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Le « Nethou - Vagabond »

Histoire mouvementée
d’un cotre de 12 mètres 50
Nouvelles >>>

• 19 juillet 2006 - Robert Krouch redécouvre à Roscoff le bateau dont il


fut le propriétaire de 1956 à 1964

• Février 2006 - Le bateau qui ne voulait pas mourir, par Robert


Bénaioun, ami de Christian L'Hoir, dernier propriétaire

1926 – Les années folles


A Saint-Nazaire, un superbe paquebot s’apprête à prendre la mer ; son nom : l’ « Ile de France ».

A Roscoff, dans le Finistère, les chantiers KERENFORS achèvent la construction d’un petit yacht bien plus
modeste. Sa ligne est très classique pour un bateau de cette région : une étrave droite et une poupe élancée
vers l’arrière.

Les chantiers Kerenfors n’en sont pas à leur premier bateau. Ils occupent la place depuis le 17ème siècle.

Extrait des "Cahiers de l'Iroise" - 150e - 04-06/1991 par Michel Ferec


Maîtres constructeurs de barques - Les Kerenfors de Roscoff

L'activité du chantier de construction de bateaux s'étale sur une période qui va de 1650 environ
jusque vers 1930, à savoir:

• Tangui KERENFORS - 1672 - 1750 - fils de François

• Tangui KERENFORS, associé à Jean - 1703 - 1789

• Jacques KERENFORS - 1751 - 1832

• François KERENFORS - 1786 - 1873

• Hyacinthe KERENFORS - 1815 - 1896

• Anselme KERENFORS, associé à Francique - 1850 - 1932

En 1711, Tangui et Jean paient chacun 3 livres comme taxe de charpentiers de mer. (AM. St Pol de
Léon)

"Jean Kerenfors utilise la cale du Stivel à Morlaix pour la construction de navires de taille
imposante" (J.Y.Tanguy relève dans "Le port et Havre de Roscoff")
Ces maîtres charpentiers ont en outre participé à la vie de Roscoff notamment Jacques
KERENFORS qui fait partie du corps politique en 1789 et signe le cahier de doléance. En 1790, il est
procureur de la commune, puis agent national.

Hyacinthe KERENFORS est conseiller municipal, puis adjoint de 1848 à 1870. Francisque, puis
Anselme sont conseillers.

Inscrits maritimes (matricule des ouvriers non navigants) ces maître ouvriers pourraient être requis à
tous moments pour le service des arsenaux. François KERENFORS "levé" à Roscoff pour Brest
04.04.1816 ( Archives de la marine de Brest).

« Le Yacht » du 24 avril 1926

« La construction est toujours très active dans la région. Les chantiers Kerenfors, de Roscoff, terminent la
construction d’un yacht de croisière de 12 mètres pour le compte de M. Bodin qui compte entreprendre sous
peu une longue croisière à bord ».

Le Nethou, un yacht de croisière


Bien qu’ayant la silhouette des cotres dont la vocation était de travailler pour la pêche ou le pilotage, le Nethou
fût construit uniquement pour la plaisance.

C’est Maurice Bodin, retraité de la Marine Marchande, qui en passe commande aux chantiers. Son objectif est
de construire un yacht en Bretagne et une fois terminé, de l’emmener en méditerranée.

Le Nethou fut vraisemblablement construit d’après les plans d’un cotre pilote de la baie de Morlaix. Il en a la
ligne, ainsi que le gréement.

Ce choix de construction est intéressant pour la plaisance car il laisse au yachtsman beaucoup de place pour
les aménagements intérieurs tout en apportant au bateau de réelles qualités marines.

Ces cotres étaient capables de prendre la mer par n’importe quel temps. C’était en effet la qualité essentielle
du bateau « pilote » ( c’est le pilote qui arrivait le premier au devant du vapeur qui décrochait le contrat).

Extrait du « Yacht », juillet 1926

Journal de bord de M. Bodin de sa traversée de Roscoff à Gibraltar

Croisière de Roscoff en Méditerranée sur un yacht mixte de 12 m. 50


de longueur.
J'ai effectué le voyage de Roscoff au Trayas sur mon petit yacht mixte Nethou, de 8 tx 36 de jauge, d'une
longueur totale de 12 m. 50, dont c'était la première sortie. Je crois que le .récit de cette croisière de près de
2.000 milles, accomplie en moins d'un mois, vingt-huit jours exactement, y compris deux escales, à
Lisbonne et à :Gibraltar intéressera les lecteurs du Yacht; mais je serais ;heureux si j'avais pu montrer aux
sportsmen qui ignorent la mer, ce qu'il est possible de faire avec, un voilier de petit tonnage, à peu, de frais
et apporter ma contribution à la cause du yachting français.

Nous étions trois à bord du Nethou : un ami d'Angers, M. L.Berruet; grand. mutilé de la guerre, qui n'hésita
pas à m’accompagner et dont il faut admirer l'énergie; mon marin, Henri Autret, le seul homme de Roscoff
qui voulut bien s'engager pour cette randonnée, et: enfin le capitaine du Nethou; signataire de ces lignes.

Nous quittâmes Roscoff le 4 mai dernier, à 11 h. 30; avec forte brise d'Est et courant de jusant. Les quatre
premières heures nous filâmes 8 n. 5 sur un largue et le soir, à 18 h. 30, nous étions au nord d'Ouessant.
La brise mollit à ce moment et je ne pus doubler Ouessant que vers minuit. Je mis. alors le cap sur
Finistère, distant de 380 milles, mais en me tenant un peu à l'ouest de la ligne des vapeurs, afin d'être plus
tranquille. Dans la nuit, je perdis de vue le feu des Créac’h. Le lendemain matin, j'établis mon flèche. A midi
mes observations me donnèrent comme position Nord 47° 51’ et 8° 5' W. Paris, et 120 milles parcourus -au
loch. Dans la soirée, la brise fraîchissant, je dus rentrer flèche, grand'voile et, établir ma voile de cape.
C'était la première fois que nous faisions cette manœuvre sur le Nethou et elle nous prit un certain temps.
Par .la suite, à deux, nous arrivions à amener, à rouler notre grand'voile, à amarrer solidement le gui sur le
couronnement et à envoyer la voile de cape en moins de vingt, minutes. Le. 6, au matin, nous pûmes
remettre la grand'voile.

A midi nous avions parcouru 251 milles (N° 46° 5' et 10° 2' W. Paris). L'après-midi, force nous fut encore
d'amener, notre grand'voile pour en réparer l'empointure, qui, faite avec du filin trop faible, avait cédé.
Certains constructeurs ne me. paraissent pas avoir une idée très nette des efforts auxquels est soumis un
bateau. A ce moment, le vent qui nous avait si bien servi, commença à mollir. Comme la houle était très
forte, je ne pus avec faible brise, tenir le vent arrière et je me décidai à loffer, pour appuyer mon bateau. Je
courus alternativement sur les deux bords, tout en ayant soin de ne pas aller à l'est de la ligne des vapeurs.
J'en rencontrais plusieurs; qui tous applaudirent notre petit bateau. L'après-midi du 7 mai. nous croisâmes
une escadrille anglaise, composée d'un croiseur léger et de neuf contre-torpilleurs, qui faisait route sur
Finistère. Notre salut nous fut rendu deux fois; et; sur les navires anglais toutes les jumelles étaient
braquées sur nous. Les Anglais ne s'attendaient: certes pas à rencontrer si loin un petit bateau de plaisance
battant pavillon français. Cette journée -du 7 mai était la troisième de notre voyage: A midi; nous avions
parcouru 331 :milles (N. 44° 48'-10° 30 W. Paris) soit 110 milles de moyenne journalière. Tout cela :à la
voile, le moteur ayant refusé tout service depuis l'appareillage. Le soir, la brise fraîchissant, je voulus
diminuer ma voilure. Par suite d'une malfaçon, je ne pus me servir de mon gui à rouleau. Je le maudis,
énergiquement, mais je dus fuir sur mes focs et, après une vaine tentative de réparation dans la nuit, (il était
23 heures) je dus me résoudre à envoyer ma voile de cape, bien que la brise m'eût permis de naviguer avec
deux tours de rouleau.

Le 8; mai, à 2 heures du matin, j'aperçus au S. S,-E. le puissant feu espagnol de Sisargos. C'était le premier
phare vu depuis Ouessant: A 4 heures nous relevâmes le feu de Villano par l'avant. L'atterrage était précis.
Entre temps, là brise de N.-E fraîchit et la mer se creusa. La houle atteignit près de six mètres de hauteur,
Le Nethou se comporta très bien. Des vapeurs, le cap sur Ouessant, tanguaient dur, mettaient
copieusement le nez dans la plume et... nous étions encore en chaussons sur le pont. La construction de
Roscoff est vraiment très marine. Malheureusement elle est peu fignolée et dans ce pays on ignore tout de
l'art d'aménager un bateau. La mer continuant a se creuser, je fis fermer toutes les ouvertures. A 11 h. 30
nous passâmes à cinq ou six milles à l'ouest du cap Finisterre, ayant traversé le Golfe de Gascogne en trois
jours et demi.

Le soir, vers 22 heures, le bateau devenant très dur à gouverner (on ne pouvait pas barrer -plus .d'une
heure de suite), je fis amener, la voilé de cape. Nous faisions à ce moment route, sur les Berlingues. Le 9;
au matin, la brise mollit et je fis établir toute ma toile. A midi calme plat. La houle de la veille subsistait,
c'était très désagréable. Nous roulions bord sur bord.:. Pour pouvoir déjeuner; nous dûmes amener la
grand'voile, le gui menaçant de tout casser. Nous avions parcouru 551 milles. A partir :de ce moment je
ne fis plus d'observations astronomiques, car je pouvais utiliser des relèvements terrestres, n'étant guère:
qu’à10 ou 15 milles des côtes portugaises. Le 10, au matin, à 9 heures environ, nous rencontrâmes un lan-
goustier camaretois, qui, reconnaissant un bateau breton, mit son embarcation à la mer. Il manquait de
vivres. Nous pûmes lui donner du pain, de l'huile et de l'eau-de-vie. En échange il nous offrit du poisson.

Ce, matin-là,, les vents passèrent par tous les quarts de la rose des vents pour, finir par s'établir au Suroît.
A. midi nous relevâmes la tour du phare de Boa Nova, à 7 milles au N.- 80 E: (au loch 595 milles). Le 11
mai, au matin, par petit temps nous passâmes entre les Berlingues et la presqu'île de Péniche. La brise-
était. du Nord, après que les vents eussent joué toute la nuit, et soient passés successivement au Sud et à
l'Est. Nous longeâmes la terre à quelques milles de distance. Nous fûmes dépassé par le Formose, des
Chargeurs Réunis, dont tous les passagers nous firent une ovation.

A 18 heures nous passions devant Razo et entrions dans le Tage. Nous avions parcouru 710 milles en 7
jours et six heures. Nous aurions désiré remonter la rivière, malheureusement la brise mollit et-le: moteur
continuait à refuser tout service.
Ne pouvant étaler le courant de jusant je cherchais à la sonde un mouillage sur le rivage nord, entre les
feux de Saint Julien et de Belem. Le lendemain matin profitant des contre-courants qu’on rencontre sur la rive
nord du Tage, très près de la terre; je pus arrivé à Lisbonne bien avant l’étale de la basse mer.

Nous quittâmes Lisbonne le dimanche 16 mai à 6 h30 par forte brise de N. J’appareillais avec deux jours
de rouleau.

Dès que j’au passé le banc du Buglo, la brise rafraîchissait, je dus établir la voile de cape. A ce moment, nous
mîmes le loch à la mer. Je tachais de faire route directement sur le cap Saint Vincent, mais le bateau
embardait terriblement. A 10 h 30, nous passâmes à 3 milles à l’ouest du cap Espichela

A 23 h 30, nous passâmes au large du cap Saint Vincent. Nous fîmes alors route sur Gibraltar. Le 17, la brise
commença à mollir, je pus envoyer ma voile de cape, puis ma grande voile avec des tours de rouleaux
d’abord, ensuite toute haute, puis enfin j’établis le flèche. Dans l’après-midi, une rafale un peu brutale nos
surpris. Le bateau tient bien le coup. Malheureusement le gui, qui avait trois nœuds au même endroit se
rompit. Nous étions à près de 60 milles du Cap Saint Vincent, la terre la plus proche. Nous mimes notre voile
de cape, malheureusement le vent mollit et refusa. Avec la voile de cape nous faisions des bordées carrées.
Impossible de continuer ainsi. Enfin, nous pûmes réparer le gui avec nos deux avirons, la vergue de flèche
que nous sacrifiâmes et tous le rabans qui se trouvaient à bord et le 18 au matin, nous avions un gui assez
solide pour supporter la grand’voile au bas ris.

M. BODIN

Maurice BODIN arrive au terme de son périple après 28 jours de mer et deux escales, à Lisbonne et à
Gibraltar. Il navigue en méditerranée pendant trois ans.

1929
Au cours d’une croisière entre Palerme et Toulon, le Nethou est complètement désemparé par une violente
tempête de mistral.

Le gréement détruit, le bateau est à la merci des éléments. Il dérive pendant trois jours avant d’être secouru
par le paquebot “Martinique” de la Compagnie Générale Transatlantique.

Maurice Bodin, son épouse ainsi que le mousse prenne place à bord du Martinique, qui remorque le petit
yacht jusqu’à Alger.

Une nouvelle période commence pour le Nethou sous le soleil nord africain.

Mars 1929, M. Emile Vidal, membre de la Société Nautique d’Alger, se rend acquéreur du Nethou que Maurice
Bodin est obligé de laissé sur place.

Il entreprend les réparations qui s’imposent: révision de la coque et confection d’un nouveau gréement, y
compris mât et espar. Il compte faire au cours de la belle saison une croisière en méditerranée.

“Le Yacht”, août 1929 – Alger

La réfection complète du yacht Nethou qui après son naufrage en Méditerranée, avait été acheté par M.Emile
Vidal, le sympathique yachtsman algérois, vient d’être terminée. A l’ancien gréement de cotre, détruit au cours
du naufrage, a suppléé un gréement marron dont la voilure sort des ateliers Ténot. La première sortie du
Nethou a eu lieu le 2 août, par gros vent du nord et mer creuse. La tenue à la mer de cette robuste unité de
plaisance a été parfaite et a donné entière satisfaction à son propriétaire, qui compte d’ici peu cingler vers les
Baléares pour une assez longues croisières autour de ces îles.
Une fois regréé, le Nethou sillonne la méditerranée en compagnie de son nouveau propriétaire et plus rad, en
1931, avec ses deux associés, M; Aldebert et le Docteur Béraud, vice-président de la Société Nautique
d’Alger.

D’un tonnage plus important, le cotre marconi Nethou, ayant à bord un de ses propriétaires, M: Émile
Vidal, ainsi que M. Bernardo Martinelli, nous revient d'une fort intéressante croisière aux îles Baléares,
itinéraire qui paraît devenir familier à nos yachtsmen algérois.

Parti le 1er août, à 8 heures du matin, par vent d'Ouest frais, le Nethou arrivait le lendemain, à 15 heures, à
Palma de Majorque. Après plusieurs jours de repos dans cette ville, qui furent employés à la visite des grottes
de Monaco, de Porto-Cristo, de Pollensa, du cap Forujentor, etc..., le Nethou quittait Palma le 10 août,
à 6 heures, pour Iviça, où il arrivait le même jour, à 16 heures, ayant bénéficié d'une superbe brise de N.-W.

Le souvenir que rapportent nos yachtsmen de cette escale est des plus agréables, tant l'accueil
chaleureux qui leur a été fait par le président et les membres du Club Nautique de cette localité fut empreint de
la plus franche cordialité. Aussi, afin de prouver leur reconnaissance à leurs amis espagnols, nos yachtsmen
algérois ont-ils fait inscrire au Club Nautique d'Iviça le cotre Nethou, au mât duquel flotte aujourd'hui le guidon
de ce groupement.

Malheureusement, le séjour dans cette ville ne devait être que de courte durée et le 12 août, à 15 heures,
le Nethou appareillait par bonne brise d'Est et mer plate pour Formentera, où il mouillait deux heures après
son départ.

Le 13 août, le Nethou cinglait vers la côte algérienne par jolie brise de Sud-Est et le 14, à 20 heures,
prenait son mouillage dans le plan d'eau du Sport Nautique d'Alger.

La bourrasque de vents de N.-W. de la nuit du dimanche au lundi de Pentecôte faillit causer la perte d'une
des plus belles unités d'u Sport Nautique d'Alger, : le Nethou.

Après avoir navigué toute la journée du dimanche, Nethou mouillait dans la soirée à cent cinquante mètres
de terre, à la plage de la Madrague, près de Guyotville.

Dans la nuit, un violent coup de vent s'éleva, Nethou chassa sur son ancre et, avant que le moteur puisse
être mis en marche, il vint s'échouer, fort heureusement sur le sable transporté par les brisants à quelques
mètres de terre.

Dès que la nouvelle fut connue à Alger, de nombreux sociétaires du S. N. A. se transportèrent sur les lieux
du naufrage et tout fut mis en œuvre pour sauver le yacht, malgré les éléments qui ne paraissaient pas vouloir
se calmer.

L'inquiétude sur le sort de cette robuste unité fût grande durant toute la matinée. Néanmoins, vers 13
heures, le remorqueur de 650 CV Provençal 21, de la Société Provençale de Remorquage, pourvu d'une
solide aussière de 150 mètres, dite « Sécuritas” aimablement mise à la disposition des sauveteurs par la
Compagnie Schiaffino, prit la mer et fut assez heureux, après d'habiles manœuvres pour renflouer le
Nethou qui fut ramené à Alger sans paraître avoir trop souffert de son échouage.

1932 - Fin
Nouveau changement de propriétaire.

Emile Vidal cède le bateau au Dr. Béraud, qui s’associe plus tard au Dr. Colonieu

1936 - Alger
Si le yachting de course s’est quelque peu ralenti par suite de l'exode estival des Algérois, celui de
croisière, par contre, est marqué par une grande activité. C'est ainsi que les yachts Eider, Pavane,
Raiatéa, Sylphe, Iris ont visité depuis le début de l'été et à plusieurs reprises les ports de Dellys et de
Bougie et que le Nethou et la Jeannette II ont cinglé sur les Baléares où ils durent subir quelques légers
ennuis que leur procurèrent les événements qui se déroulent actuellement en Espagne.

Disons de suite que ces ennuis furent sans gravité et que nos yachtsmen qui avaient quitté Alger ignorant
totalement ce qui se passait en Espagne en furent quittes pour des émotions bien compréhensibles
d'ailleurs. Les propriétaires du Nethou, les docteurs Colonieu et Béraud, ont bien voulu à ce sujet nous
donner quelques indications sur leur court séjour dans ce pays troublé.

Parti d'Alger le 18 juillet, le Nethou arrivait à Palma le 21 après une traversée délicieuse de 29 heures
qui fut favorisé, par un délicieux vent d'Est. Dans le part de Palma se trouvaient déjà les goélettes Jean-
nete Il, du Y. C. A., appartenant à M. Rigoulot, et Jacaranda, appartenant à M. Harry Baur, aux côtés
desquelles le Nethou prit son mouillage.

LA COURSE - CROISIERE ALGER – DELLYS - ALGER


Cette importante et première épreuve de yachting s'est disputée les 9, 10 et 11 juillet, sur le parcours Alger-
Dellys et retour, soit 90 milles environ. Cette manifestation, organisée par le Sport Nautique d'Alger, sous le
haut patronage du Yacht Club de France, qui avait bien voulu attribuer à l'épreuve . le prix des Compagnies
de Navigation, fut un très gros succés pour les organisateurs. Sur huit yachts qui prirent le départ, deux
seulement durent abandonner, par suite d'avaries de gréement.

Néanmoins, le 10 juillet, à 10 h. 50, le yacht Elvire franchissait à Dellys la ligne d'arrivée, suivi d'Iris à 11 h.
40, d'Antigone à 24 h. 25, du Nethou à 15 h 05, et du Mourato à 17 h, 30. Fleur-de-Mai,. qui avait

effectué la route au moteur, après avoir cependant pris le départ à la voile précédait à l’arrivée le lot de
coureurs.

A son tour, M. le Dr Béraud, vice-président du Sport Nautique, exprima ses sentiments à l'égard de la
navigation de plaisance qui sont les mêmes que ceux de MM. Guiauchain et Sizes; il n'a qu'un seul, désir,
celui de voir se réaliser souvent de semblables manifestations. M ; le Dr Béraud remercia ensuite M. le
Gouverneur Général de l'Algérie, la Ville d'Alger, le Yacht Club de France, M. Esbert et de généreux
anonymes qui ont bien voulu offrir des coupes et objets d'art comme prix pour cette croisière. Il remercia
aussi M. le Maire de Dellys pour son aimable accueil. Ce dernier souhaite la bienvenue aux yachtsmen
algérois et lève son verre à l'heureux retour des concurrents.

Voici les résultats techniques. .

Classement général d'après le handicap national.•

Elvire, à M. Guiauchaiu en 26 h 42

Nethou, à M. Béraud en 31 h 42

Antigone, à M. Faget en 31 h 50

Mourato, à MM..Ambrosi et Hanin en 34 h 34

Iris, à M. Grandmont en 35 h 35

Classement par séries

Série A I Elvire

Série B I 1. Nethou – 2. Antigone

Série des 8 m 50 Mourato


Prix spécial Iris et Fleur-de-mai, à M. Herman

Une vive effervescence régnait déjà dans Palma fasciste. Après avoir assisté au départ de la Jeannette-
II, qui ralliait Alger, et les opérations de mouillage terminées, nos yachtsmen débarquèrent pour faire des
provisions, vêtus par inadvertance de leur veste de staristes sur lesquelles s'étalait l'étoile rouge, insigne
des flottes de stars. Ils furent aussitôt appréhendés et durent découdre rapidement cet insigne de leur
veste. Ils purent ainsi continuer leurs achats néanmoins souvent arrêtés par des tout jeunes gens qui,
sous la menace de fusils et revolvers, les mettaient dans l'obligation de décliner leurs titres et qualités, les
bras en l'air, bien entendu.

Le 24 au matin, alors que tout l'équipage du Nethou était plongé dans un profond sommeil, deux bombes
lancées d'un hydravion éclatèrent sur le quai. Le réveil fut plutôt désagréable et, après avoir assisté à
une journée très troublée, nos yachtsmen décidèrent de cingler sur Cabréra. Au moment -de leur départ
plusieurs bombes, dites de démonstration, éclataient encore sur Palma.

1938
En 1938, au large de la Sicile, le Nethou essuie une de ces tempêtes de mistral qui peuvent se
déchaîner instantanément en Méditerranée. Le yacht en perdition voit son gréement une nouvelle
fois détruit. Grâce à son petit moteur Gouach, le Nethou peut se mettre à l’abri.

Suite à cette mésaventure, les Drs. Béraud et Colonieu décident de diviser la voilure. Ils ajoutent
un tape-cul et le transforment donc en yawl bermudien.

C’est sans doute à cette époque que la barre fût remplacée par une barre franche.

1939
L’Europe entre ans le deuxième conflit mondial.

Le Nethou, comme la plupart des bateaux de plaisance de la Société Nautique Algéroise, est réquisitionné par
la Marine Française, qui veut en faire un bateau école. Il est amené sur la grande jetée du port d’Alger. Un
coin de quai use un bordé au niveau de l’eau. Le Nethou coule par quelques mètres d’eau.

Il n’est renfloué que bien plus tard et est restitué à ses propriétaires à la fin de la guerre. MM. Beraud et
Colonieu touchent 40 centimes de dédommagement par jour passé par le fond.

1946
Le Nethou traverse la méditerranée en 1946, à destination d’Antibes, où il est vendu à Michel Bertrand,
professeur à Paris.

Michel Bertrand, qui en est aujourd’hui à son 27ème bateau, ne gardera le Nethou que quatre ans.

Le cotre effectue plusieurs croisières, et surtout une campagne de pêche à l’éponge sur les côtes tunisiennes
qui manque de tourner au drame.

Du poste avant, Michel Bertrand surprend la conversation de son équipage tunisien qui projette de le jeter à la
mer pour s’emparer du Nethou.

Il réussi à les tenir en respect avec un fusil jusqu’au port le plus proche.

1950
Pendant ces quatre années le Nethou ne subit pas de grosses transformations. Il est équipé d’un moteur
Baudouin à essence et pétrole, à manivelle.
Il est mis en vente à Cannes en juillet et sera vendu 125.000 francs le 29 août 1950.

L’homme qui fait affaire avec Michel Bertrand s’appelle Jean Corne, il est chirurgien-dentiste en Haute-Savoie.

1951
Dès 1951, Jean Corne entreprend la réfection complète du pont. Il confie ces travaux à un charpentier de
marine de Monaco.

Le pont est relatté en “Pitch pin” d’une épaisseur de 70mm. Le roof est complètement reconstruit.

1953
Jean Corne trouvant que le Nethou est trop lourd à manœuvrer pour un homme seul, le vend le 21 septembre
1953 à Charles Vanel.

L’acteur rebaptise “Vagabond”, comme les autres yachts qu’il aura par la suite. Il entreprend également la
rénovation complète de l’intérieur et modifie le gréement. Il fait peindre la coque en noir.

Nice-Matin – Samedi 22 août 1987

En rappelant que Charles Vanel était déjà tropézien à l'époque où les « locomotives » actuelles de la presqu’île
n'étaient pas nées. C'était dans les années 30, à « La Pêcherie », sur la baie des Caroubiers où il avait pour
voisins Colette, René Clair et Dunoyer de Segonzac. Et pour compagnon « Le Vagabond », un voilier qui restait
rarement à quai, lorsqu'il séjournait au bord du Golfe. Un séjour qui fut le sien, fidèlement, jusqu'en 1955, lorsqu'il
céda sa « Pêcherie » à Julien Duvivier..

Le « tape-cul » est remplacé par un mât d’artimon placé deux mètres en avant. La grande voile, plus petite, est aurique,
la trinquette bômée et une voile de flèche surplombe l’ensemble. Les travaux sont effectués à Fiumicino en Italie.

En 1955, voulant se rendre acquéreur d’un bateau plus grand, Charles Vanel contacte l’ancien propriétaire du petit cotre,
Jean Corne.

Celui-ci répond qu’habitant en Haute-Savoie, il ne lui est pas possible d’entretenir un bateau de la taille du « Vagabond ».

1956 à 1964
C’est Robert Krouch, directeur commercial chez Kodak qui l’achète début 1956. Robert Krouch qui vit aujourd’hui dans le
Michigan et fait partie des « Brothers of the Coast », laisse le Vagabond basé à Saint Tropez, où il obtient un anneau
devant le célèbre « Sénéquier ».

De 1956 à 1959, Robert Krouch et sa famille font à bord de fréquents séjours. La première grande sortie se fait en
Corse ; ensuite le Vagabond visite la Sardaigne et les côtes italiennes, vers Porto Fino.

En 1958, en revenant d’une croisière aux îles d’Hyères, alors que Robert Krouch jette l’ancre dans la baie de Pampelone,
deux nageurs s’approchent du Vagabond : « Quelle ne fut pas notre surprise, raconte Jean Leubu, ami de Krouch, de
reconnaître Gérard Philippe et le jeune Pierre Fourcade, venus saluer Charles Vanel, qu’ils pensaient toujours être le
propriétaire du bateau ».Robert Krouch leur fait les honneurs du Vagabond, sur lequel ils passent une partie de l’après-
midi.

En 1959, Robert Krouch emmène le Vagabond à Monte-Carlo, où il est ancré au port de la Condamine. C’est
certainement à cette époque que le vieux Baudoin ( le moteur) qui équipait le petit yacht est remplacé par un
Mercedes diesel de 90 CV.

19 Juillet 2006 - Robert Krouch retrouve avec beaucoup d'émotion son ancien
bateau à Roscoff
De chez lui à Miami en Floride, Robert Krouch, dit "Bob" fait comme beaucoup d'internautes, il tape
son nom dans le moteur de recherche de Google, comme cela pour voir.... Quelle surprise, quelle
émotion, il découvre la page du site web du « Vagabond » qui est la première dans le résultat de
Google. Il ne savait plus où était son ancien bateau qu'il n'avait pas vu depuis 42 ans.

Bob a de la famille en France, des enfants, une belle-sœur vivant en Bretagne à Port-Blanc dans les
Côtes d'Armor. Il entreprend un voyage. A peine descendu de l'avion le 18 juillet, il se rend chez sa
belle-sœur. Et dès le lendemain, il vient en famille à Roscoff pour revoir son "Vagabond". Il n'a pris
aucun rendez-vous sur place.

Il réussit à contacter le secrétaire de l'association "Nethou-Vagabond-Roscoff". Une rencontre de trois


heures permet à peine de tout se dire. Première escale au bar le « Winch », base du Vagabond Il
fallait du temps pour que chacun raconte sa version de l'histoire.

Côté Roscoff, nous lui avons raconté l'appel au secours dans la presse pour sauver ce bateau, la
réaction immédiate, le retour du Vagabond début janvier 2006 et les projets autour de ce témoin de la
vie maritime roscovite.

Bob a raconté sa rencontre avec Charles Vanel, lors de l'achat du bateau qui était un véritable bijou en
1954, les travaux qu'il a effectué pour adapter le bateau à son nouvel usage, en famille avec trois
enfants. Il a également raconté quelques aventures avec les marins qui l'ont accompagné pendant les
huit années de navigation sur le Vagabond.

Ensuite, après les présentations, la visite a commencé. D'abord, un premier arrêt à l'emplacement du
chantier Kerenfors où le bateau a été construit. Ensuite, à Ste Barbe, ce fut la rencontre de Bob avec
le Vagabond. Il n'a pas pu cacher des larmes d'émotion quand il a touché son ancien bateau.

Ce moment d'émotion passé, Bob qui a aujourd'hui 85 ans, mais qui est dans une forme étonnante a
grimpé l'échelle de 4 mètres comme un jeune homme. Avec l'aide de son petit-fils, il a fait une
ouverture dans la bâche de protection du bateau pour s'y glisser et faire la visite de l'intérieur, de la
cabine. Il y est resté une bonne demi-heure en compagnie de ses proches. En ressortant, il était
partagé entre le bonheur d'avoir remis les pieds à bord et la tristesse d'y découvrir un bateau en
mauvais état.

Il a raconté par le détail toutes les modifications de l'aménagement de la cabine, du changement de


moteur, etc... Il précise que l'intérieur était entièrement recouvert d'acajou quand il avait acheté le
bateau.

Bob a toujours un bateau chez lui au USA, il s'appelle.... le"Vagabond". C'est dire combien ce vieux
bateau qu'il vient de retrouver a compté dans sa vie de marin. Actuellement, Bob écrit ses mémoires
de marin pour une revue américaine ( du style de notre Chasse-Marée ). Il y relatera ses années sur le
cotre aujourd'hui redevenu roscovite.

Cette rencontre est pour l'association un encouragement magnifique. Derrière ce qui peut
apparaître comme une "épave" se cache une histoire, des histoires qui sont des "
morceaux " de roman et de vie.

1964
Le Vagabond est vendu en 1964 à André Ferrari, de Lyon.
Le nouveau port d’attache du cotre devient Le Lavandou.

De ce point de départ, le Vagabond sillonne à nouveau la Méditerranée : Baléares, Corse, Sardaigne

1978
Le vagabond, qui est amarré trop sec, coule dans le port de Bormes, suite à une petite marée comme il peut y
en avoir en Méditerranée. Le bateau s’incline de l’avant et embarque de l’eau par les jointures de bordés. Une
remise à neuf s’impose.

Les travaux sont confiés à Pat Girard, petit fils d’André Ferrari et aujourd’hui charpentier de marine, spécialisé
dans la réfection de vieilles coques. Il est aidé par M. Aguilar pour certains travaux de charpente.

1979
Les travaux seront terminés pour l’été 1979. André Ferrari décède à la fin de cette même année.

Ses petits-enfants, qui ont grandi avec le Vagabond sur lequel ils ont passé la plupart de leurs vacances,
tentent de le conserver en créant une association pour sa sauvegarde.

1983
Le bateau est vendu par la famille à un tropézien, Jacques Cadet, amateur et passionné de vieilles coques et
de navigation authentique.

Jean cadet, en voyant le petit cotre dans le port de Bormes, tombe sous le charme de sa silhouette et
l’emmène dans un port qu’il connaît déjà bien, même s’il a beaucoup changé : Saint Tropez.

1984
Jacques cadet entreprend de redonner une nouvelle jeunesse au presque sexagénaire Vagabond :

• renforcement de la voûte arrière affaiblie par un incendie antérieur ( remplacement de plusieurs


barreaux de pont )
• remise à neuf de l’intérieur qui souffre d’infiltrations d’eau douce s’écoulant par le pont ( masticage et
peinture ). Étant déjà propriétaire d’un autre vieux gréement, Jacques Cadet met en vente le petit
cotre.

1985
Il est acheté en 1985 par Christian L’Hoir, professeur en Belgique et Pascal Lorent, journaliste, tous deux
anciens amis de l’ancien propriétaire.

Le bateau qui ne voulait pas mourir


li s'est appelé "Nethou" puis "Le Vagabond". C'est sous ce dernier vocable que nous
l'avons connu.

Il y a une quinzaine d'années , la capitainerie du Lavandou change de place notre bateau,


le Marco Polo et nous positionne tout au fond du port , contre l'aire de carénage .

Il semblait voué à une destruction certaine , au grand chagrin de son capitaine , et de nous
tous, qui avions le coeur serré à la pensée de voir disparaître ce bateau légendaire .
Mais on ne peut pas parler du Vagabond sans évoquer son propriétaire , Christian L'Hoir ,
un personnage truculent et sympathique que nous avions connu depuis le jour ou notre
bateau a été amarré à coté du sien , il y a 10 ou 15 ans Très apprécié par tous ceux qui
gravitaient dans le secteur , depuis les dirigeants et employés du chantier contigu et du
port , jusqu'aux shipchandlers , artisans et mécaniciens du secteur , il était toujours prêt à
rendre service . On peut dire que quand il descendait de sa Belgique natale vers la fin juin
pour remonter en octobre ou septembre il animait ce coin du port du Lavandou qui était un
peu devenu son domaine.

Et personne n'en prenait ombrage .

En effet , le Vagabond lui même , ne pouvait plus sortir , ayant perdu au cours de sa vie
mouvementée, son lest de fonte et son moteur grippé à mort depuis longtemps hors
service . Mais cela n'empêchait pas son propriétaire, Christian de continuellement travailler
à améliorer le pont , le gréement et l'intérieur de ce bateau qui était une grande partie de
sa vie En fait il ne s'en servait que comme résidence secondaire , pour se loger et recevoir
les plongeurs du club de Charleroi dont il était le président .

C'était devenu une coutume , pour nous, quand nous rentrions de croisière en Corse ,
Sicile , Sardaigne ou Baléares, de le trouver sur le quai pour nous passer les amarres et
nous souhaiter la bienvenue . Après quelques semaines de navigation , nous étions
tellement contents de retrouver notre poste d'amarrage, très animé, avec tous ses amis qui
étaient aussi les nôtres ..

Entre temps, il coule une seconde fois, à cause d'un amarrage défectueux , dans le port de
Bormes les Mimosas. De nouveau restauré il reparaît en vedette dans une série télévisée
qui fut la coqueluche du moment , " Les cœurs Brûlés" , avec Mireille Darc et Pierre Vanek
, en 1992 .

Après son énième naufrage, le dernier , dans le port du Lavandou, son propriétaire , le
Christian du vagabond , comme nous l'appelions, s'arrache les cheveux et commence à se
battre contre les compagnies d'assurance. Dans l'impossibilité de faire face à la petite
fortune qu'on lui demande pour rénover le "Vagabond", il est contraint d'abandonner,
provisoirement à son sort son bateau sur l'aire de carénage du Lavandou

Les mois passent et , enfin, tout se débloque comme je l'ai raconté un peu plus haut .

La roue du destin a tourné dans le bon sens : un jour de Janvier 2006 , une semaine avant
sa démolition

prévue , le "Vagabond , alias Nethou , chargé sur une remorque spéciale / bateaux, prend
la route de la Bretagne, et plus précisément de la ville de Roscoff qui l'a vu naître , il y a 80
ans.

Ce même jour , je reçois un coup de téléphone de mon ami belge , Christian L'Hoir , qui ,
des larmes dans la voix me dit textuellement : "Robert , le "Vagabond ne mourra pas ".

N'est ce pas une belle histoire que celle de ce bateau qui ne voulait pas mourir !!!
Robert Bénaioun - Fontaines , Février 2006

1987
Le bateau retourne une nouvelle fois au Lavandou pour occuper la même place que dans les années
soixante. Il s’y trouve encore en 1993.

Malgré les quelques 1.000 kilomètres qui les séparent de la méditerranée, les nouveaux propriétaires
essayent de garder le vagabond en état de navigation.

1988
Renforcement de la proue

1989
Réfection des mâts et gréements ; changement de plusieurs bordés.

1990
Un nouvel associé, Yvan Delaforge, vient prêter main forte. Le vagabond retrouve sa couleur d’origine
« Blanc ».

1993
Le vagabond navigue toujours.

2004 - Décembre
Le Vagabond, cotre aurique de 12,50 mètres, construit en 1926, coule dans le port du Lavandou - Var.

2005 - Décembre
Le propriétaire actuel, âgé de soixante-dix ans, a réussi à le sortir de l’eau, et à le caler sur le
chantier du Lavandou lors de son naufrage, voici un an. Il n’a pas les moyens financiers de le sauver.
Dans les premiers jours de janvier 2006, un des derniers vieux gréements français sera menacé de
disparition, peut-être détruit par une pelle mécanique, si aucune solution n’est trouvée!

Quelques personnes, connaissant bien ce bateau et son propriétaire depuis quelques années déjà, ont lancé
un S.O.S. par voie de presse, à la mi-décembre 2005. Sur place à Roscoff, ce S.O.S. a été entendu «5 sur 5»
par quelques amoureux des bateaux, de l’histoire de leur ville ou de l’histoire du bateau avec son volet
«cinéma».

Ils sont intervenus auprès du maire, et l’ont persuadé de l’intérêt de cette opération. Ils déposent aussitôt les
statuts de leur association «Nethou - Vagabond - Roscoff» pour la sauvegarde du petit cotre. Le propriétaire,
très heureux de voir son bateau survivre, le vend pour un euro symbolique à l’association qui se charge de le
sauver, de le protéger des intempéries.

Aujourd’hui, les nouvelles du Vagabond sont bonnes. Il sera rapatrié dès le début du mois de janvier par
convoi exceptionnel à Roscoff - Finistère, où il deviendra en quelque sorte le symbole du patrimoine maritime
de la ville. En urgence, il sera protégé des intempéries.

2006
4 au 9 janvier

Le Nethou - Vagabond est transporté par la route. Il est gruté au Lavandou, le 4 janvier, soit un jour avant la
date de sa destruction. Après, une longue route, il arrive à Roscoff, le lundi 9 janvier au environ de midi.

9 janvier 2006

Il est accueilli par l’équipe qui s’est chargé de le faire remonter en Bretagne après 80 ans de
« vagabondage ».

Il est 17 heures, lorsqu’il a prit sa place à Roscoff, à quelques mètres de la chapelle Ste Barbe. . La première
mission de sauvetage est terminée.

La suite de l’histoire reste à écrire. La toute jeune association va appeler vers elle tous ceux qui aiment la mer
et les bateaux, l’histoire de ce port finistérien, Roscoff et les amoureux du cinéma.

Quel est l’intérêt de ce bateau, dont tout le monde tombe amoureux?

• Premièrement, il est la dernière unité à être sorti du chantier Kerenfors (deux siècles d’histoire dans le
port de Roscoff).
• Ensuite, par miracle, Le Vagabond, construit pour une durée de vie de quelques dizaines d’années, a
survécu de 1926 jusqu’à aujourd’hui (où il est très fatigué...)
• Enfin, parce que chaque étape de sa vie tumultueuse est connue. On connaît presque toutes les
destinations de ses nombreuses navigations, ses quatre différents gréements, ses treize propriétaires
successifs qui sont tombés, tous, sous le charme de ses qualités tant esthétiques que marines.

Il existe des documents écrits, photographiques, et cinématographiques de toutes ces époques...

Le Nethou - Vagabond est sans doute trop «âgé» pour retourner à la mer. Mais, c’est un « ancien » qui peut
servir de témoin et de modèle pour une nouvelle naissance maritime. Chacun pourra contribuer à sa manière
à redonner vie à ce bateau.

Certains travailleront directement à le soigner, d’autres iront, ici et là, rechercher tous les documents le
concernant pour lui redonner son histoire, d’autres encore aideront financièrement à la prolongation de cette
belle histoire...

14 janvier 2006

Le bateau est couvert d’une bâche qui le met à l’abri des intempéries. Il attend de nouvelles aventures…

Nethou et le cinéma

Le Nethou a toujours attiré les regards et la sympathie là où il jetait l’ancre. Il était peu courant à l’époque et
encore moins maintenant, de rencontrer en Méditerranée un navire ayant une telle ligne.

En 1952, le Nethou est amarré au quai Bailly du Suffren à St Tropez. A son bord la famille Hénaff a loué le
Nethou pour les grandes vacances.

Extrait d’un article du « Chasse-marée »

Réponse de Alain Le Hénaff, à Ploërmel (56).

Bien qu'il ne s'agisse que anecdote sans importance, , je ne résiste pas au plaisir de vous ra conter notre
rencontre avec Nethou. En 1952, j'ai eu l'occasion de louer ce bateau à son propriétaire M. Jean Corne, pour
des vacances en famille le long de la côte d’Azur. Notre croisière fut modeste car nos quatre fils, alors âgés
de six, dix, douze et quatorze ans et passionnés de plongée, n'appréciaient que modérément les traites
hauturières. Nous avons donc simplement visité les mouillages de la côte – encore quasi déserts -
Antibes, Saint-Tropez, Saint-Raphaël, Saint-Mandrier... - et surtout les îles de Porquerolles et de Port-Cros.
En dépit de sa rusticité apparente, le Nethou était relativement facile à manœuvrer, portait bien la toile et avait
des performances assez étonnantes dès qu'on lui lâchait un peu d'écoute.

Un matin alors que nous étions à Saint Tropez où je m’étais amarré au fond du port, le capitaine du port vint
nous saluer et nous déclara qu’il souhaitait nous voir en place d'honneur sur le grand quai-promenade.
Manœuvre immédiate qui nous amarra entre deux bateaux magnifiques, le splendide « Ombre blanche »
de Monsieur Schneider (Creusot) et le petit paquebot de la Môme Moineau (vedette du show-bis parisien
de l’époque), la poupe sur le Bailli de Suffren et Sénéquier.

C'est à cet endroit privilégié que trois messieurs nous virent et que l'un d'entre eux nous demanda la
permission de filmer notre jeune équipage. Plongé dans une épissure, je donnai aussitôt toutes les
permissions. Nos fils firent du zèle : escalades dans la mâture, brique du pont, nettoyage de la coque
depuis le youyou, etc. Nous avons ensuite restitué le bateau à Monsieur Corne, qui me fit grand plaisir en
affirmant que son bateau n'avait jamais été aussi propre et aussi beau. Quelques semaines plus tard il le
vendait à l'acteur Charles Vanel.

Une dizaine d'années passèrent. Nous étions alors en Afrique équatoriale. Un commerçant avait eu l’idée
d’installer un cinéma en plein air où l’on apportait son siège et son « repellent » anti-moustiques. Un soir, le
programme annoncé comportait un grand film, dont j'ai tout oublié, et un court-métrage d'Alain Resnais
commenté par Jean Cocteau et intitulé Devoirs de vacances.

Dès les premières images, ma femme et moi nous nous regardâmes avec des yeux ronds. Sur l'écran, on
voyait un enfant grimper agilement en haut du grand mât d'un bateau nommé Nethou, tandis que la voix de
Jean Cocteau déclamait : "Monte petit mousse, monte jusqu'aux étoiles !"

Quelle émotion de revivre ces moments lointains dans le temps, au cœur de l'Afrique noire.

Ces souvenirs sont consignés dans un journal de bord, souvent illustré, où le pittoresque et l'inattendu sont
joyeusement mis en relief, et dont ma femme a toujours assuré la rédaction.

Charles Vanel a toujours voulu être marin


C’est au théâtre qu’il débute sa carrière en 1908, carrière la plus longue de l’histoire du cinéma.

Il vient de terminer « Le salaire de la peur » quand il se rend acquéreur du Nethou. Il l’appelle « Vagabond » et
le fait repeindre en noir.

Lors des Festivals de cannes, Charles Vanel amarrait son bateau devant la croisette et s’y réfugiait pour
échapper à la foule et aux journalistes, qu’il préférait éviter.

Dès que son emploi du temps le lui permettait, il larguait les amarres pour de nombreuses croisières, qu’il
effectuait seul ou avec ses proches ou amis, tels Gérard Philippe, Michèle Morgan, Jean Gabin,…

1992 – Les cœurs brûlés


Une société de production parisienne tourne un téléfilm sur la côte d’Azur : Les cœurs brûlés, qui sera le
feuilleton de l’été sur TF1.

Le « Vagabond » est loué par la production.

A la barre, le jeune fils de famille ( Pierre Cosso ), qui après un tour du monde en solitaire sur le petit yacht
revient embrasser ses parents ( Mireille Darc et Pierre Vaneck ).

Les cœurs s’embrasent, le « Vagabond » aussi, mais ce n’est que du cinéma !

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