n c y c l lsl., I. 1 * » ed.. 855. Les D o m m .c a . n s h o n g r o i s les
donnent c o m m e c h r é t i e n s d e r ite g rec. m ais c o n s ta te n t q u e leu r p r in c e est p o l y g a m e (D e
facto H u n g a ria e m a g n a e ); le m o i n e E p ip h a n e c o n s i d e r e les Z ^ t o i c o m m e d e s d e m . - m f i d è l e s
(Patr. G r , C X X , p. 243); cf. aussi G o lu b o v ic h , V. 43; A.-D. V o n d e n B r m c k e n , D ie . N a tio n e s ..

P ^ 1117 r ité dans V La u ren t, Un évêché fa n tôm e o u la B itzin a ta u riq u e , d a n s


Echos J o fr x r n i 939 P 9 U . su iv Cf.. R C r. C r.. C V II. p. 367. 394. 398. U s d e u x m é , r o -
Poles s o m S i n c . e s Í » n S H. G e l z e r . U n g c d r U c k ,e . . . B ,s ,ü n ,e rVe r m C n is s e . d a „ s B y ^ n H n is -

Zeitsch rift, I, 1892, p. 253 et suiv.

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248 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

merçants en M e r Noire. Cette inféodation n e s t peut-être pas antérieure à la


fin du X I V e siècle : il n e m p ê c h e que les G ên o is avaient déjà pris pied dans
cette ville - située de façon très heureuse sur la péninsule de Taman, cn
face de V ospro - et que les Ghizolfi allaient s'y m aintenir j u s q u e n 14827\
Jean de Ziquie était, d a p r è s Jean III de Sultanieh, un n oble zique qui,
réduit en esclavage et ven du à Gênes, s’y serait instruit dan s la foi chré­
tienne; libéré, il entra dans 1 'ordre franciscain et revint dans sa patrie pour
y prêcher à ses com patriotes76. Ceux-ci avaient été p ré c é d e m m e n t 1objet
des prédications de Richard d'Angleterre et de François de Cam erino, et le
« r o i des Z iq u e s», Versacht, avait adopté la foi cath oliqu e; mais il semble
qu'il se soit agi là d ’un ram eau implanté dans la pén insule de Crimée, et
non des Ziques du K ouban, qui ne constituaient d 'ailleu rs certainem ent pas
un royaum e u n iq u e 77; Jean de Ziquie, en tout cas, ne parait pas avoir fait
référence à cette prem ière conversion des Ziques. M ais sa p r o p r e prédica­
tion sem ble avoir connu un grand succès; et le m ission naire s'en vint à Avi­
gnon, en 1348, p o u r d e m a n d e r au pape de d o n n e r à son terrain d apostolat
une organisation stable et des m oyens plus am ples. C lém en t V I répondit à
son voeu, le 21 février 1349, en créant une n ouvelle p ro v in c e ecclésiastique
dont il lui con féra le titre a rc h iép isco p a l78.
Le siège du nouvel archevêché fut placé à M a t re g a (a u jo u r d ’hui
Tam an ), ancienne possession byzantine oú se trouvait une m é tro p o le grec­
qu e ; la bu lle pontificale évoque cette dern ière en précisant q u e l l e n etait
pas o c cu p ée p a r un prélat c a th o liq u e 79. II est à noter, d a ille u r s , q u o n n'y
connait pas de couvent franciscain d a p r è s les listes q u e n o u s possédons; il

75 Io r g a , N o te s et extraits, I, p. 36; B e lg r a n o , dans A tti d elia S o cie tà lig u r e d i storia patria,


1866, p. 127 (l e t t r e d e Z a c c a r ia G h iz o lfi, au le n d e m a in d e la c h u t e d e la c it é ). Un A rgon u s de
G isulfis, d o n t la filie b é n é f ic ia d u n e d is p e n s e d e m a r i a g e en 1329 ( M o l la t , Jean X X I I , 45331),
d e va it-il son n o m à 1II-K h a n A r g u n ? L a s itu ation d e s G h i z o l f i à M a t r e g a é v o q u e c e lle des
d e l l ’O r ta à Caffa, s e ig n e u r s d e la v ill e au d é b u t du X I V e siècle.
74 D e r L ib e llu s de n o titia orbis, éd. K e r n , p. 111; G o l u b o v i c h V p 40
77 S u pra , p. 231-232.

Fontes, IX , 146, G o lu b o v ic h , V, p. 40 et suiv.; G. F e d a lt o , La chiesa latin a, p. 455.


7V C u m , s ic u t a ccepim us, in re g n o Z e c h ia e qu aed am eccles ia m e tro p o lita n a , M atrigensis
ecclesia appellata, qu a e d iu c a ru it, p r o u t caret, p a s to re c a th o lic o , e x is te re d in o s c itu r. - M atrega
(To p.ii T a Pt"Xa . * les s è c h e r i e s » - o n sait le r ô l e q u e jo u a it le p o is s o n s é c h é d a n s le c o m m e r c e
d e la m e r N o i r e ) , un m o m e n t o c c u p é e au X I ' s iè c le p a r les R u s s e s q u i 1’a p p e la i e n t Tm utara-
kan, éta it r e d e v e n u e g r e c q u e au c o u r s d e c e s iè c le , et 1'était e n c o r e au X I I * . (N . B an escu . art.
c ité ). En 1192, Isa ac I A n g e a u to r is a it les G ê n o i s à n a v i g u e r v e r s t o u t e s les r é g i o n s d e son
e m p i r e p ra e te r R u s s ia m et M a tra ch a m ( C e s a r e I m p e r ia li , C o d ic e d ip lo m á tic o delia rep u b lica di
G en ova , R o m e , 1942, t. III, p. 61). L e s D o m in ic a i n s h o n g r o i s y d é b a r q u e n t, v e n a n t d e C on stan ­
t in o p le , en 1236.

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LES M ISSIONS DE LA MER NOIRE ET DU CAUCASE 249

s e m b le difficile c e p e n d a n t de s u p p o s c r que Jean de Ziquie ait re c o m m a n d é


le choix de cette ville s'il n'v avait pas une base m issionnaire sur place,
d a u ta n t q u e M a t re g a était un port fréquenté p ar les m arch an ds italiens e t
probablem ent déjà d o m in é p a r des seigneurs gênois vassaux du khan de la
Horde d ’Or, toutes con d itio n s fa v o ra b le s à lim p la n ta tio n d ’une résidence
de religieux latins.
Quant à la p r o v in c e ecclésiastique, elle n etait pas définie dans la bu lle
de 1349, m ais d e u x b u lle s du 22 mai 1349 érigeaient en cités épiscopales
deux villes qui recevaien t p o u r pasteurs T h o m a s de B ira g o, e p is co p u s
Sybensis et Jacques d e P on tecorvo, e p is co p u s L u cu ce n s is , tous deu x fran cis­
cains80, en faisant état des succès re m p o rté s p a r la prédication des Frères
Mineurs en Z iqu ie. Ceci nous invite à c h erch er non loin de M a tre g a et au
K ou b a n les d e u x villes en q u e s tio n 81.
L activité de 1’arch evêqu e, de ses suffragants et de leurs m ission naires
se poursuivit et, semble-t-il, au cours des dix années suivantes, elle atteignit
la région de D e rb e n d , près des Portes de Fer. R evenu à A vignon en 1358,
Jean de Z iq u ie e x p o s a le t a t de sa provin ce : sur une distance équ ivalan t à
huit jo u rs de voyage, on ne trouvait pas une cathédrale; les peuples, insuffi-
samment e n cad rés, risquaient de passer à 1'idolâtrie ou à 1 Islam. Le p a p e
Innocent V I autorisait en c o n sé q u e n c e la r c h e v ê q u e à é rig e r d e u x villes en
cités épiscopales, à y c on stru ire des églises et à désign er lu i-m èm e des évê-
ques, le 22 ju in 1358. Jean, m uni p a r la C h a m b re a p ostoliq u e d un viatique
de cinquante florins, le 26 juillet, reprenait le chem in de la Z i q u i e 82.
Oü s’é le v è re n t les d e u x nouvelles cathédrales? D e u x conflits oú se
trouva im p liq u é la r c h e v ê q u e C o sm e de S arai permettent au m oin s d emet-
tre des hypothèses. En 1363, peu de tem ps après la création de 1a rc h e v ê c h é
de Sarai, Jean de Z iq u ie d e m a n d a au pape, qui en confia le soin à T h o m a s
de Tabriz, a rc h e v ê q u e de Khilat, de d élim iter le diocèse de la T a n a et le

,0 G o l u b o v i c h , V, p. 45 ; F on tes, I X , 150 e t 151.


" On a i d e n t i f i é Syba a v e c le C uba d e s p o r t u la n s (TSuba. au sud d A n a p a ) et L u cu ce ru
avec lo Copa su r la m e r d ’A z o v , au n o r d d e M a t r e g a (l e C o p a riu m , o u 1e v e q u e d e C a ffa r e v e n -
diqu e en 1471 u n e c h a p e l l e ? - V ig n a , Cod. d ipl.., II. 1, P- 734 et 784); c e s id e n t .h c a t .o n s s o n t
peu assurées. H a y t o n c i t e un Ciba. à u n e d e m i - é t a p e « d u D e r b e n t » , o ü se t r o u v a it a on í re
des Il-K h a n s et d e la H o r d e d ' O r : il d o i t s a g i r d e K u b a (R . S. S. A z e r b e ija n ). e c i p a< * r a i
jusquen D a g h e s t a n 1’e x t e n s i o n d e la p r o v i n c e d è s 1349 ( D o c A rm ., U, p. )- J*cu
pou rrait v e n i r d e L o c ic i, q u e les p o r t u la n s p la c e n t à l e m b o u c h u r e a n c e n n e d u fle u v e ^ K o u -
ban ( D e s i m o n i et B e l g r a n o , A tla n te id ro g ra fic o . p. 129). c e s t - à - d i r e t r e s p rè s d e lo C o p a ^ u r \ c
nom d e Ciba, cf. la r e m a r q u e d e M. C a n a r d , R e v u e des études a rm é m e n n e s V, 1968, p. 321-322.
« Fontes, X , 116; G o l u b o v i c h . V. p. 43; S c h a e fe r , D ie A usga b en ... II. P-

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250 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D'ORIENT AU MOYEN-AGE

diocèse M ap p ensis, le p re m ie r relevant sans doute de S arai et le second dc


M a tre g a (et se trouvant alors sans titulaire). On a p ro p o sé d'identifier ce
d e r n ie r siège à celui d'Anapa, ville de la côte du K o u b a n située au sud de
Matrega, ce qui laisserait su p p o se r que les régions litigieuses se trouve-
raient à 1'intérieur et n on sur la c ô t e 83. M ais ceci laisse entendre q u u n évê-
ché M a p p e n s is avait pu être créé p a r 1’a rc h e v ê q u e de M atrega. Un peu plus
tard, en 1370, C o sm e de S ara i se plaignait qu e trois évèques se fussent mis
ind üm en t en possession des biens de 1'évêché de la T a n a : Nicolas, episco­
p u s M a ia n en sis, Mathieu, e p is co p u s F o rru s ie n s is et Lazare, ep iscop u s Tar-
c u e n s is 84. Le troisièm e est certainem ent un é vê qu e de Tarki, viile les-
gh ien n e q u e nous allons retrouver; le second nous reste non identifiable85;
le p r e m ie r parait bien être Nicolas de N e u e n b u rg , un D om in icain qui avait
été p o u r v u d u siège de M a ie ria , le 8 juin 1366, en rem plaçant le Franciscain
Jean S p e c u li, p o u r v u le 22 juillet 1363 après Ia m ort d ’un N i c o la s 86. M aieria,
localité qu i s e m b le avoir été de bon n e heure p o u rv u e d ’un couvent francis­
cain, est selon toute a pp aren ce identique à M adjari ( M a g i a r ) : cette ville,
située s u r la K o u m a , affluent du Manytch, à peu près à mi-chemin de
M a t re g a et de D e rb e n d , sur la route menant de la péninsule de Tam an aux
Portes d e Fer, c o rre sp o n d ra it au M e n g ia r de M a rc o Polo : sa situation géo-
g r a p h iq u e r é p o n d ra it tout à fait au souci exprim é p a r Jean de Ziquie de
j a l o n n e r p a r des évêchés la route en q u e stio n 87. Elle avait déjà un évêque

*x Fon tes, X I , 9-10; G o lu b o v ic h , V, p. 44.


M Fon tes, X I, 195. Cf. supra, p. 243 : il nous s e m b le que, l a p p a r t e n a n c e d e la Ta n a à l’une
d e s d e u x p r o v i n c e s en q u e s t io n ayant pu ne pas ê t r e r é g l é e ( T h o m a s d e T a b r i z avait été
t r a n s f é r é en 1368 à S u lta n ie h ), 1 'arch evêq u e d e M a t r e g a aurait é t é s u s c e p tib le d e c o n fé r e r
1 'a d m in is tr a tio n d e c e d i o c è s e v a ca n t à tro is d e ses su ffr a g a n ts . ..
®5 G. F e d a lt o , La chiesa, p. 460, p r o p o s é d e r e c o n n a it r e d a n s F o rru s ie n s is u ne ca co gra p h ie
p o u r Saraensis', c e la ne s e m b l e pas p o ssib le, 1'arc h ev êq u e d e S a r a i é t a n t le plaignant.
®‘ E u b e l, H ie ra rch ia , I, 322. A n o t e r q u e N icola s , e p is co p u s M a ierien sis, agissait en 1368
c o m m e a u x ilia ir e d e I e v ê q u e d e H a lb e r s ta d t (S c h m id t , Ü rk u n d e n b u c h des H och stifts Halbers-
tadt, I V ). N i c o l a s fut t r a n s fé r é à L u b e c k en 1377, sans d o u t e r e m p l a c é p a r un Jean qui vécut
lui aussi en P o m é r a n i e (1378) et a u q u e l aurait s u c c é d é en 1412 un Jean, e p is c o p u s M a jorien -
sis. C f. F e d a lt o , La chiesa, p. 460. La d if f ic u lt é se t r o u v e ici da n s c e q u e I e v ê q u e Nicolas, en
1368, a p p a r a it c o m m e n o n -ré s id e n t ie l, a lo r s q u e la m a in m is e sur T a n a parait le fait d un évê­
q u e r é s id a n t e n O r i e n t ____
*7 P e llio t , N otes o n M a rc o P o lo , II, p. 777-778. O n id e n t ifie s o u v e n t M a d ja r i à G eorgievsk,
qui se t r o u v e n e t t e m e n l au sud d e la v ille a n c i e n n e : cf. Jean P o to c k i, Voyage dans les sieps
d ’A stra k h a n et d u Caucase, éd. K la p r o t h , Paris, 1829, p. 185-192. P e llio t r a p p r o c h e le n om de
C u m m a g e ria , o u le D e lo c is p la ce les d e u x c o u v e n t s q u e Paulin d e V e n is e a ttr ib u e à Maieria,
d e c e lu i d e K ú m m ã j a r q u e c it e A b u 'l Fidá. L c m o t parait p lu tò t s a p p l i q u e r à u ne r é g io n q u à
u ne ville, p u isq u 'il est q u e s t io n d e d e u x /oca; si l’o n r a p p r o c h e c e t t e m e n t io n d e c e lle du

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LES M ISSIO N S DE LA MER N O IR E ET DU CAUCASE
251

avant 1363 : sa création, en tant q u e v ê c h é , à la date de 1358 serait très vrai-


s e m b l a b l e .

Ce qui n o u s p e r m e t de ja lo n n e r 1’avan ce des m issionnaires, c e st la liste


des couvents fra n c isca in s d o n n é e en 1373 p a r Jérôm e de Pise : les n o m s de
Magcr, C u m u ch , T a rc h is , peu t-être celui de M a m u c c i n ous am ènen t ju sq u 'a u
Daghestan88. Et n o u s s o m m e s tentés de p e n se r q u e n 1363, q u a n d il vint à
Avignon et q u il agita la q u e stio n de la délim itation de sa province, Jean de
Ziquie a pu d e m a n d e r au p a p e 1au torisation de c ré e r de n o u v e a u x diocèses
- de m êm e q u il sollicitait 1 octroi d ind u lg en c e s aux fidèles qui Taideraient
par leurs a u m ô n e s à c o n s t ru ir e des églises en Z i q u ie 89.
En Ziqu ie p r o p r e m e n t dite, la succession é p isc o p a le parait régulière,
tant que vit Jean de Z iq u ie : T h o m a s de B ira g o , qui fait une a p p a ritio n en
Avignon en 1363, est r e m p la c é le 16 n o v e m b r e 1366 su r le siège S y b en sis p a r
Tealdo de G o r e s t i s 90. S u r le siège L u c u c e n s is , c'est un Franciscain d u n o m
de François qui, en 1377, était désign é p a r Jean de Z iq u ie p o u r s u c c é d e r à
Jacques; il se fit c o n f ir m e r p a r le pape, peut-être pa rc e q u e 1’a rc h e v ê q u e
était m ort entre t e m p s 91. M ais la liste épisc op a le de ces d e u x sièges s'inter-
rompt ensuite, c o m m e celle de M a tre g a e l l e - m ê m e : il s e m b le q u e la m is­
sion du K o u b a n ait p e r d u son élan, tandis q u e 1’effort se portait d u côté de
la C a s p ie n n e 92.

regnum Y v e rie o ú les F r a n c is c a in s a v a ie n t eu d e u x m a r t y r s d è s 1288 et q u i p o u r r a i t è t r e s it u é


à p r o x im it é d e c e t t e C u m m a g e ria q u i se ra it la v a l lé e d e la K o u m a , o n d o i t e n v i s a g e r un a p o s -
tolat des F r è r e s M i n e u r s a ssez a c t if e n t r e M e r N o i r e et C a s p ie n n e , au N o r d d u C a u c a s e , d è s la
fin du X I I I * s iè c le . O r c est v e r s le m è m e t e m p s q u e M a r c o P o l o c it e les m a r c h a n d s g ê n o i s q u i
n aviguaient su r la m e r C a s p i e n n e : c e t t e r o u te , o u v e r t e au c o m m e r c e e u r o p é e n , 1 e t a it aussi
aux m is s io n n a ir e s .
G o l u b o v i c h , V, 193 ( c u s t o d i e d e S a ra i). C es c o u v e n t s s o n t e n c o r e c it é s e n 1390. G o l u ­
b ovich a p r o p o s é d e r e c o n n a i t r e d a n s M a m u c c i le n o m d e S h e m a k h a , au su d-est d e D e r b e n d
(II, p. 559).
M F ontes, X I , 25 (3 m a i 1363). L e p a p e a v a it d o n n é à Jean, e n 1348, le d r o i t d ’e n v o y e r à
A lexa n d rie un n a v i r e c h a r g é d e m a r c h a n d i s e s ; en 1363, il lui d o n n e c e l u i d e c o n f é r e r t r o is
offices d e t a b e l l i o n s : il s a g i t là d e s u b s id e s in d ire c t s , 1 'a r c h e v ê q u e a y a n t a in si p o u v o i r d e
ven dre u n e l i c e n c e d ’e x p o r t a t i o n , d 'u n e part, et d e s o f fic e s , d 'a u t r e part.
w G o l u b o v i c h , V, p. 117; A m o r t , D e o r ig in e in d u lg e n tia ru m , p. 187, (28 j a n v i e r 1363). T h o ­
mas avait sans d o u t e a c c o m p a g n é s o n a r c h e v ê q u e .
1.1 G o l u b o v i c h , V, p. 233. F r a n ç o i s éta it a u x ilia ir e d e 1'évêque d e B r i x e n e n 1386-1387 -
Peut-être a p r è s un s é j o u r e n O r ie n t .
1.2 N o u s n o u s p e r m e t t o n s d e r e n v o y e r à n o s étu d es , Les m is s io n n a ire s la tin s ch e z les K a i-
ta* du D agh esta n ( X I V '- X V * siècles), d a n s T r u d i X X V M e d jd u n a ro d n o g o K o n g re s s a V o s to k o v e -
dov, M oskva 1960, II I, p. 606,611 , et Les n a v ig a tio n s des O c c id e n ta u x s u r 1’O c é a n In d ie n e t la
rr'* r C a spienn e ( X l l ' - X V ' siècles), d a n s S o cié té s et c o m p a g n ie s de c o m m e r c e e n O r ie n t et d ans
lO cé a n In d ie n ( B e y ro u th 1966), p. 353-363.

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2 52 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O RIENT AL MOYEN AGE

S u r cet effort, nous so m m e s surtout inform és par une bulle de 1401


Les Franciscains travaillaient depuis le tem ps de Jean de Ziquie in ChavcJu-
k en si patria , c'est-à-dire chez les Kaítak du Daghestan, dans les «m on ts Cas­
p ie n s ». D es villes, des châteaux, s'ouvrirent à leur prédication et, dans cette
région oú C o s m e de S ara i se plaignait qu e les infidèles et les hérétiques
aient fe rm é les églises des catholiques, en 136994, « l e s infidèles n’osaient
plus b la s p h ê m e r la croix d u C h rist». Des cités entières furent converties:
celles de C h om ek , Thum a, T a rc h u (ou T h a rch u ), D e r w e li (D e rg w e li) et
M ic h a h a , qui paraissent se répartir d ep u is 1’e m b o u c h u r e du Terek dans la
M e r C a sp ie n n e ju sq u 'a u versant sud du C a u c a s e 95. On peut supposer que
certains é v ê q u es de rite grec résidant dans ces villes avaient reconnu lauto-
rité d u p a p e et de 1'a rc h e vê q u e ; il est aussi possible q u e ce d ern ier ait érige
de s é vêch és latins dans chacune d e lle s.
D e fait, des séries épiscopales font leur apparition. L une d elles est
c elle des « é v ê q u e s de 1'église des M onts C a sp ie n s», sans localisation plus
précise, q u 'o n est tenté de faire rem o n te r à une date antérieure à 1378,
p u is q u e n o u s trou von s à la fois une série clémentiste, représentée par le
F ran ciscain Jacques de V a lle Aretza, désigné p ar C lém en t V II le 3 juin 1389
p o u r r e m p la c e r un autre Franciscain, Laurent, et une série urbaniste, repré­
sentée p a r le Franciscain B e r n a r d de Caffa, p o u r v u de ce siège par Boni­
face IX , le 27 n o v e m b r e 1396, à la mort du frère M artin R u s s u s 96.
S u r le siège de K u m u k , on connait un Augustin, Em eri, p o u rvu en 1391,
et un Franciscain, Jean G ib e le ti, qui eut en 1400 m aille à partir avec le
m inistre g é n é ra l des Frères M ineurs, lequel avait fait saisir ses livres et ses
b ie n s d é p o s é s au couvent de Caffa : il faisait a lors va lo ir q u il avait fait bàtir

« E u b e l, B u l i F ra n cis c., V I I , 339 ( F o n te s . X I I I , 103). Cf. G o l u b o v i c h . V. 92.


v4 Fon tes, X I , 162.
v5 C h o m e k : K u m u k h , c h e f- lie u du c e r c l e d e L e s g h ie , R. S. S. D a g h e s ta n , dans la haute vai-
l é e d e la Su lak . T h u m a , q u e B a r b a r o a p p e l l e T u m e n ( T ra v e is to T a n a a n d Persia, p. 9, 30-31,
8 9 ) : la v i l l e d i s p a r u e d e T ju m e n , à p r o x i m i t é d u site o ü les R u s s e s é d i f i è r e n t e n 1567 leur for-
t e r e s s e d e T e r k o í o u T u m e n , a u jo u r d hui p r è s d e T e r s k o i i G o r o d ó k , a u c o n f l u e n t du Terek et
d u T j u m e n . T a r c h u : T a r k i, au s u d -o u e s t du p o r t d e P e t r o v s k , a u j o u r d ’hui M a k h a ó-K a le . Derg­
w e li : D o u r g a li, b o u r g a d e s it u é e au sud d e T e m i r - K h a n - C h o u r a , ( a u j o u r d 'h u i Buynask), le
D u g r e li d e K l a p r o t h . M ic h a h a p o u r r a i t s ' i d e n t i f i e r à M u k h a k h , R. S. S. A z e rb e ija n , cercle e
Z a k a t a ly , s u r le v e r s a n t sud d u C a u ca se. N o t o n s q u e le M a g e r o ü e x is t a it en 1393 une res'
d e n c e f r a n c is c a in e , si l’o n n 'y r e c o n n a i t pas M a ie r ia -M a d ja r i, p o u r r a i t è t r e M a gar, sur 1un <-s
a f f l u e n t s d e la Su lak , à l o u e s t d e K u m u k h . .
V6 E u b e l , H ie r a r c h ia , I, p. 350, r é u n it les é v ê q u e s d e K u m u k à c e u x d e s M o n ts
S u r c e s d e r n i e r s , cf. G o l u b o v i c h , V, 276 et 2 8 1 ; F on tes. X I I I , 1, 45 c. (e p is co p u s ecclesiae 0
tiu m C a s p io ru m , e p is c o p u s M o n tis C aspii).

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LES M ISSIONS DB I A Ml-H NOIRE ET DU CAUCASE 253

à ses propres tiaií* dan s ccttc ville une maison qu il destinait à un autre
f r a n c i s c a i n , G e o ig c s G ib t Icttts, et deux autres Frères qu il devait choisir
pour les em m enei pièch ei dans les monts C a sp ie n s97. A sa mort, un autre
F ra n cisca in , A m b io is e Scipion, fut envoyé « p o u r le salut des chrétiens
habitant ceitaines íeg io n s voisines des Monts Caspiens, sous la dom in ation
des Tartares», au m ilieu des inlidèles, des hérétiques et des schismati-
ques 98 (1421).
Un troisième siège épiscopal, celui de Tarki, était occup é en 1370 p ar le
Lazare qui est cité à p r o p o s de l eglise de la Tana; son n o m peut é v o q u e r
une origine indigène — un Lesghien ou un Zique p ro m u à 1’épiscopat, ou
bien confirm é dans sa prélature par l archevêque latin En 1433, un c e r ­
tain Corneille, m ission naire revenant des Monts Caspiens, oü un très n o m ­
breux peuple chrétien risquait de devier de la foi, faute de prédicateurs,
selon les term es e m p lo y é s p ar E ugène IV, était n o m m é ep is co p u s A tra ch ita -
nus et se voyait autoriser à re m m e n e r avec lui ju s q u ’à vingt Frères
Mineurs99.
D ’autres départs nous sont s ig n a lé s : en 1392, les Franciscains R o g e r
dAngleterre et A m b r o is e dc Sienne signalaient 1’im portan ce des effectifs
des chrétiens dans les monts Caspiens, oü on comptait près de dix m ille
convertis, et la rareté des m is s io n n a ire s : ils se voyaient autorisés à e m m e -
ner dans la vicairie de Tartarie Aquilonaire vingt-quatre de leurs con frè-
res'00. Et, en 1422, signalant la disparition de la plupart des m ission naires
dans les M o n ts Caspiens, oü existaient plusieurs couvents franciscains, le
Frère François Spinola, un Gênois, et son confrère D o m in iq u e B a rth é le m y
de Caffa recevaient 1’autorisation de prendre en Italie qu aran te religieux,
prêtres ou convers, p o u r les e m m e n e r avec e u x 101.
Entre ces deux dates, la région avait connu les attaques de T a m e rla n :
plusieurs cités et leurs églises avaient été brülées, de n o m b r e u x fidèles

1,7 Le Q u ien , O rie n s ch ris tia n u s , III, 1109: E m eri, ep iscop u s C am ocensis, est a u t o r is é à
em m en er un f r è r e d e so n o r d r e . C e t t e m e n t io n est m ise en d o u t e p a r G. F e d a lt o , La chiesa,
P-461. Jean, e p is c o p u s C o m u c h e n s is o u C h o n iu n c e n s is '. Fontes, X I I I , 1, 81, G o lu b o v ic h , V, 331.
Cet é v ê q u e se t r o u v a i t à G ê n e s , le 9 m a i 1400, p o u r la c o n s é c r a t io n d e 1é v ê q u e d e C h io
(Gênova, A r c h i v i o n o t a r ile , A n t o n i o F o g lie tta , 2, II, f° 3 6 v°). Sa p r o m o t i o n est c e r t a i n e m e n t
antérieure).
VK Eubel, B u li F ra n cis c., V II, 1508. L e p a p e c o n fé r a it aux c h r é t ie n s d e la r é g i o n u n e indul-

gence p lé n iè r e in a r t ic u lo m o rtis .
R a yn a ldu s, A n n a le s e ccles ia s tici, IX , p. 160 (29 ju ille t 1433).
IU(J Eubel, B u l i F ra n cis c., V I I , 101.
,0' IbicL, 1530. C e s r e lig ie u x ne s o n t pas u n iq u e m e n t d e s tin é s aux m o n t s C aspien s, m a is

aus>si a C h io, P é r a et C affa .

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254 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O RIE N T AU MOYEN-AGE

m assacrés ou réduits en esclavage. A la suite de 1’initiative d un Gênois


Antoine Reccana, qui avait lancé des navires sur la C asp ien n e pour 1u11e,
contre les M usu lm an s, avant de les utiliser p o u r son com m erce, Boni­
face IX finit p ar p r o c la m e r une véritable c ro isad e dont la direction fut
confiée à un Franciscain origin aire d u pays, Antoine S o lp a n , qui portait le
titre de visiteur a la tere du ministre g é n éral dans la vicairie de Russie, et de
custode de Sarai, en ac co rd a n t une ind u lg en c e plénière aux Grecs, Armé-
niens et Nestoriens, participant à 1'entreprise, qui se c o n v e rtira ie n t102.
Les textes de 1421, 1422, 1433 q u e nous avon s cités attestent que la
chrétienté ro m a in e du Daghestan avait su rm o n té cette é p re u v e ; mais nous
avons un autre tém oign age particulièrem en t v i v a n t : c e s t celui de Jean
S ch iltberger, ce ch evalier a llem a n d réduit en esclavage p a r les Turcs lors
de la bataille de Nicopolis, qui traversa la région aux en viron s de 1410.
D ans un pays m ontagneux, qu il a p p e lle S e tz u le tw i, il note la presence de
n o m b r e u x chrétiens avec leu r évêque, les prètres, des Franciscains, célé-
bran t la liturgie en langue tartare, ce qui assurait aux convertis une meil-
leu re con n aissan ce de leur foi et attirait les paiens à c e lle -c i,ü4.
Le petit p e u p le catholique du pays de la C a sp ie n n e continua à vivre
p e n d a n t tout le X V e siècle; 1’a m b a s s a d e u r vénitien B a r b a r o , qui traversa la

102 Cf. n o s a r t ic le s c ité s plus haut. L e n o m du d e s t in a ta ir e d e la b u l le d e 1401 a été lu Gol-


p a n d a n s les F o n te s ; le t e x t e du Reg. Lat. 87, f° 76, p o r t e b ie n S o lp a n .
101 D e s i m o n i id e n t if ie c e pays à c e lu i d e D jo u la d ( I e k a t e r i n o g r a d ) , su r lc T e r e k , à 1’oucst
d e M o z d o k (/ c o n ti d e lV a m h a scia ta . . . da n s A tti delia società lig u r e d i storia patria, XIII, 3,
p. 586).
R e is e b u ch , éd. N e u m a n n , p. 87-88 : « D o r i n n e sin d vil C r is t e n u n d h a b e n t ein Bislum
d o r i n n e . Und ir p r i e s t e r sin d B e y e r f ü s s e n o r d e n s u nd k ü n d e n m it latin u nd sin ge n t un lesent
ir g e b e t in t a r t a r s c h e r sp rach. Das ist d o r u m b fu n d e n das d ie L e y e n d e s t e r s t e r c k e r in dem
G l o b e n sint. Es w e r d e n o c h vil H e i d e n b e s t e r c k t im c r i s t e n l i c h e m G lo u b e n , d o r u m b das sie
d ie w o r t v e r n e m e n , d ie P r ie s t e r s in g e n t u nd l e s e n t » ; ed. L a n g m a n t e l, T ü b in g e n 1885, p. 38
( B ib lio th e k d er L ite ra ris c h e n V e re in s in S tu ttg a rt, 172) : « u n d in d e m la n d sin d auch vil Cristen
u n d h a b e n ain p is t u m b d o r i n n ; u nd d i e p r i e s t e r sein p a r f ü e s e r o r d e n s , u nd sie ch ü n d en kain
la te in u n d w a s sie s in ge n o d e r lesen , d a s ist in d e r t h a t r is c h e n s p r a c h , u nd das ist dorumb
e r f u n d e n w o r d e n , d a s d ie la y e n d e s t e r s t e r c k e r a u f f d e m g la u b e n s i n d » . S c h ilt b e r g e r donne
e n s u it e le t e x t e du P a te r e n la n g u e « t a r t a r e » , c e s t - à - d i r e e n t u r c : « A t h a b is u m chi kockchta
s e n ; a lg u s c h lu d u r s e n u n g a d u n g » , etc. L a lo c a lis a t io n d e S e tz u le t ( « e i n p ir g is c h l a n t » ) reste
d i f f i c i l e . S c h i l t b e r g e r q u itte , au n o r d d e s P o r t e s d e Fer, la v ille d O rg e n tz , en suivant le fleuve
E d il, q u i 1'am ène j u s q u e d a n s c e pays, d ’o ú il p a r t se m e t t r e au S e r v ic e d ’ Ed igü, qui gouverne
a lo r s le Q ip ó a q . II p a r a it i m p o s s i b l e d e r e c o n n a i t r e U r g e n j d a n s O rgen tz, ni la V o lg a dans le
f l e u v e E d il, qui n a r r o s e pas c e t t e ville. Aussi p r o p o s o n s - n o u s d e r e c o n n a i t r e dans ce pays
m o n t a g n e u x le D a g h e s ta n , e n a c c o r d a v e c 1 'id e n tific a tio n d e D e s i m o n i .

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LES M ISSIO N S DE LA M ER N O IR E ET DU CAUCASE 255

région de D e r b e n d p o u r se r e n d r e en Perse, en venant de la Tana, re n c o n -


na des F ran ciscain s p a r m i les C a ita c c h i q u e se parta g e a ie n t les rites grec,
a r m é n i e n et latin. II fit ro u te avec un D o m in ic a in , V in ce n t d e Caffa, q u i lui
raconta les é p r e u v e s s u p p o r t é e s p a r la ch rétien té des m o n ts C asp ie n s. La
dernière en date était u n e e x p é d itio n m e n é e à travers le pays, d e p u is She-
makha, en passant p a r D e r b e n d , ju s q u a T ju m e n et au Terek, et en re v e n a n t
par le pays des C irc a ss ie n s o ú les ch rétien tés de rite gre c avaient aussi
bea u cou p souffert. C e s t à le u r r e t o u r q u e les ra v a g e u rs avaien t été a n é a n tis
par les Lesghiens, p r è s d e K u m u k (C re m u c h u m )', les c a th o liq u e s d e la p r o ­
vince de T e z e c h ia avaien t p a r tic u liè r e m e n t s o u f f e r t : 1 'in te r lo c u te u r d e B a r ­
baro les localisait en tre D e r b e n d et le Terek, c ’est-à-dire d a n s ces « m o n t s
Caspiens» d o n t les b u lle s po n tific a le s d u X I V e siècle faisaient é t a t 105.
En fait, les con ta c ts avec les c a th o liq u e s d u D a g h e sta n allaie n t d e v e n i r
impossibles. A vec la c h u te d e M a tre g a , en 1482, d isp araissait le d e m i e r
accès m a rit im e à la « Z i q u i e » , et les O tto m a n s allaient c o n t r ô l e r les riv e s d e
la M e r N o ir e , tan d is q u e les relation s avec la P erse de s p r e m ie r s S é f é v i d e s
restaient o c c a s io n n e lle s et indirectes.
M ais la p r o v i n c e e c c lé sia stiq u e de M atrega, en tant q u e telle, avait dis-
paru bien a u p a r a v a n t . C o m m e celle d e V o s p r o , c o m m e celle d e S arai, su r-
vécut-elle à son f o n d a t e u r ? 106.
C e s t en effet le lot c o m m u n de s trois a rc h e v ê c h é s fo n d é s en T a r t a r i e
Aquilonaire q u e d e n a v o i r eu q u u n e existence é p h é m è re . C e r ta in s é v ê c h é s
ont vécu très lo n g t e m p s : c e u x d e s c o m p t o ir s g ê n o is o u vén itien s d e la M e r
Noire, c eux d u D a g h e s t a n et d e s pays d e la Casp ien n e, o ú se m a in t in r e n t
jusque très ta rd d a n s le X V e siècle de s ch rétientés latines o r g a n is é e s . L e s
Franciscains on t a lim e n t é les cou vents, la P ap au té p o u r v o y a n t p l u s o u
moins r é g u liè r e m e n t à la s u c c e ss io n de s évêchés. M a is 1 institution m é tr o -
politaine n a eu, sem ble-t-il, q u u n e existence assez brève .

Iü5 G. B arbaro , Traveis to Tana and to Persia, p. 87 et suiv.


I0# Lorsque les G ê n o is essaient d e faire c r é e r un a rc h e v ê c h é à Caffa, ils font état de
lexistence de celui de Sultanieh; il n e s t pas plus questio n de M atrega qu e de Sarai. O n peut
toutefois r e m a rq u e r q u e B a rb a r o ou son in fo rm a te u r a ppelle Tezechia (Ziquie) la partie du
Daghestan oú résidaient les c a th o liq u e s kaítak, ce qui rappelle la p ro vin ce de Zichia d es tex-
tes Pontificaux. Le m ot est passé d an s la g é o g ra p h ie : 1'une d es cartes de atlas d O rtelius
P*ace Exzechia au sud de D erben d , tandis q u u n e autre fait de Zechia une ville de la c o te d u
Kouban, entre M atrega et Zavatopoli.

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256 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO NS D O R IE N T AU M OYEN AGE

II - LA F IN D E S M IS S IO N S M É D IÉ V A L E S

L ’histoire des m issions de s pays de la M e r N o ire et de la Mer Cas


p ie n n e n o u s a a m e n é s à n ous e n g a g e r n o tab le m en t dans le X V C siècle. Ce
siècle, q u i s o u v r e su r le G r a n d Sch ism e p o u r s a c h e v e r p a r la conquête tur-
q u e d u bassin de la M e r Noire, q u e suivra bientôt celle de la Syrie et dc
1’Egypte, est celui de la fin des m ission s m édiévales, a u x q u elles se substi-
tueront au X V I e siècle de n ou ve lle s m éthodes, s a p p liq u a n t à dautres
c h a m p s d ’apostolat.

a ) L es m is s io n s au d é b u t d u X V e siè cle

N o u s avon s la b o n n e fortune de d is p o s e r d u n tableau d e n s e m b le des


m issio n s latines au d é b u t du X V e siècle g râ c e à la rédaction, p ar 1'archevê-
q u e Jean III de Sultanieh, du L ib e llu s de n o titia o rb is . C e texte rappelle les
succès o b t e n u s p a r la prédication des m ission naires latins en Tartarie, et
note tout sp écialem en t le cas du Cathay, oú existe e n co re un bon nombre
d e cath oliques, sans doute privés p o u r le m o m e n t de missionnaires, mais
q u i se sont adressés à la r c h e v ê q u e de Sultanieh en le priant de venir.
L ’A rm é n ie , grâce à 1’U n ion de Qrnay, est un territoire particulièrement fer-
tile, et justifie 1'existence d u siège de Sultanieh. La G é o rg ie a vu les prédica-
teurs franciscains et dom in icain s m u ltip lier les c o n ve rsio n s; mais les rava-
ges de T a m e rla n ont détruit les églises et réduit de n o m b r e u x catholiques
en e s c la v a g e 107. En Ziquie, grâce à 1’a rc h e v ê q u e Jean, de g ra n d s succès ont
été obtenu s. Il y a des catholiques à B a g d a d et au K urdistan, et des Domini­
cains s’o c c u p e n t des uns et des autres. A M o ssou l, le « c a t h o l i c o s » syrien est
b ie n d isp o sé en vers les Latins. Q uan t à 1'Ethiopie, elle échan ge des ambas-
sa d e s avec le pape, et 1'a rc h e v ê q u e souhaiterait p o u v o ir s’y r e n d r e 108.
C e table au n'est pas celui d 'u n e activité m ission n aire en déclin, même
si Jean III d é p lo r e 1'indifférence d u Siège A p o sto liq u e à 1'égard des appels
d e s chrétiens d u C a t h a y 109, et s’il signale les effets désastreux des invasions

107 C 'e s t t r è s e x a c t e m e n t c e q ü é c r i t B o n i f a c e I X da n s u n e l e t t r e du 19 aoüt 1398 aux


F r è r e s P r è c h e u r s e t M i n e u r s s o cie ta tis P e r e g r in a n tiu m n u n cu p a ti, ad p ra e d ic a n d u m . . . àesti-
nati, e n les in v ita n t à r e l e v e r les n o m b r e u s e s é g lis e s e t c a t h é d r a l e s d e G é o r g i e et de Grande-
A r m é n i e d é t r u i t e s p a r T a m e r l a n (E u b e l, B u l i F ra n c., V II, 257).
I0Í Ed. K e r n , d a n s A r c h iv u m F ra tru m P ra e d , V I I I , 1938, p. 82-123.
I0V Jean I I I a f f i r m e q u e, s'il n e s’é t a it pas r e n d u au C athay, c 'é t a it faute d a v o ir obtenu
s o c ie ta te m a sede a p o s to lica , a u t r e m e n t d it un g r o u p e d e m i s s io n n a ir e s à y em m e n e r .

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LES M ISSIO N S DE LA M ER NO IRE ET DU CAUCASE 257

j e Tam erlan . Celles-ci, toutefois, ont sp écialem en t affecté les pays de la


G rande-Arm énie, la G é o rg ie , le D aghestan, la Ziquie, la basse V o lg a : autant
de régions o ú les m issio n n a ire s latins avaient particulièrem ent travaillé.
La mission de G é o rg ie aurait, selon Jean III, été arrètée en plein élan.
Nous la connaissons fort m a l : les évêques de Tiflis du X I V e siècle avaient
très vite consacré leur activité aux Arméniens, et en particulier à ceux de
Qrnay. Mais elle avait pris plus d'extension dans la seconde moitié du siè­
cle, quand Tiflis et Akhalzikhé étaient pourvues d u n couvent dominicain et
d un couvent franciscain chacune, avec peut-être un évêque latin dans cha­
que v ille 110. M ais on sait co m bie n de cam pagnes Tamerlan m ena en G é o r ­
gie : que restait-il des com m unautés fondées par les missionnaires après ces
expéditions dévastatrices?
Et cependant le m ê m e Jean III se portait garant envers 1’Occident des
bonnes intentions du redoutable conquérant transoxianais. Encore évêque
de Nakhidjevan, en 1398, il fut envoyé par Tamerlan en am bassade à Gênes
et à Venise, p o u r obten ir de ces cités la reprise des relations com m erciales
assez distendues depu is le temps des Tchopan iens111. On sait que c e s t au
cours de cette m ission qu e 1'évêque se rendit à Rome oú Boniface IX fit de
lui un arch evêque de Sultanieh. Revenu auprès de Tamerlan, celui-ci, qui
avait envoyé le D om inicain François Ssathru à Péra, pendant sa cam pagn e
contre Bajazet (18 aoüt 1401) et qui avait reçu par son intermédiaire des let­
tres du roi de France, renvoya Jean auprès de ce dernier (1403) en le char-
geant de faire part au roi de sa victoire sur Bajazet et de son désir de déve-
lopper les relations entre 1'Occident et ses Etats112. Or, si nous en croyons
1'ambassadeur, la haine que Tam erlan avait éprouvée p ou r les chrétiens
avait été dissipée grâce à ses entretiens avec les deux D o m in ic ain s113. Et
l'on peut se d e m a n d e r si la croisade destinée à soulager les chrétiens du
Daghestan, envisagée p a r Bon iface IX, n apparut pas très vite com m e hors
de propos, m ê m e en tenant com pte de ce que Tamerlan avait détruit la

1,0 Cf. s u p ra , p. 183. On notera qu e ces m issions ont été ignorées de M. Tamarati dans son
Église g é o r g ie n n e des o r ig in e s à n o s jo u rs .
m i Jorga, N o ,e s e , e x tra i,s , d ans R e v O r. lat., IV., p. 245. Cf. L. Petech. ar,. c,L. P-569-570.
112 Silvestre de Sacy, M é m o ir e s u r u n e c o r r e s p o n d a n c e in é d ite de T a m e rla n a vec C h a rles V I,
dans M ém . AcacL In s c r., VI, 1822, p. 470 et suiv.
M ,H. M oranvillé, M é m o ir e s u r T a m e rla n et sa c o u r , dans B i b i E c. C h a rle s , t. L V , 1894,
P 462. François S s a th ru est-il identique à François de Tabriz, précon.sé en 1398 pour le siège
de Nakhidj evan?

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258 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O RIE N T AU MOYEN AGE

base latine de Smyrne, q u e les papes d'Avign on avaient entretenue j u s q u e n


1402... " 4.
Ainsi T a m e rla n lui-m êm e paraissait-il disposé à en revenir à la tolé-
rance des souverains m u su lm a n s qui 1'avaient p ré c éd é dan s les anciens
e m pires m o n g o ls de Perse et de Djagataí. Ses successeurs sem blent avoir
agi de m ê m e ; 1’activité m ission naire ne devait d o n c pas être entravée dans
l e m p i r e tim ouride, qui ne vécut, il est vrai, q u 'u n tem ps relativem ent court
dans la partie occidentale des territoires co n q u is p a r T am erlan .
Le G r a n d Schisme, lui-m êm e, avait-il b e a u c o u p é p r o u v é les missions?
Certes, il y eut c o n c u rre n c e entre les prélats n o m m é s p a r les deu x pontifes
rivaux su r les m ê m e s sièges; m ais il est v r a is e m b la b le que, q u a n d il y eut
d o u b le nom ination, un seul évêque était résidant, 1’autre étant un simple
titulaire exerçant ses fonctions pontificales dan s des d io c è se s occidentaux.
C est B o n ifa c e I X qui se préoc c u p a it des chrétiens d u D a gh e sta n ; c'est Clé­
m ent V I I qu i octroyait aux Frères P rê c h e u rs le droit de c r é e r des couvents
en G é o rg ie . Les difficultés sont réelles à Caffa, évêch é d o té de revenus et
d é p e n d a n t d e la r é p u b liq u e de Gênes, qui lo u vo ie entre les d e u x obédien-
c e s 115; o n se p r é o c c u p e d e t e in d r e « l e s c h i s m e » 116. M a is q u a n d se prépare
la c ro is a d e d e N ic o p o lis (1396), les deux pontifes e n c o u r a g e n t de leurs
i n d u lg e n c e s les croisés qui appartiennent d'a ille u rs a u x d e u x obédiences.
II est p r o b a b l e q u e les difficultés n ’atteignirent pa s au d e g ré d ’acuité
q u a v a i t c o n n u la lutte entre le p a p e et les « F ra t ic e lle s » au tem ps de
Jean X X I I , C lé m e n t V I et Benoit X I I 117. Seulem ent, c est a u centre m ê m e de

114 C h a r l e s V I r é p o n d f o r t c o u r t o i s e m e n t à T a m e r l a n e n ju in 1403; le r o i d e Castille


e n v o i e à S a m a r k a n d R u y G o n z a le z d e C l a v ijo ; etc.
" S G. F e d a lt o , La chiesa, p. 451-453. S u r la s it u a t io n d a n s le r o y a u m e d e C h y p r e (d o n c
d a n s la p r o v i n c e d e T e r r e S a in te ), d a b o r d a v ig n o n n a is , p u is r o m a i n e t à n o u v e a u avignon-
nais, cf. J. R ic h a r d , L e ro y a u m e de C h yp re et le G ra n d S ch is m e , d a n s C o m p te s re n d u s de l'A ca d
des In s c r., 1965, p. 498-507.

116 Cf. les p o u v o i r s c o n f é r é s p a r B e n o i t X I I I a u p r o v i n c i a l d e s D o m i n i c a i n s d e T e r r e


S a in t e ( l « r ju i l le t 1 3 96 ): K. E u b e l, D ie a v ig n o n e s is c h e O b e d ie n i d e r M e n d ik a n te n o r d e n s . . . zur
Z e it des G ro s s en S ch ism as, d a n s Q u e lle n u n d F o rs c h u n g e n , I, 2, P a d e r b o r n , 1900, n ° 831. Cf.
aussi le d r o i t r e c o n n u à 1 é v ê q u e d e C a ffa d e r e l e v e r d e l e u r s c e n s u r e s les v i c a i r e s d e s D o m i ­
n ic a in s et d e s F r a n c is c a in s d e P é r a et d e C a f fa r e b e l l e s à B e n o i t X I I I ( n ° 1047; Fon tes, X I I I , 2,
86-88). G r é g o i r e X I I , au m o m e n t o ú le c o n c i l e d e P is e r e s t r e i n t s o n o b é d i e n c e (Jea n I I I de
S u lt a n ie h j o u e un r ô l e e n 1408 d a n s le s a d h é s i o n s au c o n c i l e : cf. L o e n e r t z , E v ê q u e s d o m in i­
ca in s des d e u x A rm én ie s , d a n s A F P , 1940, p. 258 et su iv.) d o n n e t o u s p o u v o i r s au F ranciscain
M tc h e l de M o n te c u c ito d a n s les v i c a i r i e s d 'O r i e n t , d 'A q u ilo n a r is , d e R u s s ie e t à P é r a en 1410­
1411 ( F o n te s , X I I I , 1, 150, 152); etc.

117 L e s é c h o s d u f r a t i c e l l i s m e se f o n t e n c o r e e n t e n d r e e n p a y s d e m i s s i o n sous Inno-


c e n t VI, q u i in v i t e en 1353 1 e v ê q u e d e C a f fa à i n s t r u m e n t e r c o n t r e e u x ( F o n te s , X , 27). C e sont

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LES M ISS IO N S DE LA M E R N O IR E ET DU CAUCASE 259

|a chrétienté que dautres préoccupations tenant au schisme lui-m êm e


avaient pu faire p e rd re de vue les besoins les plus urgents de terres de m is­
sion.
Malgré ces vicissitudes, la sem ence jetée en terre p a r les m issionnaires
continuait de lever. Jean III de Sultanieh affirm e dans son L ib ellu s de n oti-
tia orbis que, dans les toutes d e m iè re s années du X I V e siècle, les fidèles
d'Extrême-Orient ont envoyé au Siège Apostolique des d em a n d es de m is­
sionnaires; il nous a p p re n d aussi que les Ethiopiens, dont les contacts avec
leglise rom ain e avaient été plus épisodiques, mais réels, au tem ps d u pre-
mier évêque de Quilon, échangeaient avec la Papauté des am bassa d es dont,
à vrai dire, nous d éc o u v ro n s peu de tra c es118.
Mais ce sont des pélerinages qui nous permettent de constater qu e
1’Eglise d ’Occident est connue, et ses sanctuaires vénérés, dans des pays
fort éloignés. En 1431, p a r exemple, un prêtre appelé Th om as d'Ethiopie,
«m u par sa dévotion et p ar la ferveur de sa foi, se x p o s a n t à de m ultiples
dangers et fatigues, était parti des lointaines contrées de 1'Ethiopie p o u r
visiter le seuil des A p ô t r e s » 119. De 1’Inde du Sud, au début du X V e siècle, les
témoignages de cette dévotion se multiplient. En juin 1403, d eux prêtres,
Abraham et Saliba, qui se disent de la loi de saint Thomas, font le péleri-
nage de R o m e 120. L a n n é e suivante, on voit d é b a rq u e r en Sicile des « c h r é ­
tiens catholiques originaires de 1’Inde, venant par la grâce de D ieu de visi­
ter le Sépulcre du S e ig n e u r», et se rendant à Rom e et à C om p oste lle ; ils
obtiennent un sauf-conduit aragonais le 12 avril, et, le l er aoüt, B o n ifa ce IX
leur accorde une indulgence plénière, en les qualifiant de « m oines selon la
vie et la règle de saint Antoine, vivant dans les montagnes de 1’I n d e » m . Le

é v i d e m m e n t d e s S p i r it u e ls , c e s « p s e u d o - r e l i g i e u x » q u e d é n o n c e C l é m e n t VI, d a n s sa l e t t r e I n
amara t r a h im u r a d r e s s é e a u x a r c h e v ê q u e s et é v è q u e s d e G r a n d e - A r m é n i e , d e P e r s e et d e s
autres p a ys d ' O r i e n t e t d ' O u t r e m e r (29 m a i 1344) c o m m e s a t t a q u a n t a u x c h r é t i e n s r e v e n u s à
I Union en n ia n t la l é g i t i m i t é d e s p a p e s C l é m e n t V, Jean X X I I , et B e n o i t X I I , e t en r é p a n d a n t
d autres e r r e u r s ( F o n te s , I X , 42). L a c o n s e r v a t i o n m o i n s a t t e n t i v e d e s b u lle s p o n t i f i c a l e s au
temps du G r a n d S c h i s m e n o u s e m p ê c h e d e s a v o i r si les p a r tis a n s d e l'u n o u l a u t r e p a p e p r o -
voqu aient aussi d u s c a n d a l e p a r m i les A r m é n i e n s o u a u t r e s r e u n iti p a r d e s p r o p o s d u m ê m e
genre.
" * Des e n v o y é s d u P r ê t r e J ea n s e r a i e n t v e n u s à la C u r i e e n 1351 ( G o l u b o v i c h , II, 152, cf.
aussi Le D e gestis t r iu m re g u m d e Jean d e H i l d e s h e i m , ibid., V, 59). L e 16 j u i l le t 1402, un
a m b a s sa d e u r d u P r ê t r e Jean, s e i g n e u r d e 1’I n d e , a p p o r t e d e s p r é s e n t s à V e n i s e ( I o r g a . N o te s
e' extraits, I, p. 320). .
I,v L e p a p e d e m a n d e q u o n lui f a c i l i t e le r e t o u r : N o te s e t extra its. II, p. 301.

120 Fontes, X I I I , 1, 128.


121 P a le r m e , A r c h i v i o di S ta to . C a n c e l l e r i a 43. f “ 203 (12 a v r il 1404. C a t a n e : n o u s d e v o n s
c e tie r é f é r e n c e à M. H e n r i B r e s c . q u e n o u s r e m e r c i o n s v i v e m e n t ) . L a n a l y s e d e la l e t t r e p o n -

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260 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIONS D O RIE N T AU M O YEN AGE

m ê m e jo ur, et sans nul d o u te à le u r d e m a n d e , d e u x indults sont accordés


p a r le m ê m e p a p e à D avid P a rz a h a n a n ih a ra et à son é p o u se Madeleine ro
et reine des Indiens, p e r so n n a g e s dont 1'identification est malaisée, mais
d o n t le n o m n ou s orien te bien vers les pays in d o -d r a v id ie n s ,22.
Un troisièm e g r o u p e de p é lerin s est signalé à la fin de 1407 dans les
A n n a le s de B o lo g n e : il s’agit de « q u a t r e o u cin q h o m m e s d'Inde, oú l apôtre
saint T h o m a s a p rê c h é et c o n v e rt i». D e u x d e n t r e eux étaient prêtres et, le 4
d é c e m b r e 1407, ils c é lé b rè re n t la m esse en p u b lic « e t ils la disaient très
d é vo te m e n t, et on ne c o m p re n a it ni ce qu 'ils lisaient ni leurs lettres, mais
b e a u c o u p d e ch oses c o m m e Jhesus Christus, Amen, Alleluia, les noms de
p r o p h è t e s et d'apôtres, et ils faisaient m is e re re D o m in e c o m m e nous. Et ces
c h ré tie n s venaient de Jérusalem et allaient en pélerinage, cest-à-dire quils
allaien t à Saint-Jacques, et Saint-Antoine, et à R o m e » 123.
L e x t e n s i o n d u pélerin a g e de Jérusalem à R o m e et à Compostelle, voire
m ê m e à P a d o u e , parait b ie n té m o ig n e r de 1'empreinte reçue, du fait de la
fré q u e n t a t io n d e s Latins, p a r les Chrétiens de 1'Inde au X I V e siècle. Mais les
r e lig ie u x latins avaient sans doute cessé de fré q u e n te r ce pays.
En Azerbeijan , en G ra n d e -A rm én ie , en G é orgie, su r les b o r d s de la Cas­
p ie n n e , les C h rétiens avaient relevé les ruin es c ausées p a r 1'invasion de
T a m e r la n . M a is la désaffection des A rm é n ie n s se m a n i f e s t e : vers 1420, le

t i f i c a l e d a n s A r c h i v i o s e g r e t o V a tic a n o , R eg. Lat., 118, f ° 198, d o n n e les n o m s d e s quatre moi­


nes, J o h a n n e s de L om y d a , P e tru s Syo, S y m o n D yabilis, T h o m a s de A ld a n ic i; le sauf-conduit n’en
d o n n a i t q u e t r o is : J o h a n n e s d i la m ida, P e tru s d i Syo, S im o n D a b ilis . U n c i t o y e n de Fama-
g o u s t e , L o u i s G e o rg ii, b é n é f i c i a i r e d u n in d u lt d u m ê m e j o u r , les a c c o m p a g n a it - il, ce qui don-
n e ra it u ne in d ic a tio n sur leu r itin éra ire?
,JJ R e g . Lat. 118, f° 198 ( F o n te s , X I I I , 1, 135d). L a m e n t i o n d e c e « r o i » é v o q u e la lettre de
J ea n X X I I au d o m in u s N a s c a r in o r u m de C o lu m b o et le p a s s a g e d e s a n n a le s ch in oises m e n
t i o n n a n t le c h e f d e s « Y e h - li- k o - w e n » d e « K í i- la m » (W . W . R o c k h ill, N o te s o n the relations and
tra d e o f C h in a w ith the E a s te rn a rc h ip e la g o a n d the coa s t o f th e In d ia n O ce a n d u rin g the four-
te n th c e n tu ry , I, d a n s T o u n g p ao, X V , 1914, p. 434-435), a in si q u e la p r é s e n c e d u n roi c h r é t i e n
d u n o m d ' E t i e n n e s u r la c a r t e d e 1’a tla s d e C h a r le s V, d e s s in é v e r s 1375, re p ré s e n ta n t l i n d e
d u S u d (c f. K u n s t m a n n , D ie M is s io n e n in In d ie n u n d C h in a in v ie rz e h n te n Jhdt, dans Histons-
c h e s -P o litis c h e s B la tt fü r k a th o lis c h e s D e u ts c h la n d , X X X V II, 1856, p. 135-151). Mais le
P. E. H a m b y e a b i e n v o u l u n o u s s i g n a l e r q u e 1’e x i s t e n c e d u n e v é r i t a b l e d y n a s t ie royale d a ns
1'Inde m é r i d i o n a l e a v a it é t é é c a r t é e p a r 1’é t u d e d u P. A.-M. M u n d a d a n , T ra d itio n s o f the Saint
T h o m a s C h ris tia n s , B a n g a l o r e 1970, p. 125-129, e t q u ’il p o u r r a i t c e p e n d a n t s'a g ir d e q u e l q u e
rafa lo c a l. L e s n o m s d e D a v id et M a d e l e i n e é t a i e n t e x t r ê m e m e n t r a r e s c h e z les C h r é t i e n s
i n d i e n s ; c e l u i d e P a r z a h a v a r i v a r a p o u r r a i t a s s o c i e r à la r a c i n e d r a v i d i e n n e Pazhaya un sa ns
c r i t vira .
121 I o r g a , N o te s e t e x tra its , I, p. 159 ( R e v u e de T O rie n t la tin , IV, 1896, p. 29) d ’a p rès Bologne,
B ib l. U n iv e rs ., ms. 91, n ° 2, f° 50.

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LES M ISSIO N S DE LA MER N O IR E ET DU CAUCASE 261

monastere de S a in t -T h a d d é e lu i-m ê m e a b a n d o n n e 1’U n io n (q u i se m aintient


cependant a Z o r z o r ) ' 24. L e s A r m e n i r e u n iti se c o n c e n t r e m p r o g re s siv e m e n t
autour du m o n a s t e r e d 'A b a r a n - q u i fournit en 1425 un a rc h e v ê q u e d e S u l­
tanieh - et d e 1é v ê c h é d e N a k h id je v a n , ainsi q u a u t o u r des c o u v e n ts de Cri-
niée . c est g r â c e a u x D o m in ic a in s d e C a ffa q u e la Société des P érégrin an ts,
qui con tin u e à a v o i r d e s liens étroits avec les Uniteurs, se rétablit a p r è s
1456 . M a is les D o m in ic a in s p a ra issen t a v o ir laissé à leu rs c o n fr è r e s a r m é ­
niens les r é s id e n c e s q u i s u b s is t e m : Jean III de S ultan ieh lu i-m ê m e , si zélé
poui les m issions, ne p a rait pas a v o ir rep ris le c h e m in de sa ville a rc h iép is-
copale et se fixe à C a f f a 126.

Une ré g io n q u i avait cessé d 'être un terrain d e m ission actif d e p u i s la


chute d e s Etats fra n c s d e S yrie r e p r e n d c e p e n d a n t p r o g r e s s iv e m e n t sa
place d a n s les p e r s p e c t iv e s m issio n n a ire s : il s’agit des pays s o u m is au s u l­
tan du C a ire . Au le n d e m a in de la chute d Acre, la P a p a u té avait la n c é u n e
inteidiction a u x L a tin s d e fr é q u e n t e r ces territoires, q u e ce füt p o u r y c o m -
m ercer o u p o u r v a c c o m p l i r le p é le rin a g e de T e rr e S ain te — et, p e n d a n t
longtem ps, il fallut une a u to ris a tio n spéciale pour passer outre à cet
e m b a r g o qu i fut d a ille u r s vite violé de m ille m a n i è r e s - L e s M a m e lü k s , d e
leur còté, n a v a ie n t g a r d e d e fa v o ris e r les contacts entre les C h r é t ie n s ind i-
gènes et les L a t in s qui, au vu et au su de tous, p r é p a r a ie n t u n e c r o i s a d e
p o ur l i b é r e r la T e r r e S ain te d e le u r o c c u p a tio n ; ils avaient sy s té m a tiq u e -
ment e n c o u r a g é , p a r m i les M a ro n ite s, les é lé m e n ts hostiles à 1'Union latine,
c o m m e ils le fire n t p o u r les A rm é n ie n s. L a cessation de 1etat d e g u e r r e
avec les M o n g o l s d e P e r s e de va it a s s o u p lir le u r attitude, sans la m o d i f i e r
rad ic a le m e n t.
T o u te fo is , la présence en E g y p te de très nom breux c a p tifs latins,
réduits en e s c la v a g e lo r s d e la c o n q u ê t e de s d e m i e r s ré d u its francs, a m e n a
assez vite u n e r e p r i s e d e s r e la t io n s s u r le p la n religieux. A u t e m p s d e B o n i ­
face V III, c in q F r a n c is c a i n s se r e n d ir e n t en E g y p te p o u r r é c o n f o r t e r c e s
captifs, en b é n é f i c ia n t à la fois d e la b ie n v e illa n c e d e s C o p t e s et d e la tolé-
rance d u su lta n . Ils a u r a ie n t m ê m e eu d e s e n tre tie n s t h é o lo g iq u e s a v e c le
k h a life 127. Et d a u t r e s d e v a ie n t les suivre, à d e s in te rv a lle s i r r é g u l i e r s : le

124 Supra, p. 206 n. Nous savons du moins que Jérôme. archevêque de Maku, s etait alors
séparé de 1'Eglise romaine, ct les liens étroits de 1’archevêque avec Saint-Thaddée font suppo-
scr que celui-ci avait adopté la même attitude. Zorzor fournit encore au XVIIC siècle un pro­
vincial a la congrégation des Uniteurs (Tournebize, Les Frères Uniteurs, p. 263 et 269).
I2' Loenertz, Lu société des frères Pérégrinants de 1374 à 1475, dans A F P, XLV, 1975, p. 125
et 133-145. Le rétablissement de la Société est dúe à 1’évèque de Caffa, Jérôme Panissari.
12,1Oú les contacts avec les Arméniens se maintiennent jusquà la chute de la ville.
127 Golubovich, III, 68.

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262 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D O R IE N T AU MOYEN AGE

Franciscain Sim on Settidoyiis constatait qu e les captils, qui n i_taicnt pus


maltraités et vivaient de l'exercice de leu r métier, disposaient de deux cha-
pelles, 1’une au Caire et 1'autre à Alexandrie, et souffraicnt seulement dc ne
p o u v o ir o b se rv e r le rep os d o m in i c a l12*; il ne ren c o n tra pas de ses conírères
desservant ces chapelles, et c e s t dans une église coptc qu il célébra la
messe le jo u r de la C h a n d e le u r et q u i l ensevelit son c o m p a g n o n , le Frère
H u g u e s le L u m ino ur. N o m b r e u x furent les Latins p riso n n ie rs en Egypte
qui, à la m an ière de deux Italiens, interprêtes du sultan, q u e rencontra le
m ê m e Sim on, passèrent au rite copte, faute d'être so u te n u s d a n s leur pro-
p re r i t e 129.
D ailleurs 1'activité m issionnaire ne pouvait q u être réduite. Sim on et
son c o m p a g n o n furent couverts d ’insultes à le u r d é b a r q u e m e n t , q u a n d on
dé c ou vrit un crucifix dans leurs b a g a g e s 130. D u ra n t la p é r io d e o ü le sultan
fit f e r m e r les églises coptes et melkites, entre 1322 et 1327, 1accès des reli­
g ie u x à 1'Egypte ne pouvait pas être facile; q u a n d 1’e m p e r e u r bvzantin et le
roi d A r a g o n obtinrent la ré o u v e rtu re des églises, ils ne p araissen t pas être
in te rve n u s en fa v e u r des missionnaires.
Ceux-ci, d'ailleurs, se trouvaient p a r la fo rc e des c h o s e s exposés à
c o n t r e c a r r e r le prosélytism e m u su lm a n . En e n c o u r a g e a n t les captifs à res-
ter fe rm e s d an s la foi, ils les dissu adaien t d ’e m b r a s s e r la re lig io n musul-
m a n e ; or, d an s 1’e m p ire des M a m e lü k s, les ré n é g a ts jo u a ie n t un rôle impor-
tant et étaient fort a p p r é c i é s 131. R a m e n e r un ré n é g a t à sa foi p r e m iè r e était,
p o u r les m issionnaires, un im pératif; c'était aussi, si la c h o s e s'ébruitait, la
m o rt p o u r le re la p s et p o u r celui qui 1'avait incité à a b j u r e r 1’Islam. Ainsi
s 'e x p liq u e le m a rty re de plus d un re lig ie u x f r a n c i s c a i n 132.

I2H M ario Esposito, Itinerarium Symonis Semeonis ab Hybernia ad Terram Sanctam, Dublin
1960 (Scriptores latini Hyberniae, IV, p. 90). Le v o y a g e du F ra n cisca in irlandais date de 1328­
1329.
,2y Esposito, op. cit., p. 86, 96-98. Le pape s e f f o r ç a it d e n c o u r a g e r le rach at des captifs:
ainsi Jean X X II autorise-t-il l'envoi d e m a rc h a n d is e s en E g y p te à c e tte fin (1317 : Mollat,
Jean X X I I , 5742).
11(1 Wach, hii sunt canes et porei vilissimi, qui non credunt Machotnetuni esse prohetam Dei et
nuntium, sed ipsum in suis predicationibus superstitiosis continue blasphemant et ad hec alios
inducant. (p. 48).
111 Ch. K o h ler, Deux projets de croisade, d a n s Mélanges p ou r servir à Ihistoire de l'Orient
latin, p. 553.
1,2 Cf. le cas du c h e v a lie r h o n g ro is T h o m a s, rénégat, r a m e n é à la foi p a r le F ra n c isc a in
N icolas de M o n te c o rv in o lors d un v o y a g e à Jérusalem , m a rty ris é en E g y p te a v e c des F ra n cis­
c a in s a p rè s a v o ir a b ju ré p u b l i q u e m e n t : G o lu b o v ic h , V, 73 (1358).

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LES M ISSIO N S DE LA MER N O IR E ET DU CAUCASE 263

Précaire dan s le u r inslallation en Egypte, la situation des re lig ie u x nc


leur permettait g u è r e d e j o u e r en ce pays un autre rô le q u e celui d a u m ò -
niers des c o lo n ie s m a r c h a n d e s italiennes, p ro v e n ç a le s o u catalanes, o u d e
g ro up es de p é l e r i n s 133.
En Syrie il en allait d iffé r e m m e n t . L e p é le r in a g e d u S a in t -S é p u lc r e et
des autres Lieux-S ain ts entrainait la nécessité p o u r les p é le rin s d e t r o u v e r
jes autels oú les p rê tre s puissent c é lé b r e r les offices. Les M a m e lü k s
tiraient un profit p é c u n ia ir e c o n s id é r a b le d u pélerin a g e , et les s o u v e r a i n s
dOccident qu i étaient en r a p p o r t a ve c e u x le u r r e c o m m a n d a i e n t les p é l e ­
rins. Aussi, tout en e xclu an t au d é b u t la p ré se n c e p e r m a n e n t e d e L a tin s à
Jérusalem, a d m ettaien t-ils le u r v e n u e p o u r la visite d e s L ieux-S ain ts, sa n s
faire d e x c e p t i o n p o u r le u rs p r ê t r e s 134. En 1327, le roi d ’A r a g o n d e m a n d a i t
au sultan d a u t o r is e r les F ra n c isca in s à s éta b lir à J é ru s a le m ; v e rs 1333, u n
groupe de F rè re s M i n e u r s parait être là à d e m e u r e p o u r d e s s e r v ir le S ain t-
Sépulcre et, o c c a s io n n e lle m e n t , la b a siliq u e de la Nativité à B e t h l é e m ; il
commence à r é u n ir d e s terrain s et des m a iso n s à J é ru sale m e n tr e 1335 et
1337. En 1342, C lé m e n t V I c o n firm a it la con cessio n p a r le su lta n a u roi
Robert de N a p le s , o u tr e le b â tim e n t d u M o n t-S io n o ú était d é s o r m a i s é t a b li
un couvent avec so n g a r d i e n 135, d u droit p o u r les F ra n c isca in s d e s é j o u r n e r
au Sain t-S ép u lcre. C e c o u v e n t fut bientôt d o u b lé p a r un lieu, é g a l e m e n t
franciscain, à B e y r o u t h , qui d even ait 1e ch elle n o r m a le m e n t f r é q u e n t é e p a r
les m a r c h a n d s 136. P a r contre, la cré a tion d ’un c ou v en t à B e t h l é e m tarda
davantage137.

1.3 Jean d e W i n t e r t h u r r a p p o r t e , à la d a t e d e 1338, q u a la d e m a n d e d u s u lt a n t r e n t e


Dominicains, fa m o s i le c to re s , a u r a i e n t é t é e n v o y é s p a r le p a p e e n E g y p t e : le s u lt a n le s a y a n t
menacés d e les f a i r e p é r i r s'ils v o u l a i e n t p r ê c h e r la f o i c a t h o l i q u e d a n s le u r h a b i t r e l i g i e u x , ils
I auraient q u i t t é p o u r le s v ê t e m e n t s d e s in d i g ê n e s . S e m o q u a n t d e l e u r t e r r e u r , le s u lt a n les
expulsa et ils se r é f u g i è r e n t e n C h y p r e , é v i t a n t d e t r e m is à m o r t p a r c e q u i l s a v a i e n t d e s l e t ­
tres du roi de France (p . 144). L 'h i s t o r i e t t e , é v id e m m e n t d o rig in e fra n cisca in e, p a ra it
controu vée.
1.4 G o l u b o v i c h , II I, 68.
135 Ib id ., II I, 313; IV, 1-60. - S u r t o u t c e c i, cf. l e t u d e d e L e o n h a r d L e m m e n s , D ie F ra n z is k a -
ner im hi. L a n d e, I, D ie F ra n z is k a n e r a u f d e m S io n (1335-1552), 2Céd., M ü n s t e r 1925 ( F r a n z is k a -
"úc/ie S tu d ie n , B e ih e ft 4 ). J e a n d e W i n t e r t h u r fa it é c h o à c e t t e f o n d a t i o n : cf. C. B r u n , D ie
^rtirizisk ü n ery n ission en u n d d e r O r ie n t b e i J o h o n n v o n IV., d a n s Z e its c h r ift f ü r s c h w e iz e r is c h e
K lrche n g e s ch ich te , X V I I , 1923, p. 32-37.
136 G o l u b o v i c h , II I, 411. C e t t e r é s i d e n c e e x is t a it d è s 1345.
157 Ibid., V, 207 : G r é g o i r e X I a u t o r i s e M a r t i n d 'A r a g o n , O. M., à f o n d e r un c o u v e n t à
Sairu-Nicolas d e B e t h l é e m . L e Liber conformilatum d e B a r t h é l e m y d e P is e (1 3 9 0 ) m e n t i o n n e
loca du M o n t - S i o n , d u S é p u l c r e , d e B e t h l é e m e t d e B e y r o u t h , et s ig n a le q u u n e r é s i d e n c e
etablie a N a z a r e t h a d ü ê t r e a b a n d o n n é e ( G o l u b o v i c h , II, p. 269).

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264 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO N S D O R IF N T AU M O YEN AGE

Les F ranciscains de T e rr e Sainte n a v a ie n t pas le droit de p r ê c h e r


p u b liq u e m e n t aux M u s u lm a n s : ils se limitaient au Service des pélerins. Le
p a p e le u r d o n n a le soin d 'a s s u r e r 1'inquisition en T e rre Sainte et en Egyptc
- les p é le rin s d é b a r q u a ie n t initialem ent à A le x a n d rie p o u r gagner Jérusa­
lem p a r le C a ire et le c o u ve n t d u S in a i - en raison de la présence p o s s ib le
d 'h é r é tiq u e s p a rm i les visiteurs de s L ie u x S a i n t s 1** Les Franciscains n'en
étaient pas m o in s e x p o s é s à des ve xa tio n s de toute sorte; à plusieurs repri­
ses, ils furen t expulsés, v o ire m assacrés, lo r s q u e le sultan décidait d u s e r de
re p ré s a ille s à I’é g a r d d u n e pu issa n c e latine, q u e ce füt lors de la «croisade
d ’A l e x a n d r i e » m e n é e p a r P ie r re l cr de C h y p re o u lors d u conflit entre le sul­
tan B a r s b a y et le roi A lp h o n s e d ' A r a g o n 139. M ais, p a rm i les motifs de ces
vexation s, fig u re n t aussi les c o n v e rs io n s vraies o u s u p p o s é e s de Musulmans
o u les a b ju r a t io n s de rén é g a ts qui intervenaient d u fait d e s Franciscains140.
L e c o u v e n t d e Jérusalem , q u e d o u b la it u n e a n n e x e à Bethléem , présen-
tait u n a u tre intérêt p o u r la p r o p a g a t io n de la d o ctrin e cath oliqu e : c etait
les con ta c ts q u il réserv ait aux F ran ciscain s avec les p élerin s de toute
c o n f e s s io n et a v e c les relig ie u x de s a u tres m o n a stè re s d e J é r u s a le m 141. Les
D o m i n i c a i n s d u X I I I e siècle avaient pu en p r o fite r p o u r n o u e r des relations
a v e c les c h e fs d e s E glises o rie n tale s; les Fran ciscain s d u X V C allaient faire
de m êm e.
L e s D o m i n i c a in s laissèrent p r a tiq u e m e n t aux F ran ciscain s le m onopole
d e s L i e u x S ain ts (o ú c e p e n d a n t il avait été q u e stio n de les installer en
1322) : toutefois, en 1348, le ch ap itre g é n é ra l se p r é o c c u p a it de la fondation
d e d e u x co u ve n ts, l'un à J é ru sale m et 1’a u tre à B e th lé e m . Ce projet neut
p a s d e suite; à n o u v e a u , en 1382, C lé m e n t V I I autorisait les Frères Prè-

138 S u p ra , p. 133.
IW L a c r o i s a d e d e P i e r r e l er d e C h y p r e e n t r a i n e la f e r m e t u r e d u c o u v e n t et la m o r t de
d o u z e f r a n c i s c a i n s d a n s les p r i s o n s d e D a m a s : G o l u b o v i c h , V, 113-116. Cf. aussi A h m e d Dar-
rag, L 'E g y p te s o u s le rè g n e de Barsbay, 825-841 / 1422-1438, D a m a s 1961, p. 269-286 (Institut
f r a n ç a i s d e D a m a s ).
140 C e s c o n v e r s i o n s e t a b j u r a t i o n s p e u v e n t d a i l l e u r s a v o i r é t é d is c r è t e s , c a r les co n v e rtis
g a g n a i e n t C h y p r e o ú ils p o u v a i e n t d é c l a r e r p u b l i q u e m e n t l e u r f o i : p a r e x e m p l e Suriano. II
tr a iia to d i T e rra S a n ta e d e W O rie n te d i fra te F r a n c e s c o S u r ia n o , éd . G o l u b o v i c h , M ila n 1900,
p. 161. - L i s t e d e s m a r t y r s f r a n c i s c a in s , d o n t p l u s i e u r s m a r t y r i s é s à J é r u s a l e m : M o n u m e n ta
fra n c is c a n a , é d . B r e w e r , p. 526-528; cf. P. D u r r i e u , P r o c è s -v e r b a l d u m a rty re de q u a tre Frères
M in e u r s e n 1391, d a n s A rc h iv e s de i O r i e n t la tin , I, 1881, p. 539-546.
141 C e c i sa n s p r é j u d i c e d e s c o n f l i t s q u e s u s c ita it la p o s s e s s i o n d e s L i e u x S a in t s : les rap-
p o r t s e n t r e L a t i n s e t G é o r g i e n s s e n t r o u v è r e n t e n v e n i m é s et S u r ia n o , r o m p a n t a vec 1 habi-
t u e l l e b i e n v e i l l a n c e d e s p r e m i e r s e n v e r s les s e c o n d s , les t r a i t e d e p e s s im i h e r e tic i ( Trattato,

p. 74).

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LES M IS S IO N S DE LA M E R N O IR E ET DU CAUCASE 265

ch^urs à a c c e p t e r lt* lieu q u i le u r était offert, p o u r y f o n d e r u n e r é s id e n c e ,


dans la va ée e J o sa p h a t, p a r le su ltan lu i-m ê m e . U n e fois d e plus, o n en
resta là L a p r o v i n c e d o m i n i c a i n e d e T e r r e S a in te restait d o n c en fait,
depuis a is p a r it io n d u r o y a u m e d A r m é n ie , r é d u it e à ses c o u v e n t s chy-
priotes et, p r a t i q u e m e n t , s o n activité m i s s i o n n a i r e n e p o u v a it p a s d c p a s s e r
les contacts a v e c les n o n -L a t i n s d e C h y p r e et la p r é d i c a t i o n a u x e s c la v e s
m u su lm a n s qui, p a r f o i s m a l g r é le u r s m a itres, e m b r a s s è r e n t la foi c h r é ­
tienne en a s s e z g r a n d n o m b r e 143.

b) Le c o n c i l e de F lo r e n c e e t le s c o m m is s a ir e s a p o s to liq u e s

L i m p la n t a t i o n f r a n c is c a i n e a u x L i e u x S ain ts - q u i n e s'était p a s a c c o m -
pagnée d e la m is e en p la c e d u n é p is c o p a t, inutile en r a is o n d e s c a r a c t è r e s
prop re s a u x c t a b l is s e m e n t s latins d e Syrie, de P a le stin e et d 'E g y p t e , et ju r i-
d iq u e m e n t p e u c o n c e v a b l e p u is q u 'il existait un p a t r i a r c h e d e J é r u s a le m ,
des é v è q u e s d e B e t h l é e m et d e B e y r o u t h , tous vivan t au lo in - a llait se
révéler p r é c i e u s e a u m o m e n t o ú s 'o u v ra it u n e n o u v e lle p é r i o d e d e This-
toire d e s m is s io n s . O n sait c o m m e n t le p a p e E u g è n e I V a v a it été a m e n é à
c o n c e v o ir le c o n c ile , r é u n i p o u r la r é f o r m e d e l E g lis e d O c c i d e n t , c o m m e
un c o n c ile g é n é r a l a yan t e n tre a u t r e s p o u r objet, et p o u r o b j e t p r i n c i p a l,
1U n ion d e s E g lis e s . D e s n é ce ssité s p r o p r e s à 1’e m p i r e b y z a n tin et à ses r a p ­
ports a v e c 1’E g li s e d e R o m e a va ie n t ici j o u é u n r ô le e sse n tie l. M a i s n o u s
nous a t t a c h e r o n s s e u le m e n t a u x n é g o c ia t io n s qu i fu re n t m e n é e s en v u e d e
1’U n ion d e s E g lis e s , a u t o u r d u c o n c ile d e F lo re n c e , a v e c les a u t r e s E g li s e s
orientales. E l le s r e p r é s e n t e n t en effet la d e r n iè r e g r a n d e p é r i o d e d e s m i s ­
sions m é d i é v a l e s , tou t e n faisant r e v iv re les e n t r e p r is e s m e n é e s , n o t a m ­
ment lo rs d e la r é u n i o n d e s c o n c ile s d e L y o n I et L y o n II, p a r les p a p e s d u
X I I I e s i è c l e ,44.
E u g è n e IV, en a c c o r d a v e c les P è r e s de B â le , avait e s s a y é d è s 1433 d e
faire p a r v e n i r ses le ttre s au c a t h o lic o s a r m é n ie n , C o n s ta n tin V I. M a i s c e s t
un F ra n c is c a in , J a c q u e s d e s P rim a d iz i d e B o l o g n e , q u i j o u a ici le r ô le e s se n -

142 R e i c h e r t , A c ta c a p it. g e n e r., II. p. 323; E u b e l , D ie a v ig n o n e s is c h e O b e d ie n z . n ° 185.


145 E n 1426-1427, u n c e r t a i n n o m b r e d e s c l a v e s b a p t i s é s p r é f é r a i e n t , d i t M a k h a i r a s , p e r -
d r e la v i e p l u t ô t q u e d e r e j o i n d r e le u r s a n c i e n s c o r e l i g i o n n a i r e s , l o r s d e 1 i n v a s i o n d e s M a m e -

'úks d a n s l’i l e . .
144 L ' U n i o n d e s E g l i s e s , d a n s s o n e n s e m b l e , a é t é é t u d i é e p a r le P. G. H o f m a n n . S. J., D ie
E m ig u n g d e r a r m e n is c h e n K i r c h e m il d e r k a th o lis c h e n K ir c h e a u f d e m K o n z i l v o n F l o r e m , d a n s
O rie n ta l,a c h r is t ia n a p e r ió d ic a , V. 1939. p. 151-185; - K o p te n u n d A e th io p e n a u f d e m K o n z i l v o n
F lo re n z. i b id V III 1942 p. 5-39. N o u s n e I e t u d i e r o n s pas e n t a n t q u e t e lle .

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266 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO NS D O RIE N T AU M O YEN AGE

tiel. II avait été désign é le 29 ju in 1437, c o m m e vicaire du ministre général


des Franciscains dan s tous les pays d ’Orient (v ic a r iu s in p a rtib u s otnnibus
o r ie n ta lib u s ) et en v oyé « à C affa et à Péra, chez les Sarrasins, paiens, Grecs
B u lgares, Ethiopiens, Ibères, Alains, Khazars, Goths, Syriens, Perses, Medes
Ziques, Ruthènes, Russes, S is s i (Scythes?), Jacobites, N u b ien s, Nestoriens
G é o rg ie n s , A rm é n ie n s, Indiens, Turcs, S t e liti (M o sso u lita in s), Tartares, K ur­
des, Polonais, H o n g r o is de G r a n d e H o n g r i e » - on reconnait là len u m éra -
tion d e s b u lle s c u m h o r a u n d e c im a , avec p lu s ie u rs c a c o g r a p h ie s - p o u r visi-
ter et r é f o r m e r les c o u v e n ts (à c o m m e n c e r p a r celui de Caffa), avec pouvoir
de p rê c h e r, d é r i g e r de s cou ve n ts et d e m m e n e r avec lui d e n o m b r e u x frè­
r e s 145.
Il s agissait p o u r lui d ’in t r o d u ir e la ré g u liè re o b s e r v a n c e dan s les cou­
vents fra n c is c a in s d ’O rient, ce q u i était u ne de s g ra n d e s p ré o c c u p a tio n s de
cette p é r i o d e 146. M a is Jacqu es pren ait é g a le m e n t contact avec le catholicos
a r m é n ie n . D e u x é v è q u e s a r m é n ie n s sont présents, en tant q u e procu reu rs
d e ce d e r n ie r , q u a n d on p r o c la m e 1'Union avec les G r e c s (9 avril 1438); en
ju ille t d e la m ê m e année, la d é lé g a t io n a r m é n ie n n e est constituée, avec
1'évêque a r m é n i e n d e P éra et trois va rtabed. Jacqu es les a c c o m p a g n e , avec
un a u t r e F ra n c isca in , Basile, et un U n iteur, N e r s è s 147. L e 13 aoüt 1439, ils
son t à F lo r e n c e ; o n tra v a ille su r les textes de D a n ie l d e T abriz, d u concile
d e Sis d e 1307; le 22 n o v e m b r e 1439 était p r o c la m é le D e c r e tw n p r o Arm e-
nis, q u i r é s o lv a it en fin la q u e s tio n d e s r e b a p t ê m e s et re c o n n a issa it 1'auto-
rité d u p a t r i a r c h e s u r tous les é v è q u e s a rm é n ie n s, y c o m p r i s c e u x de Péra,
d e C affa, d e L w ó w et d e K a m i e n i e c 148.
L 'U n i o n fut p r o c l a m é e d è s 1440 à C a ffa et les a u to rité s gênoises se
m o n t r è r e n t e x t r ê m e m e n t d é s ir e u s e s d ’a p p l i q u e r les d é c r e t s de Florence,
r e c o n n a i s s a n t a u d é l é g u é d u p a tria rc h e , le v a rta b e d Sarkis, d e v e n u chape-
lain d u p a p e , le d r o it d e sta tu e r s u r tout ce q u i avait trait à le u r adoption,
é c r iv a n t a u p a t r i a r c h e p o u r lui d e m a n d e r d 'a p p r o u v e r le d é c r e t 149, révo-

145 Hüntemann, B u l i F ra n c ., I, 295, 297, 300. La présence des Polonais ( P o lo n o r u m ) sur-


prend ...
146 En même temps que lui, le Dominicain Nicolas de Ferrare était envoyé réformer le
couvent des Frères Prêcheurs de Péra (Iorga, N o te s e t e x tra its , II, 343); cf. G. Hofmann, Pàps-
t lic h e G e s a n d ts c h a fte n f i i r d e n N a h o s te n . 1415-1453, dans S tu d ia m is s io n a lia , V, 1950, p. 61.
147 Un Dominicain, Thomas Siméon, avait lui aussi servi d'interprète (A. Vigna, C o d d ip -,
II, 2, p. 700-701). .
I4HCocquelines, B u l l a r u m . . . a m p lís s im a c o l l e c li o , III, 3, p. 28. Les Arméniens a c c e p ta ie n t

de célébrer plusieurs fêtes à la même date que les Latins, r e c o n n a i s s a i e n t la dualité des natu
res du Christ, et 1’invocation de la Trinité dans la formule du baptême.
149 Constantin VI était mort et remplacé par Grégoire IX.

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LES M IS S IO N S DE IJ\ M ER N O IR E ET DU CAUCASE 267

q Ua n t un c o n s u l q u i p a ra issait a v o i r fait c a u se c o m m u n e avec les a d v c r s a i-


rt>s de 1 'U n io n 150. En P o lo g n e , o ú L w ó w avait un é v ê q u e a r m é n i e n d e p u i s
1356 au m oins, et o ú 1'évêque G r é g o i r e avait m a n ife sté un g ra n d zéle p o u r
|'Union, en e n v o y a n t ses r e p r é s e n t a n t s à F lore n ce , le roi C a s i m i r exig e lui
aussi d'un n o u v e l é v ê q u e d e L w ó w et K a m ie n ie c , en 1464, qu'il o b t ie n n e
dcs lettres « d u p a t r i a r c h e d e G r a n d e - A r m é n i e » 151. Cette p r é c is io n laisse
d ailleurs un d o u t e : c etait le c a th o lic o s d e Sis, C o n s ta n tin VI. q u i avait
e n g a g é les n é g o c ia t io n s p o u r 1’U n i o n ; a p r è s sa m ort, o n sait q u e les m o n a s -
tères de G r a n d e - A r m é n i e a v a ie n t e x ig é de so n su c ce sse u r, G r é g o i r e IX , q u ’il
quitte la C ilic ie p o u r r e v e n i r d a n s le u r p a y s et que, s u r so n refus, ils é lu re n t
un c ath olicos q u i s ’éta b lit à E ts c h m ia d z in (V a g h a r s c h a p a t ) en 1441; G r é ­
goire I X et son s u c c e s s e u r K a r a p e t se d é c la r a n t fid è le s à 1’U n io n , n o n sa n s
précautions, 1'attitude d u c a t h o lic o s d 'E t s c h m ia d z in fut d e r e f u s e r tou te
concession a u x Latin s. M a i s cette attitu de fut-elle a ussi t ra n c h é e q u ’o n
l'admet g é n é r a le m e n t ? L e texte p o lo n a is n ’est p a s seul à d o n n e r à p e n s e r
que, r e c o n n u p a r les é v ê q u e s d e Caffa, de L w ó w et d e Péra, le c a t h o lic o s d e
G ra n d e -A r m é n ie m a in t e n a it d e s con tacts avec 1’E g lise d e R o m e ’52.
Jacques d e s P r im a d iz i était r e v e n u e n O rient, o ú il fut r e n o u v e l é d a n s
ses fo n c tio n s d e 1442 à 1444, avan t d 'ê tr e r a p p e lé en Italie p o u r p r e n d r e la
charge d e la flotte c h r é t i e n n e 153. U n a u tre e n v o y é po n tific a i, 1 'évêque d e
Coron C h r is t o p h e G a r a t o n i, avait c e p e n d a n t été c h a r g é d e se r e n d r e en
Géorgie en m ê m e t e m p s q u ’à B y z a n c e , m a is sa m is s io n n ’a p a s laissé d e t r a ­
c e s154. II n 'e n est p a s d e m ê m e p o u r un a u tre F ran c isca in , le c é l è b r e A lb e r t
d e S artean o. C elu i-ci, q u i avait d é jà été c h a r g é en O r ie n t d 'u n e m is s io n e n
rapport a v e c 1 'in tro d u c tio n d e 1 'O b se rv a n c e d a n s les c o u v e n t s d e s L ie u x -

,,;o Iorga, N otes et extraits, III, p. 55, 66, 67, 72. Le p a tria rc h e c o n fir m e d é s o r m a is le c h o ix
de l'évèque a r m é n ie n d e C a ffa ; il a son légat à C affa : Vigna, Cod. dipl., II, 2, p. 30-31, 101, 118,
186 (à 1’o c c a s io n d u n e d o u b le é le ctio n , les p r o te c te u r s p ré c isen t qu e les ag en ts de G ê n e s
n ont d autre p o u v o i r q u e d e faire e x é c u t e r les m a n d e m e n ts d u patriarch e).
151 Sd islaus O b e rty n s k i, D ie Florentiner Union des polnischen Armenier, d an s Orientalia
christiana periódica, t. X X X V I , 1, 1934.
152 Fr. T o u rn e b iz e , Arm énie (d a n s Dict. hist. et géogr. eccl.) a d m e t qu e c e fut G ré g o ire IX
Moussabékiantz, c a t h o lic o s d e Sis, qui d o n n a en 1450 son a d h é sio n à 1 U nion, m ais G ré g o ire
était mort en 1446; se lo n G. H o fm a n n , art. cité, c e s t le c a th o lic o s d e V a g h a rs c h a p a t - alors
Grégoire X — q u i avait agi en c e se n s —. T h o m a s d e M e d z o p h (m o rt en 1446) ra p p o rte la nais-
sance du c a th o lic a t d ’E ts c h m ia d z in en lui d o n n a n t un se n s n e tte m e n t a n ti-c h a lcé d o n ien ,
dautres fa c te u rs o nt jo u é .
,SJ H un tem an n , op. cit., I, 792-793 (il d e v in t p lu s tard v ic a ire g é n é r a l de 1'O b serva n ce en
Italie).
G. H o fm an n , Pdpstliche Gesandtschaften, p. 63-64 (13 o c t o b r e 1439).

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268 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO N S D O R IE N T AU M O Y E N AGE

S a in ts 155, se vit investir, égalem ent en 1439, des fonctions de com missaiif
ap o sto liq u e dans les partes Orientales, 1’Inde, 1’Ethiopie, 1’Egypte et à Jérusa
lem. II était spécialem ent chargé par Eugène IV de travailler à r é a lis e r
1’U n io n entre 1’Eglise latine et les églises orientales séparées de Rome; i|
partait p o u r le couvent de B e yrou th muni de lettres p o u r Thomas, « e m p e-
re u r des I n d e s », Jean, « e m p e r e u r des E th io p ie n s » et p o u r les C o p te s 156.
A lbe rt prit sans d oute des contacts à Beyrouth, mais sans se rendre à
Jérusalem ; il se rendit directem ent en Egypte. O n a dit que, lors de son
sé jo u r au Caire, il avait été m enacé de mort, soit p o u r avoir prèché trop
h ard im en t, soit p arce qu e les M am e lü k s veillaient à e m p ê c h e r les contacts
entre O c cid e n tau x et E t h io p ie n s 157, et qu il avait faliu le racheter à prix
d a r g e n t ; q u e son v oyage s’était ensuite poursuivi par Jérusalem d'oú il
aurait v o u lu atteindre 1’O céan Indien p a r 1’Asie m in eu re et la Perse. Une
é tu d e récen te a d é m o n tré qu'il n'avait pas quitté le Caire, oü le patriarche
copte, p e u d é s ire u x sans doute de voir les Latins traiter directem ent avec
1'Eglise d 'E t h io p ie qui relevait en principe de son autorité, le dissuada de
p a s s e r outre, se c h argean t d 'in fo r m e r lui-m êm e les E thiop ien s de la procla-
m a tio n d u d é c re t d U n io n avec les G recs - a u q u e l le patriarche melkite
d ’A le x a n d r ie d o n n a lui-m êm e son adhésion. A lbert repartit p o u r 1'Italie
av ec un e n v o y é d u p atriarch e copte, 1'abbé André, qui a d h é ra au décret
d 'U n i o n avec les Coptes, le 4 février 1442. Et ce serait p a r une autre voie
q u e 1’a b b é é th io p ie n de Jérusalem, N ic o d èm e , aurait été incité à se rendre à
F lo r e n c e o ü il p artic ip a à ces n é g o c ia tio n s 158.
A lb e r t était s u r le point de re p artir p o u r 1'Ethiopie, de façon à obtenir
1'adhésion d e s autorités religieuses de ce pays au d écret Cantate D o m in o ; on
le voit q u a lifié d e n u n ciu s in pa rtib u s o rie n ta lib u s le 3 ja n v ie r 1443, avec
m is s io n d a s s i s t e r Jacques des Prim ad izi d an s la r é fo r m e des couvents de

155 II rend compte au pape, le 23 mars 1436, de 1’état des Lieux-Saints.


156 Huntemann, op. cit., I, p. 442-444; R. Pratesi, N u o v i docum enti sul B. Alberto de Sar-
teano, dans A rch ivu m francisc. hist., LIII, 1960, p. 70-110.
157 Un envoyé abyssin, revenant de la cour d’Aragon avec deux autres messagers, dont un
religieux latin, est exécuté en 1429 (Ahmed Darrag, L'Egypte sous le règne de Barsbay, p. 339­
340).
158 Franciscus Haroldus, Beati Alberti a Sarthiano, O. M. reg. obs., vita et opera,
Romae 1688; G. Hofmann, K opten und Aethioper auf dem K o n z il . . . ; Raynaldus, Annales, IX,
367 et suiv.; E. Cerulli, E u g ên io I V e gli Etiopi al concilio di Firenze nel 1441, dans Rendiconti
dellA ccadem ia dei Lincei, ser. VI, vol. IX, 1933; T. Somigli, Etiópia francescana, Quarac-
chi 1928, p. XLV; Pierre Santoni, Albert de Sarteano, observant et humaniste, envoyé pontificai à
Jérusalem et au Caire, dans Mél. E co le franç. de Rom e, M o y en -A g e et temps modernes, t. 86, 1974,
p. 165-211. Le décret dunion : Coquelines, B u lla r u m . . . ampl. collectio, III, 3, p. 37.

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LES M IS S IO N S DE LA M E R N O IR E ET DU CAUCASE 269

Constantinople et Caffa, ce qui laisse s u p p o s e r qu il entendait re p r e n d r e la


route de la m e r N o ire. Là-dessus on apprit q u e des envoyés éthiopiens
auprès du sultan d u C aire avaient pris contact avec les Franciscains à
Bethléem et le u r avaient fait sa v o ir qu e les lettres de 1'abbé N ic o d è m e
contenant la fo r m u le d 'u n io n étaient arrivées en E thiopie et avaient été
approuvées.
De fait, les relations entre R o m e et 1'Ethiopie entraient d an s une p hase
nouvelle : en 1450, u n e a m b a s s a d e de 1’e m p e r e u r Z a r 'a Y a q o b , c o m p o s é e
d un religieux éthiopien, d un Sicilien fixé d ep u is lon gtem p s en Ethiopie,
Pietro R o m b u l o de Messine, et d 'un « M a u r e » , arriv a à R o m e p r o n o n n u l l i s
a rd u is n e g o íiis e tia m h o n o r e m s a n c te a p o s to lic e sed is c o n c e r n e n t i b u s 159. E lle
reprit la ro u te de l'E th iop ie; mais, p eu d a n n é e s après, Calixte III envisa-
geait d 'a s so c ie r le N é g u s aux o p ération s m enées contre les T u rcs et, lui
écrivant à cette fin, exprim ait son voeu de m aintenir 1’un ion entre les E g li­
ses160. En 1480, 1'em pereur E s k a n d e r envoyait un m e ssa g e r au sultan d u
Caire avec, prétendait-on, m ission de r a m e n e r de G rèc e un prélat p o u r se
faire c o u r o n n e r p a r l u i : le gard ie n des Frères M in e u rs d u M o n t-S io n insis-
tant p o u r q u e ce soin fut laissé à des Latins, on aurait écrit à R om e, les
envoyés faisant acte d ’o b é d ie n c e envers le pape qui d o n n a m issio n au
vicaire g é n é ra l d es Franciscains d e n v o y e r des religieux en E thiopie. D e
fait, d eu x d ’entre eux partirent; l’un d'eux, Jean de Calabre, y parvint effec-
tivement et y tro u va un certain n o m b r e d ltaliens qui s étaient fixés, d e gré
ou de force, en Ethiopie. O n envisagea en core des n égociation s en vue d e
1’Union. Mais, cependant, Sixte I V avait d on n é à des m o in e s abyssin s une
chapelle à R o m e : 1'union éthiopienne, très vague sans d oute d an s la réalité,
paraissait d o n c effective à ses y e u x 161.

159 C.-M. d e W i t t e , U n e a m b a s s a d e é t h io p ie n n e à R o m e en 1450, d a n s O r ie n t. c h ris t. p e r io d ,


X X I I , 1956, p. 286-298; C. T r a s s e l l i , U n I t a lia n o in E t i ó p i a : P ie t r o R o m b u lo da M e s s in a , d a n s
R assegna d i s tu d i e t io p ic i, I, 2, 1941. ( P i e t r o R o m b u l o a u r a it r a c o n t é c o m m e n t le « r o i d u
C a t h a y » , un c h r é t i e n v a s s a l d e s M o n g o l s - a u p rè s d u q u e l lu i-m ê m e a u ra it é t é e n v o y é en
a m b a s s a d e p a r le N é g u s - a u r a it e n v o y é a u p a p e d e u x é v è q u e s d e 1’é g l i s e i n d i e n n e ) .
160 R a y n a l d u s , A n n a le s , X, p. 85. D e t e l l e s l e t t r e s a v a i e n t é t é é c h a n g é e s e n t r e le s s o u v e ­
rains é t h i o p i e n s e t le s r o i s d ' A r a g o n : C e r o n e , L a p o lit ic a o r ie n ta le d i A lfo n s o d i A ra g o n a , d a n s
A r c h iv io s t o r ic o p e r le p r o v i n d e n a p o le ta n e , t. X X V I I , 1902, p. 3-93, e t X X V I I I , 1903, p. 154-212.
161 L ' h i s t o i r e d u m e s s a g e r é t h i o p i e n e s t r a p p o r t é e d a n s XI t i n e r a r i u m T e r r a e S a n ta e d u
F r a n c is c a in P a u l W a l t h e r ( T u b i n g e n , 1892, p. 37 -43 ); c e l l e d e J e a n d e C a l a b r e , d o n t le r a p p o r t
P a r v in t à J é r u s a l e m e n 1483 p a r les s o i n s d c B a p t i s t e d ' I m o l a , d a n s S u r i a n o , T r a tta to d i T e r r a
Santa . . . , éd . G o l u b o v i c h , p. 80-87 ( S u r i a n o é ta it nonce a p o s to liq u e à J éru sa lem lo rs du
d é p a r t d e s d e u x m i s s i o n n a i r e s ) . Cf. a u s s i M . C h a i n e , U n m o n a s tè r e é t h io p ie n à R o m e a u X V ‘ e t
X V I* s iè c le : S a n S te fa n o d e i M o r i, d a n s M é la n g e s de la F a c u lté O r ie n ta le , V, 1911, p. 1-37. e t

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270 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO NS D O R IE N T AU MOYEN-AGE

Ce n e s t sans d o u te pas A lbert de S a rtea n o qui avait pris contact avec


les M a ro n ite s d u Liban. N o u s savon s q u e le p atriarch e maronite, Jean X al-
Gagí, remit au g a rd ie n du cou vent franciscain de B e y ro u th une profession
de foi et un acte d o b é d i e n c e qui furent rem is au p a p e p a r un des religieux
du couvent, en 1439 - tandis q u A l b e r t allait a p p o r t e r à R o m e une lettre des
M a ro n ite s de Jérusalem , et que le v ê q u e m a ro n ite de C hypre devait
e n v o y e r sa p r o p r e a d h é s io n aux décrets d e F lo re n c e (e n s e n g a g e a n t à ne
plu s m ê le r d 'h u ile à la m a tiè re de la c o n s é c ra t io n ) en 14 4 5 162 En réponse
E u g è n e I V en voyait au p a tria rc h e le pa lliu m , le b â to n pastoral et la mitre,
c o m m e ja d is 1'avait fait In n o c e n t I I I 163. M a is il désign ait aussi un Francis­
cain, A n to in e T ro ja n o , c o m m e « c o m m i s s a i r e a p o s to liq u e dan s les provin-
ces d e s T artares, d'Assyrie, de P erse et d'E th io p ie , ainsi q u ’a u p rè s des
n a tion s d e s M a ro n ite s, D ru so ly te s (sic), N e s t o r ie n s et Syriens, sau f dans les
lie u x d e T e r r e S a in t e ». (15 d é c e m b r e 1440). Ce c u r ie u x titre (voulait-on res-
p e c t e r la d é lé g a t io n c o n fié e à A lb ert de S a r t e a n o qui avait Jérusalem dans
sa c ir c o n s c rip t io n , o u bien n'y avait-il là q u e le d é s ir de laisser les Lieux-
S ain ts et les c o u v e n ts fran ciscain s de T e r r e Sain te en d e h o r s de sa ju rid ic­
tion ? ) c o r r e s p o n d a i t en fait à u ne m issio n a u p r è s d e s p e u p le s du Liban,
p o u r les fa ire a d h é r e r aux décrets d u con c ile; il a m e n a effectivem en t en
1444 à R o m e d e s rep ré se n ta n ts des M a r o n it e s et de s D r u s e s 164.
A n t o in e fut r e m p la c é cette a n n é e -là p a r d e u x c o m m is s a ir e s apostoli­
q u e s : l'un, G a n d o l f o de Sicile, g a rd ie n d u M o n t-S io n , in p a r tib u s o r ie n ta li-
bus, In d ia e , A E g y p ti et H ie r u s a le m ; 1'autre, P ie rre F e r r a r iu s , d u couvent du
S a i n t - S a u v e u r de B e y ro u th , in p r o v ín c ia S y ria e a p u d n a tio n e s M a r o n ita ru m ,
D r u s o lit a r u m e t S u r ia n o r u m lb5.

R e n a t o L e f è v r e , R o m a e la c o m u n it à e tio p ic a d i C ip r o n e i s e c o li X V e X V I , d a n s Rassegna di
s tu d i e t io p ic i, I, 1941, p. 71-86 ( l e c o u v e n t S a i n t - S a u v e u r d e N i c o s i e , d é p e n d a n t d u m o n a s t è r e
é t h i o p i e n d e J é r u s a l e m , se m e t e n 1456 s o u s la p r o t e c t i o n d u S i è g e A p o s t o l i q u e p o u r échap-
p e r a u x v e x a t i o n s q u e lui a u r a ie n t i n f l i g é e s d e s C o p t e s d e C h y p r e , h o s t i l e s à 1’ U n io n ; son
p r i e u r , Pa u l, fu t c h a r g é d e m i s s i o n p a r R o m e a u p r è s d u r o i d ' E t h i o p i e ) .
162 C e e i l a is s e s u p p o s e r q u e le p a t r i a r c h e a v a i t é t é d i r e c t e m e n t a p p r o c h é p a r les r e lig ie u x
d e B e y r o u t h , A l b e r t d e S a r t e a n o n e t a n t p a s p a s s é p a r le L ib a n , t a n d i s q u e les é v ê q u e s o r i e n ­
t a u x d e C h y p r e f u r e n t p r e s s e n t i s p a r les L a t i n s d e C h y p r e .
141 L e O u i e n , O r ie n s c h ris tia n u s , I I I , 54-65; H . L a m m e n s , F r è r e G r y p h o n et le L ib a n a u X V ‘
s iè cle , d a n s R e v u e d e 1 'O rie n t c h ré tie n , IV , 1899, p. 68 e t suiv.
164 H u n t e m a n n , B u li. F ra n c is ., I, 501; W a d d i n g , A n n a le s M in o r u m , X I , p. 99, 164. E n 1444.
A n t o i n e é t a i t e n v o y é e n S a x e (ib id ., X I , p. 215).
165 H u n t e m a n n . B u li. F ra n c is ., I, 785, 826; A n n a le s M in o r u m , X I , p. 215. II est b i e n p r é c is e
q u e 1’a u t o r i t é d e P i e r r e n e s’é t e n d p a s s u r le s L i e u x S a in ts . Q u a n t a u t e r m e d e p a rte s o rie n ta -
les, il n e d é s i g n e e n fa it r i e n d e p r é c i s : en 1445, l o r s q u e le m i n i s t r e g é n é r a l n o m m e d e u x

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LES M ISSIO N S DE LA MER N O IRE ET DU CAUCASE 271

En fait, le rôle d u c o m m is s a ir e a p o s to liq u e fut e ssen tiellem en t d être


un résident a u p r è s du p a tria rc h e m aronite. Car, si ce d e r n ie r était sin cère-
ment acquis à la c au se de 1'union, il app ara issa it q u e la lo n g u e in te rru p tio n
des relations entre Latins et M a r o n it e s avait r e d o n n é v ig u e u r a u x influen -
ces m o n o p h y site s qui s’exerçaien t d an s certain es con tré e s d u L i b a n ; et les
Franciscains estim aient q u e les u sa ge s litu rgiqu es des C h ré tie n s d u L i b a n
appelaient de s c o r r e c t i o n s I66. U n F la m a n d , G ry p h o n , qui avait c o n q u is son
doctorat à 1 Université de Paris, en vo y é en 1442 en T e rr e Sainte, et ayant
appris l’a r a b e à Jérusalem , jo u a un rô le essentiel d a n s ce r a p p r o c h e m e n t
des usages latins et m aronites. Le p a p e Paul II, en 1469, r e c o m m a n d a it au
nouveau patriarch e, Pierre, de suivre les conseils de G r y p h o n 167 qui m o u r u t
peu après, m ais do nt 1'oeuvre fut con tin u ée p a r d autres p e r s o n n a g e s q u i se
qualifiaient e u x -m ô m e s d u titre de « c o m m i s s a r i o a p o s to lic o d e li M a r o n i-
thi», A le x a n d re Ariosto, puis Fran cesco S u r i a n o 168.
Les efforts d E u g è n e IV, se c o n d é p a r ses c o m m is s a ir e s fran ciscain s,
atteignirent é g ale m en t les Syriens : 1'archevêque d Edesse, A b d a lla h , vint à
Rome c o m m e rep résen tant d u patriarch e syrien, le 30 s e p t e m b r e 1444. L e s
prélats o rie n tau x de C h y p re avaient égalem en t été invités à a d h é r e r à
1'Union sous la f o r m e définie au concile : en 1445, avec 1'é v ê q u e de s M a r o n i -
tes, celui de s N e sto rie n s faisait acte d 'o b é d ie n c e au Siège a p o s t o l i q u e 169. Et,
si l'on retient le té m o ig n a g e de Pietro R o m b u lo tel q u e n o u s le r a p p o r t e
Pietro R anzano, un so u v e ra in chrétien de 1’Inde (?) aurait é g a le m e n t e n v o y é
une a m b a s s a d e p o u r m a n ife ster sa volon té de c o m m u n io n avec le S ain t

vicaires m p r o v ín c ia O rie n ta li, il s a g i t d e s p a y s h a b it é s p a r les G r e c s d ' E u r o p e et d ’A s ie ( H ü n -


temann, op. cit., I, 844).
166 Cf. le t t r e d ' A l e x a n d r e A r i o s t o à S i m o n d e R e g g i o : le p a p e S ix t e I V l'a e n v o y é p o u r
M u ro n ita ru m gen tem , o rth o d o x e fid ei q u a s i n e o p h itu m , ab in v e te ra tis e rro rib u s , s u p e rs titio n ib u s ,
eripere, en 1476.
167 R a y n a ld u s, A n n a le s e ccles ia s tici, X, p. 476.
'** Cf. H. L a m m e n s , F rè re G ry p h o n et le L ib a n ; le t t r e d ’A l e x a n d r e A r io s t o , d a n s I o r g a ,
Notes et extraits, V, p. 5-10; S u r ia n o , T ra tta to di T e rra santa, p. 68-71 ( i l n o u s a p p r e n d q u e G r y ­
phon avait fait e n t r e r da n s l o r d r e f r a n c is c a in q u e l q u e s M a r o n it e s , e t q u ’il v i v a i t p a r m i c e u x -
ti avec un seul f r è r e ). S u r la p e r s is t a n c e d e 1 'in flu en ce m o n o p h y s i t e , cf. K a m a l S. S a lib i, T h e
M a ron ite c h u rc h in the M id d le Ages a n d its u n io n w ith R o m e , d a n s O rie n s ch ris tia n u s , X L I I ,
l y 58, p 101-104; des c o n fli t s a r m é s s u r g ir e n t , q u i s’ a c h e v è r e n t p a r la d i s p e r s i o n d e s é l é m e n t s
M o n op h ys ite s.
' La táche, ici, i n c o m b a i t à ! 'a r c h e v ê q u e d e R h o d e s A n d r é C h r y s o b e r g è s , q u i fut e n v o y é
a C h y p r e aussitót a p r è s la c o n c l u s i o n d e 1'Union a v e c les S y r ie n s (G . H o f m a n n , P a p s tlic h e
ndtschaften, p. 64-65). Cf. A. V o g t , F lo r e n c e (c o n c ile de), d a n s D ict. de th é o lo g ie c a t h o i, VI, 1,
<- 46-49 C h r y s o b e r g e s d e v in t en 1447 a r c h e v ê q u e d e N i c o s i e et lé g a t à C h y p r e , R h o d e s et
dans 1'Archipel.

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272 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO N S D O R IE N T AU M OYEN-AGE

S i è g e 170. Et les M e lk ite s avaient é g a le m e n t m a n ilesté le u r b o n n e volonté,


sans a lle r très l o i n 171.
II vaut la peine de r e m a r q u e r c o m b i e n ce m o u v e m e n t en fa veu r dc
1’u n ion r a p p e lle les é c h a n g e s d e p r o fe s s io n s d e foi, a c c o m p a g n é e s de mani-
festations d e respect e n v ers le S iè g e de Pierre, q u on avait c o n n u s au XIII*-
siècle. L e fait n o u v e a u tenait à ce q u e le c o n c ile d e F lo r e n c e s était attaché
à e ffa c e r les ob sta c le s à une v é rit a b le c o m m u n i o n d a n s la (oi et les r it e s 1' 2.
N o u s a v o n s essayé d e m o n t r e r d a n s q u e lle m e s u r e c h a c u n d e s décrets
d 'u n io n traduisait u n e réalité v é c u e ; elle ne sau ra it ê tre sou s-estim ée, puis-
q u e d a n s tel cas - c o m m e p o u r les M a r o n it e s - 1 u n io n fut p o u r s u iv ie avec
p e r s é v é ra n c e , tandis q u a i l l e u r s les a c c o r d s p a ss é s a v e c les c h e fs d e s hiérar-
ch ie s o r ie n t a le s n 'e n train aien t g u è r e d e c o n s é q u e n c e s p ra tiq u e s.
C e s t là q u e le rô le de s c o m m is s a ir e s a p o s t o l iq u e s a u r a it p u être im por-
tant. N o u s a v o n s vu q u 'à p a rtir d e 1440, et su rto u t d e la n o m i n a t io n de Gry-
p h o n , le c o m m i s s a ir e a u p r è s des M a r o n it e s est d e v e n u u n v é r i t a b le conseil-
le r d u p a tria rc h e , en m ê m e te m p s q u 'u n r e p r é s e n t a n t p e r m a n e n t d u pape

170 S u p ra , p. 269 n. 159 : c e r o i d e C a t h a y a u r a it e n v o y é à R o m e u n e d é l é g a t i o n d c t r e n t e


p e r s o n n e s , d o n t d e u x é v ê q u e s d e 1'église in d ie n n e , p o u r r e c o n n a i t r e la p r i m a u t é p o n t if ic a le .
M a i s un d e s é v ê q u e s s e r a it m o r t à A l e x a n d r i e , p e n d a n t le v o y a g e d a l l e r ; 1’a u t r e s u r le G a n g e ,
a p r è s ê t r e r e v e n u d e R o m e p a r J é r u s a l e m ; et un s e u l d e s a m b a s s a d e u r s s e r a i t p a r v e n u au
t e r m e d u v o y a g e d e r e t o u r . II es t i n u t i le d e d i r e q u e , si n o u s s o m m e s i n v i t é s p a r c e s ind ica-
t i o n s à c h e r c h e r c e « C a t h a y » d a n s 1'Inde, r ie n d e p e r m e t d e 1’i d e n t i f i e r a v c c q u e l q u e o m b r e
d c c e rtitu d e.
171 O n p a r l e d ’un s y n o d e d e J é r u s a le m oú, e n 1443, le s t r o i s p a t r i a r c h c s m e l k i t e s a u r a ie n t
d é c i d é d e r e f u s e r 1'Union d e F l o r e n c e ; s o n e x i s t e n c e n 'e s t p a s a b s o l u m e n t a s s u r é e ; 1’a rc h id ia -
c r e d ' A n t i o c h e M o i s c G i b le t , p e r s o n n a g e a s s e z é n i g m a t i q u e , se p o r t a i t g a r a n t , e n 1460, de
1’a d h é s i o n d e c e s m ê m e s p a t r i a r c h e s à 1’U n io n : G. H o f m a n n , P a p s t P iu s I I u n d d ie K ir c h e n e in -
h e it des O sten s, d a n s O r ie n ta lia c h r is tia n a p e r ió d ic a , X I I , 1946, p. 224-228 ( c f . O . H a l e c k i , D ip lo -
m a tie p o n t ific a le et a c tiv ité m is s io n n a ir e en A sie a u x X I I I * X I V e s iè c le , d a n s C o m itê in te rn . des
sc. h is to riq u e s , X I I e C o n g re s , V ie n n e 1965, R a p p o rts , II, p. 23-24 e t 3 1 ). Q u a n t à A l e x a n d r e
A r i o s t o , il r a p p o r t e q u a y a n t p a r c o u r u les c h r é t i e n t é s g r e e q u e s d e S y r i e , d ’ E g y p t e e t d ’A rm é -
nie, p o u r les i n v i t e r à a d h é r e r a u x d é c r e t s d e F l o r e n c e , il r e n c o n t r a u n r e f u s d u p a t r i a r c h e de
J é r u s a l e m ; c e l u i d A n t i o c h e l o u v o y a ; le s m o i n e s d u S i n a i ( o ü le s L a t i n s a v a i e n t u n e c h a p e l l e à
I u s a g e d e l e u r s p é l e r i n s ) sc r c t r a n c h a i e n t d e r r i è r e le s d é c i s i o n s d e s p r é l a t s d o n t ils d é p e n -
d a i e n t : V ia g g io n e lla S ir ia . . . (1 4 7 5 -1 4 7 8 ), éd . G. F e r r a r o , F e r r a r e , 1878, p. 57-58. L a d a t e d e ce
v o y a g e est s a n s d o u t e a n t é r i e u r e à 1475.
1 Le souci d e m a in te n ir 1’ i n d i v i d u a l i t é de chaque rite est b ie n m a r q u é : N i c o l a s IV
i n t e r d i t a u x c a t h o l i q u e s , e n 1448, d e p r e n d r e a r g u m e n t d e 1’ U n i o n p o u r p a s s e r à 1'Eglise grec-
q u e , q u e l q u e la u d a b ile s q u e s o i e n t le s r i t e s d e 1’ E g l i s e d ’O r i e n t ( C o c q u e l i n e s , I I I , 3, p. 64). Sur
le s s u i t e s d u c o n c i l e , cf. G. H o f m a n n , P a p s t K a lix t I I I u n d d ie F r a g e d e r K ir c h e n e in h e it im
O s te n , d a n s M is c e lla n e a G. M e r c a ti, II I, 1946. p. 2 0 9-2 37 ; O. H a l e c k i , S ix t e I V e t la c h ré tie n te
o r ie n ta le , d a n s M é la n g e s E. T is s e ra n t, C i t é d u V a t i c a n , 1964, II, p. 245 e t s u iv .

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LES M ISSIO N S DE LA MER N O IRE ET DU CAUCASE 273

v, He lui. Les autres com m issa ire s, a u x q u e ls avaient été c o n fié c s de s


^LlpI - , ,
‘ isSions dip lo m a tiq u e s d a n s une aire très étendue, ne se m b le n t pas a v o ir
ui la possibilite d a g i r de m è m e : A lb ert de Sarteano, m alg ré ses efforts, n'a
u joindre ni l ' « e m p e r e u r de 1’I n d e » , ni l ' « e m p e r e u r d ‘E t h io p ie », et a tout
ul p|us pu ren c o n tre r à l o c c a s i o n d ’un u n iqu e voyage les d e u x p a tria rc h e s
d ’A l e x a n d r i e ; Jacques des Prim adizi n'a sans doute eu de contacts avec le
catholicos d 'A rm é n ie q u e p a r T interm éd iaire du vicaire de celui-ci à Caffa.
II n e m p ê c h e q u e 1’institution des c o m m issa ire s a p o s to liq u e s relayait
dans une certaine m e s u re celle des é vè q u es et a rc h e v è q u e s du siècle pré c é-
dent. Ils étaient en fait investis des p o u v o irs d'un vicaire d u m in istre g é n é ­
ral des Frères M in e u rs, r e n fo r c é s p a r ceux d ’un légat pontificai. M a is le u r
rôle ne parait pas être allé ju s q u 'à la constitution de c o m m u n a u t é s c a th o li­
ques relevant d 'u n e h ié ra rc h ie d é p e n d a n t directem ent du P ap e : ils étaient
essentiellement v o u é s à la ré u n io n à R o m e des Chrétiens séparés, p ris d a n s
1’ensemble de le u rs Eglises. C était le re n o u v e a u de 1’idée qu 'a v a ie n t c a re s-
sée les papes du d é b u t d u X I I I e siècle.

c) Les d e rn iè re s m is s io n s m é d ié v a le s

Les c o m m is s a ir e s a p o s to liq u e s qu e nous c o n n aisson s exe rc e n t le u rs


fonctions dan s d e s c a d r e s g é o g ra p h iq u e s qui n'ont plus rien de c o m m u n
avec les vicairies et les custod ies du X I V e siècle. Le fait q u e la q u asi-totalité
d entre eux a p p a r t ie n n e à 1'ordre franciscain peut s 'e x p liq u e r p a r 1'impor-
tance que p re n d , à 1'époque qui suit le G ra n d Schisme, la q u e s tio n d e
l'Observance d a n s 1’o r d r e de s F rères M ineurs, suscitant à la fois l'e n v o i d e
religieux p o u r i n t r o d u ir e la r é fo r m e dan s les couvents é lo ig n é s et un n o u ­
veau zèle p o u r les m i s s i o n s 173. Les D om inicains, tou jou rs pré se n ts à P é r a et
a Caffa, sont é g a le m e n t à 1'ceuvre en A rm é n ie et en G é o rg ie , en liaison a ve c
les Frères U n ite u rs d o n t le n o m b r e des couvents s est réduit, m ais q u i r e s ­
tent actifs, n o t a m m e n t su r les rives d e la M e r N oire.
La vieille m issio n de C o m a n ie et du Q ip c a q con n ait c e p e n d a n t u n
renouveau, à p a rtir d e s c o u v e n ts de L w ó w , de P o d o lie et de V o lh y n ie , et d e
la Hongrie. Le r a p p r o c h e m e n t p o lo n o -lith u a n ie n a ch an gé les c o n d itio n s de

173 En 1460, le P a p e a d r e s s e au v i c a i r e d e C a f f a et d e s a u t r e s m a is o n s in p a rtib u s in fid e -


lium , V a le n t in d e T r é v i s e , u n e l e t t r e lui fa is a n t p a rt d e s p la in t e s d e s f r è r e s d e C a ffa , d o n t le
c o u v e n t a é t é s u p p r i m é p a r le c h a p i t r e g é n é r a l ; il lui d o n n e a u t u r it é aussi b i e n s u r le s m a i ­
sons d e 1’o b s e r v a n c e q u e s u r le s m a i s o n s c o n v e n t u e l l e s , lui c o n f è r e les f a c u lt é s h a b i t u e l l e s et
•u» p e r m e t d e m m e n e r a v e c lu i d e s F r è r e s v o l o n t a i r e s ( H u n t e m a n n . B u l i F ra n c is c ., II. 78 4).

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274 LA PAPAUTÉ E T LES M ISSIO N S D O R IE N T AU M O YE N AGE

1é v a n g é l i s a t i o n 174; les T a rt a re s se sont alliés aux Lithuaniens, et certains


d e n t r e eux se sont ré fu g ié s d a n s les territoires d u g r a n d -d u c W i t o l d ,7\ Le
trav ail m is s io n n a ire a re p ris en C o m a n i e h on g ro ise . Et l’on voit, en 1410
G r é g o i r e X I I se féliciter de s su ccès de 1'évangélisation en pays ruthène
lith u a n ie n et tartare, o ú l'on a e n re g is tré plus de vingt m ille co n v e rsio n s; il
a u t o r is e le F ra n c isca in Jean de P o lo g n e , dit le Petit, à e m m e n e r de ses
c o n f r è r e s d a n s ces pays. Jean X X I I I fait aussi état des c o n v e rs io n s qui se
m u ltip lie n t p o u r o r d o n n e r la c o n stru c tio n d 'é g lis e s p a ro issia le s destinées
a u x T a r t a r e s d e v e n u s c h r é t i e n s 176. M a is il ne s e m b le pas q u e les couvents
d e C r i m é e jo u e n t d a n s 1'ceuvre m is s io n n a ire de stin é e a u x p a rte s A q u ilo n a re s
le r ô le q u i avait été le le u r un siècle plu s t ô t : le m o n d e tartare n ’est plus
celu i q u 'o n t c o n n u les m is s io n n a ire s de la fin d u X I I I e et d u X I V e siècles, et
1a p p r o c h e d e s in fid é le s à c o n v e r t ir se fait, c o m m e au d é b u t d u X I I I C, à p a r­
tir d e s fro n t iè r e s de s pays de vieille chrétienté.
D a n s ces n o u v e lle s p e rspectives, les p r o v in c e s e c c lé sia stiq u e s de K h a n ­
ba liq , d e S arai, d e Sultan ieh , de M a tre g a , paraissen t bien o u b lié e s , et avec
e lle s ces n o v e lla e p la n ta tio n e s fid e i qu i avaient d o n n é lieu, a u X I V e siècle, à
la n a is s a n c e et à la p r o lifé r a t io n de s é vê ch é s m issio n n a ire s. Aussi vaut-il la
p e in e d e s a r r è t e r su r u n e d e r n iè r e tentative de faire r e v iv re l épiscopat
m i s s i o n n a i r e : ce lle de L o u i s de B o lo g n e .
P e r s o n n a g e c o n tr o v e r s é , certes, q u e ce Franciscain, s im p le fra te r la icu s
qui p a r a it a v o i r été I’un des c o m p a g n o n s d ’A lb e r t de S a rte a n o , lequel
1'envoya à R o m e , en 1436-1438177. En 1454, il a p p a rtie n t t o u jo u r s au couvent
d e J é r u s a le m ; il f o r m e a lo r s le projet de se r e n d r e avec d e u x c o m p a g n o n s

174 S u r c e s c o n d i t i o n s , cf. G. S o r a n z o , I I p a p a ío , i E u r o p a c r is tia n a e i T a rta ri, p. 402-443.


L e s T a r t a r e s p e r d e n t , au m i l i e u d u s iè c le , le c o n t r o l e d e la V a l a c h i e , l o r s q u e la P o l o g n e , alliée
a la H o n g r i e . a t t i r e c e l l e - c i d a n s s o n o r b i t e au m o m e n t o ü e l l e o c c u p é les t e r r e s ru s s ie n n e s
( L w o w ) : c e s t à c e t t e d a t e q u e la P a p a u t é c r é e 1' é v ê c h é d e M i l c o v (1 3 4 7 ). D u c ô t é d u n o rd , la
L i t h u a n i e r e s t e p a í e n n e j u s q u au m a r i a g e d e J a g e l lo n et d H e d w i g e (1 3 8 6 ). Cf. B ra tia n u , La
M e r N o ir e , p. 281-283.
175 S u r 1 'allia n c e p o l o n o - t a r t a r e ( o u p lu t ô t l i t h u a n o - t a r t a r e ) , cf. B. S p u le r , op. cit., p. 131­
140 L i n f l u e n c e d e s J a g e l l o n s se fait, au d é b u t d u X V e s iè c le , s e n t i r j u s q u ’e n C r i m é e .
'"Fontes, X I I I , 1, 151; A. T h e i n e r , V e te ru m o n u m e n ta h is tó r ic a H u n g a r ia m sacratn illus-
tra n tia , II, p. 191 (J e a n X X I I I a t t r i b u é c e s c o n v e r s i o n s a u x F r a n c i s c a i n s et. se r é f é r a n t aux
i n t e n t i o n s d e S i g i s m o n d , r o i d e H o n g r i e , r a p p e l l e q u 'il a e x is t é d a n s c e t t e c o n t r é e d e s églises
d é t r u i t e s p a r le s T a r t a r e s , et a u t o r i s e . a v e c la c r é a t i o n d e g l i s e s p a r o is s ia l e s , la n o m in a t i o n
d a r c h i d i a c r e s ) . B. S p u l e r , D ie G o ld e n e H o rd e , p. 240, r a p p r o c h e c e d e r n i e r t e x t e d u n e indul-
g e n c e a c c o r d é e e n 1344 p a r C l é m e n t V I p o u r u n e é g l i s e d e T r a n s y l v a n i e s it u é e e n t r e Chré-
t i e n s et T a r t a r e s .
177 Fr. H a r o l d u s . op. cit., p. 29.

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LES M ISSIO N S DE LA MER N O IRE ET DU CAUCASE

dans 1 In de ct en E th io p ie : N ic o la s V a p p r o u v e ce projet et le u r a c c o r d e
dispense d u je ü n e et d e 1’abstin en ce. Calixte III va plus loin, a c cro issa n t le
nom bre d e s m ission n aires, le u r c on fian t de n o u v e lle s tâches, le u r d o n n a n t
des m oyen s fin a n c ie rs (11 m ai 1455), avant de r a m e n e r le n o m b r e d e s c o m ­
pagnons de L o u is à qu atre, le 10 ja n v ie r 1456,78.
Lo uis et son c o n f r è r e B a r t h é le m y d e F o l i g n o 179 se r e n d e n t en O rie n t,
ou ils v o u la ie n t d e m a n d e r à C o n sta n tin Z a r a Y a q o b so n a id e c o n t r e les
Turcs; mais, ayant r e n c o n t r é en E g y p te d e s re lig ie u x éth iop ie n s, ils les
ramènent avec eux, n o n sans a v o ir visité en Perse et en G é o r g i e les « c h r é ­
tiens qu on a p p e lle F r a n c s » 180. C alixte III T e n c o u r a g e à r e p a r t ir p o u r 1 I n d e
et p o u r 1 E th iop ie , o ú n o tre F ran ciscain en visa g e de r e c r u t e r d e s F r è r e s et
de fo n d e r d e s m o n a stè re s, avec 1’a id e de s r e lig ie u x é th io p ie n s. M a i s L o u i s
ne devait p a s r é a lis e r son p r o j e t : so n activité va se c o n c e n t r e r s u r les p a v s
caucasiens. Pie II, ayant p ris c o n n a is s a n c e des p rote sta tio n s d e fid é lité é m a -
nant des p a t r ia r c h e s d ’A n tio c h e (m elkite, m a ro n ite ), d e s c a t h o lic o s d A r m é -
nie, de G é o rg ie , des C h a ld é e n s, des deux p a tria rc h e s d ’A le x a n d r i e , de
1’e m p e r e u r d e T r é b i z o n d e et des rois de G é o r g i e et de P e r s e — c ’e s t -à -d ire
de Q w a r q w a r é II d A k h a l z i k h é et de G e o r g e s V I I I d l m é r é t h i e — q u e L o u i s
avait r a p p o r t é e s d e sa m issio n d e 1456-1457, le r e n v o ie a u x O r i e n t a u x a v e c
le titre d e n o n c e a p o s t o liq u e en O rie n t (o c t o b r e 145 8 )181.
Le p a p e en visageait, d a n s ses lettres, u n e c o o p é r a t i o n m ilit a ir e a v e c le
souverain t u r c o m a n d u M o u t o n -B la n c , U z u n H a ssa n , et a v e c le m p e re u r
d Ethiopie, c o n t r e les T u r c s et les M a m e l ü k s 182. M a is, l o r s q u e L o u is de
B o lo g n e revient, à la fin d e 1460, c ’est en c o m p a g n i e d ' a m b a s s a d e u r s d e
l e m p e r e u r d e T r é b i z o n d e , d e s d e u x rois g é o rg ie n s , d ’U z u n H a s s a n et d ' u n
ém ir d 'A r m é n ie , d o n t q u e lq u e s -u n s au m o in s 1'avaient a c c o m p a g n é à tra-
vers la T a rta rie , la H o n g r i e et 1'Allem agne - le u r p a s s a g e à la c o u r i m p é -
riale, en o c t o b r e 1460, avait fait g r a n d e im p r e s s io n - P ie II, trè s f a v o r a b l e -
ment im p r e s s io n n é , lui c o n f é r a le titre d e p a t r ia r c h e d 'A n t i o c h e et le s f o n c ­
tions de légat a p o s t o l i q u e a u p r è s d e s p r in c e s d ' O r i e n t 183. L o u i s r e p r i t a u s s i-

,7s H u n t e m a n n , B u li. F ra n c ., I, 1738; II, 33.


! ' L e q u e l o b t i e n t f a c u l t é d e p r ê c h e r e t d ’a b s o u d r e d a n s t o u t e s le s p a r te s o r ie n ta le s ( ib id
II, 404). *

uo I b i d , II. 411 e t 413.


111 W a d d i n g , A n n a le s M in o r u m , X I I I , 60.
11,2 W a d d i n g , A n n a le s M in o r u m , X I I , 42 0 ( l e t t r e à Z a r a Y á q o b ; c e t t e l e t t r e d u l er d é c e m b r e
. qu a c c o m p a g n a i t le d o n d e r e l i q u e s , d e v a i t ê t r e p o r t é e p a r d e u x d e s r e l i g i e u x é t h i o -
Picns, P a u l et T h é o d o r e , q u i é t a i e n t v e n u s a v e c L o u i s . d e B o l o g n e ) .
H u n t e m a n n , B u li. F ra n c ., II, 866 e t 868 ( l a l é g a t i o n lu i e s t c o n f é r é e l e 13 j a n v i e r 1461).

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276 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO N S D O R IE N T All M O YE N AGE

tôt, avec ses c o m p a g n o n s , la route de Paris, puis de la c o u r de B o u r g o g n e .


la « g r a n d e a m b a s s a d e » s’étoffant en c o u rs de route de n o u v e a u x personna-
ges, tel un rep résen tan t d u Prètre Jean, qui se joint à lui en mai 1461
L ’authenticité de le u r m ission prêtait de plus en plus à su spicio n ; mais ce
sont les in c a rta d e s de L o u is en m a tiè re e cclésiastique (il se pare trop tôt du
titre p a tria rc a l; il a c c o r d e en qualité de légat des d isp en se s extravagantes;
il se fait c o n f é r e r la prêtrise et sa c re r à V e n ise sans 1'aveu d u p a p e ) qui sus-
citent 1'indignation d e Pie II. Celui-ci o r d o n n a qu on l’e m p ris o n n à t; mais
L o u is avait d éjà rep ris le c h em in de 1’O r i e n t 184.
L o u is devait réap p a ra itre , tou jou rs c h arg é de m issio n s diplom atiques,
à la c o u r de P o lo g n e en 1465, p o u r se faire é c o n d u ir e d u reste p a r le roi
C a s im ir IV ; p u is en 1473, à la c o u r d u duc de B o u r g o g n e , qu i lui con fere le
titre de c o n s e ille r et 1'envoie à Uzun Hassan, « p o u r certain es m atières et
a ffa ire s s e c r e t z » 185. Cette mission, su r la qu e lle on a ém is des doutes, sur la
foi d e 1 'a m ba ssa d e u r vénitien Contarini (qu i re n c o n tra effectivem en t Louis
à la c o u r d e Tabriz, se disant envoyé du du c de B o u r g o g n e et a p p ortan t des
p ré se n ts au s o u v e ra in turcom an qui - nous dit C ontarin i - paraissait ne pas
le c o n n a itre ), p e u t être ra p p r o c h é e des a m b a ssa d e s q u e le m è m e Uzun Has-

184 L ' a m b a s s a d e de 1460-1461 est regardée com m e a u th en tiq u c n otam m en t par


O. H a l e c k i , D ip lo m a tie p o n tific a le et a c tiv ité m is s io n n a ire en Asie a u x X I I I * , X I V ' et X V ' siècles,
p. 24; e l l e es t c o n s i d é r é e c o m m e très s u s p e c te p a r A n t h o n y B r y e r , L u d o v ic o da B o lo g n a and
th e G e o r g ia n a n d A n a to lia n em bassy o f 1460-1461, da ns Bedi K a rtlis a . R e v u e de K a rtvé lo lu g ie ,
X I X - X X , 1965, p. 178-198. Aux y e u x d e cet auteu r, les e n v o y é s g é o r g i e n s au m o in s ven a ien t
b i e n d e s p a y s c a u c a s ie n s ; m ais le fait q u e tous, ainsi q u e le s r e p r é s e n t a n t s d e s s o u v e r a in s tur-
c o m a n s et a r m é n ie n s , a v a ie n t le c r â n e rasé, p a r fo is à l e x c e p t i o n d 'u n e t o u f f e d e ch eveu x ,
1’a m è n e à les r e g a r d e r c o m m e d e s F ra n c is c a in s d é g u is és, ou d e s c h r é t i e n s latins ayant a d o p té
la t o n s u r e fr a n c is c a in e . II n ou s s e m b l e q u e la m o d e t u r c o - ta r ta r e d u c r â n e rasé a é té assez
l a r g e m e n t a d o p t é e ( n o t a m m e n t en P o l o g n e ) p o u r q u e cet i n d ic e p u iss e ê t r e éc a rté. N ou s
douton s aussi q u e 1 'im p r u d e n te d é m a rch e du F r a n c is c a in , c o m p r o m e t t a n t aux y e u x du
G r a n d T u r c les é m i r s d e 1'Anatolie o r ie n ta le , 1 'e m p e r e u r d e T r é b i z o n d e , ait é t é la cau se d e la
c a m p a g n e d i r i g é e c o n t r e e u x p r é c i s é m e n t en 1460-1461. M a is il est c e r ta in , la d é m o n s t r a t io n
d e M. B r y e r le p r o u v e , q u 'il y a va it da n s les a llé g a t io n s de L o u is d e B o l o g n e t o u t e u ne part
d a f f a b u l a t i o n , q u e les le t t r e s d e s s o u v e r a in s ne so n t c e r t a i n e m e n t p a r t o u t e s a u th en tiq u e s, et
q u e d e s i m p o s t e u r s se s o n t j o i n t s au g r o u p e . A va ien t-ils 1’i m p r e s s i o n d e x p r i m e r ré e lle m e n t
les in t e n t io n s d e s p o t e n t a t s o r ie n t a u x au n o m d e s q u e ls ils p a r la ie n t ? A gis sa ien t-ils en fonc-
t io n d 'in s t r u c t io n s plu s o u m o i n s o ffic ie u s e s , tra n s m is e s p a r d e s i n t e r m é d i a i r e s ? II nou s sem ­
b le d iffic ile de trancher.
1,5 A r c h i v e s d é p . d u N o r d , B 2 096/67.202 : q u it t a n c e d e 13 n o v e m b r e 1473 é m a n a n t de
L o u is , p a t r i a r c h e d 'A n t io c h e , d u ne s o m m e d e 405 li v r e s « s u r le v o y a g e q u e fa iso n s presente-
m e n t d e la v i l l e d e T r è v e s en A l l e m a i g n e d e v e r s H u g o n Assain, le plus g r a n t d e s M a c h o m e t*
t e s » ( p i è c e s ig n a lé e p a r M. P ié t r e s s o n d e S aint A u b in ).

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LES M ISSIONS DE LA MER NO IRE ET DU CAUCASE 277

san avait confiées à un médecin juif en vue de conclure des alliances avec
les Occidentaux contre les O tto m an s186. Mais Contarini, ulcéré de ce que
Louis le quitta à Tiflis le 6 aoüt 1475 pour entreprendre seul le voyage à tra­
vers la Russie et la Tartarie, le regarde com m e un im p o s te u r,87.
Quoi qu il en soit de son rôle diplomatique, Louis de B o lo g n e se pré-
s e n t a i t dès 1457 com m e le porte-parole des « F r a n c h i» qui, en terre d'Asie,
suivaient le rite romain et qui souhaitaient faire de lui leur prélat.
Calixte III envisageait favorablem ent cette dem ande; Pie II, en 1458, se
co n te n ta it de l e faire son nonce. Mais, lorsqu'il revient, il apporte une n o u ­
velle requète dem andant que lui fut conféré le titre de patriarche - titre
qui, soit dit en passant, parait déjà lui avoir été donné en Orient, si on en
croit ses dires, et les lettres q u i l apportait avec lui.
Pie II donna suite à cette requète par une bulle du 9 janvier 1461188; il
lui interdisait toutefois, nous dit-il dans ses Comm entarii, de p rendre le titre
patriarcal avant son retour à Rome, les bulles étant provisoirem ent laissées
en garde à un cardinal, de façon à ce que l’on püt déterm iner exactement le
ressort du patriarcat en question189. Louis ne s en para pas m oins du titre
de «patriarche eslu par toutes les nations d 'O rien t» (de m êm e qu'il n hési-
tait pas à conférer un titre de comte palatin à l'un de ses com pagnons, ni à
donner des dispenses). A son retour à Rome, Pie II le tança vertement et
refusa de lui faire donner ses bulles, sans toutefois lui refuser 1'argent de
son voyage de r e t o u r : à Venise, Louis se faisait ordon ner prêtre et, selon
Pie II, recevait la consécration épiscopale. Et, malgré ce pape, il continua à
se dire patriarche d'Antioche, com m e nous 1’attestent aussi bien les d o c u ­
ments relatifs à 1'ambassade de 1473 que le récit de Contarini.

186 M a y e r A. H a le v y , L e rô le d ls a a c Beg, m éd e cin et am b assad eu r de U z u n -H a s s a n en M o l ­


davie et dans les pays voisin s, c o m m u n i c a t i o n p r é s e n t é e au X V e C o n g r è s in t e r n . d ’h i s t o i r e d e
la m éd ecin e, M a d r id , s e p t e m b r e 1956.
187 Josafa B a r b a r o et A m b r o g i o C on ta r in i, T ra v e is to Tana a n d Persia , L o n d o n 1873, p. 136,
140 et 144. - A v a n t d e s’e m b a r q u e r p o u r r it a lie , à Caffa, en 1471, L o u is a va it p r is s o in d e se
munir d a ttes ta tio n s d é l i v r é e s d e v a n t 1’é v ê q u e d e C a ffa ; n o u s n e les p o s s é d o n s m a l h e u r e u s e -
ment pas.

188 H ü n te m a n n , B u li. F ra n cisc., II, 866. - N o t o n s q u e C a lix te III, en d é c e m b r e 1457, a v a it


rc c o m m a n d é aux c h ris tia n i F ra n c h i d e c h o i s i r u n e p e r s o n n e i d o i n e in v e s tru m o m n iu m ca p u t.
n Prenant le titre d e « p a t r i a r c h e eslu p a r les c h r é t i e n s d ’O r i e n t » , L o u is d e B o l o g n e n e fai-
sait peut-être q u e d i r e la v é r i t é : c e r ta in s c a t h o liq u e s d e G é o r g i e , e n p r é s e n c e d e s le t t r e s pon-

le^ h ^ ° nt ^ e n s e r ^ ue c e m *ss' o n n a ire a c t i f e t b ie n en c o u r a u p r è s du S a in t-S iè g e s e r a it


“ c e d o n t le p a p e leu r laissait le c h o ix . Et L o u is ne d e m a n d a it sans d o u t e q u ’à s'en c o n v a in -
cre lui-même.

fair ^ P 190. II ne faut pas o u b l i e r q u i l e x ista it un p a t r ia r c h e t itu la ir e d A n t i o c h e


° r s G u illa u m e d e Ia T o u r , 1457-1470).

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278 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIONS D O R IE N T AU MOYEN-AGE

La portée de cette désignation nous parait assez compréhcnsible. Louis


de Bologne, vieux routier des pays d'Anatolie et du Caucase, avait pu cons-
tater que les différents rites relevaient tous d ’un patriarche (le titre dc
catholicos ayant tendance à s’effacer devant celui de patriarche), que ce
fussent les Géorgiens, les Arméniens, les Chaldéens, les Syriens. Seuls les
Franchi, c'est-à-dire les Chrétiens de rite latin, ralliés à Rom e par les mis­
sionnaires du X I V e et du début du X V e siècles, n avaient pas de prélat pré-
sent en Orient, au grand dam de leur identité confessionnelle. Et ce frère
lai, qu'il est permis de supposer fort peu lettré, s'imagina de se faire confé-
rer le titre patriarcal par ses coreligionnaires de G éorgie ou de Grande-
Arménie. Rom e ne trouva pas 1’idée inadmissible : Pie II conféra effective-
ment le titre patriarcal à Louis, en se réservant d ’étudier ce que représente-
raient exactement les pouvoirs du nouveau patriarche, ce qui nécessitait
une étude de la situation de la hiérarchie latine, ou ralliée à Rome, en terre
d ’Orient, dont la Curie n'avait probablem ent plus q u ’une conception très
vague. Quant à savoir ce que fit Louis de B ologne pendant ses séjours
orientaux, il nous faut nous résigner à 1'ignorer190.
Mais, quelles qu’aient été ses outrecuidances et ses hâbleries, il n’en
reste pas moins que le Franciscain avait été l'un des derniers à se préoccu-
per du sort des Chrétiens catholiques que les missionnaires avaient implan-
tés au Moyen-Orient, et dont les voyageurs vénitiens qui l’ont connu ont
rencontré quelques représentants. Mis à part les Arméniens-unis, les
contacts allaient de ce côté être rompus.
Ceux d ’Extrême-Orient furent peut-être moins oubliés. Car, dans la
quête des chemins qui menaient vers les Indes ou la Chine, le souci de
retrouver les Chrétiens du Cathay n a pas été alpsent. Et cest en les cher-
chant encore que Bento de Goes allait, au début du X V I I e siècle, révéler
aux Occidentaux la route qui menait de 1’Inde à la Chine.

190 D e u x é t u d e s r é c e n t e s ont a p p o r t é d e n o u v e a u x é l é m e n t s s u r L o u is d e B o lo g n e . Les


a r c h iv e s d e sa fa m il le c o n s e r v e n t , à c ô t é d ’ in d u lts q u ’il a v a it d e m a n d é s p o u r les siens, la let­
tre d e r e c o m m a n d a t i o n q u e C a lix te I I I lui a va it d o n n é e à l ’in t e n t io n du k h a n tu rkm èn e
Gahan-Sãh ( Janssa A s s irio ru m re g i ac p r in c ip i B a b ilo n ie ), le 22 d é c e m b r e 1457, ce qui peut
i n d i q u e r q u e n 1458 il n e se r e n d it pas a u p r è s d e c e d e m i e r : A n g e l o B a r g e lle s i- S e v e r i, N u o v i
d o c u m e n ti su fr. L o d o v ic o da B o lo g n a , a l s e c o lo L o d o v ic o S e v e ri, n u n z io a p o s to lic o in Oriente.
dans A rch . Fra n c. hist., 69, 1976, p. 3-22. En 1473, c est en c o m p a g n i e d ’A n s e l m e A d o r n o q u i l
p rit la r o u t e d e 1'Orient c o m m e a m b a s s a d e u r du d u c d e B o u r g o g n e ; m a is A n s e lm e le quitta
en P o l o g n e ( o ú B u o n a c c o r s i Fut t é m o i n d e son p a s s a g e ). A so n r e t o u r , a p r è s a v o i r é t é empri-
s o n n é á M o s c o u , il éta it r e v e n u à R o m e en 1477, e t il se t r o u v a it e n 1479 en A l l e m a g n e :
R ic h a r d J. W a ls h , C h a rles the B o ld a n d the C ru s a d e : p o litic s a n d p ro p a ga n d a , d a n s J o u rn a l o f
m e d ie v a l history, III, 1977, p. 70-72.

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CONCLUSION

LES MISSIONS MÉDIÉVALES:


SUCCÈS OU ÉCHEC?

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L h isto ire d es m is s io n s latin e s d a n s l'Asie m é d i é v a le et d a n s les p a r t ie s
de 1'Afrique qui a p p a r t ie n n e n t a u m o n d e o r ie n ta l n e n o u s est c o n n u e q u 'à
travers des s o u rc e s très fr a g m e n t a ir e s . D e s p a n s en tiers d e cette h is t o ir e
nous restent in co n n u s, d è s lo r s q u e les re g istre s p o n t ific a u x re ste n t m u ets.
Grâce à ces registres, il n o u s est p o s s ib le d e su iv re les d e s tin é e s d e s siè g e s
épiscopaux; g râc e a u x textes a rm é n ie n s , d e re fa ir e 1'histoire d e s F r è r e s U n i ­
teurs. Mais, lo r s q u e la P a p a u t é n ’a p a s e u à in terven ir, n o u s r e s t o n s d a n s
1’ignorance. Q u e d e v in re n t, a p r è s 1330, les m is sio n s d e 1’I n d e d u S u d et d e
Transoxiane? Q u e lle fut la p é n é tra tio n d e s m is s io n n a ir e s d a n s les p r o v i n ­
ces de Sarai et d e M a t r e g a ? Q u e ls é v ê c h é s y fu re n t érigés, et c o m b i e n d é v ê -
ques se su cc éd è re n t-ils s u r ces sièges? A u tan t d e q u e s tio n s a u x q u e l l e s n o u s
ne pouvon s r é p o n d r e q u 'e n r a s s e m b la n t d es é lé m e n ts très d i s p e r s é s et
insuffisants à n o u s i n f o r m e r c o m p lè te m e n t .
L o r s q u u n o u v r a g e c o m m e les A n n a les o m n iu m te m p o ru m d e P ie t r o
Ranzano fait état d u t é m o ig n a g e , s u r l'E x trè m e -O rie n t, d 'u n D o m i n i c a i n d u
nom de B la ise le G ên o is, q u i y a u ra it v é c u entre 1334 et 1365, f o r c e n o u s est
d avouer qu e rie n ne n o u s p e r m e t d e ra tta ch e r ce p e r s o n n a g e à d e s é v è n e -
ments a u tre m e n t c o n n u s 1. Et cet e x e m p le p o u r r a it être r a p p r o c h é d e b i e n
d autre s.
II nous faut d o n c a d m e t t r e q u e les m is s io n s m é d i é v a l e s o n t e u p l u s
i #•
u im portance e n c o re q u e les d o c u m e n t s q u i n o u s sont p a r v e n u s n o u s p e r ­
mettent de 1’im a g in e r. T e l m o m e n t d e le u r histoire, c o m m e la p é n é t r a t io n
des doctrines latines en G é o r g i e à la fin d u X I V e et a u d é b u t d u X V e siècle,
nous reste p r a t iq u e m e n t in c o n n u : o r les ré su lta ts d e cette p é n é t r a t io n
apparaissent c o m m e su ffisan ts p o u r n o u s p e r m e t t r e d e s u p p o s e r q u e n o u s
avons là une d e s p a g e s n o t a b le s d e 1'histoire m is s io n n a ire .

P ie t r o R a n z a n o , Annales o m n iu m tem p oru m , c i t é p a r C. T r a s e ll i, U n Ita lia n o in E tió p ia


ne ^ secolo, d a n s Rassegna di studi etio p ici, I, 2, 1941.

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282 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN AGE

Cet aveu d ’ignorance doit nuancer les conclusions que nous pouvons
avancer à la fin de notre enquête. II est malheureusement probable que
nous n’aurons jamais le moyen de faire progresser nos connaissances, à

moins de découvertes en dehors des textes et des archives aujourd'hui


accessibles.
Compte tenu de ces préliminaires, Thistoire des missions peut paraítre
jalonnée par un certain nombre d ’échecs. Echec, en premier lieu, de la ten-
tative d a m e n e r les Mongols au christianisme : la déconvenue de Rubrouck
voulant trouver en Sartaq un chrétien répondant à 1idée qu il se faisait
d'un prince chrétien est suivie par bien d autres. Les rapports presque ami-
caux des papes avec les Il-Khans, les bonnes intentions marquées par Toq­
tai, Tina-bág, Àlgigidai, et bien dautres à 1egard des missionnaires, les hon-
neurs prodigués à Jean de Montecorvino ou à Marignolli n'empêchent pas
q u ’en définitive les Tartares de Perse, du Qipcaq, du Djagatai, passent à
1'Islam, ceux du Cathay au bouddhisme. Au milieu du X IV e siècle, tout
espoir doit être abandonné de ce côté : un siècle d'efforts s'est révélé insuf-
fisant à attirer les Mongols au christianisme.
Echec aussi de 1'Union des Eglises, sous la forme envisagée au X IIIe siè­
cle. L ad h é sio n obtenue à plusieurs reprises, tant à la primauté romaine
q u ’à la foi professée par le Siège Apostolique de la part de quasi-tous les
chefs des Eglises orientales auxquels les papes du X I II e siècle avaient
envoyé leurs messagers se révélait, à l’expérience, sans effet sur les particu-
larismes des différentes communautés. Un Montecorvino, au contact des
Nestoriens du Cathay, un Ricoldo, parmi les chrétiens de diverses confes-
sions de Mésopotamie, constataient que la profession de foi acceptée par
les patriarches ou les catholicos n'avait aucun poids auprès de leurs ouail-
les qui restaient fidèles à leurs traditions et à leurs rites, même entachés
d erreur aux yeux des théologiens latins. Les efforts dépensés au X IV e siè­
cle, notamment auprès des Arméniens, permettaient aux Latins de gagner
du terrain, mais sans jamais être certains que les promesses qui leur étaient
faites 1'étaient de coeur, plutôt que de bouche. Les actes d a d h é sio n se suc-
cédaient; mais il fallut les reprendre tous au concile de Florence, et, dans
les années qui suivirent, essayer de faire confirm er 1'acceptation des
décrets du concile : sans cesse proclamée, 1'Union restait sans cesse en
qu estion 2.

1 L e m e tro p o lita Yberius, regis G e o rg ia e a p o c ris a riu s , ava it a ssiste au c o n c i l e d e F lo r e n c e ;


mais, e n d é p i t d e s p r o t e s t a t i o n s d o b é d i e n c e ct d e f i d é l i t é q u a v a i t a p p o r t é e s L o u is d e B o l o ­
gne, A l e x a n d r e V I p r o f i t e d e la v e n u e d 'u n e n v o y é d u r o i C o n s t a n t in III, e n 1496, p o u r lui

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LES M ISSIONS M Ê D IÊ V A L E S : SUCCÊS OU ÊCHEC? 283

Echec, enfin, des fidelium novellae plantationes, c'est-à-dire de l’im plan-


tation des com m unautés de rite latin. Echec relatif, car nous avons vu que
des conversions en n om b re relativement important - elles se chiffrent ici
ou là par dizaines de milliers - ont été aequises tant au Cathay qu en Inde,
au Daghestan, en Tartarie du N ord et ailleurs. Mais, en dépit des espoirs
q u avaient fait naítre les bulletins de victoire d ’un M ontecorvino, d ’un Jour­
dain Cathala, d ’un François de Camerino, d ’un Jean de Ziquie, d'un T h o m a s
Mancasola, ces chiffres restaient bien faibles au regard de la masse des
paíens, des infidèles, des chrétiens séparés de 1’Eglise rom ain e au milieu
desquels les novellae plantationes se trouvaient situées. D ailleurs, ces p la n ­
tationes posaient une question de principe, difficile à résoudre. II s agissait
de com m unautés nettement définies, avec leur clergé, sous la houlette des
évêques latins que nous connaissons : elles se séparaient ainsi des ch rétien ­
tés d autre rite dont les chefs, officiellement, étaient en union avec Rom e.
Le cas des Frères Uniteurs de Grande-Arménie, ou blieux de la u to rité
reconnue p ar le pape au catholicos de Sis, est particulièrem ent notable.
Mais il explique comment, après un grand siècle de création de diocèses
latins, on en revint, autour de 1439, aux négociations avec les patriarches et
catholicos des Eglises d Orient, en vue de réaliser 1’Union des Eglises.
Ce qui est certain, c’est que la vague de conversions qui d écid e de la
création d un siège épiscopal ou d'une province ecclésiastique s a m o r tit
relativement vite, et q u o n crie bientôt à 1’aide. L'histoire des m issions
médiévales est jalonnée de voyages de missionnaires à Avignon ou à R o m e
en vue d o b t e n ir des renforts, des encouragements, dans 1'espoir de r e p r e n ­
dre la conquête des âmes et de maintenir dans la foi celles qui ont déjà été
conquises. Et l’on sm te rro g e sur les causes de ces ralentissements, de ces
reculs. II en est une qui apparait toujours n ettem e n t: c ’est la disparition
d u n e génération de missionnaires, fauchés par la mort, rentrés en Occident
ou autrement indisponibles. Ainsi R om e doit-elle re p ren d re en 1328-1330,
puis en 1349, puis en 13743 1equipem ent de la province de Sultanieh; les
grandes expéditions à destination de la Haute-Tartarie et du Cathay ont le
même caractère.
La G rande Peste apparait com m e respon sable d'un m om ent oú se tarit
lencadrem ent des m issions4. Certes, les couvents ont été partout frap p é s

a d r e s s e r la c o n f e s s i o n d e fo i du c o n c i l e d e F l o r e n c e , a fin q u e la G é o r g i e s u iv e la v r a i e f o i
U a m a r a t i , L e g lis e g é o rg ie n n e , p. 460-463).
’ C e t t e année-la, p a r e x e m p l e , le p a p e p o u r v o i t à la fo is au x s iè g e s d e T a b r iz . M a r a g h a et
N a k h id je v a n , et les D o m i n i c a i n s se d é c i d e n t à r é t a b l i r la S o cie ta s P e r e g r in a n tm m .
* G. F e d a lt o , Ixi chieaa, p. 475 : « I a p estilen za dei 1348 s e g n a v a un a r r e s t o , se n o n la
rovina, d e l l e m is s io n i dell'A.sia o c c i d e n t a l e ».

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284 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

d e f a ç o n p a r t i c u l i è r e m e n t s p e c t a c u l a i r e p a r la m o r t a l i t é ; certes, Jean de
L e o m i n s t e r est v e n u a p p o r t e r à A v i g n o n de s n o u v e l l e s fort a l a r m a n t e s des
p o s t e s d e m i s s i o n d o m i n i c a i n s d e la p r o v i n c e d e S u lt a n ie h - et nous nous
s o m m e s d e m a n d é si la p e s t e n a v a i t pas aussi é t é i e s p o n s a b l e du silence
qui se fait sur 1 'a rc h e v êq u e e n v o y é à K h a n b a l i q p o u r r e m p l a c e r M o n te c o r-
v in o . N e a n m o i n s , d è s 1349, A v i g n o n p o u r v o i t au r e m p l a c e m e n t d e s év èq ue s
d é f u n t s d ans la p r o v i n c e d e S u l t a n i e h ; Jean d e M a r i g n o l l i et ses c o m p a ­
g n o n s o n t tenu la p l a c e v i d e d e 1’a r c h e v ê q u e au C a t h a y , et c est en 1349 que
se c r é e u n e n o u v e l l e p r o v i n c e , c e l l e d e M a t r e g a . A c c i d e n t sérieu x, certes, la
P es t e N o i r e n ’a pas dú a r r ê t e r r é e l l e m e n t 1 e f f o r t m i s s i o n n a i i e - m ê m e si
les v i d e s c r e u s é s dans les c o u v e n t s o c c i d e n t a u x o n t pu r e n d i e p i o b l c m a t i -
q u e le r e m p l a c e m e n t d e s m i s s i o n n a i r e s
Jean I I I d e S u l t a n i e h i n c r i m i n a i t , à p r o p o s d e la m i s s i o n du Cathay,
1’i n d i f f é r e n c e du S a in t- S iè g e à 1’é g a r d d e s a p p e l s d e s c h i é t i e n s d e cette
c o n t r é e 5, et Dietrich de Nyem, lui faisant écho, rend les d é s o r d r e s du
G r a n d S c h i s m e d ’O c c i d e n t r e s p o n s a b l e s du d é s i n t é r è t d o n t s o u f f i e n t les
m i s s i o n s a u p r è s d e s i n f i d è l e s 6. M a i s n o u s a v o n s r e n c o n t r é d e s t é m o i g n a g e s
d e 1 i n t e r ê t q u e p a p e d e R o m e et p a p e d ’A v i g n o n o n t m a r q u é p o u r les mis­
sions, sans nous dissimuler pour autant que les préoccupations qu ils
a v a i e n t d a u t r e c ò t é o n t pu n u ir e à celles-ci. C e q u i est plus p r o b a b l e , c e s t
q u e le S c h i s m e a m is fin à u ne t e n t a t i v e d o r g a n i s a t i o n d un s e r v i c e cha rgé
d e s m i s s i o n s à la Curie. Jules G a y a r e l e v é la c o n f e c t i o n d un r e g i s t r e spé-
cialem ent c o n s a c r é aux i n f i d è l e s à la c h a n c e l l e r i e d ’U r b a i n V 7; et G r é ­
g o i r e X I a in st itu é la c o m m i s s i o n d ’e x p e r t s d o n t n o u s a v o n s parlé, pour
résoudre les difficultés que rencontraient les m issionnaires. Avec le
S c h i s m e , o n n e r e t r o u v e plus t r a c e ni d un s o u c i d e c o n s t i t u e r d e s dossiers
p r o p r e s aux q u e s t i o n s m is s i o n n a i r e s , ni d e c o n f i e r c e l l e s - c i à un g r o u p e
d ’é v é q u e s et d e t h é o l o g i e n s . N é a n m o i n s les O r d r e s , q u i o n t to u t spéciale-
m e n t c h a r g e d e s miss ion s, o n t réussi à m a i n t e n i r l e u r s o r g a n i s m e s m i s s i o n ­
naires. C e s t m ê m e à c e m o m e n t q u e les F r a n c i s c a i n s ont, semble-t-il, modi-
f ié leurs c a d r e s t r a d i t i o n n e l s e n cr éa n t, e u x aussi, u n e Societas fratrum pere­
g rin a n tiu m i m i t é e d e T e x e m p l e d o m i n i c a i n , q u i p o u v a i t p e u t- ê tr e, dans une
c e r t a i n e m e s u r e , p a l l i e r les i n c o n v é n i e n t s s u s ci té s p a r le S c h i s m e .

5 II p re c is e que. s’il ne s e s t pas lu i-m ê m e re n d u au Cathay, c e s t faute d a v o i r obtenu


societa lem a sede a p ostolica (L ib e llu s de n o titia orb is).
* T h e o d o ric i de Nyem de scism ate lib r i tres, éd. E rler, L e ip z i g 1890, p. 306-307.
7 S upra , p 136. N ou s c o m p to n s , à 1’o c c a s io n du c o l l o q u e La genèse et les débuts du Gran
S ch is m e d ‘O ccid e n t qui se tien d ra du 25 au 28 s e p t e m b r e 1978 à A v ig n o n , r e p r e n d r e le t u d e de
ce docu m ent

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LES M ISS IO N S M É D IÉ V A L E S : SUCCÈS OU ÊCHEC? 285

LCs dévastations inhérentes aux cam pagnes de Tamerlan, qui ne man-


pas de les justifier en se couvrant du pretexte de la guerre sainte, et
q menant des opérations particulièrem ent sévères contre les Georgiens,
ont considérablement é p ro u v é les chrétientés latines de la région cauca-
sjenne, en Arménie, en Géorgie, au Daghestan, plus au N o rd encore. Les
bulles pontificales y lont écho, et permettent de reconnaitre dans cette
tourm ente u n e des plus rudes épreuves subies par les missions. Les c o n v e r­
sions forcées im posées à leurs sujets p ar les khans m on gols passés à l'Islam
0nt certainement aussi ép ro u v é celles-ci8. Néanm oins, nous 1'avons vu, les
chrétientés relèvent la tête après les orages, et les gens du Daghestan vont
jusqu a organiser leu r défense sous la form e d ’une c r o is a d e .. .
Plus grave, à notre sens, a été la constitution de 1’em pire ottoman. Les
Mamelüks, à la fin du X I I I e siècle, ont sciemment fait obstacle aux relations
de la Papauté et de 1'Occident avec les chrétiens orientaux; ils ont agi de
même au X I V e siècle avec les Arm éniens et les Ethiopiens, ceci p o u r em pè-
cher des coalitions dont ils auraient pu éventuellement souffrir. Les Otto-
mans, à leur tour, n o n t eu garde de témoigner envers les Latins la tolé-
rance q u a v a ie n t pratiquée les Mongols, m êm e islamisés. Ils ont surtout
interrompu les relations directes de l'Occident avec les pays du M oyen-
Orient; il a faliu qu e se crée une route com m erciale à travers la Pologne, la
Moldavie et la Tartarie p o u r relier la Crim ée à l’O ccident9, et ceci m odifie
les conditions dans lesquelles les missionnaires peuvent atteindre leu r ter-
rain d action. L ’U nion entre R om e et 1'Eglise grecque ne survit pas à la
prise de Constantinople, et Louis de B o logn e s'emploie à organiser la résis-
tance à la con quête p a r les Osm anlis de 1’Asie mineure orientale; le glas des
missions de la M e r N o ire est sonné lorsque les Turcs liquident les c o m p ­
toirs gênois. En ce sens, on peut dire que Nicopolis et V arn a ont été des
coups très d urs portés aux missions latines, et la prise de Constantinople
par M ahom et I I également.
L'histoire de ces missions n’est cependant pas seulement celle de leurs
échecs. N o u s avons constaté que, bien qu e le silence se fasse p o u r nous sur

" La c o n v e r s i o n f o r c é e n 'e s t d a ille u r s p a s t o u j o u r s g é n é r a l e ; o n v o i t m ê m e d e s c o u v e n t s


b o u d d h is te s s u b s i s t e r d a n s 1’e m p i r e t i m o u r i d e : cf. J. D en y , Lln s o y u r g a l d u tim o u r id e S ã h ru h
en é c ritu re o u ig o u r e , d a n s J o u r n a l A s ia tiq u e , 245, 1957, p. 253-266.
y D es la d e u x i e m e m o i t i é d u X I V « s iè c le , la r o u t e à t r a v e r s la M o l d a v i e et c e l l e à t r a v e r s
la P o l o g n e s o n t s u i v i e s à 1’o c c a s i o n : G. I. B r a t ia n u , La M e r N o ir e des o rig in e s à la c o n q u ê te
utlom une, p. 284. - M . M a l o w i s t ( K a ffa , k o lo n ia g e n u e n s k a na K ry n tie , 1453-1475, V a r s o v i e
1947) a m o n t r é 1’ i m p o r t a n c e d e s r e l a t i o n s c o m m e r c i a l e s d e C a f fa a v e c les p a y s d a n u b ie n s et
la P o lo g n e , et 1 'in stitu tio n d un v é r i t a b l e p r o t e c t o r a t p o lo n a is , en 1462, s u r c e t t e ville.

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28 6 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIONS D 'O RIENT AU MOYEN-AGE

telle ou telle terre de mission, on voit celle-ci réapparaitre après un lou^


espace, et témoigner de la vitalité de la «plantation de la foi». Dc l’Indc
viennent des pélerins plus de soixante-dix ans après la prédication de Jour­
dain Cathala, quarante ans après 1'apparition épisodique du nom de son
successeur. Louis de B o logn e se porte témoin de la présence de très nom-
breux « F r a n c h i» dans les royaum es géorgiens, et Contarini recoupe ce
témoignage; au X V I e siècle, les Géorgiens catholiques continueront à
tém oigner de leur attachement à 1’Eglise r o m a in e 10. Ils bénéficient, faute de
religieux venus des pays latins, de 1’appui que leur fournissent les « Frères
Prêcheurs Unis d A r m é n ie », dont Nakhidjevan est le centre essentiel11.
N o u s savons qu'à la fin du X V C siècle les missions du Daghestan sont tou-
jours bien vivantes, malgré les déprédations qu'elles subissent de la part de
leurs voisins musulmans.
Q u ’en est-il du lointain Cathay? Si l'on en croit Fernao M en d es Pinto12
- mais Yule a baptisé celui-ci le «p rin c e des menteurs. .. » - un Hongrois
du nom de M athieu Escandel, après avoir été ermite au Sinai, serait venu
en Chine avec des m archands du royaum e de Tenasserim et aurait prêché
et accom pli des miracles, aux environs de 1410, dans une petite ville de
Chine : les Portugais auraient retrouvé une petite chrétienté latine encore
vivante et fervente vers 1550. Mais nous savons q u a u début du X V I I e siècle,
des envovés m ongols à la cour de Moscovie exprimaient le désir d ’aller en
p élerin age à Jérusalem et à R o m e : com m e pour les Indiens de 1403-1407,
nous ne pouvon s guère que conclure à la survivance de traditions remon-
tant aux chrétientés chaldéennes du X I I I C siècle, d o u le futur Yahballáhã
III et son com p agn on Barçau m a étaient partis en pélerinage aux Lieux-
Saints, mais aussi aux missionnaires latins du X I V e s iè c le 13.
Ce qui subsiste des chrétientés latines, isolées et coupées du monde
Occidental, est sans doute bien faible, mis à part 1’ilot a rm é n o -gé o rgie n 14.

10 T a m a r a t i , o u v r . cité, I, p. 463-466. Cf. les l e t t r e s p o r t é e s à P a u l I I I p a r d e u x D o m in ic a in s


d e N a k h i d j e v a n . a v e c c e l l e s du p a p e , a tt e s ta n t 1’e f f e t d e s p r é d i c a t i o n s d e s U n ite u r s sur les
q u a t r e r o i s g é o r g i e n s d e T iflis, d e K o u t a i s , d e K a k h é t i e et d ’A k h a l z i k h é (1545-1546).
11 Cf. M. A. V a n d e n O u d e n r ijn , B is h o p s a n d A r c h b is h o p s o f N a x iv a n . P lu s ie u r s é v ê q u e s
v o n t au X V I C s iè c le , se f a i r e c o n s a c r e r à R o m e .
u Les voya ges a d v e n tu re u x de F e r n a n d M e n d e z P in to , trad. B e r n a r d F ig u ie r , Paris 1645,
p. 343-347 (c f. M o u l e , C h ris tia n s in C h in a ). L e v i l l a g e e n q u e s t i o n es t a p p e l é X ifa n g a n , et est
d it v o is i n d e C o h i l o u z a a : 1 'id e n t if ic a t io n d e c e s lo c a l i t é s r e s t e d o u t e u s e .
13 H . S e r r u y s , E a rly M o n g o ls a n d lh e c a t h o lic C h u rc h , d a n s N e u e Z e its c h r ift fü r M issions-
w is s e n s ch a fl, X I X , 1963, p. 161-169.
14 L u d o v i c o d i V a r t h e m a , si p r o l i x e q u a n t a u x c h r é t i e n s d e 1'Asie d u Su d-E st, ne sig nale
n u lle p a r t d e c a t h o l i q u e s ; N i c o l o d e ' C o n t i - q u i a a b j u r é au c o u r s d e ses v o y a g e s - c ite les

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LES M ISSIO N S M É D IÉ V A LE S : SUCCÊS OU ÊCHEC? 287

Mais les conséquences de 1’Union de Florence, préparée par deux siècles de


ntacts et de conversations, devaient se p rolo n g e r b e au c o u p plus loin.
Les moyens mis en oeuvre par les missionnaires, nous les avons rencon-
trés Après une p ériod e oú il leur a faliu passer par 1’interm èdiaire d ’inter-
prètes, ils se sont mis à l’étude des langues orientales; ils ont traduit les
livres liturgiques, de telle sorte q u a u Cathay com m e en Arm énie ou au
Daghestan, 1'emploi du turc ou de 1'arménien p o u r les offices est d ev en u
courant, et le Codex cu m a n icu s en apporte le témoignage. Le chant liturgi-
que a été l’un des grands m oyens em ployés p o u r attirer et retenir les néo-
phytes. L e x e m p le de la vie religieuse que donnaient D om inicains et F ran ­
ciscains a be a u c o u p com pté également. Enfin, auprès des élites lettrées, les
théologiens et les canonistes occidentaux, apportant des oeuvres qui ont été
traduites, ont fait connaitre une pensée qui a eu une p ro fo n d e influence.
Que ce soit auprès des infidèles, par exem ple des tribus de la steppe qu e
convertissaient et accom pagnaient les missionnaires qui s étaient adaptés à
la vie nomade, ou auprès des chrétiens orientaux auxquels s a d re ssa it un
Barthélemy da Poggio, les religieux latins paraissent avoir trouvé le ton de
prédication qui convenait à leurs différents auditoires.
Un apostolat apud gentes ne pouvait se concevoir sans un réseau des-
tiné à le soutenir m atériellem ent et spirituellement. Certes, dan s 1’Asie
ouverte aux O ccidentaux des X I I I e, X I V e et m êm e X V* siècles, les m a r ­
chands ont apporté aux religieux une aide inappréciable; ils le u r ont aussi
apporté certaines e x ig e n c e s : les Gênois de la M e r N o ire tenaient à a v o ir
leurs religieux franciscains et un évêque dans chaque cité, m ais ils les invi-
taient à ne pas tro u b le r la paix de leurs com ptoirs p ar un apostolat im p or-
tun auprès des G recs ou des Arm éniens de Caffa ou d 'a ille u r s .. . M ais c'est
d'Occident que les m issionnaires attendaient 1'essentiel du soutien qui leu r
était nécessaire.
Le canal p a r lequel passait ce soutien, nous 1'avons vu, était essentielle-
ment constitué p ar la Papauté et p a r les Ordres. N o u s avons cherché à défi-
nir 1'action de l'une et des autres. Seule la Papauté était à m ê m e de d o te r
les missionnaires de pouvoirs excédant ceux que le droit can on ique re c o n ­
naissait aux sim ples prètres - j u s q u a u m om en t oú il lui parut que 1'implan-

N e s iu rien s d e 1'Inde et d e S o c o t o r a ; m a is , b i e n q u e s 'é t a n t t r o u v é à Q u i l o n a u x e n v i r o n s d e


144°, ‘ I ne m e n t i o n n e pas d ' a v a n t a g e d e c h r é t i e n s d e r i t e latin. P a r c o n t r e , P i e t r o R o m b u l o
Precise que, m a r i é e n E t h i o p i e , il é l é v e ses e n f a n t s e n b o n s c a t h o l i q u e s ; le s c h r é t i e n s d e C a f f a
se p r o c u r e n t d e s p r è t r e s c a t h o l i q u e s j u s q u e su r les m a r c h é s d ’ e s c l a v e s : il e x i s t e a in si d e s sur-
V|vances o u d e to u t p e t i t s g r o u p e s d i f f i c i l e s à d é c e l e r .

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288 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO NS D O R IE N T AU MOYEN-AGE

tation d une hiérarchie épiscopale régulière répondait micux aux besoins


des fid elium novellae plantationes —. Cet épiscopat missionnaire, jouissant
de privilèges exceptionnels et de faveurs, telles que loctro i des bulles grátis
p ro Deo, la donation d'un anneau épiscopal offert par le pape, des subsides
p o u r les longs voyages à accom plir j u s q u a u x territoires de mission, devait
assurer aux com m unautés de néophytes une vie liturgique susceptible de
se perpétuer, 1'évêque ordonnant (o u réconciliant) des prêtres. assurant
1 administration des sacrements. La mise en place de provinces ecclésiasti-
ques assurait à cet épiscopat la possibilité de vivre d'une vie indépendante,
les évèques, élus soit p ar le couvent servant de chapitre, soit dans dautres
conditions - telles que le choix par 1'archevêque lui-même élisant leur
métropolitain, et celui-ci exerçant ses fonctions sans attendre que Rome lui
eut envoyé le pallium . M êm e isolée, la province ecclésiastique pouvait
vivre sans attendre 1’intervention du Siège apostolique.
Au temps de la centralisation avignonnaise, un tel p ro g ra m m e est déjà
re m a rq u a b le . Ce qui vaut d'être souligné, ce n'est pas q u ‘il ait en général
éch o u é dans sa réalisation - que ce soit parce que la Curie faisait automati-
qu em e n t jo u e r les réserves pontificales, ou parce que le chiffre des évèques
en core présents dans la province au décès du métropolitain rendait impos­
sible la consécration, sur place, de son successeur c'est q u ’il ait effective-
ment jo u é dans un certain n om b re de cas. L'inconvénient, p o u r l historien,
c est d être obligé de tirer parti de Yargum entum a s ile n tio : du fait que nous
ne p o ssé d o n s pas la bulle de provision, avons-nous le droit d ’en conclure
q u e 1 é v êq u e avait été élu sur place? Mais des indices - ne füt-ce que la
m ention de six cités épiscopales autrement inconnues dans les «m o n ts Cas­
p ie n s », 1’élection à Soldaya m êm e d ’un évêque de Soldaya, le privilège
d elire les évèques reco n n u à tel couvent d'Uniteurs - permettent d a p p u y e r
cet a rg u m e n tu m a silentio.
En gros, 1on peut sans doute dire que la Papauté avait mis dans l’insti-
tution a rch iép iscop ale des espoirs qui furent déçus. Si la p rovince de Sulta­
nieh s'est maintenue, vaille que vaille, pendant plus d'un siècle, ce fut grâce
aux injections perpétuelles de sang n ouveau que la Papauté lui assura, et
aux con dition s particulières nées de 1'Union de Qrnay. Celle de Khanbaliq,
d ém e su ré e, connut de longues éclipses; celles de V ospro, M atrega et Sarai
ne vécurent guère que le temps de la vie d e leur p re m ie r archevêque. Mais
1'institution arch ié p isc op a le n'était-elle pas partout en perte de vitesse au
X I V * siècle?
Du côté des O rdres, au xqu els il appartenait de recruter les missionnai­
res et, su r les lieux de leu r apostolat, d 'en assu rer la correction, le recrute-
m ent des m issionn aires nécessitait une in form ation diffusée parm i les Frè-

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LES M ISSIO N S M Ê D IÊ V A LE S: SUCCÊS OU ÊCHEC? 28*)

ui vivaient dans les couvents occidentaux. Aux temps modernos, la


K agande pour les missions s’est faite surtout gràce aux «lettres édifian-
1' écrites par les missionnaires depuis les lieux de leur apostolat et large-
rnent répandues en Occident. Le M oyen-Age en a connu 1'équivalent : les
lettres des Franciscains du Qipcaq, celles de M ontecorvino, de Jourdain dc
Séverac, de Pierre Geraldi, font le bilan d u n e action m issionnaire en
dem andant des secours, des renforts, des prières p o u r les « p é r é g r in a n t s » .
Un auteur a tout spécialem ent recueilli des textes de ce genre : c ’est le
Franciscain Jean de Winterthur, dont la chronique, écrite à la gloire de
1 ’o r d r e des Frères M i n e u r s 15, a conservé entre autres la substance de la let­
tre du prem ier Franciscain qui ait rejoint M on teco rvin o en Chine, A rn o ld
de Cologne. Jean, qui tém oigne d u n intérêt tout particulier p o u r les m is­
sions, parait d a ille u rs avoir recueilli des « o n - d i t » qui ne figuraient p r o b a ­
blement pas dans des «lettres édifia n tes» ,6. M ais c'est lui qui atteste 1’é ch o
que trouvaient ces écrits, qui jouaient à 1'égard des missions le rô le des
excitatoriae dans 1'histoire des Croisades.
Non contents de fourn ir des recrues, les O rd res assurent leu r e n c ad re-
ment grâce à des institutions qui permettent de passer outre aux régles
habituellement observées dans chacun d'eux. C e s t la Societas fra tru m pere-
grinantium dom inicaine; ce sont les vicairies et les custodies fran ciscaines
en Orient, en Tartarie Aquilonaire, au Cathay, qui exercent la c o rre c tio n
des Frères envoyés en mission, qui dem andent p o u r eux les p rivilèges
nécessaires, leur fournissent des livres, des secours.
Les circonstances changent; les cadres se t r a n s f o r m e n t : on p arle d e la
«province de D a m a s » à p ro p o s du couvent franciscain de B e y r o u t h ; le n o m
d ’A quilonaris a disparu, et q u a n d on parle de partes septentrionales, c'est à

ls Cf. Fr. B a e t h g e n , F ra n z is k a n is c h e S tu d ie n , d a n s H is to r is c h e Z e its c h r ift, C X X X I , 1925,


p. 421-471. V o i r aussi, n o t a m m e n t , C. B r u n , D ie F r a n z is k a n e r m is s io n e n u n d d e r O r ie n t b e i
Johann v o n W in t e r t h u r d a n s Z e its c h r ift f ü r s c h w e iz e ris c h e G e s c h ic h te , X V I I , 1923, p. 29-37.
16 T e l l e 1’a n e c d o t e r i d i c u l i s a n t le m a n q u e d e c o u r a g e d e s D o m i n i c a i n s e n E g y p t e (s u p r a .
p. 263 n.). II r a p p o r t e la d é c a p i t a t i o n d e s e i z e F r a n c i s c a i n s d e P e r s e , à la d a t e d e 1341, e n
a m p lifia n t p e u t - ê t r e e t e n d é f o r m a n t u n e i n f o r m a t i o n c o n c e r n a n t le m a r t y r e d e W i l l i a m W a l -
den à S e lm a s . ( C h r o n ic o n , éd . G. v o n W y s s , d a n s A r c h iv f ü r s c h w e iz e r is c h e G e s c h ic h te . t. X I ,
p. 172-173). A la d a t e d e 1342, il r a c o n t e c o m m e n t le m i n i s t r e g é n é r a l d e 1'O rde, le g a c io n e
s u m m i p o n tific is fu n ctu s , a u r a it c o n v e r t i le r o i e t le p e u p l e d u n e c e r t a i n e ile , a u x q u e l s le c h a -
pitre g é n é r a l r é u n i à A s s is e e n v o y a d e s m i s s i o n n a i r e s p o u r les b a p t i s e r (p . 2 3 0 ) : il e s t i m p o s ­
sible d e r a p p r o c h e r c e p a s s a g e d u n fa it c o n n u . S e l o n C. B r u n ( D ie F r a n z is k a n e r m is s io n e n
und d er O r ie n t b e i J o h a n n v o n W in te r th u r , p. 30-31), le c h r o n i q u e u r a u r a it m ê l é d e s i n f o r m a -
tions r e l a t i v e s a u r o i d e B o s n i e , q u i d e m a n d a i t d e s m i s s i o n n a i r e s a u c h a p i t r e d e s F r è r e s
M in eu rs, e t d ' a u t r e s c o n c e r n a n t la d é c o u v e r t e d e s C a n a r i e s e t d e l e u r p o p u l a t i o n e n c o r e
paien ne.

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290 LA PAPAUTÉ ET LES MISSIONS D ORIENT AU MOYEN-AGE

propos de la Russie et de la C arélie17; le nom de parles orientales a pris une


acception plus v a g u e 18. Au milieu du X V 1' siècle, les bases d ou partent les
missionnaires franciscains sont Caffa, pour les pays du Caucase, et les cou­
vents de Terre Sainte, pour les pays du Moyen-Orient, 1'Inde et l'Ethiopie;
les Dominicains usent volontiers des couvents polonais pour partir en mis­
sion à travers les pays infidèles, mais sans négliger Péra et Caffa. D ’ailleurs,
la réform e de 1'ordre franciscain, qui avait été secoué au X IV C siècle par
1'agitation des Spirituels jusqu’en pays de mission, donne un nouvel essor
aux missions sous 1'impulsion des religieux de l'Observance - les Primadizi,
Sarteano, Gryphon, Louis de Bologne -.
Les papes aussi modifient les struetures données aux missions:
Eugène IV nom m e des commissaires apostoliques, là oú, un siècle plus tôt,
on aurait désigné des évèques. L accent est mis cette fois sur 1Union des
Eglises, au point que les chrétiens de rite latin manquent d u n chef spiri-
tuel, et que Louis de Bologne imagine de prendre un titre patriarcal pour
assum er cette direction.
Faut-il conclure q u o n avait cessé, à Rome, de croire possible la conver­
sion des infidèles par les missionnaires latins, et qu on en était revenu à la
conception du début du X I II e siècle, s'en remettant aux chrétiens orientaux
de ce soin? C est sans doute aller bien au-delà des perspectives que lon
pouvait n ourrir à la Curie. Mais il parait certain que les papes du X V C siè­
cle, passionnés par les contacts pris avec 1'Ethiopie, poursuivant sans se las-
ser les négociations en vue de l’Union des Eglises, n'ont pas cherché à rani-
m e r les missions implantées au X IV e siècle et qui se bornent à survivre, là
oú la chose est possible. On a 1'impression d ’un certain essoufflement de
1'effort missionnaire, tel qu'il s etait défini au X I II C et au X I V C siècles.
Des chrétientés implantées par les Latins en pays d 'O rient( beaucoup
s'étiolent et disparaissent progressivement. Et nous pouvons nous interro-
ger p o u r en discuter les c au ses19.
Les papes d'Avignon avaient voulu d on n er à ces chrétientés la possibi-
lité de vivre sur elles-mêmes, sans être exagérém ent dépendantes du Siège
Apostolique, avec une organisation qui leur permit de se perpétuer sans

17 R ip o ll, III, 109 (12 aoü t 1439).


18 Cf. supra, p. 265 et suiv.
Iv Un f a c t e u r a c e r t a i n e m e n t j o u é un r ô l e i m p o r t a n t : c 'e s t le r e e u l d e s c h r é t ie n t é s o r ie n ­
tales, i n t e r l o c u t r i c e s au p r e m i e r c h e f d e s m is s io n n a ir e s , et q u i se r e p l i e n t su r elles-m êm es.
P a r t i c u l i è r e m e n t s p e c t a c u l a i r e est le cas d e la v i e i l l e c h r é t i e n t é d e M é s o p o t a m i e et d ' I r a n :
J.-M. Fiey, C h ré tie n s s y ria q u e s sou s les M o n g o ls , p. 80-84, 87-97.

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291
LES M ISSIONS MÉDIÉVALES : SUCCÈS OU ÊCHEC?

recourir à lui. L ’institution des provinces ecclésiastiques en pays de mis-


sion, qui se plaçait dans la droite ligne de la tradition canonique, prend
ainsi tout son sens : elle assurait le renouvellement, au sein de la province
elle-même, d une hiérarchie épiscopale - puisque la confirm ation p a r le
métropolitain et la consécration par les co-évêques, s'ajoutant à 1élection,
suffisaient à créer un évêque Celle-ci, à son tour, assurait le re n o u v e lle ­
ment du clergé par le jeu des ordinations, et, par son intermédiaire, la per-
manence de 1’offrande du sacrifice de la Messe et de 1’adm inistration des
sacrements. Autrement dit, le fonctionnement normal de 1’institution pro-
vinciale assurait à la com m unauté chrétienne son indispensable vie liturgi-
que.
Mais, précisément, 1’institution provinciale était trop aventurée p o u r
fonctionner normalement, dans son état de fragilité20. Il n’est pas exclu q u e
1 unique recrutem ent des chapitres cathédraux par 1'assimilation de c e r ­
tains couvents aux chapitres du type Occidental, ait été une cause d e fai-
blesse de 1 institution; il est certain que l’on avait trop pris, au X I V e et au
XVe siècles, 1habitude de recourir au Siège Apostolique, qu il s agisse de
pourvoir aux sièges épiscopaux et archiépiscopaux, ou de transférer un pré-
lat d un siège à un autre, p ou r que les remplacements s’effectuassent quasi-
automatiquement sur place. N ous savons combien rapidem ent d isp a ru re n t
les archevêques dans la majorité des provinces; est-ce parce que l’on ne vit
pas les fidèles d e m a n d e r à Rom e de nouveaux titulaires - exception faite
du Cathay oú M ontecorvino avait tenu une place con sidérable —, o u p a rc e
que R om e m anquait en ce dom aine d ’un suffisant esprit de continuité?
De ce fait, les novellae plantationes devinrent vite exsangues. Et les
com munautés catholiques vécurent ce que vivaient aussi les c o m m u n a u té s
chaldéennes d ’Extrêm e-Orient ou de 1'Inde, attendant de leur cath olicos
1'envoi d ’un métropolite, d'un évêque, voire d ’un p rê tre 21. O r 1’isolem ent d e
ces com m un autés catholiques, - constituées au temps oú la paix m on gole,
malgré les p re m iers déchirem ents de 1'empire gengiskhanide, était une réa-
lité devint peu à peu tragique. Dès les environs de 1340, T ab riz cesse

70 A n o t e r q u e , d a n s 1'Eglise g r e c q u e d e s X I I I e et X I V e siècles, la m u l t i p l i c a t i o n d e s m é t r o -
poies a u t o c é p h a l e s t é m o i g n e e l l e aussi d e 1’a f f a i b l i s s e m e n t d e 1’in s t it u t i o n d e la p r o v i n c e
t c c lé s ia s t iq u e .
21 Cl. Ch. S c h e f f e r , Les voyages de L u d o v ic o d i V a rlh e m a , P a ris 1888. ( R e c u e il de vo y a ge s et
d ocu m en ts p o u r s e r v ir à ih i s t o ir e de la g é o g ra p h ie , I X ) , p. 195-196. A Q u ilo n , V a r t h e m a t r o u v e
«a u lc u n s c r e s t i e n s d e c e u l x d e S a in c t T h o m a s . . . Ils n o u s d i s o y e n t q u e , d e t r o is ans u n e
*°ys, il le u r v ie n t u n g p r e s t r e d e B a b i l o y n e p o u r le s b a p t i s e r » . Cf. s u r to u t J. D a u v il lie r , L es
P ro v m c e s c h a ld é e n n e s • d e l e x l é r i e u r » au M o y e n -A g e , p assim .

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292 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIONS D O R IE N T AU M O YEN AGE

d e t r e régulièrement fréquenté par les marchands; 1'Océan Indien. par-


couru par tant de voyageurs occidentaux dans les prernières décennies du
X I V e siècle, ne l'est plus au X V e que par de rares aventuriers du type d ’un
Nicolo d e ’ Conti, qui s'était fait musulman. L'Asie centrale, agitée par les
convulsions du khanat de Djagataí, est désormais de traversée bien peu
süre, et son unification par Tam erlan ne lui assura pas une paix durable.
II n est pas ju sq u ’aux pays du Caucase qui ne deviennent d a c c è s diffi-
cile quand les Ottomans commencent à contrôler les Détroits, tandis que
les M am elüks ne relâchent que peu à peu leur vigilance à interdire prati-
quement 1’accès de 1’intérieur de leurs Etats, et à plus forte raison de
1'Ethiopie, aux chrétiens d ’Occident. Les hom m es passent difficilement; les
messages et les nouvelles filtrent également avec peine.
Cet isolement, en fait, est la rançon d'une certaine démesure. Les Occi­
dentaux du X I I I e siècle ont été saisis d ’un véritable vertige en découvrant
l a m p l e u r du m onde que leurs connaissances géographiques ne leur avaient
pas perm is de deviner avant les voyages d'un Plancarpin ou d'un Rubrouck;
ils se sont lancés intrépidement à la conquête de ce monde, sans entrevoir
pleinem ent son immensité, et il faut arriver à Jourdain Cathala de Séverac
p o u r qu un voyageur ose écrire que la chrétienté occidentale ne represente
m èm e pas la vingtième partie des habitants du monde. On s est sans doute
illusionné aussi sur les effectifs des fidèles des Eglises orientales q u o n
croyait au X I I e siècle bien plus nom breux que les Sarrasins et les paiens. II
reste que les Dominicains, les Franciscains, la Papauté, n o n t pas hésité
devant cette multitude d ames à conquérir; la réaction des frères Polo en
face des m illions de Chinois qu ils découvraient a été de d e m a n d e r quel­
ques m issionnaires - et il semblait suffisant à G régoire X de leur confier
d eux Frères P rê c h e u rs ...
Sans doute faut-il incriminer aussi 1’insuffisance d ’une doctrine en
m atière cecuménique. Les Latins étaient fort novices en ce qui concernait
les relations avec les Orientaux, lorsque les Croisades les mirent en contact
avec eux : leur expérience se limitait, en fait, aux différends latino-grecs, oú
le facteur politique jouait un grand rôle. La volonté d u n ité qu'ils appor­
taient, conséquence n orm ale de la doctrine de 1’Eglise catholique sur la pri­
mauté de saint Pierre et les responsabilités q u e l l e entrainait, a été un fac­
teur n ouveau dans les rapports entre les c o m m u n a u té s chrétiennes
d Orient; elle a rencontré des bon n es volontés équivalentes - un Nersès de
L am p ro n , un Y ah ballãh à III, ont été eux aussi passionnés p o u r 1'Union -.
Mais, dans un dom ain e oú depuis longtem ps s’étaient accusées des posi-
tions bien arrêtées, les Latins découvrirent bientôt que la reconnaissance
de la prim auté pontificale et 1'affirmation de 1'unité de foi, qu e recueillaient

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LES MISSIONS M Ê D IÊV ALES: SUCCÊS OU ÊCHEC? 293

sans trop de peine les messagers pontificaux auprès des chefs des Eglises.
laissaient subsister de profondes divergences. Ricoldo de M ontecroce a
défini une attitude très souple : si la foi doit être unique, les rites peuvent
différer. Mais les rites sont la traduction des dogmes dans la liturgie. Aussi,
dès les pourparlers pour 1'Union arménienne qui s'engagent à la fin du X I I e
siècle, Rome commence-t-elle à dem ander la modification de certains usa­
ges, soit parce qu ils maintiennent des clivages choquants (à propos, par
exemple, de la date des fêtes), soit parce qu'ils sont entachés de telle ou
telle signification non orthodoxe (notamment 1'usage de ne pas mettre
d eau dans le vin du calice ne trahit-il pas la volonté de ne pas adh érer à la
doctrine chalcédonienne sur les deux natures du Christ?).
Les Latins ont été ainsi amenés, par les exigences d une unité réelle-
ment vécue, à des prises de position qui peuvent apparaitre excessives,
encore qu elles ne leur aient pas été propres. Le renouvellement du b a p ­
tême reçu dans une autre confession, que les Nestoriens voulaient im poser
aux Grecs, au témoignage de Rubrouck, et aux Alains, du temps de Monte-
corvino, et que certains Byzantins voulaient de leur côté im poser aux
Arméniens, résultait d u n doute pesant à la fois sur la forme du b a p t ê m e 22
et sur la doctrine christologique sous-jacente à celle-ci. Que ce « r e b a p -
tème» fut maladroit, même lorsquil était donné sous condition, la chose
est certaine; que cette pratique fut le résultat d'une aspiration à 1’authenti-
cité de la foi vécue en commun, c est également chose certaine. Mais il est
évident que la recherche de 1'Union des Eglises, comportant en m êm e
temps le refus de transiger avec le dogme reçu du Christ et défini par la tra-
dition, n etait pas chose aisée.
II n'était pas aisé non plus de définir 1'appartenance des Chrétiens
orientaux ramenés à 1'union avec Rome. Pouvait-on les laisser dans leur
communauté, lorsque les chefs de celle-ci, le clergé local, les autres fidèles,
ne renonçaient pas aux affirmations dogmatiques et aux pratiques liturgi-
ques contraires à l’Union? Si la réponse était négative, ils ne pouvaient que
fejoindre les néophytes arrachés à l'« infidélité» dans des communautés
catholiques séparées de leurs communautés d o r i g in e . ..
II est inutile d ’insister sur ces difficultés. Une doctrine missionnaire
plus élaborée, des recherches cecuméniques mieux éclairées, sont loin de
les avoir toutes résolues.

21 II s e m b le p a r e x e m p l e q u e, c h e z les A rm é n ie n s , 1‘u sa ge d'un b a p t ê m e p a r trip le im m e r -


su>n, ch a c u n e s a c c o m p a g n a n t d u n e in v o c a t io n à l'une des p e r s o n n e s d e la T rin ité, ait été
asscz la r g e m e n t en u sa ge (cf. E. H e r m a n , B aptêm e en O rien t, da ns D ict. de D r o it ca n o n iq u e , II,
c 192-193). C e t te p r a tiq u e a p p a ra is sa it à d ’a u tres c o m m e u ne n é g a t io n du b a p t ê m e unique.

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29 4 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO N S D O R IE N T AU MOYEN-AGE

Mais la principale cause de la disparition des chrétientés fondées par


les missionnaires médiévaux, ce fut certainement le m anque d ’hommes,
rançon de cette dém esure que nous relevions. Q uand Jean de Leominster
évalue à trois le chiffre des Dominicains vivant dans les loca de la province
de Sultanieh - au lendemain, il est vrai, de la Peste N o ire - comment nous
étonner que les chrétientés de rite latin ne se soient rencontrées q u e n
M ésopotam ie, en G rande-Arm énie et en Azerbeijan, avec deux nébuleuses
éloignées dans 1'Inde et au Turkestan, sans que la plus gran de partie de
1’Iran, 1'Afghanistan. la masse constituée par 1'Inde gangétique et la plupart
des pays du Dekkan aient été seulement effleurés?
De ce m anque d hommes, les missionnaires sont douloureusem ent
conscients. M ontecorvino, seul religieux latin avec qu elqu es esclaves rache-
tés, envoie de Chine des appels quasi-désespérés. Jourdain de Séverac
s écrie que la m oisson est abondante, et les ouvriers peu nom breux. Quant
à Jean III de Sultanieh, il termine son Libellus p ar ces phrases la p id a ire s :
E cce bona dispositio. Q u id plus, nisi m itta n tu r messores?.
Les m oissonneurs, effectivement, sont venus au compte-gouttes. Quand
le pape autoi ise tel missionnaire, p ro m u ou non à Iépiscopat, à em m ener
a\ ec lui quatre, douze ou vingt de ses confréres, pourvu que ceux-ci soient
volontaires, le chiffre nous frappe par sa modestie. II nous m anque de
savoir si, lorsqu e le missionnaire s'adressait à son ordre, on assistait tou-
jo u r s aux élans d e n th o u sia sm e que nous a décrits G é ra u d de Frachet à pro-
pos de ce «c h a p itre des la r m e s » oú tous les Frères, en pleurs, se portaient
v olontaires p o u r partir chez les Tartares. Ou si, en pays de mission, on avait
souvent à se d éfe n d re de 1’arrivée de trop de religieux peu susceptibles de
p lier leu r g o sier aux langues orientales, c o m m e ce fut le cas en Qipcaq.
M a lg ré tout. la carence des missionnaires nous est trop souvent affir-
m ée p o u r p o u v o ir être mise en doute. L e s so u ffle m e n t de 1'Occident, si sen-
sible au tem ps de la guerre de Cent Ans, ne sest-il pas m a rq u é dans le
d o m a in e m issionnaire c o m m e ailleurs?
Mais, en matière de missions, y a-t-il jam ais succès ou échec, au sens
ab so lu du terme? C e s t à d a u t r e s balances q u ’il faudrait en p eser les résul-
tats, et ces balances ne sont point les nôtres. L ’héroisme, 1'enthousiasme,
1'abnégation, se rencontrent à trop de pages de 1’histoire des missionnaires
m édiévaux; trop de martyrs ont payé de leur vie la confession de leur foi,
ou I exposition à un climat qu ils n étaient pas faits p o u r supporter; trop
d ám es ont e m b rassé la foi qui leur était annoncée, p o u r que nous ne consi-
dério n s pas cette histoire c o m m e celle d une gran d e oeuvre, et les hommes
qui 1’ont vécue c o m m e de g ran des figures.

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LES M ISSIONS M É D IÉ V A LE S: SUCCÈS OU ÉCHEC? 295

Une am vre m arquée par des efforts prodigieux dassim ilation, de c o m -


préhension, d investigation. C e sont des missionnaires qui ont écrit ces
récits de voyage qu'ont laissés Plancarpin ou R ubrouck, les M ira b ilia des-
cripta de Jourdain de Séverac, le De statu S a racen oru m de G u illa u m e d e T r i­
poli et com bien d autres écrits que nous avons rencontrés sur notre route
et qui ont enrichi la connaissance du m on d e de leurs con tem p orains. D an s
le Livre des M erveilles de la B iblioth èque nationale, M a r c o P o lo - un laic
certes, mais un laic qui prend sa part du travail d'évangélisation, c o m m e
ses oncles, c o m m e Lucalongo, le com p agn on de M on tecorvin o, c o m m e
Gui aum e de M odène, ce m archand qui versa son sang avec les F ran cis­
cains d Alm aligh - voisine avec Odoric de Pordenone, le « p é r é g r i n a n t » qui,
muni des p ouv oirs d un légat, visita les Lieux Saints, mais aussi 1’Inde, la
ine et Asie centrale. Et c'est précisément le récit des voyages d ’O d o r ic
qui, en passant dans le livre de Jean de M a n d e v ille 23, devint la so u rc e d e la
connaissance qu eurent la fin du M oyen-Age et une partie des tem ps m o d e r -
nes des pays en question.

Ce qu ils ont apporté à la connaissance du m onde, les m is sio n n a ire s


1ont aussi a p p o rté à la connaissance de 1'Eglise. Sans le la b e u r des trad uc-
teurs et des controversistes du XIVe siècle, l'Union de Florence. b a se d e
depart p o u r de n ouveaux rapprochem ents oecuméniques, n a u r a it pu inter-
vemr. Les n om s des diverses com m unautés orientales - Nestoriens, J a c o b i­
tes, etc. - n evoqu aien t p o u r les hom m es du XI* siècle qu 'u n c a ta lo g u e
d heresies ch ristologiques; ils désignent désorm ais des collectivités h u m ai-
nes, avec des caractéristiques nationales, des particularism es re sp e c ta b le s
et 1’on p r e n d r a peu à peu 1’habitude d e m p l o y e r d a u t r e s v o c a b le s - C hal-
déens, S y r ie n s . . . - qui rendront mieux com pte de ces p artic u larism e s et
élim ineront le p a rfu m d'hérésie qui sattachait aux anciens n o m s 24.

2' C o m m e l'a m o n t r é R o b e r t Fazy {Je h a n de M a n d e v ille . Ses vo y a ge s et s o n s é jo u r d is c u te


en E gypte, dans A s ia tis c h e S tu d ie n , IV, 1950, p. 30-54), M a n d e v ille est p r o b a b l e m e n t un p e rs o n -
nage h is to riq u e , qu i au rait e f f e c t i v e m e n t visité C o n sta n tin o p le. la S yrie, 1'Egypte, et v é c u
dans 1'entourage du sultan avan t d e r e t o u r n e r v ers 1356 à L iè g e. La q u e s tio n d e s o n v o y a g e
au-delà d e 1’ E gyp te , j u s q u a u Cathay, d e son r e to u r à tra v e rs les pays s o u m is au x M o n g o l s p a r
le m è m e it in é r a ir e et a v e c les m ê m e s c o n s ta ta tio n s q u O d o r i c d e P o r d e n o n e , est beaucou
plus d isc u ta b le. Jusqu a plus a m p le in fo r m é , o n peu t r e g a r d e r c e tte p a rtie du ré c it comme
d é m a r q u a n t la n a rr a tio n du v o y a g e u r franciscain. Cf. A lb e rt B o v e u s c h e n , D ie Q u e lle n f ü r d ie
R e is e b e s c h re ib u n g des J o h a n n v o n M a n d e v ille , B e r lin 1888 (inaug. Diss. L e ip z ig ). - Cf. aussi
J H e n n in g e r , S u r la c o n t r ib u t io n des m is s io n n a ir e s à la c o n n a is s a n c e de iO r ie n t , s u r t o u t p e n
d a n t le M o y e n -A g e , d ans N Z M W , IX. 1953, p. 161-185.
24 C e s t ainsi q u e Jean III d e Sultan ieh , dans s o n L ib e llu s (1404), e m p l o i e r é g u l i è r e m e n t le
t e r m e d e S u r ia n i (cf. K e r n , p. 118) là o ü on utilisait au p a ra v a u t c elu i d e J a co b ite .

O O U I II IL.VJ kJ J W U I I lv-/V/UI II I U I
296 LA PAPAUTÉ ET LES M ISSIO N S D O R IE N T AU M O YEN-AG E

Enfin les missions m édiévales ont app o rté à 1’histoire de 1’Eglise et a


1’histoire tout court, de m erveilleuses expériences. Des h o m m e s exception-
nels les ont animées : Jean de M ontecorvino, qui entreprit à lui seul la
conquête de 1'Extrême-Orient, c o m m e Jourdain Cathala celle de 1'Inde;
R ubrou ck ou Plancarpin, les découvreurs, qui se sont lancés sur les routes
encore bien inquiétantes de 1’Asie, si peu de tem ps après la conquête mon­
gole; Jean de Ziquie ou Jean de Qrnay, qui, à peine acquis à la foi romaine,
ont attiré à elle tant de leurs com patriotes. Et c o m b ie n d ’autres hommes,
qui ont aban d o n n é sans hésiter le m o n d e c on n u p o u r s’a v en tu rer dans des
pays à la fois im m enses et mal reconn us et y p rê c h e r la foi, rencontrant
parfois des audiences étonnam m ent bien disposées, p a rfo is des rebuffades
ou des accueils polis, mais décevants, parfois aussi le m artyre! Ces mission­
naires, qui ont connu aussi leurs défaillances, q u e n o n t é p a rg n és ni les
erreurs, ni les m aladresses, mais qui obéissaient avec tant d'en th ousiasm e à
1’a p p e l évan géliqu e en allant a n n o n c er la b o n n e n o u v e lle à toutes les
nations, parm i les épreuv es et dans un isolem ent q u e lq u e fo is à peu près
com plet, ont écrit des pages qui ne le cédent pas à celles q u ’ont écrites
leurs g ran d s continuateurs de 1e p o q u e m o d e r n e o u d e tem ps plus proches
de nous.

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297

em pire TURQUIE

de nicee
500 1000 km

LES MISSIONS DE COMANIE AVANT L’INVASION MONGOLE

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LES ROUTES SUIVIES PAR LES OCCIDENTAUX DANS LEM PIRE MONCOL A LA FIN DU XHJ' ET AU DEBUT DU XIV' SIÈCLE
299

la p r o v in c e de su lta n ie h

x J U U I II IV / U k-/ y W t _ JI I l v J V _ . U I II I V y l
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LES PAYS DE LA MER NOIRE ET DU CAUCASE DE 1332 AU DÊBUT DU X V SÍÊCLE


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▲ Aimaligh

• Hami

La province ecclésiastique de Khanba


Khanbaliq

( partie orientale )

et Ia vicairie franc iscaine de Cathay .

A Évêché et couvent

A C o u ven t probable

0 500 1000 km
>— --------------- ------------------------- >
K arakorum
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Bolgar
M O R D V ES

500 km

r Saraitchik
i
i
t La Tana
Mo nca st ro
#
I # Maierid Bolac
i ZíQ U IE

G R A N D t
ABKH A Z it
M ONTS
T A R T A R IL
CASPIENS
G E O R G IE _ n * les loca dT béne. des MonCs Caspiens nt figurem pu
• Tiflis

• résidence Iranciscaine - sur cette a rte

V lieu* dc dépoitation oú
V I C A I R l t DE T A R T A R I E

Rubrouck envisageatt de se fíxer


O R I t N T A L E

LES STATIONS MISSIONNAIRES DANS LA VICAtRIE DE TARTARIE AQUIL1NAIRE


304

LES STATIONS MISSIONNAIRES FRANCISCAINES DANS LA VIÇARIA TARTARIAE ORIENTALIS AU XIV- SIÈCLE

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IN D E X N O M INUM

N 'o n t pas été retenu s dans cette liste, des nom s qui reviennent c o n tin u e ’

M o n g o l s , M u s u lm a n s , D o m in ic a in s , F ra n c isc a in s .
D e s a b r é v i a t i o n s o n t é t é a d o p t é e s p o u r le s m o t s les plu s u su els :

r., p o u r r e lig ie u x ,
év., pour évêque,
arch., p o u r a r c h e v ê q u e ,
patr., p o u r p a t r ia r c h e ,
cath., p o u r c a t h o lic o s .

L e s n o m s d e lie u x , é t a n t g é n é r a l e m e n t id e n t i f i é s d a n s le t e x t e o u e n n o t e , n e s o n t p a s

a c c o m p a g n é s ic i d e l é m e n t s d e lo c a li s a t i o n .

A, Ã 'Ain Jalüd, b ata ille : 100


Aiola, a r c h e v è c h é : 48
A kh alzikh é : 171, 185, 195, 256; - é v ê c h é : 183,
A aron, r . : 151
Ab aqa, Il-K h a n : 83, 85, 86, 101, 102. 103, 105, 192

108, 145 A k k e rm a n : v o i r M o n c a s t r o

Abaran, c o u v e n t : 223, 261 Aksarai, c o u v e n t : 95, 243

A b d allah , arch. E d e s s e : 271 Alains, A l a n i e : 5, 27, 29, 30, 65, 81, 139, 149,

A b k h a z e s : 179, 237, 238 153, 154, 161. 183, 184, 187, 188, 231, 237,

A b ra h a m , cath. d e G é o r g i e : 56, 115 238, 247

— , p é le r in in d ie n : 259 A lb an ie n s o u A g h o u a n s : 5, 51; - c a t h o l i c o s ;

— , d e G r a n d e - A r m é n ie : 219 204, 216


A lb é ric , c a r d in a l d 'O s tie : 10
— d e Larde, r . : 70
Abu-Saíd, khan m o n g o l : 94, 106, 175 A lb e r t d e S a rte a n o , r . : 267, 268, 270, 273, 274

Abusqa, p r in c e m o n g o l : 157, 160 — , év. S a r a i : 160

A c r e : 34, 35, 38, 42, 43, 58, 84. 104, 107, 110 Albors ( m o n t s ) : 186
A l d o b r a n d o d e F lo r e n c e , r . : 107
A d a m d e M ars h , r . : 65
A d a n a ( c o n c i l e s ) : 201, 204 A l e p : 39, 40, 45; - arch. s y r ie n : 99, - s u lta n :

al-Adil, s ultan d ’E g y p t e : 39 43, 44

A g h p a g h , é v è c h é a r m é n i e n : 204 A le x a n d r e 1’Anglais, r . : 184

A g h ta m a r ( c a t h o l i c o s ) : 56, 204, 216 A l e x a n d r e Petri, c l e r c a r m é n i e n : 207

1’A i a s : 50, 110, 116, 175, 176; - é v ê c h é : 208 — A r io s to , r . : 271, 272

A im e r v , patr. A n t i o c h e : 11, 47 — , év. T r é b i z o n d e ; 233, 234

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306 INDEX NOMINUM

A le x a n d rie : 41. 239, 262, 264, 272; - patriar­ — Solpan, r . : 254


che c op te : 268, 275; - patr. melkite : 268, — , arch. S u lta n ie h (?) : 182
275; v o ir Nicolas — , év. T r é b i z o n d e : 213, 214, 233, 241
Alexis, r . : 60, 71 — T r o ja n o , r . : 270
Àlgigidài, go u v e rn eu r m o n g o l : 73, 74, 76, 98, A n to n in d 'A le x a n d r ie , arch. H i é r a p o l i s : 209
142 21 0,214
— khan m o n g o l : 187, 189 A p a h u n iq , A p a m é e , a r c h e v ê c h é s : 221
Ali, khan m o n g o l : 163, 164 A p o s to lu s : v o i r A ra k ie l
Alinjak : v o ir Erncak A p r a k o u n ik , c o u v e n t : 222, 223
A liqu is: 185 (id. que le p récéden t?) A q u ilo n a ris ( v i c a r i e de T a r t a r i e ) : 128, 129
Alm aligh : 93, 95, 153, 162 à 166, 186, 189, 243 130, 135, 163, 164, 171, 184, 186, 237. 241
Am aury de Lusignan, seigneur de T y r : 200 242, 244, 246, 253, 258, 289
A m b ro is e Scipion, r . : 253 A r a g o n ( r o i d ’) : 262, 263, 264, 268, 269
— d e Sienne, r . : 244, 253 A ra k ie l, arch. N i c o p o l i s : 197, 198, 199
A m ir Sarkis, seign eu r de Tiflis : 185 — , arch. S o l g a t : 92
Anapa : v o ir Mappensis A r b è le s : 111, 177
Anazarbe, a r c h e v ê c h é et arch evêqu es : 209, A r d a z : v o i r S a in t - T h a d d é e
212, 213 A rg iò n e n s is , é v ê c h é : 193, 198
A n d o lo de S avignone, G ê n o is : 153 Argis, é v ê c h é a r m é n i e n : 204
A n d ré Armenus d e Caffa, r . : 133 Argu n, c h r é t i e n m o n g o l : 175
— , a b b é c o p t e : 268 — , g o u v e r n e u r m o n g o l : 98
— C h rysobergès, arch. R h o d es : 271 — Il-K h a n : 85, 86, 102, 103, 104, 105, 106,
— II, r o i de H o n g rie : 23, 24 108, 114, 145, 248
— d e L o n gju m eau , r . : 45, 59, 60, 70 à 74, 76, A riq -b ü k a , kh an m o n g o l : 84
77, 78, 84, 108, 142 A r m é n ie , A r m é n i e n s : 5, 9, 10, 19, 35, 36, 48 à
— d e Pérouse, év. Za yto n : 148, 149, 151 53, 65, 88, 91 à 93, 145, 150, 158, 159, 160,
— , arch. S o l g a t : 235 170, 171, 180, 186, 189, 191, 193, 196 à 225,
— d elia Terza, r . : 132, 133, 233 254, 260, 266, 267
A n d r e u c c io d'Assise, é v . : 199 — ( c a t h o l i c o s ) : 108, 145, 159, 170, 180, 196,
A n ge d e S p o lè te , r . : 41, 236 202 à 205, 210, 212, 216, 219, 224, 240, 275;
A n g le te rre , ro i et r o y a u m e : 104, 109, 142, vo ir C o n s t a n t in , E t ie n n e , G régo ire, Jac­
148, 178; v o ir E d o u a rd q u e s, M e k h i t a r , Paul.
Ani ( c a t h o l i c o s ) : 78 — , (o u C i l i c i e ) , r o y a u m e : 59, 99, 101, 115,
An selin d e T o u cy , c h e v a lie r : 31 116, 119, 142, 196, 200 à 203, 205, 207 à 210,
A n s e lm e A d o rn o , e n v o y é b o u r g u ig n o n : 278 212 à 217, 224; - r o i s : 42, 43, 56, 60, 145,
A n t i o c h e : 38, 100, 112, 144; - c h a n t r e : 12; - 208 ( v o i r C o n s t a n t in , G u y, H é t h o u m , Léon,
patr. latin : 9, 43, 51, 55, 61, 142, 275, 277, O s h in )
278 (v o ir A im e ry , L o u is de B o lo g n e); - — , v o i r a ussi G r a n d e - A r m é n i e
patr. g r e c : 183, 231, 272, 275 ( v o i r David, — , d e C r i m é e : 196, 201, 238, 240
E u t h y m e ); - p r i n c i p a u t é : 49, 50, 55, 100 A r m é n i e n s - U n i s : 185, 219, 223, 224, 238, 259,
( v o i r B o h é m o n d ) ; v o ir aussi M o ís e G ib le t 261, 278; v o i r a u ssi B a s ilie n s , U n ite u r s
A n t o in e d ’A r m é n ie , r . : 107 A r n o l d d e C o l o g n e , r . : 289
— d e B o rg o - S a n - S e p o lc r o , r . : 244 A r z e lio n e n s is ( E r z e r u m ? ) , s i è g e é p i s c o p a l et
— d e L e v a n to , év. T a n a : 245 é v ê q u e : 193, 244
— d e M ilan , r . : 205 A s c e lin d e C r é m o n e , r . : 55, 59, 70 à 74, 78
— d e P arm e , r . : 85 A s h d a r a g , é v ê c h é a r m é n i e n : 204
— R ec ca n a, G ê n o is : 254 A s s a s s in s ( I s m a i l i e n s ) : 8, 34, 99
— , arch. S a lo n iq u e : 185 A s s ila d in d e T i f l i s : 185

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307
INDEX N O M IN U M

Astrakhan, co u v en t, v ille et é v ê c h é : 89, 95, B a u d o u in II, e m p e r e u r d e C o n s t a n t i n o p l e .


243. 245, 246 44, 45, 79
Athanase, é v ê q u e a r m é n ie n : 198, 199 — d e H ainaut, c h e v a li e r : 79
— . patr. d e s J a cob ite s : 61 — , Turc c o n v e r t i : 7
Augustins : 124; v o i r E m eri. B e a u v a is ( é v ê q u e ) : 41
A v ig n o n ( A r m é n i e n s d ' ) : 197, 207, 211 B ela IV, r o i de H o n g r i e : 22, 23, 27, 29, 30, 31,
A v m a r M o n a ch u s , patr. J éru sa lem : 33 68, 71
B e n o it d e P o lo g n e , r . : 70, 72, 78
— , év. S im is s o : 189, 235
B e n t o d e G oe s, v o y a g e u r : 278

B B e r d ib à g , kh an m o n g o l : 161
B é r a n g e r d e L a n d o r r e , m a it r e g é n é r a l d e s
D o m in ic a in s : 94, 126, 127, 130, 132, 138
Baalbek (é m i r d e) : 45 B e r n a r d , ca rd in a l, év. A l b i : 212
Babaron, château : 49, 207 — , r., c o m p a g n o n d ’O d o r i c : 155, 191
Bagdad : 197, 110, 115, 177, 182, 256; - Khalife — d e Caffa, év. M o n t s C a s p ie n s : 252
de : 44. 76, 99, 142 — , r., en C h in e ( ? ) : 155
Baibars, sultan d ’Egyp te : 43, 84, 101, 103 B e r n a r d d e Guardiola, év. D e h i k e r k a n : 177,
Baíburt, é v ê c h é a r m é n ie n : 204 182
Bàidú, Il- K h a n : 104, 106 — G uille , r . : 113
Baiju, c h e f m o n g o l : 71, 72, 73, 81, 87, 98 — M o r e t , év. S a v a s t o p o l i : 175, 178
Bâle ( c o n c ile d e ) : 265 — le P é le r in (s a in t ) : 39
B a n d in o M arzi. r . : 162 — , év. S iv a s : 176, 182
B a r Andréas, th é o lo g ie n : 12 B e r n a r d in d e P la is a n c e , év. S iv a s ( ? ) : 175,
Baraq, c h r é t ie n m o n g o l : 175 176, 182
B a r b a r o (G io s o fa t), v én itie n : 246, 254 B e r t h o l d V o li, év. S a v a s t o p o l i : 179
B a rç a u m a (alias R a b b a n Ç a u m a ) : 105, 108, B e r t r a n d C o lle t , év. T i f l i s : 177, 185
109, 110, 136 — d e Toulouse, r . : 151
B a rga d in d e M etz, a v e n t u r ie r : 150 Bertuccius, arch. M aku : 206
Bàrkà, khan m o n g o l : 69, 77, 89, 91, 92, 95, Bessarion (le card in al) : 240
156, 160 B e th lé em , c o u v e n t : 263, 264, 265, 269
Barrarius ( m o n t ) : 172, 178 B e y r o u t h : 36; - c o u v e n t : 263, 265, 268, 270
B a r th é le m y A b b aglia ti, év. T a b r i z ; 175, 176 B ic c io d ei Franceschi, b a n q u i e r : 200
— d e C r é m o n e , r . : 79, 81 Blaise le Gênois, r . : 281
— d e F o lign o , r . : 275 B la n c h e de Castille, rein e d e F r a n c e : 44
— da P o g g io , év. M a ra g h a : 175, 177, 178, 194, B o g o s : v o i r Paul
217, 218, 222 B o h é m o n d I d ’A n tio c h e : 7; - V I d 'A n t i o c h e :
— d e T ab riz, arch. T a rs e : 208 68, 99, 100
— d e T ivo li, év. D o n g o la ( ? ) : 218 — d e Lusignan, p rin c e a r m é n ie n : 218
Basile, A n gla is : 83 B o la c , lieu d e d é p o r t a t io n : 81

— d e B o lo g n e , év. T an a : 245, 246, 266 B o l o g n e ( U n i v e r s i t é ) : 127


— d e Jé ru s a le m : 197 B o n a gra zia , m in is tre d es F ran ciscain s : 94,
— , arch S é le u c ie : 209 125
B a silie n s d lta lie : 197, 198, 199, 215, 220; v o i r B o n i fa c e d e Surdis, év. T an a et S o ld a y a : 235,
B a sile d e B o l o g n e 236
Baskirs, B a s k irie : 21, 29, 30, 93, 96, 160, 188 B o r t , « d u c » c o m a n ; 24
Batu, khan m o n g o l : 30, 68, 79, 87, 95 B o s n i e : 133, 137, 289
B a tu m ( « F a x io » ) : 230 B o s ra , a r c h e v ê c h é : 210, 214

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308 INDEX N O M IN U M

B ourgogn e (duc d c) : 276, 278 C h rétien , é v . : 144


B oxley, c o u v e n t : 124 C h r is t o p h e G arantoni, év. C oron : 267
B ro d n ici, p e u p le d 'U k r a in e : 22, 23, 24 C h y p r e : 38, 42, 61, 73, 76, 116, 120 \%
B u k ha ra : 186 200, 211, 215, 258. 263. 264. 265, 270. 272
B u lga res : 30, 65, 139 a r c h e v ê q u e : v o i r G e r m a in ; - roi i
u • . n \ 'voir
— d e la V o lg a : 21. 22, 27, 29, 30, 41, 91 H e n r i et P ie r r e )
Bunda, ville : 21. 22 Ciba : 249
B o r a q , khan m o n g o l : 187 C i m b a l o ( B a l a k l a v a ) : 94, 161, 230, 2 3 7 '. é \
B u r c h a r d d e M o n t-S ion , p é le r in : 7 c h é : 234, 235, 243
Büri, p r in c e m o n g o l : 77, 78 C ir c a s s ie n s : v o i r T c h e r k e s s e s
B u s ca rei d e G hisolf, G ê n o i s : 105, 110, 247 C i s t e r c i e n s : 13, 16, 66, 100, 124
Buzun, khan m o n g o l ; 189 C la v ijo (R u y G o n z a l e z d e ) : 189
C odex c u m a n ic u s : 97, 98
C o k to g a n u s (T o q t a i ) , khan m o n g o l : 157
C o m a n s ou Q ip è a q ( T u r c s ) : 4, 14, 20 à 27, 29

c, c à 34, 54, 65, 68, 91, 139, 160, 161, 274; - évê­
c h é d e s - : 24, 25, 26, 31, 88. 141
C o m p o s t e l l e ( p é l e r i n a g e ) : 259, 260
Caffa : 89, 93, 94, 119, 135, 138, 156 à 159, 161, C o n r a d F la d e r , év. A rg io n e n s is : 193
182, 223, 230, 232, 235 à 240, 246, 285: - c o u ­ — d e P re g re n tia , év. C a ffa : 165
vent d o m in ic a in : 130, 131, 132, 156, 161, — d e Saxe, r . : 184
174, 222, 261, 273; - couvents fra n c isc a in s : — , év. T a n a : 245
90, 94, 95, 129, 161, 237, 252, 266, 273; - cus­ C o n s ta n t in I, cath. d ’A r m é n i e : 52; - I I: 53; -
tod ie : 241; - évèch és et é v è q u e s : 158, 159, I I I : 202, 206; - V I : 265, 266, 267
160, 165, 166, 193, 200, 222, 223, 230 à 240, — II, r o i d A r m é n i e : 213, 214; - I I I : 216
245, 253, 258, 266, 267, 277 — C r e m a n e n s o u C a rs illy , c h e v a l i e r : 214
Cagatai, fils d e Gengis-Khan : 186 — , e m p e r e u r d ’E t h i o p i e : v o i r Z a r a Y a'qob
Cagri, cou ve n t arm én ien : 223 — III, roi d e G é o r g ie : 282
le Caire : 40, 41, 262, 264, 268; v o ir Egypte — , év. M a m is tra : 208
Canaries ( í l e s ) : 289 C o n sta n tin o p le : 60, 79, 89, 91, 231, 241; - cus­
Canksi, khan m o n g o l : 163, 164, 189 to d ie : 171, 269; - patriarches grecs: 179,
Carlin o de Grassis, év. Alm aligh : 162, 163 183, 2 3 1 ; - p atriarch es latins : 232, 233, 235
C a r m e s : 122 C o n ta rin i ( A m b r o is e ), V é n itien : 276, 277
C a rp i : 170, 171, 185 la C o p a : 230, 249
Casale Fasioli : 199 Copan, c h e f m o n g o l : 175
C asim ir IV, r o i de P o lo g n e : 267, 276 C o p t e s : 5, 9, 57, 261, 262, 268
Caspien n e ( m e r ) : 33, 76, 80, 251, 254 C o r é e ( r o i d e ) : 152
Caspiens ( m o n t s ) : 135, 184, 186, 253; - é v ê ­ C o rm a q a n , c h e f m o n g o l : 87, 98
ché et é v è q u e s : 244, 252 C o rn e ille , év. T a r k i : 263
Castille (r o i d e ) : 258 C o r o n (é v. d e ) : 214; v o i r Christope
C a th a y : 146 à 156, 162, 165, 166, 172, 190, C o s m e d e Z iquie, arch. S a ra i: 154, 233, 241.
242, 256, 269, 272, 278; - v i c a i r i e : 129, 13s! 243, 244, 245, 249, 250, 252
152, 154, 162, 163, 165, 186 C o ih u lo to g a , c h r é t ie n m o n g o l : 106, 175
C é r a s o n le (auj. G i r e s u n ) : 230 C r o a t ie : 185
C h ald é en s : v o ir N e s t o r ie n s C r im é e : v o i r A r m é n ie n s , Khazarie, Qipéaq
Charles d e France, arch. K h a n b a liq : 155, 156 C u lm , é v ê c h é : 13, 14
Chine : 75, 114, 125, 222, 286; - v o ir C ath ay C u n m ta g e ria , r é g io n : 250, 251
C h io : 135, 253; - c o u v e n t ; 130, 174
C y r ia q u e , arch. K h i l a t : 221

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IND EX N O M IN U M 309

D Duwa, khan m o n g o l : 172, 186


D u w a -T e m ü r , khan m o n g o l : 189

D a g h e s ta n : 247, 251, 252, 254, 255. 257, 258;


v o ir M on ts Caspiens
D a m a s : 99, 100, 264; - sultan : 44, 45
D a m ie t t e : 35, 41
E
D aniel, p r i n c e d e H a l i c z : 15, 23, 66
— , h i g o u m e n e russe : 6
— K o b y a k o v i c , c h e f c o m a n : 23
Edesse, a r c h e v ê c h é : 220 (v o ir A b d a l la h .
— , patr. d e s M a r o n i t e s : 48
Jean David, W illi a m F r e n e y ) ; - c o m t é : 9,
— d e T a b r iz , a rc h . B o s r a : 210, 212, 213 214
10, 11
218, 266
Edigü, c h e f m o n g o l : 251
D a r m a s ir in , k h a n m o n g o l : 163, 187, 189
E d o u a r d II, roi d ’A n g l e t e r r e : 113, 143
D a t h a n i- K h a t u n , p r i n c e s s e m o n g o l e : 104
E g y p t e : 46, 54, 120, 125, 138, 170, 209, 238,
D a v id ( l e r o i), personnage l é g e n d a ir e 34 261 à 264, 268, 275; - sultan : 36, 37, 44. 45,
54, 67
261, 263, 264, 265
— , e n v o y é m o n g o l : 142
E le clu s, r . : 38
— , é v ê q u e d 'A n i : 54
E le u t h è r e de Jahouk, r . : 220, 221
— . patr. d A n t i o c h e : 58, 60
Elie d e H o n g r ie , r .: 160
— d 'A s h b y , r. : 83, 101, 102 — Petit, r . : 131
— II, r o i d e G é o r g i e : 53; - I V : 55 E lis a b e th d e B o u r g o g n e - M o n t a i g u : 44
— , p r i e u r a r m é n i e n d e P a d o u e : 197 Elysée. c le r c in d ie n : 7
— P a r z a h a n a n i h a r a , r o i d e s I n d ie n s : 260 E m e ri, év. K u m u k : 252, 253
D e h i k e r k a n : 170, 175, 176, 181; - é v ê c h é et E rn cak , c h â te a u : 185 (?), 223
é v ê q u e s : 177, 182, 183 E r z e r u m : 116, 171, 193, 195, 204. 222; v o i r
D e l h i : 186; - s u lta n : 191, 192 A rzelon ien sis, S i m e o n B e c h
D e m e t r iu s , D i m i t r i , r o i d e G é o r g i e : 115 E r z in c a n : 107, 116, 204, 205
— d e T iflis , r . : 183 Esen-buqa, khan m o n g o l : 186
D en h a , c a t h o l i c o s d e s N e s t o r i e n s : 108, 110 E s k a n d er, e m p e r e u r d ’E t h i o p i e : 269
D e n y s b a r S a lib i, é v ê q u e d ’A m i d a : 11 Estokis, s e ig n e u r d e B a s k ir ie : 96
— , pa tr. d e s J a c o b i t e s : 58 E s z t e r g ò m ( a r c h e v ê q u e ) : 24, 25
— , év. T a b r i z : 112, 115, 145 E t h io p ie , É t h i o p i e n s : 5, 6. 7, 9, 36, 57, 65,
D ietrich : v o ir T h ie r r y 114, 115, 139, 170, 182, 183, 192, 256. 259,
D ja g a ta i, k h a n a t et k h a n s : 147, 152, 154, 156, 268, 269, 270, 275, 287; - - a r c h e v ê q u e : 145;
163, 164, 166, 172, 186 à 189 - e m p e r e u r : 86, 145, 172, 192, 268. 269
D o m i n i q u e , r. : 162 E tie n n e , arch. A n a z a r b e : 209
— d ' A r a g o n , r . : 60 — , c a t h o l i c o s d e s A r m é n i e n s : 53
— B a r t h é l e m y d e C a ffa , r . : 253 — d e H o n g r i e , r . : 184
— , Il io n i, m a r c h a n d : 150 — , r o i d e s I n d ie n s : 260
— M a in fro y de R o s i è r e s , a rc h . S u lta n ie h : — , arch. M a m is t r a : 208
181 — d e N a g y -V a r a d , r . : 161
— , a rc h . M a l a z g e r d : 215 — , a rch . N ik : 224
— d e N o r d r a c h , r . : 198 — O r b é lia n . arch. d e S i o u n i e : 201, 204

— , év. P é r a : 232 — P i e r r e d e S e c z h e w , év. N a k h id je v a n : 193

D o n g o la , é v ê c h é ( ? ) : 192 — , é v . S a r a i : 159, 160

D o u r g a li , év ê c h é : 252 — , a rc h . S o l g a t : 92, 159

D r u s e s : 270 — , év . T r é b i z o n d e : 233

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310 IN D E X N O M IN U M

E t s c h m ia d z in : 267 G a n d o l f o d e Sicile, r . : 270

E u d e s d e C h â te a u r o u x , l é g a t : 76, 77, 83, 142 G a u t ie r d e la C h a p e lle , év. D eh ik erk a n m


E u t h y m e , patr. g r e c d ’A n t io c h e : 100 — , év. G l a s g o w : 137

E z é c h ie l, p r é la t a r m é n i e n : 198, 199 G a y le t s o r , c o u v e n t : 217, 223


G a za ria : v o i r K h a z a r ie
G ê n e s , G ê n o i s : 42, 89, 94, 105, 114 115 ll9
120, 135, 156, 157, 158, 176, 179,’ 1 8 2 ’ 230 ’
233, 238, 239, 240, 242, 243, 247, 24s’. 257
F
266, 267; - a r c h e v ê c h é : 165, 193, 234, 239 *
G e n t i l e d e M a t e lic a , r . : 234
F a m a g o u s t e : 260; - A r m é n i e n s : 199 G e o f f r o y , év . Q u i m p e r : 137
F e r n a n d d e B u it r a g o , r . : 152 G e o r g e s V, r o i d e G é o r g i e : 54, 184; - V I I I -
F l o r e n c e ( c o n c i l e ) : 246, 265, 266, 268, 272 275
F o rru s ie n s is , é v ê c h é n o n i d e n t . : 250 — G ib e le tu s , r . : 2 5 3
F o u - t c h é o u : 124
— N o r e g h e s , év. a r m é n i e n d e C h y p r e : 199
F r a n c e ( r o i d e ) ; 54, 175, 182, 184, 257, 258, — d e R e g ib u s , év. S a v a s t o p o l i : 179
263; v o i r L o u is
— , v o i r a ussi K õ r g i s
F r a n ç o i s d 'A l e x a n d r i e , r .: 163 G é o r g i e , G é o r g i e n s : 6, 9, 10, 22, 23, 34, 35, 36,
— d ’A ssis e ( s a i n t ) : 34, 37, 38
51 à 56, 59, 65, 67, 75, 78, 81, 98. 99, 115,
— d u B o u r g , r . : 156
139, 145, 178, 183 à 186, 195, 256, 257, 258,
— d e C a m e r i n o , a rc h . V o s p r o : 231
264, 267, 275, 276, 277, 2 8 1 ,282 , 286; - r o i s :
— , év. C a v a i l l o n : 137
44, 185; v o i r C o n s t a n t in , D a v id , Demetrius,
— C in q u in i, év. T a b r i z : 177
G e o r g e s , Q w a r q w a r é , R u ss u d a n .
— d e P e t r i o l o , r . : 205
G é r a r d A lb u in i, év . Z a y t o n : 148, 151
— d e P u ig , r . : 154, 244
— de H o n g rie, r . : 27
— S p i n o la , r . : 253
— d e P r a to , r . : 85, 86, 103, 139, 143
— S s a th ru , r . : 257
G é r a u d C a lv e t , é v . D e h i k e r k a n : 172, 175, 177
— , a rc h . S u lt a n ie h ( ? ) : 181
G e r m a i n , a rc h . d e C h y p r e : 58, 60
— S u r ia n o , r . : 269, 271
G h a z a n , k h a n m o n g o l : 101, 104, 106, 120
— d e T a b r iz , év. N a k h i d j e v a n : 193, 257
G h a z n a : 186
— , év. T a n a : 245
G h izo lfi, s e ig n e u rs d e M a t r e g a : 247, 248
— d e T e r n i; r . : 244
G ib ele t, s e ig n e u r ie au L ib a n : 1 1, 47 , 48
Francon de P é r o u s e , a rch . S u lta n ie h : 132,
G illes d e R o m e , r . ; 1 0 6
139, 171 à 174, 179, 180, 184
G io v a n n in o d e Ollis, r . : 4 1
F r é d é r i c II, e m p e r e u r : 54, 75
G o d e f r o y d e B o u illo n , c h e f d e la c r o i s a d e : 7
F u g iu : v o i r F o u - t c h é o u
G o lp , m o n a s t è r e : 2 2 0 , 2 2 1 , 2 2 3
G o n s a lv e T re s ta rn a , r . : 1 6 2
G o r h i g o s : 2 1 6 ; - é v ê c h é : 2 1 6 ; v o i r Haython,
Oshin, T h a d d é e
G, G G o ss e t, c l e r c d e R u b r o u c k : 7 9 , 80
G o th s d e C r i m é e : 5, 2 1 , 30, 89, 2 3 2
Gaban, évêché : voir Jacques Goihus, év. S a v a s t o p o l i : 1 7 9
Gabriel, patr. des Coptes : 5 G r a n d e - A r m é n i e : 131, 1 3 5 , 1 7 6 , 18 0, 1 8 1 , 186,
Gaete ( é v ê q u e ) ; 214 195, 1 9 6 , 1 9 7 , 2 0 1 , 2 04 , 2 0 6 , 2 07 , 2 1 2 , 2 1 7 ,
Gahãn-Sáh, khan turkmène : 278 2 2 2 , 2 5 6 , 2 5 7 , 2 5 9 , 260, 2 6 1 , 2 6 7
Gaikhátu, Il-Khan; 104 G r a n d e - H o n g r i e : 2 6 à 3 1 , 7 7 , 1 3 9 , 1 8 7 , 188
Galaad : voir Khilat G r è c e , p r o v i n c e d o m i n i c a i n e : 1 1 7 , 1 2 8 , 130,
Gani-bàg, khan m o ng ol : 160, 161, 232 187, 2 39

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311
IN D E X N O M I N U M

G r e c s (Byzantins) : 36, 48, 49, 56, 65, 91, 92, G u re g , c h e f c o m a n : 22


119, 139, 161, 189, 196. 219, 232, 237, 240, G u y d c C o r t o n a , év. M a r a g h a : 194
247, 254 — d e L u sig n a n , r o i d A r m é n i e : 208, 213. 216.
G r é g o i r e , a rc h . cT A p a h u n iq : 220 218
— il. c a t h o l i c o s d e s A r m é n i e n s : 10; - I I I : 10. G ü y ü k , k h an m o n g o l : 68, 71, 72, 73, 75. 76,
48; - I V ( D g h â ) : 48; • V ( A b i r a d ) : 49; - V I I : 99
201, 204; - I X : 266, 267; - X : 267
— II (B a r H eb ra eu s), m a p h ria n ja c o b ite :
112; - I I I ( B a r Ç a u m a ) : 112
H
— , h i g o u m è n e russe, 60
— d e H o n g r i e , r . : 153
H a g h p a d , é v ê c h é a r m é n i e n : 204
— , év. d e L w ó w : 267
H a m a ( é m i r ) : 44
— d e S a rg iis , a m b a s s a d e u r : 216
H a - m i : 153
— S e q u ilic i, i n t e r p r è t e : 203
H a n ga , v i l l e d ' A r m é n i e : 2 1 1
— S iscu s, év. P é r a : 233
H a n g - t c h é o u ( Q u i n s a i ) : 152
— d e T h a t e v . v a r t a b e d : 185
H a r r a n , é v ê c h é : 210
G r y p h o n , r . : 271, 272
H a y t h o n , é c r i v a i n : 200, 202
G u ic h a r d d e C r é m o n e , r . : 55, 78
H e n r i d 'A p o ld a , é v . : 189
G u illa u m e , r., c o m p a g n o n d ' A n d r é d e L o n g ­
— II, r o i d e C h y p r e : 42, 200
j u m e a u : 76
— le L io n , d u c d e S a x e : 8
— A d a m , a r c h . S u l t a n i e h : 114, 115, 170, 172,
— d e M o r u n g e n , p é l e r i n : 39
175, 179, 180, 192, 205
H e r a c liu s , patr. d e J é r u s a l e m : 1 1
— B e r n a r d , r . : 113
H é r a t : 105
— B o n e t , r . : 215
H e re m u s de P a rp a io lo , év. C i m b a l o : 234
— B o u c h e r , o r f è v r e : 81 à 84, 97 H éth ou m I, r o i d ' A r m é n i e : 52, 81, 92, 99,
— C h a m p e n o i s d e T r i p o l i , r . : 44 100; - I I : 52, 200, 201, 202 ( v o i r a u s s i H a y ­
— d e C h ie r i, r . : 104, 109, 115, 134 thon)
— d e C ig iis , év. T a b r i z : 176, 182 H i é r a p o l i s , a r c h e v ê c h é : 209
— F r e n e y , a r c h . E d e s s e : 52, 142, 144 H o m s ( s u l t a n ) : 45
— . év . L y d d a : 113, 143, 144 H o n g r i e : 13, 23, 24, 27, 30, 31, 32. 54, 67, 68,
— , év. M a r a g h a : 194 88, 119, 141, 188. 273, 274; - p r o v i n c i a l : 88.
— d e M e r r y , c h e v a l i e r : 31 141; - r o i : v o i r aussi A n d r é , B e la .
— d e M o d è n e , m a r c h a n d : 164 H o r d e d ’O r : v o i r Q i p é a q
— d e M o n t f e r r a t , r . : 56, 57, 139 H r o m g l a , c h â t e a u : 9, 53, 170, 196, 197
— d e N a s s io , G ê n o i s : 153 H u g u e s le L u m i n o u r , r . : 262
— du P ré , a rc h . K h a n b a l i q : 154, 156, 244 H u g u e s P a n z i e r a d e P r a t o , r . : 96
— R o m a i n , p é n i t e n c i e r a p o s t o l i q u e : 137 H ü la g ü , I l - K h a n : 68, 83, 87. 99 à 103, 171
— d e R u b r o u c k , r . : 26, 33, 55, 78 à 84, 87, 88, H um bert de Rom ans, m a itre des D o m in i­
89, 97, 115, 126, 138, 143, 147, 150 c a in s : 66, 114, 117, 119, 125, 127, 128, 134
G u i l l a u m e S a u r a t, r . : 177, 206, 218 H y a c i n t h e ( s a i n t ) : 16
— II, a r c h . S u l t a n i e h : 173, 181
— . év. T a b r i z : 186
— d e la T o u r , p a tr. A n t i o c h e : 277
— d e T r i p o l i , r . : 42, 44, 46, 117, 118
— , év. U r g e n j : 162 I
— d e V i l l e n e u v e , é v . : 148, 149
— W a r d e n , r . : 177, 206 I a t v a g u e s : 15, 68
G u je r a t , c o n t r é e : 190, 191, 192 I b è r e s , I b é r i e : 65, 139, 171, 184, 251

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312 IND EX N O M IN U M

I g n a c e II, patr. d e s J a co b ite s; 57 à 59, 60, 61, — , év. Sivas : 176, 182
75 — , d c V a lle Aretza, év. M o n t s C a s p i e n s : 252
— arch. J é r u s a l e m : 11, 12 — Vassali, e n v o y é m o n g o l : 85, 109
lllu m in a tu s d e R ieti, r . : 37 — d e V itry , év. A c r e : 34, 41, 43
Ilio n i, fa m i l l e g é n o is e : v o i r D o m in iq u e Jaffa, c o u v e n t : 38
In d e , I n d i e n s : 39, 65. 114, 115, 139, 146, 148, Jahouk, c o u v e n t : 223
149, 151, 152, 156, 172, 182, 190, 191, 192, J a m c a i: v o ir Yan g-tch éou
195, 259, 260, 269, 271, 272, 275; - r o i c h r é ­ Jean, arch. i n d ie n : 7
tien : 260, 269 — , r. a r m é n i e n : 211
Isâ, d i g n i t a i r e c h r é t ie n au S e rv ice m o n g o l : — , c le r c a r m é n ie n , « c h a p e l a i n » d e S a r t a q :
85, 102 77, 78, 88
Isaac II 1’A n g e , e m p e r e u r d e B y z a n c e : 248 — , patr. d ’A l e x a n d r i e : 16
Is a ie N c e c i, v a r t a b e d : 201, 202, 217, 218 — , arch. A p a h u n iq ( ? ) : 220
I s n a r d , r é g e n t du c o l l è g e d ’A v ig n o n : 137 — d e B o n a s t r o , r . : 105
I s o l le P isan : v o i r Z o l o — d e C a la b r e , r . : 269
iS o y a b h , a rc h . N is ib e : 59, 60, 75 — d e C a r c a s s o n n e , r . : 76
I t a l ie n s ( m a r c h a n d s ) : 93, 94, 97, 239; v o i r — C le n k o k , p é n i t e n c i e r a p o s t o l i q u e : 137
a u ssi G ê n e s , Pise, V e n is e — d e C o ri, a rch . S u l t a n i e h : 134, 174, 180,
I w a n é , b a r o n g é o r g i e n : 54 181, 194
— D a v id d e Z o r z o r , a rc h . E d e s s e : 198, 209,
212, 220
— , e m p e r e u r d es É th io p ie n s (?) : 268
— d e F lo r e n c e , év. T i f l i s : 180, 184, 185, 186,
218, 222
— d e F r a n c e , év. T a b r i z : 136
— d e Gallo, r . : 133
— , d e G a ille fo n ta in e, év. N a k h id je v a n : 193,
J a c o b ite s alias S yrie n s : 5, 10, 11, 35, 36, 48, 221
57, 58. 65, 112, 118, 119, 139, 189, 195, 196, — Gibeleti. év. K u m u k : 252, 253
271; - m a p h r ia n : 177, 195 ( v o i r Jean, G r é ­ — . m a p h ria n d es J a c o b ite s : 59
g o ir e , S a lib a ); p a t r i a r c h e : 145, 182 ( v o i r — , patr. des J a c o b ites : 58
A th an ase, Denys, Ig n a c e ) — d e J o in ville : 40
J acqu es d'A rles-sur-T ech , r.: 111, 113 — K a d o r , r . : 206
— , II, c a t h o lic o s d es A r m é n i e n s : 207, 210, — , arch. K h i l a t : 221
211, 213, 215, 224 — d e L e o m in s te r , r . : 181
— d e C a m e r in o , r . : 184, 203 — d e L u m b e l lo , arch. S u lta n ie h : 174, 181
— C a m p o r a , év. C a ffa : 240 — , év. M aieria : 250
— d e F lo r e n c e , év. Z a y to n : 152, 154, 242 — d e M a n d e v ille , v o y a g e u r : 150, 295
— , év. G a b a n : 203 — d e M a r ig n o lli. r . : 132, 136, 139, 153, 154,
— d e G o lp , v a r t a b e d : 223 163, 164, 192
— d 'Ir la n d e , r . : 191 — X, patr. d e s M a r o n i t e s : 270
— d e la M a r c h e (s ain t), r . : 133, 134 — , év. M e d z q a r : 213, 214, 224
— d e N ic o s ie , év. S ivas : 176 d e M o n t e c o r v i n o , arch. K h a n b a l i q : 52, 53,
— d e P is to ie , r . : 161 56, 86, 103, 109, 112 à 115, 132, 145 à 154,
— d e P o n t e c o r v o , év. L u cu ce n sis : 249, 251 165, 192
— d e s P r im a d iz i, r . : 265, 266, 267, 268, 273 — . év. N a k h id j e v a n : 193, 224
— , év. Q u il o n ; 192 — d e P la n c a r p in , r . : 59, 70 à 73, 78, 88, 99,
— d c R ussan, r . : 44, 55 138

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INDEX NOMINUM 313

— d e P o lo g n e (lc Pctit), r . : 135. 274 Jourdain Cathala d e Séverac, év. Q u ilon :


— P o n h y er, arch. Tarsc : 207 151, 177, 180, 190, 191, 192, 195
— d e Qrnay, r . : 217, 218, 219, 220 Julien de H on g rie, r . : 21, 26 à 30, 67, 71
— d e R ouen, év. T a b r iz : 177
— d e Sainte-Agathe, r . : 85
— , év. S a m a r k a n d : 189 K
— d e S a u lo, arch. Solgat : 235
— , év. S a v a s t o p o l i : 179 K ai-Kaw üs, sultan de T u r q u ie : 43
— S p e cu li, év. M a ie ria ; 250 K a it a k : 129, 247, 252, 254, 255
— d e S t a n fo r d , r . : 70 K alojean, tsar des B u lg a res : 3, 49
— III, arch. S u lt a n ie h : 155, 156, 181, 182, K a m ie n ie c , é v ê c h é a r m é n ie n : 266, 267
193, 195, 221, 245, 256 à 259, 261 a l-Kam il, sultan d ’E g y p te : 36, 37
— d e T a b r iz , év. N a k h id je v a n et C affa : 222 Kàpàk, khan m o n g o l : 163, 186, 187
— , év. T a b r i z : 136 K a rak iliss é : v o ir M aku
— , arch. T a r s e : 207 K a r a k o r u m : 80, 81, 82, 84, 85
— , « roi des T a r t a r e s » : 157 K a rap et, r. a r m é n ie n : 179
— , év. V a h rn a rte n s is : 224 — , laic a rm é n ie n : 202
— , év . V a r n a : 236 — , c a th o lic o s de Sis : 267
— Vassali, e n v o y é m o n g o l : 85, 109 Karasu, c o u v e n t : 94, 160, 237
— V a ta tz ès , e m p e r e u r d e N i c é e : 84 a l-Karbalâi, m a r c h a n d : 93
— d e V od eyo. év. P a g r o p o l i : 234 K a rich in u s , i n t e r p r è te : 90
— d e W i n t e r t h u r , c h r o n i q u e u r : 189, 289 K a rn i, é v ê c h é a r m é n ie n : 204
— d e Z iq u ie , a rch . M a t r e g a : 135, 246 à 252, K a r o c h , d o m in u s Asiae : 221
256 Kars, é v ê c h é a r m é n ie n : 204
— d e Z o r z o r , t h é o l o g i e n : 204, 205, 217 K a y s e r i : 116; - a r c h . : 213
J e a n - B a p t is t e d e Jnsula, arch. M a k u : 206 K e r a it ( T u r c s ) : 75, 125
J é r é m i e I, patr. d e s M a r o n i t e s : 47; - I I : 48 K e r a k (sultan d e ) : 45
J e r e ta n n y , c h e f d e s G r a n d s - H o n g r o is : 188 K e r l e y , p r in c es se m o n g o l e : 157
Jérôm e de C a t a lo g n e , év. C affa : 136, 149, K h a n b a liq , a r c h é v ê c h é et a r c h e v ê q u e : 85,
157, 158, 159, 165, 169, 203, 231 147 à 156, 158, 163 à 166, 169, 172, 173, 182,
— , a rc h . M a k u : 206, 261 186, 191, 230, 232, 234, 242, 244
— P a n is sa ri, év. C a f fa : 261 K h a z a r ie , c u s t o d ie : 89, 95, 129, 242, 243 ( v o i r
J é r u s a le m : 5, 6, 9, 38, 44, 45, 56, 75, 103, 108, aussi Ladislas, Q ip c a q )
128, 263, 264, 265, 268, 269, 271, 272; - arch. K h a z a r s : 21, 30, 65, 139
des A rm é n ie n s : 197, 198, 201, 202; - d e s K h e r s o n , a r c h e v ê c h é : 183, 231, 232, 239
N e s t o r i e n s : 75; - patr. g r e c : 272; - patr. K h ila t, a r c h e v ê c h é : 181, 220, 221

l a t i n : 42, 53, 99, 103, 196, 208, 215, 265 K h w a r e z m , K h w a r e z m i e n s : 54, 75, 187, 188
(v o ir Aym ar, Thom as A g n i); - couvent K i e v : 15, 16, 22, 23, 67, 71, 88, 124, 243

é t h i o p i e n : 268, 270; - c o u v e n t du M o n t- K it b u q a , c h e f m o n g o l : 100

S io n : 209, 263, 269; - S a i n t - S é p u l c r e : 55, K o n k a n , c o n t r é e : 192

56, 259, 263 ( v o i r aussi L ie u x -S a in t s ). K o n y a : - a r c h e v ê q u e a r m é n i e n : 211, 213; -

Job, a rc h . M a k u : 206 sultan : v o i r T u r q u ie

J o h a n c a , r . : 96 K õ r g is , r o i d e s O n g ü t : 146, 147

J o h n : v o i r Jean K o u b a n , c o n t r é e : 246, 247, 248, 250, 251

Jonas, c h e f c o m a n : 31 K o u r ji, e n v o y é m o n g o l : 105

J o r d a n d e S a x e , m a i t r e d e s D o m i n i c a i n s : 66 K u m u k , c o u v e n t e t é v ê c h é : 243, 247, 251,

Joseph de G ra n d e-A rm én ie , év. C im b a lo : 252, 253, 255


K u r d e s , K u r d i s t a n : 107, 177, 182, 256
235

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314 INDEX NOM INUM

L Magar, Mager, Maieria, couvent : 243, 251,


252
Ladislas, c u s to d e de K h a z a r ie : 88, 89, 90, 91 Maku, archevêché et résidence franciscainc .
L a n c e r n y : v o i r Lin-Tsin 116, 171, 206, 218, 219, 223; voir Bcrtuc^
L a q u e d iv e s (ile s ) : 170 cius, Jean-Baptiste, Jérôme, Job, Pierre de
Latins ca p tifs des M u su lm an s : 39, 40, 41, 43, Ellegnis, Zacharie et Saint-Thaddée.
61, 107, 261, 262; - d é p o r t é s ch ez les M o n ­ Malabar, contrée : 191, 192
g o ls : 77 à 81, 83, 139; - au se rv ic e m o n g o l : Malachie de Crimée, vartabed : 222, 223
83. 84, 104, 105, 124, 150 Malazgerd, arc h e v ê q u e : 135; v o ir Domini-
L a tra n III ( c o n c i l e ) : 11, 238; - I V : 47, 58, 59 que, Nersès
L a tt a k ié : 99, 100 Malghayti, peuple d ’Asie centrale : 187, 188
L a u ren t, r . : 89 Mamelüks : 97, 100, 101, 103, 106, 116, 197,
— d ’A n côn e, r . : 163 200, 212, 216, 261, 262, 263
— , év. Monts Caspiens : 252 Mamistra (Misis) : 49, 50, 207 208, 209, 221
d e P o rtu ga l, p é n it e n c ie r a p o s t o l i q u e : 58, Mamucci, c o u v e n t : 243, 251, 252
60, 61, 70 Manasserius, r . : 40
L a za re, év. T a r k i : 250 M a n ic h é e n s : 125
L éon II, roi d A r m é n ie : 19, 49, 50, 53; - I V : Mappa (Anapa?), é vêch é : 243, 250
200; - V : 205, 207, 208, 212; - V I : 216 Mansel, év. Tortose : 116, 143, 144
L é o n a rd Samuel, prètre arménien : 199 Maragha, couvent et é v ê c h é : 111, 170, 171,
Lic os to m o , évê ch é : 236, 237 175 à 178, 194, 223; évèqu es : 181, 183 (voir
Lieux-Saints : 6, 19, 56, 108, 183, 261, 263, 264, aussi Barthélem y)
265, 267, 268, 270, 286 Mar Barçauma, m onastère : 10, 11
Lim assol (é v ê q u e d e ) : 215 Marc, envoyé m o n g o l : 142
Lin-tsin ( L a n c e r n y ) : 152, 155 — de Péra, év. Salmastro : 236
Lithuanie, L ith u a n ie n s : 15, 68, 88, 141, 274 M a r d i n : 38
L iv o n ie : 13, 14, 141 M arguerite de Provence, reine de France : 79
Locici, siège d'un évêché ( ? ): 249, 251 Marie Paléologue, épouse d'A baqa : 102
Louis I X ( s a i n t ) : 40, 73, 74, 76, 78 à 80 M ar Matta, m onastère : 10, 112
— de B o lo g n e ( L o d o v ic o S e v e r i ) : 274 à 278 M aroc : 138, 141; - sultan : 44
— Gom ez, év. Nakhidjevan : 193 Maronites : 5, 9, 11, 35, 36, 47, 56, 58, 65, 112,
— de S o le ro d ’Asti, r . : 206 270, 271, 272, 275
— , év. T re b iz o n d e : 233, 234 Martin d ’Aragon, r . : 263
— , év. Vicina : 236 — , arch. Edesse : 21 1, 220
Luc I, patr. des M aronites : 47 Russus, év. M onts Caspiens : 252
Lucas de B o z o lo de Pise, r . : 133 Stephani, arch. S éleucie : 209
L w ò w : 246, 274; - c o u v e n t: 129, 131, 273; - — Zaccaria, G ênois : 179
é vê c h é arm énien : 92, 266, 267 Mathieu de Chieti, r.: 104, 109, 115, 134
Lyon I ( c o n c i l e ) : 45, 59, 67, 68, 70; * I I : 46, — Escandel, r . : 286
100, 101, 106 — de Pon trem oli, év. Tana : 245
év. Tana : 245
— , év. T ré b izo n d e : 233
— , év. U r g e n j : 162
M a tr e g a : 22, 27, 89, 230, 247, 248. 255; •
M arch evêch é : 241, 242, 243, 246 à 255
M ayen ce (a rch e vê q u e de) : 49
M ad elein e, reine des Indiens : 260
M ekh itar d ’Abaran, r.: 171, 222, 223, 224
Madjari, é v é c h é ( Maieria ) : 250 , cath olicos des Arm én ien s : 213, 214, 215

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INDEX NOM INUM 315

— d e Dashir, v a r t a b e d : 52 — Balientz, arch M a la zg erd : 198, 210 à 213,


M e lk it e s ( a n c i e n n e d é n o m in a t i o n : S y r i e n s ) : 215, 217, 219, 221, 224
5, 9, 35. 36. 51, 58. 59. 65, 139, 187. 188, 272 — d e G rag g a : 214
M e m b r o k , c h e f c o m a n : 24 — d e L a m p r o n : 49, 50, 61, 213
M e rid io n a le s partes : 114, 134, 174 Nersès, le Grand, patr. des A r m é n i e n s : 48
M e s c h e d : 188 N estoriens, C h a ld é e n s : 5, 6. 9, 35, 51, 57. 58,
M ich a h a , é v ê c h é ( M u k h a k ? ) : 252 65, 81, 82. 83, 108 à 112. 118, 119, 125, 149,
M ic h e l d e M o n te c u c ito , r . : 258 150, 165, 166, 177, 190. 195. 196. 254. 272,
— le S y r ie n , patr. des Ja cob ite s : 11 275; - c a t h o l ic o s : 56, 57, 99, 177 (vo ir
— d e V e n is e , r . : 191 Denha, Y ãh ballahà)
M ilc o v , é v ê c h é : 25, 274 N ic o d è m e , a b b é é th io p ie n : 268, 269
M ille n u s , c h e f alain : 231 Nicolas, év. 1’Aias : 208, 224
M ille s t o r c e , c o n t r é e : 152, 162 — , patr. A le x a n d r ie : 34, 40. 58
M in d a u g a s, p r i n c e lith u a n ie n : 15, 68 — , cle r c : 90
M in g, d y n a s t ie c h in o is e : 155 — de Banzia, é v . : 148
M i n g r é lie n s : 237, 238 — B onet, r . : 139, 164
M ir a m a r , c o u v e n t : 119, 127 — de Caffa, év. P h o u l l o i : 240
M i s i s : v o i r M a m is t r a — , év. C im b a lo : 234
M is se rq u is : v o i r A m i r Sarkis — de Ferrare, r . : 266
M o is e , r . : 90 — , arch. K h a n b a liq : 152, 154, 163
— G ib le t, a r c h i d i a c r e d A n tio c h e : 272 — de M olano, r . : 136, 153

M o l d a v i e : 285 — de M o n te c o r v in o , r . : 262

M o le p h a ta n i, p e u p le d e s In d e s : 192 — de Neuenburg, év. M a ieria : 250

M o n a l d o d 'A n c ô n e , r . : 205 — Passeck. év. S a v a s t o p o l i : 179

M o n c a s t r o : 95, 230, 237; - é v ê c h é : 236 — de Pistoie, r . : 114, 145, 146

M õ n g k á , khan m o n g o l : 68, 74, 76, 79 à 82, 84, — Steynacker, év. Varna : 236
— de Troja. év. Tana : 245
92, 99, 108
— dc Vicence, r . : 84
M õ n g k à - T e m ü r , khan m o n g o l : 93
N ic o lo de' Conti, v o y a g eu r : 286, 292
M o n t a g n e N o ir e , c e n t r e m o n a s t iq u e : 10, 36,
N icop olis, a r c h e v ê c h é : 198
197
— , crois ad e de : 258
M o r a v i e : 13
Nicosie, c o u v e n t : 128; - a r c h e v ê q u e : 199,
M o r d v e s : 27, 28, 93
215, 239; - m onastère é th io p ie n : 270
M o s s o u l : 1 10, 112, 256; - M o s s o u l it a in s : 65,
Nik, a rc h ev êc h é : 224
139, 142; - v o i r aussi Jacob ites (m a p h r ia n )
N isibe : v o ir Isoyabh
M u k h a k h : v o i r M ich a h a
Nogai, ch e f m o n g o l : 88, 90, 91
M y tilèn e , a r c h e v ê c h é : 193
Noravan k, é v ê c h é a rm énien : 204
N o r v è g e : 109
N o s a i r i s : 34, 36
N Nubie, N ubiens : 5. 36, 65, 114, 139 ( v o i r Don-
gola )
N a k h id je va n : 78. 185. 192, 193, 221; - é v ê c h é
et é v ê q u e : 181, 183, 192, 193, 204, 221 à
223, 261, 286
o, õ
N arjot de T o u c y , c h e v a lie r : 31
N a sca rin i. c h r é tie n s d es In d e s : 192
O berto de Pasam orte. marchand de Plai-
N aza re th : 263
s a n c e : 94
N e h ron ( é v ê q u e d e ) : 216
Oddoinus, év. A n e n o m e n s is : 193
Nersès, r. a r m é n ie n : 266

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IN D E X N O M I N U M
316

O d o r i c d e P o r d e n o n e , r .: 132, 151, 191, 295 - E u g è n e I I I : 48; - I V : 134 253 ,


27 0.271 - « A 265, 268
O g h u l-Q aím is, r é g e n t e m o n g o l e : 76
Õ g ò d à i, kh an m o n g o l : 68, 69, 87 - G r é g o i r e I X : 23, 24, 25, 39, 40 4| 44 An

O írat, trib u m o n g o l e : 106 51, 55. 57, 58, 68, 84, 91, 124 141- x i

Olgaitü , khan m o n g o l : 104, 120, 143 84, 85, 102, 124; - X I : 124. 131 ’ l 33

O liv ie r de Paderbon , éc o lâ tre de C o l o g n e : 136, 181, 193, 194, 222, 223, 263; - X l l ’- 2S«’
274 ’
34, 35, 36
O lo n -S ü m e , r é s i d e n c e d e s Õ n g ü t : 147 - H o n o r i u s I I I : 50, 51, 54, 55, 79, 141
O m o d e i , arch. T a r s e : 207 - I n n o c e n t I I I : 33, 37, 39, 40, 43, 49 50 51
Õngü t, p e u p le turc : 75, 106, 108, 146, 147 53, 59, 270; - I V : 31, 45,48, 52, 58, 59,60 65

( v o i r K ó r g is , Sa ra) 66, 68, 70, 71, 77, 127, 134, 140, 142; - VI -

O rgen íz, v i l l e n o n i d e n t . : 254 133, 173, 198, 205, 220, 241, 242, 258

O rie n ta lis p ro v ín c ia , O rie n ta le s p a rte s : 20, - Jean X X I : 85; - X X I I : 106, 134, 152. 158

114, 129, 134, 266, 268, 270, 271, 275, 290 166, 173, 174, 175, 176, 179, 180, 182, 183,

O rie n ta lis (vic a irie de T a rta rie): 128, 129, 187, 188, 191, 194, 195, 196, 201. 202. 204,

130, 170, 184, 2 3 7 , 258 205, 207, 208, 210, 218, 231. 239. 258, 259,

O rn a ch , O rn a m , v il le ( U r g e n j ? ) : 21. 22 262; - X X I I I : 155, 274

O r t a ( d e l i ’), s e ig n e u r s g ê n o is d e C a ffa : 248 - L u c iu s I I I : 39, 48

O r t o l f d ’A lz e n b r u c k , arch. A p a m é e : 221 - M a r t i n V : 193, 194, 238

Oshin, r o i d ’A r m é n i e : 52, 201, 202, 203 - N i c o l a s I I I : 32, 41, 85. 86, 88. 103, 141, 143,

— , c o m t e d c G o r g h i g o s : 208 144; - I V : 52, 55, 86, 103, 104, 105, 112, 115,
O t t o m a n s ( T u r c s ) : 275, 276, 277, 285, 292 134, 145, 238; - V : 246, 275

O tto n , r. h o n g r o i s : 27, 28 - Pa u l I I : 271


O x f o r d ( U n i v e r s i t é ) : 127 - P ie I I : 275 à 278
Ô z b à g , k h an m o n g o l : 69, 93, 157, 158, 160, - S ix t e I V : 240, 269, 271

161 - U r b a in I V : 32, 43, 52, 68, 100, 101,103, 142;


- V: 135, 138, 173, 174, 208, 216, 220, 239,
240, 245
P a p h o s ( é v ê q u e d e ) : 214, 215
P a c ò m e , a rch . d 'A m a s é e : 240 P a q u e t t e d e M e t z : 81
P a d o u e , p é l e r i n a g e : 260 P a r is ( U n i v e r s i t é ) : 119, 127
P a g r o p o l i , é v ê c h é : 234, 237 P a s c a l d e V i t o r i a , r . : 128, 162, 163, 164
P a k a r a n , é v ê c h é a r m é n i e n : 204 P a t r a s ( a r c h e v ê q u e d e ) : 239
P a p es : P a u l l cr, c a t h o l i c o s d e s A r m é n ie n s : 216
- A l e x a n d r e I I I : 33, 46; - I V : 46. 99, 127; - - d e B e n t i v o g l i o , g é n é r a l d e s Basiliens : 199
V I : 282 - d e B o r g o - S a n - S e p o l c r o , r . : 244
- B e n o i t X I : 111; - X I I I : 126, 153, 197, 207, — , p r i e u r d e s E t h i o p i e n s d e N ic o s ie : 270
209, 2 1 1, 212, 220, 256, 259; - X I I I : 129, 258 — , r. é t h i o p i e n : 275
B o n i f a c e V I I I : 106, 113, 116, 132, 143, 197, - Francisci, év. S a v a s t o p o l i : 179
202, 261; - I X : 129, 133, 193, 199, 252, 254, — , é v . S a r a i : 92, 152
256 a 259 — , év . S i m i s s o : 189, 235
- C a l i x t e I I I : 269, 275, 277, 278 P é k in : v o ir K h a n b a liq
- C lém en t I I I : 49; - I V : 105, 114, 134; - V : P é l a g e , lé g a t p o n t i f i c a i : 34, 37, 53
148, 149, 155, 165, 166, 194, 197, 199, 200, P é r a , v i l l e e t c o u v e n t s : 128 à 131, 133. 1 ■
202, 259; - V I : 133, 173, 176, 181, 198, 201, 138, 158, 171, 172, 174, 185, 195, 239, 25 ■
207, 209, 210, 214, 215, 220, 221, 223, 246, 257, 258, 273; - é v ê q u e a r m é n i e n : 200, 2 ■

248, 259, 263, 274; - V I I : 181, 185, 252, 258, 266, 267; - é v ê q u e latin : 232, 233,
264 P e r e g r i n o d e C a s t e llo , év. Z a y t o n : 148, -

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INDEX NOMINDM 317

P e r s e : 133. 170, 176, 189. 275; - Il-Khans. puis


naire), khanat et khans : 69. 87. 89 a 98
khans, m o n g o ls : 68. 69, 87, 98 a 108 114
101, 107, 120, 125. 126. 141. 153. 156 a 162,
116. 120, 172, 247
165, 172, 187, 244, 249. 273, 274; - A rm e
Petroska , é v ê c h é a r m é n ie n : 205
niens du -: 196, 201
P h ilip p e d e F erm o. légat p o n tifica i 88, 141
Q irqy er. co u ven t : 89. 90. 95
— de In c o n tris , r . : 133
Qrnay. co u v en t : 178. 185. 217 a 220. 223
p r ie u r d e Jéru sa lem : 46, 56, 57, 67, 126 Qubilai, khan des M o n g o ls 84, 85, 86, 102.
P i e r r e d ’Adria, arch. M a m is tr a : 208
124. 145. 146
A k h e i o v i c , « a r c h e v ê q u e de R u s s ie » : 67 Q uilon : 287, 291; - é v ê c h é : 183. 191. 192
— d 'A r a g o n , r . : 223
Quinsay : v o ir H ang-tchéou
— I, roi d e C h y p r e : 216, 264
Qutlugh-Shàh, c h e f m o n g o l : 106
— d e E lle g n is , arch. M a k u : 206
Q w a r q w a r é II, roi g é o r g ie n : 278
— F e rra riiis , r . : 270
— d e F l o r e n c e , é v . : 149, 157
— G e ra ld i, év. S a v a s t o p o l i : 178, 182
— d e G r a n d e - A r m é n i e , r . : 199 R
— , a r c h e v ê q u e a r m é n i e n d e Jéru salem : 197
— d e L o m b e r t z , év. A stra kh an : 246 Ragès de M é d ie : v o ir Edesse
— d e L u c a l o n g o , ou d e Luca L o n g o , mar- Rascie, r o y a u m e : 185
c h a n d : 145, 147, 150, 151 R a y m o n d Etienne, r . : 114, 170, 192, 202. 207
— . patr. d e s M a r o n i t e s : 271 — Lull, r.: 42, 119, 120, 126, 136
— M a r t e l, r . : 163 — Raphi, r . : 163
— le Petit, r . : 156 R e n i e r Balian d A rm é n ie, r. a r m é n ie n : 214
— R o m b u l o , I ta lie n d ’E t h io p i e : 269, 271, 287 — Constansa, p r è tr e a r m e n ie n : 207
— T h o m a s (s a in t), lég a t du p a p e : 196 Riazan : 27, 28
— d e T u rre , r . : 184, 203 Richard, i n t e r p r è t e : 100, 104, 105
Pisans : 158 ( v o i r Z o l o ) — d 'A n g le te r re . év. K h e r s o n : 231, 232
Pise ( c o n c i l e d e ) : 258 — d c B o u r g o g n e , év. A lm a lig h : 162, 163
P is p e k (auj. F r u n z e ) : 92, 164 — d e Cluny, é c r iv a in : 7
P la n c a r p in : v o i r Jean. — M a cie r, r . : 184
P o l o ( M a f f e o , M a r c o et N i c o l ò ) : 84, 86, 105, R i c o l d o d e M o n t e c r o c e , r . : 46, 48, 107, 110 à
124, 125, 134, 145, 186 113, 118, 119, 126, 138
P o l o g n e : 13, 14, 68, 89, 246, 266, 267, 273, 274, R i g a : 13, 14, 15

276, 278, 285 R o b e r t d Anjou, ro i d e S ic ile ( N a p l e s ) : 152,

Pons, r . : 151 263

— , a rch . S é l e u c i e : 177, 209, 218 — H y n tle s h a m , év. S a v a s t o p o l i : 179

P o r s ic o , c o u v e n t ; 170, 171 — de Rip alta, m a r c h a n d italien : 94, 162

P r é m o n t r é s : 16, 124 — d e San V a le n t in o , r . : 199

P r è t r e Jean, s o u v e r a i n l é g e n d a i r e : 6, 7, 16, R o g e r d ’A n g le t e r r e , r . : 244, 253


— B a c o n , é c r iv a in : 80, 127
34, 259, 276
P ru ss e : 13, 14, 20, 119, 141 — H e r i e t s h a m , r . : 124
R o m a g y r is , s iè g e d u n c a t h o lic o s : 188
R o m a n ie , p ro v in ce fr a n c is c a in e et re s s o r t
d i n q u i s i t i o n : 128, 133
Rom e, u n iv e rs ité : 119; - p é l e r i n a g e : 259,
Q
260, 286
R o s t a i n g C la p ie r , év. T a b r i z : 177
Q a id u , k h a n m o n g o l : 86, 145, 172, 187
Q ip c a q ou H orde d 'O r (T a r ta r ie A q u il o - R u b r o u c k : v o i r G u illa u m e .

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318 IN D E X N O M I N U M

Russes, Russie, R u th è n e s : 6, 15, 16, 22, 23, S e lm a s : 107. 115, 170, 175. 177, 206, 219.
25, 29, 30, 36, 59. 60, 61, 65, 67, 68, 71, 75. S e m p a d , c o n n é t a b l e d 'A r m é n ie : 49 7 (,
78, 81, 88, 96, 139, 160, 161, 237, 238, 243; - S e r b i e ( c o m t c s s e d e ) : 135
couvents d o m in ic a in s : 131; - vicairie fran- S e r g e (S a r k is ), m o i n e a r m é n ie n : 81. 84 92
ciscaine : 129, 130, 137, 254, 258 (le m o i n e ) , p e r s o n n a g e légendaire • 82
Russudan, reine de G é orgie : 54, 55 84,92 ’ '
— , e n v o y é m o n g o l : 73
— d 'A p r a k o u n ik , v a r t a b e d : 222, 223
— , a rch e v ê q u e arm énien, puis patr. de Jéru­
- s salem : 201
— de Sis, c h a n c e lie r d ’Arm énie : 203
Sabadin, e n v o yé m o n g o l : 105, 110 — , v a rta b ed : 266
Sahap, ville d 'A rm én ie : 211 Seth d 'A rm én ie, vartab ed : 223
Saint-Thaddée, m o n a s t è r e : 175, 204, 205, Setzulet, c o n t r é e : 254
206, 221, 261; - a r c h e v ê q u e : 193, 195, 212 Shahinsháh, b a ro n g é o rgie n : 55
( v o i r aussi M ak u ); v o ir Zacharie S h em a kh a (A z e r b e ija n ) : 251, 255
Saliba, m aphrian des Jacobites : 58 Siam : 286
— , m arch and d ’Acre : 58 S ib é rie : 96
— , p éle rin indien : 259 Sicile (r o i d e) : 77, 101; v o ir R obert
S alim b ene, c h r o n i q u e u r : 85 Sidon, c o u v e n t : 38
Salmastro, ville et é vê c h é : 116, 219, 234, 236, Sigism ond, roi d e H o n g rie : 274
237, 246 S im é o n Bech, év. E rze ro u m : 210
S alo m o n , c h rétien nestorien : 105, 108 — R a b b a n -a ta , d i g n i t a i r e c h a l d é e n : 59, 71,
S am a rk an d : 73, 93, 186; - é v ê c h é : 183, 187, 74, 75
188, 189 ( v o i r T h o m a s M ancasola) Simisso, c o u v e n t et é v ê c h é : 171, 189, 230,
S anche d e Boleyna, r . : 113 235. 236, 237
Sara A ra u ’ul, princesse õ n g ü t : 106, 146 S im on d e Saint-Quentin, r.: 51, 55, 72, 73,
S a r a i : 90, 91, 92 à 97, 128, 156 à 162, 188, 189, 108
243; - a r c h e v ê c h é : 159, 165, 241 à 246, 255 — , Semeonis, v o y a g e u r : 262
( v o i r C o s m e ); - c u s to d ie : 129, 241, 243, S i n a i : 264, 272
246, 254; - é v ê q u e s grecs et arm én ie n s : S in o p e : 89, 230, 237, 239
v o ir Etienne, Paul, T h é o g n o s te S ira -o rd o : 73, 80
Saraicik : 93, 163 Sis : 170, 177, 211, 223; - a r c h e v ê q u e : 49, 212,
Sardenay, sanctuaire : 36 213; - c o u v e n t : 213; - syn od es et conciles:
S a r k i s : v o ir S erge 50, 62, 201, 213, 216, 233, 266
S arm ates ( t e r r e d e s ) : v o i r Astrakhan S is ia n : 71, 73
Sartaq, p rin c e m o n g o l : 77 à 81, 87, 88 S iv a s : 110, 115, 116, 128, 145, 176, 183, 223; -
S avasto p oli, é v ê c h é : 178, 179, 182, 183, 184, a r c h e v ê q u e ; 213
230, 232, 238, 239 S m y r n e : 232, 358; - a r c h e v ê c h é : 235; - évê­
Saxi ou Saqsin : 21, 29 c h é : 174, 179, 182, 185
Scacatai, c h e f m o n g o l : 79 Societas P e reg rin a n tiu m : 129 à 132, 172, 173,
S c h ilt b e r g e r (Johann), v o y a g e u r : 207, 222, 174, 180, 181, 187, 220, 222, 239, 261
223, 240, 246, 254 S o c o t o r a : 6, 114, 170, 190
S cy th es : 139 S ô f â l a : 190
S éb a s te d e Palestine (?), é v ê c h é : 176; - v o ir S o g d i e n s : 188
Sivas S olagay, p r in c e g é o r g i e n : 184
S é le u c ie (S e le fk é ), a r c h e v ê c h é : 209 (v o ir S o ld a y a ( S o g d a í a ) : 30, 88, 89, 90, 93, 94, 160,
P on s) 230, 235 à 240, 246

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INDEX NO M INUM 319

S o lg a t : 89, 90. 95. 156, 160, 230, 237; • arche- T e m ü r , khan m o n g o l : 146
v ê q u e s : 91, 159, 235 ( v o i r A rakiel, E tie n n e ) T e n d u c , c o n t r é e : 146, 147
S o ro n iu s , p r i n c e c o m a n : 31 T e r r e Sainte, p r o v i n c e d o m in ic a in e : 78. 117.
Sou/dal (d u c d e ) : 27, 28, 31 203, 215, 224, 239, 258. 265; - v ic a i r ie fran-
S p ir it u e ls : 176, 180, 206, 258 c i s c a i n e : 52. 115, 128. 224. 264
S ud eiisis, siè g e r c le v a n t dc S u lla n ieh ( ? ) : 182 T e u t o n i q u e s : 14, 15
S u ffr e d in , m c d e c i n : 105 T h a d d é e , év. C affa et G o rh ig o s : 158, 159.
S u lta n ie h : 175, 182, 223; - a r c h e v è c h é s et 165, 198, 208, 218, 224, 234
arch evèqu es: 169 à 183, 186, 190, 192 à Th àn a (m a r t y r s d e ) : 151, 183, 190. 191
195, 212, 230, 232, 244, 256, 261; - c o u v e n ts : T h é o d o r e , év. d A l a n i e : 149, 231
170, 195 — , patr. c o p t e : 40
Suse ( a r c h e v ê q u e d e ) : 16 — , r. é th io p ie n : 275
Syba, é v ê c h é : 249, 251 — , arch. S é leu cie : 209
S y r ie : 57, 99, 100, 120; - v o i r T e r r e Sainte — , v o ir aussi T h o r o s
S y r ie n s : v o i r M e lk it e s , Jacob ites (le n o m de T h e o d o r o ( M a n g u p ) : 89, 232
S y r ie n s e n t r e en u sage à la p la ce d e ce T h é o d u le , a v e n t u r ie r : 83
d e r n i e r t e r m e au c o u r s du X I V ' - siè cle) T h é o g n o s te , év. S a r a i : 91
T h éo ria n o s, th e o lo g ie n : 213
Th ess a lo n iq u e : 171 ( v o i r A n to in e )
T Theya, localité non i d e n t . : 206
T h ierry . év. des C om a n s : 24, 25
T a b r iz : 71, 78, 98, 107, 112, 115, 116, 145, 170, — de N yem . éc riva in : 284
171, 175, 176, 177, 186, 223, 276; - c o u v en t Thodotelia, princesse m o n g o l e : 167
fra n cis ca in , c u s t o d ie et v i c a i r i e : 129, 171, Thogay, c h e f alain : 153
184, 194, 195; - é v é c h é et é v ê q u e : 180 à T h o m a s (t o m b e a u dc 1 'a p ô t r e ): 39, 190
183, 193; - p r ie u r d o m in ic a in : 147 — , é v . : 149

Tai-düla, p r in c e s s e m o n g o l e : 160 — d'Abaran, arch. Sultanieh : 222

Tà k ü d á r, Il-K h a n : 102, 107 — , m é t r o p o li t e d Abyssinie : 57

T a l a s : 77, 81 — Agni de Len tino, patr. J éru sa lem : 52, 83,

Talika , khan m o n g o l : 187 100, 101


T a m e r l a n : 129, 182, 189, 229, 245. 253, 256, — d ’Aquin ( s a i n t ) : 12, 117, 218
— , év. a rm é n ie n d ltalie : 198
257, 258
la T a n a : 93. 94. 95, 135, 161, 162. 165, 189, — d e Birago, év. S y b e n s is : 249, 251

193, 230, 232, 234, 238, 243. 244, 245, 249, — d ’E thiopie, p é lerin : 259
— de H o n g rie, c h e v a lie r : 262
250, 253, 254
Tarki, c o u v e n t et é v ê c h é : 243, 250, 252. 253 — , « e m p e r e u r des I n d e s » : 268

Ta rse, archevêché et a r c h e v ê q u e . 49, 50, — de Jakouk, év. N ak h id je va n : 193, 194, 219,

202, 207, 208, 209, 212, 213 221


T a r t a r ie : v o i r A q u ilo n a ris , O rie n ta lis — , arch. M a m istra : 208

Ta th ev , c o u v e n t et a r c h e v ê c h é a r m é n ie n s : — Mancasola, év. Sam arkand : 94, 162, 180,


187, 188, 189
204, 223
Tau ru s (m o n t s d u ): 119. 196 ( v o i r aussi — , év. Sarai : 160
— S im éo n , r . : 266
M o n ta g n e N o i r e )
— , év. Sim isso : 189, 235
T c h e r k e s s e s : 161, 237, 246. 247
— de Tabriz, arch. Kh ilat et S u lta n ie h : 181,
T e a ld o d e Gorestis, év. S ybensis: 251
T e d a l d o d ei V i s c o n t i : v o i r G r é g o i r e X 221, 249, 250
— d e T o le n tin o , r . : 190, 195, 202
T c k r i t : 10, 99, 108, 112; - a r c h e v ê q u e m aro-
— W aleys, év. L ic o s t o m o : 236
n i t e : 48, 113

25

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320 INDEX NOM INUM

Thoros, p r ie u r a rm é n ie n de S ienne : 198 Valen tin d e Tré vise , r . : 273


— Mikaílentz, e n v o y é a r m é n ie n : 212 ( v o ir Vanévan, é v ê c h é a rm é n ie n : 204
aussi T h é o d o r e ) V a r n a : 158; - é v ê c h é : 236
T if lis : 116, 175, 277; - c o u v e n t s : 55, 71, 78, Vartan, va r ta b e d : 52; - i d . : 60
115, 128, 170, 184, 185, 186, 222, 257; - évê- — , sacriste de S a in t-Th a dd ée : 204
q u e s : 173, 174, 181, 183, 184, 195, 222 Vasinpace, r . : 114, 134, 190
Tinà-bàg, khan m o n g o l : 160 Venise, V én itie n s : 94, 95, 119, 135, 151, 158,
Tjum en, é v ê c h é : 252 161, 164, 175, 182, 241, 242, 257, 259, 276
Tlieu, e r m it e : 90
V eroli, c a t h é d r a le : 109
To gh a n -T em ü r, khan m o n g o l : 153 Versacht, c h e f des Z iq u es : 231, 248
Tõla-buqa, khan m o n g o l : 90 Vicina, c o u v e n t et é v ê c h é : 90, 95, 230, 236,
To qtai, khan m o n g o l : 93, 156, 157 237
To rto s e, c o u v e n t : 38; - évêque: 53 ( v o i r Vincent de Caffa. r . : 255
M a n sel) V la d im ir (d u c d e ) : 27, 59
T ra n so xian e, c o n t r é e : 160, 164, 186 V o s p r o : 230; - a r c h e v ê c h é : 165, 179, 231,
T r é b i z o n d e : 116, 230; - c o u v e n t s : 130, 171, 232, 234, 237, 239, 240, 242. 255
237; - c u s t o d ie : 129, 171, 237; - e m p e r e u r : V s e v o lo d , c h e f c o m a n : 23
275. 276; - évèques: 232 à 235 (vo ir
A ntoine, C o s m e )
T r i p o l i : 38, 52, 58, 80, 107, 110
Ts iu an -tch éou ; v o ir Zayton
W, X, Y, Z
T u g h lu q -T e m ü r, khan m o n g o l : 164
T u r b e s s e l : 11
T u r c o p le s : 7, 8, 43 W editi, p e u p le : 21, 22, 27
T u r q u i e : 39, 67, 141; - su ltan: 8, 19, 23, 43, W illia m : v o i r G u illa u m e
44, 45, 54, 69, 89, 98 ( v o ir aussi Ottom ans) W r o c l a w : 70
T y r : 38, 43 X ifan gan, en C hine ( ? ) : 286
Y áh b a llah à III, c a t h o lic o s d e s N es to rie n s:
108, 109, 110, 111, 177
u, ü Yaílaq, prin c es se m o n g o l e : 89. 92
Y à m à k ( T u r c s ) : 21
Ü k á k : 95. 243 Y a n g-tch éo u ( J a m c a i ) : 150. 151, 152
UIrich de S e yfriesto rf, é v . : 148 Y lice , c o u v e n t : 95. 237, 239
Uniteurs ( F r e r e s ) : 131, 199, 207, 209, 215. 217 Y o u r i K o n c a k o v iò , c h e f c o m a n : 23
à 224, 261, 266, 283, 286 Y v e s de N a r b o n n e , e le r e : 70
Urbain, r . : 90 Z a c h a rie M anu elian, ou d e Saint-Thadd ée.
U r g e n j: 93, 95, 116, 162, 163, 164, 188, 243; - arch. M a k u : 171, 203, 204, 205, 217, 220
évéché: 162, 186; - v o ir aussi Ornach, — M a rch a rt, arch. M a k u : 206, 220
O r g e n tz Zagan, e n v o y é m o n g o l : 105
U ruk-Khatun, p rin cesse m o n g o l e : 104 Zaharé, b a ro n g é o r g ie n : 55
Uzun-Hassan, khan t u r k m è n e : 275, 276 Za ra Y a q ob, e m p e r e u r d ’E t h io p ie : 269, 275
Ziques, Z i q u i e : 5. 30. 65. 135, 139, 163, 231,
232, 237, 238. 247, 248, 251, 255. 256
Z a y to n (T s iuan t c h é o u ) : 150. 151, 152, 154,
V 191; - é v ê q u e : v o i r Jacques d e F lo r e n c e
Z o l o de Anastasio. a v e n t u r i e r pisan : 104, 105
V ahrn urtcnsis, é v é c h é : v o ir Jean Z o r z o r , c o u v e n t : 204, 205, 221, 261; v o i r Jean
Valachie, V a l a q u e s : 25, 39, 131, 237, 274 David

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POSTFACE

P u blié en 1977, le présent ouvrage avait rencontré un accueil b ie n v e il-


lant d u fait qu'il présentait un essai de synthèse su r le m o u v e m e n t m is s io n ­
naire qui se m anifesta à 1egard des pays d'Orient et d 'E x trê m e -O rie n t d e p u is
la fin d u X I I e siècle. E n 1’envisageant à partir du rôle m o te u r de la P a p a u té ,
nous avions en effet pu dépasser l optique la plus courante, q u i p artait de
1’action des o rd res missionnaires, agents principaux tant de 1e van g élisa tio n
des infidèles q u e des d ém arch es tendant à ram en er les chrétiens o rie n ta u x à
1'union des Eglises.
D e p u is vingt ans, la recherche a progressé, en dépit de 1’accent qu i a été
mis su r la discussion des buts et des méthodes de la m ission d u fait d e n o u ­
velles orientations de la doctrine missionnaire, avec leurs im p lic atio n s théo-
logiqu es et ju rid iq u e s qui n entraient pas dans notre p ropos. T o u te fo is cette
réflexion a pris a p p u i su r des expériences passées, p a rm i lesquelles les m i s ­
sions chez les M o n g o ls , qui sont regardées c o m m e ayant é c h o u é p a r c e q u e
fondées su r des «m é th o d e s infructueuses», telles que la tentative de c o n v e r -
tir les souverains, leu r conversion apparaissant c o m m e u n p r é a la b le à celle
de leurs p e u p le s (J. P i r o t t e , «C o n v ertir p a r le som m et du V e au X T V e s. R é -
flexions actuelles su r les am biguités d u n e vieille stratégie» d a n s V a c c u e il et
le refus du c h ris tia n is m e : h istoriogra p h ie de la m ission . Actes du c o llo q u e de
S tu ttg a rt 1985, L y o n 1986, p. 23-25). II nous sem ble q u e n fait les m is s io n ­
naires des X I I I e et X I V e siècle n'ont pas été les adeptes d u n e m é th o d e u n iq u e
et ont utilisé des d é m a rc h e s très diverses, et que leu r entreprise s e s t su rto u t
heurtée à u n e n viron n e m e n t historique défavorable.
N o u s n ou s b o m e r o n s d an s les pages qui suivent à actualiser les d o n n é e s
que n ous avion s recueillies, en in diquan t les sources et les d ire ction s n o u ­
velles de la recherche.
D an s le d o m a in e des sources, nous bénéficio ns de 1'achèvement d u r e ­
cueil d u P. T h o m a s K a e p p e l i , S crip tore s O rd in is P ra e d ic a to ru m m e d ii a evi, 4
vol., R o m e 1970-1993, et de 1'édition critique de R ic c o ld o da M o n te d i C roce.
Contra legem S a ra c e n o ru m , a cu ra di J. M . M é rig o u x , O . P. c o n p re s e n ta z io n e
di E. Panella, O.P., p a ru e d an s M e m o rie d o m e n ica n e , n. s., 17, et tirée à p a rt :
Pistoia, 1986. L e récit de voyage d u m ê m e R ic c o ld o vient d e t r e réédité : R ic -
cold de M o n te Croce, P érég rin a tio n en Terre S a in te et au P ro c h e O rie n t, texte
latin et traduction p a r R. K a p p le r (avec la trad uction des Lettres d u m ê m e )
Paris, 1997.

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322 PO STFAC E

L a correspondance des papes du X IIP siècle avec les princes orientaux a


été rééditée et étudiée dans K. E. L u p p r ia n , Die Beziehungen der Pàpste zu is-
lamischen und m ongolischen Herrschem im 13. Jhdt. anhand ihres Briefwech-
seis, Città dei Vaticano, 1981 ( Studi e Testi, 291).
Parm i les études sur les textes, nous citerons, outre notre volume sur Les
récits de voyages et de pèlerinages (Typologie des sources du Moyen-Age Oc­
cidental, n° 38, T um h out 1981, complété par une mise à jour de 1985), les
livres de Chr. Deluz, Le Livre de Jehan de Mandeville : une géographie du X IV f
siècle, Louvain 1988, et de Michèle G u é r e t -L a f e r t é , S u r les routes de le m -
pire m ongol. Ordre et rhétorique des relations de voyage aux X I I P et X IV ' siècle,
Paris 1994. Une place doit être réservée aux traductions érudites, notamment
à G uillaum e de Rubrouck. Voyage dans 1’empire m ongol, trad. par Cl. et
R. Kappler, Paris 1985, et à la traduction anglaise de la même relation, par
P. Jackson, publiée par la Hakluyt Society, Londres 1990, ainsi qu à une nou­
velle traduction de Plancarpin en italien : Storia dei M on go li, a cura di
P. Daffino, C. Leonardi, M. C. Lungarotti, E. Manesti, L. Petech, Spoleto
1989. N o u s avons étudié deux des textes relatifs aux premiers contacts de
1’Occident avec les Mongols : «The Relatio de Davide as a source for Mongol
history and the legend of Prester John», dans Prester John, the M ongols and
the Lost Tribes, ed. Ch. Beckingham, B. Hamilton, Aldershot, 1996, p. 139­
158, et « L a lettre du connétable Smbat et les rapports entre Chrétiens et
M on gols au milieu du X IIP siècle», dans Armenian studies. Etudes armé-
niennes. In m em oriam Haig Berberian, ed D. Kouymjian, Lisbonne 1986,
p. 689-696. t
LTiistoire des missions dans son ensemble a fait 1’objet d ’un chapitre de
YH istory o f the crusades, ed. in chief K. M. Setton, sous la signature de M ars­
hall W . B aldw in (vol. V, Madison 1985, p. 452-518). Lauteur, malheureuse-
ment trop tôt disparu, avait achevé sa rédaction vers 1970. Un article M is­
sion, dü à H.D. Kahl, a été publié dans le Lexikon des Mittelalters (VI, 669­
679). On trouve aussi plusieurs chapitres relatifs à cette question dans le
tome VI, Un temps depreuves (1274-1449), sous la direction de M. Mollat du
Jourdin et A. Vauchez, de XHistoire du christianisme, Paris 1990, notamment
p. 821-841.
Les rapports de la croisade et de la mission, ainsi que la définition de
la tâche missionnaire, surtout auprès des Musulmans, ont fait lobjet du livre
important de Benjam in Z. K e d a r , Crusade and M ission. European Ap-
proaches towards the M uslim s, Princeton 1984, à compléter par E. S ib e r r y ,
«M issionaries and crusaders. 1095-1274. Opponents or allies?», dans Studies
in Church history, 20, 1983 p. 103-110; D. B e r g , « Kreuzzugsbewegung und
Propagatio Fidei. Das Problem der Franziskanermission im 13. Jhdt. und das
Bild von der islamischen Welt in der zeitgenõssigen Ordenshistoriographie»,
dans Orientalische K u ltu r und europaisches Mittelalter, ed. A. Zimmermann
et I. Craemer-Ruegenberg, Berlin 1985, p. 59-76 ( Miscellanea Mediaevalia,
17); A.D. V o n D en B r in c k e n , «Islam und Oriens christianus in den Schrif-

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323
POSTFACE

ten des Kõlner Domscholasticus Oliver (+ 1227), Ibid., p. 86-102. Les actes
du colloque tenu à Assise, publiés sous le titre Espanzione dei Franciscanesi
m o tra Oriente e Occidente nel secolo 13., Assise 1979), réunissent des articles
de F. Gabrieli, K. Elm, D. Bigalli et M. Batllori, envisageant les attitudes de
saint François, de Roger Bacon, de Raymond Lulle. Sur ce dernier, cf. aussi
S. G a r c ia s P a l o u , R am on L lu ll y el Islam, Palma 1981.
Les missions dans 1’Europe du Nord, premier terrain dexpérience m is­
sionnaire, ont continué à retenir 1’attention. Relevons S. T r a e g e r , « B e m o ,
O. Cist., Apostei der Obodriten (1158-1191), dans Cistercienser C hronik, 86,
1989, p. 6-16; Studien über die Anfànge der M ission in Livland, ed. M. Hell-
mann, Sigm aringen 1989 ( Vortràge und Forschungen, 37); 1edition p ar T. Ja-
sinski de lettres inédites de Grégoire IX et Innocent IV sur la mission de
Prusse ( Zapiski Historyczne, 53, 1988, p. 57-67 et 54, 1989, p. 79-82), ainsi
que les chapitres de J. Kloczkowski dans le tome VI de \Histoire du ch ris tia ­
nisme.
S u r les missions dominicaines, un important travail, reprenant et
complétant les études du P. Loenertz, va incessamment paraitre : Cl. D e l a -
c r o ix -B e s n i e r , Les D om in ica in s et la chrétienté grecque aux X IV e et X V e siècle
(thèse soutenue en 1994 devant 1’Université de Paris X -Nanterre).
U n d o m a in e sest particulièrement enrichi : celui de 1'histoire des églises
orientales. N o u s avons cherché à en donner un tableau d e n s e m b le dans
YH istoire du C hristianism e, VI, p. 209-249; G. Fedalto en a traité dan s Le
chiese d ’O rien te, vol. I, Da G iustiniano alia caduta di C o n s ta n tin o p o li , M ilan
1984 (réim pr. 1991) ( C om plem enti alia Storia delia Chiesa diretta da H u b ert Je-
d in ); on doit au m êm e auteur, qui avait publié en 1976-1981 La chiesa latina in
Oriente, V erona, 3 vol., une H ierarchia ecclesiastica orientalis, P adoue 1988, 2
vol.; et au regretté P. J.M. Fiey, P o u r un «O rie n s christianus n o v u s », B e y ­
routh, 1993. O n dispose également de C. Detlef G. Müller, G eschich te der
orientalen N a zion a lk irch e n , Gõttingen 1981 ( Die K irchen in ihren G esch ich te).
On utilisera aussi le bon livre de Peter K a w e r a u , O stkirchengeschichte , L o u -
vain 1982-1983, 2 vol, à compléter par W . De Vries, « D ie Patriarchen d e r
nichtkatholischen syrischen K irch en », dans O stkirchliche Studien, 33, 1984,
p. 2-45.
B e a u c o u p d'inform ations sur les églises de nte grec et de langue sy­
riaque ou a ra b e dans J. N a s r a l l a h , H istoire du m ou vem en t littéraire dans l e ­
glise m elch ite du Ve au X X e siècle, vol. 3, 2 /1250-1516), Paris 1981. L a chrétien­
té de N u b ie , pratiquem en t absente de notre ouvrage, est m ieux con nu e du
fait des découvertes archeologiques recentes . cf. G. V a n t i n i , I l cris tia n e s im o
nella N u b ia a n tica V é ro n e 1985 (M u seu m C om b on ia n u m , 39). P o u r 1'Eglise
éthiopienne, on r e c o u r t à Tadesse T a m r a t , C hurch and State in E th io p ia .
1270-1527 O x fo rd 1972. Relevons ici que le mouvement réform ateur de la
«m a iso n d 'E w o s t a t e w o s », qui prit naissance au X I V ' siècle, ne parait pas
avoir subi d m f l u e n c e occidentale, sauf peut-être très indirectement p a r la
voie de 1’A rm én ie , et celà en dépit de la présence b.en attestee de Latins en

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324 POSTFACE

Ethiopie au X V Csiècle. La recherche historique sur 1’histoire de 1’Eglise a été


particulièrement active en Arménie et a donné lieu à la rédaction de nom-
breux travaux, le plus souvent en langue russe ou arménienne. A noter
comme touchant à 1’histoire des conflits auxquels ont été mêlés les mission­
naires latins, 1'étude de S. S. A r e c h v a l ia n , Z istorij filosofkie shkol sred-
nevokoi A rm enii (« P o u r 1'histoire des écoles philosophiques arméniennes»)
Erivan 1980.
Les études concernant 1'empire mongol se sont multipliées, notamment
en raison de 1'intérêt qui sest porté en ces derniéres années sur l'«altérité».
Notons en particulier Folker B. R e ic h e r t , Begegnungen m it China. Die Ent-
deckung Ostasiens im Mittelalter, Sigmaringen 1992, et Felicitas S c h m ie d e r ,
E uropa und die Fremden. Die M ongolen im Urteil des Abendlandes vom 13. bis
in das 15. Jhdt., Sigmaringen 1994, constituant les volumes 15 et 16 des Bei-
trage zur Geschichte und Quellenkunde des M ittelalters. Le premier met en re-
lief le nom bre important des Occidentaux qui ont atteint la Chine et l’Ex-
trême Orient; le second reprend 1'histoire des contacts entre les Mongols et
les Européens, avec tout un chapitre intitulé «Praxis und Theorie der Mis­
sion unter den Tartaren», tous deux avec une importante bibliographie. On
notera 1’ouvrage de J.-P. Roux, La religion des Turcs et des M ongols, Paris
1984, et celui de J. A u b in , E m irs m ongols et vizirs persans dans les remous de
V a ccultu ration , Paris 1995 ( Studia iranica, cahier 15) qui éclaire les condi-
tions dans lesquelles se fit le passage des M ongols de Perse à llsla m . Sur les
débuts de 1’alliance de ceux-ci avec les Francs, cf. J. R ic h a r d , « U n e ambas-
sade m on gole à Paris en 1262?», dans Journal des Savants, 1979, p. 295-303
(d u m ême, « A propos de la mission de Baudouin de Hainaut : 1’empire latin
de Constantinople et les M o n go ls», Ibid., 1992, p. 115-121).
E n ce qui concerne 1'histoire proprement dite des missions, nous note-
rons quelques travaux:

- J. D. Ryan, «N ic h o la u s I V and the evolution of the E a ste m mission ef-


fo rt», dans A rch iv u m historiae p o n tificia e , 19, 1981, p. 79-85, oü 1'auteur
m ontre com m ent 1'impact de la chute d ’Acre am ène le pape, essentiellement
soucieux de préparer la reconquête de la Terre Sainte et préoccupé par les
pro blè m es de conversion des M ongols, à confier à M athieu de Chieti et Guil­
lau m e de Chieri une mission auprès d 'A rghu n p o u r 1'inviter à une nouvelle
c a m p a g n e (1291).

- E. D u p e r r a y , « L e x p a n s io n chrétienne en Chine au XTVe siècle», dans


Les réveils m issionn a ires en France du m oyen âge à nos jours. Actes du col-
lo qu e de Lyon, 29-31 m a i 1980, Paris 1984, p. 49-54^
- R. M ü l l e r , «Jean de M on tecorvin o (1247-1328), prem ier archevêque
de Chine. Action et contexte m issionn aire», dans Neue Zeitsch rift fü r M is-
sionsw issenschaft, 44, 1988, p. 81-109, 197-217, 263-264.
- O d o ric o da Pordenon e e la Cina. A tti dei con vegn o in tem aziona le (1982),
a c u ra di G. Melis, Po rd en on e 1984.

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POSTFACE

O- P ritsa k , «Christian missionary activities in the Pax m o n g olica »,


dans 11 battesim o delle terre russe. B ilancio di un millenio. Atti dei convegno
m tem azionale, Florence 1991, p. 59-72 (Civiltà veneziana. Studi, vol. 43).
J. R i c h a r d , « L e christianisme dans 1’Asie centrale», dans Journal o f
Asian history, 16, 1982, p. 101-124.
- J. R i c h a r d , « L e discours missionnaire : 1'exposé de la foi chrétienne
dans les lettres des papes aux M ongols», dans Prédication et propagande au
Moyen Age. lslam , Byzance, Occident, Paris 1983, p. 257-269) ( Penn-Paris-
D u m ba rton Oaks colloqu ia , 3).
- « L o u is de Bologne, patriarche dAntioche, et la politique bourgui-
gnonne envers les états de la Méditerranée orientale», dans Publication du
centre européen détudes burgundo-médianes, 20, 1980, p. 63-69.

N o u s avons consacré une étude particulière au registre tenu à la chan-


cellerie pontificale p ou r les affaires missionnaires et orientales, préludant à
la mise en place de la commission chargée de répondre aux questions des
missionnaires : J. R ic h a r d , «L e s papes d’Avignon et 1’évangélisation du
monde non-latin à la veille du Grand Schisme», dans Genèse et débuts du
Grand Schism e d ’Occident. Avignon 1978, Paris 1980, p. 305-315.
U n certain nom bre de questions ont retenu 1’attention : celle de 1’e m p lo i
d es l a n g u e s : D. U r v o y , «L es Musulmans et 1'usage de la langue arabe par
les missionnaires chrétiens au Moyen Age», dans Traditio, 34, 1978, p. 416­
427; J. R i c h a r d , «L'enseignement des langues orientales en Occident au
M oyen A g e » , dans Lenseignem ent en lslam et en Occident au Moyen Age (R e­
vue des études isla m iqu es, 16, 1976), p. 149-164.
La cap tiv ité a été l'un des facteurs qui ont amené la Papauté à envoyer
des religieux en pays musulman et à nouer des relations avec les églises
orientales, du fait qu'il lui fallait se préoccuper non seulement du rachat des
captifs, m ais de la nécessité de leur apporter des secours spirituels. Cette
q u estio n , q u e n o u s a v io n s a b o r d é e in cid e m m e n t d an s cet o u v ra g e ,
com m ence à susciter des études systématiques : Y. F r i e d m a n , «T h e ransom
o f captives in the latin kingdom of Jerusalem», dans A u to u r de la Prem ière
croisade. Actes du co llo q u e de la S S C L E, Clerm ont 1995, ed. M. Balard, P a ­
ris 1996, p. 177-192 (Byzantina Sorbonensia, 14) et surtout G. C i p o l l o n e ,
Cristianità lsla m . C attività e liberazione in nom e di D io : il tem po di In n oce n -
zio 111 d op o il 1187. R om e 1992 ( Miscellanea historiae pon tificiae, 60).
Un c h a m p de recherche est en plein renouvellem ent: il sagit de l’union
arménienne. E lle vient de faire 1'objet d'une étude très a p p ro fo n d ie :
P H a i f t e r Das Papstu m u n d die A rm enier im frühen und hohen M ittelalter,
von den ersten K ontakten bis zur Fixierung der K irch en u n ion im J a h r e 1198
K o ln -W e im a r -W ie n , 1996 (B eihefle zu J. F. B õhm er, Regesta im p e m 15).
L a u te u r a repris la critique des textes et les prob emes de datat.on elirn.-
nant certaines traditions, c om m e la visite du catholicos Grégoire II à Rom e,
scrutant en particulier les modalités de 1’union de 1198. II a toutefois laissé

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326 PO STFAC E

de côté 1'importante production historique en langue arménienne sur ce su-


jet, notamment A. B o z o i a n , «Docum ents on the Armenian-Byzantine eccle-
siastical negociations (1165-1178)», Erivan 1995. Sur cette question, en atten-
dant la parution du livre annoncé de G. D e d e y a n , Les p ou voirs arméniens
dans le P roch e-O rien t méditerranéen (1068-1144) (thèse soutenue à Paris I,
1990), on aura aussi recours à H. M. B artikjlan , « L e s relations des églises de
1’Arm énie cilicienne et de 1'empire byzantin et leurs implications politiques»,
dans Les Lusignans et VOutremer, Poitiers 1994, p. 47-53. Cf. surtout B. H a ­
m i l t o n , «T h e Arm enian Church and the Papacy at the time of the Cru-
sa d es», dans E astem Church Review, 10, 1978, p. 61-87.
P o u r 1'histoire de 1'union arménienne après 1198, ont paru entre autres,
avec lo u v ra g e d e n se m b le de CL M u t a f ia n , La C ilicie au ca rrefour des em-
pires, Paris 1988, 2 vol., 1’article du comte W . H. R u d t de C o l l e n b e r g , «L es
Bullae et les litterae adressées p ar les papes d A v ig n o n à 1'Arménie cilicienne.
1305-1375», dans A rm enian Studies. Etudes arm éniennes, cité plus haut,
p. 697-726, et notre article «L e s Arméniens à Avignon au XTVe siècle», dans
R evue des études arméniennes, 23, 1992 ( M em o ria l S. D er Nersessian), p. 253­
264. S u r le concile de Sis, qui renouvela en 1307 1’union de 1198 en introdui-
sant certains usages qui soulevèrent une vive opposition, cf. D. D. B u n d y ,
« T h e a n o n y m o u s life o f Georg Skewrac'i», dans Revue des études arm é­
niennes, n.s., 18, 1984, p. 491-502, et «T h e council o f Sis», dans After Chalce-
don. Studies in Theology and Church history offered to Prof. A. van Roey, L o u ­
vain 1985, p. 42-56 ( O rientalia Lovanensia analecta, 18).
Sign alon s à ce propos que 1'incertitude que nous avions manifestée en ce
qui concerne la réception de 1'union de Florence par le patriarcat arménien
(p. 267) n'a pas de raison d'être, la date de la lettre du catholicos donnée par
B a lg y c o m m e de 1450 devant être rapportée à 1440. L a lettre ém ane donc de
G ré g o ire IX de Sis et non de Grégoire X d'Etschmiadzin.
N o u s avons enfin eu à examiner les relations des pélerins de Jérusalem
en ce qui concerne leur perception des chrétiens orientaux (J. R ic h a r d ,
« M anières de crestiens : les chrétiens orientaux dans les relations de pèleri-
nages aux Lieux Saints», dans C olum beis 5, 1993, p. 89-110). O n constate que
plusieurs d e n tre eux sont attentifs aux progrès des négociations menées en
vue de 1’union des Eglises, et celà dès le temps de B u rc h a rd de Mont-Sion, et
que se manifeste souvent une vision déjà «cecum énique» des diversités de la
Chrétienté.

Jean R ic h a r d
M ars 1997

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TABLE DES MATIÈRES

A v a n t -p r o p o s ................................................................................................... ^
S o u rc es et b i b l i o g r a p h i e ............................................................................. ^
Liste des o u v ra g e s u tilisé s...........................................................................

IN T R O D U C T IO N

L ’oeuvre m issionn aire au X I I e siècle et la définition d u n e d octrin e de


la m is s io n ................................................................................................ 1
D ans les pays d'Outre-mer, 4; au contact des paíens d 'E u ro p e , 12.

P R E M I È R E P A R T IE

Les missions, de 1'apparition des ordres mendiants à la c o n q u ê te


m o n g o l e .................................................................................................. 17

1. Les m issions chez les Comans et les peuples voisins .................... 20


Les Com ans, 20; - leur conversion, 24; - la G ra n d e -H o n g rie , 26;
- 1'invasion m o n g o le et les C om ans de H ongrie, 30.

2. Les m issions dans les terres d O u tre -m e r ....................................... 33


Un nouvel esprit missionnaire; les prises de contact, 33.
a) L e s missions auprès des M u s u l m a n s .......... 37
La prédication aux M usulm ans, 37; - le soutien aux captifs,
39; - la prédication dans les Etats latins, 41; - les a m bassa-
des aux princes, 43.
b) L a recherche de 1' U n i o n des E g l i s e s .......... 47
Les Maronites, 47; - les Arméniens, 48; * les G é o rg ie n s et le
couvent de Tiflis, 53; - les D om inicains de Jérusalem et les
églises orientales, 56; - les conversations à 1'occasion du
concile de Lyon, 59.

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328 T A B LE D ES M A TIÈR ES

D E U X IÈ M E PARTIE

La conquête mongole et les missions jusqu'à la création d'un épisco­


pat missionnaire................................................................................ 63
La découverte des Mongols, 65.
aj L e s ambassades pour la conversion des
M o n g o l s ...............................................................................................
Les envoyés d ’Innocent IV, 69; - 1'ambassade de Louis IX,
73; - la conversion de Sartaq et le voyage de Rubrouck, 77;
- les Polo et les ambassades destinées au grand khan, 83.
b) L a mission chez les Tartares du N o r d .... 87
\
Les Franciscains en Tartarie, 87; - leur établissement en
Crimée, et la lettre du custode Ladislas, 89; * la pénétration
à 1'intérieur du khanat de Qipcaq, 93.
c) L a mission de Perse au temps des Il-
Khans 98
La campagne de Hülàgü et la mission de David d ’Ashby, 98;
- les relations entre les Papes et les Il-Khans, 101; - le passage de
ceux-ci à rislam et ses conséquences, 106; - 1'Union avec les Chal­
déens, 108; - les autres églises, 112; - les établissements des Frères,
115.
La définition d'une méthode par Hum bert de Romans,
Guillaume de Tripoli, Ricoldo de Montecroce et Raymond
Lull, 116.

T R O I S I È M E PARTIE

La naissance d'un épiscopat missionnaire et les missions dans les


empires m ongols du Nord, d'Asie centrale et d 'E x trê m e -O rie n t. 121

1. Les papes du X I V e siècle et Vorganisation des m issions ............. 124


La prédom inance des ordres mendiants, 124.
a) L e r ô l e des ordres dans la p r é p a r a t i o n e t
1’ e n c a d r e m e n t des missionnaires, 125.
Le choix des hom m es et lenseignem ent des langues, 125; -
les vicairies franciscaines, 128; - la Societas peregrinantium ,
130.

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T A B L E D ES MAT1ÈRES 329

b) L e rôle de la p a p a u t é , 131.
Légats et inquisiteurs, 131; - la demande de missionnaires,
1ebauche d ’une centralisations, 134.
cjLes o r i g i n e s d un é p i s c o p a t m i s ­
sionnaire; 137.
Les privilèges, 138; - les premières désignations épiscopa-
les, 141.

2. La création de Varchevêché de Khanbaliq et ses s u ite s ............. 144


a) J e a n d e M o n t e c o r v i n o et la mission de
C h i n e , 145
La mission de Montecorvino, 145; - la création d'une p ro­
vince ecclésiastique, 148; - leglise latine de Chine et ses
évêques, 149; - les sucesseurs de Montecorvino, 152.
b) L e s évêchés du Qipcaq et d u D j a g a t a i , 156
Jérôme de Catalogne et Toqtai, 156; - levêché de Caffa et
les difficultés avec les Arméniens, 158; - les autres évêchés
du Qipcaq, 160; - la mission d'Almaligh, 162; - 1'impossible
unité de la province, 165.

Q U A T R IÈ M E PARTIE

Larch idiocèse de Sultanieh : les missions dans les « partes orientales


et m érid ion ales» et 1'union a rm é n ie n n e ....................................... 167

1. La p rovin ce de S u lta n ie h ............................................................. 169


a) L a fondation de la p r o v i n c e , 169
Guillaume Adam et la bulle Redemptor noster, 170; - un
archevêché missionnaire, 171; - les sièges épiscopaux, 175.
b) L a nouvelle province de Sultanieh, 180
Jean de Cori et la réorganisation de 1328, 180; - la Géorgie
et 1'évêché de Tiflis, 183; - Thomas Mancasola et levêché
de Samarkand, 186; - Jourdain Cathala et levêché de Qui­
lon, 190; - la question de Nakhidjevan et le fonctionnement
de 1'institution provinciale, 193.

2. L V n io n arménienne et ses vicissitudes: Union de Sis et Union


de Qrnay ^
Le maintien des relations avec les églises orientales, 195; - le
problèm e arménien et les Arméniens d Italie, 196.

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330 TA B LE DES M A TIÈ R E S

a) L ’ A r m é n i e et Rome avant la création de


1’ o r d r e d e s U n i t e u r s , 200.
Le royaume de Cilicie et 1'Occident, 200, - le concile e is
et son application, 201; - la mission de 1321 et les contacts
avec Saint-Thaddée, 203; - les relations avec la Cilicie sous
le régime de l'Union et la hiérarchie épiscopale, 207; - N er­
sès Balientz et la Fides Armenorum, 210; - la fin du
royaume, 216.
b) « A r m é n i e n s - U n i s » et F r è r e s Uniteurs 217.
Le groupe de Qrnay et la pénétration de la pensée atine,
217; - la congrégation des Uniteurs, 219; - le reeul de
1’Union et ses causes, 222.

C IN Q U IÈ M E PARTIE

Les missions dans les pays de la Mer Noire et du Caucase et la fin


des missions m é d ié v a le s................................................................ z
1. Les provinces de Vospro, Sarai et Matrega .* les missions dans les
pays de la Mer N oire et de la M er Caspienne .............................. 230
La province de Vospro et les évêchés de
l a M e r N o i r e , 230.
La conversion des Alains et des Ziques, 231; - 1'érection des
évêchés de la Mer Noire, 232; - évêchés missionnaires et
desserte des comptoirs gênois, 237.
b) L ' a r c h e v ê c h é de Sarai, 241.
Cosme de Ziquie et la partition de 1'archevêché de K hanba­
liq, 241; - la survie des évêchés, 245.
cJJean de Ziquie et les catholiques du
Caucase, 246.
Louverture de la Ziquie aux Occidentaux, 246; - les étapes
de 1'apostolat de Jean de Ziquie, archevêque de Matrega,
248; - 1'organisation des évêchés du Daghestan et la survie
de 1'Eglise latine en pays kaitak, 252.

2. La fin des missions m édiévales .................................................... 256


a) L e s missions au début du X V e siècle, 256.
Les missions d'après Jean III de Sultanieh: Tamerlan et le
Grand Schisme, 256; - Les pélerins orientaux en Occident,

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T A B LE D E S MAT1ÈRES 331

259; - la reprise de 1'activité franciscaine en Egypte et en


T e rre Sainte, 261.

b) L e c o n c il e de F l o r e n c e et les c o m ­
missaires apostoliques, 265.
Les négociations avec les Arméniens, 265; - la mission
d A lbert de Sarteano, 267; - Ethiopiens, M aro n ite s et
Syriens, 269.

cjLes d ernières missions médiévales, 273.


L a Pologne, base des missions chez les Tartares, 273; -
L o u is de B o lo g n e et 1’idée d'une organisation p ro p re aux
cath oliques des pays caucasiens, 274.

C O N C L U S IO N

Les m issio n s m édiévales : succès ou é ch ec? ........................................... 279

C A R T ES

Les m issio ns de C om anie avant 1’invasion m o n g o le ............................. 297


Les routes suivies p a r les Occidentaux dans 1'empire m on gol à la fin
d u X I I I e et au d ébu t du X I V e s i è c l e ................................................. 298
La p ro v in c e de S u lta n ie h ........................................................ ................... 299
Les pays de la M e r N o ire et d u Caucase de 1332 au début du X V e siè­
cle ............................................................................................................ 300
La p ro v in c e ecclésiastique de K h an b aliq (partie orientale) et la vicai­
rie franciscaine de C a t h a y .................................................................. 301
L A r m é n i e et les m issions latines.............................................................. 302
Les stations m issionnaires dans la vicairie de Tartarie A q u ilo n a ir e .. 303
Les stations m issionnaires franciscaines dans la viçaria Tartariae
orien ta lis au X I V e s i è c le ...................................................................... 304

Index n o m in u m .................................... ....................................................... 305


P o s t f a c e .......................................................................................................... 321
T able des matières ...................................................................................... 327

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£\T,

A c h e v é d ’imprimer
en février 1998
sur les presses de la
Scuola T ip ogr afi ca S. P io X
V ia degli Etruschi 7
1 - 00185 R o m a

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PUBLICATÍONS
DE L’ÉCOLE FRANÇA1SE
DE ROME

Piazza Navona 62
00186 Roma (Italie)

Hlustration de la couverture :
L e p a pe B en o it X I I reçoit des am b assa-
d e u r s du g r a n d K h a n venus lui d e m a n d e r
un a r c h e v ê q u e p o u r le siê g e de K h a n b a l iq
(1 3 3 8 ). B ib l. N at. de France, m s.
franç. 2810, f« 133.

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J0UUBOSLUBQ Áq P0UUBOS

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