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Chapitre 7

STABILITE DES PENTES


1 Généralités
Les mouvements et glissements de terrain sont très souvent des accidents graves de grande ampleur qui
provoquent des dégâts matériels considérables et peuvent causer des pertes en vies humaines.
On peut distinguer les problèmes classiques d’instabilité à l’échelle des travaux : barrages, digues, talus
... qui intéressent des volumes de sol de l’ordre de dizaine de milliers de m 3, des mouvements de grande
ampleur en montagne qui affectent des millions de m3 :
- Mont Granier (Savoie, 1248) : 500 millions de m3
- Friolin (Savoie, 1980-1985...) : 10 millions de m3
- Le Thoronet (Var, 1984-1990...) : 2 millions de m3
- Val Pola (Valteline, Italie, juillet 1987) : 30 millions de m3
- Mount Saint Helens (USA, mai 1980) : 2300 millions de m3

Ces grands mouvements de terrain peuvent être plus ou moins réguliers et assez lents (glissement de la
Frasse, en Suisse, de 40 millions de m3, depuis plusieurs siècles, glissements du littoral normand,
glissement de la Clapière (Saint Etienne de Tinée) ... ou très brutaux comme l’éboulement rocheux de
Randa en avril et mai 1991(20 et 10 millions de m3)

2 Description du phénomène

Le moteur des mouvements de terrain est la pesanteur, mais d’autres causes peuvent déclencher le phénomène ou
l’amplifier.
L’eau sera, très souvent, une cause très aggravante par l’action de la pression interstitielle, des forces
hydrodynamiques, de la modification des caractéristiques mécaniques des sols fins.
Les séismes pourront être un facteur déclenchant de mouvements de terrain de très grandes ampleurs,
spécialement bien entendu pour les zones fortement sismiques.
Les variations climatiques : pluie, fonte des neiges, sécheresse, gel-dégel.
L’érosion des sols superficiels non cohérents, mais aussi l’érosion des falaises littorales.
On distingue trois grandes catégories de mouvements de terrain :
 les affaissements et effondrements de massifs sous minés;
 les écroulements (roches);
 les glissements (roches et sols).
Plus le mouvement de terrain prévisible est important, plus les études géologiques, hydrologiques et
hydrogéologiques devront être poussées, tout calcul de stabilité de pentes devenant illusoire s’il ne prend pas en
compte l’ensemble de ces données.

Pour les pentes naturelles


Les mécanismes suivants peuvent être distingués
- écroulements
Glissement
- glissement plan
- glissement rotationnel simple
- glissement rotationnel complexe
Talus artificiels
Les talus artificiels sont principalement affectés par des glissements et parfois par des phénomènes de
fluage.
2.1 Affaissements et effondrements.

Les cavités peuvent être naturelles (vides de dissolution ou karsts) ou provenir d’anciennes carrières ou de
bassins miniers.

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On distingue les affaissements si le phénomène est lent et progressif, créant une dépression topographique
continue et les effondrements brutaux qui sont limités en surface par des bords subverticaux qui délimitent le
fontis. Les effondrements profonds peuvent se traduire, dans un premier temps par des affaissements de surface,
puis évoluer vers des fontis.

2.2 Les écroulements


Ils concernent les massifs rocheux plus ou moins fracturés qui vont se rompre progressivement par fauchage,
tassement, basculement d’un pan de falaise subverticale, ripage de bancs rocheux à pendage aval, rupture de
bancs rocheux ... (Fig.1)

Fig.1 Différents types d’écroulement

Pendant l’écroulement la vitesse est généralement considérable et l’extension importante (Mont


Granier, 20km² sur environ 7,5km). Il n’existe pas de méthodes de calcul simples, ni d’ouvrages de
protection, mais les mesures de prévention, voir d’évacuation sont possibles, ruines de Séchilienne, par
exemple.

2.3 Les glissements


Selon la géométrie de la surface de glissement on distingue (Fig.2):
 le glissement plan, en milieux rocheux et en terrain meuble, s’effectue le long d’une surface de
rupture sensiblement plane;
 le glissement rotationnel, en terrain meuble et en débris de roches très fragmentées, s’effectue
suivant une surface plus ou moins circulaire, il se caractérise par un escarpement à l’amont et un
bourrelet à l’aval, généralement on rencontrera plusieurs glissements emboîtés;
 glissement quelconque, est une combinaison des deux cas précédents.

Fig.2 Différents types de glissement

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2.4 Mouvements de terrain par fluage


Ces mouvements sont dus à la déformation par viscosité du sol. Ils concernent les sols argileux et se
produisent superficiellement sans surface de glissement précise.
2.5 Les coulées boueuses et les laves torrentielles
Ce sont des écoulements visqueux ou fluides dans des milieux fins saturés d’eau, mais pouvant
également entraîner des blocs, qui peuvent cheminer sur des pentes très faibles et sur des distances
considérables.
Les coulées boueuses peuvent être la langue terminale de certains glissements de terrain à teneur en eau
très élevée (exemple : coulée boueuse de Bellevaux-Vallon (Haute Savoie, 1943)
Les laves torrentielles sont des coulées plus ou moins fluides dans le lit des torrents de montagne. Les
matériaux sont transportés sur plusieurs kilomètres à des vitesses qui peuvent être très importantes
(exemple : laves torrentielles de Pontamafrey dans la vallée de la Maurienne, pouvant couper la RN 6
et la voie ferrée)
2.5 Différentes causes de ruptures
On peut distinguer :
- Les ruptures dues aux modifications du moment moteur (surcharges des murs de quai par exemple)
- les ruptures provoquées par les modifications des conditions hydrauliques (vidange rapide d’un
réservoir, apparition d’un écoulement)
- les ruptures entraînées par les modifications des caractéristiques géotechniques du terrain (rupture à
long terme des pentes naturelles, dessalage de certaines argiles dans les digues collinaires)

3 Méthodes de calcul de stabilité de pentes de sol

3.1 Hypothèses de calcul


Il existe, en principe, deux possibilités pour calculer la stabilité d'une pente. La première est de
considérer que la masse instable forme un bloc rigide, que le sol a un comportement rigide-plastique
et donc qu'à la rupture tous les points de la masse stable atteignent en même temps leur seuil de rupture
; ce sont les méthodes de calcul à la rupture, les seules encore employées pratiquement à ce jour. La
seconde possibilité est d'appliquer la méthode des éléments finis en choisissant une loi de
comportement réaliste ; en réduisant, par exemple, les caractéristiques de sol jusqu’à la rupture.

3.2 Définition du critère de rupture


Le critère de rupture utilisé est le critère de COULOMB.
 '   ' tg ' c '
Si l’on vérifie la stabilité de la pente par rapport à une première rupture éventuelle, on prendra :
C'pic et φ'pic
Si l’on vérifie la réactivation d’un glissement qui s’est déjà produit, on prendra :
C'rés et φ'rés
3.3 Définition du coefficient de sécurité
Plusieurs définitions du coefficient de sécurité peuvent être adoptées ; actuellement, on utilise encore la
définition suivante du coefficient de sécurité global F :
 tg ' c'
F  max 
 
tg ' c'
  
F F
Cette définition conduit à étudier l'équilibre limite du sol avec des caractéristiques réduites
tg ' c'
et
F F

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3.4 Détermination de la géométrie de la rupture


Pour les pentes naturelles dont le glissement est amorcé, la surface de rupture est généralement connue,
de même pour les glissements plans pour lesquels la surface de rupture a été reconnue.
Par contre, dans les autres cas, très nombreux, la surface de rupture est inconnue. Dans les cas courants,
on adoptera une surface de glissement cylindrique à base circulaire et on recherchera le cercle qui
donne le "coefficient de sécurité" F le plus faible.

4 Stabilité des pentes en rupture plane


b b

L L C

QD D
z z
QG W γ1 W
hw B
WT WN γ2 A T
β β N

Fig. 6 pente indéfinie avec écoulement parallèle à la pente

Le poids total du sol se décompose en une composante normale totale au plan AB, WN et une composante
tangentielle totale au plan AB, WT.

WN   ( L.hw . 2 cos  )  ( L.( z  hw ). 1. cos  ). cos 


WT   ( L.hw . 2 cos  )  ( L.( z  hw ). 1. cos  ). sin 

La composante normale effective s’obtient en retranchant la résultante de la pression interstitielle U (Fig.6)


WN  WN  U
U  (hw . cos 2  ). w .L U  (hw . cos 2  ). w .b / cos    w .hw .b. cos 
La résistance maximale mobilisable en cisaillement le long de AB est égale, en appliquant la loi de Coulomb à :
τ’ =σ’ tgφ’ + C’
Tmax  WN tg   (C .L)
Le coefficient de sécurité F est le rapport entre la résistance de cisaillement maximale (mobilisable) et la
composante tangentielle WT (mobilisée)
WN tg  ( C . L )
F s WT
qui peut s’exprimer également en contraintes :
 max   tg   C 
avec :      u
   [( z  hw ) 1  hw 2 ]. cos2   [hw . w . cos2  ]
 mobilisée  [( z  hw ) 1  hw 2 ]. sin  . cos  ]

 max WN tg   (C .L)


F 
 WT

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Le coefficient de sécurité est donc égal à :


 max [( z  hw ) 1  (hw 2 )]. cos2   (hw cos2  ) w .tg   (C )
F 
 [( z  hw ) 1  (hw 2 )]. sin  cos 
soit en divisant par cos²β le premier terme du numérateur
 max  [( z  hw ) 1  hw .( 2   w )].tg  C
F  
 [( z  hw ) 1  (hw 2 )].tg [( z  hw ) 1  (hw 2 )]. sin  cos 
Le premier terme représente la part due au frottement, le second la part due à la cohésion.

Coefficient de sécurité global


Le coefficient de sécurité global vis-à-vis de la rupture le long du plan situé à la profondeur z est donné
par la formule suivante
 Z 
   .h   w .hw . cos2  .tg   (C )
 max
F  0 
 z
sin  cos    .h
0
S’il n’y a pas d’écoulement et que le sol est homogène, la formule précédente devient :

 max  .z. cos2  .tg  (C )


F 
  .z. sin  cos 
5 Stabilité des pentes en rupture circulaire
z (x), l'équation de la ligne de talus,
y (x), l'équation de la ligne de rupture étudiée,
dy
tg  tangente à la ligne de rupture,
dx
On découpe le massif de sol en tranches verticales
d’épaisseur dx assez petites pour que la base de chaque
tranche, soit assimilable à un segment de droit (Fig.3)

On désigne :
e (x), ligne d'action de la force interne qui s'exerce
sur une section verticale,
V(x) et H(x), les composantes verticales et horizontale
de la force interne.
Chaque tranche est en équilibre sous l’action des
forces extérieures qui lui sont appliquées.
 forces volumiques (poids volumique, eau…)
 forces surfaciques (réactions entre tranches, réactions à la base de la partie stable sur la partie qui
glisse)

Les forces en présence sont les suivantes :


 poids de la tranche γh.dx
 forces intertranches horizontales H et (H + dH)
 forces intertranches verticales V et (V + dV)
Les forces intertranches ont leur point d’application sur la courbe e(x)
 contrainte normale totale σ, pression interstitielle u et contrainte tangentielle τ à la base de la
tranche appliquée sur la surface ds.1

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D'autre part, l'équation d'équilibre de l'ensemble du volume de sol AMB par rapport à O fournit une
équation supplémentaire
Projection des forces élémentaires sur Ox
En projetant les forces élémentaires normales σ.ds et tangentielles τ.ds à la tranche sur les axes (x,y) (rotation
de ), on obtient en prenant σet τavec leurs signes :

- dH+ (σ.ds) sinα+ (τ.ds) cosα = 0 (1)

Projection des forces élémentaires sur Oy

-dV – (γh.dx) + (σ.ds) cosα –(τ.ds)sinα = 0 (2)

Equilibre de rotation des forces élémentaires par rapport au point M, point de passage de γh.dx, σ.ds
et τ.ds (moment de la tranche par rapport à M)

- Vdx + H.de + dH(e-y) = 0 (3)


de
Avec ds 
cos 

De (1) et (2), on peut déduire les contraintes σ et τ


σ = ( γh cos2α ) + (tg α x
dH dv
  (h cos2  )  (tg .  ) cos2  (4)
dx dx
dH dV
  (h cos .sin  )  (  tg ) cos2  (5)
dx dx
[∫ τ(x+[y.tgα])+ σ(y-[xtgα])dx = ∫0x1(x.γh).dx (6)
Moment des forces surfaciques Moment des forces volumiques

On a donc cinq fonctions inconnues : H(x), V(x), σ(x), τ(x), e(x) et le coefficient de sécurité F.
On dispose des quatre équations (1), (2), (3) et (6) et de la loi de Mohr-Coulomb.
Ce système ne peut donc se résoudre sans une hypothèse complémentaire sur les fonctions inconnues
et les diverses méthodes de calcul (une vingtaine) diffèrent essentiellement par la nature de l'hypothèse
complémentaire, ce qui explique que suivant les méthodes retenues, on obtiendra des "coefficients de
sécurité" différents. Pour être retenue pratiquement, une méthode de calcul devra être validée par
l'expérience.
L'hypothèse complémentaire peut porter soit :
 sur une répartition des forces internes (Fellenius, Bishop, Morgenstern et Price...),
 sur la position de la ligne d'action e (Janbu...),
 sur la répartition de la contrainte normale (Raulin et al 1974) généralement appelée méthode des
perturbations.
On retiendra les méthodes les plus utilisées pratiquement
 méthode de Fellenius
 méthode de Bishop
 méthode des perturbations développées en France.

5.1 Méthode de FELLENIUS (1927)

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Dans cette méthode, on suppose que la surface de rupture potentielle est circulaire, on découpe le sol
en tranches élémentaires et on adopte comme hypothèse que les tranches sont indépendantes : Hi =
Vi = 0 (Fig.12)

Fig.4 Equilibre d’une tranche de sol (Fellenius)


Les équations de la statique ne sont donc pas respectées. Avec les mêmes notations que précédemment
pour une tranche i, on obtient :
   .h. cos 2 
   .h. cos  sin 
conformes aux équations (4) et (5)
Pour la tranche élémentaire, les contraintes se rapportant au même élément de surface

  max et  max  (  u )tg   C 
F
[( .h. cos 2  )  u ]tg   C 
Soit :   .h. cos sin 
F
Pour une tranche élémentaire, on retrouve la même définition que pour le glissement plan.
Pour l'ensemble des tranches, on écrit l'équation des moments par rapport au centre du cercle pour avoir
un calcul simple.
n
[(( i .hi . cos2  i )  ui )tgi  Ci].dsi n

i 1 F
 R  
i 1
[( i .hi . cos i sin  i ).dsi ]  R

R est constant et F par hypothèse le même dans chaque tranche, d'où

 [(( .h . cos
i i
2
 i )  ui )tg i  Ci].dsi
F i 1
n

 ( .h . cos 
i 1
i i i sin  i ).dsi

Pratiquement, on ne découpera pas suivant des tranches infiniment petites (30 à 50 tranches maximum,
généralement) et on fera le calcul à partir des poids de chaque tranche.
Wi   i .hi .dxi avec dxi  dsi cos  i
d’où Wi   i .hi . cos  i .dsi et en remplaçant dxi par bi (largeur d’une tranche)

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n

 [(W . cos )  (u .b / cos )]tg   C .(b / cos )


i i i i i i i i i
F i 1
n

W .sin 
i 1
i i

5.2 Méthode des tranches de BISHOP

5.2.1 Méthode détaillée (1954)


Les composantes Vi , Vi+1 , Hi , Hi+1 les réactions sur les tranches verticales interviennent dans les efforts
appliqués sur AB et influencent la réaction Ri .
En 1954, Bishop a publié une méthode appelée méthode détaillée, permettant de calculer le coefficient
de sécurité F en tenant compte de ces sollicitations.
Le coefficient de sécurité est donné par la formule générale suivante :
n
[(Wi  (Vi  Vi 1 )  ui .bi )tg ]  (Ci.bi )
 tg i
1
cos  i  sin  i .
F F
n

W .sin 
1
i i

5.2.2 Méthode de BISHOP simplifiée (1954)


Dans cette méthode, on suppose également que la surface de rupture potentielle est circulaire ; on
découpe le sol en tranches élémentaires et on adopte comme hypothèse qu’il y a seulement une
réaction horizontale entre les tranches :Vi = 0 et Hi ≠ 0 (Fig.13)

Fig.5 Equilibre d’une tranche de sol (Bishop simplifié)

En écrivant directement la projection sur l'axe vertical, avec

(  u )tg  C 
  
F F

   tg   C 
W  [(  u).b]   .b.tg      b.tg 
 F  F 
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d'où l'on tire la valeur de σ' que l'on reporte dans l'équation des moments par rapport au centre du cercle
I, de l'ensemble des tranches.
1 n bi n

F 1
 i i
[( .tg )  C ] 
cos  i
 
1
Wi . sin  i .R

Tous calculs faits, on obtient l'expression implicite de F.

n
[(Wi  ui .bi )tg ]  (Ci.bi )
 tgi
1 cos  i  sin  i .
F F
n

W .sin 
1
i i

La valeur initiale du coefficient Fo est obtenue, en général, par la méthode de Fellenius ; on opère
ensuite par itérations successives jusqu'à la précision désirée.

6 CONCLUSIONS
Les deux méthodes les plus couramment utilisées en bureau d'études sont :
 la méthode de BISHOP simplifiée, la méthode de FELLENIUS permettant de calculer,
généralement, le coefficient de sécurité initial ;
 la méthode des perturbations, en particulier pour les ruptures non circulaires. Elle a l'avantage de
fournir le lobe des contraintes normales le long de la surface de rupture.
Généralement, c'est au projeteur de rechercher la surface potentielle de rupture qui donne le coefficient
de sécurité minimum Fmin
Les calculs de stabilité de pentes nécessitent au préalable d'avoir déterminé la répartition des pressions
interstitielles dans tout le volume de sol exploré.
Généralement, pour qu'il y ait stabilité, on recherchera un "coefficient de sécurité global" de 1,5 en
phase définitive et de 1,3 en phase provisoire.
Les calculs aux états limites ultimes (ELU) sont en cours de développement dans l’EC7.
Les calculs de stabilité sont effectués en France à partir des principaux logiciels suivants :
GEOSTAB
PETAL
TALREN

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