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LA PRATIQUE ARCHIVISTIQUE AU CAMEROUN À L’HEURE DE

LA DÉCENTRALISATION
Par Martin NGUIO KOUANG
Chef de service de la documentation et des archives
Ministère de la Culture
Cameroun
Le Cameroun est passé dans la catégorie des « Pays à loi » depuis la promulgation de

la loi n°2000/10 du 19 décembre 2000 sur les archives. Celle-ci venait mettre un terme

aux décrets précédents et s’arrimer aux nouvelles avancées prenant en compte les types

nouveaux de supports.

S’il est acquis que le Ministère de la Culture en administre l’activité (avant 1983, la

direction des Archives était rattachée à la Présidence de la République) la réorganisation

récente de ce Ministère a fait ressortir :

Une direction des Archives en charge, entre autres, de :

l’élaboration et la mise en œuvre des normes scientifiques et techniques uniformes en matière


d’archives,

la préparation et l’application du cadre législatif et réglementaire en matière d’archives,

la politique d’acquisition, par le classement des archives privée

le suivi des activités des archives nationales.

Les Archives Nationales, comme service rattaché au Ministère de la Culture.

Avant d’analyser la situation d’ensemble, il faut noter que la loi constitutionnelle

N°96/06 du 18 janvier 1996 consacrait le principe de la décentralisation, complétée par les

lois n°2004/017 du 22 juillet 2004 relative à l’orientation de la décentralisation. La

circulaire n°001/CAB/PM du 11 janvier 2008 qui en est issue, relative à la prise en

compte de la décentralisation dans les stratégies sectorielles, recommande l’étude du

transfert des compétences des départements ministériels pour le terme de janvier 2010,
018 fixant les règles applicables aux communes et 019 fixant les règles applicables aux

régions.

Dans les faits, il a existé, dès 1989, des services régionaux (au sens administratif) des

archives qui avaient pour objectif de créer des dépôts régionaux. Leur suppression en

1993 a laissé un vide jamais comblé. Les archives produites ou reçues dans les unités

administratives (régions – ex provinces, départements, arrondissements, districts) ont

toujours été gérées localement sous la supervision du chef d’unité. Aucun cas de transfert

de celles-ci vers les Archives Nationales n’a été rapporté depuis l’indépendance, en 1960.

Tout à coté, la réorganisation gouvernementale de 2004 a mis en place dès l’année

suivante, dans tous les départements ministériels, des services d’archives dont l’activité

est centrée sur la gestion des archives courantes et intermédiaires, avant leur transport

aux Archives Nationales.

Dans cette configuration, la décentralisation trouve au Ministère de la Culture une

situation où, n’ayant pas jusqu’ici matériellement d’emprise sur les archives détenues par

les unités administratives, elle se doit de mettre en place des mécanismes de transfert de

compétences comprenant les moyens humains et matériels.

Si tant est vrai que les Archives Nationales n’existent pas encore organiquement, la

difficulté viendrait de la disponibilité des deux derniers éléments cités. De ceci surgit

l’ampleur des difficultés de l’application de l’orientation souhaitée.

Sur le plan humain, aucun cadre archiviste (Bac + 2) n’a été recruté dans

l’administration depuis 1987. Ceux antérieurement formés sont soit partis à la retraite,

soit, parce que démotivés, ont décidé de charger de corps ou de service. Au Ministère de
la Culture, seuls restent deux cadres formés en archivistique. Le Directeur des Archives

(organe normatif) ne dispose d’aucun collaborateur de cette qualité.

La décentralisation, si elle était effective au niveau des archives, en tenant compte des

canons professionnels, nécessiterait :

Structure Hauts cadres Cadres moyens Aides Total

Direction des archives 06 12 18

Régions (10) 10 10 20 40

Départements (57) 57 114 171

Communes (372) 372 754 1126

Total 16 421 798 1355

Chiffres astronomiques même s’il faudra répartir ces personnels entre ceux relevant de

la fonction publique et ceux recrutés par les organes décentralisés.

En recyclant ceux ayant des dispositions, la résorption d’une partie du déficit peut

être envisagée.

Sur le plan financier, le ministère de la culture n’ayant pas jusqu’ici eu des moyens

suffisants pour la gestion des archives, il n’y aurait pas réellement de transfert à effectuer

d’autant que le budget de fonctionnement de la direction des Archives ne prend pas en

compte les éventuels démembrements, puisque inexistants.

La construction des dépôts d’archives devra être prise en compte.

Techniquement, le grand chantier serait l’élaboration des normes et techniques à

appliquer aux archives. Jusqu’ici, aucune harmonisation n’a été effectuée. Le plan

national de classement attendu depuis 1993, date de création du service central des
Archives qui en avait la prérogative n’a pas été réalisé. Au cas où il le serait,

l’imprégnation nécessaire aux procédures d’archivage et de versement, et les délais pour

le roder seraient des chantiers énormes.

La structuration des organes régionaux ou communaux en charge des questions

culturelles n’étant pas encore effective, il va sans dire qu’au niveau des archives, une

politique beaucoup plus volontariste devra être envisagée pour donner plus de visibilité à

ce patrimoine qui n’a pas encore aux yeux des camerounais, toute sa place. Ceci passe par

une sensibilisation et formation des administrateurs aux enjeux des archives sur le plan

de la recherche et de la préservation de la mémoire. Le public devra également se sentir

concerné par cette sensibilisation, les procédures de classement des archives privées en

étant tributaires.

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