2,80 € mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO - N° 23 214 - www.lefigaro.

fr - France métropolitaine uniquement Première édition

lefigaro.fr
« Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais

REPORTAGE EXPOSITION
CES FEMMES QUI MONTENT PLONGÉE DANS LE MONDE
AU FRONT DANS L’ARMÉE MYSTÉRIEUX DES OCÉANS AU
AFGHANE PAGE 14 MUSÉUM D’HISTOIRE NATURELLE PAGE 11

LE FIGARO
ENTREPRENEURS
NOTRE CAHIER SPÉCIAL Entreprise : les nouvelles
DÉFENSE
aspirations des jeunes salariés
L’Otan fête ses Pour attirer les talents, les entreprises doivent respecter des valeurs et donner du sens à leurs
70 ans, dopée
par l’hostilité
actions. L’épanouissement personnel est devenu le premier critère de choix des salariés.
de Trump PAGE 7
Rejoindre un grand groupe nelle à tout autre critère. Sou- sion, la volonté de participer à tant des valeurs sociales et
installé n’est plus le Graal des cieux de leur autonomie, un projet collectif prennent environnementales. En asso-
PRISONS jeunes générations, qui privi- beaucoup optent pour de peti- une place grandissante. ciation avec Great Place to
La France reste légient leur épanouissement tes structures ou créent leur Pour attirer les meilleurs, les Work, Le Figaro publie le pal-
championne de la personnel et l’équilibre entre société. La recherche d’utilité, entreprises s’efforcent de ré- marès de celles où il fait bon NOTRE
vie privée et vie profession- l’engagement dans une mis- pondre à ces attentes en por- travailler. SUPPLÉMENT
surpopulation PAGE 8
è LES GRANDS GROUPES TRADITIONNELS CONTRAINTS DE S’ADAPTER è CES START-UP QUI MISENT SUR L’INNOVATION RESPONSABLE è ENTRE NUMÉRIQUE ET ÉCOLOGIE,
RELIGION LES JEUNES DIPLÔMÉS ONT TROUVÉ LE BON COMPROMIS è LA SECONDE JEUNESSE DU SECTEUR DE LA NOTATION ENVIRONNEMENTALE ET SOCIALE PAGES 22, 23 ET L’ÉDITORIAL
Les évêques de
France en quête
d’un nouveau
président PAGE 9 L’écologie
ÉCONOMIE au cœur
Coup de frein
sur le commerce
de la bataille
mondial PAGE 20 des élections
DISPARITION européennes
Nicole L’écologie est devenue l’une
Dassault,
une grande
Face à la menace des préoccupations majeures
des Français. Les partis ne s’y

dame PAGE 38 djihadiste, la France sont pas trompés comme si

chacun avait désormais vo-

étend sa zone
cation à être « plus vert »
que l’autre ! De quoi exaspé-
Quel lien y
CHAMPS LIBRES

d’opération au Mali
n
rer Yannick Jadot, député
a-t-il entre le européen sortant et tête de
liste EELV aux européennes.
vote et le Le regain d’activité des groupes islamistes Entre lui et d’anciens mili-
sentiment de au centre du pays conduit les militaires tants comme Pascal Canfin
déclassement ? passés chez LREM, l’ambian-
DAPHNE BENOIT/AFP

de l’opération « Barkhane » à se déployer

et à créer une base au sud du fleuve Niger. ce est au règlement de comp-
n
La chronique PAGE 6
tes et aux tirs de barrage.
de Ran Halévi Chacun met évidemment en
doute la sincérité écologique
n
Un entretien du voisin. PAGES 2 ET 3
avec François
Lenglet
n
La chronique ÉDITORIAL par Gaëtan de Capèle gdecapele@lefigaro.fr
de Bertille
Bayart
L’analyse Question de sens

T
n

de Marie- ravailler oui, mais pas n’importe
Cécile Renault comment, à n’importe quel prix, ni
PAGES 15 À 17
pour n’importe qui. Le monde éco-
nomique a beau être plus incertain
d’impôts. Après avoir épuisé les charmes du
travail sans contraintes, sans doute disserte-
ront-ils aussi de l’importance des process et
des organisations bien huilées.

@ FIGARO OUI
FIGARO NON
Réponses à la question
que jamais, la jeune génération,
sans doute davantage que les précédentes,
déconcerte par ses exigences. Elle qui devrait
trépigner d’entrer au plus vite et au meilleur
Les préoccupations exprimées par les jeunes
salariés n’en constituent pas moins de réels
sujets de réflexion pour le monde économi-
que. Il faut être aveugle pour ne pas voir les
de mardi : tarif possible dans la vie active fait de plus en dérives du capitalisme, dont les dégâts se li-
plus valoir d’autres priorités : l’éthique, l’uti- sent dans chaque
Finalement, pensez-vous
que le grand débat lité sociale, l’écologie, le service des autres, La jeune nouvelle élection.
a été utile ? l’épanouissement personnel… Ce que reven- génération Depuis un certain
diquent ces nouveaux arrivants, au-delà du temps déjà, les entre-
OUI NON confort matériel, c’est la liberté de donner un déconcerte prises s’efforcent de
18 % 82 % sens à leur vie professionnelle. Qui n’a rêvé, par ses s’adapter aux exigen-
TOTAL DE VOTANTS : 24 499 dans sa jeunesse, de bâtir un monde ces du temps présent.
meilleur ? exigences De conjuguer au
Votez aujourd’hui Il y a évidemment une forme de romantisme mieux performances, respect des valeurs et
sur lefigaro.fr dans cette philanthropie des temps moder- bien-être au travail. Non par altruisme, mais
Débat des européennes : nes, qu’autorisent surtout les diplômes de nos parce que c’est leur intérêt bien compris.
3’:HIKKLA=]UW]U\:?k@e@a@d@k";

approuvez-vous grandes écoles. Même si, ici comme ailleurs, Comme toujours, la tentation est grande,
la décision de justice qui le naturel revient toujours au galop : accapa- chez nos gouvernants, de leur dicter par la loi
oblige France 2 à inviter rés par des questions beaucoup plus matériel- les comportements vertueux à adopter. Mais
M 00108 - 403 - F: 2,80 E

Hamon, Philippot les, les mêmes discuteront probablement un les nouvelles aspirations des salariés, ainsi
et Asselineau ? jour, autour d’une bonne table, de leurs car- que celles des consommateurs, sont de bien
MARGAUX BENN -
rières, de leurs voyages, de leurs projets im- meilleurs aiguillons que n’importe quelle ré-
MUSÉUM NATIONAL D’HISTOIRE mobiliers, du meilleur moyen de payer moins glementation supplémentaire. ■
NATURELLE - TIN-YAM CHAN

AND : 3,00 € - BEL : 2,80 € - CH : 4,10 FS - CAN : 5,50 $C - D : 3,40 € - A : 3,50 € - ESP : 3,10 € - Canaries : 3,20 € - GB : 2,80 £ - GR : 3,30 € - DOM : 3,10 € - ITA : 3,20 €
A

LUX : 2,80 € - NL : 3,30 € - PORT.CONT : 3,20 € - MAR : 22 DH - TUN : 4,20 DT - ZONE CFA : 2.300 CFA ISSN 0182.5852
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

2 L'ÉVÉNEMENT
J’ai honneur de
vous notifier La rue et l’armée détrônent
Abdelaziz Bouteflika
formellement ma
décision de mettre
fin au mandat
que j’accomplis en
qualité de Le Conseil constitutionnel doit déclencher, mercredi, l’intérim du chef de l’État.
Président de la
République, à partir
de ce jour, mardi
26 Radjab 1440,
correspondant
au 02 avril 2019.
Cette décision que
je prends en mon
âme et conscience
est destinée
à contribuer
à l’apaisement
des cœurs et des
esprits de mes
compatriotes, pour
leur permettre de
projeter ensemble
l’Algérie vers
l’avenir meilleur
auquel ils aspirent
légitimement. »

RYAD KRAMDI/AFP
EXTRAIT DE LA LETTRE
DE DÉMISSION D’ABDELAZIZ
BOUTEFLIKA

Said Bouteflika, conseiller à la présiden- contestation et les coups portés contre c’est Benflis qui parle des forces extra-
ADAM ARROUDJ £ ce de la République». Zéralda, la présidence. constitutionnelles à l’œuvre dans le pays,
ALGER
Cette lettre, qui laisse entendre que Acte II : le chef d’état-major Ahmed c’est du folklore, décrypte un cadre des
BRENDAN SMIALOWSKI/AFP

ALGÉRIE Une page de l’histoire de l’Al-
gérie s’est tournée. Abdelaziz Boutefli-
ka, 82 ans, a démissionné mardi 2 avril
avant la fin de son quatrième mandat
prévue le 28. Officiellement, le prési-
dent «a avisé le Conseil constitutionnel
de la fin de son mandat de président de la
République», a annoncé un communi-
qué publié dans la soirée par l’agence de
presse officielle. Clap de fin d’une jour-
Il revient aux née en trois actes.
Tout a commencé avec la publica-
Algériens tion de la lettre de Liamine Zeroual,
de décider dans laquelle l’ancien président de la
République (1994-1999) raconte avoir
comment gérer rencontré le général Toufik, l’ancien
cette transition chef du DRS, les services secrets dis-
sous en 2016. « J’ai reçu, le 30 mars, à
en Algérie »
ROBERT PALLADINO,
sa demande, le général de corps d’ar-
mée à la retraite Mohamed Mediène, qui
PORTE-PAROLE DE LA m’a proposé de présider l’instance de
DIPLOMATIE AMÉRICAINE gestion de la période de transition,
écrit-il. Il m’a confirmé que cette pro-
position est le fruit d’un accord avec
l’ancien président, dont le nom circu-
lait depuis plusieurs jours comme po-
tentiel remplaçant d’Abdelkader Ben-
salah, à la tête du Conseil de la nation
(Sénat), a décliné l’offre, dévoile sur-
tout les acteurs à la manœuvre dans les
négociations pour la succession, en de-
hors de la Constitution.
D’un côté, Saïd Bouteflika, figure du
cercle présidentiel, le frère et conseiller
du président, dont le rôle central dans
la prise de décision politique, connu de
tous, semble aujourd’hui poser soudai-
nement problème : selon des médias lo-
caux, une plainte déposée par des ci-
toyens contre lui pour « usurpation
d’identité, faux et usage de faux » aurait
été acceptée par la cour d’Alger.
De l’autre, Mohamed Mediène, icône
de ce tout puissant État profond, im-
possible retraité et patron jusqu’à la
mort d’une structure insoluble dont les
réseaux que l’on croyait endormis ont
probablement joué un rôle essentiel
dans la montée en puissance de la
Gaïd Salah, qui pèse beaucoup sur la
scène politique mais peu face au sym-
bole que représente Liamine Zeroual,
sentant le contrôle de la transition lui
échapper, convoque les commandants
de forces, les commandants de régions
militaires, et des cadres du ministère de
la Défense nationale et de l’état-major
de l’ANP pour une réunion au siège de
l’état-major.
Une « bande » au pouvoir
En début de soirée, le communiqué
tombe : le patron de l’armée demande à
ce que soit appliquée «immédiatement»
l’article 102 de la Constitution pour
destituer le président – une option à la-
quelle il a déjà appelé le 26 mars – rap-
pelle qu’il est un « moudjahid », et
d’une façon inédite, dénonce « la ban-
de » au pouvoir.
Acte III : moins d’une heure après,
l’agence de presse officielle annonce la
démission de Bouteflika, signe que le
rapport de force a changé. « Quand
services de renseignements. Mais quand
c’est l’armée qui le dit, l’armée qui peut
actionner la gendarmerie ou le procureur
de la République clairement contre la
famille Bouteflika, le rapport de force
bascule.»
À partir d’aujourd’hui s’enclenche
donc la procédure liée à l’article 102 de
la Constitution : le Conseil constitu-
tionnel doit proposer au Parlement de
déclarer l’état d’empêchement à partir
duquel l’intérim du chef de l’État est
assuré par le président du Sénat pour
45 jours, reconductibles en 90 jours
pendant lesquels doit être organisée
une élection présidentielle. « Les pro-
blèmes ne font que commencer, s’inquiè-
te un ancien collaborateur de la prési-
dence. Le système ne veut pas de
Bensalah (l’actuel président du Sénat,
très malade, NDLR) mais ils peuvent en
faire un pion. Il va falloir recréer un
consensus autour d’un candidat qui
n’existe pas. Et ça, en moins de cinq
mois… » ■

Vingt ans d’un règne sans partage financé par la rente pétrolière
UNE IMAGE revient sans cesse à l’évo-
cation de l’Algérie des années Boutefli-
ka : celle du Titanic, mastodonte au
potentiel énorme que de mauvais
choix mènent droit vers l’iceberg. À
son arrivée au pouvoir en 1999, Abde-
laziz Bouteflika hérite certes d’un pays
ravagé par dix ans de guerre civile,
mais la conjoncture politique et écono-
mique lui est très favorable.
Depuis la moitié des années 1990,
l’islamisme armé s’est considérable-
ment résorbé sous les coups de l’armée
et l’engagement des Algériens. Il ne
manque qu’au projet de « pacification »
des militaires une couverture civile :
Abdelaziz Bouteflika, présenté comme
l’homme providentiel, fera de la Char-
te pour la paix et la réconciliation na-
tionale, un des grands chantiers de son
règne.
Adoptée par référendum le 29 sep-
tembre 2005, cette Charte vient cou-
ronner un processus de réconciliation
à travers différentes mesures : l’élar-
gissement des extinctions de poursui-
tes judiciaires contre les islamistes ar-
més et la prise en charge de leurs
proches en échange de leur reddition,
l’indemnisation des familles de dispa-
rus et l’immunité judiciaire des agents
de l’État impliqués dans la lutte anti-
terroriste et soupçonnés par les ONG
C
dans les maquis en 1992, il n’en reste-
rait que 500 à 600 (sources sécuritai-
res), localisés dans quatre régions –
mais la réconciliation, imposée d’en
haut, ne permettra pas que justice soit
rendue, ni que la vérité sur la crise qui
a mené aux violences massives des an-
nées 1990 soit établie.
Flambée des cours du pétrole
À partir de 2004, c’est un allié écono-
mique qui se met du côté d’Abdelaziz
Bouteflika : le cours du pétrole. La
flambée du prix du baril a fait passer le
PIB de 85 milliards de dollars à 213 mil-
liards en 2014, date à laquelle le cours
du brut s’est effondré. En dépit d’un
modèle économique non viable, ap-
puyé sur des recettes provenant à 97 %
des exportations d’hydrocarbures,
l’Algérie a dépensé sans compter.
Pour la population d’abord, nourrie
aux transferts sociaux (subventions sur
le carburant, l’électricité, le gaz, le lait,
les céréales, la santé gratuite, l’aide à la
création d’entreprise, à l’achat d’un
appartement…) qui représentaient en
2019 près de 21 % du budget de l’État.
Mal gérées et diluées dans une inflation
comprise entre 8 et 10 %, ces dépenses,
qui s’ajoutent à une facture de plus de
40 milliards de dollars d’importations
(en 2018), font depuis toujours frémir
Comme assurer son autosuffisance ali-
mentaire.
L’Algérie est pour l’instant, en Médi-
terranée (hors Union européenne), le
pays qui importe le plus et qui exporte
le moins de produits agroalimentaires.
Selon la FAO, elle ne parvient même
pas à produire les aliments essentiels à
la consommation humaine. Autre prio-
rité : lutter contre les circuits informels
qui gangrènent l’économie jusqu’à dé-
vorer 40 % du PIB. Ou instaurer un cli-
mat propice aux investissements. En
2019, l’Algérie se plaçait à la 157e place
(sur 190) du classement « Doing busi-
ness » de la Banque mondiale.
Plus grave : depuis la chute du prix
du baril en 2014, les autorités ont choi-
si de ne mener aucune réforme et, afin
de rembourser des dettes et combler
les déficits, de s’endetter auprès de la
banque centrale en imprimant de la
monnaie à hauteur de près de 35 % du
PIB en moins de deux ans, ce qui laisse
envisager le pire pour la valeur du di-
nar. Convaincu qu’il dispose encore de
gisements de gaz et de pétrole incon-
nus, et aveuglé par les estimations qui
placent l’Algérie dans le top mondial
des réserves de gaz de schiste, l’État
continue de miser sur une remontée du
prix du baril et d’ignorer les avertisse-
ments des contre-pouvoirs qui ont en-
vi à Abdelaziz Bouteflika pour acheter
et dévitaliser opposition et société civi-
le, déjà très fragilisées à la sortie des
années 1990. Même si l’échec renouve-
lé des acteurs à dialoguer les uns avec
les autres est une constante du champ
politique depuis des années, la politi-
que de clientélisation et de noyautage a
La rente pétrolière a servi
à Abdelaziz Bouteflika
pour acheter et dévitaliser
opposition et société civile,
déjà très fragilisées à la
sortie des années 1990.
conduit à l’implosion ou à l’affaiblisse-
ment de nombreux mouvements (le
mouvement culturel berbère, les chô-
meurs, les syndicats autonomes, etc.),
au point qu’aujourd’hui, très peu
d’entre eux arrivent à se structurer
autour d’idées et de leaders. Sous cou-
vert de réformes, le gouvernement a
notamment voté en 2012 une loi sur les
associations très dissuasive, qui lui
permet notamment de refuser l’enre-
gistrement des associations considé-
rées comme une menace pour les « va-
rienne, voire de les sanctionner péna-
lement.
Quant à l’opposition politique, elle
s’est retrouvée piégée entre deux logi-
ques : soit en refusant de négocier avec
le pouvoir, elle s’est heurtée à l’absen-
ce d’espaces d’expression et n’a pas pu
exister; soit en acceptant d’être repré-
sentée au Parlement, elle s’est décré-
dibilisée aux yeux de l’opinion publi-
que. Pendant ce temps, le pouvoir a
créé autour de lui un univers virtuel
d’institutions aux ordres, de partis po-
litiques, de syndicats, de journalistes,
et même de chefs d’entreprise, faisant
de la crise des ressources humaines
une crise au moins aussi grave que cel-
le des ressources économiques.
Occupé à faire des ressources écono-
miques un outil politique pour la
conservation du pouvoir, Abdelaziz
Bouteflika n’a, enfin, pas réussi à adap-
ter ses politiques aux mutations profon-
des qui traversent la société depuis vingt
ans. À part des logements – plus de 3,6
millions sont sortis de terre entre 1999
et 2018 – rien n’a été construit pour faire
face à la poussée démographique et aux
besoins alimentaires, énergétiques, so-
ciaux qui l’accompagnent : à l’horizon
2030, la population dépassera les 50
millions d’habitants, elle sera principa-
lement concentrée sur la bande littora-

de violations des droits de l’homme. La les experts, inquiets que l’État ne se core la force de lui tenir tête. leurs et constantes nationales », l’ordre le, et les Algériens seront à 70 % en âge
paix est revenue – des 37 000 hommes concentre pas sur d’autres priorités. Car en vingt ans, la rente a aussi ser- public, la « moralité » et la loi algé- de travailler. A.A (À ALGER) ■

La sortie sans gloire d’un président qui voulait incarner l’orgueil algérien
THIERRY OBERLÉ £@ThierryOBERLE
IL N’EN RESTAIT qu’un, c’était lui.
Comme tous les dirigeants qui se sont
succédé à la tête de l’Algérie, Abdela-
ziz Bouteflika est un ancien insurgé de
la guerre d’indépendance. Né à Oujda,
au Maroc, le 2 mars 1937, d’une famille
de commerçants de l’Ouest algérien, il
rejoint le Front de libération nationale
(FLN) en 1956 et intègre le cercle des
proches du colonel Houari Boumedie-
ne à l’état-major général au Maroc. Si-
Abdelkader - c’est le nom de guerre
du jeune commandant au sein de l’Ar-
mée nationale de libération - maîtrise
aussi bien l’arabe classique que la lan-
gue française. Son instinct politique se
révèle à 24 ans lors d’une mission se-
crète visant à prendre contact avec les
chefs historiques de la révolution, em-
prisonnés dans la forteresse d’Aulnay-
sous-Bois, au nord de Paris.
En 1961, Abdelaziz Bouteflika est
chargé par l’Armée des frontières de
sonder les prisonniers du Gouverne-
ment provisoire de la République algé-
rienne (GPRA) en vue d’alliances. Il se
fait passer pour le parent d’un détenu.
Aït Ahmed et Boudiaf gardent leur dis-
tance avec ce petit jeune homme aux
yeux bleus et à la moustache en ba-
taille. Ben Bella est attentif. Après les
accords d’Évian, les membres du
GPRA et les dirigeants de l’armée de
l’intérieur sont évincés de la course au
pouvoir. Ben Bella rafle la mise. Il
triomphe avec l’appui de l’ALN dont les
troupes sont massées aux frontières.
C’est l’indépendance. Voilà Bouteflika
ministre de la Jeunesse et des Sports.
Cheveux longs et col large
Sa proximité avec son mentor Houari
Boumediene, le tout-puissant vice-
président et ministre de la Défense du
Conseil de la révolution, explique sa
fulgurante ascension dans les premiè-
res heures de la nouvelle Algérie. Dès
avril 1963, Bouteflika obtient le porte-
feuille des Affaires étrangères. Il a
26 ans. À Paris, le plus jeune ministre
des Affaires étrangères du monde est
fasciné par le général de Gaulle. Il
n’entend pas pour autant mener la vie
facile à l’ancien colonisateur. Ses rela-
tions avec la France sont ambivalentes.
Volontiers provocateur, il négocie
âprement les contentieux apparus
après Évian.
L’Algérie est le phare du tiers-mon-
disme. Elle impulse le mouvement des
non-alignés. Engagé dans une hasar-
deuse aventure insurrectionnelle dans
la région africaine des Grands Lacs, le
Che est accueilli triomphalement dans
les rues d’Alger. Fort de ses hydrocar-
bures, l’État-providence se lance dans
l’industrie lourde et dans la planifica-
tion à la soviétique. La rente pétrolière
assure une relative prospérité aux
classes moyennes naissantes, mais les
mauvais choix économiques se relèvent
catastrophiques dans la durée. L’agri-
culture s’effondre. Une classe de digni-
taires s’arroge des privilèges et étouffe
les libertés publiques. Bouteflika n’en a
cure. Ce célibataire sans enfants porte
des cheveux longs et des chemises à col
large, fume des cigares comme Fidel,
séduit les femmes.
« Le ministre algérien Abdelaziz
Bouteflika est un personnage surpre-
nant, écrit dans ses Mémoires Valéry
Giscard d’Estaing. Il disparaît parfois
pendant plusieurs semaines sans qu’on
retrouve sa trace. Il lui arrive de venir
faire des visites incognito à Paris, dont
nous ne sommes pas prévenus. Il s’enfer-
me dans l’appartement d’un grand hôtel
où se succèdent de charmantes visites.
On affirme qu’il porte une perruque. »
Orgueil national
En 1974, l’infatigable voyageur préside
la session des Nations unies au cours
de laquelle Yasser Arafat monte pour
la première fois à la tribune. Abdelaziz
Bouteflika incarne, grâce à ses talents
oratoires, l’orgueil national. Le sien
aussi. Le nationalisme lui colle à la
peau. Il déteste cordialement les voi-
sins tunisiens ou marocains, jugés trop
proches de l’ex-puissance tutélaire,
ainsi que les régimes arabes inféodés
aux États-Unis. L’Algérie attise le
conflit entre le Front Polisario et le
Maroc, qui se disputent le Sahara occi-
dental. En décembre 1975, Bouteflika
accepte une escale à Alger de l’appareil
mis à la disposition de Carlos et des
ministres pris en otages au siège de
l’Opep, à Vienne. Le chef de la diplo-
matie algérienne s’entretient dans un
des salons d’honneur avec le Vénézué-
lien Ilich Ramirez Sanchez, dit « le
Chacal », à l’origine de plusieurs opéra-
tions terroristes majeures en Europe.
L’avion s’envole ensuite vers la Libye, un
autre régime ami du « front du refus ».
À la mort de Houari Boumediene, en
décembre 1978, Abdelaziz Bouteflika
prononce son oraison funèbre. C’est,
pour longtemps, son dernier discours
public. Les caciques du régime se dis-
putent l’héritage. Le colonel Chadli
Bendjedid prend le pouvoir et procède
à une purge. L’ancien ministre des Af-
faires étrangères s’exile pour une tra-
versée du désert au sens figuré comme
au sens propre. Elle le conduit à Abu
Dhabi et au Qatar.
En Algérie, la crise sociale et le man-
que de libertés alimentent la contesta-
tion sur fond de montée de l’islamis-
me. Le Front islamique du salut arrive
en tête des législatives de 1991, mais
l’armée stoppe le processus électoral.
Le pays bascule dans la violence. Les
TISSOT heritage visodate.
INSPIRÉE PAR LA COLLECTION
TISSOT VISODATE DE 1950.
320€ TTC*
*PRIX PUBLIC CONSEILLÉ
BOUTIQUEs : 76 AVENUE DES CHAMPS–ÉLYSÉES – 7 5008 PARIS
LES 4 TEMPS, NIVEAU 2 – 92092 PARIS LA DÉFENSE
ATELIER HORLOGER : 78 AVENUE DES CHAMPS-ÉLYSÉES – 75008 PARIS
Les dates clés de la crise politique qui ébranle le pays
La démission d’Abdelaziz Bouteflika
intervient après plus d’un mois de
crise politique. Celle-ci a débuté avec
l’annonce, le 10 février, de la volonté
du président algérien, 82 ans et très
affaibli par un AVC en 2013, de bri-
guer un cinquième mandat lors
d’une élection présidentielle prévue
le 18 avril.
u10 février : Bouteflika s’adresse
aux Algériens
Le président Abdelaziz Bouteflika
annonce dans une « lettre à la na-
tion » sa volonté de briguer un cin-
quième mandat.
22 février : premières
u manifestations
À Alger, Oran, Constantine ou encore
Sidi Bel Abès, des dizaines de milliers
d’Algériens défilent dans les rues
pour protester contre la candidature
à un cinquième mandat d’Abdelaziz
Bouteflika.
Le président Bouteflika en 2009
à Alger. PASCAL GUYOT/AFP
u11Lemars : Bouteflika renonce
chef de l’État algérien déclare
dans un communiqué qu’il renonce à
briguer un cinquième mandat. L’élec-
tion du 18 avril est reportée sine die.
Bedoui est nommé Premier ministre.
u18Bouteflika
mars : Bouteflika reste
u«1 prochaine
confirme qu’il restera
président après la fin de son mandat,
le 28 avril.
u26 mars : l’armée tonne
Le chef d’état-major de l’armée
algérienne demande que soit engagée
la procédure prévue par l’article 102
de la Constitution, quand le président
de la République « pour cause de ma-
ladie grave et durable, se trouve dans
l’impossibilité totale d’exercer ses
fonctions ».
u31demars : un gouvernement
transition est dévoilé
Le pouvoir algérien dévoile la com-
L'ÉVÉNEMENT
djihadistes ébranlent l’appareil poli-
tico-militaire avant de finalement
perdre du terrain dans un conflit qui se
solde par plus de 150 000 morts. C’est
la « décennie noire ». Des années de
sang, de désespoir et de vengeances.
En janvier 1994, en pleine guerre
contre les maquis islamistes, les mili-
taires proposent à Abdelaziz Bouteflika
de revenir. Il refuse la présidence.
L’avenir est incertain. Le général Lia-
mine Zéroual remplace Bouteflika. Les
militaires obtiennent finalement la dé-
mobilisation de l’AIS, le bras armé du
Front islamique du salut, après une sé-
rie de massacres de civils.
Islamisation de la société
En 1999, Bouteflika accepte une nou-
velle offre des généraux. « C’est le
moins mauvais des candidats », lance le
général Khaled Nezzar, ancien chef
d’état-major des armées, qui le déteste.
T I S S OT WATC H E S . C O M
TISSOT, INNOVATEURS PAR TRADITION
position d’un nouveau gouverne-
ment de transition, promis depuis la
nomination le 11 mars du nouveau
Premier ministre Noureddine Bedoui,
censée accompagner la Conférence
nationale promise.
avril : démission
er
» de Bouteflika
La présidence algérienne annonce
dans un communiqué qu’Abdelaziz
Bouteflika démissionnera avant l’ex-
piration de son actuel mandat, le 28
avril.
u2Leavril : Bouteflika démissionne
chef d’état-major de l’armée al-
gérienne, le général Ahmed Gaïd Sa-
lah, demande que soit « appliquée
immédiatement » la procédure consti-
tutionnelle permettant d’écarter le
président Bouteflika du pouvoir. Dans
la foulée, le président remet sa démis-
sion « à partir d’aujourd’hui » au
Conseil constitutionnel.
LE FIGARO mercredi 3 avril 2019
3
Convaincus de sa victoire annoncée,
ses adversaires se dérobent à la veille
du scrutin présidentiel en dénonçant
une « mascarade électorale ». Président
mal élu, Bouteflika invective Paris, qui
s’interroge sur l’honnêteté du scrutin.
« Il faut l’excuser, il est fraîchement dé-
congelé », ironise Hubert Védrine.
Très vite, pourtant, Bouteflika réussit
son offensive de charme. Il parle, inta-
rissable après un si long silence : il va
réconcilier le pays, briser les tabous,
réhabiliter la langue française, tendre
la main aux ennemis d’hier et même
aux pieds-noirs et aux Juifs.
Que reste-t-il du tourbillon des
mots ? Quelques acquis : la « concorde
civile » a permis le retour à la paix,
mais la politique de réconciliation na-
tionale n’a apporté ni la vérité, ni la
justice pour les victimes. Peu à peu, la
société a basculé dans le conservatis-
me religieux. En dépit de la manne pé-
trolière et gazière, le pays reste plongé
dans le marasme social. Sans travail,
les jeunes commencent à prendre
clandestinement la mer. Les harraga
rejoignent l’Europe ou se noient. En
fin de cycle, le système est incapable
de se réformer.
Réélu, après un simulacre de duel
avec son ex-premier ministre Ali Ben-
flis, Abdelaziz Bouteflika consolide son
pouvoir en se débarrassant des képis
étoilés de la vieille garde qui interve-
naient dans les grandes décisions. La
presse est mise au pas et la société ci-
vile est priée de se taire. Le raïs a les
coudées franches, mais les réformes de
fond s’enlisent.
La tentative de passage en
force pour un cinquième
mandat est vécue comme
une offense à sa fierté par
une partie du peuple
algérien. Elle a fait tomber
le « mur de la peur ».
« Nous voulons des visas », lance la
jeunesse algérienne lors des visites de
Jacques Chirac, ce président français
qui a lui aussi participé à la « guerre
d’Algérie ». Il est question d’un « traité
d’amitié » entre la France et l’Algérie.
Le projet ne résiste pas aux relations
passionnelles entre les deux pays.
Dans les deux camps, le passé n’a pas
été apuré.
Victime d’une grave hémorragie,
Abdelaziz Bouteflika est hospitalisé
d’urgence au Val-de-Grâce, à Paris,
en novembre 2005. On le dit mourant.
Il revient à Alger affaibli mais ne lâche
pas les rênes. Il est réélu en 2009 pour
un morne troisième mandat. L’affai-
risme et la corruption se sont installés.
Les pétrodollars assurent la survie du
régime en achetant la paix sociale.
L’écueil des soulèvements arabes est
évité grâce au traumatisme de la « dé-
cennie noire ».
Le mépris et l’autoritarisme
Cloué dans une chaise roulante par un
accident vasculaire cérébral, le vieil
homme n’est plus que son ombre. La
population oscille entre honte et pitié.
Il est à nouveau réélu en avril 2014
sans prononcer un mot. Le quatrième
mandat est le crépuscule de son règne.
Le pays est à son image : il continue à
vivre mais souffre de paralysie. Abde-
laziz Bouteflika parvient cependant à
se débarrasser du dernier vestige du
passé, le général Mohamed Mediene
dit Toufik, le légendaire patron sans
visage du Département du renseigne-
ment et de la sécurité (DRS), considéré
durant des décennies comme le chef
occulte du régime. Il est enfin seul.
Presque seul. Son frère, Saïd, est sa
courroie de transmission et une cour
de courtisans lui rend visite. Son état
de santé le contraint à quitter le palais
présidentiel d’El Mouradia. Il végète à
Zéralda sur la côte, dans une maison
médicalisée, loin du monde.
Aveuglé par le mépris et l’autorita-
risme, le clan présidentiel ne voit pas
le ras-le-bol des Algériens poindre. Il
est convaincu que le cinquième man-
dat passera comme les autres. La ten-
tative de passage en force est vécue
comme une offense à sa fierté par une
partie du peuple algérien. Elle a fait
tomber le « mur de la peur ». La partie
s’achève pour celui qui voulait partir
en raïs, qui voulait mourir comme
Boumediene et Chadli. Issu d’une gé-
nération qui appartient à l’histoire,
C
Abdelaziz Bouteflika a raté son dernier
rendez-vous avec elle. ■
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO
4 POLITIQUE
France 2 devra inviter trois autres candidats
La chaîne se plie à la décision du tribunal administratif, mais fait appel pour « atteinte à la liberté de la presse ».
ENGUÉRAND RENAULT £@erenault
ET LORIS BOICHOT £@lboichot
EUROPÉENNES France 2 devra instal-
ler trois pupitres supplémentaires sur
le plateau de son « Émission politi-
que » spéciale élections européennes,
animée jeudi, en prime time, par Tho-
mas Sotto et Alexandra Bensaïd. L’an-
cien socialiste Benoît Hamon (Généra-
tion.s) et les deux partisans du
« Frexit », François Asselineau (UPR)
et Florian Philippot (Les Patriotes), se
joindront aux neuf autres têtes de lis-
tes candidates au scrutin du 26 mai.
C’est le résultat de la décision du tri-
bunal administratif de Paris, saisi d’une
procédure de « référé-liberté » par ces
trois personnalités politiques. Lundi, la
juridiction a ordonné à la chaîne publi-
que de les inviter soit à « L’Émission
politique » du 4 avril, soit à un autre
débat avant le 23 avril, pour respecter
le « caractère pluraliste de l’expression
des courants de pensée et d’opinion ».
Sous contrainte, France Télévisions
prend acte de cette décision. Mais sur
le fond, elle la conteste. Dans un
communiqué, le groupe audiovisuel
public annonce qu’il « fait appel des
décisions du tribunal administratif ».
France 2 estime en effet que « la déci-
sion d’une juridiction administrative,
portant ainsi sur le contenu éditorial et
la programmation d’une émission d’in-
formation, qui plus est en dehors de la
période de campagne électorale définie
par les règles du CSA (qui démarre le
15 avril), porte une atteinte grave à la
liberté de la presse ».
La direction du groupe avait lancé
ses invitations à neuf têtes de liste, se-
lon des critères de représentativité
qu’elle juge objectifs : Manon Aubry
(LFI), Jordan Bardella (RN), François-
Xavier Bellamy (LR), Nicolas Dupont-
Aignan (DLF), Raphaël Glucksmann
CONTRE-POINT
PAR GUILLAUME TABARD £@GTabard
Quand le macronisme veut
rimer avec pompidolisme
C
e pari-là vaut bien une
messe. Pour rapiécer
la tunique déchirée
de l’unité nationale,
Emmanuel Macron a assisté
à la messe marquant le
quarante-cinquième anniversaire
de la mort de Georges Pompidou.
Si Jacques Chirac était assidu à ce
rendez-vous annuel honorant la
mémoire de son mentor, celui-ci
n’a rien d’obligatoire pour un chef
d’État en exercice. Il y a donc une
volonté particulière du huitième
président de la Ve, qui a également
rédigé la préface d’un livre sur
la présidence Pompidou paraissant
à l’occasion d’un colloque qui
marquera en juin le cinquantenaire
de son entrée à l’Élysée.
« Cette filiation m’était palpable »,
a confié le chef de l’État en sortant
de l’église. Macron a quelque chose
en lui de Pompidou. Un parcours non
exclusivement politique qui les fit tous
deux passer par la banque Rothschild.
L’un et l’autre ont accédé à la fonction
suprême par une forme de rupture
avec celui qu’ils avaient servi. Après
Mai 1968, Georges Pompidou,
remplacé à Matignon, s’est émancipé
du général de Gaulle. Au point que
l’homme du 18 Juin l’a indirectement
rendu responsable de la victoire
du non au référendum d’avril 1969.
En 2016, on a quitté évidemment
les grandeurs de l’Histoire. Mais
Emmanuel Macron aussi s’est
affranchi de François Hollande ; au
point que l’ancien président socialiste
lui en veut toujours de l’avoir empêché
indirectement de se représenter.
Rothschild et la rupture : ce ne sont
toutefois pas les ressemblances que
l’actuel chef de l’État entend valoriser.
Son ambition est d’assumer et de
souligner la continuité entre tous les
présidents de la République. Macron
avait été élu sur le dépassement
du clivage gauche-droite traditionnel.
A
Cet espoir d’incarner une forme
d’unité française a été passablement
De gauche à droite : Benoît Hamon (Génération.s), Florian Philippot (Les Patriotes) et François Asselineau (UPR) se joindront aux neuf autres têtes de listes, jeudi sur France 2.
(liste commune Place publique-PS),
Yannick Jadot (EELV), Nathalie Loi-
seau (LREM) étaient concernés, mais
aussi Ian Brossat (PCF) et Jean-Chris-
tophe Lagarde (UDI), d’abord exclus
du débat, puis repêchés.
Arthaud et Lassalle remontés
Dans l’urgence, France 2 devra donc
réaménager la configuration de
« L’Émission politique » et procéder à
un nouveau tirage au sort sur l’ordre
de prise de parole des 12 invités. Les
présentateurs, Thomas Sotto et
brisé par près de deux ans de mandat.
De petites phrases en grandes
réformes, de choix économiques
en crise des « gilets jaunes », il est vite
apparu en président clivant, en chef
d’une France brisée, beaucoup
le rendant responsable des tensions
de la société. L’hommage à Pompidou
est un moyen, symbolique mais réel,
de renouer avec une histoire plus
large. D’autant que, derrière la
présidence des années heureuses
d’avant la crise, celle du natif
de Montboudif est aujourd’hui
regardée avec une certaine nostalgie.
Emmanuel Macron veut aussi
renouer avec la théorie des « deux
corps du roi ». Il y a d’un côté l’action
menée, par définition soumise à la
critique, et de l’autre la fonction
présidentielle en tant que telle qui
subsiste quelle que soit la personnalité
de celui qui l’exerce. Ce qu’il illustre
en invitant par exemple Nicolas
Sarkozy au plateau des Glières ;
ce qu’il illustre moins par sa relation,
ou plutôt son absence de relation, avec
François Hollande. Le calcul politique
n’étant jamais étranger, Macron
soigne ainsi plus ostensiblement
le flanc droit de l’électorat.
En début de campagne européenne,
alors qu’il affronte le Brexit, le chef
de l’État honore enfin la mémoire
de celui qui a voulu et permis l’entrée
du Royaume-Uni dans le Marché
commun. Pompidou eut l’audace
de porter l’ouverture européenne
en conservant le corpus patriotique
du gaullisme. C’est cette synthèse
aussi que Macron aimerait incarner
à son tour. ■
Alexandra Bensaïd, auront fort à faire
pour gérer le plus grand plateau d’in-
vités politiques jamais présenté. « La
programmation d’une émission ne re-
garde pas un juge du tribunal adminis-
tratif. Il prend sa décision, on la respec-
te, mais là on oublie le téléspectateur.
On passe de neuf à douze invités et le
risque est que la clarté voulue pour notre
débat devienne un grand brouillard » a
réagi Thomas Sotto sur TVMag.fr.
Remontés contre leur exclusion du
débat et enhardis par la décision du
tribunal, les têtes de liste Nathalie Ar-
David Lisnard (LR) : « Il faut un acte trois
de la décentralisation »
VIRGINIE LE TRIONNAIRE
£@vletrionnaire
QU’ILS SOIENT de la majorité ou
de l’opposition, les élus s’accor-
dent sur un point : « La difficulté est
de sortir de cette crise structurelle, pro-
fonde, qui traverse le pays », lâche Da-
vid Lisnard, invité ce mardi du « Talk
Le Figaro ». Pour le maire Les Répu-
blicains de Cannes, les cohortes de
« gilets jaunes » sont d’abord le résul-
tat d’une « crise de la confiance » vis-
à-vis de l’État dont la gestion interro-
ge. « Il y a deux chiffres qui sont quand
même très parlants. C’est le déficit de
l’État qui augmente depuis deux ans et
le déficit commercial qui explose, tra-
duisant notre incapacité à être compéti-
tifs. L’État est l’enfant malade de la so-
ciété française. »
L’édile dit lui aussi être confronté à
la crise à l’échelle de sa ville : « Cannes
est la ville la plus inégalitaire et la plus
contrastée de France. J’ai un taux de
pauvreté qui est à plus de 19 % et j’ai
également beaucoup de richesses. » Ce
qui donne à l’élu la mission « de recou-
dre le tissu social et de créer du sens, de
créer du lien, de faire communauté,
liste-t-il. C’est ce qui est beau dans la
politique. »
“ L’État est l’enfant
malade de la société
française
DAVID LISNARD
” tes aux habitants, pour développer ma
Si l’élu n’a pas de réponses à donner
à la crise au niveau national, son expé-
rience d’élu local le pousse à réclamer
« un acte trois de la décentralisation ».
LR plaide pour une déconcentration de
l’État, une départementalisation de ses
services comme pour redonner du
pouvoir aux préfets.
« La proximité ne règle pas tous les
problèmes mais elle crée de la responsa-
bilité et donc de l’efficacité, veut croire
le vice-président du conseil départe-
mental des Alpes-Maritimes. Or,
aujourd’hui, on a plus le levier fiscal
avec l’illusion de la suppression de la
thaud (Lutte ouvrière), le « gilet jau-
ne » Jean-François Barnada (Jaunes et
citoyens) et Jean Lassalle (Résistons !)
ont demandé mardi à France Télévi-
sions de les inviter eux aussi. Le député
béarnais a même envoyé, en ce sens,
un courrier à la présidente de France
Télévisions, Delphine Ernotte.
Mais France Télévisions a opposé une
fin de non-recevoir aux trois candi-
dats. À son tour, Nathalie Arthaud a
donc décidé mardi de saisir la justice,
via une procédure de référé-liberté.
« C’est lamentable de ne pas être invi-
DAVID LISNARD, hier, dans le studio du Figaro. J.-C. MARMARA/LE FIGARO
taxe d’habitation. Beaucoup de pays re-
donnent de la marge de manœuvre au
local. C’est ce système-là qu’il faut
réinventer. »
Alors que la classe politique a les
yeux rivés sur les prochaines euro-
péennes, David Lisnard scrute quant à
lui l’horizon des prochaines municipa-
les, en 2020. Même s’il se garde bien
de se déclarer, pour l’heure, candidat
à sa propre succession. « À un an d’une
élection c’est trop tôt. Je suis là pour
exécuter un mandat, rendre des comp-
ville, pour tenir une trajectoire. Je pren-
drai ma décision fin 2019. »
L’homme qui n’avait pas obtenu
l’investiture de son parti lors des pré-
cédentes élections, en 2014, se plaît à
vanter son bilan aux manettes de la
ville : « À Cannes la dette a baissé de
55 millions d’euros en cinq ans et nous
n’avons pas touché aux taux d’imposi-
tion, ni créé de fiscalités additionnelles.
On a l’un des plus grands centres d’af-
faires de France après Paris […]. La
chambre régionale des comptes a donné
un satisfecit à la ville de Cannes. » Une
liste à la Prévert qui, bien que le maire
s’en défende, sent déjà la campagne
électorale. ■
GILLES ROLLE/REA, MARTIN BUREAU/POOL/EPA/MAXPPP, TENANI SERGE/AVENIR PICTURES/ABACA
té », regrette-t-on dans l’entourage de
la communiste révolutionnaire. « Na-
thalie Arthaud représente l’un des plus
anciens partis, et elle est la seule à avoir
déjà annoncé intégralement sa liste ».
Le record de politiques sur un pla-
teau revient, à ce jour, à BFMTV et
CNews, organisateurs d’un débat entre
les 11 candidats à l’élection prési-
dentielle, le 4 avril 2017. Le rendez-
vous télévisé avait porté chance aux
deux chaînes d’information en con-
tinu, suivies par 6,3 millions de
téléspectateurs. ■
ZOOM
Débat : l’UDI
fait ses propositions
Alors que le grand débat est arrivé
à l’Assemblée, les députés du
groupe UDI, Agir et indépendants
formulent une série de
propositions sur le consentement
à l’impôt, l’organisation
des services publics, la transition
écologique, la décentralisation,
le vote blanc, la démocratie
participative, etc. « C’est
la première majorité qui n’apporte
pas à son gouvernement
les informations qui remontent
du terrain », regrette Jean-
Christophe Lagarde, président
du groupe, en rappelant les alertes
des parlementaires sur la CSG, les
80 km/h, la fracture territoriale
ou la taxe carbone. « On aurait pu
éviter cette crise. Des braises
couvaient depuis longtemps et ils
ont mis des bûches dans le foyer ! »,
ajoute Lagarde. « Pour éviter
que cette crise dure, on fait
des propositions. Il serait temps
que l’exécutif se mette à en faire. »
 80% des cambrioleurs passent
par la porte d’entrée . . .
247 394 cambriolages en France par an (1)

Portes blindées
Garanties selon nos conditions générales de vente aux professionnels (1) Source Le Figaro

La Résistance Certifiée
par le Pôle Européen de Sécurité, CNPP
Résistance à l’effraction maximale certifiée
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO
6 INTERNATIONAL
Theresa May va réclamer un nouveau report du Brexit
La première ministre britannique veut éviter une sortie sans accord le 12 avril et chercher un consensus avec Jeremy Corbyn.
FLORENTIN COLLOMP £@fcollomp
CORRESPONDANT À LONDRES
ROYAUME-UNI Près de trois ans après le
référendum, changement de stratégie.
Après avoir répété maintes fois «pas
d’accord plutôt qu’un mauvais accord»,
Theresa May veut maintenant écarter la
possibilité d’un « no deal » le 12 avril
qui se profilait à l’horizon comme un
train fou. Un scénario qui devenait
« chaque jour plus probable », selon le
négociateur européen Michel Barnier.
Theresa May a tranché entre les parti-
sans, dans son propre entourage, d’un
Brexit immédiat, même sans accord, et
ceux qui réclament une prolongation
pour permettre la recherche d’une so-
Au Mali, la
France déploie
encore un peu
plus ses soldats
Les militaires de l’opération « Barkhane »
vont s’installer au sud du fleuve Niger, dans
la région du Gourma, pour la première fois.
TANGUY BERTHEMET £@tanguyber
AFRIQUE DE L’OUEST L’armée française
s’installe à Gossi. Depuis janvier, des sol-
dats travaillent à remettre en état un an-
cien camp des Forces armées maliennes
(Fama) et de l’ONU afin de contrôler cette
petite ville, et surtout au-delà la vaste zone
du Gourma. Le mouvement pourrait pa-
raître anodin, juste une petite caserne
d’une grosse centaine d’hommes à seule-
ment 150 kilomètres à l’ouest de Gao, le
cœur opérationnel de l’opération
« Barkhane ». Mais il s’agit d’un nouveau
déploiement de la force française au Sahel
dans une région, au sud du fleuve Niger,
où elle n’intervenait jusqu’à présent
qu’exceptionnellement. « C’est une ex-
tension de la zone d’action », souligne de
colonel Patrik Steiger, le porte-parole de
l’armée. « Barkhane » déjà a connu plu-
sieurs mutations au Mali, depuis sa créa-
tion dans la foulée de l’opération « Ser-
val » contre les djihadistes en 2012.
Conçue comme un bouclier déployé
dans l’extrême nord face aux groupes is-
lamistes, elle a dû retourner vers le sud,
en 2016, avec la résurgence des terroristes
autour de Gao. L’état-major français, en
collaboration avec les Fama et les Casques
bleus, a dès lors ouvert un premier front
près de Ménaka. Depuis 2017, les troupes
françaises se battent dans le Liptako, une
vaste région semi-boisée à la croisée des
L’AKP d’Erdogan conteste sa défaite à Istanbul
Le candidat du parti islamo-conservateur est devancé de 25 000 voix dans cette ville qui fut longtemps sa chasse gardée.
DELPHINE MINOUI £@DelphineMinoui
CORRESPONDANTE À ISTANBUL
TURQUIE Istanbul retient son souffle.
Alors que les résultats définitifs sont
encore attendus, l’AKP ne reconnaît
toujours pas la victoire du candidat de
l’opposition, Ekrem Imamoglu, dans la
capitale économique du pays. Ce mar-
di, le parti du président Recep Tayyip
Erdogan a officiellement annoncé qu’il
contestait les résultats des élections
municipales dans tous les arrondisse-
ments de la ville et a demandé un re-
comptage au Haut Conseil électoral
(YSK). « Cette procédure d’appel est lé-
gitime. Tout le monde devrait la respec-
ter », s’est justifié Omar Celik, le por-
C
te-parole de l’AKP, selon lequel
319 500 bulletins seraient invalides.
lution, introuvable jusqu’à présent
après trois refus d’entériner son accord
à la Chambre des communes.
Elle a passé toute la journée de mardi
barricadée à Downing Street avec son
cabinet dans une réunion marathon de
plus de sept heures. Les ministres
étaient retenus à l’intérieur, privés de
portables, jusqu’à une déclaration télé-
visée de Theresa May en début de soirée.
Celle-ci a assuré que « sortir avec un ac-
cord serait la meilleure option ». Elle va
donc demander aux Vingt-Sept une
nouvelle extension, « la plus courte pos-
sible », pour ne pas avoir à participer
aux élections européennes, donc limitée
au 22 mai.
Elle espère explorer d’ici là une nou-
velle voie avec l’opposition pour « met-
300 km
Points d’appuis
de l’opération
« Barkhane »
ALGÉRIE
MALI
MAURITANIE Tessalit
Kidal
Gao
Ménaka
NIGER
Mopti
Gossi
Bamako
BURKINA
Ogossagou FASO
Nig
GUINÉE
er
GHANA
CÔTE
D’IVOIRE
Infographie
frontières du Mali, du Niger et du Burkina
Faso. Signe évident d’une détérioration
de la situation, le Burkina est en effet à son
tour la cible d’attaques terroristes depuis
deux ans. Durant 18 mois, « Barkhane » a
œuvré à réduire la capacité de nuisance
de l’État islamique au Grand Sahara
(EIGS) et de son chef, Abou Walid al-Sa-
hraoui, actif dans le Liptako, tuant plu-
sieurs dizaines de terroristes. Autour de
L’écart entre Ekrem Imamoglu et
son adversaire Binali Yildirim est
d’environ 25 000 voix. Dès lundi, ce-
lui-ci avait affirmé que le nombre de
votes invalides dépassait cet écart.
Cherchant vraisemblablement à sau-
ver la face, le président Erdogan de-
meure pour l’instant en retrait de cette
dispute. Dans un message de « gratitu-
de » publié ce mardi 2 avril sur le
compte Twitter de l’AKP, il s’est
contenté d’évoquer la victoire de son
parti dans 15 métropoles de province
(le soir des élections, il en avait men-
tionné 16, en incluant Istanbul). Avant
de préciser : « Il n’y a pas de perdant
dans ces élections. Le gagnant, c’est
chaque personne qui a voté, qu’elle ait
voté pour nous ou non. »
Faut-il craindre une annulation du
tre fin à l’impasse actuelle ». Jeremy
Corbyn, le leader du Labour, s’est dit
« très heureux » de rencontrer à nou-
veau la première ministre. Il « reconnaît
qu’elle a fait un geste ».
Assouplir les lignes rouges
Cela montre a priori sa disposition à as-
souplir ses lignes rouges. Un consensus
risque de passer par l’acceptation d’une
union douanière avec l’UE, l’une des
exigences du Parti travailliste, au grand
dam des brexiters. Faute de résultat de
ces tractations, Theresa May propose-
rait alors de soumettre une série de so-
lutions différentes au vote des députés.
Un processus qui a jusqu’à présent
échoué à accoucher d’un résultat. Lundi
soir, les députés ont une nouvelle fois
À bord d’un véhicule blindé léger, le 25 mars, deux soldats de la force « Barkhane » protègent le chantier de la nouvelle base
française de Gossi (Mali), à 150 km à l’ouest de Gao. DAPHNE BENOIT/AFP
Ménaka, plusieurs dizaines d’opérations
ont été montées, débouchant sur une cer-
taine pacification. Les officiers se gardent
bien de crier victoire. « On a atteint un
certain point de développement, de restau-
ration de l’État malien et d’affaiblissement
de l’ennemi », estime, auprès de l’AFP, le
chef d’état-major français, le général
François Lecointre. Mardi soir, l’Élysée a
néanmoins annoncé la mort d’un méde-
cin militaire français au Mali à la suite du
« déclenchement d’un engin explosif im-
provisé » au passage de son véhicule blin-
dé, lors d’une opération de lutte « contre
les groupes armés terroristes ».
« Barkhane » a donc décidé, au prin-
temps 2018, de pénétrer plus à l’ouest, le
long de la route reliant Gao à Bamako. Axe
vital, la RN16, est de moins en moins sûre,
sujette aux braquages de groupes armés
contre les civils ou de poses de mines arti-
sanales. Autour, une brousse mitoyenne là
encore du Burkina, offre un sanctuaire aux
rebelles. Des éléments de l’EIGS s’y sont
repliés, mais cette zone est surtout le fief
d’une katiba d’Ansar Dine Sud, une fac-
tion liée au Groupe de soutien à l’islam et
aux musulmans (GSIM), filiale d’al-Qaida.
Son chef, al-Mansour Ag Alkassim, a sans
doute été tué en novembre dernier dans
vote ? Les partisans de l’opposition
restent sur leurs gardes, échaudés par
le précédent de 2014. Des soupçons de
fraude avaient à l’époque été évoqués
dans la capitale, Ankara, lors de la vic-
toire du maire AKP. Depuis deux jours,
ils observent également, entre amuse-
ment et crainte, l’étonnante valse des
posters sur les murs d’Istanbul. Frap-
pées d’un « Merci Istanbul » accompa-
gnant la photo du duo Erdogan-Yildi-
rim, les affiches y ont d’abord fait – un
peu trop rapidement - leur apparition,
avant d’être retirées, pour ensuite
réapparaître ce mardi matin à diffé-
rents points de la ville. Mais empêcher
la victoire d’Imamoglu demeure un
pari risqué pour l’AKP.
« D’un côté, ils essaient de faire appel,
sur la base d’irrégularités qu’ils dénon-
rejeté toutes les options qui leur étaient
présentées : union douanière, maintien
dans le marché unique européen, nou-
veau référendum ou annulation de la
sortie de l’UE. Inquiets de la marche
vers un « no deal », le conservateur Oli-
ver Letwin et la travailliste Yvette Coo-
per se préparaient à déposer ce mercre-
di un projet de loi visant à l’empêcher en
forçant Theresa May à demander un
long report du Brexit, lors d’un Conseil
européen extraordinaire à Bruxelles
dans une semaine.
Or une longue extension impliquant
la participation britannique aux élec-
tions européennes « n’a rien d’évident
ou d’automatique », a prévenu Emma-
nuel Macron, en recevant le premier
ministre irlandais, Leo Varadkar, à
un raid des forces spéciales. Cette mort
probable n’a toutefois pas réduit les capa-
cités de sa katiba. Les forces françaises
souhaitent également tenter de combattre
Ansarul Islam, des djihadistes actifs au
Burkina Faso. Ouagadougou n’a cepen-
dant pas encore officiellement donné son
accord complet.
Ce déploiement dans la Gourma devrait
se faire avec les mêmes mé-
160
thodes que dans le Liptako.
Dans les pas des rangers mili-
taires, la France s’emploie à
gagner les cœurs des habi-
tants en finançant des pro-
grammes de développement civils massacrés ravages. Le 23 mars,
et en aidant la réinstallation en mars dernier
de l’administration malienne. lors d’une opération
Des ambitions, classiques d’épuration ethnique dans gou dans ce qui ressemble à
dans ce type de conflit, régu- le village d’Ogossagou
lièrement mises en avant.
L’armée française se fait en
revanche plus discrète sur un autre pilier
de cette méthode : l’appui sur des groupes
armés « laïques », signataires de l’accord
de paix d’Alger, comme le Gatia ou le MSA.
« Ce sont des collaborations ponctuelles »,
souligne le colonel Steiger. Ce travail main
dans la main avec d’anciens rebelles est
très critiqué, notamment par certains di-
cent. Mais de l’autre, il leur faudra bien
accepter les résultats donnés par
l’YSK », estime Serkan Demirtas, le
chef du bureau d’Ankara du journal
Hürriyet Daily News, en rappelant
qu’Erdogan « a lui-même reconnu leur
échec dans les grandes métropoles lors
de son discours de dimanche ». Selon
lui, « tous ces appels au recomptage
sont à lire comme un message envoyé à
leur base, une façon de leur montrer que
rien n’est perdu ».
Tentatives de torpillage
Si Istanbul fait l’objet de tant de
convoitise, c’est qu’elle fut longtemps
perçue comme la chasse gardée d’Er-
dogan et de l’AKP. « Gagner Istanbul,
c’est gagner la Turquie », n’a cessé de
marteler, durant toute la campagne,
l’Élysée pour évoquer la situation bri-
tannique. Les Européens exigeront
comme condition à une prolongation
du feuilleton un élément nouveau ma-
jeur : élections, nouveau référendum
ou plan B clairement identifié présenté
par Theresa May.
Celle-ci se résout enfin à chercher
une voie médiane après avoir été accu-
sée de préserver les intérêts du Parti
conservateur. Elle a choisi de privilégier
la recherche d’un compromis avec l’op-
position pour une solution « d’intérêt
national », plutôt que de céder à sa pro-
pre base europhobe. Près de 200 dépu-
tés tory - deux tiers des élus du parti -
dont une demi-douzaine de ministres,
lui avaient écrit une lettre pour la pres-
ser d’assumer un « no deal ». ■
plomates français. « C’est une erreur, as-
sure l’un d’eux. Ces groupes n’ont pas une
vision d’un Mali uni mais uniquement celle
de leurs intérêts. On perd notre neutralité. »
L’intervention dans la seule Gourma est
aussi l’objet de polémiques feutrées.
« C’est un pis-aller. L’armée française veut
depuis longtemps intervenir aussi dans le
centre du pays, dans la région de Mopti »,
affirme un bon connaisseur
du dossier. Ce centre est de-
venu le vrai foyer de l’insur-
rection, où les activités djiha-
distes mêlées à de vieux
antagonismes tribaux font des
160 civils ont ainsi été massa-
crés dans le village d’Ogossa-
une opération d’épuration
ethnique. Le gouvernement
malien insiste néanmoins
pour que la sécurité autour de Mopti reste
le fait de la seule armée malienne. « Ils en
ont fait un point d’honneur. Seulement les
Fama n’y parviennent pas », continue ce
spécialiste du Mali. Or, sans apaisement
dans le centre, les chances de parvenir à
une paix durable dans le reste du pays pa-
raissent illusoires. ■
celui qui y démarra sa carrière en 1994,
lorsqu’il dirigea la mairie. Fidèle à son
sens de la modération, Ekrem Imamo-
glu prêche, pour sa part, la patience.
« Je suis l’actualisation des résultats
avec patience. Mais ce chaos m’attriste.
C’est un grand pays. Je fais confiance au
YSK. Si je perds ce scrutin, je féliciterai
mon rival », a-t-il déclaré ce mardi de-
vant un parterre de journalistes.
Alerté par certaines rumeurs, il res-
te néanmoins vigilant face aux tenta-
tives de torpillage de ses adversaires.
« Ces deux derniers jours, nous rece-
vons des appels de la municipalité. Cer-
taines personnes sont en train de dé-
tourner des dossiers, d’autres sont sur
le départ […] Je les tiendrai responsa-
bles pour la moindre pièce volée », a-t-
il prévenu. ■
 LE FIGARO mercredi 3 avril 2019

INTERNATIONAL 7

L’Otan fête ses 70 ans,

dopée par l’hostilité de Trump
L’organisation célèbre son anniversaire à Washington, où son hôte est l’un de ses plus virulents détracteurs.
mocrate – par une majorité bipartisane dépit de sa froideur envers l’Alliance, liards de dollars fin 2020 », dit Stolten- avec l’Alliance, à laquelle il cherche
PHILIPPE GÉLIE £@geliefig de 357 voix contre 22 – interdirait Trump l’aime bien et apprécie ses ré- berg –, une majorité d’États membres constamment à rajouter de nouvelles
CORRESPONDANT À WASHINGTON
l’utilisation de fonds fédéraux pour se sultats. Stoltenberg s’est aligné sur sa respectent aussi l’engagement de missions. Depuis quelques mois, son
retirer de l’Alliance atlantique ou ra- demande – unanimement soutenue consacrer au moins 20 % de leurs dé- Administration met la pression sur
DÉFENSE Si l’on en croit les apparen- patrier les troupes américaines d’Eu- aux États-Unis – d’une contribution penses militaires à l’acquisition d’équi- l’Otan pour obtenir son soutien face à la
ces, l’Organisation du traité de l’Atlan- rope. « Il n’y a aucun appétit au accrue des Européens, tout en lui en pements lourds (chars, avions, systè- Chine, pointant la menace des investis-
tique Nord ne s’est jamais aussi bien Congrès pour sortir de l’Otan », souli- laissant le mérite. « C’est grâce à votre mes d’armements). L’Alliance s’est sements de Pékin dans les infrastructu-
portée. Soixante-dix ans après sa créa- gne le sénateur républicain Jim Risch, leadership et à votre message ga- musclée via une nouvelle Force de res (ports, aéroports, télécoms). Ses
tion en 1949, son secrétaire général, président de la commission des affai- gnant », l’a-t-il flatté en juillet. Le se- réaction rapide, l’initiative des « quatre mises en garde n’ont guère porté jus-
Jens Stoltenberg, est reçu à Washington res étrangères. La lettre invitant Stol- crétaire général profite des pulsions 30 » (30 bataillons d’infanterie, 30 na- qu’ici, les Européens estimant que les
avec les honneurs d’un chef d’État. Ac- tenberg au Capitole a été signée par les négatives de Trump pour renforcer vires de combat et 30 escadrilles aé- accusations d’espionnage contre la 5G
cueilli mardi comme « un ami » dans le quatre dirigeants des deux chambres, l’Otan sur tous les fronts. « C’est un riennes prêtes à répondre à une crise du géant Huawei manquent de preuves.
Bureau ovale, il aura le rare privilège de démocrates et républicains, afin de paradoxe, a-t-il reconnu lors de la dans les 30 jours), ainsi que de nou- Comme chaque fois qu’il est déçu, le
s’exprimer ce mercredi devant les deux « renforcer notre indispensable alliance présentation de son rapport annuel à la veaux commandements conjoints président américain a alors envisagé de
chambres du Congrès américain, avant […] en ces temps critiques pour les mi-mars. À l’heure où certains s’inter- consacrés aux cyberopérations, aux li- faire payer les alliés. Sa dernière idée,
de présider un sommet des 29 ministres États-Unis, l’Otan et l’Union européen- rogent sur la force du lien transatlanti- gnes de communication maritime et à baptisée « coût plus 50 », aurait forcé
des Affaires étrangères de l’Alliance ne. » Un message directement adressé que, nous faisons plus ensemble – dans la mobilité des armées en Europe. les pays hébergeant des troupes améri-
jusqu’à jeudi. Même les inévitables ma- à la Maison-Blanche. plus de domaines et dans plus d’endroits Quelque 20 000 troupes sont déployées caines à rembourser leur entretien,
nifestations d’opposants seront au ren- L’exercice pourrait se révéler pé- – que jamais auparavant. » dans des opérations de l’Otan en plus 50 %. « Extorsion ou prétexte pour
dez-vous dans la capitale américaine, rilleux pour l’ancien premier ministre Outre la progression significative des Afghanistan, en Irak, au Kosovo, en s’en aller », selon plusieurs élus, l’idée a
sous le cri de ralliement « Non à la norvégien, mais il a su négocier avec budgets de défense – « Nous espérons Pologne et dans les États baltes. été tuée dans l’œuf par le Pentagone et
guerre, non à l’Otan ». habileté les pièges de Washington. En atteindre une augmentation de 100 mil- Cela ne suffit pas à réconcilier Trump le Congrès. Jusqu’à quand ? ■
Pourtant, l’Alliance atlantique tra-
verse une phase de périls inédits dans
son histoire. Son adversaire potentiel-
lement le plus mortel siège à la Maison-
Blanche. Hostile aux alliances en géné-
ral, tout particulièrement aux traités
militaires et commerciaux qui, à ses
yeux, désavantagent systématique-
ment les États-Unis, Donald Trump rue
dans les brancards depuis avant même
son élection. Il a jeté le doute sur la
clause de solidarité de l’Article 5, de-
mandant au nom de quoi les États-Unis
seraient tenus de se battre pour le Mon-

“ Nos amis
nous ont fait plus de mal
que nos ennemis
”
DONALD TRUMP EN 2018 LORS DU SOMMET
DE L’OTAN À BRUXELLES

ténégro, dernier arrivé parmi les 29

pays membres. Lorsque la même ques-
tion a été posée en janvier à son secré-
taire d’État, Mike Pompeo, celui-ci a
refusé « de spéculer sur une hypothè-
se ». « Sauf que ce n’est pas hypothéti-
que », souligne le New York Times,
puisque c’est « le fondement même de la
dissuasion » qui fait la valeur de l’Otan.
Mais pour Trump, les « soi-disant al-
liés », comme il les désigne, « ne se
soucient pas de nous », ils sont même
« pires » que des adversaires parce
qu’ils « volent » les États-Unis qu’ils
considèrent comme « une tirelire ».
Mauvaise élève de l’Alliance, l’Allemagne
« Nos amis nous ont fait plus de mal que
nos ennemis », avait-il lâché avant un
sommet particulièrement tendu en
reste prisonnière de son dilemme militaire
2018 à Bruxelles. En tête de ses griefs, le
reproche que les Européens ne paient
pas leur dû et « doivent des milliards » à
Washington. En fait, l’insistance du
président pour un « partage plus équi-
table du fardeau » commence à porter
ses fruits : sept pays consacrent désor-
mais 2 % de leur PIB à la défense,
contre trois en 2014 ; 24 des 29 ont
augmenté leurs dépenses militaires,
« que
ajoutant 41 milliards au pot commun
depuis 2016. La majorité est sur la tra-
jectoire des 2 % en 2024, comme déci-
dé en 2014, à l’exception notable de
l’Allemagne.
Mais l’argument pécuniaire masque
la profonde aversion de Trump pour
l’Alliance atlantique, qui « profite
beaucoup plus aux Européens qu’à
nous ». Fondamentalement, le prési-
dent ne voit pas pourquoi les États-
Unis s’investissent encore, plus de sept
décennies après la fin de la Seconde
Guerre mondiale, dans la protection
d’un continent largement assez riche
pour se défendre tout seul. « La stabilité
géopolitique est le dernier de ses soucis et
la menace russe en Europe ne le concerne
pas », estime Thomas Wright de la
Brookings Institution. Devant ses
conseillers, il revient inlassablement
sur son désir de quitter l’Otan, même
s’il en a jusqu’ici été dissuadé. La
Constitution prévoit la ratification des
nouveaux traités par le Sénat, mais rien
sur leur annulation. « Le Congrès ne
pourrait pas faire grand-chose », esti-
me Charles Kupchan du Council on Fo-
reign Relations.
Pour tenter de prévenir ce risque, la
Chambre et le Sénat ont adopté l’an
dernier à la quasi-unanimité des réso-
lutions affirmant leur soutien à l’Otan.
NICOLAS BAROTTE
£@NicolasBarotte
CORRESPONDANT À BERLIN
« PAS DE PUBLICITÉ pour la
mort. » La formule claque comme
un slogan pacifiste. Avec ce mot
d’ordre, le SPD de Berlin a propo-
sé ce week-end « d’interdire aux
organisations militaires » de par-
Le fait ticiper à des réunions d’informa-
le tion dans les écoles de la ville,
quelles qu’elles soient. Cette mise
gouvernement au ban ciblée de la Bundeswehr a
allemand scandalisé. « C’est une gifle pour
envisage tous les soldats », a critiqué la mi-
nistre de la Défense Ursula von
de réduire ses der Leyen. L’armée allemande est
contributions régulièrement invitée dans les
militaires, établissements pour évoquer ses
missions de sécurité et non pour
alors qu’elles recruter, dit-on à la Bundeswehr.
sont déjà Mais pour les militants du SPD, le
inacceptables, risque de propagande serait le
même.
est un signal
inquiétant
En Allemagne, la question mili-
taire divise toujours et leste le dé-
envoyé par bat politique droite-gauche. La
mairie de Berlin, dirigée par le so-
l’Allemagne cial-démocrate Michael Müller,
à ses 28 alliés n’a pas indiqué si elle voulait re-
de l’Otan
L’AMBASSADEUR
» prendre l’idée à son compte. La
direction du SPD a déjà pris ses
distances. Mais l’affaire témoigne
DES ÉTATS-UNIS
À BERLIN, RICHARD de l’enracinement profond de
GRENELL l’antimilitarisme en Allemagne.
Elle illustre pourquoi le pays re-
nâcle à augmenter ses dépenses
militaires.
Si l’Allemagne est devenue un
acteur du jeu international, elle
n’assume pas sa part du fardeau.
Depuis son élection à la Maison-
que 1,37 % de son PIB à sa défense
en 2019, l’Allemagne est encore
loin d’atteindre l’objectif de 2 %
en 2024 fixé aux membres de
l’Otan. Au mieux, Angela Merkel
s’est engagée à parvenir à 1,5 %.
Mais elle n’y arrivera peut-être
même pas. Les prévisions budgé-
taires présentées en mars par le
vice-chancelier et ministre des
Finances SPD, Olaf Scholz, ont
sacrifié l’armée : en 2023, le bud-
get de la Défense ne devrait re-
présenter que 1,23 % du PIB.
L’ambassadeur des États-Unis
à Berlin, Richard Grenell, a sè-
chement réagi, comme on ren-
voie la copie d’un mauvais élève.
« Le fait que le gouvernement alle-
mand envisage de réduire ses
contributions militaires, alors
qu’elles sont déjà inacceptables, est
un signal inquiétant envoyé par
l’Allemagne à ses 28 alliés de
l’Otan », a-t-il déclaré. Le ton
martial du commentaire a suscité
l’indignation générale. Mais il
n’est pas le seul à avoir critiqué
Berlin. « Je pars du principe que les
Allemands tiendront leurs promes-
ses », a déclaré au Spiegel, le se-
crétaire général de l’Otan Jens
Stoltenberg.
« Un bond substantiel »
Les menaces et les réprimandes
ont toutefois laissé de marbre à
Berlin. Le ministère des Finances
met en garde contre une lecture
en trompe-l’œil des chiffres. La
baisse en proportion est due aux
performances économiques du
pays et non à une cure d’austérité,
puis 2014, elles ont déjà progressé
de 34 % en volume. D’ici à 2023,
Olaf Scholz a proposé d’allouer
3,3 milliards d’euros supplémen-
taires pour atteindre 44 milliards
d’euros. Ursula von der Leyen ré-
clamait 55 milliards d’euros.
Compte tenu de l’état déplorable
des équipements de la Bundeswe-
hr, ce rattrapage n’est pas jugé
excessif par les experts du secteur.
En freinant l’effort sur les dé-
penses militaires, Olaf Scholz, qui
vise une candidature à la chancel-
lerie, entend cependant obtenir le
soutien de son camp. Outre l’as-
piration pacifiste, le SPD s’offus-
que aussi de devoir se plier aux in-
jonctions de Donald Trump.
La question militaire est venue
s’ajouter à la liste des différends
au sein de la coalition CDU/CSU-
SPD. Soucieuse d’apaiser les ten-
sions, Angela Merkel a temporisé,
comme à son habitude, en défen-
dant du bout des lèvres le budget.
« Certains diront que ce n’est pas
assez, mais pour nous c’est déjà un
bond substantiel », a-t-elle décla-
ré en février.
La question des « 2 % » plom-
be les relations entre Berlin et ses
partenaires. Dimanche, le minis-
tre des Affaires étrangères SPD
Heiko Maas a fait mine de se ral-
lier à l’objectif. « Nous nous y ap-
procherons pas à pas », a-t-il
confié à Die Welt sans dire à quel
rythme. « Ce ne sera pas un débat
sur les armes, mais sur l’équipe-
ment, précisément parce que les
avions doivent voler et que les navi-
res doivent naviguer », a-t-il
Donald Trump
lors d’un sommet
de l’Otan le 12 juillet
2018 au siège
de l’organisation
à Bruxelles.
KEVIN LAMARQUE/
REUTERS
ZOOM
Trump prêt à fermer la
frontière avec le Mexique
Donald Trump a réitéré mardi sa
menace de fermer « de grandes
portions » de la frontière avec le
Mexique. Le président américain a
appelé le Mexique à interpeller les
migrants originaires d’Amérique
centrale qui transitent sur son sol et
le Congrès à muscler les lois
migratoires des États-Unis, faute de
quoi, a-t-il dit, « la frontière sera
fermée, c’est sûr à 100% ». La
fermeture portera peut-être
uniquement sur « de grandes
portions de la frontière » et pas sur les
3 200 kilomètres qui séparent les
États-Unis du Mexique, a-t-il
précisé, promettant une annonce
« dans les prochains jours ». « Fermer
la frontière pourrait avoir un impact
économique catastrophique sur notre
pays », a alerté le chef de la majorité
républicaine au Sénat, Mitch
McConnell. « La sécurité est plus
importante que le commerce », a pour
sa part argumenté Trump.
EN BREF
Les enfants de Khashoggi
indemnisés par Riyad
Selon le Washington Post,
les quatre enfants du journaliste
saoudien Jamal Khashoggi ont
chacun reçu en compensation des
maisons de plusieurs millions de
dollars et perçoivent chaque mois
des versements supérieurs
à 10 000 dollars de Riyad.
Le Venezuela bientôt en
« crise alimentaire aiguë »
Le Venezuela, pays producteur
de pétrole, devrait faire son entrée
C

L’une des premières mesures votées en Blanche, Donald Trump ne cesse dit-on. Les dépenses militaires ajouté dans un message à sa pro- en 2019 parmi les pays en « crise
janvier par la nouvelle Chambre dé- de le rappeler : en ne consacrant continueront d’augmenter. De- pre famille politique. ■ alimentaire aiguë », selon l’ONU.
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO
8 SOCIÉTÉ
La France, toujours championne
d’Europe de la surpopulation carcérale
Selon une étude annuelle, son taux d’incarcération reste pourtant dans la moyenne par rapport aux autres États.
PAULE GONZALÈS £@paulegonzales
JUSTICE Les prisons françaises souffrent
toujours du même mal. Space I, la grande
étude statistique annuelle sur les prisons
de quarante États du Vieux Continent, pi-
lotée par l’Université de Lausanne pour le
compte du Conseil de l’Europe, le confir-
me : alors que le taux de détention mé-
dian est passé de 109,7 à 102,5 détenus
pour 100 000 habitants - soit une baisse
de 2,6 % -, la France a un taux d’incarcé-
ration pour 100 000 habitants qui corres-
pond exactement à celui médian de tous
les pays observés. Ainsi affiche-t-elle un
taux de 103,5 % de détenus, en hausse de
0,9 % par rapport à 2016 mais en baisse de
0,7 % par rapport à 2008.
Pourtant, l’Hexagone continue d’être
lanterne rouge en ce qui concerne la
densité carcérale, frôlant les taux de
surpopulation de la Moldavie, de la Rou-
manie et de la Macédoine du Nord avec
116 détenus pour 100 places. Cette inadé-
quation entre le nombre de détenus et ce-
lui des places en détention est la meilleu-
re preuve d’un manque cruel de places de
prison, qui fait vivre les détenus dans des
conditions indignes et dénoncées par
toutes les organisations internationales.
« Pour des questions d’optimisation de
l’espace et de bonne gestion des coûts, l’oc-
cupation carcérale se rapproche toujours de
la capacité maximale du parc pénitentiaire.
Il n’est ainsi pas rare que la baisse de la po-
pulation carcérale entraîne une fermeture
d’établissements. Mais plus on concentre la
population pénale, plus on augmente les
risques d’incidents », avertit le directeur
de l’étude, le criminologue Marcelo Aebi.
Contrairement à ce que prétendent beau-
coup des détracteurs de la prison en Fran-
ce, il n’est donc pas vrai que plus on
construit de places de prisons, plus on les
remplit. Si la France garde un taux d’oc-
cupation de 1,3 détenu par cellule, c’est
parce que, comme le fait remarquer Mar-
celo Aebi, « il faut distinguer entre maisons
d’arrêt surpeuplées et maisons centrales »
où se pratiquent un strict numerus clausus
et un strict encellulement individuel.
Dans le même temps, la France est
championne européenne du bracelet
électronique avec près de 11 000 indivi-
dus concernés alors qu’il est majoritai-
rement ignoré des autres pays du
Conseil de l’Europe, « essentiellement
pour des questions de coût », estime le
criminologue de Lausanne. Cela n’em-
Deux djihadistes assignent l’État en justice
Détenues dans un camp syrien, elles exigent leur rapatriement en France avec leurs six enfants.
STÉPHANE DURAND-SOUFFLAND
sdurandsouffland@lefigaro.fr
JUSTICE Un si petit prétoire pour un si
grand dilemme : une juge des référés du
tribunal administratif de Paris a exami-
né, seule, mardi, les requêtes déposées
par deux femmes de djihadistes. Déte-
nues dans le camp syrien de Roj, en
zone kurde, elles entendent enjoindre à
l’État français de les rapatrier avec leurs
enfants. Ces derniers, au nombre de six,
sont âgés de 1 an à 8 ans.
Les avocats des requérantes,
Mes William Bourdon et Vincent Bren-
garth, souhaitent convaincre la prési-
dente qu’il s’agit d’une problématique
strictement juridique et qu’elle est
compétente pour l’examiner, argument
qui sera contesté par la représentante
du ministère des Affaires étrangères.
« Nous sommes devant la chronique de la
mort annoncée d’enfants français en bas
âge, otages d’un cynisme d’État », affir-
me Me Bourdon, qui en appelle au
« bouclier du juge ».
L’avocat déplore que, selon un son-
dage, seulement un Français sur trois
soit favorable au rapatriement des
enfants de djihadistes : « Ainsi, les en-
fants de terroristes deviennent respon-
1
sables de leurs géniteurs », ironise-t-
il avant de s’en prendre aux autorités
politiques : « On ne veut pas dire à nos
compatriotes qu’il existe une obliga-
A
tion juridique de les faire revenir en
France. On cherche à tout prix à “déju-
La France garde un taux d’occupation de 1,3 détenu par cellule. Ci-dessus, les couloirs de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis (Essonne).
pêche pas l’Hexagone de détenir le plus
fort taux de suicides en prison des qua-
rante pays étudiés. Pour pondérer cette
donnée, l’universitaire de Lausanne
rappelle qu’il faut mettre ce taux en re-
lation avec le taux de suicide national.
TAUX D’INCARCÉRATION
pour 100 000 habitants, en 2018
plus de 250
de 200 à 249
de 150 à 199 Royaume-uni
de 100 à 149
de 80 à 99
Allemagne
moins de 80
MÉDIANE FRANCE
EUROPÉENNE :
103,5
102,5
Italie
Espagne
Portugal
Infographie
Le camp syrien de Roj, en zone kurde, où les deux femmes de djihadistes sont
détenues avec leurs enfants. AHMED MARDNLI/EPA/MAXPPP
ridiciser” la décision : cette position est
archaïque et obsolète. »
Son confrère et lui énumèrent, au
soutien de leur argumentation, diffé-
rentes jurisprudences ainsi que la Dé-
claration des droits de l’enfant. Celle-ci
dispose notamment que « l’enfant doit
bénéficier d’une protection spéciale et se
voir accorder des possibilités et des faci-
lités par l’effet de la loi et par d’autres
moyens, afin d’être en mesure de se dé-
velopper d’une façon saine et normale
sur le plan physique, intellectuel, moral,
spirituel et social, dans des conditions de
liberté et de dignité ». Me Brengarth sou-
L’étude note que la France bat des re-
cords en matière d’évasion, même si avec
1,7 surveillant par détenu, elle est dans la
moyenne européenne. Ainsi, en 2017, le
nombre d’évasions s’est élevé à 611 dans
l’Hexagone, contre 394 en Allemagne ou
Finlande
Russie
Suède
Pologne
Roumanie
Bulgarie
Grèce
Chypre
ligne que « si tant est qu’elles existent,
les juridictions kurdes n’ont pas la capa-
cité de juger nos ressortissants, car la
qualification d’association de malfaiteurs
à caractère terroriste n’existe pas dans
leur législation ».
Une immixtion illégale
Mais la représentante du Quai d’Orsay
soutient, elle, l’incompétence du tribu-
nal, au motif que la question soulevée
« n’est pas détachable de la conduite des
relations internationales de la France »,
ainsi que l’a déjà jugé la juridiction ad-
ministrative, saisie une première fois de
de jugement. « Ce que la France ne donne
pas, c’est le nombre d’étrangers en situa-
tion irrégulière. Il est probable que, faute
de représentation et de domiciliation, une
majorité soit maintenue en détention afin
de ne pas risquer d’échapper à leur juge-
ment », tente Marcelo Aebi.
La France est championne
de la détention provisoire
avec un taux de 29 %
quand le taux médian
européen est de 22 %
La France est d’ailleurs championne de
FRANÇOIS BOUCHON/LE FIGARO
la détention provisoire avec un taux de
29 % quand le taux médian européen est
de 22 %. Marcelo Aebi interroge aussi la
détention par type d’infraction. En effet,
est en augmentation de 9,7 % en Europe
l’incarcération liée à la drogue, soit un
taux médian de 16,8 %. En France, elle
n’excède pas 18,3 % : l’un des taux les
moins importants en la matière. Enfin, en
2018, plus d’un tiers des détenus euro-
péens purgeaient une peine pour infrac-
130 en Italie. Autre donnée intéressante, tion avec violence. Marcelo Aebi y voit un
le taux des étrangers dans les prisons changement sociétal majeur : « Bien des
européennes. Sur les 15 391 étrangers in- violences n’auraient fait l’objet d’aucune
carcérés en France, les deux tiers sont des plainte il y a trente ans. L’Europe est deve-
ressortissants de pays extérieurs à nue de plus en plus intolérante à la violen-
l’Union européenne, 63 % sont en attente ce », conclut le criminologue. ■
DENSITÉ CARCÉRALE, NOMBRE DE DÉTENUS pour 100 places, en 2018
ESPAGNE 71,8
ROYAUME-UNI 76,4
POLOGNE 85
PAYS-BAS 86,5
ALLEMAGNE 87,4
MÉDIANE EUROPÉENNE 91,4
AZERBAIDJAN 91,4
CHYPRE 95,8
GRÈCE 101
PORTUGAL 105,9
MOLDAVIE 113,4
ITALIE 115
FRANCE 116,3
ROUMANIE 120,5
Source : Space, Conseil de l’Europe 100
EN BREF
Racisme et antisémitisme :
Belloubet demande aux
parquets de « serrer la vis »
La ministre de la Justice,
Nicole Belloubet, a demandé
ces requêtes en décembre. Un arrêt mardi aux parquets de « serrer
postérieur du Conseil constitutionnel la vis » dans la lutte contre
consacrant « l’exigence constitutionnelle le racisme et l’antisémitisme
de protection de l’intérêt de l’enfant » a pour qu’« aucune agression
encouragé les requérants à saisir à nou- ne reste impunie ». Une circulaire
veau le tribunal. sur ce sujet a été rédigée.
« Les opérations de rapatriement,
poursuit la juriste, impliquent une re- Enseignement supérieur :
cherche préalable d’accord avec les auto- le ministère va financer
rités locales qui ont le contrôle de nos res- des thèses sur
sortissants. Le juge administratif ne la radicalisation islamiste
saurait ordonner à l’État un tel rapatrie- Le ministère de l’Enseignement
ment sans lui enjoindre aussi de dialoguer supérieur va financer cinq postes
et de négocier avec les autorités locales. » de doctorants pour travailler
Un tel jugement constituerait donc bien, sur la radicalisation islamiste et
d’après elle, une immixtion illégale. ouvrir à la recherche scientifique
Le ministère ne veut toutefois pas le Fichier des signalements pour
passer pour une entité dépourvue de la prévention et la radicalisation
cœur et rappelle que, les 15 et 27 mars à caractère terroriste (FSPRT).
derniers, cinq orphelins et une fillette
de 5 ans privée de ses parents ont été Attentats à Trèbes et
rapatriés en vertu de la doctrine du Carcassonne : un proche du
« cas par cas » qui prend également en tueur en garde à vue à Paris
compte le contexte humanitaire. Mais, Un proche du djihadiste
d’une manière générale, la France refu- Radouane Lakdim, qui a tué
se de faire revenir sur son sol les djiha- quatre personnes le 23 mars 2018
distes affiliés à Daech et leurs épouses. à Trèbes et Carcassonne,
Au terme d’une heure de débats, la a été interpellé mardi
présidente prend la parole : « Je n’exclus et placé en garde à vue à Paris.
pas de renvoyer ces affaires devant une
juridiction collégiale », annonce-t-elle. Nice : 14 prévenus libérés
Il est donc possible qu’une nouvelle après une erreur de la justice
audience ait lieu très rapidement - pro- Quatorze prévenus,
cédure de référé oblige - devant trois dont un trentenaire soupçonné
magistrats. Ce qui semblerait davan- d’être un poids lourd du trafic
tage en adéquation avec l’ampleur des de drogue à Nice, ont obtenu
questions soulevées, et les conséquen- leur remise en liberté en raison
ces potentielles de la décision à venir. ■ d’une erreur de la justice.
 LE FIGARO mercredi 3 avril 2019

SOCIÉTÉ 9

Les évêques de
France en quête
d’un nouveau
président
Le successeur de Mgr Pontier
devra affronter une crise profonde
causée par l’accumulation de scandales. Les évêques de France lors de l’assemblée plénière de printemps, mardi, à Lourdes. LAURENT FERRIERE

mandat. Une petite dizaine de noms jorité, ne consiste pas à « débarquer im- ques, mardi matin, Mgr Pontier n’a donc Mgr Pontier n’a pas pu parler de
JEAN-MARIE GUÉNOIS £@jmguenois circulent néanmoins (lire ci-dessous). médiatement » le cardinal Barbarin, pas éludé le « trouble profond » qui tra- l’électrochoc provoqué chez les fidèles
En attendant, la maison catholique comme affirmé alors. Elle est destinée à verse l’Église : « Dans notre pays, le clas- par le livre de Frédéric Martel, Sodoma

RELIGION À Lourdes, les évêques réunis
à huis clos depuis mardi en assemblée de
printemps vont notamment réfléchir sur
les enjeux de… l’intelligence artificielle.
Deux spécialistes leur parleront de la
puissance supposée infinie des ordina-
teurs. Aucune « intelligence » d’ordina-
teur ne pourra toutefois résoudre le ma-
laise sérieux qui mine l’Église de France.
Le nouveau président de la Conférence
des évêques de France qu’ils doivent
élire à la suite des deux mandats de
Mgr Georges Pontier, archevêque de
Marseille, 75 ans, hérite d’un cahier des
charges d’une rare gravité. Nul candi-
dat ne peut se présenter : c’est par votes
successifs, qui peuvent durer jusqu’à
jeudi, que le nouveau président est élu à
la majorité des deux tiers. Le nouvel ar-
chevêque de Paris, Mgr Michel Aupetit,
a déjà fait savoir qu’il ne briguait aucun
brûle. Le vrai-faux dénouement de l’af-
faire Barbarin dans le bureau du Pape, le
18 mars, avec le report d’une démission
suspendue au résultat de la justice fran-
çaise - François a fermement confirmé
sa position dimanche soir à son retour
du Maroc : il veut respecter la « pré-
somption d’innocence » –, a eu l’effet
d’un toit qui s’écroule après un incendie
longtemps couvé. Mais le retrait « per-
sonnel » du cardinal, qui conserve néan-
moins sa charge d’archevêque, crée une
situation inédite qui sème de la confu-
sion car elle n’est pas tout à fait dans les
règles canoniques.
Confusion accrue par l’interprétation
erronée de deux votes du conseil presby-
téral de Lyon, les 14 et 19 mars, répandue
par des prêtres qui n’étaient pas présents
aux réunions. Loin d’une « rébellion »,
cette motion, votée à une très forte ma-
« accompagner sa propre décision de re-
mettre sa charge », « que tout le monde a
jugée très digne » mais qu’il faut anticiper
Pour 6 Français sur 10,
jamais l’Église n’a eu
une si « mauvaise image »
en termes de « délai », explique dans un
courrier interne le père Yves Baumgar-
ten, en charge de la gestion courante du
diocèse. Car, de l’avis de tous, cette si-
tuation transitoire ne peut s’éterniser. Ce
qui explique qu’une délégation officielle
devait cette semaine déposer cette mo-
tion au Vatican chez le cardinal Ouellet,
préfet de la Congrégation pour les évê-
ques, pour préparer l’avenir.
En inaugurant l’assemblée des évê-
sement sans suite prononcé d’abord par le
procureur de la République de Lyon au su-
jet du cardinal Barbarin, puis la condam-
nation de celui-ci, suivie de l’appel engagé
par ses avocats, l’attente de la fin du pro-
cessus judiciaire de la part du Pape pour
examiner la remise de sa démission par le
cardinal Barbarin, le manque de clarté de
la nouvelle gouvernance du diocèse de
Lyon, les réactions vives de certaines vic-
times d’abus, tout cela marque nos églises
diocésaines. »
Sans oublier, a encore noté le prési-
dent sortant des évêques, « la mise au
grand jour de l’horreur vécue par des reli-
gieuses agressées par des prêtres diocé-
sains ou religieux, ou parfois même par
leurs propres supérieures ». Des « actes
abjects » que l’épiscopat « dénonce avec
force » et qui « exigent » que les « victi-
mes soient entendues et accompagnées ».
CASTELLI/ANDIA.FR, ÉRIC LE BRUN/LIGHT MOTIV, THIERRY GACHON/PHOTOPQR/L’ALSACE/MAXPPP, BIGOT/ANDIA.FR, MARC BERTRAND/CHALLENGES-REA ET FLORENCE BROCHOIRE/SIGNATURES
(Robert Laffont), sur l’homosexualité
dans l’Église, un sujet totalement tabou
dans les rangs ecclésiaux. Ni des plain-
tes déposées pour « attouchement »
contre le nonce apostolique en France,
qui nie cependant les faits. Protégé par
l’immunité diplomatique, il n’était pas
à Lourdes mardi comme l’impose tou-
tefois sa fonction.
Cette accumulation de scandales en
moins d’un mois a créé un traumatis-
me sans précédent dont le sondage
publié le 27 mars par Témoignage
chrétien donne une idée : pour 6 Fran-
çais sur 10, jamais l’Église n’a eu une si
« mauvaise image », 83 % des catholi-
ques estimant que cette crise est l’une
des « plus graves » que l’Église ait
connue. Quant à l’affaire Barbarin,
65 % des sondés jugent que le Pape
aurait « mal géré » la situation. ■

Mgr Jean-Paul
James (Nantes)
■ À 66 ans, c’est un homme
plutôt discret, trop, aux yeux de
certains, et au parcours classique
mais qui peut rassurer en temps
de crise. Il a été également
évêque de Beauvais, Noyon
et Senlis. Plutôt issu de la filière
de professeur et de directeur
de séminaire, il est aussi passé,
avant la prêtrise, par une grande
école de statistiques. Une tête
bien faite qui a aussi la réputation
d’être un homme sage.
Mgr Dominique
Lebrun (Rouen)
■ À 61 ans, il s’est fait
nationalement connaître
avec l’affaire de l’assassinat du
père Hamel, dont il était l’évêque.
Juriste de formation, ancien arbitre
de football à ses heures, il est
parfois jugé trop pointilleux, mais
il bénéficie d’une incontestable
expérience pastorale - il fut prêtre
dans le 93 et évêque de Saint-
Étienne - et d’un grand sens
du contact humain qui lui vaut
une belle surface médiatique.
Mgr de Moulins- Mgr Pierre
Beaufort (Reims) d’Ornellas (Rennes) (Strasbourg)
■ À 57 ans, il vient d’être nommé
archevêque de Reims. Science Po
avant le séminaire, puis aumônier
d’école, directeur de séminaire,
curé de paroisse, secrétaire
de l’archevêque de Paris,
il a ensuite été évêque auxiliaire.
Reconnu pour sa capacité
de travail et sa lucidité,
il est une valeur sûre pour
un renouveau générationnel
de l’épiscopat même s’il est « trop
parisien » aux yeux de certains.
Mgr Luc Ravel
■ À 65 ans, ce prêtre de l’institut
Notre-Dame de Vie, ingénieur
de formation, ancien secrétaire
du cardinal Lustiger, a marqué
par la méthode ouverte
avec laquelle il a mené
toute la réflexion bioéthique
de l’épiscopat. De nature plutôt
intellectuelle, il a un grand souci
pastoral qu’il sait habilement
mettre en œuvre avec tous
les interlocuteurs, civils
et religieux, de sa région.
■ À 61 ans, ce polytechnicien,
religieux des Chanoines réguliers
de Saint-Victor, est
une des fortes personnalités
de l’épiscopat. Avant l’Alsace,
il a été évêque aux armées,
où ce fils de général était comme
chez lui. Il vient de publier un livre
remarqué sur la lutte contre
la pédophilie. Meneur d’hommes
mais ne faisant pas dans
l’onctuosité épiscopale, il dispose
d’un bon profil médiatique.
Mgr Laurent
Ulrich (Lille)
■ Âgé de 67 ans, ce prêtre
du diocèse de Dijon, dont
il fut vicaire épiscopal avant
de devenir, en 2000, évêque
de Chambéry, puis archevêque
de Lille en 2008, a été également
vice-président de la Conférence
des évêques. Il a une longue
expérience pastorale et connaît
bien la structure ecclésiale
française, où il est très à l’aise.
Il a déjà été cité plusieurs fois
pour la présidence.

Le Pape appelle les jeunes à accueillir les migrants

Il leur demande de s’engager et regrette
« une mentalité xénophobe » dans les pays
européens qui sont confrontés à l’immigration.
VATICAN Dans l’exhortation post-
synodale Christus vivit, publiée mar-
di, synthèse du synode sur les jeunes
qui s’est déroulé à Rome en octobre
2018, le pape François leur demande
de ne pas observer le monde depuis
un « balcon », vautré dans un « di-
van » ou caché derrière un « écran »,
comme s’ils étaient « des jeunes mo-
mifiés », mais de se lancer en étant
« épris de liberté ».
Et surtout, François engage les fu-
turs leaders et tous les jeunes en gé-
néral à « ne pas se laisser enrôler dans
les réseaux de ceux qui veulent les op-
poser à d’autres jeunes qui arrivent
dans leurs pays, en les présentant com-
me des êtres dangereux ». Car, déplo-
re-t-il, « dans les pays d’arrivée, les
phénomènes migratoires suscitent des
alarmes et des peurs, souvent fomen-
tées et exploitées à des fins politiques.
Exigence du Pape : « Il faut réagir
fermement à cela. » Dimanche soir,
dans une interview exclusive à
La Sexta, une chaîne de télévision es-
pagnole, François avait d’ailleurs
lancé : « Quant aux catholiques qui re-
jettent l’immigration, qu’ils lisent
l’Évangile, qu’ils soient cohérents. »
Texte coup-de-poing
Très attaché à l’engagement social et
politique, le Pape appelle aussi les
jeunes à prendre des responsabilités
dans ce domaine : « Je vous demande
aussi d’être protagonistes de ce chan-
gement. Continuez à vaincre l’apa-
thie, en donnant une réponse chré-
tienne aux inquiétudes sociales et
politiques, présentes dans diverses
parties du monde. » Ce qui nécessite
« d’accompagner spécialement les
jeunes qui se profilent comme leaders,
Le pape François (ici, en septembre 2017, à Rome) appelle les jeunes à prendre
des responsabilités dans le domaine social et politique. GIUSEPPE CICCIA/NURPHOTO
Mais dans ce texte coup-de-poing et
foisonnant de 299 paragraphes, le Pape
ne s’en tient pas uniquement à la ques-
tion migratoire. Il encourage les jeunes
à avoir toujours plus d’allant. « Je serai
[…] L’Église a besoin de votre élan, de
vos intuitions, de votre foi. Vivez donc,
exhorte-t-il, prenez des risques, même
si vous vous trompez. […] Ouvrez la por-
te de la cage et sortez voler ! S’il vous
sociaux ne trouvent pas les réponses
qu’ils méritent, ce n’est pas bon de partir
battu. Le chemin est Jésus; […] Il change
la perspective de la vie. »
Sur un plan plus ecclésial, le docu-
ment se termine par un appel aux voca-
tions religieuses et sacerdotales, mais
aussi au mariage « entre un homme et
une femme ».
Et, sur le plan doctrinal, François en-
courage les jeunes à prier « le Seigneur
de délivrer l’Église des personnes qui
veulent la faire vieillir, la scléroser dans
le passé, la figer, l’immobiliser » et à
« calmer l’obsession de transmettre une
accumulation de contenus doctrinaux »
en évitant une « pastorale des jeunes
aseptisée, pure, marquée par des idées
abstraites, éloignée du monde ».
Il attend aussi de la jeunesse qu’elle
soit vigilante sur les abus sexuels :
« Quand vous voyez un prêtre en danger,
parce qu’il a perdu la joie de son ministè-
re, parce qu’il cherche des compensa-
tions affectives ou qu’il est en train de
perdre le cap, ayez le courage de lui rap-
peler son engagement envers Dieu et
avec son peuple, annoncez-lui, vous-
A

Une mentalité xénophobe, de fermeture pour qu’ils puissent se former et se plus heureux en vous voyant courir plus plaît, ne prenez pas votre retraite avant mêmes, l’Évangile, et encouragez-le à
et de repli sur soi se diffuse alors. » qualifier ». vite qu’en vous voyant lents et peureux. l’heure. » Il ajoute : « Quand les malaises rester sur le bon chemin. » ■ J.-M. G.
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

10 SOCIÉTÉ

Moins de fautes grâce au nouveau clavier

La première norme française va notamment remédier au problème des majuscules impossibles à accentuer.

MARIE-ESTELLE PECH £@MariEstellPech

BUREAUTIQUE Il sera bientôt possible
d’écrire dans un français correct grâce à
la toute première norme française pour
les claviers informatiques. La France était
jusqu’à aujourd’hui l’un des rares pays
européens à ne pas disposer d’une norme
nationale en la matière. La disposition du
clavier « azerty », qui tire son nom des
premières touches alphabétiques du cla-
vier, est une variante de la disposition
« qwerty », brevetée en 1868 pour les
machines à écrire. Disposition organisée
pour éviter les risques de blocage des
marteaux de frappe, et qui n’avait jamais
fait l’objet d’un toilettage en profondeur.
Aujourd’hui, d’un fabricant à l’autre,
le clavier diffère. Certaines touches ne
sont pas disponibles au même endroit ou
pas du tout. Deux exemples symptomati-
ques : les symboles « @ » et « € », pour-
tant très utilisés, sont placés de façons
très diverses. Pour y accéder, il faut par
ailleurs une double commande. Mais la
difficulté la plus récurrente - et très aga-
çante - concerne aujourd’hui l’usage des
caractères accentués, et en particulier des
caractères accentués en majuscule. Leur
Des machines ont calculé
l’emplacement optimal
des nouveaux caractères
à ajouter
utilisation est difficile, voire impossible.
Sur Windows, par exemple, impossible
d’utiliser l’accent aigu. Sur Mac, la mani-
pulation, particulièrement baroque, est
inconnue de la plupart des utilisateurs.
Selon la Délégation générale à la langue
française, ces limitations informatiques
conduisent de nombreux Français à
considérer que l’on ne doit pas accentuer
les majuscules, alors que l’accent a pleine
valeur orthographique, y compris au sein
de l’administration (INSEE et non INSÉÉ).
Le clavier « bépo » (en haut) présente en accès direct des caractères jusque-là absents du clavier « azerty » (en bas).
« Il fait partie de l’orthographe du mot et
est donc indispensable, y compris sur les
majuscules, les capitales et la préposition
À », rappelle l’Académie française. Au
risque, sinon, de prêter à confusion. Est-
on par exemple INTERNE ou INTERNÉ ?
Autre caractère répandu, le « ç » ne
peut pas, lui non plus, être saisi en majus-
cule, alors que les phrases commençant
par le pronom « ça » sont monnaie cou-
rante. Vaut-il mieux omettre la majuscu-
le, ou écrire « Ca » ? Dans les deux cas,
c’est une erreur d’orthographe ! Quant
aux deux ligatures du français que sont
les « æ » et « œ », ces touches sont le plus
souvent absentes des claviers. Pourtant,
nous voyons tous les jours passer des
« œufs » et des « œuvres »… Certes, ces
voyelles entrelacées sont le plus souvent
accessibles a posteriori via un correcteur
orthographique automatique… mais ce
dernier n’est pas toujours disponible. En-
fin, les guillemets à la française, les dou-
bles chevrons « », sont le plus souvent
remplacés par des virgules hautes à l’an-
glaise. Un comble ! Compte tenu de ces
difficultés, la Délégation générale à la
langue française et aux langues de France
a lancé, en 2015, en partenariat avec l’As-
sociation française de normalisation
BÉPO
(Afnor), un travail visant à aboutir à une
norme française. Il s’agit d’ajuster les dis-
positions de certaines touches, sans les
révolutionner.
Des machines ont calculé l’emplace-
ment optimal des nouveaux caractères à
ajouter. Une enquête publique avait éga-
lement été lancée, suscitant un fort inté-
rêt chez les internautes. Établis sur cette
norme non obligatoire, bien sûr, de nou-
veaux modèles de claviers azerty verront
le jour si les fabricants décident de l’adop-
ter. Les consommateurs, entreprises et
administrations pourront alors décider ou
non de les privilégier. Pour Thibault
Un outil militant ?
Grande nouveauté de ce clavier à la
française, il proposera le point médian,
un signe typographique « · » placé
au-dessus de la ligne de base,
recommandé par les thuriféraires
de l’écriture inclusive pour insérer
les formes féminine et masculine
d’un même terme. Ce choix n’a pas été
guidé par les débats sur l’écriture
inclusive, précisent les concepteurs,
mais par la volonté d’adapter ce clavier
aux usages et de prendre désormais
en compte les langues régionales,
aujourd’hui oubliées. Le point médian
trouve une utilité en catalan, où il est
utilisé entre deux « l » pour signifier
qu’ils ne se prononcent pas comme le
« ll », dit « géminé ». Il est également
utilisé en occitan, dans sa variante
gasconne, pour séparer deux lettres
qui, sinon, se prononceraient
différemment. Le caractère n tilde (ñ)
va aussi apparaître. Il est aussi utilisé
en basque et en breton, comme dans
le mot Enankañ. Plus globalement,
la saisie de l’ensemble des caractères
des langues à alphabet latin présentes
sur le continent européen, dont
l’allemand, l’espagnol et le portugais,
sera enfin possible. M.-E. P.
Grouas, chef de la mission des langues et
du numérique au ministère de la Culture,
cette norme azerty nécessite « quelques
heures à quelques jours d’adaptation ». Son
ministère pourrait la proposer assez rapi-
dement. La deuxième norme possible, un
clavier « bépo » optimisé, est plus révolu-
tionnaire. Elle chamboule tout, nécessi-
tant trois semaines d’adaptation, mais
« c’est la plus adaptée à la langue françai-
se, et la plus ergonomique », selon Jean-
Christophe Groult, représentant de l’as-
sociation d’utilisateurs Ergodis. Dans les
deux cas, les utilisateurs devraient aussi
pouvoir taper plus vite leurs textes. ■

Les violences contre d’une professeur d’un lycée de Créteil,

braquée avec une arme factice par un
élève. Face à l’émoi suscité par ces ima-

les profs en hausse

Selon le baromètre de l’Autonome de solidarité
laïque, qui agit pour la protection juridique
des enseignants, les litiges ont augmenté de 7 %.
CAROLINE BEYER £@BeyerCaroline
ÉDUCATION Un enseignant agressé
physiquement et verbalement par un
père d’élève pour une raison qui reste
indéterminée. Les faits se sont produits
le 28 mars au matin, peu avant l’ouver-
ture d’une école maternelle toulousai-
ne. Un incident qui vient s’ajouter à la
longue liste des violences à l’encontre
des enseignants. En février, c’est dans
un collège de l’Isère qu’un professeur
d’histoire-géographie était blessé au
genou, après une altercation avec un
père en colère. En février toujours, à
Saint-Denis, un enseignant qui tentait
de s’interposer dans une bagarre était
roué de coups par quatre individus.
de citadelle assiégée ? Les rapports en-
tre les parents et les enseignants sont
loin d’être au beau fixe, les premiers
n’hésitant plus à venir demander, par-
fois brutalement, des comptes aux se-
conds. Selon le baromètre, les agres-
sions physiques légères, elles, restent
plutôt stables (6 % des dossiers), tout
comme les préjudices informatiques -
photographies, films et propos circu-
lant sur les réseaux sociaux - (6 %) et le
harcèlement moral (1,87 %).
L’Autonome de solidarité relève aussi
une augmentation des dossiers concer-
nant les différends familiaux, notam-
ment les séparations des parents, dans
Les insultes, les menaces et les propos diffamatoires représentent les deux tiers
des dossiers de litiges en 2018. PICASA
lesquels ils sont pris à partie, ainsi que
l’accueil des élèves handicapés. « Les
enseignants sont confrontés à des en-
fants qui peuvent être violents ou en si-
tuation de handicap et qui sont accueillis
dans les établissements sans aide, sans
assistance particulière, constate l’Auto-
nome de solidarité. Les enseignants sont
démunis. » Les professeurs ont le blues.
Ils l’ont d’ailleurs fait savoir cet autom-
ne sur les réseaux sociaux, avec le
hashtag #pasdevague, dénonçant à la
fois la dégradation du climat scolaire et
l’omerta de rigueur dans l’institution.
Déclencheur de ce torrent d’expres-
sions individuelles ? L’agression filmée
ges circulant alors en boucle, le minis-
tre de l’Éducation promettait de ma-
nière imminente un plan lutte contre
les violences scolaires. Cinq mois plus
tard, le fameux plan, repoussé de nom-
breuses fois - étant interministériel, il
doit mettre d’accord les ministres de
l’Éducation, de la Justice et de l’Inté-
rieur - n’est toujours pas arrivé. Com-
portera-t-il des mesures consistant à
sanctionner financièrement les parents
des élèves fauteurs de troubles ? Le mi-
nistre de l’Éducation n’a pas écarté
l’idée, même si elle ne fait pas forcé-
ment consensus. « Ce sera un plan com-
me il n’y en a jamais eu jusqu’à présent, a
indiqué Jean-Michel Blanquer, le
20 mars dernier, sur CNews. Je l’annon-
cerai dans très peu de temps et il sera va-
lable pour la rentrée prochaine. »
Une enquête de la Depp, le service
statistique de l’Éducation nationale,
menée du 12 mars jusqu’au 5 avril pro-
chain sur les agressions de personnes
dans les collèges et lycées, devrait ser-
vir de base à l’annonce de ce plan. ■

Hashtag #pasdevague
Faits surmédiatisés ou violence ac-
Nette augmentation de l’absentéisme scolaire en 2018
crue ? Alors que le plan ministériel
contre les violences scolaires se fait
cruellement attendre, le baromètre an-
nuel réalisé par l’Autonome de solidari-
« deDuleurs
té laïque fait état d’une augmentation
de 7 %, en 2018, des litiges par rapport
à l’année précédente, soit 4 883 dos-
siers ouverts. Les insultes, les menaces
et les propos diffamatoires représentent
les deux tiers de ces dossiers. « Même
quand elles sont peu graves, ces situa-
tions sont déstabilisantes et stressantes
pour les personnels d’éducation, peu ha-
bitués à gérer ce genre d’agressions »,
explique l’organisme qui œuvre pour la
protection juridique des personnels de
l’Éducation nationale.
Qui sont les auteurs de ces agres-
sions ? Les parents d’élèves et respon-
sables légaux (à 55 %) arrivent nette-
ment en tête, bien avant les élèves
(21 %), la hiérarchie (7 %) et les collè-
A
L’ABSENTÉISME touchait 5,6 %
fait des élèves scolarisés dans l’ensei-
gnement public en 2017-2018,
contre 4,9 % en 2016-2017. Une
absences augmentation sensible de
non justifiées, 0,7 point. Tous ont été absents de
façon non justifiée quatre demi-
les élèves journées ou plus par mois en
perdent moyenne selon une note de la
en moyenne Depp, le service statistique du mi-
nistère de l’Éducation nationale.
1,6 % de temps Cette augmentation est parti-
d’ensei- culièrement visible pour les lycées
gnement, professionnels : + 2,4 points alors
que, pour les collèges et les lycées
jusqu’à 4,6 % généraux et technologiques, la
en lycée hausse n’est que de 0,5 point.
profes- Dans ces structures, les évolutions
sionnel » sont, de fait, fluctuantes selon les
mois. Les absences augmentant
en avril et mai au moment des
examens et des beaux jours mais
sents dans les collèges et 6,8 %
dans les lycées d’enseignement
général. En revanche, pour les ly-
cées professionnels, le taux d’ab-
sentéisme est supérieur à celui de
l’année précédente quel que soit
le mois, excepté en janvier. Quel-
que 18,3 % des élèves sont absents
de façon chronique et jusqu’à
44 % dans le quart des lycées les
plus défavorisés socialement.
Profil social
de l’établissement
Un mauvais signal pour ces éta-
blissements où trop d’élèves sont
orientés en raison de l’insuffisan-
ce de leurs résultats scolaires et
non par choix. Les élèves com-
mencent à y sécher les cours dès
septembre, mois où le taux d’ab-
sence est sept fois plus élevé que
ment général. Pourquoi un tel ab-
sentéisme dans la voie profes-
sionnelle ? Les chercheurs de la
Depp l’exposent à demi-mot : une
orientation « plus ou moins choi-
sie », euphémisent-ils. Des durées
de transport plus élevées entre
domicile et établissement scolai-
re, du temps souvent consacré à
un travail d’appoint… Autant
d’éléments qui pourraient expli-
quer en partie ce phénomène.
L’absentéisme est par ailleurs
corrélé au profil social de l’éta-
blissement. En janvier 2018, pour
le quart des établissements les
plus favorisés, le taux d’absen-
téisme moyen est de 2,1 % ; il est
en revanche de 11,6 % pour le
quart des établissements les plus
défavorisés. Un constat valable à
tous les niveaux de scolarité, dès
concentrent la population la plus
défavorisée. Autre enseignement
de l’étude, du fait de leurs absen-
ces non justifiées, les élèves per-
dent en moyenne 1,6 % de temps
d’enseignement, jusqu’à 4,6 % en
lycée professionnel.
Enfin, les chefs d’établissement
du public ne signalent à leur hié-
rarchie départementale que 0,4 %
des élèves, ceux qui font preuve
de l’absentéisme le plus lourd. À
titre de comparaison, dans l’en-
seignement privé, le pourcentage
d’élèves signalés est infime. Il va-
rie de 0,01 % pour les collèges et
lycées d’enseignement général à
0,06 % en lycées professionnels.
Des résultats qui peuvent traduire
« une moindre fréquence des cas
d’absentéisme graves dans le privé
mais aussi une différence de prati-

gues (6 %). De sanctuaire préservé et diminuant le reste de l’année. On dans les collèges et quatre fois plus le collège. Mais plus marqué dans que dans la gestion de l’absentéis-
respecté, l’école est-elle passée au rang compte en moyenne 3,2 % d’ab- que dans les lycées d’enseigne- les lycées professionnels, qui me », selon la Depp. ■ M-E. P.
 LE FIGARO mercredi 3 avril 2019

SCIENCES 11

Le Muséum national
d’histoire naturelle
propose une
plongée insolite
au cœur d’un océan
peuplé d’animaux
étranges.

VINCENT BORDENAVE £@bordenavev

ENVIRONNEMENT Au sous-sol la gran-

de galerie de l’Évolution, sous les ba-
leines et les requins, c’est une véritable
plongée dans les profondeurs que nous
propose le Muséum national d’histoire
naturelle (MNHN). Un périple digne de
Jules Verne qui mêle habilement my-
thes et sciences. « On a voulu montrer
un monde que le visiteur ne connaît
pas », explique Bruno David, président
du MNHN.
Un voyage insolite dans un univers
coloré et vivant mais aussi terrifiant.
Un milieu hostile dépourvu de lumière
et peuplé d’animaux étranges. Où la vie
est si difficile que pour survivre, les or- Un paysage issu des fonds marins de l’océan Antarctique. Le Muséum national d’histoire naturelle veut montrer un univers coloré et vivant mais aussi terrifiant. STEVE CLABUESCH
ganismes ont dû développer des capa-

L’océan dévoile ses mystères

cités particulières. Des talents dont
l’homme a su s’inspirer. L’exposition
fait ainsi la part belle à l’apport de ce
monde des profondeurs dans la recher-
che médicale. « Je suis émerveillé quand
des biologistes découvrent que certains
coraux, les Palythoa, produisent une Plus loin, des projections nous per- re à la Lune. Les microorganismes défi- changer nos habitudes. « Quand on

molécule qui pourrait aider à guérir cer-
tains cancers ! » raconte le président du
MNHN. La molécule produite par ce co-
rail, la palytoxine, a la propriété de re-
mettre en route le mécanisme de mort
programmée des cellules cancéreuses.
Des tests effectués en 2018 sur des sou-
ris atteintes d’un cancer incurable
(glioblastome) du cerveau se sont révé-
lés très positifs. Les premiers essais sur
l’homme sont prévus pour 2021.
Avant de s’immerger, le visiteur
prend toute la mesure de l’expérience
qui l’attend dans une salle introductive.
Libre à lui de prendre les commandes
du Nautile, ce sous-marin de l’Institut
français de recherche pour l’exploita-
tion de la mer, et plonger jusqu’à
6 000 m. Puis de magnifiques fresques
de photographies scientifiques présen-
71 %
de la surface du globe
est recouverte
par l’océan
tent quelques-unes des 235 000 espèces
connues qui peuplent ces fonds marins.
Des crustacés vert fluo, un petit isopode
aux allures d’extraterrestre, un gala-
thée yéti aux pattes de fourrure, un co-
quillage rouge vermillon… Les animaux
naturalisés par les équipes du Muséum
semblent presque vivants, retrouvant
ainsi leur environnement.
mettent d’admirer les animaux surpris
dans leur milieu naturel. Apparaissent
ainsi sous nos yeux des spécimens que
l’on croirait sortis tout droit de l’imagi-
nation d’un dessinateur de science-fic-
tion. Parmi eux, un poisson au crâne
transparent, le Macropinna microstoma.
Difficile de croire qu’il s’agit d’un ani-
mal et non d’un sous-marin parfaite-
ment équipé pour explorer les abysses !
Deux sphères émeraude se dessinent
très distinctement à l’endroit où l’on
s’attend à trouver son cerveau. Il s’agit
en fait de ses yeux. Une vision à 360°
qui permet au poisson d’adapter au
mieux sa direction.
Perdu dans une salle appelée « le bal-
let du plancton », on ne sait plus bien si
on se trouve 20 000 lieues sous les mers
ou embarqué dans un voyage de la Ter-
lent sur les murs dans une chorégraphie
somptueuse.
Quatre points rouges
Tout au long de la visite, quatre points
rouges attirent l’œil et détonnent dans
cet espace tamisé. « On a voulu éviter de
donner un côté anxiogène à l’exposition,
pour que le spectateur profite au maxi-
mum des splendeurs des profondeurs,
raconte Bruno David. Pourtant, on est
obligé d’alerter sur les dangers. » Quatre
points rouges comme autant de mena-
ces qui guettent ce monde sous-marin :
la pollution du plastique, l’acidification
du milieu, l’exploitation minière et la
surpêche. Grâce à des outils ludiques et
pédagogiques, le visiteur peut non seu-
lement prendre la mesure des risques
mais aussi comprendre comment
mange un poisson carnivore, les consé-
quences sont autrement plus graves pour
la biodiversité que quand on mange un
mammifère herbivore, car c’est toute la
chaîne alimentaire qui est affectée, ex-
plique Bruno David. Il ne s’agit pas, ici,
de dire aux gens de ne plus manger de
poisson. Mais juste de faire attention, en
évitant d’encourager la surpêche, par
exemple. »
Avant de sortir et de rejoindre la
grande galerie de l’Évolution, une der-
nière salle revient sur les créatures ex-
traordinaires qui ont alimenté les my-
thes. Pour l’occasion, le calamar géant
a reçu un petit coup de jeune et a re-
trouvé des paupières pour protéger ses
immenses yeux. Sa première naturali-
sation, qui date des années 2000, avait
mal vieilli… ■

« L’océan ne fait que nous renvoyer ce qu’on lui fait subir »

PRÉSIDENT du Muséum national
d’histoire naturelle depuis 2015,
Bruno David a été biologiste marin.
Par cette exposition, il veut mon-
trer la beauté incroyable, et trop
mal connue, de la vie sous-marine.
LE FIGARO. - Aborder la question
des océans, c’est effleurer
une infinité de réponses.
On parle autant d’environnement
que de climat, de biodiversité
que de pollution. Comment
fait-on pour tout aborder ?
Bruno DAVID. - On ne peut pas. On
fait donc des choix. Pour cette ex-
position, on a essayé de montrer des
choses que l’on n’a pas l’habitude
de voir. L’océan couvre 70 % de la
surface planétaire et 96 % du volu-
me offert à la vie sur Terre. C’est
donc énorme et largement mécon-
nu. Pour donner une image parlan-
te, il n’y a que quatre personnes qui
sont descendues sous les 10 000 m
de profondeur, quand douze hom-
mes ont mis le pied sur la Lune !
On a tendance à dire que l’océan,
c’est la vie. Est-ce caricatural ?
Ce qui est vrai, c’est que toutes les
« justice
« La vie sur Terre est un équilibre,
et l’océan y a une place centrale »,
explique Bruno David. G. ROLLE/REA
formes de vie viennent de l’eau.
Même en surface, aucun animal
ou plante ne s’en affranchit
totalement. À tout bien peser,
c’est même plutôt surprenant qu’au
cours de l’évolution des organismes
en soient sortis ! L’océan nous aide
à respirer, il nous protège aussi. Il
freine le réchauffement climatique
en absorbant le CO2 et en
Il faut rendre
à
participant à la création des nuages.
La vie sur Terre est un équilibre,
et l’océan y a une place centrale.
l’infiniment
petit, cette Vous dites que l’océan nous
protège, mais c’est aussi un danger
population et une source de catastrophes…
méconnue, Il ne fait que nous renvoyer ce qu’on
à qui pourtant lui fait subir. On a longtemps sous-
estimé son rôle dans le processus
on doit de réchauffement climatique. De la
beaucoup. même manière, on a pu penser qu’il
Une respiration représentait une source inépuisable
de richesse et de nourriture.
sur deux est Un de mes prédécesseurs, Jean
possible grâce Dorst, a publié en 1965 un ouvrage
à l’oxygène précurseur sur la menace que
les activités humaines font peser sur
produit par la nature, intitulé Avant que nature
le plancton
BRUNO DAVID,
» meure. Il a écrit un chapitre
sur l’océan dans lequel il expliquait
PRÉSIDENT DU MUSÉUM que ses ressources sont illimitées
D’HISTOIRE NATURELLE et que l’impact de l’homme y est
quasiment nul. Il se trompait.
L’océan fascine autant
qu’il terrifie, et ce, depuis toujours,
si l’on en croit des mythes
plus vieux que l’écriture…
Près de 60 % de la population
humaine vit à moins de 100 km
de l’océan. Il nourrit les hommes
depuis presque toujours car il est
beaucoup plus simple de se
promener sur le littoral pour
ramasser les coquillages que d’aller
chasser. Nous lui sommes
redevables. Mais de l’autre côté, il a
quelque chose de terrifiant. Quand
on navigue, il est extrêmement
difficile de se repérer. Il a fallu
attendre le XVIIIe siècle pour
commencer à se repérer en
longitude grâce à des horloges de
marines précises. Les Anglais ont
été les premiers à maîtriser cette
technologie, qui était même un
savoir-faire classé secret d’État !
L’océan nous nourrit, mais il faut
croire que nous ne lui en sommes
pas très reconnaissants au vu des
ordures qu’on lui donne à digérer.
Là encore, il y a une prise de
conscience depuis quelques années,
même si le chemin est encore long…
Nous n’avions aucune idée de la
richesse de la vie que l’océan abrite.
Le but de cette exposition est
justement de montrer une image
positive, de rendre hommage
à la splendeur de l’océan. La vie
sous-marine est d’une beauté
incroyable. On avertit bien entendu
les visiteurs des dangers dus à la
pollution plastique et atmosphérique.
On va sensibiliser pour changer les
comportements. Notre objectif est de
montrer cette image méconnue d’un
monde où se côtoient l’infiniment
petit et l’infiniment grand. En ça,
l’océan nous fascine.
Vous faites d’ailleurs la part belle
à l’infiniment petit.
C’est vrai, même si en sortant de
l’exposition le visiteur tombe nez à
nez avec des squelettes de baleines !
Il faut rendre justice à l’infiniment
petit, cette population méconnue, à
qui pourtant on doit beaucoup. Une
respiration sur deux est possible
grâce à l’oxygène produit par le
plancton. C’est peut-être un peu
moins facile de sensibiliser les visi-
teurs sur l’importance du plancton
que de mobiliser pour protéger les
pandas. On essaye de montrer que
ce plancton peut être au moins aussi
beau et touchant que les plantigra-
des chinois ! ■
PROPOS RECUEILLIS PAR V. B.

Les eaux du globe, une gigantesque machine thermique

JEAN-LUC NOTHIAS jlnothias@lefigaro.fr
DANS son rapport sur l’état de la planète,
l’Organisation météorologique mondiale
(OMM) souligne que le « contenu thermi-
que des océans » (la chaleur stockée par
une colonne d’eau) a atteint de nouveaux
pics en 2018 entre 0 et 700 m de profon-
deur (relevés remontant à 1955) et entre
0 et 2 000 m (relevés remontant à 2005),
« pulvérisant les records de 2017 ».
Le changement climatique en cours a
niveaux. La hausse de la concentration
des gaz à effet de serre dans l’atmosphè-
re, particulièrement le CO2, cause d’une
part une augmentation des températures
moyenne de l’atmosphère et des eaux, et
d’autre part une acidification et une dé-
soxygénation des océans du fait d’une
absorption supplémentaire du gaz car-
bonique. Il faut savoir qu’océan et at-
mosphère sont étroitement liés et
forment une gigantesque machine ther-
mique alimentée par l’énergie solaire. La
chaleur est redistribuée par les vents et
Une perturbation dans l’un des deux
compartiments planétaires du gazeux ou
du liquide a obligatoirement des réper-
cussions dans l’autre. Par exemple, des
changements de direction de vents do-
minants ou des affaiblissements de cou-
rants tel que le Gulf Stream. Les phéno-
mènes de vagues marines de chaleur
(équivalent de la canicule sur terre) sont
aussi facilités. Les températures plus
élevées provoquent une fonte (partielle)
des calottes polaires, et donc une mon-
tée du niveau des eaux avec inondation
Depuis 1993, la montée moyenne des
eaux a été de 3,15 cm.
Conséquences nutritionnelles
Outre ce phénomène, l’accroissement de
la température moyenne devrait changer
la vie dans l’eau, au moins dans sa couche
de surface. À commencer par le plancton,
des milliers d’espèces animales ou végé-
tales, organismes invisibles à l’œil nu qui
produisent 50 % de l’oxygène de la planè-
te. C’est la base de la pyramide alimen-
taire. Des changements de température
tion, ce qui peut avoir des conséquences
nutritionnelles, mais aussi physiques, par
exemple sur la transparence de l’eau et sa
couleur. Une récente étude américaine
peignait ainsi à l’horizon 2100 un bleu plus
foncé dans les zones chaudes et un vert
renforcé pour les zones plus froides.
S’ajoutent à cela l’acidification et la dé-
soxygénation, qui devrait apporter des
changements dans la chimie et la biochi-
mie des eaux. On connaît l’exemple des
coraux, mais l’acidification pourrait avoir
des conséquences plus larges sur l’ensem-
A

deux conséquences majeures, qui entraî- les nuages dans l’atmosphère, et par les d’îles ou de côtes : la hausse a été de peuvent faire grandement varier les ble de la flore et de la faune sous-marine,
nent des changements à de nombreux courants dans les océans. 3,7 mm en 2018, soit plus qu’en 2017. quantités de planctons et leur composi- bouleversant la chaîne alimentaire. ■
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

12 SPORT
Quand Arsène Wenger fait le show à l’Olympia
L’ancien coach Arsène Wenger à côté
matchs de haute intensité. Ce n’est pas la
même puissance de fatigue. J’ai été surpris
d’Arsenal a livré une de Christian Jeanpierre,
organisateur de la soirée,
de la chaleur et de la bienveillance du public.
Dans un stade, tu as certaines personnes qui
prestation de haute face au 1 300 spectateurs
venus spécialement sont contre toi et là j’ai joué à domicile. Ça
fait chaud au cœur. »
volée lors d’un
pour l’entendre,
lundi soir à l’Olympia. Félicitée par les parents de Kylian
Mbappé, embrassée par Jean Dujardin
rendez-vous pas
PIERRE FAUQUEMBERG
– présent à l’Olympia pour soutenir sa

comme les autres,

lundi à Paris.
BAPTISTE DESPREZ £@Batdesprez
FOOTBALL Une scène mythique pour une
soirée que certains ne sont pas près
d’oublier. Lundi soir, l’Olympia accueillait
un invité inédit. Pour ne pas dire inatten-
du. Un chanteur ? Non. Un humoriste ?
Encore moins. Qui pouvait se targuer de
faire quasi salle comble en plein centre de
Paris au cours d’une soirée plus propice à
remplir les nombreuses terrasses de ce
coin huppé et couru de la capitale qu’à en-
fermer des centaines de personnes dans
une salle ? Un mythe de sa discipline : Ar-
sène Wenger. Pour la première fois dans sa
longue carrière, l’ancien coach historique
d’Arsenal (22 ans passés au club) se retrou-
vait face à 1 300 spectateurs venus spécia-
lement pour l’entendre. Et boire ses paro-
les. De façon presque religieuse.
Pendant près de deux heures, l’Alsacien
de 69 ans, chemise blanche et pantalon
bleu, ligne svelte et sourire « bright », a
mouillé le maillot au cours d’une master
class de haute volée scindée en deux par-
ties. La première sur son parcours, sa vi-
sion des hommes et du management. La
seconde, plus interactive, avec des ques-
tions-réponses, debout, face à un public
conquis et acquis à sa cause. Entre anecdo-
tes savoureuses (« Vous m’auriez dit que
Thuram allait avoir 144 sélections, j’aurais
souri »), moments sincères (« Je ressens
une forme de tristesse et de manque depuis
mon départ d’Arsenal ») et de vision stra-
tégique (« Je suis le dernier manager, dans
le foot aujourd’hui, il y a trop d’argent pour
qu’un seul homme gère tout »).
Ce n’est pas tous les jours qu’un techni-
cien de sa trempe s’adonne à un tel exerci-
ce en public et sans filet. Pour un pari réus-
si sous toutes ses formes au final. « Il m’a
bluffé par sa sérénité, son charisme et son
aisance à synthétiser chacune de ses pen-
sées. C’était fluide et instructif », assure
François, 43 ans, directeur marketing.
Avis partagé par Céline, fan d’Arsenal et
coach mental en entreprise. « On aurait
voulu que ça continue un peu plus tant c’était
intéressant. Que ce soit dans les anecdotes
ou sa vie d’entraîneur, il a donné l’impres-
sion de se livrer. » Difficile de trouver le
moindre mécontent au sortir de la mythi-
que salle qui affichait sur son fronton le
nom « Wenger » avec ses traditionnelles
lettres rouges.
Thierry Henry, le Paris SG, Unai Emery...
Durant sa longue conférence lundi soir
à l’Olympia, Arsène Wenger a pris le
temps d’évoquer son avenir et ses
envies. Non sans ambages. Son nom
est souvent murmuré au Paris SG, dans
un poste de patron du secteur sportif.
« Je ne suis candidat à rien et je n’en
sais rien, plante-t-il en guise de
pirouette dans sa loge après le
spectacle. Le PSG a une super équipe et
ils arriveront à franchir le dernier
obstacle en Ligue des champions. Pour
Quid du principal intéressé ? Dans sa
loge, quelques minutes à l’issue de sa
conférence d’un autre genre, il a pris le
temps de répondre à nos questions. Avec le
sourire et le sentiment du devoir accompli.
Pas totalement vidé par l’exercice. « Le
pari est réussi, souffla-t-il sans cacher sa
fierté, lui qui assure n’avoir rien préparé
en amont pour l’événement. Quand j’ai vu
mon nom sur l’affiche, je me suis demandé
s’ils ne s’étaient pas trompés. Si les gens ont
ce qui me concerne, je dois prendre une
décision entre un meilleur partage de
mon temps. J’ai fait trente-cinq ans
sans arrêter et j’aimerais trouver un
compromis en partageant ce que je sais
et en même temps avoir du temps pour
moi auprès des gens que j’ai négligés
toute ma vie. » Quid d’une sélection
nationale ? « Peut-être, mais, si cela se
fait, ce sera avant la Coupe du monde
au Qatar. » Interrogé sur Thierry Henry
et ses débuts délicats en tant que
apprécié, tant mieux. C’est toujours délicat
de mettre des mots justes sur des émo-
tions. » Relancé sur ses impressions
d’après-spectacle, le coach historique des
Gunners s’est livré un peu plus. Tout en
pudeur et sincérité. Fidèle à son image.
« Je ne me sens pas comme un artiste, mais
comme quelqu’un qui sort de scène, avoua-
t-il, assailli de toute part devant sa loge
pour la moindre photo ou autographe. Ça
vide un peu, mais ça n’a rien à voir avec des
coach à Monaco, le technicien assure
que son ancien attaquant est « encore
en période de deuil » et qu’un dîner est
prévu entre les deux hommes. Dans
une master class fleuve, l’ancien coach
d’Arsenal est aussi revenu sur les
Gunners, en plaçant une petite pique à
son successeur, Unai Emery. « Je vais
dire la vérité, il ne m’a jamais appelé,
mais ça ne m’empêche pas de rester
fan d’Arsenal jusqu’à la fin de mes
jours. » B. D.
“ J’ai été surpris
de la chaleur et de la
bienveillance du public.
Dans un stade, tu as
certaines personnes qui
sont contre toi et là j’ai
joué à domicile. Ça fait
chaud au cœur
”
femme, Nathalie Péchalat qui assurait la
première partie avec brio sur le thème du
doute - ou encore attendue par une flopée
de personnalités du monde du foot et du
rugby (Diaby, Drogba, Houllier, Fickou,
Clerc, Travers, Lacroix, Maestri…), la star
de la soirée ne boudait pas son plaisir. À ses
côtés, son ami et confident, Christian
Jeanpierre, journaliste sur TF1, chef d’or-
chestre de la soirée et à l’origine d’une telle
initiative, nageait dans le bonheur. « C’est
mon plus beau souvenir en 30 ans de carriè-
re, planta-t-il, heureux, avant de détailler
la genèse d’une soirée pas comme les
autres. Je voulais le faire depuis longtemps,
Arsène était d’accord et l’Olympia nous a
donné une seule date, on a sauté sur l’occa-
sion. Arsène, c’est 25 niveaux au-dessus des
autres, il a tout et je voulais qu’il soit un peu
plus reconnu à sa juste valeur en France. Le
pari est réussi. »
Pendant plus de deux heures, entre ré-
ponses construites et détaillées, sérieux et
vrai sens de l’humour, anecdotes crous-
tillantes et sensations personnelles, Arsène
Wenger a maîtrisé son sujet à la perfection.
Sous les yeux d’un Kylian Mbappé venu
pour l’occasion assister à une démonstra-
tion d’éloquence et d’intelligence fine.
Pour la petite histoire, tous les fonds obte-
nus lors de cette soirée seront reversés à
l’association « Premiers de cordée », dont
l’attaquant du Paris SG est le parrain. Une
soirée réussie qui en appellera d’autres ?
« On m’a proposé des Zéniths pour Arsène,
l’idée a plu, nous souffle tout sourire Chris-
tian Jeanpierre. On verra en temps et en
heure. » Pas mal pour une première. ■

EN BREF
La casse de la Route du rhum digérée, Football : Rennes en finale
Rennes s’est qualifié pour la finale

les Ultimes sont prêts à reprendre leur envol

de la Coupe de France en
s’imposant à Lyon (2-3) mardi
soir. L’autre demi-finale opposera
le PSG à Nantes ce mercredi à 21h
Reporté à 2023, le tour du monde en course en solitaire clôturera cinq années riches en épreuves. (Eurosport). Après ses
éliminations surprises en Coupe de
che de la rupture, est contraint de s’abriter la Ligue et Ligue des champions, le
GUILLAUME LOISY £@guiloisy pour réparer longuement. 2e à Pointe-à- PSG n’a pas le droit à l’erreur.
Pitre derrière Francis Joyon (Idec Sport),
VOILE Cinq mois après une Route du rhum François Gabart (Macif) termine sur une Homophobie : Maracineanu
impitoyable qui a bouleversé ses plans, la monture elle aussi meurtrie par un golfe de plaide pour l’interruption
classe Ultim a dévoilé, mercredi à Paris, Gascogne musclé (pertes d’un foil et d’un des matchs
son programme pour la période 2019- safran). Au sein de la classe, la sonnette La ministre des Sports a affirmé
2023. Pinacle de la compétition entre ces d’alarme est tirée. Et il est rapidement ad- sur RMC Sport qu’elle était
nouveaux maxi-trimarans volants (32 m mis qu’il n’est pas raisonnable de partir favorable à l’interruption
de long pour 23 m de large), la première pour une régate autour du monde en soli- des rencontres en cas d’insultes
Brest Oceans, course autour du monde en taire sur ces multicoques extrêmes à peine homophobes dans les tribunes.
solitaire, aura lieu fin 2023, un an plus tard. Trop tôt, Roxana Maracineanu avait déjà
quatre ans après sa date de PROGRAMME trop vite. fait réagir le monde du football en
départ initiale. Prudence et
sagesse l’ont emporté.
2019-2023 Armateurs et marins ont
donc décidé de reporter, et
jugeant inadmissibles les chants
entendus lors du récent PSG-OM.
« C’est plus raisonnable, 2019 de manière conséquente,
plante Thomas Coville. Il Tour de Belle-Île (18 mai) cette circumnavigation de Kylian Mbappé a rencontré
fallait tirer les leçons de la puis Armen Race pionniers. « Même s’il y a du Pelé
Route du rhum. Nous l’avons (30 mai), Rolex Fastnet retard, la décision de reporter Avec son nouveau trimaran Sodebo mis à l’eau le 18 mars, Thomas Coville a déjà prévu Le prodige français a rencontré la
fait de façon honnête et hum- Race (3 août), Brest la Brest Oceans à 2023 était de s’attaquer en 2020 au Trophée Jules-Verne. FRED MORIN/SODEBO légende brésilienne mardi dans
ble. Chacun a raconté ses ac- Atlantiques (course simple à prendre. Il faut se un hôtel parisien, un rendez-
cidents et ses galères dans aller-retour Brest-Le Cap laisser du temps. Mais on ne mas Coville. On a donc construit un pro- entre Hambourg, Nantes, Valence, Mar- vous organisé par une marque
une vraie notion collective. en double, 3 novembre). lâchera pas, on va la faire, gramme de courses qui monte crescendo seille et Athènes. Puis ils s’attaqueront fin d’horlogerie de luxe dont ils sont
Ces bateaux sont synonymes 2020 cette course. On en rêve avec de l’équipage notamment. » Il débute- 2021 à leur première course autour du ambassadeurs. «Je n’ai pas arrêté
d’audace et d’engagement, The Transat (Transat tous », martèle Jean-Ber- ra par Brest Atlantiques, course en double monde, en équipage, avec un départ don- de le toucher pour voir si c’est
mais ils confèrent aussi une anglaise), puis records nard Le Boucher, directeur inédite entre Brest, Rio de Janeiro et Le Cap né d’un port méditerranéen encore incon- vrai, c’est une fierté, a déclaré
grande responsabilité. Et autour du monde (Jules- des activités mer chez Macif, (un aller-retour sans arrêt) dont le départ nu. Une ultime répétition, suivie d’une Mbappé. C’est un moment
nous, nous voulons construi- Verne en équipages ou l’un des cinq armateurs de la sera donné le 3 novembre prochain, une Route du rhum (2022) avant le grand saut historique pour moi».
re quelque chose sur la du- Saint-Exupéry en solo). classe Ultim avec Sodebo, semaine après celui de la Transat Jacques- en solo deux ans plus tard. Au total, les Ul-
rée. » 2021 Banque Populaire, Actual et Vabre sur laquelle les Ultimes n’ont pas eu times avaleront trois tours du monde et au Voile : 2e étape musclée
Retour en novembre der- The Arch (tour d’Europe), Gitana, intégré début 2019. l’autorisation de se rabattre après le report moins 12 transats en cinq ans. Un menu pour les Figaristes
nier. Après un départ fabu- puis tour du monde Ce long délai jusqu’au pre- du tour du monde. copieux. « C’est ambitieux, mais c’est Après une première manche
leux entre la pointe du en équipage (départ mier « Vendée Globe des En 2020, François Gabart défendra son l’ADN de cette classe qui innove et veut in- remportée dans les petits airs
Grouin et le cap Fréhel, la de Méditerranée). maxi-trimarans » permettra titre face à ses concurrents sur la Transat venter la voile de demain. On n’est pas là par le duo Loison-Duthil,
Route du rhum tourne à 2022 aux équipes de fiabiliser leurs anglaise (départ le 10 mai 2020 de Ply- pour faire des choses simples, sourit Fran- les Figaristes ont repris la mer ce
l’hécatombe chez les Ulti- Route du rhum. engins, d’en construire de mouth) et l’hiver sera dédié aux records. çois Gabart. Voler à plus de 40 nœuds sur mardi pour une 2e étape beaucoup
mes. Tour à tour, Edmond de 2023 nouveaux (Macif et Banque Coville a déjà prévu de s’attaquer au Tro- ces bateaux, c’est extraordinaire, mais aus- plus longue (405 milles) et
Rothschild (Sébastien Josse, Course transatlantique, Populaire) et de prendre phée Jules-Verne sur son nouveau Sodebo. si difficile. Il y a eu de la casse, il y en aura musclée. Une météo compliquée
débarqué depuis) et Banque puis Brest Oceans confiance au fil d’un calen- Au printemps 2021, la flotte participera à encore, car c’est un sport mécanique. Il faut et idéale pour continuer à roder
Populaire IX (Armel Le Cléa- (premier tour du monde drier touffu. « On n’avait pas The Arch, un tour d’Europe organisé à faire en sorte qu’il y en ait le moins possi- les nouveaux Figaro Bénéteau 3.
C

c’h) explosent, alors que So- en solitaire en course envie qu’il y ait Brest Oceans l’occasion des 70 ans de la Ceca (Commu- ble. » Pour un maximum de bateaux sur la L’arrivée est prévue jeudi
debo (Thomas Coville), pro- et en multicoque). et rien d’autre, éclaire Tho- nauté européenne du charbon et de l’acier) ligne d’arrivée. ■ à Saint-Gilles-Croix-de-Vie.
 mercredi 3 avril 2019

LE CARNET DU JOUR
Les annonces sont reçues
avec justification d’identité
par téléphone
01 56 52 27 27
par télécopie
01 56 52 20 90
par courriel
carnetdujour@media.figaro.fr
en nos bureaux
14 boulevard Haussmann,
75009 Paris,
sur notre site :
www.carnetdujour.lefigaro.fr
Tarif de la ligne € TTC :
Du lundi au jeudi
25 € jusqu'à 25 lignes
23 € à partir de 26 lignes
Vendredi ou samedi
28 € jusqu'à 25 lignes
26 € à partir de 26 lignes
Réduction à nos abonnés :
nous consulter
Reprise des annonces sur :
www.carnetdujour.lefigaro.fr
www.dansnoscoeurs.fr
signatures
Colette Cardon,
son épouse,
Claire et Didier Cardon,
Florence Cardon,
ses enfants,
Marion et Charles Cardon,
Flavie et Nicolas Cardon,
Anne et Pierre Pouligny,
ses petits-enfants,
Chloé, Héloïse, Clélia,
Baptiste, Mathilde, Thomas
et Louis,
ses arrière-petits-enfants,
Hélène et Gérard Cardon,
Evelyne Legrand,
Geneviève et Gérard Legrand,
ses frère, beau-frère
et belles-sœurs,
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Roger CARDON
ingénieur civil
des Ponts et Chaussées,
ancien expert près
la cour d'appel de Versailles,
commandeur
de l'ordre national du Mérite,
officier
des Palmes académiques,
survenu à son domicile
le 1er avril 2019,
à l'âge de 94 ans, muni
des sacrements de l'Église.
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
Saint-Martin de Louveciennes,
le jeudi 4 avril 2019, à 10 h 30,
suivie de l'inhumation
à 14 heures, au cimetière
communal d'Ivry-sur-Seine
(Val-de-Marne),
rue Bernard-Palissy.
Ni fleurs ni couronnes.
Des dons peuvent être
effectués à l'association
Lions Lisa Tennis.
Cet avis tient lieu de faire-part.
M. et Mme
Arnauld de Mentque,
leurs enfants
et leurs onze petits-enfants,
M. et Mme
Son frère Jean-Jacques Raffel,
et sa femme Claude,
M. et Mme Olivier Dassault
et leurs enfants,
Remi, Thomas, Helena,
M. Laurent Dassault,
M. et Mme Thierry Dassault
et leurs enfants,
M. et Mme Benoît Habert
et leurs enfants,
M. et Mme Julien Dassault
et leurs enfants,
Eva, Joseph, Joachim,
M. et Mme Adrien Dassault
et leurs enfants,
Sacha, Dimitri,
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Nicole DASSAULT
née Raffel,
chevalier
de la Légion d'honneur,
officier
de l'ordre national du Mérite,
officier de l'ordre
des Arts et des Lettres,
leur mère, grand-mère
et arrière-grand-mère,
survenu le 2 avril 2019,
dans sa 89e année.
Les obsèques auront lieu
le vendredi 5 avril 2019,
au cimetière ancien de Neuilly,
3, rue Victor-Noir,
à Neuilly-sur-Seine.
On se réunira à 11 heures,
à l'entrée principale.
Cet avis tient lieu de faire-part.
M. et Mme
François Dupont-Foucart,
ses parents,
Véronique, Marie et Jérôme,
ses sœurs et son frère,
ses beau-frère, belle-sœur,
neveux et nièces
Sainte-Foy-lès-Lyon (Rhône).
Jacqueline Gaudry,
son épouse,
ses enfants,
Danielle, Alain, Dominique,
leurs enfants,
Clémence, Elodie, Clara,
Sixtine, Alexandre, Raphaël,
ont la douleur
de faire part du décès de
Jean GAUDRY
survenu le 27 mars 2019.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
en l'église Saint-Luc,
à Sainte-Foy-lès-lyon,
le samedi 6 avril 2019, à 9 h 30.
Chantal, Dominique, Anne,
Françoise (†),
ses filles,
ses gendres,
ses 9 petits-enfants,
ses 5 arrière-petits-enfants,
les familles de Geoffroy,
Le Fèbvre de Saint Germain,
Brossat, Terrenoire, Peugeot,
Guillaud
ont la douleur
de vous faire part du décès de
Jacqueline de GEOFFROY
née
Le Fèbvre de Saint Germain,
survenu le 1 avril 2019,
er
à Toulon, à l'âge de 88 ans.
La cérémonie religieuse
aura lieu le samedi 6 avril,
à 10 heures,
en l'église de Montain (Jura).
Cet avis tient lieu de faire-part.
2680, avenue de la Résistance,
83000 Toulon.
Le docteur et Mme
Philippe de Groc,
M. et Mme Bernard de Groc,
le docteur et Mme
François de Groc,
ses enfants,
Denise Lacharnay,
son épouse,
Catherine et Jean-Pierre,
ses enfants, et leurs conjoints,
Michel et Catherine,
Clémence, Laure et Ernest,
ses petits-enfants,
Gabriel, son arrière-petit-fils,
ont la tristesse
de faire part du décès de
Marcel LACHARNAY
survenu le 30 mars 2019.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le vendredi 5 avril, à 16 heures,
en l'église Notre-Dame,
à Boulogne-Billancourt.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Hélène Le Bideau,
son épouse,
Clotilde et Benoît,
Grégoire et Florence,
Charles et Camille-Clémentine,
ses enfants et leurs conjoints,
Capucine, Maxence, Céleste,
Angèle,
ses petits-enfants,
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Gildas LE BIDEAU
président d'honneur
de la Fraternité d'Abraham,
chevalier
de la Légion d'honneur,
survenu le 1er avril 2019,
dans sa 88e année.
La cérémonie religieuse sera
célébrée le vendredi 5 avril,
à 14 h 30, en l'église
Saint-François-de-Molitor,
à Paris (16e).
L'inhumation aura lieu
au cimetière de Bretoncelles
(Orne), dans l'intimité
familiale.
Saint-Cloud (Hauts-de-Seine).
Lyon.
Colette Manhes,
son épouse,
Blandine et Pierre-André
Barbier,
sa fille et son gendre,
Timothée et Noémie,
ses petits-enfants,
les familles Manhes,
de Chantemèle,
parents et amis
ont la tristesse
de vous faire part du décès,
à l'âge de 91 ans, de
M. André MANHES
La cérémonie religieuse
sera célébrée le vendredi
5 avril 2019, à 9 h 30,
en l'église Saint-Irénée,
Lyon (5e).
Condoléances sur registres.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Les auditeurs
de la 40e session nationale de
l'Institut des hautes études
de défense nationale (IHEDN)
ont la tristesse
de vous faire part du décès,
le 29 mars 2019,
de leur camarade de promotion,
Paola MASSONI
La cérémonie religieuse
aura lieu ce mercredi 3 avril,
à 15 heures, en l'église
Saint-Jacques-du-Haut-Pas,
à Paris (5e).
Ingeborg Pourtalet,
son épouse,
M. et Mme Erik Pourtalet,
M. et Mme Laurent Pourtalet,
ses enfants,
ses petits-enfants
ont la douleur
de vous faire part du décès du
docteur Georges POURTALET
médecin généraliste,
auteur de livres
sur la recherche médicale,
dont « Le corps a ses raisons
que la médecine ignore »,
13
Versailles. Paris. Belle-Île.
Lyon. San Francisco. Shangaï.
Le docteur Nicole Sentilhes,
son épouse,
Grégoire et Véronique
Sentilhes,
Damien et Flo Sentilhes,
Perrine Sentilhes (†),
Gabrielle et Joey
Sentilhes-Chou,
ses enfants,
Marguerite, Colombe, Alizée,
Coline, Carla, Lou Salomé,
Ivahnoe, Philippine et Marin,
ses petits-enfants,
sa famille
et ses nombreux amis
ont la douleur
de vous faire part du décès du
docteur Claude SENTILHES
ancien président
de la commission médicale
de l'hôpital Mignot
à Versailles,
ancien chef du service
de stomatologie et chirurgie
maxillo-faciale
de l'hôpital Mignot,
peintre et dessinateur
humoriste à ses heures,
historien des quartiers
de Versailles,
époux gourmand
depuis 60 ans,
« Patchou »
merveilleux grand-père
depuis 26 ans,
survenu le mardi 2 avril 2019,
dans sa 84e année.
La cérémonie aura lieu
dans l'intimité familiale.
La famille remercie
le professeur
Jean-Christophe Vaillant
et toutes les équipes
de l'hôpital Pitié-Salpêtrière
pour l'engagement
et l'humanité dont ils ont fait
preuve.
Cet avis tient lieu de faire-part.
20, rue de Vergennes,
78000 Versailles.
souvenirs

Arnaud Charpentier Marc, Juliette, Guillaume survenu à Mont-de-Marsan,

Le cardinal Robert Sarah
donnera deux conférences
exceptionnelles suivies
de la signature de son livre
Le soir approche
et déjà le jour baisse
(Fayard),
- le samedi 6 avril 2019,
à 15 h 30,
à la librairie La Procure,
3, rue de Mézières, Paris (6e),
- le dimanche 7 avril 2019,
à 16 heures, en l'église
Notre-Dame-de-la-Croix-
de-Ménilmontant, Paris (20e).
deuils
Bruxelles.
Le comte Etienne
de Bernes de Longvilliers,
son époux,
M. et Mme Javier Ibanez,
M. et Mme Murray Pratt,
le comte Adrien
de Bernes de Longvilliers,
Mlle Athéna
de Bernes de Longvilliers,
ses enfants et ses gendres,
font part du rappel à Dieu de la
comtesse Etienne de BERNES
de LONGVILLIERS
née Kathleen de Raet,
le 31 mars 2019, à Bruxelles,
munie des sacrements
de l'Église.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
en l'église Notre-Dame-
de-l'Annonciation,
place Brugmann, à Bruxelles,
le samedi 6 avril 2019, à 10 h 30.
370, avenue Louise,
1050 Bruxelles (Belgique).
et leurs enfants
font part du rappel à Dieu de
Mme Philippe CHARPENTIER
née Françoise Martineau,
le samedi 30 mars 2019,
dans sa 90e année.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le vendredi 5 avril 2019,
à 11 heures, en l'église
Saint-Martin d'Angliers
(Vienne).
Ni fleurs ni couronnes.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Ciboure (Pyrénées-Atlantiques).
Le vice-amiral d'escadre (2S)
François Crouzat,
son époux,
Jacqueline Kempf
et Monique Fievet-Dumonté,
ses sœurs,
Bruno Kempf,
son neveu, et sa compagne
Virginie Tonnelier,
Laurence Kempf,
sa nièce, et son compagnon
Jean Berti,
Anaïs et Florian Kempf,
ses petits-neveux,
et la famille Crouzat
ont la douleur
de vous faire part du décès de
Michèle CROUZAT
née Dumonté.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le jeudi 4 avril 2019, à 10 h 30,
en l'église
Saint-François-Xavier
de Socoa, à Ciboure.
Ni fleurs ni couronnes.
Un don peut être fait
à la SNSM
ont la douleur
de vous faire part
du rappel à Dieu de
Jean-Nicolas DUPONT
à l'âge de 41 ans, muni
des sacrements de l'Église.
La messe de funérailles
sera célébrée
le jeudi 4 avril 2019,
à 10 h 30, en l'église
Saint-Jean-Baptiste-
de-La-Salle, Paris (15e).
Ni fleurs ni couronnes.
Des prières et des messes.
Valérie et Thomas Dhellemmes,
Patricia et Jérôme
François-Sigrand,
Thierry et Séverine
Nagat Duport,
Nathalie et Pascal
Duroux Duport,
ses enfants,
Barnabé, Anabel, Sam,
Sasha, Lou,
ses petits-enfants,
Errik Simottel,
son frère,
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Françoise Cocota Natacha
DUPORT
née Simottel,
survenu à Saint-Cloud,
le 31 mars 2019.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le jeudi 4 avril, à 10 h 30,
en la cathédrale Saint-Louis
de Versailles (Yvelines).
L'inhumation aura lieu
le vendredi 5 avril, à 10 h 30,
au cimetière de Carantec
(Finistère).
17, rue de Satory,
Bénédicte de Groc,
Xavier et Estelle de Groc,
William et Flore de Groc,
Clément et Céline de Groc,
Thibault et Florence de Groc,
Laurent, Olivia et Benjamin
de Groc,
ses petits-enfants,
Alix, Diane, Henry,
Arthur, Clémentine, Alexandre,
Joseph, Lucie, Samuel,
Margaux, Valentin,
ses arrière-petits-enfants,
font part du rappel à Dieu de
Mme Jacques de GROC
née Suzanne Roumazeilles,
le 2 avril 2019,
à l'âge de 97 ans, munie
des sacrements de l'Église.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le vendredi 5 avril, à 14 heures,
en l'église Saint-Martin,
à Biarritz.
L'inhumation aura lieu
dans le caveau familial,
à Saint-Symphorien (Gironde).
Nous sommes priés d'annoncer
le rappel à Dieu de
Alyette
HONNORAT de MALLIARD
née Dubois de la Sablonière.
La cérémonie religieuse
aura lieu
le vendredi 5 avril 2019,
à 14 h 30, en sa paroisse
l'église Notre-Dame-
de-Grâce-de-Passy, 10, rue
de l'Annonciation, Paris (16e).
On y associera une
pensée pour son cher époux,
Jean Honnorat de Malliard
grand officier
de la Légion d'honneur,
(†) le 24 juin 1996.
De la part de ses enfants
et petits-enfants très chéris.
137, rue de la Tour, 75116 Paris.
et Pauline Legrand,
Jean-Damien et Bénédicte
Legrand,
Benoît et Lucie Vernon,
ses enfants,
Théo, Baptiste, Jules, Emma,
Claire, Apolline, Charles,
Louis, Justine,
ses petits-enfants,
Annie Legrand (†),
née Rousseau,
Thérèze Legrand,
née Marque
font part du rappel à Dieu de
M. Jean-Bernard LEGRAND
le 29 mars 2019.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
en l'église Stella-Matutina,
à Saint-Cloud,
le vendredi 5 avril, à 10 h 30.
Mortain-Bocage,
Le Mesnil-Gilbert (Manche).
Le docteur Jean-Yves
Lemardeley et Monique,
Vincent et Annick Lemardeley,
ses enfants,
ainsi que toute la famille
vous font part du décès de
Suzanne LEMARDELEY
née Guyot,
survenu le 1er avril 2019,
dans sa 96e année.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le vendredi 5 avril, à 10 h 30,
en la collégiale
de Mortain-Bocage,
suivie, selon sa volonté, de
la crémation au crématorium
de Villedieu-les-Poëles.
Vous pouvez déposer un
message de condoléances sur
www.dansnoscoeurs.fr
43, rue du Rocher,
50140 Mortain-Bocage,
le vendredi 29 mars 2019,
dans sa 89e année.
Il y a huit ans disparaissait
L'inhumation se déroulera
au cimetière
du Grand Jas, à Cannes, Martine AUBLET
le jeudi 4 avril, à 11 heures. Mme Bruno ROGER
De la part de
M. et Mme Olivier Randon, Bruno Roger,
Mme Béatrice Guériat, ses enfants, Laure et Marc,
M. et Mme Sylvain Randon, ses petits-enfants,
ses enfants, Anaïs et Alexandre,
et toute sa famille.
ses petits-enfants
et son arrière-petite-fille
La Fondation Martine Aublet
ont la tristesse
perpétue son souvenir.
de vous faire part du décès,
le 29 mars 2019, de
Nicole RANDON
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église Le 3 avril 2015,
Notre-Dame-d'Auteuil,
à Paris (16e), Violette GORNY
le jeudi 4 avril 2019, à 14 h 30. avocat à la cour de Paris,
Cet avis tient lieu de faire-part. nous quittait.
Bernard Gorny,
son mari,
sa famille, ses amis
Hélène David Weill, pensent à elle.
présidente d'honneur du Elle leur manque toujours.
Musée des Arts Décoratifs
Pierre-Alexis Dumas, 22, rue Emeriau, 75015 Paris.
président,
l'ensemble des administrateurs,
Sylvie Corréard,
directrice générale, messes
Olivier Gabet,
directeur des Musées,
La messe du samedi 6 avril 2019,
René-Jacques Mayer,
directeur de l'École Camondo, à 10 heures, en l'église
les équipes administratives, Saint-Joseph-des-Carmes,
70, rue de Vaugirard, Paris (6e),
scientifiques et enseignantes
sera dite à l'intention de
ont l'immense tristesse
d'annoncer la disparition de Mme Jean-Paul SILVE
Kristen van RIEL par le père Olivier Bourion,
supérieur du séminaire
le 29 mars 2019. des Carmes.
Kristen van Riel était De la part de
administrateur M. et Mme Jacques Silve
et leurs enfants.
du Musée des Arts Décoratifs
depuis 1992 et trésorier
de l'institution depuis 2016.
Kristen van Riel a été un

Mme François
Bosquillon de Frescheville,
son épouse,
Pierre Louis et Eléonore,
Marie Chantal,
Charles Edouard et Julie,
Anne France, Paul Eloi,
Jean Gabriel, Claire Aimée,
Yves Marie, Jeanne Lucie,
ses enfants et belles-filles,
Louis-Marie, son petit-fils,
font part du rappel à Dieu de
M. François BOSQUILLON
de FRESCHEVILLE
le 29 mars 2019,
à l'âge de 59 ans, muni
des sacrements de l'Église.
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
de Saint-Brice (Mayenne),
ce jeudi 4 avril 2019, à 14 h 30.
« Gautray », 53290 Saint-Brice.
ou à l'Institut Curie.
Edgar Deschamps,
son époux,
ses enfants et petits-enfants
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Ginette DESCHAMPS
née Roy,
le 31 mars 2019,
à l'âge de 90 ans.
La cérémonie religieuse
aura lieu le jeudi 4 avril,
à 15 heures, en l'église
Saint-François-Xavier,
Paris (7e).
Cet avis tient lieu de faire-part.
4, rue Valentin-Haüy,
75015 Paris.
78000 Versailles.
Jouy-en-Josas (Yvelines).
Philippe Fekete,
ses enfants et petits-enfants
ont la tristesse
de faire part du décès de
Marie-Claude FEKETE
née Revillon,
survenu le 1er avril 2019,
à l'âge de 80 ans,
à Jouy-en-Josas.
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
Saint-Martin, à Jouy-en-Josas,
le vendredi 5 avril, à 11 heures.
29, rue du Docteur-Kurzenne,
78350 Jouy-en-Josas.
Jean Krautter,
son époux,
ses cinq fils et belles-filles,
ses huit petits-enfants,
sa nièce
ont la tristesse
de vous faire part
du rappel à Dieu de
Marie-Claude KRAUTTER
née Bordenet,
le vendredi 29 mars 2019,
à Poissy.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le vendredi 5 avril, à 16 h 30,
en l'église Sainte-Pauline,
au Vésinet,
55, boulevard d'Angleterre.
Jean Krautter,
8, rue Thiers, 78110 Le Vésinet.
2, route de la Sée,
50670 Le Mesnil-Gilbert.
Les membres du
Rotary club de Paris
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Philippe MALAQUIN
président en exercice
et membre du club depuis 1997.
Les obsèques ont eu lieu
le lundi 1er avril 2019.
Nous adressons
nos plus sincères condoléances
à sa famille et à ses proches.
Rotary club de Paris,
40, boulevard Emile-Augier,
75116 Paris.
rotary.paris@wanadoo.fr
extraordinaire et fidèle soutien
des Arts Décoratifs. Souvenir, Messes,
Il a accompagné l'institution
de ses précieux conseils
jusqu'à la fin,
Services religieux
avec le courage et l'élégance Partagez le souvenir
qui le caractérisaient.
d’un être cher
dans le carnet du jour
Pierre Souleil,
son époux,
ainsi que toute la famille
ont la douleur
de vous faire part du décès de
Pierrette SOULEIL
née Claveau,
survenu le 31 mars 2019,
dans sa 94e année.
L'inhumation aura lieu
le jeudi 4 avril, à 11 h 30, Tél. 01 56 52 27 27
dans le caveau de famille, Fax. 01 56 52 20 90
au cimetière du Montparnasse,
Paris (14e). carnetdujour@media.figaro.fr
www.carnetdujour.lefigaro.fr
Cet avis tient lieu de faire-part.
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO
14 CHAMPS LIBRES
REPORTAGE
De jeunes femmes participent, aux côtés de leurs collègues masculins aspirants-officiers, à un exercice de simulation de combat à l’académie militaire de Kaboul, en février 2019.
Le dur combat des femmes
de l’armée afghane
Margaux Benn
£@B_Margaux
KABOUL
C’
EST une embuscade. Les tirs
fusent depuis un abri à une
quinzaine mètres en contre-
bas sur la colline. La tempête
floute le paysage : dans le
tourbillon des flocons, toutes
les formes se confondent. Ta-
pie derrière un monticule de neige, le visage rosi par
le vent, Salma pointe son arme et tire. Bientôt, les
munitions viennent à manquer. Alors, elle crie :
« Babababam ! Bam ! Bam ! Bam ! » Le capitaine
Khyber est satisfait : Salma et les autres aspirants - et
aspirantes - officiers de l’académie militaire de Ka-
boul ont réussi l’exercice de simulation de combat.
Depuis que l’établissement a ouvert ses portes aux
femmes il y a cinq ans, 215 ont reçu leur diplôme.
Cette année, il y a en tout 76 femmes et 950 hommes à
l’école d’officiers. Et même si la plupart des étudian-
tes se verront offrir, à la sortie, des postes adminis-
tratifs à Kaboul, elles participent aux mêmes entraî-
nements que leurs collègues masculins… Une
exception dans ce pays très conservateur, où beau-
coup de femmes ne peuvent pas étudier, se marier, se
faire soigner voire sortir de chez elles sans l’accord de
leur père ou de leur époux. Salma, 20 ans, vise un
poste de combat dans l’une des nombreuses bases
provinciales de l’armée afghane, où celle-ci affronte
les talibans et la branche locale de l’État islamique
(EI). Son pari est osé, mais réaliste : selon l’Otan, il y a
aujourd’hui environ 3 230 policières, 1 312 femmes
dans l’armée, et 122 dans les forces spéciales. En tout,
elles représentent 1,4 % des forces de sécurité. « Mon
rêve est de servir mon pays, mais pas seulement par les
armes, explique la jeune femme au visage poupon qui
a soigneusement ajusté son voile dans le col de son
uniforme. Car pour que le pays aille mieux, il ne faudra
pas seulement vaincre les insurgés : il faudra aussi
améliorer la condition féminine. »
L’espoir d’une carrière pour les femmes
L’armée afghane, exsangue, essuie des pertes lour-
des. En janvier, le président Ashraf Ghani a annoncé
que depuis le retrait de la majorité des troupes inter-
nationales en 2014, quelque 45 000 membres des for-
ces de sécurité ont été tués… Soit 30 par jour en
moyenne. Les talibans contrôlent ou influencent près
de la moitié du territoire afghan. La branche locale de
l’EI, bien qu’elle contrôle moins de territoire, de-
meure une menace majeure. Et avec le départ annon-
cé des forces américaines et de l’Otan (les premières
étant un allié clef de l’armée afghane contre les insur-
gés, les secondes assurant une mission de soutien et
de formation), la situation sécuritaire et le moral des
troupes afghanes s’annoncent en chute libre.
L’armée et la police font déjà face à un nombre re-
cord de défections. Il y a quelques jours, 150 mem-
bres de la police des frontières dans la province de
Badghis, au nord-est du pays, ont même tenté de fuir
au Turkménistan après avoir essuyé, une semaine
durant, des assauts des talibans. Mais si de plus en
A
plus d’hommes quittent l’uniforme pour rejoindre la
vie civile ou des milices d’autodéfense, pour les fem-
Cette année mes, l’armée offre une rare perspective de carrière
professionnelle.
comme depuis cinq ans,
Nafas Gul, élève officier de 23 ans, s’occupe seule
de son fils de 4 ans depuis que son mari les a aban-
donnés. Dans l’armée, elle espère gagner un revenu
l’académie militaire
fixe, bien supérieur à celui qu’elle recevrait grâce à
l’un des rares emplois qu’elle pourrait trouver dans
de Kaboul forme la vie civile. « Dans l’armée, je peux à la fois gagner
un salaire pour être indépendante, et rendre mon pays
76 femmes au métier moins dangereux pour mon enfant », confie-t-elle
avec un large sourire. De nombreuses femmes qui
d’officier. Ce choix choisissent cette carrière sont veuves ou mères céli-
bataires : ostracisées, elles doivent trouver seules le
de carrière, qui bouscule moyen de subvenir à leurs besoins. Afin d’encoura-
ger les femmes à s’engager dans l’armée - et ainsi
les valeurs traditionnelles, engranger les juteux financements internationaux
visant à promouvoir l’émancipation des Afghanes -
est encouragé par
le gouvernement a mis en place des mesures incitati-
ves, comme des soldes parfois supérieures à celles
des hommes. Pourtant, ce ne sont souvent pas les
le gouvernement mais femmes elles-mêmes qu’il faut convaincre de pren-
dre les armes… mais bien leur communauté.
se trouverait menacé Le major Fatima Sadat, qui à 24 ans dirige la section
féminine de l’académie, se rappelle : « Lorsque j’ai dit
en cas de retour à ma famille que je voulais devenir officier, cela a fait
scandale. Des oncles et des cousins ont tanné mon père
au pouvoir des talibans. pour qu’il m’en empêche, l’accusant de ne pas se préoc-
cuper de mon image ni de mon honneur. » Ses parents
tenaient à ce que leur fille exerce le métier de son
choix… Mais leur attitude fait figure d’exception. Non
seulement certaines familles sont attachées aux va-
leurs traditionnelles qui n’accordent aux femmes
qu’un rôle domestique, mais le qu’en-dira-t-on joue
aussi un rôle déterminant. « S’ils laissent leur fille faire
150 km carrière dans les forces de sécurité, on racontera que
c’est une famille peu recommandable, et toutes sortes
de rumeurs circuleront », explique-t-elle assise à son
OUZB. TADJIKISTAN bureau orné du drapeau national et d’une plaque do-
rée à son nom. Cela peut aller très loin : du sobriquet
« be-hidjab » (« sans hidjab »), comme sont parfois
TURKM. Mazar-e surnommées les femmes en uniforme dont il est pen-
Kunduz
Charif sé, à tort, qu’elles ne portent pas le voile en présence
de leurs collègues masculins, aux accusations de
Kaboul prostitution. Alors, pour éviter la honte et la stigmati-
Hérat
sation sociale, certaines familles obligent leurs filles à
AFGHANISTAN choisir une carrière plus en accord avec les traditions.
Celles qui parviennent à entrer à l’académie font
ZONES
Kandahar TRIBALES face à de nouveaux défis : « Certaines ont un niveau
IRAN
académique très bas, car dans leur famille l’éducation
des filles n’était pas la priorité », déplore le major Sa-
PAKISTAN dat. En Afghanistan, 80 % des femmes seraient illet-
trées. « D’autres, en postulant, cachent le fait qu’elles
Infographie sont mariées. Mais si elles tombent enceintes, elles ne
peuvent plus suivre les activités physiques. »
À cela s’ajoute le problème de leur sécurité au sein
même des bases et des administrations. Car malgré
les centaines de millions de dollars alloués à l’inté-
gration des femmes afghanes au sein de l’appareil sé-
Pour que le pays aille mieux,
il ne faudra pas seulement vaincre
les insurgés : il faudra aussi améliorer
»
la condition féminine
SALMA, 20 ANS, ASPIRANTE-OFFICIER
MARGAUX BENN
curitaire - les États-Unis ont versé 160 millions de
dollars à cette fin ces trois dernières années -, la mis-
sion est loin d’être accomplie. « Le harcèlement et les
violences sexuelles existent dans tous les secteurs de la
société, mais c’est un énorme problème dans l’ar-
mée », regrette la responsable. En sept ans dans l’ar-
mée, elle a été témoin de nombreux abus : « Si une
femme veut obtenir une bourse d’études à l’étranger
qui lui permettrait de monter en grade, par exemple,
son supérieur ne lui accordera que s’il obtient quelque
chose en retour. »
La question du harcèlement peu abordée
Le problème existe dans les armées du monde entier.
En début d’année, la plus grande base américaine en
Afghanistan a elle-même été critiquée dans un rap-
port interne pour son manque de réaction à la suite
des accusations de violences sexuelles. Mais en
Afghanistan, où les violences faites aux femmes en-
vahissent déjà la vie civile, le problème est loin d’être
résolu. Il est même à peine abordé.
En octobre 2018, le ministère de la Défense a dé-
claré l’adoption de mesures, peu précises, contre le
harcèlement. Lors de l’annonce de cette nouvelle
politique, le porte-parole du ministère, Jawed Gha-
foor, a indiqué que celle-ci ne visait qu’à prévenir
toute éventualité de harcèlement, les autorités
n’ayant eu vent « d’aucun fait de harcèlement » jus-
que-là. « C’est faux, corrige le major Sadat. Il est vrai
que les plaintes sont rares, mais si une femme tente de
rapporter des faits de violences ou de harcèlement
sexuel, c’est toujours la parole du plus haut gradé qui
est prise en compte. Pas celle de la femme. »
Alors que Washington et les talibans enchaînent
les pourparlers pour arriver à un accord de paix (ces
derniers refusant jusqu’ici toute communication of-
ficielle avec le gouvernement afghan), une autre me-
nace est survenue : celle d’un retour des talibans au
pouvoir, par exemple au sein d’un gouvernement
d’union nationale. Les États-Unis, pressés notam-
ment par leur propre calendrier électoral, ne ca-
chent pas leur empressement de retirer leurs troupes
d’Afghanistan, si bien que nombre d’observateurs
redoutent un accord bâclé qui, tout en mettant fin au
plus long conflit de l’histoire américaine, accorderait
trop de concessions aux talibans.
Qu’adviendrait-il alors de Salma, Nafas Gul et les
autres ? Leur camarade Salha, 20 ans, craint que ses
droits soient sacrifiés au nom de la paix : « Si les tali-
bans veulent baisser les armes, tant mieux. Mais j’ai
peur qu’ils interdisent les femmes dans l’armée. » Lapi-
dations, mutilations, pendaisons… De 1996 à 2001, les
talibans ont imposé un règne de terreur dans le pays.
Les femmes n’y avaient quasiment aucun droit.
Aujourd’hui, même si peu d’Afghans croient au re-
tour de l’obscurantisme, beaucoup se demandent
jusqu’où les droits humains acquis depuis dix-sept
ans seront maintenus, et grâce à quelles garanties.
« Même si les talibans n’avaient pas le pouvoir d’inter-
dire officiellement les femmes dans l’armée, ils feraient
en sorte que cela se passe mal, que nous y soyons mal
accueillies, voire en danger », redoute encore Salha
qui ajoute que « les familles seraient alors encore moins
enclines à nous laisser faire ce métier, et cela reviendrait
au même ». Mais la jeune femme au regard perçant,
qui assemble sa kalachnikov sous la neige, est catégo-
rique : « J’ai fait trop de sacrifices pour les laisser me
dire que je n’ai plus ma place ici. S’ils essaient de nous
renvoyer, nous les combattrons jusqu’au bout. » ■

Quel lien y a-t-il entre le vote et
le sentiment de déclassement ?
Un retour sur
Jérôme Fourquet
les déterminants Directeur du département
Opinion de l’Ifop
sociaux, culturels
et géographiques OPINION La crise des « gilets jaunes » et
du vote le grand débat national ont mis en évi-
dence un sentiment de déclassement et
à la présidentielle de relégation, exprimant des clivages à la
fois sociaux et géographiques. Dans son
de 2017 permet ouvrage L’Archipel français (1), le polito-
logue Jérôme Fourquet a mesuré ce sen-
de comprendre timent lors de l’élection présidentielle de
2017. Une analyse toujours valable à
certains ressorts l’heure de la conclusion du grand débat.
de la crise ❙ VOTE MACRON ET
« ASCENSEUR SOCIAL »
des « gilets jaunes » La « trajectoire sociale perçue » est un
et du grand débat élément structurant du comportement
électoral des Français. L’Ifop l’a mesurée
national. lors de la dernière élection présidentielle.
Cette notion mesure la perception, par les
électeurs, de leur situation sociale per-
sonnelle par rapport à celle de leurs pa-
rents à leur âge. Si les sondés ont le senti-
ment que leurs parents vivaient mieux
qu’eux, ils s’inscriront dans un schéma
de déclassement. Inversement, s’ils
croient que leurs parents vivaient moins
bien qu’eux aujourd’hui, ils se sentiront
bénéficiaires de l’ascenseur social.
Ainsi, plus un électeur a le sentiment de
s’être élevé socialement par rapport à la
génération de ses parents, et plus il a voté
pour François Fillon en 2017. Son score
passe de 13 % parmi ceux qui considèrent
que leurs parents vivaient beaucoup
mieux qu’eux à 19 % parmi ceux qui se
vivent en situation de maintien par rap-
port à la génération précédente, puis à
27 % chez ceux qui ont le sentiment de
bénéficier de conditions supérieures à
celles de leurs parents à leur âge. Le can-
didat de droite double donc son score en-
tre ceux qui se vivent en victimes du dé-
classement générationnel et ceux qui ont
le sentiment d’avoir pris l’ascenseur so-
cial. Le vote en faveur de Jean-Luc Mé-
lenchon suit une trajectoire totalement
inverse, avec un score le plus élevé parmi
les déclassés (23 %) et un point le plus bas
parmi ceux qui sont en ascension (14 %).
Logiquement, le discours de Mélenchon,
critiquant le fonctionnement de la société
et de l’économie libérale, source d’inéga-
lités, résonne davantage dans le camp des
déclassés, quand la rhétorique conserva-
trice et libérale filloniste a davantage
l’oreille des électeurs qui ont le sentiment
de s’être élevés par leur mérite.
L’opposition Macron/Le Pen traduit plus
encore ce ressenti. Marine Le Pen cara-
1 Ascension ou déclassement : France de Macron, France de Le Pen
LES VOTES AU PREMIER TOUR DE L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE DE 2017 SELON LA MOBILITÉ SOCIALE PERÇUE
en %
Votes pour Jean-Luc Mélenchon Votes pour François Fillon Votes pour Emmanuel Macron
27 %
23 %
23 %
21 % 20 %
19 % 18 %
13 % 14 %
Vos parents … beaucoup mieux … un peu mieux … pareil … moins bien … beaucoup mieux … un peu mieux
vivaient… que vous que vous que vous que vous que vous
Déclassement Ascension Déclassement
social sociale social
2 Le vote n'obéit pas au seul critère social
LES VOTES AU PREMIER TOUR DE L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE DE 2017 SELON
LA MOBILITÉ SOCIALE PERÇUE ET LA CATÉGORIE SOCIO-PROFESSIONNELLE
en %
Votes pour Emmanuel Macron Votes pour Marine Le Pen
VOTES DES CADRES
41 %
31 %
20 % 18 %
13 %
8% 7%
Se sentent en Ont le sentiment Ont bénéficié Se sentent en
situation de fort d’avoir conservé de l’ascenseur situation de fort
déclassement leur statut social social déclassement
Source : Ifop
CHAMPS LIBRES
POLITIQUE
cole largement en tête parmi les plus dé-
classés (31 %), et elle est également la
mieux placée parmi les victimes d’un
déclassement moins prononcé (25 %).
Son score devient plus faible parmi les
électeurs qui considèrent que leurs
conditions de vie sont identiques à celles
de leurs parents (13 %) ou parmi les bé-
néficiaires de l’ascension sociale (12 %
seulement). L’audience d’Emmanuel
Macron, porteur d’un discours sur la
mobilité et la réussite individuelle, ré-
pond à une logique diamétralement op-
posée : nette domination parmi les
« winners » (34 %) et niveau le plus fai-
ble (18 %) parmi ceux qui ont pris le
« descenseur social », pour reprendre
l’expression forgée par Philippe Guibert
et Alain Mergier à la suite du référendum
européen de 2005. À douze ans d’écart,
on a retrouvé la même structuration du
champ électoral, entre un pôle « opti-
miste », qui se vit sur une trajectoire as-
cendante ou stable et accepte la globali-
sation économique et les flux
migratoires, et un pôle « pessimiste »,
pour qui aujourd’hui est moins bien
qu’hier et demain pire qu’aujourd’hui.
Pour ces électeurs nombreux, la
construction européenne, la dérégle-
mentation de nombreux secteurs et
l’ouverture des frontières aux capitaux,
aux marchandises et aux immigrés se
sont soldées par une douloureuse dégra-
dation de leurs conditions de vie. Ces
électeurs se sont alors prioritairement
tournés vers la candidate qui promettait
de mettre un coup d’arrêt à cette spirale
infernale.
❙CATÉGORIE
DE GROS ÉCARTS
AU SEIN D’UNE MÊME
SOCIALE
La façon dont chacun évalue sa trajectoi-
re sociale par rapport à celle de la géné-
ration précédente est un ressort fonda-
mental de la structuration de l’opposition
gagnants-ouverts/perdants-fermés.
L’analyse en 3D des comportements
électoraux montre, en effet, que ce para-
mètre vient amplifier ou moduler l’effet
d’appartenance à une classe sociale sur le
vote. Ainsi, si l’on zoome sur la catégorie
des cadres et des professions intellectuel-
les, ayant fortement soutenu Emmanuel
Macron et rejeté Marine Le Pen, les ré-
sultats varient en fonction de ce paramè-
tre. Les cadres qui se vivent en très forte
situation de déclassement par rapport à
leurs parents ont, au premier tour, prati-
quement autant voté Le Pen (18 %) que
Macron (20 %), alors que ce dernier sur-
classe nettement sa rivale parmi les ca-
dres et professions intellectuelles qui ont
le sentiment d’avoir conservé le statut
Votes pour Marine Le Pen
34 %
31 %
27 %
25 %
20 %
13 % 12 %
… pareil … moins bien
que vous que vous que vous
Ascension
sociale
VOTES DES OUVRIERS ET EMPLOYÉS
42 % 37 %
17 % 20 % 22 %
Pensent que leurs Ne se sentent
parents vivaient pas en situation
mieux qu’eux de déclin
social par rapport à la génération précé-
dente (31 % pour Macron contre 8 % pour
Le Pen). La domination devient écrasan-
te au sein des membres de cette catégorie
qui ont bénéficié de l’ascenseur social
(41 % contre 7 %) : ils se sont identifiés au
parcours d’Emmanuel Macron.
À l’autre extrémité de l’échelle sociale,
l’hégémonie frontiste est maximale par-
mi les ouvriers et les employés qui font
l’expérience du plus fort déclassement
social : 42 % pour Le Pen contre 13 %
pour Macron. L’écart est un peu moins
marqué chez ceux qui pensent que leurs
parents vivaient un peu mieux qu’eux
(37 % contre 17 %). Enfin, pour le seg-
ment qui ne se vit pas comme en situa-
tion de déclin – segment minoritaire car
l’expérience dominante dans les milieux
populaires est celle du descenseur so-
cial –, Macron parvient à faire jeu égal
avec sa rivale (20 % contre 22 %). On
constate donc qu’à catégorie sociopro-
fessionnelle identique, le vote diffère se-
lon la trajectoire sociale des individus et
le sentiment qu’ils en ont. Il apparaît que
c’est la paire Macron/Le Pen qui a été la
plus indexée sur cette variable, parce
que chacun à sa manière incarnait le
mieux les deux mouvements qui tra-
vaillent le corps social français depuis
plusieurs décennies.
❙ RÉGIONS
EN DÉCLIN
VS RÉGIONS PROSPÈRES
Le sentiment de déclassement renvoie
aussi souvent à la perception que les
électeurs ont de leur propre région.
L’opposition de la France de Macron et
de celle de Le Pen correspond assez pré-
cisément à la perception du degré de
prospérité et de dynamisme économique
caractérisant leur région. Notons d’em-
blée qu’en une cinquantaine d’années,
les rôles tenus par les régions se sont in-
versés, ce qui a eu des conséquences
électorales.
Alors qu’au début des années 1960 les
habitants des régions industrielles du
Nord et de l’Est se voyaient comme vi-
vant dans des zones entraînant l’ensem-
ble de l’économie nationale, ils se perçoi-
vent aujourd’hui comme résidant dans
des régions en déclin. Le processus de
désindustrialisation a, de fait, durement
frappé ces régions, dont les populations,
notamment ouvrières, éprouvent un
sentiment de décrochage aigu par rap-
port aux générations précédentes, senti-
ment de déclin collectif et individuel qui
a clairement favorisé le vote FN. Dans
l’Ouest, à l’inverse, les habitants ont ac-
tuellement l’impression de vivre dans
des régions économiquement préservées
et assez dynamiques, sentiment qui
3 Croissance ou déclin : la bascule territoriale
PERCEPTION DU RETARD ÉCONOMIQUE
DE LA RÉGION PAR SES PROPRES
HABITANTS, en %
Bretagne-Vendée
en 1963
Note de lecture : en 1963, seuls 4 %
des habitants du Nord (Nord-Pas-de-
Calais-Picardie) considéraient que
leur région était en retard. En 2015,
76 % font désormais ce constat
Nord
Normandie
76 %
43 %
Bretagne-Vendée Beauce
23 % et Loire
43 %
Massif Central Rhône-Alpes
75 %
Sud-Ouest
20 %
Garonne
17 %
mercredi 3 avril 2019
LE FIGARO
15
n’était pas celui des populations il y a
cinquante ans. Ce climat est moins pro-
pice au vote FN.
Le passé des régions qui votent FN et des
régions qui votent Macron est très diffé-
rent. Dans les secondes, pour l’essentiel
sur la façade ouest du pays, la vie pay-
sanne est encore proche ; dans les pre-
mières (quart nord-est et Paca), elle re-
monte à plus de deux générations. Pour
mettre en lumière ce phénomène, Hervé
Le Bras a eu l’idée de tracer la carte de la
proportion d’agriculteurs dans la popu-
lation active il y a deux générations, en
s’appuyant sur le recensement de 1968.
La similitude entre cette carte et celle du
vote Macron est remarquable (sauf dans
la Sarthe en raison du vote Fillon). Si l’on
agrège cette France au passé paysan,
d’une part, et les grandes aggloméra-
tions, d’autre part, on retombe au détail
près sur la carte du vote Macron.
Comme l’écrit Hervé Le Bras : « La carte
de la France paysanne en 1968 donne la me-
sure de l’ascension sociale. Les enfants de
paysans sont devenus ouvriers, employés,
techniciens, cadres. Ils ont migré vers les
villes, mais gardent un peu de terre à leurs
semelles, le souvenir d’une certaine misère
rurale et d’une solidarité locale. Ils ont plus
conscience du progrès de leur condition par
rapport à celle de leurs parents ou de leurs
grands-parents, et font encore confiance à
l’ascenseur social dont ils ont personnelle-
ment bénéficié. Inversement, les régions où
les agriculteurs ne formaient plus qu’une
faible minorité recoupent les territoires qui
accordent un grand nombre de suffrages au
FN : le Nord-Est et les bords de la Méditer-
ranée. » Dans ces régions, les mutations
socio-économiques sont ressenties dou-
loureusement dans les milieux populaires
où les emplois à statut (mineurs de fond)
ou d’ouvriers ont disparu au profit de jobs
précaires (CDD, intérims) ou moins bien
payés (dans les services) avec, en toile de
fond, la hausse du chômage dans ces bas-
sins d’emplois.
Ainsi, au sein d’une même catégorie so-
cioprofessionnelle, ici les ouvriers, l’ex-
périence vécue à l’échelle d’une ou deux
générations diffère fortement selon les
régions, ce qui influe sur le vote. Au pre-
mier tour, Le Pen est hégémonique par-
mi les ouvriers du Grand Est (50 % en
Champagne-Ardenne, Alsace, Lorraine,
Franche-Comté) et des Hauts-de-Fran-
ce (46 %), alors que sa domination est un
peu moins forte parmi les ouvriers du
Grand Ouest (36 % dans l’ensemble Bre-
tagne, Pays de la Loire, Basse-Norman-
die) ou du Sud-Ouest (33 % en Nouvelle-
Aquitaine-Midi-Pyrénées). ■
(1) « L’Archipel français. Naissance
d’une nation multiple et divisée »,
Le Seuil, 379 pages, 22 euros.
Nord
4%
Normandie
10 % Est
11 %
Beauce
59 %
et Loire Centre-Est
18 %
21 %
Massif
Central Rhône-Alpes
67 % 24 %
Sud-Ouest
54 %
Garonne Midi
60 % 40 %
Est
50 %
Centre-Est
50 %
en 2015
12 %
Midi
30 %
A
Infographie
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

16 CHAMPS LIBRES
DÉBATS

L’université américaine, plus que jamais

au cœur des passions collectives du pays

L
a guerre de Donald Trump
contre la correction politique
ne cesse pas. Entre deux
salves de tweets et en
attendant les conclusions
de l’enquête qui devait
l’exonérer de « collusion » avec les
Russes dans la campagne présidentielle,
il a trouvé le temps de s’occuper
de la liberté d’expression dans
les campus américains. Un monde
où il compte peu de soutiens
et qui incarne, pour son électorat,
l’avant-garde honnie des élites.
Les universités restent la vitrine
d’excellence des États-Unis, notamment
pour les découvertes scientifiques,
la recherche médicale, les progrès
technologiques, les études économiques.
Mais elles constituent aussi, et de plus
en plus, le laboratoire agité des passions
idéologiques qui gouvernent la société
américaine depuis un demi-siècle. À la
fois temple du savoir et terre d’élection
de luttes identitaires, où chaque
communauté cultive sa différence qu’on
ne saurait critiquer ou même interroger ;
où l’impératif de vérité, fondement
de toute connaissance, se heurte à une
censure morale de toute vérité jugée
déplaisante, offensante, importune.
Les campus américains sont devenus
des refuges censés protéger toute âme
sensible des sollicitations intempestives
de la vérité. D’où l’aménagement
d’« espaces sécurisés » (safe spaces)
qui mettent les étudiants à l’abri
de propos fâcheux et d’opinions
malvenues ; l’élaboration de
« mécanismes d’avertissement » (trigger
warning) qui les alertent sur des textes
susceptibles de froisser leur subjectivité ;
ou encore, dans
certaines facultés,
RAN HALÉVI l’établissement
d’un code
POUR « LE FIGARO » d’expression
Donald Trump entend suspendre le financement (speech code) qui
public des universités ne respectant pas la liberté réglemente ce qu’il
est convenable
d’expression, cependant qu’un scandale ou non de dire.
d’admissions frauduleuses dans des établissements L’université
d’élite choque les Américains. L’historien* analyse de Californie,
la guerre culturelle qui se livre sur les campus. dans un guide
sur les « micro-agressions » à éviter, désignait à leur détestation des élites prestigieux. Reste qu’il existe une forte
cite comme exemple de deux autres cibles de choix : Hollywood corrélation entre les moyens
« paroles insensibles» des lapalissades et Wall Street. On venait d’apprendre que possèdent les universités d’élite et le
telles que : « Je crois que la personne que des acteurs célèbres (telles Felicity succès des étudiants qui les fréquentent.
la mieux qualifiée devrait obtenir cet Huffman, vedette de Desperate Voilà qui explique la volonté
emploi » ; ou « Chacun peut réussir dans Housewives, et Lori Loughlin, qui joue obsessionnelle de certains parents d’y
cette société s’il y travaille assez dur ».dans Full House) et des magnats faire accueillir à tout prix leurs enfants.
Intimidation intellectuelle, violences de la finance avaient déboursé de grosses Mais dans cette passion entre aussi
physiques, « désinvitations » d’orateurs sommes (jusqu’à 500 000 dollars) une ambition sociale, l’avidité d’une
décrétés « incorrects » : la « dictature pour faire entrer frauduleusement distinction symbolique, autre manière
victimaire » va jusqu’à bafouer leur progéniture dans les meilleures de marquer sa différence dans une
ouvertement le premier amendement universités du pays. Un entremetteur société profondément travaillée par
de la Constitution des États-Unis, socle spécialisé s’en chargeait à prix d’or, la ressemblance humaine ; jusqu’à user,
sacro-saint de la liberté d’expression. en soudoyant des « facilitateurs », pour y parvenir, de moyens illicites
ou en faisant en risquant la prison et l’indignité.
« Les universités américaines font
cohabiter les contraires : le principe
remplacer aux
examens d’entrée
des postulants mal
Les témoignages abondent sur des
adolescents « formatés » dès le lycée
par le choix des matières étudiées,
méritocratique et des procédures dégrossis par des activités culturelles, sportives,
des prête-noms bénévoles, en vue de bien garnir leur
d’admission ultrasélectives, corrigées plus doués et bien dossier de candidature aux meilleures
par un système de discrimination positive rémunérés pour institutions d’enseignement supérieur.
suivant des critères nébuleux
Pour y mettre bon ordre, le président
» la besogne.
La méthode était
simple, presque enfantine : on munissait
Les universités américaines font ainsi
cohabiter les contraires, une politique
égalitaire de la diversité avec le principe
américain vient donc de signer le candidat d’un certificat médical méritocratique et des procédures
un « ordre exécutif » visant à priver des qui lui permettait de passer l’examen d’admission ultrasélectives, corrigées
ressources fédérales les établissements dans une chambre séparée (pour cause par un système de discrimination
qui porteraient atteinte à ce principe de claustrophobie ou autre prétexte), positive suivant des critères
vénéré. « Des universités qui veulent où il était chaperonné par un aide passablement nébuleux qui varient
obtenir l’argent du contribuable devraient médical qui n’était autre d’un établissement à l’autre.
promouvoir la liberté d’expression que le mercenaire recruté pour répondre Là se trouve logée la contradiction qui
et non la réprimer », a déclaré M. Trump. à sa place. C’était un programme mine la société américaine. La logique
La portée de cette mesure est limitée de discrimination positive, du mérite privilégie l’excellence ;
toutefois. Le gouvernement alloue mais au service des riches. la rhétorique de la diversité est
quelque 36 milliards de dollars d’aide Cette affaire sordide levait le voile farouchement égalitariste. La première
financière à l’enseignement supérieur, sur d’autres pratiques, légales celles-là, récompense les réussites individuelles ;
mais ces dotations concernent mais tout aussi choquantes : donations la seconde dédommage des préjudices,
uniquement des institutions publiques, pharaoniques de parents fortunés supposés ou réels, attachés à l’identité
qui sont déjà tenues par la loi d’observer aux établissements où ils espéraient faire sociale, raciale, ethnique. Dans l’une,
le premier amendement — entrer leurs enfants ; privilège d’accès c’est l’expérience, le savoir, la
les établissements privés, en revanche, aux grandes universités pour les rejetons compétence qui légitiment la parole ;
n’obéissent qu’à leurs propres codes. de leurs anciens élèves, pratique dans l’autre, c’est le statut moral,
Et puis, la ligne de démarcation très répandue sinon toujours payante. ou victimaire, qui est érigé en droit.
entre paroles tolérables et propos Il est vrai qu’avec le système de Cette polarisation est aussi ruineuse
inadmissibles est trop poreuse sélection draconien que pratiquent ces que la guerre politique entre démocrates
pour qu’on en défère la détermination institutions (moins de 10 % d’enrôlés sur et républicains, qu’elle alimente
aux bureaucrates de Washington un nombre de postulants pléthorique), et exacerbe. Cependant que deux tiers
ou aux élus du Congrès. même les plus privilégiés des candidats des électeurs blancs non diplômés,
Toujours est-il que l’initiative ne sont pas toujours assurés les grands absents de cette histoire,
de M. Trump est pain bénit pour d’y parvenir. Vrai aussi que la qualité continuent à plébisciter Donald Trump.
ses électeurs, exaspérés par les diktats de l’enseignement dispensé dans l’Ivy *Directeur de recherche au CNRS.
et les abus de la correction politique. League n’est pas forcément meilleure Professeur au Centre de recherches
Quelques jours auparavant, l’actualité que dans des établissements moins politiques Raymond Aron.

Lenglet : « En économie aussi, la société

privilégie la protection plutôt que la liberté »
PROPOS RECUEILLIS PAR
MARIE-LAETITIA BONAVITA £mlbo
LE FIGARO. - Moins de deux ans après
l’élection présidentielle, la France fait
face depuis de longs mois au mouvement
des « gilets jaunes ». La politique
économique d’Emmanuel Macron
était-elle donc à contre-courant ?
François LENGLET. - Elle était à tout le
moins déséquilibrée : baisses d’impôt im-
médiates pour les contribuables fortunés,
avec la réforme de l’ISF et la flat tax sur
les revenus du capital, alors que les mé-
nages ont dû attendre pour profiter d’une
baisse de la taxe d’habitation échelonnée
sur trois ans. Baisse de surcroît largement
annihilée par la forte hausse des taxes sur
le carburant… Deux poids, deux mesures.
Là où Macron est à contretemps, c’est
dans sa politique européenne : il s’appuie
sur Merkel qui n’existe plus, il demande
plus de fédéralisme alors que personne
n’en veut… Ce sont les idées libérales d’il
y a vingt ans, inspirées par la disparition
des frontières nationales. Elles sont com-
plètement dépassées. J’observe d’ailleurs
que le président a changé de pied, avec la
lettre aux Européens, où il exalte les
DESSINS CLAIREFOND
fonction politique. Il assurait le consen-
tement à l’impôt des classes moyennes,
parce qu’il permettait d’entendre les ri-
ches se plaindre aussi des impôts. À par-
tir du moment où les riches ne regim-
bent plus mais au contraire semblent
très contents de la politique fiscale, la
révolte des « gilets jaunes » éclate… Je
pense que l’exécutif va donc inventer un
autre prélèvement qui assure cette
fonction politique de l’ex-ISF, proba-
blement une surtaxe sur les hauts reve-
nus. Cela étant dit, je m’interroge sur les
effets de la réforme de l’ISF. Elle était
selon moi souhaitable, même si le
calendrier de sa mise en œuvre n’était
pas le bon. Mais le seul fait d’évoquer la
remise en cause de cette réforme, dans
la bouche de ministres ou même dans
celle du président, fait qu’elle est com-
promise. Car, si j’étais riche et habitant
en Suisse, voyant les débats qui agitent
l’exécutif sur le retour de l’ISF, je me di-
rais probablement que ce n’est pas en-
core l’heure de rentrer en France…
Les Français sont hostiles à un report
de l’âge de départ à la retraite. La réforme
de la retraite passe-t-elle par une hausse
des cotisations ?
conclusion : il n’y a pas assez de travail
fourni en France. Si vous divisez l’en-
semble des heures travaillées dans notre
pays sur une année par le nombre d’ha-
bitant dans le pays (quel que soit leur
âge), on arrive à 630 heures par Français
et par an. C’est plus de 700 en Allema-
gne, 800 au Royaume-Uni et aux États-
Unis, 1 100 en Corée du Sud !
Que vous inspire la difficulté
de la mise en œuvre du Brexit,
près de trois ans après le vote
des Britanniques le 23 juin 2016 ?
On y voit le danger des référendums, qui
coalisent des forces radicalement diffé-
rentes sur une même réponse, ce qui
rend leur application très difficile. On
observe aussi le désarroi de la classe po-
litique britannique, motivée par les seuls
petits calculs politicards. C’est désolant,
et décevant, de la part de cette grande
démocratie. Pour autant, je reste per-
suadé que l’avenir de long terme du
Royaume-Uni est brillant, même en cas
de « hard Brexit ». Ce pays a des réserves
de flexibilité et de compétitivité consi-
dérables. Les Anglo-Saxons sont, une
fois de plus, en avance sur les autres,
avec leur désir de frontière nationale qui
la foulée de Trump - c’est lui qui, le pre-
mier, a pointé le danger chinois. Et c’est
une très bonne chose.
Populisme, protectionnisme, autorité…
la situation actuelle du monde est-elle
comparable à l’entre-deux-guerres,
avec le basculement de régimes
démocratiques ?
Il y a de nombreuses similitudes. Crise
financière qui réapparaît, révolte
contre les élites, besoin de protection et
d’autorité, désir de frontières… Comme
dans les années 1930, c’est la mort d’un
grand cycle libéral, avec une révolution
idéologique qui pointe. L’offre des par-
tis politiques traditionnels n’est pas
prête pour ces nouvelles demandes.
D’où l’essor de ceux qu’on appelle les
populistes, les seuls à offrir les protec-
tions - au moins en apparence. Cela ne
va pas durer. Comme dans l’entre-
deux-guerres, l’offre politique va se
réorganiser, tout comme l’économie.
Les deux vont obéir à l’injonction de la
société, privilégiant désormais le be-
soin de protection, au détriment du dé-
sir de liberté qui avait déterminé les
dernières décennies. Ce grand cycle
idéologique scande l’histoire du capita-

frontières extérieures de l’Europe, à la À mon sens, il n’y a qu’un moyen pour
fois au plan économique, stratégique et assurer l’équilibre de nos régimes so-
migratoire. C’est une rupture complète, ciaux, retraite comprise, c’est de tra-
et bienvenue, par rapport au poussiéreux vailler davantage. Plus longtemps, cer-
discours de la Sorbonne, qui sortait tout tes, avec des formules de retraite
droit des années 1980. progressive. Mais aussi plus nombreux,
en engageant l’effort de formation
La controverse gigantesque qui bride notre taux d’acti-
fait rage autour de vité, contrairement à ce que l’on observe
ENTRETIEN la réforme de l’ISF… chez quasiment tous nos voisins, à l’ex-
Polémiques sur l’ISF, réformes des retraites, Ce qui est sûr, c’est ception de l’Europe du Sud. La hausse
Brexit, protectionnisme, le journaliste économique, que l’ISF avait à la des cotisations ne réglerait rien, car elle
fois des conséquen- ne ferait que renchérir le coût du travail
A
s’est exprimé à la fois dans le vote pour le lisme depuis plusieurs siècles. Et nous
Brexit et lors de la victoire de Donald sommes à l’heure du retournement.
Trump. Ils ont lancé la révolution libéra- Cela intervient tous les trente ou qua-
le avec Thatcher et Reagan il y a quaran- rante ans, et c’est pour cela que « tout
te ans. Et aujourd’hui, ils initient un va basculer ».
nouveau cycle, protectionniste.
L’Europe doit-elle avoir peur
de la Chine ?
■ Tout va
L’Europe doit, non pas avoir peur, mais basculer !
se protéger face à la volonté de puissance 1919, 1929, 1969,
chinoise, qui s’exprime désormais sans 2009, 2019…
fard. Il y a une dissymétrie considérable Albin Michel,

qui publie « Tout va basculer ! » , analyse les enjeux ces regrettables sur et peser sur l’emploi. Quel que soit le dans le degré d’ouverture des marchés, 225 p., 16,90 €.
économiques majeurs de 2019. l’économie et une problème, on arrive toujours à la même que l’Europe commence à corriger, dans

CHRONIQUE
Bertille Bayart La chasse au patron trop payé est ouverte
C’
£@BertilleBayart
est une tradition.
Chaque année,
à la même époque,
après la fermeture
+ » Lire aussi PAGE 25
« Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais
de la chasse au gibier
et au moment
de l’ouverture de la pêche à la truite,
une autre chasse commence.
Une chasse aux grands fauves. Une chasse
au « patron-qui-gagne-trop ».
Pour cette saison, c’est Thierry Pilenko
qui a pris la première balle. À 61 ans,
il s’apprête à quitter le groupe
parapétrolier TechnipFMC,
né l’an dernier de la fusion de l’américain
FMC et du français Technip dont il était
PDG depuis 2007. Et Thierry Pilenko
quitte TechnipFMC avec beaucoup
d’argent. Beaucoup, beaucoup d’argent.
@
100 000 citations
et proverbes sur evene.fr ENTRE GUILLEMETS
3 avril 1862 : publication des « Misérables », de Victor Hugo,
alors en exil.
Victor Hugo, préface
Tant qu’il y aura sur la terre
ignorance et misère,
des livres de la nature
RUE DES ARCHIVES/RDA
de celui-ci pourront ne pas
être inutiles»
ANALYSE
Les seniors ne prennent pas
Marie-Cécile Renault
£@Firenault
l’emploi des jeunes, au contraire
A
lors que la polémique
ouverte par Édouard
Philippe, Agnès Buzyn
et Gérald Darmanin
sur le report de l’âge
de départ en retraite
n’est toujours pas refermée,
les opposants à cette mesure font feu
de tout bois. Ils arguent que, dans
un pays où 25% des jeunes actifs
sont au chômage (contre 9,5% pour
l’ensemble de la population), reporter
l’âge de départ en retraite des seniors
rendrait encore plus difficile
leur insertion sur le marché du travail.
Un argument séduisant... mais
totalement fallacieux. Non seulement
les seniors ne prennent pas le travail
des jeunes, mais l’activité des seniors
est au contraire porteuse de croissance,
donc d’emploi pour les jeunes.
Et cela se démontre.
Les règles du marché du travail
ne sont pas celles de la mécanique des
fluides : l’emploi n’obéit pas au principe
des vases communicants comme peut
le faire un liquide homogène. Ce n’est
pas parce que l’emploi des seniors
diminue que celui des jeunes augmente.
D’une part, parce qu’un travailleur
senior n’est pas immédiatement
substituable par un débutant.
S’ils peuvent être tentés d’embaucher
des novices, notamment parce qu’ils
coûtent moins cher, les employeurs
ont aussi besoin de conserver dans
l’entreprise de l’expertise, du savoir-
faire et de l’expérience. Pour démonter
une centrale nucléaire mieux vaut avoir
encore sous la main les salariés qui l’ont
construite, expliquait récemment
un chef d’entreprise du secteur
de l’énergie. Idem dans le ferroviaire
“Sans la liberté de blâmer il n’est point d’éloge flatteur” Beaumarchais
Dassault Médias SOCIÉTÉ DU FIGARO SAS Directeur des rédactions
14, boulevard Haussmann 14, boulevard Haussmann Alexis Brézet
75009 Paris
75009 Paris
Président-directeur général
Directeurs adjoints de la rédaction
Charles Edelstenne
Président Gaëtan de Capèle (Économie),
Administrateurs
Olivier Dassault, Thierry Charles Edelstenne Laurence de Charette (directeur
Dassault, Jean-Pierre de la rédaction du Figaro.fr),
Bechter, Olivier Costa Directeur général, Anne-Sophie von Claer
de Beauregard, Benoît
directeur de la publication (Style, Art de vivre, So Figaro),
Habert, Bernard Monassier, Marc Feuillée
Anne Huet-Wuillème (Édition,
Rudi Roussillon
Photo, Révision),
CHAMPS LIBRES
OPINIONS
Thierry Pilenko a accumulé, depuis
2010, l’équivalent de 10 millions d’euros
en actions, attribuées pour partie sous
conditions de performance. Il bénéficie
d’une clause de non-concurrence,
qui vaut une année de rémunération fixe
et variable soit 1,9 million d’euros.
Il touchera aussi une somme équivalente -
1,9 million encore - sous forme
d’indemnités de départ. Et il a encaissé
en deux fois, en 2017 et 2018, la liquidation
de sa retraite-chapeau à la française
d’une valeur de 3,8 millions en tout,
en plus de sa rémunération ordinaire.
Donc, oui, cela fait beaucoup.
Nicolas Dufourcq, le patron de Bpifrance
et à ce titre actionnaire de TechnipFMC,
a dénoncé une « somme gigantesque ». Le
ministre de l’Économie Bruno Le Maire a
et l’aéronautique où les produits
ont des cycles longs. Et ce, d’autant
que les entreprises, sous pression, ont
peu de temps pour former les jeunes,
en dépit des efforts faits en faveur
de l’apprentissage.
En réalité, s’il y a bien un frein
à l’emploi que les patrons dénoncent
avec force, c’est le manque
de compétences avant toute chose.
Et de rappeler que 400 000 emplois
ne trouvent pas preneur. Or, dans
le même temps, 17% des jeunes sortent
avant le bac sans aucune qualification
ou diplôme, sans compter ceux qui
abandonnent l’université en cours
« Le marché du travail n’est pas
un gâteau à partager. Le couper
en tranches fines ne permet pas
d’en donner à tout le monde
de route. La première clé de l’emploi
des jeunes est l’augmentation des
compétences, et donc le renforcement
du système éducatif et du système
de formation professionnelle.
D’autre part, c’est une idée fausse -
largement alimentée par la CFDT -
de croire que le marché du travail
est un gâteau à partager, et que plus
on le coupe en tranches fines,
plus il y en aura pour tout le monde.
Une philosophie qui a notamment
nourri toute la réflexion sur les
35 heures... sans parvenir à réduire
le chômage. Car, en réalité, ce qui crée
le travail, c’est la croissance. Il faut plus au politique de choisir. Mais l’État
sûrement faire grossir le gâteau si l’on
veut qu’il y en ait pour tout le monde.
Plus il y a de personnes en activité,
jeunes ou vieux, plus il y a
Arnaud de La Grange Directeur artistique
Pierre Bayle
(International),
Rédacteur en chef
Étienne de Montety Frédéric Picard (Web)
(Figaro Littéraire),
Directeur délégué
Bertrand de Saint-Vincent du pôle news
(Culture, Figaroscope, Télévision), Bertrand Gié
Yves Thréard (Enquêtes, Éditeurs
Opérations spéciales, Sports, Robert Mergui
Anne Pican
Sciences),
Directeur de la
Vincent Trémolet de Villers diversification éditoriale
(Politique, Société, Débats Opinions) Pierre Doncieux
mercredi 3 avril 2019
LE FIGARO
17
parlé d’un « comportement inacceptable ». géants, comme le terminal de Yamal,
Geoffroy Roux de Bézieux, le président 600 kilomètres au nord du cercle arctique.
du Medef, a refusé de cautionner L’unanimité contre Thierry Pilenko
« une prime à l’échec ». Un hallali. cache autre chose. Le monde politico-
Seulement voilà, la plupart des critiques
sont à côté de la plaque. Bien sûr,
le montant est impressionnant. Mais
économique français se venge contre
une fusion jamais digérée, une de ces
opérations « entre égaux » qui tournent au
on parle ici d’un secteur, le pétrole, où détriment du pavillon tricolore. Technip
les patrons peuvent toucher en un an ce en se mariant à l’américain FMC, a installé
que Pilenko aura gagné en une décennie. son siège social à Londres et est devenu
De toute façon, les patrons du CAC 40 de droit britannique. Le rapprochement
gagnent toujours trop ! Et on ne peut pas à avait un sens stratégique dans un contexte
la fois leur demander, au nom de la bonne chahuté, mais il a été mal vécu
gouvernance, de garder plusieurs années par une partie des cadres français.
leurs actions et stock-options sans « Et aussi par le corps des Mines,
les vendre au fil de l’eau, et leur reprocher qui a perdu un de ses points de chute »,
au moment de leur départ la valeur grince un bon connaisseur de l’entreprise
globale du pécule ainsi constitué. et des mœurs parisiennes.
On ne peut pas non plus affirmer Le cas Pilenko pose finalement un seul
que Thierry Pilenko est en situation problème : celui de l’accumulation
d’échec au prétexte que l’entreprise de dispositifs de rémunération en tous
a affiché une perte de 2 milliards genres, qui donne l’illusion
l’an dernier. Cette perte qui résultait de la transparence mais abolit toute prise
de dépréciations d’actifs, était purement
comptable ; c’est-à-dire qu’elle était
de risque pour celui qui en bénéfice.
L’autorégulation patronale,
sans impact sur les indicateurs critiques incarnée en France par le Haut Comité de
de l’entreprise, sur sa capacité à financer gouvernement d’entreprise (HCGE),
ses investissements, à rembourser a commencé, certes trop lentement,
ses dettes, et à payer ses dividendes. à s’attaquer au problème. En 2015, il avait
On n’osera pas dire, évidemment, contesté les 13,7 millions d’euros que
que TechnipFMC est en pleine forme. Mais Michel Combes voulait encaisser après
au royaume des aveugles, les borgnes sont seulement deux années chez Alcatel.
rois. Le secteur des services parapétroliers En 2016, il avait taclé Carlos Ghosn,
a été ravagé par l’effondrement des cours qui comptait s’asseoir sur le vote négatif
de l’or noir en 2015. Les « majors »
ont vu l’abîme de près, et elles ont affalé
de l’assemblée générale de Renault. L’an
dernier, il avait renié Georges Plassat, qui
d’un coup leurs investissements et exigé pensait valoir chez Carrefour 4 millions de
des baisses de prix de moitié de leurs clause de non-concurrence à l’âge de
fournisseurs. En France, CGG est presque
au tapis. Vallourec est exsangue.
68 ans. Cette année, c’est Thierry Pilenko
qui a pris la foudre. Tom Enders, le patron
TechnipFMC surnage bien mieux. sur le départ d’Airbus, le suit de près.
Son cours de Bourse a moins dévissé que La chasse aux grands fauves commence à
celui de son grand rival Schlumberger ressembler à une chasse responsable, qui à
par exemple. L’entreprise a prouvé chaque saison prélève quelques spécimens
sa capacité à mener à bien des projets pour le bien de tout l’écosystème.
VOX
… CULTURE
« Plutôt que de financer
des stars du rap, le Centre
de croissance, et plus il y a d’emploi. La
deuxième clé du travail des jeunes n’est national du cinéma (CNC)
donc pas le départ des seniors, mais
le dynamisme économique du pays. devrait encourager
Or, la France est le pays qui travaille
le moins. Et ce, que l’on regarde le les jeunes talents ! »,
temps de travail horaire, hebdomadaire
ou annuel. Entre vacances, RTT tribune de Constance
et 35 heures, les Français travaillent au
total 3 ans de moins que les Allemands, Péruchot, coordinatrice
estime le Medef. Surtout, à l’échelle
d’une vie, la durée du travail est du mouvement
inférieure car les Français arrêtent plus
tôt que leurs voisins européens : 40% Les Affranchis-Students
des gens partent avant l’âge légal dans
l’Hexagone. Les retraites anticipées for Liberty en France.
pour carrière longue
sont ainsi passées
de 4% à 26% avec les
réformes conduites
de 2012 à 2014 par
» François Hollande.
Un choix politique
que pourtant rien ne justifie, car
ces personnes n’ont ni une espérance
de vie inférieure ni un niveau de vie
moindre, selon un rapport du Conseil
d’orientation des retraites (le COR). Les rencontres
Un report progressif de l’âge
de départ, non pas violent et brutal,
mais d’un trimestre par an par
du FIGARO
exemple, permettrait de gagner un an
en quatre ans et deux ans en 8 ans. Tout RENCONTRE AVEC
le monde en profiterait, en premier lieu
les jeunes. Les économies ainsi réalisées
MATHIEU BOCK-CÔTÉ
pourraient être redistribuées, au profit le lundi 15 avril 2019
du pouvoir d’achat, de la solidarité à 20 heures
ou d’une baisse de la pression fiscale - Salle Gaveau
Réservations :
se recréerait indéniablement des 01 70 37 31 70 ou
marges de manœuvre. Ne pas le faire,
c’est ignorer les vrais médicaments www.lefigaro.fr
pour se cantonner à l’homéopathie. /rencontres.
FIGAROMEDIAS Impression L’Imprimerie, 79, rue de Roissy Ce journal
9, rue Pillet-Will, 75430 Paris Cedex 09 93290 Tremblay-en-France se compose de :
Midi Print, 30600 Gallargues-le-Montueux Édition nationale
Tél. : 01 56 52 20 00 1er cahier 18 pages
Ecoprint Casablanca Maroc. ISSN 0182-5852 Cahier 2 Économie
Fax : 01 56 52 23 07 Commission paritaire n° 0421 C 83022 10 pages
Cahier 3 Le Figaro
Pour vous abonner Lundi au vendredi de 7 h à 18h ;
Président-directeur général sam. de 8 h à 13 h au 01 70 37 31 70. Fax : 01 55 56 70 11 .
et vous 10 pages
Cahier 4 Le Figaro
Aurore Domont Gérez votre abonnement, espace Client : www.lefigaro.fr/client Entrepreneurs 10 pages
Formules d’abonnement pour 1 an - France métropolitaine Diffusion sur une partie
Direction, administration, rédaction du territoire national :
Club : 429 €. Semaine : 289 €. Week-end : 219 €. Cahier 5 Great Place
14, boulevard Haussmann To Work 40 pages
Imprimé sur papier issu de forêts gérées durablement.
75438 Paris Cedex 09
A
Édition IDF :
Origine du papier : France. Taux de fibres recyclées : 100%. Ce journal
Tél. : 01 57 08 50 00 Cahier 6 Figaroscope
est imprimé sur un papier UPM porteur de l’Ecolabel européen 72 pages tabloïd
direction.redaction@lefigaro.fr sous le numéro FI/37/01. Eutrophisation : Ptot 0.009 kg/tonne de papier.
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO
18
Marie-Amélie Lombard-Latune
£@malombard
D
irecteur de recherches au CNRS, Hen-
ry Rousso a beaucoup travaillé sur la
Seconde Guerre mondiale et la mé-
moire de Vichy. Il est à l’origine du
mot « négationnisme ». Au nombre
des historiens ayant fondé l’Institut
d’histoire du temps présent, il est également spécialis-
te des rapports entre histoire, mémoire et justice. En
mars denier, il a été nommé par le premier ministre à
la tête de la mission qui doit, d’ici la fin de l’année, dire
ce que devra être le futur musée-mémorial dédié aux
victimes d’attentats.
LE FIGARO. - Comment concilier histoire et mémoire
dans un musée ?
Henry ROUSSO. - On ne fait pas d’histoire sans mé-
moire. Le récit scientifique se fonde sur les traces, les
mémoires, les témoignages. Ce mémorial aura trois
fonctions. Une fonction mémorielle, de souvenir. Un
musée, au sens premier, un lieu où l’on montre quel-
que chose, dédié à la connaissance. Et un lieu de trans-
mission.
Au risque de « muséifier » des événements récents,
sur lesquels des enquêtes sont encore en cours ?
C’est une objection qui n’est pas sans rappeler le débat
sur l’histoire contemporaine et la possibilité d’écrire
sur une histoire inachevée. J’ai beaucoup travaillé et
évolué sur ces questions depuis près de quarante ans,
notamment au sein de l’Institut d’histoire du temps
présent. Et j’ai, pour la première fois, envie de passer
du côté de l’action.
Qu’allez-vous montrer dans ce lieu ?
C’est trop tôt pour le dire ! Pour le moment, la lettre de
mission me demande d’établir un cahier des charges,
un projet général, de proposer un lieu et les grandes li-
gnes d’un parcours muséographique.
Quelle part donnerez-vous à l’émotionnel ?
Pour prendre un exemple peut-être caricatural,
les peluches déposées devant le Bataclan au lendemain
du 13 novembre 2015 y auront-elles une place ?
Au mémorial du 11 Septembre à New York, il y a ce
genre d’objets. Une peluche, c’est du domaine de
l’affectif, du symbolique. Et cette mémorialisation
immédiate fait partie de l’histoire des attentats du
World Trade Center. Elle dit beaucoup des réactions
des New Yorkais, et des Américains en général, sur le
11 Septembre. Alors, bien sûr, ces objets ne disent
rien de Ben Laden… Mais, en déposant des nounours
ou des dessins devant le Bataclan ou sur d’autres
lieux d’attentats, les citoyens, qui sont alors dans la
sidération, veulent laisser à la fois un hommage et
une trace car ils ne savent pas de quoi demain sera
U
EA
UV
O
N
Le grand quiz
de la culture générale
7
,90
1
DISPONIBLE CHEZ TOUS LES MARCHANDS DE JOURNAUX ET SUR WWW.FIGAROSTORE.FR
A
RENCONTRE
« On ne fait pas
d’histoire sans
mémoire.
Le récit scientifique
se fonde
sur les traces,
les mémoires,
SEBASTIEN SORIANO/LE FIGARO
les témoignages. »
Henry Rousso : « Ce musée-mémorial
sera une forme de victoire sur le terrorisme »
L’historien va piloter la création d’un lieu dédié aux victimes d’attentats, conjuguant
mémoire et histoire. Un projet ambitieux, qui soulève de multiples questions.
fait. Pour prendre un tout autre exemple, à Paris, au - qui ? quoi ? comment ?- et besoin de réagir. Moi- naire. Je suis depuis longtemps plus proche du « travail
Mémorial de la Shoah, l’exposition « Après la même, n’habitant pas loin de la place de la République de mémoire » défendu par Paul Ricœur que du « de-
Shoah » a montré que la « première » mémoire de et ayant eu peur pour mes proches ce soir-là, je suis voir de mémoire ».
l’holocauste pouvait être très riche : dès le printemps ensuite descendu dans la rue pour manifester ma pré-
1945, des mémoriaux éphémères sont érigés en sence sur les lieux. Quelle période et quel périmètre du terrorisme
hommage aux victimes, des pancartes sont placées abordera ce musée-mémorial ?
sur les lieux de leur disparition. Vous avez dit, il y a quelques années, Il concernera les actes terroristes commis sur le terri-
que « le surinvestissement de la mémoire est une forme toire français et ceux ayant concerné des victimes
Que dit de notre société d’impuissance ». Vous avez changé d’avis ? françaises à l’étranger. La période couvrira le dernier
ce besoin de « mémoriel » ? Ma « critique » visait non pas les politiques de mémoi- tiers du XXe siècle, après les guerres coloniales, jusqu’à
Un attentat terroriste est un coup de tonnerre dans un re en tant que telles mais une forme d’excès. Mais je aujourd’hui et… malheureusement peut-être demain.
ciel serein, un acte de guerre en temps de paix. Agres- suis aussi convaincu que la mémoire est une forme de Le point de départ sera l’émergence d’un terrorisme
sée à ce stade, la société a, tout à la fois, besoin de sens connaissance, elle-même liée à l’émotion, à l’imagi- international et mondialisé même si nous ne nous in-
terdisons pas de remonter dans le temps pour mieux
l’expliquer.
Et quid de la définition du terrorisme ?
Je reprendrais la définition de Raymond Aron : un acte
violent dont les effets psychologiques sont hors de
proportion avec ses résultats physiques. Regardez les
effets produits par la tentative d’attentat commise par
Richard Reid, le passager d’un vol Paris-Miami aux
PRÉSENTE
chaussures bourrées d’explosifs. Cela a bouleversé le
transport aérien, la sécurité dans les aéroports et la
manière de voyager.
Le terrorisme aujourd’hui, dans l’esprit des Français,
il est islamiste…
« concernera C’est effectivement une dimension centrale du terro-
Ce musée risme contemporain mais ce n’est pas le seul comme
les l’a prouvé l’attentat récent en Nouvelle-Zélande com-
mis par un militant suprémaciste. Il s’agit de prendre
actes terroristes en compte toutes les facettes du terrorisme contem-
Combien de pays sont commis sur le porain : politique, religieux, ethnique, etc. Pour
riverains avec la Suisse ? territoire français autant, ce terrorisme-là a déjà suffisamment marqué
l’histoire. Il y aura un avant et un après.
A3 et ceux ayant
B4 concerné Autre réticence possible sur ce projet : un tel musée,
C5
des victimes c’est faire beaucoup d’honneur aux terroristes…
C’est une objection possible mais, depuis la nuit des
françaises temps, les sociétés humaines créent des lieux pour se
D6
à l’étranger. La recueillir. Ce musée-mémorial sera aussi un lieu de ré-
période couvrira flexion, de distance et d’analyse critique. Tout ce qui
Combien d’images par fait la quintessence de nos démocraties. C’est bien là
le dernier tiers une forme de victoire sur le terrorisme, une manière
seconde comportent les
films argentiques depuis
du XXe siècle, d’affirmer la suprématie de nos valeurs sur celles de
l’apparition du parlant ? après les guerres ceux qui veulent nous détruire.
A 16
coloniales, jusqu’à Pour revenir au Mémorial du 11 Septembre
aujourd’hui et… à New York, ne fait-il pas la part belle à l’émotion,
B 24
malheureusement moins à la pédagogie ?
C 36 Nous n’avons effectivement pas le même rapport en-
peut-être demain. tre émotion et connaissance en Europe ou aux États-
D 48 Le point de départ Unis. Notre mission réfléchit à un musée national, pi-
sera l’émergence loté par la puissance publique. Il s’adressera à tous les
publics, à toutes les générations mais comportera une
Également connu pour ses d’un terrorisme dimension critique. Sinon, autant arrêter tout de suite !
travaux de mathématiques, international La France a un certain savoir-faire en la matière :
il aurait inventé le mot
« philosophe ».
De qui s’agit-il ?
et mondialisé » l’Historial de la Grande Guerre à Péronne, le Mémorial
de Caen, le Mémorial de la Shoah, la Maison
d’Izieu, etc. La France fait aussi partie des pays, avec
l’Allemagne, qui ont le plus développé les politiques de
A Pythagore
mémoire, comme on vient de le voir pour le centenai-
B Thalès re de 1914-1918.
C Platon
L’ancien site du Palais de justice, sur l’île de la Cité
D Euclide à Paris, a été évoqué. Ce serait un bon choix ?
Cela a été évoqué par le Comité mémoriel mais rien
n’est tranché. Ce qui est certain, c’est que ce lieu devra
avoir une symbolique immédiate et forte. Peut-on
l’implanter dans un bâtiment existant ? Doit-il, au
contraire, sortir de terre ? Il est trop tôt pour trancher.
Le bâtiment ne verra sans doute pas le jour avant qua-
tre ou cinq ans. ■
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO - N° 23 214 - Cahier N° 2 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr
lefigaro.fr/economie
ÉCONOMIE
LES ENTREPRISES ONT ÉTÉ
NOMBREUSES À VERSER
LA PRIME MACRON PAGE 24
économie
Le climat de tension pèse
sur le commerce mondial
L’affrontement qui oppose Washington à Pékin depuis un an a contribué
au moindre dynamisme des échanges internationaux de marchandises en 2018.
Pour l’Organisation mondiale du fer qui oppose Donald Trump à Xi
commerce (OMC) qui comptabili- Jinping depuis un an a produit des
se chaque année les échanges de effets négatifs. À l’automne der-
marchandises à travers la planète, nier, l’OMC tablait sur une crois-
pas de doute possible : le bras de sance du commerce mondial de
STOCK.ADOBE.COM,
L'HISTOIRE
Pas facile de jouer au Robin des bois
avec les niches fiscales des riches
L
e chiffre fait mouche : les niches
fiscales pèsent 100 milliards
d’euros. Pour redonner un milliard
d’euros aux contribuables
les plus modestes, le ministre
des Comptes publics, Gérald Darmanin, ainsi
que les députés En marche !, veulent rogner
les crédits et réductions d’impôt des plus
aisés. Raboter un milliard sur 100, l’affaire
devrait être aisée. Elle ne l’est point,
apprend-on dans une note des services
de l’Assemblée commandée par le
rapporteur général du budget, Joël Giraud.
Pour commencer, les fameux 100 milliards
concernent à la fois les ménages
et les entreprises.
La note des services de l’Assemblée chiffre
à seulement 12,5 milliards d’euros les niches
concernant les particuliers. Pour compliquer
encore l’équation, Gérald Darmanin
a promis qu’il ne toucherait pas au crédit
LA SÉANCE DU MARDI 02 AVRIL 2019
CAC 40 EUROSTOXX 50
5423,47 +0,33% 3395,70 +0,30%
DOW JONES FOOTSIE
26179,13 -0,30% 7391,12 +1,01%
ONCE D’OR NASDAQ
1293,50 (1295,40) 7499,64 +0,28%
PÉTROLE (lond) NIKKEI
21505,31 -0,02%
69,290 (68,700)
3,9 % en 2018. La croissance aura
finalement été de 3 %. L’issue de
la guerre commerciale entre les
deux premières puissances éco-
nomiques du monde pèsera forcé-
COMMUNIQUÉ FINANCIER | 2 avril 2019, 17h45
d’impôt emploi à domicile, qui représente
tout de même 4,7 milliards. Il ne reste donc
que 7,8 milliards d’euros éligibles au coup
de rabot anti-riches. Le ministre aurait
dans son viseur le crédit d’impôt transition
énergétique, dont il voudrait priver
les plus aisés. Ce dispositif, qui permet
de subventionner une partie des travaux
d’isolation thermique de son logement,
coûte 1,9 milliard. Mais 28 %
de cette somme bénéficie aux 10 %
des Français les plus aisés, soit un peu plus
de 500 millions d’euros.
Où trouver le demi-milliard manquant ?
Peut-être en rabotant encore
davantage le plafond des niches fiscales,
fixé aujourd’hui à 10 000 euros
- sauf exception. Toutefois, ce plafond
ne permet à l’État d’économiser, à ce jour,
que 75 millions d’euros. Le compte
n’y est pas… ■ GUILLAUME GUICHARD
le PLUS
du
FIGARO
ÉCO
DIVERTISSEMENT
Le marché
mondial
de la musique
est en pleine forme
PAGE 28
> FOCUS
BERCY RÉVISE À
LA BAISSE SES
PRÉVISIONS
AIR FRANCE POUR 2022
LA COMPAGNIE Le gouvernement a fortement revu
à la baisse son programme de sta-
SE RENFORCE bilité pour la période 2017-2022. Le
AUX ÉTATS-UNIS PAGE 25 document, envoyé chaque année à
la mi-avril à la commission de
Bruxelles et dont Le Figaro s’est
procuré une copie, fixe la trajectoire
des agrégats économiques jusqu’à
la fin du quinquennat. Bercy prévoit
désormais une croissance de 1,4%
par an entre 2020 et 2022, contre
1,7% par an il y a 12 mois. Pour 2019,
la chute est aussi brutale : la prévi-
sion de progression du PIB a été ra-
menée à 1,4% versus 1,9% il y a un
an. La conséquence de ce net ralen-
tissement de l’économie, commun à
toute l’Europe, se voit sur les autres
indicateurs macroéconomiques.
Le déficit, qui devait à être ramené
à -0,3% du PIB en 2022, est annon-
ment sur la dynamique des cé à -1,2% à terme, soit une prévi-
échanges cette année. Mais la san- sion de reflux de 1,6 point depuis fin
té économique de l’Europe et de 2017, contre 3,1 visés il y a un an.
l’Asie contribuera aussi au rythme Idem pour le taux de dette publique,
du commerce mondial. PAGE 20 lui aussi toujours présenté en repli,
mais de manière moins prononcée:
96,8% en 2022, contre 89,2% il y a
un an à la même échéance. À ce
Les nouvelles
stade, l’endettement n’est donc
programmé pour reculer que de 1,6
point sur le quinquennat, contre 5
aspirations points promis en 2017 au cours de la
campagne par Emmanuel Macron.
des jeunes Quant au taux de dépenses publi-
ques, il ne reculera que de 3 points,
générations
à 52,1% en 2022, versus une réduc-
tion de 4 points affichée à terme
dans le programme de stabilité
d’avril 2018. Il n’y a au final que sur
Révolution au sein des les prélèvements obligatoires que
DRH des entreprises : le gouvernement améliore sa prévi-
sion expédiée à Bruxelles l’année
les jeunes recherchent dernière, en visant désormais un
désormais du sens taux de 43,8% fin 2022, versus
44,3% il y a un an. Si le gouverne-
et privilégient les
ment tient cet objectif, la baisse
offres d’emploi en sera donc de 1,4 point sur le quin-
quennat, contre 1 promis par le pré-
cohérence avec leurs sident en 2017. MARC LANDRÉ
valeurs. PAGES 22 ET 23
WWW.SYNERGIE.COM
Daniel AUGEREAU
Président du Directoire
2018 : SYNERGIE A SES
PLUS HAUTS HISTORIQUES
Chiffre d’affaires : 2.551,1 M€ – Ebitda : 137,2 M€
1er Résultat opérationnel courant : 128,4 M€
Groupe français Résultat net : 82,5 M€
indépendant de
services RH Le Directoire de SYNERGIE, sous la Présidence de Consolidés - en M€ 2018 2017 Variation
M. Daniel AUGEREAU, s’est réuni le 29 mars 2019 et
Chiffre d'affaires 2.551,1 2.323,2 +9,8 %
5e a arrêté les comptes annuels au 31 décembre 2018.
Les procédures d’audit de ces comptes ont été réalisées Ebitda 137,2 135,1 +1,6 %
Réseau
et le rapport correspondant est en cours d’émission. Résultat opérationnel courant* 128,4 127,5 +0,7 %
européen
Résultat avant impôts 117,6 115,2 +2,1 %
17 Charge d'impôt (35,1) (33,6)
UN CHIFFRE D’AFFAIRES RECORD DE 2.551,1 M€
Pays dans Résultat net 82,5 81,5 +1,2 %
le monde SYNERGIE, 5e Groupe européen en Gestion des
Ressources Humaines, affiche un chiffre d’affaires
* Avant amortissement et dépréciations des incorporels
750 consolidé de 2.551,1 M€, en hausse de 9,8 % par rapport
à 2017 (+5,8 % à périmètre et devise constants).
Intégrée au sein du Groupe, l’entreprise de services
Agences numériques DCS EASYWARE a réalisé une très bonne
Avec une présence dans 17 pays (Europe, Canada, performance depuis son entrée en Juin 2018.
4 100 Australie), l’activité à l’International, atteint 1.343,3 M€ A l’International, l’Ebitda est également en progression
Collaborateurs (52,7 % du chiffre d’affaires consolidé), et s’est s’établissant à 53,5 M€.
permanents fortement développée (+14,6 %), avec d’excellentes
performances affichées dans les pays où SYNERGIE
Une dépréciation de goodwill et autres éléments
incorporels, liée aux conséquences du Brexit, a été
bénéficie particulièrement d’une large implantation
constatée en Grande Bretagne pour 3,4 M€.
comme l’Europe du Sud (+14,3 %) et l’Autriche (+20,7 %).
En France, le chiffre d’affaires progresse à 1.207,8 M€
Compte tenu d’un coût financier limité à 1,7 M€ et d’une
charge d’impôt de 35,1 M€, le résultat net s’est élevé à
et affiche une croissance de 5,0 % (+2,8 % à périmètre
82,5 M€ contre 81,5 M€ en 2017.
constant).
UNE EXCELLENTE STRUCTURE FINANCIÈRE
UNE AMÉLIORATION DE LA RENTABILITÉ
Avec des capitaux propres de 501,8 M€ et une trésorerie
L’ensemble des indicateurs de rentabilité est en
progression dans un marché assez tendu au cours du
(nette de tout endettement) positive de 125,6 M€
(y compris créances CICE mobilisables), SYNERGIE
second semestre.
dispose des moyens nécessaires à la poursuite de
L’Ebitda consolidé s’établit à 137,2 M€, contre 135,1 M€ son développement et à la réalisation de nouvelles
en 2017 et le ratio de marge opérationnelle courante sur acquisitions, tant en France qu’à l’étranger.
chiffre d’affaires est de 5 %.
Il faut noter que l’effet favorable de la hausse de l’activité
Le Groupe poursuit actuellement l’étude de dossiers
de croissance externe afin de se déployer notamment
a été légèrement atténué en particulier en France, avec
la baisse du taux de CICE de 7 à 6 % (-8,6 M€), mais
dans les pays nordiques et en Europe de l’Est après
avoir concrétisé l’acquisition de la société australienne
PROCHAIN
RENDEZ-VOUS
également dans d’autres pays (Belgique, Allemagne,
Pays-Bas...) où de nouvelles mesures législatives ou
ENTIRE RECRUITMENT au début de l’année 2019.
Publication réglementaires ont été mises en place. PERSPECTIVES
du chiffre En France, SYNERGIE affiche un Ebitda de 83,6 M€. SYNERGIE poursuit aujourd’hui sa croissance avec un
d’affaires du chiffre d’affaires en hausse par rapport à 2018 et se veut
Les investissements engagés depuis deux ans avec
1er trimestre 2019
le mercredi 24 le recrutement de consultants, la digitalisation et le
confiant pour l’exercice en cours.
avril 2019 après développement des outils IT ainsi que la formation des DIVIDENDES : 0,80 € PAR ACTION
Bourse intérimaires qui s’est amplifiée, se sont poursuivis pour Lors de l’Assemblée Générale des Actionnaires du 13
améliorer notre service auprès de la clientèle en France
comme à l’International.
juin 2019, il sera proposé la mise en paiement le 21 juin
2019 d’un dividende de 0,80 € par action.
CAPITAL SOCIAL : 121 810 000 € - EURONEXT PARIS COMPARTIMENT B - ISIN FR0000032658 - MNÉMO : SDG - REUTERS : SDGI.PA - BLOOMBERG : SDG:FP
CONTACT : SYNERGIE Direction Financière - Yvon Drouet - Tél. +33(0)1 44 14 90 20 - yvon.drouet@synergie.fr
C
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

20 ÉCONOMIE
Coup de frein sur le commerce mondial
Les tensions commerciales entre Pékin et Washington ont freiné les échanges de biens en 2018, pointe l’OMC.

ANNE CHEYVIALLE £@AnneCheyvialle CROISSANCE MONDIALE ANNUELLE, en %

INTERNATIONAL La preuve par les COMMERCE PIB

faits. Le climat de guerre commer-
ciale entretenu depuis plus d’un an
par le bras de fer entre Washington
et Pékin se ressent sur les échanges
de biens et services. Les données
publiées mardi par l’Organisation
mondiale du commerce (OMC)
soulignent un net ralentissement
en 2018, qui s’est accentué en fin
d’année. Le commerce mondial a
certes progressé mais au rythme de
3 % l’an dernier alors que l’OMC
envisageait encore 3,9 % en sep-
tembre. Le chiffre pour 2019 est
aussi nettement revu en baisse, à
2,6 %, contre 3,7 % précédem-
ment. Un rebond est possible en
2020 en cas d’apaisement, pointe
l’organisation internationale basée
à Genève.
La mise en place de nouveaux
droits de douane et de mesures de
rétorsion n’explique pas à elle seule
le ralentissement. La faiblesse de la
croissance mondiale, plus de volati-
lité sur les marchés financiers et un
resserrement des conditions moné-
taires dans les pays développés ont
également pesé sur les échanges. Le
directeur général de l’OMC, Rober-
to Azevêdo, a insisté sur « la montée
des tensions commerciales » comme
« principal facteur » du coup de
frein même s’il est difficile de quan-
tifier leur impact. « Le commerce
mondial ne peut pas jouer pleinement
son rôle de moteur de la croissance
lorsque les niveaux d’incertitude sont
aussi élevés », a alerté le Brésilien
pour qui « il est urgent de résoudre
les tensions » car « le monde entier
sera perdant ».
Le port de Lianyungang,
dans la province côtière
du Jiangsu, en Chine.
CHINA STRINGER NETWORK/
REUTERS
Lui faisant écho, Christine La-
garde, la directrice générale du
FMI, s’exprimant à Washington en
prélude aux assemblées générales
du Fonds monétaire et de la Banque
mondiale la semaine prochaine, a
évoqué une économie mondiale
« perturbée » mais table sur une
« légère accélération au deuxième
semestre » qui écarte « un risque de
récession à court terme ».
Impact limité du Brexit
Sur le front commercial, le conflit
entre Washington et Pékin joue un
grand rôle, a reconnu Roberto
Azevêdo. Précisant que sur les
481 milliards de dollars de mesures
restrictives au commerce quanti-
fiées par le G20 en novembre, quel-
que 350 milliards relèvent de la
Chine et des États-Unis. Donald
Trump souffle régulièrement le
froid et le chaud sur les négocia-
tions en cours. Faute d’un accord -
un round s’est encore tenu la se-
maine dernière à Pékin -, le prési-
dent américain menace d’élever
encore les droits de douane de 10 à
25 % sur 200 milliards d’exporta-
tions chinoises. Dépendant de la
nature de l’accord entre le Royau-
me-Uni et l’Union européenne, le
Brexit représente un autre facteur
4,6
3 3 2,9
2,8
2,3 2,4
1,6
2015 2016 2017
Source : OMC
de risque même si l’impact devrait
se limiter aux deux partenaires.
Sauf qu’un coup de froid sur le
marché européen ne sera pas sans
effet, compte tenu de son impor-
tance sur l’échiquier commercial
mondial. L’an dernier, le ralentis-
sement des échanges est venu
principalement de l’Europe et
l’Asie, qui représentent respective-
ment 37 % et 35 % des importa-
tions mondiales. Après avoir enre-
gistré un record en 2017, le
commerce a décéléré en Asie. De
son côté, l’Europe a vu ses exporta-
tions stagner tandis que les impor-
tations ont diminué. À noter, en re-
Prévisions
3
2,6 2,6 2,6
2018 2019 2020
Infographie
vanche, l’exception nord-
américaine, où la dynamique
économique a contribué à une forte
croissance des importations.
Les États-Unis, la Chine et l’Al-
lemagne, trio de tête du commerce
mondial, couvrent plus du quart
des échanges de biens et de servi-
ces. C’est dire si les tractations
commerciales qui se jouent à
Washington, Pékin et Bruxelles
sont importantes. L’UE entend
mettre en garde, la semaine pro-
chaine lors d’une réunion du G20
finance, contre les dangers du pro-
tectionnisme et l’urgence d’une
réforme de l’OMC. ■

L’euro est la clé de la souveraineté, plaide la Banque de France

Dans sa lettre annuelle au président de la République, le gouverneur dresse le bilan des 20 premières années.

JEAN-PIERRE ROBIN jprobin@lefigaro.fr

MONNAIE Depuis la nationalisation
de la Banque de France en 1945, cela
fait partie de « la tradition républi-
caine », comme l’a rappelé mardi
François Villeroy de Galhau, son
gouverneur. À chaque printemps,
celui-ci adresse sa « Lettre au prési-
dent de la République ». Un tel dia-
logue au sommet rassurera ou irri-
tera - selon la sensibilité de chacun -
en ces temps de « grand débat » où
François Villeroy toutes les paroles se valent !
de Galhau, gouverneur «Les acquis et les défis de l’euro
de la Banque vingt ans après sa création »: le thè-
de France. me choisi pour la lettre 2019 coule
S. SORIANO/LE FIGARO de source et on y apprend des tas de
choses que l’on croyait connaître de
façon plus ou moins nette.
Ainsi depuis l’émergence de
l’euro, l’inflation a été en moyenne
de 1,4 % l’an, alors que son taux an-
nuel s’était établi à 5,1 % sur les
vingt années 1979-1998 en France
Cette désinflation n’est pas toujours
bien perçue, regrette la Banque de
France, qui donne cet exemple. La
baguette de pain valait en moyenne
4,40 francs (67 centimes d’euro) en
2001, juste avant l’introduction des
pièces et des billets en euro, et il fal-
lait payer 0,90 euro, fin 2018 ; soit
une hausse de 1,6 % l’an entre 2002
et 2018. Le prix de la baguette n’a
donc pas flambé ! Le corollaire di-
rect de la stabilité des prix sur
vingt ans est le reflux des taux d’in-
térêt que tout un chacun constate,
pour s’en féliciter en tant qu’em-
prunteur et s’en plaindre comme
épargnant. Grâce à la faiblesse des
taux, « la France (l’État) économise
ainsi chaque année au moins 35 mil-
liards d’euros sur la charge de sa
dette (publique) soit l’équivalent du
budget de la défense », peut lire Em-
manuel Macron dans la lettre qui lui
est adressée.
Le revers des taux bradés
Mais la médaille a son revers, et la
Banque de France ne l’élude pas, se
demandant si ces taux bradés ne
constitueraient pas « des facilités
excessives, au détriment de notre
compétitivité et de nos finances pu-
bliques ». La dégradation de l’une et
des autres chez nous est l’un des
faits marquants de ces vingt années
de monnaie unique, qui ont coïnci-
dé avec deux crises financières ma-
jeures: Wall Street 2008 et celle de
la zone euro à partir de 2010, et jus-
qu’en 2015, sauvetage de la Grèce.
Certes, les choses vont un peu
mieux depuis, notamment en France
qui a vu « la création de 780 000 em-
plois en net sur trois ans ». Mais cela
ne saurait en rien occulter la persis-
tance d’« un chômage structurel
beaucoup trop élevé à près de 9 % (de
la population active) » souligne avec
tact le gouverneur qui ne se prend
pas pour le Commandeur.
En tant que grand argentier et
loin de tout satisfecit, il définit trois
grands défis pour l’euro. Tout
d’abord un approfondissement de
l’union bancaire, qui implique
d’avoir « plus de banques paneuro-
péennes transfrontalières ». Le se-
cond objectif vise « la prospérité et
une croissance mieux répartie » en-
tre les États membres. Et, last but not
least, il faut accroître le rôle inter-
national de l’euro « qui favoriserait
la protection de nos entreprises
contre les risques de change ou de
contentieux judiciaire extraterrito-
rial ». Un enjeu essentiel de souve-
raineté pour l’Europe face aux im-
périalismes chinois et américain. Un
vrai débat pour les européennes. ■

L’Italie priée par Bruxelles et l’OCDE de changer de politique

Les deux institutions redoutent les effets négatifs du revenu citoyen et de l’avancée de l’âge de la retraite.
rencontre : « Alors que nous pen- elle critique vivement dans son vers les travailleurs touchant des

« légèrement
VALÉRIE SEGOND £@ValSegond
Je suis ROME
préoccupé ZONE EURO Embourbé dans une
que récession qui s’installe, le gouver-
nement italien est sous le feu des
l’économie critiques, de l’OCDE après celles
italienne du FMI, de la Banque d’Italie et de
continue la Confindustria (le patronat). Mais
aussi sous la pression amicale mais
à régresser ferme de l’Europe pour qu’elle
et espère que s’attaque à sa dette publique.
les autorités « Je suis légèrement préoccupé
que l’économie italienne continue à
feront régresser et espère que les autorités
des efforts feront des efforts supplémentaires
supplémen- pour soutenir la croissance », a ainsi
dit mardi le président de la Com-
taires pour mission européenne, Jean-Claude
soutenir la Juncker, à la sortie de sa « rencon-
croissance
JEAN-CLAUDE
» tre cordiale et amicale » avec le
premier ministre Giuseppe Conte.
Le TGV Lyon-Turin et les flux mi-
A
sions que la croissance serait de
l’ordre de 1 %, ce chiffre doit être
revu à la baisse, indique le prési-
dent de la Commission. Vu le poids
de la dette publique, toutes les politi-
ques de relance ne peuvent être que
limitées. » D’où la nécessité d’«ef-
forts supplémentaires » sans pour
autant évoquer publiquement un
« budget rectificatif », qui ne sera
évoqué qu’après les européennes.
Divisions à Rome
Car Rome ne veut pas en entendre
parler même si le ministre de
l’Économie, Giovanni Tria, devrait
présenter dans les prochains jours
un nouveau document budgétaire
bâti sur une croissance à peine su-
périeure à zéro. Pour éviter l’exer-
cice de correction, Giuseppe Conte
a choisi d’évoquer « un ralentisse-
ment conjoncturel, reconnu par les
- 0,2%
C’est la contraction
du PIB italien prévue
cette année par l’OCDE
tra de maintenir stable notre déficit
structurel ». Et tente de retourner
le problème à l’Europe : pour
contrecarrer le ralentissement
mondial que toute la zone euro af-
fronte, a-t-il dit à Jean-Claude
Juncker, « il faudrait que les États
membres ayant une marge de
manœuvre budgétaire l’utilisent
afin de réduire les déséquilibres éco-
nomiques au sein de la zone euro ».
Si l’OCDE reconnaît que la
panne de croissance italienne est
rapport sur l’Italie les deux mesu-
res phares du gouvernement qui
plombent sa croissance poten-
tielle. Un vrai risque dans un pays
à l’arrêt depuis vingt ans, où le re-
venu par habitant est encore en
dessous de son niveau de 2000. La
retraite anticipée à 62 ans ? « Elle
ralentira la croissance à moyen ter-
me, réduira l’emploi des seniors,
fera croître les inégalités intergéné-
rationnelles et augmentera la dette
publique », dit l’OCDE. Car son
coût cumulé d’ici à 2025 s’élève-
rait, selon ses calculs, à pas moins
de 40 milliards. Aussi, préconise-
t-elle son abrogation.
Le revenu citoyen ? Si l’objectif
de réduire la pauvreté est bien
compris, l’OCDE dénonce ce sou-
tien au travail au noir, qui de sur-
croît piège les pauvres, sans tenir
compte de l’écart nord-sud. Elle
revenus bas.
Une analyse qui a conduit
l’OCDE à anticiper une récession
de 0,2 % pour 2019 et une crois-
sance de seulement 0,5 % en 2020,
ce qui fait de l’Italie l’homme ma-
lade de l’Europe. Avec un déficit
public beaucoup plus élevé que les
2,04 % annoncés : 2,5 % du PIB en
2019. À ce rythme, la dette publi-
que s’élèverait à 134 % du PIB cette
année et 135 % l’année prochaine.
Une attaque très mal vécue par
Rome qui estime que l’OCDE sous-
estime les effets bénéfiques de ses
deux réformes sur la consomma-
tion. Sans compter le plan en fa-
veur de la croissance, fait d’incita-
tions fiscales à l’investissement et
de simplification administrative
qui devrait être présenté en
Conseil des ministres dans les pro-
chains jours. Si la Ligue et le Mou-

JUNCKER, PRÉSIDENT
DE LA COMMISSION gratoires ont été abordés mais c’est règles européennes comme un fac- en partie due au ralentissement recommande sa réduction de 30 à vement 5 étoiles parviennent à se
EUROPÉENNE l’économie qui était au cœur de la teur transitoire et qui nous permet- mondial et notamment allemand, 40 %, en orientant les économies mettre d’accord… ■
 2008-2018, 10 années de
forte création de valeur

DANS UN UNIVERS DES RISQUES EN ÉVOLUTION,

SCOR GÉNÈRE DES PERFORMANCES DE TOUT PREMIER PLAN

Alors que l’univers des risques ne cesse de s’étendre et de se complexifier, SCOR repousse
les frontières de l’assurabilité en investissant en permanence dans la compréhension et la
modélisation des risques. Nous sommes fiers de contribuer à la résilience des sociétés en aidant
les assurés à surmonter les nombreuses catastrophes et les nombreux risques auxquels ils sont
confrontés. La capacité démontrée de SCOR à créer de la valeur, tout en absorbant les chocs,
repose sur une appétence au risque contrôlée, un fonds de commerce solide, une forte
diversification et une protection efficace du capital.
Poursuivant sans relâche une stratégie ambitieuse, le Groupe jouit d’un fort potentiel
de croissance rentable et de création de valeur à long terme en tant que réassureur
mondial indépendant de premier rang.
Denis Kessler, Président-Directeur général

UNE CROISSANCE UNE PRÉSENCE

FORTE
5,8
EUR 15,3 GLOBALE 43% aux Amériques
EUR milliards
de Primes brutes
Primes brutes
émises en 38% en Europe, au Moyen-
Orient et en Afrique
milliards
de Primes brutes
émises en 2008
émises en 2018
2018 19% en Asie-Pacifique

UN BILAN SOLIDE UNE SOLIDITÉ FINANCIÈRE

EUR 44,4 DE PREMIER PLAN
AA-
EUR 25,5
milliards en 2008
milliards en 2018
A- Notation S&P en 2018

Notation S&P en 2008

UNE CRÉATION DE VALEUR UN RENDEMENT POUR

SUR LE LONG TERME
EUR 7,5
LES ACTIONNAIRES
TRÈS ÉLEVÉ + 301%
EUR 3,0 milliards de sur 10 ans*
milliards de Capitalisation boursière
Capitalisation boursière en 2018 *
Rendement global pour les actionnaires,
en 2008 dividendes réinvestis, du 31 décembre 2008 au 31 décembre 2018

UN DIVIDENDE QUI A PLUS

QUE DOUBLÉ UN RETOUR EUR 3,0
EUR 0,80
EUR 1,75 DU CAPITAL
TRÈS ÉLEVÉ
milliards de
capitaux restitués
en 2018* aux actionnaires
en 2008 *
Sous réserve de l’approbation par
depuis 2008
l’Assemblée Générale Annuelle du 26 avril 2019.

Plus de
UN ALIGNEMENT
DES INTÉRÊTS ENTRE
COLLABORATEURS
12,6% *
du capital de SCOR a été
DES
INVESTISSEMENTS 87%
ET ACTIONNAIRES
distribué aux collaborateurs
depuis 2005, sans dilution
RESPONSABLES du portefeuille d’actifs
de SCOR sont gérés en
pour les actionnaires conformité avec les
critères ESG

www.scor.com L’Assemblée générale mixte 2019 de SCOR se tiendra le 26 avril 2019. Les informations concernant cette
Assemblée sont disponibles sur le site de SCOR à https://www.scor.com/fr/assemblee-generale-mixte.
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

22 L'ÉVÉNEMENT
Les nouvelles générations plébiscitent les en
Pour attirer et retenir les jeunes diplômés et les talents, les sociétés doivent porter des valeurs et donner du
CORINNE CAILLAUD
£@corinnecaillaud
ENTREPRISE Branle-bas de com-
bat dans le 17e palmarès des entre-
prises où il fait bon travailler en
vie (13 %) et favoriser le dévelop- tude qui dispense des formations sation. « Les jeunes ont besoin est volatil, la notion d’utilité et de
pement durable social et environ- dans des grands groupes et des ETI d’être engagés. Dans un environ- contribution individuelle et collecti-
nemental (12 %) sont d’ailleurs les confrontées à des problématiques nement qui évolue en permanence, ve prend plus de place », confirme
principaux éléments qui contri- de transformation de leur organi- où l’incertitude est grande, où tout Anne Lebel, DRH de Natixis.
buent à donner du sens au travail
selon cette enquête. « La rémuné-
ration n’est plus le driver principal

NOUVELLE DONNE
Le Figaro publie,
dans un cahier à part,
le 17e classement des
entreprises où il fait bon
France. Le profil des sociétés lau-
réates cette année n’a plus grand-
chose à voir avec celles qu’on y
trouvait il y a moins d’une décen-
nie. Ainsi les filiales tricolores de
Microsoft, Volkswagen Group ou
encore Abbott figuraient encore
en 2010 dans le top 10 des entre-
prises de 500 à 5 000 salariés plé-
biscitées. Mais trimer aujourd’hui
dans un groupe qui compte parmi
les leaders de son secteur ne suffit
plus à attirer les talents et encore
moins à les retenir. « Les collabo-
rateurs recherchent quelque chose
de plus profond », souligne Xavier
Fontanet, l’ancien PDG d’Essilor
dans la préface du livre de Fabien-
35%
des jeunes. Si leur travail ne les
épanouit pas, ils sont prêts à démis-
sionner, ce qui aujourd’hui est
beaucoup mieux admis par l’envi-
ronnement », relève Manuelle Ma-
lot, directrice du NewGen Talent
Centre de l’école de commerce.
Si les diplômés étaient prêts à des étudiants
souhaitent
temporiser cinq ans pour attein-
dre leur but professionnel il y a un
quart de siècle, l’impatience est
l’apanage des générations Y et Z créer leur
qui ne veulent pas attendre. Moins
de six ans après la fin de leurs étu-
entreprise
des, 48 % des jeunes de moins de (sondage Viavoice
30 ans ont quitté leur premier
de novembre 2017)
poste - dans lequel ils sont en
moyenne restés 22,5 mois.

travailler. Ce palmarès
distingue les entreprises
françaises de toutes
tailles engagées
dans des démarches
de transformation
et qui se démarquent
par la qualité
des environnements
et des conditions de
travail qu’elles offrent.
ne Alamelou-Michaille, savam-
ment intitulé Manager avec son
âme, la méthode des grands diri-
geants pour mettre l’humain au
cœur du travail.
Une quête de sens particulière-
ment prégnante chez les jeunes
générations qui accordent aussi
une grande importance à leur
équilibre entre vies professionnel-
le et privée. Leur premier objec-
tif ? Acquérir de nouvelles com-
pétences et se développer
personnellement, selon une étude
de l’Edhec Business School réali-
sée en juin 2018. L’épanouisse-
ment personnel (45 %), gagner sa
48%
Valeurs humanistes
Certains n’hésitent pas à partir
d’un grand groupe pour rejoindre
une structure plus modeste mais
davantage en phase avec leurs va- des jeunes
leurs. Ou alors pour créer leur ont déjà quitté, à moins
propre structure. « C’est une vraie de 30 ans, leur premier
tendance de fond : ces jeunes ne se poste en entreprise
mettent pas de barrière. Ce qui (enquête Edhec
compte, c’est l’aventure, l’autono- de juin 2018)
mie et l’engagement de la mission.
Cette génération s’est assignée
pour tâche de transformer un mo-
dèle en train de s’essouffler et qui
arrive à bout », pointe Lucie Pas-
cutto, fondatrice de Mindful Atti-

3
L’avis du prof : L’avis du patron :
Manuelle
Malot
■ Directrice des activités
Carrières de l’Edhec
« Les générations Y et Z
veulent gagner leur vie
LE TOP DES OBJECTIFS
DE CARRIÈRE DES JEUNES (EDHEC, JUIN 2018)
Jean-Marc
Borello
■ Patron du groupe SOS,
numéro 1 de l’économie sociale
Business School mais pas à n’importe èAcquérir de nouvelles compétences
et solidaire en Europe (18 000
■ A créé et dirigé salariés, 1 milliard d’euros
le NewGen Talent Centre quel prix. Aujourd’hui, et se développer personnellement (48 %) de chiffre d’affaires…)
de l’Edhec, un centre le décisionnaire du lien èAvoir de la diversité dans les missions (17 %) ■ À reçu 260 candidatures sur
d’études sur les jeunes son dernier poste à pourvoir,
générations contractuel n’est plus èAvoir des perspectives internationales dont 80 % de grandes écoles
■ A intégré l’Edhec en 1988 l’entreprise, mais le jeune » et une stabilité professionnelle (14 %) ■ A publié « L’entreprise doit
changer le monde »

Les grands groupes traditionnels contraints de s’adapter Ces start-up qui

SERVICE ENTREPRISES
Pendant des décennies, rien n’était
plus enviable, pour les diplômés des
grandes écoles, que de débuter chez
L’Oréal, Procter & Gamble (P&G)
ou LVMH pour les passionnés de
marketing, dans les banques ou les
cabinets de conseil pour les finan-
ciers, ou chez Airbus pour les ingé-
nieurs. Cette époque est révolue.
Désormais, ces grandes entreprises
doivent se démener pour attirer les
talents. Au sortir de HEC, de l’X, de
Centrale, les jeunes ne rêvent plus
de faire carrière dans une multina-
tionale ; ils veulent, sinon monter
leur start-up ou œuvrer dans l’hu-
manitaire, du moins trouver du
sens à leur travail.
Fini donc, les discours unique-
ment axés sur la rentabilité. Dans
les colonnes du Figaro en février,
Jean-Paul Agon, le PDG de L’Oréal,
faisait la promotion de l’action de
son groupe pour le développement
durable, l’éthique et l’égalité hom-
mes-femmes (avec par exemple un
congé paternité étendu à six semai-
nes). « Cela motive et fidélise nos col-
laborateurs, cela nous permet d’atti-
rer les meilleurs candidats »,
assurait-il.
« Pour recruter, il ne suffit plus de
publier l’offre d’emploi et d’attendre.
Nous devons aller chercher les ta-
lents pour les nouveaux métiers du
numérique », admet Mikaël Butter-
bach, directeur emploi, formation
et gestion des compétences d’Air-
bus. L’entreprise est ainsi sponsor
de l’équipe féminine d’e-sport
« Out of the Blue », organise des
réunions d’information pour les
blogueurs, influenceurs, instagra-
A
nation en 2018 de la première fem-
me CTO (directeur des technolo-
gies) de l’aéronautique.
Même effort au cabinet d’audit et
de conseil EY, qui recrute 2 500 per-
sonnes par an. « Des collaborateurs
exposent à l’extérieur le vécu dans
l’entreprise, et les candidats posent
beaucoup de questions sur la flexibili-
té, le travail à distance », confie la
DRH France Audrey Deconclois. Le
concurrent KPMG valorise sa fonda-
tion, qui encourage les salariés à
s’impliquer dans le volontariat au
profit d’étudiants et de personnes
fragiles. Un classique pour les grands
groupes, qui communiquent à tout-
va sur leurs actions sociales. LVMH
promeut son opération « Une jour-
née pour soi » à destination des fem-
mes précaires, menée avec le Se-
cours populaire. Et a signé la charte
des Nations unies contre la discrimi-
nation des personnes LGBTI.
Le développement durable est un
autre thème porteur. « Nous venons
d’acheter une entreprise de
construction de charpente en bois.
Nous sponsorisons un master biodi-
versité à la Sorbonne », détaille
Franck Gauthier, DRH de la bran-
che construction d’Eiffage. Vinci,
de son côté, se pose la question de
continuer à fournir des automates
dans les mines de lignite, fortement
émettrices de CO2. Les banques
soulignent, elles, l’arrêt du finance-
ment des énergies fossiles.
Mais, vu l’image détériorée de la
finance, attirer et garder des jeunes
est particulièrement ardu dans ce
secteur. Certains établissements évi-
tent d’indiquer qu’ils recherchent
un trader, préférant la mention
« opérateur de marché », moins sul-
fureuse. « Les banques font attention
ciers complexes, qui renvoient aux
subprimes », ajoute Thierry Iochem
chez eFinancialcareers, un site
d’emploi.
Atouts mis en avant
Face à la concurrence des associa-
tions et des start-up, les grandes
entreprises ont des atouts. « Nos
marques portent du sens et nous
avons une organisation décentrali-
sée, qui permet d’exercer tôt des res-
ponsabilités, souligne Chantal
Gaemperle, directeur ressources
humaines et synergies de LVMH.
Notre force, c’est aussi la transmis-
sion : chez LVMH, les jeunes peuvent
apprendre auprès de salariés expéri-
mentés. » Ce qui est peu le cas dans
les start-up.
Télétravail, organisation du travail
plus souple, équipes fonctionnant
par projets : la plupart des grands
groupes ont revu leur management
pour coller aux nouvelles aspira-
tions, et ne plus être doublés par les
start-up. Certains misent sur l’ac-
tionnariat. « Tous nos collaborateurs
ont des actions gratuites au bout d’un
an et les salariés sont le premier ac-
tionnaire, avec 13 % du capital, préci-
se Sophie Letierce, DRH du promo-
teur Kaufman & Broad. Cela laisse
plus de liberté pour développer des
projets de développement durable,
même s’ils ne sont pas rentables à
court terme. »
La communication envers le
grand public est aussi un outil. Dans
sa dernière campagne de pub,
Gillette (P&G), dénonce le sexisme
et les préjugés. « Nous avons choisi
de prendre le contre-pied de certains
comportements, explique Muriel
Picat, DRH de P&G France et
Benelux. C’est un moyen de parler
aux potentielles recrues, comme à
nos consommateurs. » ■
ELSA BEMBARON £@elsabembaron
Les start-up sont, par définition,
des entreprises en pointe de l’in-
novation et la révolution culturelle
en cours ne leur a pas échappé.
Elles en sont même, pour certai-
nes, à l’origine. C’est dans ce vaste
terreau des jeunes entreprises in-
novantes que sont apparus un
grand nombre de projets sociale-
ment responsables. Sans comple-
xe, elles se sont attaquées à tous les
défis, depuis ceux de l’inclusion
numérique, en passant par la for-
mation, l’alimentation, la gestion
énergétique, le transport… Tout un
Les entreprises ont écosystème se construit aujour-
revu leur management d’hui autour de ces entreprises qui
pour attirer et garder ont choisi de s’attaquer à des sujets
les jeunes talents. de société.
PHOVOIR/AUREMAR/ Fait marquant, ce sont souvent
STOCK.ADOBE.COM des femmes qui sont à la tête de ces
entreprises. C’est le cas de
Konexio, fondée par deux femmes,
qui propose des formations au nu-
mérique en ciblant plutôt les im-
migrants et les personnes en diffi-
culté pour les aider à s’intégrer et à
trouver du travail. Avec l’appui de
mécènes et de bénévoles, elles ont
contribué à la formation de
200 personnes.
La quête de sens est à la fois la
raison d’être de ces start-up et un
argument clef pour recruter et fi-
déliser leurs salariés. Yann Lechel-
le, directeur opérationnel de Snips,
qui développe un assistant vocal
respectueux de la vie privée, en fait
l’expérience tous les jours : « Nous
employons 78 personnes. Toutes re-
çoivent des propositions de Google
ou Facebook qui leur permettraient
de doubler leur salaire, quintupler

meurs… Pour attirer les femmes, à bannir de leurs annonces les mots ti- leurs revenus avec les stock-options.
l’industriel met en avant la nomi- trisation ou le nom de produits finan- Mais Snips leur offre un projet qui a

treprises engagées
sens à leurs actions.
Rien d’étonnant donc à ce que
nombre d’entreprises s’interro-
gent désormais sur le sens à don-
ner à leur action au-delà de la per-
41%
des étudiants
préfèrent, pour leur premier
emploi, choisir une entreprise
ayant une bonne ambiance, devant
des qualités humaines (33 %),
une qualité de formation (29 %)
et une bonne rémunération (28 %)
Quelle que soit sa forme
juridique, l’entreprise
a compris qu’elle avait
une responsabilité sociétale,
environnementale
et participe désormais,
à côté de l’État, à la recherche
de l’intérêt général » et qualités pro fessionnelles
misent sur l’innovation responsable
du sens avec, pour objectif premier,
le respect de la vie privée. »
Une des difficultés de ces entre-
prises est d’allier la responsabilité
sociale et la rentabilité, pour pou-
voir offrir des salaires décents et
attirer des talents. L’idéologie seu-
le ne suffit pas. Comerso a fait de la
lutte contre le gaspillage alimen-
taire et du recyclage son modèle de
développement : elle se rémunère
sur les économies qu’elle fait réali-
ser à ses clients entreprises, à qui
elle « redonne de l’éthique ».
L’investissement aussi
La start-up agenaise peut espérer
marcher dans les pas de l’améri-
cain Rubicon, aussi spécialisé dans
le recyclage et première start-up
socialement responsable à être en-
trée dans le club des licornes (avec
une valorisation supérieure à un
milliard de dollars). « Aujourd’hui,
il y a un marché pour ces entrepri-
ses. Ce n’était pas encore le cas il y a
une dizaine d’années », note un ex-
pert du secteur. Les consomma-
teurs cherchent eux aussi à privi-
légier des entreprises socialement
responsables.
formance économique. Mais ces
aspirations en désarçonnent plus
d’une et les DRH ne savent pas
toujours donner les clés à leurs
managers pour y répondre. « Le
rôle du leadership est précisément
de montrer le rôle social de l’entre-
prise et construire cette conscience
du collectif. Nous devons préparer
nos leaders à être des guides capa-
bles de mobiliser et d’expliquer ce
sens, plutôt que d’être des contrô-
leurs et des organisateurs du temps
de travail. Il faut mettre en place
des organisations qui valorisent le
travail collectif », jure Anne Lebel.
Ce qui est clair aujourd’hui,
c’est que pour attirer et retenir les
talents, les actions des sociétés
doivent être en adéquation avec
leurs discours. « Elles doivent à la
fois avoir une vision et une ambition
claire du projet d’entreprise et por-
ter des valeurs humanistes en ce
sens », assure Olivier Derrien, di-
recteur général du développeur de
logiciels Salesforce France, qui se
classe en tête du classement Great
Place to Work pour la seconde an-
née consécutive. C’est en ce sens
que, chez Salesforce, chaque col-
laborateur peut se mettre au ser-
vice d’une association pendant
LIGHTPOET/STOCK.ADOBE.COM
sept jours maximum en étant
payés par l’entreprise. « En 2017,
ce sont 15 000 heures qui ont été
données et l’an dernier 23 000,
pointe Olivier Derrien. La perfor-
mance de l’entreprise intègre cette
valeur dans ses indicateurs et c’est
aussi pour ça que les jeunes diplô-
més viennent chez nous. » ■
3
LE TOP
DE MANAGEMENT DES JEUNES (EDHEC, JUIN 2018)
DES ATTENTES
èReconnaissance des performances
et du mérite
èHonnêteté et transparence des règles
qui régissent la vie des entreprises
èDéveloppement des compétences
Mais pour grandir, ces entrepre-
1
neurs ne veulent pas faire comme
les autres. Elles sont souvent plus
exigeantes sur l’origine et les moti-
vations des investisseurs. À l’image
d’une jeune startuppeuse qui, pour
le moment, ferme les portes de son milliard
entreprise aux banques américai-
nes par conviction personnelle. Un
d’euros
défi que les fonds ont bien identifié, Montant atteint
en développant l’investissement fin 2018 en France
socialement responsable (IRS), par les fonds IRS,
c’est-à-dire « conciliant perfor- qui concilient
mance économique et impact social performance
et environnemental ». économique
Les fonds IRS pesaient un peu
et impact social et
environnemental
plus d’un milliard d’euros en
France fin 2018, selon une étude
de l’Association française de ges-
tion financière (AFG). Des labels
ont été créés par le ministère de
l’Écologie pour permettre aux
épargnants de les identifier.
« Nous sommes en train de lever un
fonds à impact social », explique
Nicolas Celier, cofondateur de
Ring Capital, qui a déjà identifié
une demi-douzaine de start-up
françaises qui répondraient à ces
critères, tout en ayant un modèle
économique viable. ■
Entre numérique et écologie, les jeunes
diplômés ont trouvé le bon compromis
LOUIS HEIDSIECK £@louisheidsieck
Les étudiants sont tiraillés. Ils
veulent à la fois lutter contre
l’exclusion sociale et travailler
dans le numérique. Ou rallier la
cause écologique en bénéficiant
de reconnaissance dans le monde
du travail. Pour répondre à cette
équation aux inconnues multi-
ples, beaucoup ont trouvé une
solution : l’entrepreneuriat so-
cial. D’après l’enquête dévoilée
début 2019 par Convergences,
groupe de réflexion dédié au dé-
veloppement durable et à la lutte
contre la pauvreté, 43 % des 18-
24 ans sont en effet attirés par
cette nouvelle forme d’engage-
ment. Un chiffre en augmenta-
tion de… 11 points en un an.
« Avant, l’engagement dans le
social était cantonné aux associa-
tions, jugées trop peu dynamiques
voire trop “gentilles” par nos
diplômés », explique Manuelle
Malot, directrice Carrières et
prospective à l’Edhec Business
School. Aujourd’hui, le milieu est
devenu « sexy », d’après Thi-
bault Larose, le directeur exécutif
de Convergences, avec l’appari-
tion d’une prise de conscience
écologique forte, marquée no-
tamment par Le Manifeste pour
un réveil écologique publié en oc-
tobre 2018 par des étudiants de
grandes écoles et les manifesta-
tions pour le climat des lycéens et
étudiants cette année.
Ce thème du développement
durable est en effet porteur : il est
à la fois attrayant pour les jeunes
L’avis du recruteur :
Isabelle
Bastide
■ Directrice France
de PageGroup, spécialisé
dans le recrutement et
l’intérim (700 consultants)
■ 4 marques : Page
Executive, Michael Page,
Page Personnel et Page
Outsourcing
■ A publié « Le
Recrutement réinventé »
La seconde jeunesse du secteur
de la notation environnementale et sociale
C’est quoi une entreprise sociale-
ment responsable ? Les agences
de notation sociale et gouverne-
mentale, dites de notation « ex-
trafinancière », ont commencé à
fleurir dans les années 2000. Elles
sont une dizaine à se partager ce
domaine, dont Ethifinance et
Vigeo Eiris en France. Générale-
ment, les notations ne sont pas
rendues publiques. Ethifinance
publie néanmoins un top 20 de
son « indice Gaïa », lui-même
constitué de 70 entreprises de
tailles intermédiaires, sans don-
ner plus d’explications sur le
classement.
Des start-up ont récemment
commencé à se positionner sur ce
marché. C’est ainsi le cas de Mo-
ralscore, fondée en janvier 2019
par Rafi Haladjian, un serial en-
trepreneur de la tech française. La
jeune pousse établit un « classe-
ment moral des entreprises », fon-
dé notamment sur l’analyse des
données disponibles (publica-
tions des entreprises, rapport
L'ÉVÉNEMENT
et rassurant pour les investis-
seurs, qui prennent de moins en
moins ceux qui veulent s’y lancer
pour de doux rêveurs. « Depuis un
ou deux ans, il n’y a pas un matin
sans qu’on ait une création de
start-up dans le développement
durable d’un diplômé de l’Edhec ! »
assure Manuelle Malot. Autre élé-
ment clé qui attire les étudiants,
“ L’entrepreneuriat
social est quasiment
devenu une mode
FÉLIX DE MONTS (VENDREDI)
” des emplois partagés entre en-
l’avènement du numérique, qui
« a conféré une image plus nova-
trice à ces entreprises sociales »,
selon Thibault Larose. De fait,
69 % des entrepreneurs sociaux
associent aujourd’hui le numéri-
que à l’entrepreneuriat social.
Côté business, ces jeunes di-
plômés délaissent donc les asso-
ciations à but non lucratif au
profit de ces « start-up for
good », comme on les appelle.
« On a réfléchi à créer une asso-
ciation, reconnaît Marguerite
Dorangeon, diplômée d’AgroPa-
risTech et cofondatrice de Cloth-
parency, qui aide à choisir des
vêtements écoresponsables.
Mais on a préféré monétiser notre
idée, pour créer de la valeur, de
l’emploi et une entreprise viable
qui ne dépende pas de subven-
tions. » Comme 78 % des entre-
preneurs sociaux qui tirent
moins de la moitié de leurs reve-
nus des recettes de leur activité,
« Les actifs sont dans une quête
de sens plus grande,
à la recherche d’un projet
enrichissant et d’un
environnement de travail agréable.
Les plus jeunes sont prêts
à s’investir, mais pas au détriment
de leur vie personnelle
d’ONG…) et des entretiens.
« Nous avons un principe de bien-
veillance, au départ », souligne
Rafi Haladjian.
La particularité de son service
est d’offrir aux utilisateurs la
possibilité de le personnaliser, en
fonction d’une dizaine de critè-
res liés à la fiscalité, l’emploi, le
respect de la vie privée ou encore
les prix. À ce tronc commun
s’ajoutent les particularités du
domaine d’activité. Moralscore
commence modestement, avec
six secteurs clés (smartphones,
livraison de repas à domicile,
achat de tech en ligne…). Un
septième, Burger/Fast Food, sera
ajouté mi-avril.
Le modèle Yuka
À chaque fois, cinq entreprises
sont passées au crible : quatre
leaders du secteur et un nouvel
entrant. Pour chaque note attri-
buée, la start-up donne quelques
lignes d’explications. Selon Mo-
ralscore par exemple, pour « se
LE FIGARO mercredi 3 avril 2019
23
la jeune femme ne s’est pas versé
de salaire lors de sa première an-
née d’activité, et vient juste de
trouver son modèle économique.
Outre ces difficultés financiè-
res, un autre frein au développe-
ment concerne 19 % des entre-
preneurs sociaux : le manque de
reconnaissance. « J’ai vu une
vraie transformation sur la per-
ception des entrepreneurs sociaux
ces dernières années, nuance tou-
tefois Félix de Monts, diplômé de
Sciences Po et fondateur de Ven-
dredi, plate-forme qui propose
treprise et association. En 2014,
lorsque je me suis lancé alors que
j’étais étudiant, le concept de
start-up sociale était méconnu
alors que l’univers de la start-up
était déjà bien implanté. J’avais du
mal à expliquer la démarche sans
paraître idéaliste. Depuis, l’entre-
preneuriat social est quasiment
devenu une mode ! »
Quoi qu’il arrive, cette nouvel-
le vague fait déjà bouger les lignes
dans certaines écoles. À HEC, la
directrice de la chaire « social
business », Bénédicte Faivre-
Tavignot, explique qu’elle va
créer « un nouveau certificat à va-
lider obligatoirement pour les étu-
diants en année de césure, avec des
thèmes basés sur l’économie et le
développement durable ». Des
cours obligatoires sur le climat
vont également faire leur appari-
tion. Quant à l’Edhec, un certifi-
cat en innovation sociale a égale-
ment été lancé en 2017 pour
« favoriser le développement dura-
ble, social et environnemental ». ■
EDHEC, J.-C. MARMARA/LE FIGARO, PAGE GROUP
»
faire conduire », mieux vaut pri-
vilégier G7 à… Uber. Le service de
Rafi Haladjian épingle le VTCisite
américain pour sa politique de
rémunération et son action socia-
le et environnementale, quand
40 % de la flotte G7 est hybride.
Moralscore n’est certes pas le
premier système de notation
« éthique », mais il est gratuit et
surtout à destination du grand
public. Rafi Haladjian réfléchit au
moyen de monétiser son offre,
éventuellement via un service
premium. En cela il s’inspire di-
rectement de Yuka, l’application
mobile qui évalue la qualité des
aliments et leur impact sur la
santé.
Yuka, qui est une sorte d’agen-
ce de notation des produits de
grande consommation, se finance
grâce à une version payante et un
programme de nutrition. Elle se
targue de surcroît de ne pas ex-
ploiter les données de ses utilisa-
teurs, ni de les revendre et de ne
pas faire de publicité. ■ E. B.
A
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

24 ÉCONOMIE

Prime Macron : les patrons ont répondu

présents pour apaiser le climat social
En janvier, 12 % des entreprises avaient versé une prime exceptionnelle de pouvoir d’achat défiscalisée.
ANNE DE GUIGNÉ £@adeguigne
POLITIQUE ÉCONOMIQUE Les
chefs d’entreprise avaient jusqu’à
la fin de la semaine dernière pour
verser la prime Macron à leurs sa-
lariés. Cette prime exceptionnelle,
entièrement défiscalisée et exoné-
rée de contributions et cotisations
sociales, jusqu’à 1 000 euros, visait
à donner un coup de pouce aux sa-
lariés gagnant jusqu’à trois smic.
Elle faisait partie de l’arsenal de
mesures en faveur du pouvoir
d’achat annoncé par le président
le 10 décembre afin de répondre à
la crise des « gilets jaunes ».
salariés) ont distribué la grati-
fication.
Dans un contexte, début dé-
La prime Macron cembre, de grande inquiétude sur
a été versée à plus
la cohésion sociale du pays, et de
de 2 millions de salariés
par plus de vive violence, nombre de patrons
200 000 sociétés se sont mobilisés afin de tenter
pour un montant total d’apporter une réponse au mou-
de plus de 1 milliard vement de contestation, alors
d’euros distribué. massivement soutenu par la po-
STOCK.ADOBE.COM pulation. « Les 230 salariés du
groupe ont tous reçu une prime de
300 euros, qu’ils travaillent dans
des filiales profitables ou déficitai-
res, témoigne ainsi Éric Lenoir,
directeur général d’une PME in-
dustrielle de mobilier urbain de la
Vienne, Seri. En temps normal,
donner un euro aux salariés en
coûte deux. Nous avons donc voulu
profiter de cette occasion pas très
chère de redistribuer de l’argent.
Nous avons aussi estimé qu’il était
de notre responsabilité de chef
d’entreprise de participer à ce
mouvement de répartition des ri-
chesses », appuie l’industriel.
Logiquement, la prime a été
prioritairement versée aux
ouvriers, professions intermédiai-
res et employés. Le secteur de la
construction remporte pour l’ins-
tant la palme de la générosité. 15 %
des employeurs, dont Bouygues,
Vinci, GCC ou encore l’ETI du
Nord Ramery se sont engagés et
18 % des salariés ont bénéficié de
la prime. Les entreprises de servi-
ces se sont montrées plus frileu-
ses.
Plusieurs patrons ont déjà ex-
primé leur volonté de renouveler
l’exercice en 2020 si le gouver-
nement maintenait la mesure. Un
groupe de députés LR, dont Oli-
vier Dassault *, élu de l’Oise, a
avancé dans cette direction à tra-
vers sa proposition de loi (du
22 mars 2019) sur la pérennisation
de la mesure. L’exécutif attend de
connaître l’intégralité des résul-
tats - ce qui devrait encore de-
mander un mois - pour se pro-

“ En temps normal,
donner un euro aux
salariés en coûte deux.
Nous avons donc voulu
profiter de cette
occasion pas très chère
de redistribuer
de l’argent
”
ÉRIC LENOIR, DIRECTEUR GÉNÉRAL
D’UNE PME INDUSTRIELLE DE MOBILIER
URBAIN DE LA VIENNE, SERI
Les résultats provisoires indi-
quent que de nombreuses entre-
prises ont répondu présentes. En
décembre et janvier, cette prime a
été versée à plus de 2 millions de
salariés par plus de 200 000 socié-
tés pour un montant total de plus
d’un milliard d’euros distribué, se
félicitait le gouvernement il y a
une dizaine de jours. En janvier,
12 % des entreprises avaient noté
dans leur déclaration sociale no-
minative (DSN) avoir versé cette
prime. Son montant moyen s’élè-
Les hôtes et hôtesses de Sofinord ont perçu une prime de 150 euros
ve à 449 euros, 10 % des salariés
ont même reçu l’enveloppe maxi-
mum de 1 000 euros.
Dans le détail, la totalité des
groupes du CAC 40 a versé la pri-
me. Dès l’annonce d’Emmanuel
Macron, les géants aux marques
bien connues du grand public
comme Total, Orange, SFR ou
Publicis se sont précipités pour
« mettre
Je voulais
communiquer sur leur bonne vo-
lonté. Selon les dernières données
de l’Insee, un tiers des grandes
entreprises (plus de 5 000 salariés
et plus de 2 milliards d’euros de
bilan) a versé la prime. Moins
visibles médiatiquement, les PME
ont également répondu à l’appel
du président : 40 % des entre-
prises qui ont participé comptent
ainsi moins de 50 salariés, a insis-
té le gouvernement. L’Insee pré-
cise que 13 % des PME et 11 % des
micro-entreprises (moins de dix
La prime Macron n’a pas séduit
uniquement des groupes indus-
triels. L’ETI spécialisée dans
l’accueil et la sécurité, Sofinord,
a également joué le jeu. Au total,
11 200 collaborateurs sur les
18 000 que compte ce groupe de
services en France (26 000 dans
le monde) ont reçu avec leur
en valeur paie de février une prime d’un
les plus bas peu plus de 100 euros.
Les salariés percevant une ré-
salaires munération brute annuelle infé-
en signe de rieure ou égale à 33 600 euros
reconnais- dans les métiers d’accueil ont
sance »
PATRICK THÉLOT,
touché 150 euros. Ceux payés
moins de 35 000 euros dans les
métiers de la sûreté aérienne et
FONDATEUR la sécurité privée ont perçu
ET DIRIGEANT
DE SOFINORD
120 euros.
« L’arbitrage s’explique facile-
ment, détaille le fondateur et di-
rigeant du groupe, Patrick Thé-
Patrick Thélot, fondateur et PDG
de Sofinord. PETER ALLAN
lot. Nous avons voulu davantage
valoriser les métiers d’accueil qui
sont moins bien payés. L’entre-
prise doit avoir un rôle social. Je
voulais mettre en valeur les plus
bas salaires en signe de recon-
naissance. » Dans les métiers de
l’accueil, qui représentent le
gros des troupes de Sofinord, les
salaires évoluent entre 1650 et
3000 euros brut, « une prime de
150 euros n’est pas neutre à ce ni-
veau de salaires. Elle a été très
appréciée des collaborateurs et
syndicats », rapporte le patron.
Il s’est très rapidement décidé
en décembre après le discours du
président à participer au disposi-
tif. « Les avantages sont multiples,
avance Patrick Thélot. L’effet est
bien sûr positif sur l’image du
groupe. Avoir accordé cette prime
a aussi été très apprécié des
noncer officiellement.
Côté syndical, on observe avec
circonspection une telle proposi-
tion. Pour Inès Minin, de la CFDT,
le bilan de la mesure est en effet
mitigé. « Nous avons vu des choses
intéressantes quand les entreprises,
comme Thales, ont mis en place des
barèmes de prime en fonction des
revenus des salariés, note la secré-
taire nationale en charge des
questions de rémunération du
syndicat. En revanche, cela n’a pas
encouragé le dialogue social. Beau-
coup de décisions ont été prises de
manière unilatérale et les entrepri-
ses qui se sont mobilisées ne sont
pas forcément celles qui ont le plus
d’enjeux autour de leurs rémunéra-
tions », regrette-elle. ■
* Le groupe Dassault est propriétaire
du Figaro.
clients, qui sont attentifs à la paix
sociale des collaborateurs qui vien-
nent travailler chez eux. Enfin,
cette mesure a donné de la cohé-
sion à l’ensemble du groupe. »
Effort de 1,3 million
d’euros
Le versement de ces primes a re-
présenté un effort de 1,3 million
d’euros pour le groupe familial
détenu à 100 % par Patrick Thé-
lot. Lequel avait généré un chif-
fre d’affaires de 950 millions
d’euros en 2018, dont la moitié
en France.
Si le gouvernement renouvelle
la mesure de défiscalisation l’an-
née prochaine et si les profits de
l’entreprise sont solides, le diri-
geant assure qu’il étudiera « très
favorablement » une nouvelle
distribution de prime. ■ A.G.

L’avocat de Carlos Ghosn redoute un procès inéquitable

Le défenseur de l’ex-PDG réclame qu’il ne soit pas jugé en même temps que Nissan.
ses anciens employés pour avoir avec lequel ils travaillent de le papier, un accusé, mais, en réali- cureur et par Nissan, de mèche, ne

« sur
Nissan est,
le
RÉGIS ARNAUD £@regisarnaud
TOKYO

AUTOMOBILE Le principal avocat

papier, de Carlos Ghosn en appelle aux
un accusé, fondements du droit. Tandis que
son client continue d’essuyer, par
mais, en journaux interposés, un déluge
réalité, il a d’accusations au Japon et désor-
pris depuis mais en France, Junichiro Hiro-
naka a pris l’opinion publique à
le début
le parti des
témoin mardi en convoquant
« d’urgence » une conférence de
procureurs »
JUNICHIRO HIRONAKA,
presse à Tokyo. Motif : les condi-
tions d’un procès équitable de son
client ne sont pas réunies, selon
AVOCAT
DE CARLOS GHOSN lui.
Le défenseur a dénoncé la pré-
sence sur le même banc des accu-
sés au procès qui s’annonce de
Carlos Ghosn, son ancien bras
droit Greg Kelly, et de leur ancien
employeur Nissan. Le construc-
A
« couvert » leur prétendue dissi-
mulation de revenus. Or, fait va-
loir le défenseur de Carlos Ghosn,
Nissan est aussi, d’une certaine
manière, son accusateur : les diri-
geants actuels du groupe ont en
effet averti le procureur de Tokyo,
L’ex-PDG conteste les soupçons de Renault
La direction de Renault a transmis
vendredi plusieurs éléments au
parquet de Nanterre. Ce dernier
doit désormais décider de mener,
ou non, des investigations plus
poussées ; celles-ci se feraient
également dans le cadre
de la procédure d’entraide
internationale qu’aurait
concert depuis le début de l’ins-
truction, débusquant les pièces à
charge, invitant les collaborateurs
de l’Alliance concernés par l’af-
faire à collaborer avec l’accusa-
tion. Deux cadres de Nissan ont
plaidé coupable. « Nissan est, sur
de Tokyo qui poursuit Carlos
Ghosn. Des flux financiers jugés
suspects sont particulièrement
visés. Il s’agit de sommes versées
par Nissan et Renault à une
société partenaire des deux
constructeurs, basée à Oman.
Cette société aurait financé, via
une entreprise libanaise, l’achat
té, il a pris depuis le début le parti
des procureurs, a insisté Me Hiro-
naka. Ceci est extrêmement rare. »
Calendrier incertain
Junichiro Hironaka craint que le
juge soit conditionné par le pro-
aurait également financé
la start-up du fils de Carlos Ghosn.
« Aucune somme versée par
Renault aux distributeurs d’Oman
n’a été détournée de ses objectifs
commerciaux et en aucun cas
tout ou partie de cette somme
n’a profité à Carlos Ghosn
ou à sa famille », a réagi un
lui laissant plus aucune chance
d’innocenter son client. Il exige,
sans succès pour l’instant, que les
juges et les procédures soient dis-
tincts pour les trois protagonistes
de l’affaire. Dans l’état actuel de la
procédure Hiroto Saikawa, direc-
teur général de Nissan, pourrait se
trouver au procès physiquement à
côté de Carlos Ghosn, l’homme
qui fit sa gloire et à la chute duquel
il contribue désormais.
Pendant ce temps, la procédure
suit son cours. Junichiro Hironaka
a indiqué avoir déjà reçu une
partie des pièces relatives à la
charge de dissimulation de reve-
nus et dans lesquelles il assure ne
voir « rien de compromettant ». Il
craint désormais que le procès ait
lieu plus tard qu’anticipé, après
septembre, et s’étire sur au moins

teur automobile est, en effet, traî- enclenchée le bureau du procureur d’un yacht. Selon Les Échos, elle porte-parole de Carlos Ghosn. un an. Carlos Ghosn n’est pas au
né au tribunal en solidarité avec bout de ses peines. ■
 LE FIGARO mercredi 3 avril 2019

ENTREPRISES 25

Airbus défend les conditions de départ de Tom Enders

Selon Proxinvest, le président exécutif d’Airbus quittera le groupe avec un package de 36,8 millions d’euros.
VÉRONIQUE GUILLERMARD
£@vguillermard
AÉRONAUTIQUE Pas de parachute
doré, mais des indemnités de départ
- approuvées par le conseil d’admi-
MARMARA/LE FIGARO
somme globale de 36,8 millions
d’euros. Un montant qui peut cho-
quer, dans un pays où le mouve-
ment des « gilets jaunes », avec ses
slogans pour l’amélioration du pou-
voir d’achat, ne désarme pas depuis
mi-novembre. Cette somme est en
2019, des actions liées à la perfor-
mance du groupe, dont Tom Enders
a acquis des droits entre 2014
et 2017, lui seront attribuées. Elles
étaient bloquées pendant cinq ans. Il
pourra donc les recevoir entre 2019
et 2022. La valeur théorique de ces
« qu’Airbus étant une société de droit
néerlandais, elle n’applique pas le
code Afep-Medef ». De même, Air-
bus n’est pas tenu d’organiser un
vote consultatif du package de dé-
part de Tom Enders, comme une
société de droit français. De son
cepte la rémunération faramineuse
de certains footballeurs, tel Neymar,
qui empoche 3,4 millions d’euros
par mois.L’an dernier, Tom Enders
a gagné 3,7 millions d’euros, dont
1,5 million de salaire de base. Cer-
tains patrons défraient la chronique

nistration - qui s’appliquent à tous
les présidents futurs et à venir
d’Airbus. Le géant européen de
l’aéronautique défend les condi-
tions de départ de Tom Enders, qui
quitte la présidence exécutive
Tom Enders quitte d’Airbus, le 10 avril 2019, à l’issue de
la présidence du groupe l’assemblée générale (AG) des ac-
le 10 avril. tionnaires. Airbus a dû s’expliquer
après la publication par le journal Le
Monde de la dernière étude du cabi-
+ » Lire aussi
PAGE 17
« Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais
net Proxinvest. Ce dernier a calculé
que Tom Enders allait partir avec la
réalité un montant théorique, issu
de l’addition de trois rémunérations
formant les indemnités de départ
du patron de nationalité allemande.
En clair, une clause de non-concu-
rrence, le produit de cession d’ac-
tions et sa retraite mensuelle versée
« jusqu’à sa mort ».
Tom Enders percevra une clause
de non-concurrence de 3,2 mil-
lions, sur une période de 12 mois, à
raison de 266 000 euros par mois à
partir de son départ. À partir de
actions oscille entre 5 et 10 millions,
car elle dépend du cours de Bourse.
Enfin, Tom Enders percevra une re-
traite mensuelle, calculée en fonc-
tion du droit allemand. Elle repré-
sentera 60 % de son salaire de base,
soit 900 000 euros par an. Airbus a
provisionné une somme sur vingt
ans qui prend en compte l’espéran-
ce de vie d’un homme allemand,
soit 80 ans. Mais si Tom Enders dis-
paraît avant, cette rente n’est plus
versée. Interrogé, le Medef rappelle
côté, Bruno Le Maire a estimé dans
Les Echos que cette indemnité « peut
porter atteinte à la réputation d’Air-
bus ». Le ministre de l’Économie
souhaite que la règle française puis-
se s’appliquer au niveau européen.
Cours multiplié par quatre
Au-delà, c’est à nouveau la question
du niveau « acceptable » par le
corps social de la rémunération des
patrons qui revient sur la table. Cela,
alors que ce même corps social ac-
en empochant un pactole alors
qu’ils laissent leur entreprise en
mauvais état. Thierry Pilenko est
parti avec 14 millions, alors que
Technip FMC est en pertes. « Une
prime à l’échec », selon le Medef.
Dans le cas d’Airbus, c’est différent.
Le groupe a gagné plus de 3 milliards
d’euros en 2018, pour un chiffre
d’affaires de 67 milliards. Pendant le
mandat de Tom Enders à la prési-
dence exécutive, le cours de Bourse
a quadruplé. ■

Air France
se renforce aux
États-Unis grâce à
sa puissante alliance
La compagnie ouvre une ligne à Dallas. Le marché
américain est son premier gisement de bénéfices.
et coûts. En 2018, la coentreprise a
VALÉRIE COLLET £@V_Collet réalisé 12 milliards de dollars de
DALLAS
chiffre d’affaires, à partager entre
ses différents partenaires. « Notre
TRANSPORT Les ballons bleu, JV Transatlantique représente 20 % Un avion d’Air France atterrit sur l’aéroport international de Logan, à Boston. NEAL HAMBERG/BLOOMBERG NEWS
blanc, rouge assemblés en torsa- du chiffre d’affaires d’Air France-
des devant la porte de sortie de
l’aéroport de Dallas jouent sur les
KLM », rappelle Anne Rigail. Pour
la seule compagnie Air France, la
pagnies formé autour de Lufthan-
sa et United Airlines (27 %). Le
et Chennai… grâce au partenariat
avec Jet Airways. » La compagnie EN BREF
deux tableaux : France et USA. Les contribution grimpe à 35 %. troisième tandem, formé par Bri- indienne, en difficulté, a été repri-
trois couleurs célèbrent l’arrivée Outre-Atlantique, les équipes tish Airways et American Airlines se en main par les banques.
d’Air France dans la ville texane, commerciales et les personnels (Oneworld), détient, lui, 21 % du « Cela n’a aucun impact sur notre
KERING CÈDE ENFIN
qui rassemble des grands noms de d’escales travaillent indifférem- marché transatlantique. La force partenariat, affirme Anne Rigail. SA MARQUE VOLCOM
la high-tech, du pétrole et du gaz, ment pour Air France et KLM. de frappe de la JV Transatlantique Avec Jet Airways, le trafic continue £ Après s’être séparé de Puma,
et de l’industrie pharmaceutique. réside dans son réseau de plus de à progresser de manière rentable. » Kering achève sa sortie du sport
À l’occasion de la saison d’été, qui Virgin Atlantic arrive 270 vols quotidiens entre Europe Il a l’avantage d’être dynamique et son recentrage sur le luxe
démarre le 31 mars dans l’aérien, à la fin de l’année et États-Unis, auquel Virgin ajou- l’hiver, quand Air France compte en cédant Volcom. La marque
Air France ouvre une treizième li- L’ALLIANCE D’ici à la fin de l’année, Virgin At- tera 24 routes. moins de clients. Interrogée sur a réalisé 230 millions d’euros
gne aux États-Unis. Trois fois par TRANSATLANTIQUE lantic, détenu à 31 % par Air Fran- À Dallas, Air France vise en par- les conséquences d’une éventuelle
DELTA, AIR FRANCE KLM, de chiffre d’affaires en 2017.
semaine, Paris est reliée à Dallas ALITALIA ce-KLM et à 49 % par Delta, ticulier la clientèle originaire faillite de Jet sur l’activité d’Air Authentic Brands Group
en A 330. Ce sera cinq fois en juillet ouvrira les portes de Londres et d’Inde, installée dans la métropole France-KLM, Anne Rigail assure

12
(Hervé Léger, Juicy Couture,
et en août. De son côté, sa cousine Manchester à ses alliés. « Grâce à texane et très présente dans les té- que tout sera fait pour éviter que la Aeropostale, Tretorn) acquiert
KLM a ouvert le même jour deux Virgin, nous allons atteindre 25 % lécoms. « Nous avons aménagé des compagnie indienne ferme. Le les droits de propriété
liaisons : Amsterdam-Boston et milliards de dollars du marché transatlantique et nous horaires facilitant les correspon- groupe pourrait-il entrer au capi- intellectuelle de Volcom, et
Amsterdam-Las Vegas. de chiffre d’affaires serons au coude à coude avec Star dances avec les grandes villes in- tal de Jet ? « Ce n’est pas à l’ordre
en 2018
en confie la licence d’exploitation
À Dallas, devant les caméras de Alliance », le groupement de com- diennes : Bangalore, Bombay, Delhi du jour », assure la dirigeante. ■ à l’actuelle direction.
chaînes locales, les dirigeants
d’Air France, de Delta, l’allié amé-
ricain, et de l’aéroport Dallas-Fort 270 L’ORÉAL RENFORCE SES
Worth rappellent qu’Air France
avait exploité la ligne avant de la
stopper il y a dix-huit ans, en plei-
vols quotidiens entre
l’Europe et les États-Unis Air France et KLM travaillent plus ensemble USINES DE PARFUMS
£ Le leader mondial des
cosmétiques investit 15 millions

13
ne crise. « Dallas, pour les Fran-
d’euros dans son usine
çais, c’est bien sûr une série télé cé- Oublié, le psychodrame qui a vu, il de mon arrivée », raconte-t-elle. dont le rayon d’action leur permet
d’Aulnay-sous-Bois
lèbre, mais c’est aussi une très belle y a un mois et demi, les salariés de Vu d’Amsterdam, Air France fait de réaliser des vols long-courriers.
villes américaines (Seine-Saint-Denis). Objectif :
ville, et le Texas est la dixième éco- KLM monter au créneau pour dé- figure de grosse administration, Autres sujets communs à appro-
desservies par Air France la spécialiser dans ses parfums
nomie au monde », souligne Anne fendre leur patron, accusé de refu- plus ou moins pilotée par le gou- fondir : le réseau et ses destinations
haut de gamme, en plein essor.
Rigail, directrice générale d’Air ser de coopérer avec Air France ? vernement français et noyautée de saisonnières, les alliances, comme
L’usine produisait fonds de teint,
France depuis trois mois. L’aéro- En tout, les dirigeants des deux syndicats prompts à lancer des celles avec des compagnies en dif-
soins visage et crèmes solaires.
port texan est en forte croissance, compagnies tentent de raccom- grèves au moindre mécontente- ficultés (Alitalia, Jet Airways), et
mais Air France, prudent, amorce moder leurs équipes. Cristallisée ment… Pourtant, dans leur cadre les achats. « Le niveau de synergies
cette ligne avec un avion de 214 autour du maintien du directeur professionnel, les salariés d’Air entre nos deux compagnies n’est pas LONDRES SOMMÉ
places rénové. général de KLM à la tête de la com- France et de KLM travaillent sans aussi important qu’au sein du grou- DE RÉCUPÉRER LES
Pour Air France, les États-Unis pagnie royale, la bataille s’était aucune friction. pe IAG », observe Anne Rigail.
sont une mine d’or. « Les États- achevée par l’entrée de l’État hol- Au sein de la compagnie tricolo- ARRIÉRÉS D’IMPÔTS
Unis, c’est notre premier marché landais au capital du groupe Air Améliorer les synergies re, les chantiers se multiplient pour £ La Commission européenne
après l’Europe, rappelle la direc- France KLM, au même niveau que Pour approfondir le travail en la rendre plus agile, plus efficace et somme le Royaume-Uni
trice générale d’Air France. La l’État français, afin de garantir la commun et apaiser les tensions, le plus proche des performances de de récupérer des arriérés
part de la clientèle premium (pre- défense des intérêts nationaux. « CEO committee », composé des sa cousine hollandaise. Les coûts d’impôts auprès de certaines
mière, affaires, premium éco) y est Après ce paroxysme, il a fallu faire patrons des deux compagnies, du de structure restent trop élevés. multinationales ayant bénéficié,
plus importante qu’ailleurs. Cette retomber la tension. directeur général du groupe et du Air France doit les réduire en sim- selon elle, d’avantages fiscaux
catégorie représente environ 55 % Pour la première fois, Pieter directeur financier, se réunit une plifiant l’organisation. « Le mode indus sur son territoire.
du chiffre d’affaires aux États- Elbers, directeur général de KLM, fois par semaine. Lorsque tous les de management doit évoluer, estime Bruxelles en a déjà épinglé
Unis. C’est un moteur pour notre est venu au siège d’Air France, à membres ne peuvent pas être pré- la directrice générale d’Air France. plusieurs, dont le géant Apple.
hub de Roissy avec 62 % de passa- Roissy, rencontrer des salariés de sents physiquement, la conférence Le manager devrait davantage être Ce dossier a donné lieu
gers en correspondance depuis ou la compagnie. Il s’est prêté au jeu est téléphonique. Objectif : amélio- un coach que quelqu’un qui aurait la à la récupération par l’Irlande
vers les États-Unis, alors que cette des questions, parfois brut de rer l’efficacité des synergies sur science infuse. » Elle tente de met- de 14,3 milliards d’euros
part est de 50 % globalement. » décoffrage : « Pourquoi vous plusieurs fronts. À commencer par tre en place un mode « collabora- d’arriérés d’impôts.
Air France profite à plein de la n’aimez pas Air France ? » lui a-t- la flotte. L’appel d’offres portant tif » dans les différentes activités.
JV Transatlantique, cette coentre- on demandé. sur l’achat de nouveaux avions Un exemple parmi d’autres : com-
prise créée en 2009 par Air Fran-
ce-KLM, Delta et Alitalia pour
proposer l’offre la plus riche de
Anne Rigail, la patronne d’Air
France, s’est soumise à la même
épreuve au siège de KLM. « J’ai
court et moyen-courriers, attendu
pour la fin de l’année, est repoussé.
Les compagnies vont « élargir la
ment réduire le temps consacré à
replier un toboggan de secours lors
de la maintenance ? Ce n’est pas le
+@ » Les 4 et 5-pièces sont
plus grands à Paris qu’en
Ile-de-France
connexions entre l’Europe et le rappelé qu’Air France avait subi une réflexion » sur la mise en commun chef qui doit apporter la réponse, » EDF devient un concurrent
C

continent nord-américain. Les transformation lourde et perdu de la flotte et tenir compte de l’ar- mais les équipes elles-mêmes. d’Air liquide
compagnies y partagent recettes 100 000 postes depuis 2006, la date rivée d’appareils monocouloirs ■ V. C. www.lefigaro.fr/economie
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

26 ENTREPRISES

Avec Gemalto,
Thales se renforce
dans le numérique
Le « nouveau Thales » pèse 19 milliards d’euros
de chiffre d’affaires, avec 80 000 salariés.
THALES et humaine », a souligné Patrice De gauche à droite : Philippe Vallée, ex-patron de Gemalto, nommé directeur général adjoint, en charge de la
CHIFFRES CLEFS DU GROUPE
VÉRONIQUE GUILLERMARD Caine. division identité et sécurité (DIS) de Thales, Patrice Caine, PDG du groupe, et Philippe Keryer, DGA stratégie et R&T
AVEC GEMALTO £@vguillermard de la nouvelle entité. GILLES ROLLE/REA
L’arrivée de Gemalto est « trans-

19
milliards d’euros
de chiffre d’affaires
TECHNOLOGIES « Une journée his-
torique pour le groupe. » C’est avec
ces mots que Patrice Caine, PDG de
Thales, a annoncé, mardi 2 avril, le
bouclage de l’acquisition de Gemalto,
formante » pour Thales. Le groupe
adopte un profil plus commercial,
avec 60 % de son chiffre d’affaires
réalisés dans le civil et 40 % dans le
militaire, contre un équilibre quasi
parfait entre les deux auparavant.
haut niveau, et autofinance sa R&D
à hauteur de 1 milliard.
« L’acquisition de Gemalto renfor-
ce le profil de Thales en tant que leader
technologique européen. Ensemble,
L’acquisition de Gemalto donne
un coup de booster à l’offensive de
Thales dans le digital, engagée
en 2014. En cinq ans, Thales a in-
vesti 7 milliards pour devenir un
stratégiques : l’aéronautique, le
spatial, le ferroviaire ou encore la
défense et la banque.
Thales est par exemple bien placé
pour profiter de l’essor attendu du

80 000
salariés dans le monde,
dont 28 000
dans la recherche
et le développement
leader de la sécurité numérique et des
cartes à puce, pour 4,8 milliards
d’euros.
Thales change de dimension avec
un chiffre d’affaires cumulé de
nous constituons le leader mondial de
l’identité et de la sécurité numéri-
que », a souligné Patrice Caine. En
leader mondial de l’économie nu-
mérique de confiance. Désormais,
il est leader dans l’identité et la sé-
marché des objets connectés et des
drones. Qu’ils soient civils ou mili-
taires. Il s’agit de milliards, voire de
Ce mouvement stratégique vers plus d’implantations complémen- curité numérique ; l’analyse de dizaines de milliards d’engins à
Gemalto, convoité par Atos, en
décembre 2017, n’aurait pu être en-
gagé et mené à bien « sans le soutien
“ L’acquisition
de Gemalto renforce le
taires à l’international, notamment
aux Amériques et en Asie, « Gemalto
apporte à Thales les technologies de
données massives, l’intelligence
artificielle, la connectivité et la cy-
bersécurité.
identifier et à connecter ainsi que
du développement de solutions
d’insertion dans le trafic routier,

1 de nos actionnaires principaux,

milliard d’euros
investi en recherche
et développement
l’État et le groupe Dassault. Je les en
remercie », a déclaré Patrice Caine.
Le PDG salue aussi l’engagement
des équipes des deux groupes,
qui ont travaillé pendant quinze
mois « de façon acharnée », afin
d’être prêtes le jour J. Désormais,
s’ouvre la page de l’intégration, qui
prendra des années. « C’est le
commencement d’une nouvelle
aventure technologique, industrielle
profil de Thales en tant
que leader technologique
européen
”
PATRICE CAINE, PDG DE THALES
19 milliards (15,9 milliards pour
Thales seul) avec 80 000 salariés et
une formidable force de frappe en
matière d’innovation. Le « nouveau
Thales » emploie 28 000 personnes
en R&D, dont 3 000 chercheurs de
gestion de l’identité des personnes et
des objets (IoT) ainsi que la protection
des données », résume Philippe Val-
lée, ex-patron de Gemalto, nommé
directeur général adjoint, en charge
de la division identité et sécurité
(DIS). Elle intègre Thales e-security,
Guavus, la start-up américaine
pionnière de l’analyse big data, ra-
chetée en avril 2017 et les trois « di-
gital factories » de Paris, Montréal et
Singapour.
En vingt ans, l’électronicien de
défense, qui s’appelait alors Thom-
son-CSF, a opéré sa métamorphose
en un groupe « tech », au sens de la
Silicon Valley. Désormais, il « maî-
trise toutes les technologies qui inter-
viennent dans la chaîne de décision
critique des gouvernements, des en-
treprises et des organisations », dé-
veloppe Philippe Keryer, DGA stra-
tégie et R&T. Cela, avec des
applications dans des industries
maritime, aérien.
Dans ce contexte, l’avenir des
cartes SIM de Gemalto n’est pas
scellé. « Elles sont au cœur du fonde-
ment technologique de l’identité nu-
mérique. Elles ont permis d’aller ver
l’IoT. Nous verrons bien », a expliqué
Patrice Caine. Il rappelle que Thales
est en mouvement. « Nous sommes
manœuvrants », dit-il, en n’ex-
cluant pas d’autres acquisitions
« ciblées ». ■

Findus renouvelle ses recettes pour doper ses ventes

Racheté en 2016 par Nomad Foods, le leader français du surgelé mise sur des innovations plus ciblées.

9,6 %
KEREN LENTSCHNER £@Klentschner
AGROALIMENTAIRE Findus est de
nouveau en ordre de bataille. Alors
La part que le marché du surgelé est en
de marché recul pour la quatrième année de
suite, l’entreprise, numéro un fran-
de Findus çais du secteur, a réalisé 250 mil-
sur le secteur lions d’euros de chiffre d’affaires en
du surgelé France (+ 1,6 %) l’an passé et gagné
en France du terrain (+ 0,2 point, à 9,6 % de
parts de marché). Findus, qui ne
communique pas sa rentabilité, est
également repassé dans le vert. Ra-
cheté il y a trois ans par l’industriel
Nomad Foods (2,2 milliards d’euros
de chiffre d’affaires), puis fusionné
avec son concurrent Iglo, le fabri-
cant de poissons panés Croustibat a
changé. « Après deux années d’inté-
gration et des perturbations liées à la
fusion, nous recueillons les fruits de
nos efforts », déclare Virginie Ha-
bermacher, directrice marketing
de Findus France. Outre le rappro-
chement des systèmes informati-
ques et des changements d’équipes,
les marques ont été fusionnées
autour d’un label unique, Findus.
Plusieurs dizaines de références qui
ne marchaient pas ou doublon-
naient ont été arrêtées. De même
que les références d’Iglo écoulées à
grand renfort de promos.
Findus a dû se mettre aux stan-
dards de sa nouvelle maison mère.
« Nous avons changé de modèle, ré-
sume Virginie Habermacher. Après
avoir lancé dans le passé jusqu’à
38 nouveaux produits par an, nous
avons rationalisé nos innovations en
nous concentrant sur des catégories
prioritaires et misé sur la rénovation
de nos gammes (réduction du taux
de sel, nouveaux conditionne-
ments…). Nous avons aussi travaillé
sur l’excellence d’exécution en ma-
gasins. » Autour de dix nouveautés
seront désormais lancées chaque
année. Priorité aux poissons panés,
aux pommes de terre et aux légu-
mes. Parmi les succès, le lancement
de Fish and Chips, qui a permis de
conquérir des consommateurs (1,5
million de foyers en deux ans) qui
n’allaient pas naturellement dans
ce rayon. Ce produit existait déjà
dans le portefeuille de Nomad
Foods, fabriqué dans son usine an-
glaise de Lowestoft. « Nous
construisons une plateforme trans-
versale afin de travailler ensemble
sur les innovations et les ruptures
technologiques », détaille Virginie
Habermacher.
Coup d’accélérateur
Pour la troisième année de suite,
Croustibat (10,2 % du chiffre
d’affaires de Findus) est de retour
à la croissance (+ 5,6 %) grâce au
déploiement de la marque dans de
nouvelles catégories (nuggets de
poulet, mini rosti…). En parallèle,
Findus a dopé ses investissements
médias grâce à la force de frappe
de sa maison mère. Si Picard reste
de loin le premier annonceur du
secteur (35 millions d’euros brut),
Findus a investi l’an passé 14 mil-
lions d’euros brut. Un coup
d’accélérateur a été mis sur le
digital (27 % des investissements
médias). Le lancement de
Fish and Chips a ainsi été soutenu
par une campagne 100 % en li-
gne, notamment sur YouTube.
Pour poursuivre sur sa lancée,
Findus mise cette année sur des
churros de pomme de terre à
consommer à l’apéro ou en ac-
compagnement. L’entreprise
compte bien réenchanter le rayon
surgelé. ■

LES DÉCIDEURS PAR Carole Bellemare www.lefigaro.fr/decideurs

â LAURENT GUILLOT SMCP : Daniel Lalonde confie Sandro et â JEAN-YVES FONTAINE

Safran
Le DGA de Saint-Gobain et patron des solutions
haute performance de la compagnie va entrer
au conseil de Safran. Ancien collaborateur de
Jean-Claude Gayssot à l’Équipement, il sera
proposé à l’AG du 23 mai comme adminis-
trateur indépendant supplémentaire. Les
mandats d’administrateur du président Ross
McInnes et du DG Philippe Petitcolin devraient
également être renouvelés.
â JEAN-PIERRE GARNIER
Carmat
Comme annoncé, l’AG a ratifié la cooptation de
l’ancien patron de GFK et de Pierre Fabre comme
administrateur, lui permettant d’assurer la prési-
dence du conseil d’administration de la biotech.
Atteint par la limite d’âge, le Pr Alain Carpentier,
développeur du cœur artificiel total le plus avan-
cé au monde, devient président d’honneur.
â JEAN-PAUL GOUDE
Desigual
Le Suisse Thomas Meyer, fondateur de
l’enseigne espagnole, a mis fin au
A
Claudie Pierlot à deux « talents » maison Elior Group
Le directeur général du groupe de
Depuis que Jean-Philippe Hec- crise des « gilets jaunes » en restauration et de services Philippe
quet, le patron de Sandro, France ou de Brexit au Guillemot fait monter un homme de
débauché l’été dernier par le Royaume-Uni. Un impact l’interne et fin connaisseur de la maison
chinois Fosun, est parti diriger évalué à 4 millions d’euros. Si comme directeur général d’Elior France,
Lanvin, Daniel Lalonde assu- la France reste son premier cœur historique du groupe cofondé par
rait lui-même, parallèlement, marché, « la pénétration des Robert Zolade. École hôtelière de Paris et
l’intérim. Alors qu’on pensait marques du groupe y est en MBA de HEC, Jean-Yves Fontaine a rejoint
que le big boss du groupe SMCP Isabelle Allouch prend la tête baisse depuis cinq ans », a Générale de restauration, devenue Elior
(Sandro-Maje-Claudie Pierlot) de Sandro et est remplacée par précisé le PDG. Reste que le Group, en 1983 et a gravi tous les échelons.
se donnait le temps pour recru- Jean-Baptiste Dacquin chez Pierlot. potentiel à l’international Depuis 2006, comme président de Vivaë et de
ter l’oiseau rare à l’extérieur, reste toujours important. sa filiale l’Alsacienne de restauration puis
comme il l’avait fait avec Isabelle Guichot, ex- À Isabelle Allouch (49 ans, Neoma), donc, de d’Ansamble, il a été le maître d’œuvre de
Kering, chez Maje, c’est finalement à Isabelle poursuivre la conquête chez Sandro. Cette l’intégration de ces sociétés au sein du grou-
Allouch, la patronne de Claudie Pierlot, qu’il L’Oréalienne, arrivée de L’Occitane il y a cinq pe, de leur repositionnement stratégique et
confie les clés de Sandro. ans, a su imposer Claudie Pierlot notamment en du redressement de leurs résultats.
La prudence affichée il y a deux semaines par le Asie et au Moyen-Orient et accélérer sa trans-
groupe de prêt-à-porter positionné sur le luxe formation digitale. C’est Jean-Baptiste Dac-
« accessible » ne serait pas étrangère à ce cas- quin, 45 ans, EM Normandie, DRH du groupe,
ting interne pour lequel aurait finalement opté qui lui succède à la tête de Claudie Pierlot. Pas- â SOLENNE LEPAGE
l’actionnaire Topsoho, contrôlé par le chinois sionné de retail et de management, cet ancien Fédération bancaire
Shandong Ruyi. Le conglomérat de Jining, qui de Kiabi (groupe Mulliez) a depuis sept ans, française
totalise 30 000 salariés, une dizaine d’usines de avec le comex, accompagné le développement
confection, 3 000 points de vente et 4 milliards des trois marques à l’international. « J’ai une Elle a à cœur de continuer dans sa
de dollars de chiffre d’affaires, a acquis il y a confiance totale dans la capacité d’Isabelle et de voie. Énarque passée par le ministère
trois ans le groupe SMCP pour 1,3 milliard Jean-Baptiste à continuer de poursuivre les de l’Économie, Solenne Lepage, jusqu’ici char-
d’euros et l’a conduit en Bourse il y a un an. Les magnifiques trajectoires de Sandro et Claudie gée de mission auprès du directeur général de
perspectives dont a fait part le groupe lors de la Pierlot », souligne Daniel Lalonde, qui conti- l’Agence des participations de l’État, arrive à la
publication de résultats 2018 particulièrement nuera à s’appuyer aussi sur l’œil artistique FBF comme directrice générale adjointe. Elle
flatteurs ont déçu les investisseurs. SMCP anti- d’Évelyne Chetrite et Judith Milgrom, les fon- chapeaute les départements banque de détail et

contrat de directeur artistique de cipe une croissance moins forte, pour cause de datrices de Sandro et Maje. C. B. banque à distance ainsi que l’activité numé-
l’artiste français Jean-Paul Goude. rique, systèmes et moyens de paiement.
 LE FIGARO mercredi 3 avril 2019

TECH 27

L’Autriche met en
place sa taxe sur les
géants du numérique
Vienne veut taxer à 5 % le chiffre
d’affaires des Gafa.
des entreprises numériques », se féli-
NICOLAS BAROTTE £@NicolasBarotte cite-t-on à Vienne. Sebastian Kurz
CORRESPONDANT À BERLIN
en avait fait la promesse dès sa cam-
pagne électorale, en 2017. Il l’avait
NUMÉRIQUE Après la France, renouvelée après que l’Union euro-
l’Autriche va décider de taxer les péenne, faute d’unanimité, a
géants du numérique. Après de lon- échoué à s’entendre sur une impo-
gues heures de discussion, la coali- sition à 3 % du chiffre d’affaires des
tion ÖVP-FPÖ (droite-extrême Gafa. « Il est tout simplement juste
droite) menée par le chancelier Se- que les géants d’Internet paient des
bastian Kurz s’est mise d’accord impôts normalement en Europe »,
mardi sur un projet de loi qui sera avait-il déclaré en décembre au Des représentants de start-up françaises et européennes se sont réunis au Théâtre des Variétés, mardi à Paris, pour échanger, en direct
soumis mercredi au Conseil des mi- Tiroler Tageszeitung. L’Autriche est et en simultané, avec les candidats aux élections au sujet de l’Europe, du numérique et de l’innovation. FRANCE DIGITALE
nistres. La nouvelle taxe numérique allée plus loin que les ambitions de
entrera en vigueur en 2020. l’UE. « Espérons que cette question

Les start-up veulent peser

Si les discussions entre les parte- de justice prévaudra bientôt dans les
naires de gouvernement ont traîné capitales d’Europe et que nous pour-
en longueur, un accord a été trouvé rons parler d’une seule voix au mon-
pour fixer à 5 % du chiffre d’affaires de extérieur », avait aussi déclaré en

sur les élections européennes

le montant de l’impôt, qui sera perçu décembre le ministre des Finances
sur les revenus liés à la publicité des autrichien, Hartwig Löger. La taxe
entreprises telles que Google, Ama- Google de Vienne ne devrait pas
zon, Facebook ou Apple, qui réali- concerner d’entreprises autri-
sent plus de 750 millions de chiffre chiennes, selon une appréciation du
d’affaires (dont au moins 25 millions
d’euros en Autriche) mais qui ne
ministère des Finances.
Elles interpellent les candidats sur l’urgence d’un cadre fiscal et légal unifié.
paient quasiment pas d’impôts en L’Allemagne freine
Europe. Avec cette taxe Gafa, Vienne Sans attendre la conclusion des dis-
s’attend à percevoir jusqu’à cussions menées au sein de l’OCDE, Le leitmotiv n’est pas nouveau : Une harmonisation de la fiscalité
200 millions euros de recettes par an. la France, la première, a décidé INGRID VERGARA £Vergara_i face à la concurrence américaine et sur les stock-options - déjà récla-
La somme est symbolique, comparée d’agir. La taxe Google française, chinoise, il faut absolument pouvoir mée en décembre dernier par une
aux quelque 8 milliards d’euros que fixée à 3 % du chiffre d’affaires, a EUROPÉENNES Montrer l’exemple penser l’Union européenne comme centaine de dirigeants emmenés par
rapporte en moyenne l’impôt sur les été adoptée début mars pour une et parler d’une seule voix pour se un seul grand marché afin de per- le fonds Index Ventures - répondrait
sociétés en Autriche. application rétroactive au 1er jan- faire mieux entendre. Pour la pre- mettre aux start-up de la tech de en partie à une autre priorité : avoir
Le projet de loi prévoit aussi d’al- vier. En France, le ministre des mière fois, trente organisations changer d’échelle. L’urgence ? les armes pour attirer et recruter des
louer 15 millions d’euros à un fonds
d’aide aux médias autrichiens. « Le
paysage médiatique est en plein bou-
Finances Bruno Le Maire espère
500 millions d’euros par an.
Contrairement à ses partenaires,
« que
Pendant
les
européennes dans 27 États mem-
bres, se sont unies pour interpeller
les candidats aux élections euro-
Avoir des règles fiscales et légales
harmonisées pour espérer pouvoir
faire jeu égal dans la compétition
talents, un des nerfs de la guerre en-
tre entreprises technologiques au
niveau mondial. Les start-up récla-
leversement », note-t-on au sein du l’Allemagne freine et s’efforce de péennes pour le futur agenda euro- mondiale. « Pendant que les Améri- ment également un « visa européen
gouvernement en considérant que détricoter les projets européens. Le
Américains péen. Objectif : mettre le doigt sur cains courent un 100 mètres, nous, des start-up ». Outre les complexités
les médias traditionnels, sous pres- ministre des Finances Olaf Scholz courent un les handicaps qui empêchent on court un 110 mètres avec administratives et RH des 27 législa-
sion des géants de l’Internet, ne s’inquiète, en effet, des conséquen- 100 mètres, l’Europe de franchir un palier et la 27 haies ! », résume Frédéric Maz- tions du travail disparates, faire ve-
pourront pas surmonter seuls les ces d’une taxation sur les entreprises relèguent loin derrière dans la zella, coprésident de l’association nir un profil d’Amérique ou d’Asie
défis économiques. Troisième pilier nationales qui veulent se développer
nous, compétition mondiale numérique, France Digitale, qui défend les inté- dans un microterritoire a peu de
du projet de loi : une clause de res- dans le secteur du numérique. On on court un malgré un marché potentiel de rêts de 1 400 start-up et 100 inves- sens s’il ne peut espérer évoluer sur
ponsabilité qui obligera à plus de fait aussi remarquer à Berlin, où 110 mètres 500 millions de citoyens. tisseurs en France et en Europe. un plus grand terrain de jeu. L’Euro-
transparence les plateformes Inter- l’excédent budgétaire est la norme À Paris, au Théâtre des Variétés, pe doit aussi favoriser la mobilité des
net qui réalisent du commerce en depuis quelques années, le peu d’in-
avec les PDG de Heetch, de Doctolib, de Créer un « visa européen » talents à l’intérieur du continent en
ligne.
« Le gouvernement fédéral fait un
térêt budgétaire d’une nouvelle
taxe. Enfin, le gouvernement alle-
27 haies
FRÉDÉRIC MAZZELLA,
» Devoteam, de Sandblock ou les
partenaires des fonds Ventech ou
Priorité absolue : avoir un cadre fis-
cal unifié. Les start-up européennes
permettant la portabilité des droits à
la retraite.
premier pas important pour renfor- mand craint d’éventuelles repré- COPRÉSIDENT 360 Capital Partners, ont ainsi pu réclament que la rentabilité d’une Pour faire émerger plus de « li-
cer la contribution fiscale des gran- sailles américaines. ■ DE FRANCE DIGITALE échanger directement pendant près société soit prise en compte au ni- cornes », ces entreprises qui par-
de deux heures avec les candidats veau européen dans la taxation : viennent à franchir le cap du mi-
de cinq partis (LREM, LR, PS, EELV « L’entreprise ne doit être imposée liard d’euros de valorisation,
et La France insoumise) sur les pro- dans aucun pays de l’Union euro- l’Europe a aussi besoin de fonds pa-
blématiques que rencontrent les péenne si elle n’y réalise pas de béné- neuropéens, capables d’investisse-
jeunes entreprises de la tech euro- fices », propose le manifeste. À ments transfrontaliers. « Si les
péenne pour grandir. L’événement l’heure actuelle, une entreprise qui grandes entreprises du XXIe siècle
était répliqué au même moment affiche un déficit à cause d’investis- sont les start-up d’aujourd’hui, se-
dans six capitales européennes, sements dans sa R&D est imposée ront-elles européennes ? À l’ins-
Berlin, Bruxelles, Madrid, Milan, dans chaque État de l’Union où elle tant T, c’est marginalement le cas »,
Sofia et Vienne avec des acteurs de réalise des bénéfices. Ce qui n’est estime Jean-David Chamboredon
la tech et des candidats locaux. évidemment pas le cas pour une de France Digitale. L’équation ac-
Au préalable, ces organisations entreprise américaine dont le siège tuelle se résume en trois chiffres :
européennes, dont les français est dans la Silicon Valley et qui vend avec 23 milliards d’investissement
France Digitale, France Invest et ses produits dans les États de la côte en capital-risque en 2018, l’Europe
Syntec Numérique, leur avaient re- est. Le manifeste propose donc un a atteint un nouveau sommet,
mis un programme de 15 proposi- vrai statut d’entreprise européenne quand celui des États-Unis culmi-
Le chancelier Sebastian Kurz avait fait de cette taxe l’une de ses promesses tions concrètes, regroupées sous le pour remplacer celui créé en 2001 et nait à 130,9 milliards de dollars et la
de campagne en 2017. YVES HERMAN/REUTERS titre « United Tech of Europe ». qui s’est révélé inefficace. Chine à 105 milliards. ■

LA SÉANCE DU MARDI 2 AVRIL

LE CAC JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12 JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12 LES DEVISES MONNAIE 1 EURO=
L’OR JOUR VEILLE 31/12
AUSTRALIE ................................................................................
DOLLAR AUSTRALIEN 1,5817 AUD
ACCOR .............................................. 37,09 +1,62 37,1 36,5 0,312 -0,05 ♣
MICHELIN ..............................................
109,75 +0,41 110,3 107,95 0,333 +26,59 CANADA ................................................................................
DOLLAR CANADIEN 1,4919 CAD
COTATION QUOTIDIENNE ASSURÉE PAR LOOMIS-CPOR
♣
AIR LIQUIDE .................................. 114,1 +0,09 114,5 113,8 0,149 +5,21 ORANGE ..............................................14,605 +0,14 14,645 14,51 0,149 +3,18
www.cpordevises.com
GDE BRETAGNE ................................................................................
LIVRE STERLING 0,86 GBP
AIRBUS .............................................. 117,22 -0,46 118,26 116,76 0,177 +39,61 PERNOD RICARD .................................. 160,8 +1,45 161,5 159,35 0,129 +12,21 HONG KONG ................................................................................
DOLLAR DE HONG KONG 8,7918 HKD
LINGOT DE 1KG ENV .....................................................
37720 37490 +4,81
JAPON ................................................................................
YEN 124,73 JPY
NAPOLEON ..................................................... 223,7 220 +0,9
ARCELORMITTAL SA .................................. 19,32 +1,16 19,51 19,164 0,167 +6,5 PEUGEOT .............................................. 23,03 +1,68 23,1 22,44 0,325 +23,52 PIECE 10 DOL USA .....................................................
640 640 +4,4
ATOS .............................................. 86,3 -1,95 87,36 83,96 0,861 +20,73 ♣ 46,86
PUBLICIS GROUPE SA ............................. +1,85 46,87 46,05 0,485 -6,43 SUISSE ................................................................................
FRANC SUISSE 1,1195 CHF PIECE 10 FLORINS .....................................................
228,5 228,5 +3,86
ETATS-UNIS ................................................................................
DOLLAR 1,12 USD PIECE 20 DOLLARS .....................................................
1219 1220 -0,08
AXA .............................................. 22,965 +1,15 23,09 22,65 0,297 +21,78 RENAULT .............................................. 61,24 +0,97 61,66 60,39 0,269 +12,26
TUNISIE ................................................................................
DINAR TUNISIEN 3,384 TND PIECE 20F TUNISIE .....................................................
213 210 -
BNP PARIBAS ACT.A .................................. 43,905 +0,98 44,315 43,44 0,285 +11,22 SAFRAN .............................................. 122,35 -0,69 123,6 122,35 0,128 +16,08 MAROC ................................................................................
DIHRAM 11,103 MAD PIECE 5 DOL US (H) .....................................................
330 330 +1,54
BOUYGUES ..............................................32,72 +0,28 32,88 32,59 0,173 +4,4 SAINT GOBAIN .................................. 33,535 +0,78 33,615 32,92 0,296 +14,98 TURQUIE ................................................................................
NOUVELLE LIVRE TURQUE 6,2141 TRY PIECE 50 PESOS MEX .....................................................
1409 1409 +3,68
CAPGEMINI ..............................................
108,6 -1,14 109,8 108,2 0,2 +25,12 SANOFI ..............................................79,24 +0,49 79,48 78,55 0,102 +4,73 EGYPTE ................................................................................
LIVRE EGYPTIENNE 19,45 EGP PIECE FR 10 FR (H) .....................................................
121,9 120 -0,65
CARREFOUR ..............................................
16,64 -0,78 16,765 16,61 0,217 +11,6 SCHNEIDER ELECTRIC ............................. 71,68 +1,33 71,68 70,52 0,169 +20,03 CHINE ................................................................................
YUAN 7,5265 CNY PIECE SUISSE 20F .....................................................
218 218 +2,88
PIECE LATINE 20F .....................................................
217 217 +2,36
CREDIT AGRICOLE .................................. 11,165 +0,72 11,21 11,025 0,17 +18,4 SOCIETE GENERALE ♣ ..................................
26,615 +0,34 26,895 26,435 0,341 -4,33 INDE ................................................................................
ROUPIE 77,035 INR SOUVERAIN ..................................................... 279,7 279,7 +4,76
DANONE ..............................................68,5 +0,23 68,74 68,34 0,174 +11,36 SODEXO ..............................................98,94 +0,12 99 98,32 0,13 +10,55 ALGERIE ................................................................................
DINAR ALGERIEN 134,15 DZD KRUGERRAND .....................................................
1228 1235 +2,76
DASSAULT SYSTEMES .................................. 133,3
ENGIE .............................................. 13,35
-0,07 134,1
+0,26 13,425
132,75
13,22
0,072
0,19
+28,54
+6,59
STMICROELECTRONICS .............................
TECHNIPFMC ..................................21,6
14,105 +2,73
+0,75
14,155
21,88
13,7
21,36
0,521
0
+12,98
+22,38
SICAV ET FCP
VALEURS LIQUIDATIVES EN EUROS (OU EN DEVISES), HORS FRAIS
ESSILORLUXOTTICA .................................. 96,84 -0,37 97,62 96,84 0,306 -12,32 TOTAL .............................................. 49,98 -0,04 50,17 49,855 0,171 +8,23 VALEUR DATE DE
Cybèle Asset Management
HERMES INTL ..................................600 +0,44 600 595 0,046 +23,76 UNIBAIL-RODAMCO-WE ............................. 149,85 +0,91 150,35 148,2 0,344 +10,67
RETROUVEZ
LIQUID. VALORISAT.
37 av. des Champs-Elysées
42 rue d’Anjou, 75008 Paris
KERING ..............................................526,4 +0,82 527 520 0,15 +27,89 VALEO .............................................. 28,24 +2,8 28,56 27,09 2,023 +10,7 75008 Paris
Tél. : 01 55 27 94 94
Tel. : 01 56 43 62 50
www.palatine.fr
L'OREAL ..............................................
238,6 -0,75 241,3 238,3 0,072 +18,59 VEOLIA ENVIRON. .................................. 20,03 +0,05 20,14 19,99 0,197 +11,56 BETELGEUSE ................................................
47,24 29/03/19
LEGRAND ..............................................60,48 +0,57 60,48 60,02 0,138 +22,68 VINCI♣.............................................. 88 +0,57 88 87,38 0,198 +22,19 SICAV BELLATRIX C ................................................
325,77 29/03/19 SITE D’INFORMATIONS EXCLUSIVES
LVMH .............................................. 334,5 +0,38 334,6 331,75 0,13 +29,55 VIVENDI ..............................................25,79 +0,16 25,84 25,62 0,204 +21,19 UNI HOCHE C ................................................
274,79 29/03/19 SIRIUS ................................................54,09 29/03/19 WWW.WANSQUARE.COM

ATOS VICTIME D’UNE ERREUR D’ÉVALUATION DU BROKER AMÉRICAIN BERENBERG rlaskine@lefigaro.fr

L’action Atos a vécu mardi une journée 60 euros. Ce type de changement de re- des actifs réalisés par les analystes de digitalisation des entreprises a annoncé re, le titre Atos perdait 1,95 % à
boursière pour le moins mouvementée. commandation émanant d’un des bu- Berenberg et alerte l’Autorité des mar- son intention de distribuer aux déten- 86,30 euros. Depuis le début de l’année,
Dès l’ouverture du marché, toutes les reaux d’études les plus influents de Wall chés financiers (AMF). Le bureau d’étu- teurs d’actions Atos 23 % du capital de sa l’action progresse cependant de 21 %.
1

agences de presse ont fait état d’une Street a eu pour effet de faire plonger le des américain avait oublié de tenir comp- filiale à l’issue de l’assemblée générale du Après la publication, fin février, de résul-
note émise par le bureau d’études améri- cours de 4,5 % dans la matinée, avec un te de la participation de 27,3 % que le 30 avril. À aucun moment, il n’a été ques- tats 2018 très satisfaisants, le groupe a
cain Berenberg, dans laquelle ses analys- plus bas de 83,96 euros. groupe conservera dans le capital de tion de se séparer de tous les titres. Be- confirmé ses objectifs pour 2019 : une
tes indiquent être passés à « la vente » À la mi-journée, changement de dé- Worldline, sa filiale spécialisée dans les renberg a reconnu son erreur et a retiré marge opérationnelle située entre 11,5 %
A

sur la valeur, avec un objectif de cours cor : le groupe Atos décèle une erreur solutions de paiement. sa note en indiquant que le titre Atos et 12 % et un flux de trésorerie de l’ordre
drastiquement revu à la baisse de 90 à grossière dans les calculs d’évaluation Fin mars, le numéro un français de la était « en cours de révision ». À la clôtu- d’un milliard d’euros. ■
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

28 MÉDIAS et PUBLICITÉ
Le marché mondial de la musique en forme
En 2018, les ventes ont bondi de 10 %, à 19 milliards de dollars. Le streaming pèse près de la moitié des revenus.

CAROLINE SALLÉ £@carolinesalle
MUSIQUE L’industrie de la musi-
que enregistrée est-elle au seuil
d’un nouvel âge d’or ? Année après
année, la filière monte un peu plus
le volume. Et le millésime 2018 n’a
pas dérogé à la règle. Pour la qua-
trième année consécutive, le mar-
ché mondial de la musique a affiché
une belle croissance. Les ventes ont
bondi de près de 10 % et atteint
19,1 milliards de dollars de chiffre
d’affaires, selon le dernier rapport
de la Fédération internationale de
l’industrie phonographique (IFPI).
Soit quasiment deux fois la valori-
sation du groupe Accorhotels.
«On se souvient tous des années
précédentes. C’était le festival des
pleurs, nous n’avions que de mauvais
résultats à annoncer. Avec une qua-
trième année de croissance, je pense
que nous pouvons être bien plus opti-
mistes désormais », a déclaré Fran-
ces Moore, la directrice de l’IFPI,
lors de la présentation du rapport
annuel de l’organisation à Londres.
Les raisons d’espérer des lende-
1
radicalement la physionomie de
l’industrie en même temps qu’elle
lui offre un nouveau souffle, après
quinze ans de vaches maigres.
DRAKE 255 millions d’abonnés
En pleine explosion, le streaming a
enregistré une croissance de 34 %,
pour atteindre 8,9 milliards de dol-
En 2018, le groupe lars de chiffre d’affaires. Dans sa
coréen BTS s’est version payante, via les abonne-
classé sur la deuxième ments, et gratuite, financée par la
marche du podium publicité, le streaming représente
des meilleurs artistes, désormais près de la moitié des re-
juste après le rappeur
venus mondiaux (47 %) du secteur.
canadien Drake,
et devant le chanteur À eux seuls, les abonnés payants à
de pop anglaise des services tels Spotify, Apple
Ed Sheeran. Music ou Deezer pèsent déjà 37 %
BURAK CINGI/REDFERNS, du marché. Et ils sont désormais
REUTERS, FABRIZIO BENSCH/ 255 millions à travers le monde.
REUTERS Résultat de ce changement de
paradigme, la filière ne tire plus
qu’un quart de ses revenus des
ventes de CD, segment en régres-
sion de 10 %. La plus forte baisse
revient aux téléchargements de
morceaux de musique, qui chutent
de 21 % et ne comptent plus que
pour 12 % du chiffre d’affaires
mondial.
Si le streaming permet globale-
ment à l’industrie musicale d’éle-
ver à nouveau la voix, tous les ter-
ritoires n’évoluent pas au même
rythme. L’Europe, elle, fait du sur-
place, tandis que l’Amérique du
Nord progresse de 14 %. L’Améri-
que latine, avec une croissance de
16,8 %, demeure le marché le plus
dynamique. La région Asie et Océa-
nie devient quant à elle le second
plus important marché. La Corée
du Sud (+18%) par exemple, est
maintenant le 6e plus gros territoire
de la musique enregistrée dans le
monde, juste devant la Chine. Là-
bas, le potentiel est énorme. « Les
abonnés payants se multiplient grâce
aux efforts de toute l’industrie,
même si nous ne sommes encore qu’à
33 millions d’abonnés, sur une popu-
lation de 1,4 milliard d’habitants »,
explique Andrew Chan, le directeur
général de Sony Music en Chine.
En plus de regonfler les revenus
de la filière, le streaming offre un
autre intérêt. Celui d’abolir les

2
mains qui chantent sont d’autant frontières pour des artistes jadis
plus fondées qu’il s’agit de la hausse cantonnés à leur marché local.
la plus importante depuis 1997, date Meilleur exemple: le groupe de K-
à laquelle l’IFPI a commencé à pu- pop star BTS, qui s’est classé l’an
blier des statistiques mondiales. dernier sur la deuxième marche du

3
La filière n’a certes pas encore podium des meilleurs artistes, juste
atteint le pic de 1999, période où le après le rappeur canadien Drake, et
CD était roi et les revenus culmi- devant le chanteur de pop anglaise
naient à un peu plus de 25 milliards Ed Sheeran. D’après David Erlan-
de dollars. Pourtant, elle pourrait GROUPE dsson, data-analyste chez Spotify,
viser plus haut encore, grâce à la
démocratisation du streaming et
CORÉEN BTS « en 2018, des pays aussi divers que
le Pérou, le Canada, la France ou la
l’essor de plateformes comme Spo- ED Turquie ont tous comptabilisé plus de
tify, Apple Music, Deezer ou Ama- SHEERAN 100 millions de streams de K-pop ».
zon Music. L’écoute de musique en Bienvenue à l’ère de la musique lo-
ligne est en train de reconfigurer cale mondialisée. ■

Binge Audio mise sur le podcast quotidien

Le studio a lancé avec succès son émission d’actualité et va produire celles des « Échos » et du « Parisien ».

1,6
CHLOÉ WOITIER £@W_Chloe
PODCAST Des podcasts produits
pour L’Équipe ou Marie-Claire, des
million projets imminents pour Les Échos et
Le Parisien, sans compter une dizai-
d’écoutes pour les ne de podcasts maison et des pro-
programmes grammes en marque blanche pour
de Binge Audio des annonceurs : la jeune équipe de
en mars Binge Audio croule sous les projets.
« Notre chiffre d’affaires a doublé en
2018, et devrait être multiplié par 2,5
en 2019 », note Gabrielle Boeri-
Charles, directrice générale de ce
studio de podcasts. Fondé en 2016, ce
dernier compte une quinzaine de sa-
lariés, très souvent passés par Radio
France. «Cela s’entend dans la qualité
de nos productions», souligne Joël
Ronez, fondateur de Binge Audio.
L’un des principaux chantiers de
Binge Audio pour 2019 est la pro-
duction d’un podcast quotidien
d’actualité pour Les Échos, qui sor-
tira «avant cet été», selon Nicolas
Barré, directeur de la rédaction du
journal économique. Une autre
quotidienne pour Le Parisien est en
préparation. Des pilotes ont été
tournés pour les deux émissions,
inspirées du Daily du New York Ti-
mes mais avec des angles et des tons
adaptés à chaque ligne éditoriale.
Les deux podcasts seront enregis-
trés au siège du groupe de presse,
qui a acquis 30% de Binge Audio fin
2018.
Si Binge Audio produit des pod-
casts pour les autres médias et pour
les marques (70% de son chiffre
d’affaires en 2019), le studio réalise
aussi ses propres émissions, qui
sont toutes monétisées. En mars,
ces dernières ont atteint 1,6 million
d’écoutes sur les plateformes de po-
dcasts, avec une progression
moyenne de 7% par mois.
Un auditoire jeune
Ces podcasts, souvent centrés sur
les questions sociétales, attirent une
audience âgée à 80% de moins de
35 ans. Le programme le plus popu-
laire est le bimensuel sur la mascu-
linité «Les Couilles sur la table»,
avec plus de 400 000 écoutes en
mars. Mais «Programme B», une
autre quotidienne d’information
lancée en novembre, est en pleine
accélération, avec 200 000 écoutes
le mois dernier. «À ce rythme,
“Programme B” finira par être notre
plus gros podcast», poursuit Ga-
brielle Boeri-Charles. Ce podcast
décrypte en 20 minutes un fait
d’actualité. «On préfère arriver
après tout le monde, mais avec les
bons interlocuteurs et un angle iné-
dit», souligne David Carzon, direc-
teur de la rédaction - Binge Audio
emploie trois journalistes. «Cette
émission prouve qu’il y a un public en
France pour des podcasts quoti-
diens», note la directrice générale.
Le studio est par ailleurs en pour-
parlers avec la BBC et la RTS (audio-
visuel public suisse) pour coprodui-
re des émissions ponctuelles.
Binge voit positivement l’arrivée
de nouvelles plateformes de distri-
bution de podcasts comme Majelan
et Sybel, qui ont besoin de contenus
pour justifier leur volet payant. «Ce
sont des opportunités pour nous. Soit
ils achètent des exclusivités, soit ils
cofinancent des productions pre-
mium», indique Joël Ronez. L’un de
ces nouveaux acteurs a cofinancé
une future série documentaire
audio de Binge autour de la carrière
d’Alain Prost.
Le studio prévoit, par ailleurs,
une diversification originale : la soi-
rée «Binge Audio en scène», pré-
vue le 14 mai au Palais des glaces.
«Ce n’est ni une conférence ni un en-
registrement en public, mais un show
de deux heures autour de nos pro-
grammes», explique Gabrielle Boe-
ri-Charles. Le spectacle, inspiré des
live magazines, pourrait tourner
dans le reste du pays en cas de suc-
cès. Un tiers des places, de 18 à 30
euros pièce, ont déjà été vendues. ■

EN BREF
Mark Zuckerberg veut remettre les médias en valeur CONSULTATION
CITOYENNE SUR
LE SPORT À LA TÉLÉ
Facebook souhaite proposer un onglet dédié aux articles « à forte valeur ajoutée ». £ Le gouvernement a lancé
une « consultation citoyenne »
pour savoir s’il faut renforcer
loppent cet onglet, déjà testé en in- encore beaucoup de détails à régler, me, relève de l’opération de com-

« voire
10 %, 15 %
même
HAROLD GRAND £@haroldgrand

NUMÉRIQUE La scène se déroule

20 % des dans un salon boisé, Mark Zucker-
utilisateurs berg converse avec Mathias
Döpfner - PDG d’Axel Springer, le
de Facebook plus grand groupe de presse euro-
veulent péen - du « journalisme de quali-
lire plus té ». Après une heure d’entretien,
d’actualité
MARK ZUCKERBERG,
» une proposition sort du lot. Le fon-
dateur de Facebook confie vouloir
mettre en place un espace - sous
PDG DE FACEBOOK forme d’onglet - dédié aux infor-
mations « à forte valeur ajoutée et
dignes de confiance » où chaque uti-
lisateur retrouvera des articles, vi-
déos, enquêtes émanant de grands
groupes de presse reconnus.
Selon lui, « 10 %, 15 % voire même
20 % » des utilisateurs de Facebook
veulent lire plus d’actualité. C’est
A
terne et disponible en fin d’année.
Mark Zuckerberg a précisé que cet-
te nouvelle offre nécessiterait une
sélection de l’information publiée,
sans en dévoiler les détails. Selon
CNN, une petite équipe de journa-
listes serait en cours de recrutement
par Facebook pour effectuer ce tra-
vail de curation. De son côté, le fon-
dateur de Facebook a une nouvelle
fois précisé qu’il n’engagerait pas
des journalistes pour écrire des ar-
ticles, rappelant que sa plateforme
n’avait pas un rôle d’éditeur mais
d’hébergeur de contenus.
Concernant la monétisation,
Mark Zuckerberg dit vouloir « en-
tretenir une relation directe avec les
groupes de presse » et n’a pas rejeté
la possibilité de payer une « licence
d’exploitation » aux médias pour
mais je suis optimiste et je pense que
cela pourrait rendre le service plus
durable », a-t-il réagi.
Changements de cap
Pour Facebook, l’idée de rémuné-
rer directement des médias serait
une première. En 2015, la platefor-
me avait lancé les Instant Articles.
Ce format permet aux utilisateurs
de lire des articles tout en restant
dans l’écosystème du réseau social.
En échange, la régie publicitaire de
Facebook se charge du partage des
revenus avec les rédactions parte-
naires. Très vite, une partie des mé-
dias qui publiait sous Instant Arti-
cles ont été déçus par une
monétisation jugée insuffisante.
Plusieurs d’entre eux dont le New
York Times l’avaient abandonné.
munication ou du réel changement
stratégique. Facebook a déjà énor-
mément changé de vision concer-
nant la place des médias sur son fil
d’actualité.
Le 11 janvier 2018, Mark Zucker-
berg avait annoncé vouloir mettre
en valeur les contenus de « pro-
ches » dans le fil d’actualité et dimi-
nuer la présence de marques et de
médias. Son objectif à l’époque ? Re-
venir à la mission première de Face-
book : celle de rapprocher les gens.
Les médias avaient dû s’adapter à ce
changement soudain d’algorithme.
Un an plus tard, il fait demi-tour et
tente un nouveau coup. Reste à sa-
voir comment cet onglet spécifique
dédié à l’actualité pourra se distin-
guer de ses concurrents directs :
l’agrégateur de contenus Google
le nombre de grands
événements sportifs qui
doivent obligatoirement
être diffusés sur une chaîne
gratuite. À ce jour,
21 événements sont ainsi
protégés. La consultation est
ouverte jusqu’au 27 mai.
TENCENT VA LEVER
5 MILLIARDS
DE DOLLARS EN DETTE
£ Selon Bloomberg
et le Financial Times, le groupe
chinois prévoit de lever
5 milliards de dollars
par le biais d’une émission
obligatoire, après des résultats
2018 décevants. Tencent
avait déjà levé par la dette

pour répondre à cette demande que distribuer leurs articles sur son on- Difficile de savoir si cette nouvelle News et le récent kiosque numérique une somme similaire
les équipes du réseau social déve- glet spécial. « Cela fait sens. Il y a annonce, assez inédite dans la for- sur abonnement Apple News +.■ en janvier 2018.
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO - N° 23 214 - Cahier N° 3 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr

Breitling

STYLE VOYAGE
MODE, BEAUTÉ... DESTINATIONS, CONSEILS,
LES INCONTOURNABLES TÉMOIGNAGES :
DE LA SEMAINE LE HANDITOURISME À LA LOUPE
PAGE 34 PAGE 33

Les Clowns, de
Federico Fellini (1971),
ressort en version
restaurée le 10 avril.

Fellini,
à l’infini
BAVARIA FILMS

À la Cinémathèque de Paris, le grand cinéaste est confronté à Picasso autour de thèmes qu’ils chérissent. Et « Le Voyage
de G. Mastorna », son film jamais tourné, est adapté au théâtre. Les grands artistes ne meurent jamais. PAGE 30

Un grand cinéaste peut cacher un critique assassin

LIVRE Avant de passer derrière la caméra, François Truffaut éreintait les films des autres. Aperçu dans un recueil.
Il défend Gance, Guitry, Ophuls,
MORCEAU CHOISI considère Hitchcock comme un
Éric Neuhoff auteur. On trouve dans ces pages sa
eneuhoff@lefigaro.fr célèbre définition du cinéma : « Faire
faire de jolies choses à de jolies fem-
plaudir aux débuts de Vadim, d’en-
censer La Comtesse aux pieds nus, de
porter Fritz Lang au pinacle (« Ne pas
aimer Fritz Lang c’est ne pas le com-
prendre et ne pas le comprendre, c’est
sateurs le priveront d’invitation. La
vérité est sa stratégie. « On connaît
beaucoup trop de monde dans ce milieu,
il faut bien choisir entre la lâcheté et la
muflerie. J’ai choisi la muflerie. » On

C’
est tout lui. À 22 ans,
Truffaut est déjà Truf-
faut. En 1954, Jacques
Laurent lui confie la
rubrique cinéma de
l’hebdomadaire Arts. Il n’a pas dû re-
gretter sa décision. C’est un coup de
tonnerre dans la critique. Truffaut se
taille d’emblée une réputation. Il sait
ce qu’il veut. Ses éreintements lui va-
lent de solides inimitiés. Claude
Autant-Lara, une de ses bêtes noires,
le traite de « jeune voyou du journalis-
me ». Après avoir lu l’article sur ses
Chiens perdus sans collier, Jean Delan-
noy s’étouffe : « Ce que vous avez écrit
est d’une telle bassesse qu’en vingt ans
de métier, je n’ai pas rencontré la pa-
reille. » Si la qualité française déclen-
che chez lui des haussements d’épau-
les, Truffaut sait aussi admirer.
François Truffaut (ici, en 1968) a régné
entre 1954 et 1958 sur la rubrique
cinéma de l’hebdomadaire Arts.
mes. » Il annonce la couleur : « Le film
de demain sera un acte d’amour. » Son
credo est simple : « Un film, pour être
réussi, doit exprimer simultanément une
idée du monde et une idée du cinéma. »
Ses flèches visent juste. Son don de la
formule saute aux yeux. La mauvaise
foi ne lui est pas étrangère. Ce sont des
armes de précision. Quelques échan-
tillons fourniront un aperçu de son ta-
lent. « Le Ballon rouge apparaît donc
comme un film de Minou Drouet à l’usa-
ge de Marie-Chantal », « Dassin est-il
un Saül pleureur ? », « Si l’on se deman-
de à quoi peut ressembler le plus mau-
vais film d’un metteur en scène fort coté
et néanmoins exceptionnellement peu
doué, il faut aller voir Oasis d’Yves Allé-
gret. » On voit qu’il n’y va pas avec le
dos de la cuillère.
Cela ne l’empêche pas de revenir
plusieurs fois sur Lola Montès, d’ap-
ne pas comprendre le cinéma »). Bres- sent qu’il a déjà une idée derrière la
son ne récolte que des éloges. Bizarre- tête. Dès mars 1956, il évoque Jules et
ment, John Ford n’est pas sa tasse de Jim, « un des plus beaux romans mo-
thé : « C’est Saint-Exupéry qui n’aurait dernes que je connaisse ». Il annonce :
pas dépassé la maternelle. » Marilyn « Notre génération sera d’abord celle
Monroe, Kim Novak lui font battre le des metteurs en scène » et « Il est pro-
cœur. Il tord le nez devant La Nuit du bable que j’abandonnerai un jour la cri-
chasseur (plus tard, il reviendra sur tique au profit d’activités plus créatri-
son opinion). Changer d’avis ne le re- ces ». On connaît la suite. Le voyou
bute pas. avait un bel avenir devant lui. ■
Chroniques
La vérité, une stratégie d’« Arts
Bien que signé Autant-Lara, La Tra- Spectacles »
versée de Paris récolte ses suffrages. Sa (1954-1958),
curiosité est sans bornes. Il file à Gallimard.
Bruxelles assister à une projection des Textes réunis
Sentiers de la gloire, alors interdit en par Bernard
France, n’hésite pas à revoir les films Bastide,
plusieurs fois (il en a vu trois mille en 524 p.,
dix ans, à une époque où les DVD 24 €.
n’existaient pas). Le Festival de Cannes
en prend pour son grade. Les organi-
A

RUE DES ARCHIVES/LOUIS MONIER, YOOLA, GALLIMARD, BREITLING

 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO
30 L'ÉVÉNEMENT
Fellini-Picasso : dans les
profondeurs de la création
EXPOSITION La Cinémathèque française organise un dialogue imaginaire autour
de ces deux grands artistes du XXe siècle. En ressort une vitalité visionnaire.
L
MARIE-NOËLLE TRANCHANT
mntranchant@lefigaro.fr
e titre de la nouvelle expo-
sition de la Cinémathèque française,
« Quand Fellini rêvait de Picasso », an-
nonce les couleurs : on va plonger dans
un monde onirique, fantasmatique,
dans les courants de l’inconscient, aux
sources des visions. En mettant en re-
gard l’œuvre de ces deux puissants ar-
tistes du XXe siècle, l’historienne de
l’art Audrey Norcia, commissaire de
l’exposition, instaure entre eux un dia-
logue imaginaire, à partir d’affinités ar-
tistiques qui l’ont frappée.
Si l’on s’en tient aux faits, Federico
Fellini et Pablo Picasso ne se sont jamais
rencontrés. Ils se sont parfois frôlés. En
1953, des amis de Fellini font partie du
comité d’organisation de la grande ex-
position Picasso qui a lieu à Rome – mais
il n’en a pas laissé d’écho. Au Festival de
Cannes, le peintre et le cinéaste man-
queront deux fois l’occasion de se par-
ler : en 1957, Fellini venu présenter Les
Nuits de Cabiria, marche en compagnie
de Georges Simenon, qui aperçoit Picas-
so et veut les présenter l’un à l’autre.
Mais un groupe de paparazzi les empê-
che de se rejoindre. « J’ai tout de même
pu remarquer ses yeux… pénétrants com-
me des lasers », dira Fellini. En 1961, on
voit Fellini montant les marches avec
Giulietta Masina, suivi quelques instants
plus tard par Picasso.
Ces rendez-vous manqués dans la
vie, ont eu lieu sous une autre forme, et
Audrey Norcia ouvre l’exposition sous
le signe de l’inconscient avec les dessins
du Livre des rêves de Fellini. Après La
Dolce Vita, le cinéaste en proie au doute
créateur a consulté un psychanalyste
disciple de Jung, qui lui a suggéré de
dessiner ses rêves. Et Picasso y apparaît
à trois reprises, en 1962, 1967 et 1980.
« Toute la nuit avec Picasso qui me par-
lait, me parlait, me parlait… note Fellini
en 1967. Nous étions très amis, il me té-
moignait beaucoup d’affection, comme
un frère aîné, un père artistique. » Pour
Audrey Norcia, ces visions sont « un
réel encouragement à la création ». Le
visiteur nocturne arrive chaque fois à
un moment où le cinéaste va faire évo-
luer profondément son art avec Huit et
demi (1963), Satyricon (1969), La Cité
des femmes (1980).
Cinq sections structurent l’exposition
qui se veut « un parcours très libre d’as-
sociations, d’images, d’idées, comme
dans les rêves ». « L’Antiquité »,
d’abord, source d’inspiration qui pour
les deux artistes rejoint la modernité.
Des photos de Picasso lors de son voya-
ge à Pompéi en 1917, des dessins comme
L’homme nu contemplant sa compagne
« Le Voyage de G. Mastorna » fait fausse route
Serge Bagdassarian dans Le Voyage
A
de G. Mastorna, au Théâtre
du Vieux-Colombier. V. PONTET/COLL. CF
endormie (1922), avec sa touche de rou-
ge pompéien, ou Femme assise dans son
fauteuil (1922), voisinent avec des cos-
tumes et accessoires du Satyricon, si-
gnés Danilo Donati, des photos de tour-
nages, des extraits de films : bien sûr la
célèbre scène de la fresque antique qui
s’effrite lorsqu’on la met au jour, dans
Fellini-Roma. Ou la parade bacchique
de La Dolce Vita où Anita Ekberg appa-
ÉTIENNE SORIN esorin@lefigaro.fr
Marie Rémond aime monter des pièces à
partir de textes non dramatiques et elle
a bien raison. Le théâtre est un art géné-
reux ; il peut accueillir bien des formes
et des récits. Après André, inspiré de
l’autobiographie d’Andre Agassi,
champion de tennis qui détestait ce
sport dans lequel il excellait, Vers Wan-
da, évocation de l’actrice Barbara
Loden, épouse d’Elia Kazan et réalisa-
trice d’un seul et beau film, Wanda,
c’est après avoir lu l’ouvrage de Greil
Marcus Like a Rolling Stone, Bob Dylan à
la croisée des chemins qu’elle collabore
une première fois en 2015 avec la Comé-
die-Française. Dans le réjouissant Com-
me une pierre qui roule…, Marie Rémond
transforme le Studio-Théâtre en studio
d’enregistrement. En une session,
Dylan compose une chanson culte.
Splendeurs et mystère de la création,
mise en abyme, on retrouve ces grands
thèmes dans Le Voyage de G. Mastorna,
créé au Théâtre du Vieux-Colombier
dans un espace bifrontal qui semble dé-
sormais la règle en ces murs et dont,
raît comme une ménade entraînant la
danse, et où passe fugitivement un fi-
gurant qui rappelle Deux faunes et une
nymphe de Picasso (1938).
Des œuvres peu connues
La section intitulée « Le continent fem-
me » est riche des obsessions du peintre
et du cinéaste devant le corps féminin
exploré comme un paysage, du beau vi-
sage pur de Claudia Cardinale aux fan-
tasmes de la Géante, des Femmes d’Al-
ger d’après Delacroix de Picasso (1955) à
son Nu couché (1967). « Danse et corri-
da » amène notamment la figure du Mi-
notaure, motif typiquement picassien
que Fellini introduira dans Le Satyricon.
Puis on pénètre dans une petite rotonde
dédiée au cirque, thème commun à Pi-
casso et à Fellini qui avait d’ailleurs
souhaité faire tourner le peintre dans
son film Les Clowns (1970). À côté de
belles eaux-fortes, un délicieux petit
dessin de Pierrot tracé aux crayons de
couleur par Picasso rime joliment avec
une aquarelle de Fellini, maquette de
costume pour une Gelsomina enfantine
et touchante. La dernière section, « Les
mythes », s’intéresse aux processus de
création des deux artistes, et croise
leurs modes d’expression ; Fellini évo-
encore une fois, on peine à saisir toute
la justification.
Marie Rémond transpose sur le pla-
teau un scénario jamais tourné de Fede-
rico Fellini. Quand il écrit Le Voyage de
G. Mastorna, Fellini a 45 ans. Il est au
sommet de sa carrière. Il a enchaîné les
succès : Oscar du meilleur film étranger
pour La Strada en 1957, Palme d’or à
Cannes pour La Dolce Vita en 1960, Huit
et demi en 1963… « Le Voyage de G. Mas-
torna est le projet le plus ambitieux, le
plus mystérieux, le plus noir que j’ai ja-
mais tenté de réaliser », répétait Fellini.
Making-of d’un film fantôme
En 1966, le producteur Dino De
Laurentiis lance la construction des
décors, Marcello Mastroianni, choisi
pour le rôle-titre, s’exerce au violon-
celle. Les tensions, les désaccords entre
le réalisateur et son producteur, retar-
dent le début du tournage. Et puis,
Fellini tombe malade. Superstitieux, il
interprète ce mal comme un mauvais
présage et abandonne le projet. La mort
est justement le sujet du Voyage de
G. Mastorna. Ou plutôt, la vie après la
mort, dans une vision laïque. Giuseppe
quant son cinéma-peinture dans Inter-
vista, Picasso à la caméra, tournant son
court-métrage (perdu) La Mort de
Charlotte Corday.
Grâce aux prêts de la Fondation Al-
vene et Bernard Ruiz-Picasso, on dé-
couvre des œuvres peu connues du
peintre. Toiles et dessins, objets, pho-
tos et manuscrits, extraits de films for-
ment un ensemble souple et varié qui
favorise les rapprochements sans être
systématiques. Dans l’esprit de la syn-
chronicité chère à Jung, ce sont des si-
gnes et des coïncidences qui indiquent,
selon Audrey Norcia « une harmonie
entre Picasso et Fellini hors de l’espace et
du temps ». « Ce sont deux étoiles loin-
taines qui s’envoient des clins d’œil »,
renchérit l’historien du cinéma Aldo
Tassone, spécialiste et ami de Fellini
– on lui doit l’édition française du
Voyage de G. Mastorna (lire ci-des-
sous). « Aux yeux de Fellini, dit-il,
Picasso est une sorte de modèle de la
créativité pure. Il parlait de sa “santé
créatrice”. » Et c’est bien cette vitalité
visionnaire, cette fête de l’imagination,
qui passe dans l’exposition. ■
« Quand Fellini rêvait de Picasso »,
Cinémathèque (Paris XIIe), jusqu’au 28 juillet.
Rétrospective et débats.
Mastorna, violoncelliste célèbre tué
dans un crash d’avion, erre dans un au-
delà qui ressemble à s’y méprendre à
notre ici-bas. C’est la Divine Comédie de
Dante version motel.
L’adaptation de Marie Rémond en-
tremêle l’intrigue du Voyage de
G. Mastorna et l’histoire du tournage.
On assiste à une espèce de making-of
de ce film fantôme. Fellini au travail se
résume à un homme caméra Super-8
au poing assis sur un tabouret à roulet-
tes. Un peu léger pour rendre compte
du maestro, interprété pourtant avec
conviction par Serge Bagdassarian.
Certains comédiens jouent bien le peu
qu’ils ont à jouer. Laurent Lafitte en
Marcello, Jérémy Lopez en assistant de
« Fefe », Georgia Scalliet en femme
fellinienne sont des silhouettes bien
dessinées mais sans chair. Ils peinent à
donner de la consistance à ce monde
flottant et onirique. Limbes ou pas lim-
bes, on a du mal à croire qu’un tourna-
ge de Fellini puisse être d’une telle
monotonie. ■
Le Voyage de G. Mastorna,
Théâtre du Vieux-Colombier (Paris VIe),
jusqu’au 5 mai.
L’exposition « Quand Fellini
rêvait de Picasso », jusqu’au
28 juillet à la Cinémathèque
(Paris XIIe). En dessous :
Federico Fellini sur le tournage
de Casanova en 1976.
S. DABROWSKI/CINÉMATHÈQUE FRANÇAISE, RUE DES ARCHIVES/COLLECTION CSFF, ÉDITIONS DE FALLOIS, LA TOUR VERTE
Et
AUSSI
■ Le Voyage de G. Mastorna
de Federico Fellini (Éd. Sonatine)
Après un accident d’avion,
un célèbre violoncelliste
se retrouve en transit dans une ville
mystérieuse. Il soupçonne bientôt
qu’il pourrait être mort. Comme
Dante, il va explorer l’au-delà au
long d’un voyage semé d’épreuves.
Le scénario maudit que Fellini n’a
jamais pu tourner est devenu un
roman fantastique et métaphysique
de « conscience-fiction », écrit
dans sa préface AldoTassone, grâce
à qui on peut lire ce film imaginaire.
■ Viva Cinecittà ! de Philippe
d’Hugues (Éd. de Fallois)
« Invention,
poésie, don
de vie, émotion »,
c’est le meilleur
de Fellini pour
l’essayiste,
qui se fait
le cicérone
de cet « ensemble
cinématographique » exceptionnel.
Son ouvrage fait revivre l’âge d’or
du cinéma italien à travers douze
grands réalisateurs qui lui ont donné
son éclat et sa profondeur. Derrière
les portraits apparaissent la réalité
historique, la sensibilité de l’époque :
tout un paysage captivant.
■ Federico Fellini, six ans
avec le Maestro, de Dominique
Delouche (Éd. de la Tour verte)
Assistant
de Fellini
sur Il Bidone,
Les Nuits
de Cabiria
et La Dolce Vita,
l’auteur a
un point de vue
privilégié sur
son univers professionnel et
humain. Et nous entraîne au cœur
d’un tourbillon vivant.
■ Les Clowns (1970)
et Répétition d’orchestre (1978)
Deux films de Fellini sur le monde
du spectacle reviennent
sur les écrans en version restaurée
à partir du 10 avril. Nostalgie
d’enfance ou métaphore critique,
des œuvres à redécouvrir.

CULTURE
« La Flor » : en prendre de la graine
CHRONIQUE Pour la quatrième et dernière partie de son film fleuve, l’Argentin Mariano Llinas
rend hommage, entre autres, à « Partie de campagne », de Renoir. Et propose du grand cinéma.
LE CINÉMA
Éric Neuhoff
eneuhoff@lefigaro.fr
O
uf. Ça y est. Il est possible de
voir enfin La Flor dans son
entier. Il faut se préparer à
l’aventure comme pour un
prodigieux voyage. Prévoir
du temps dans son agenda, l’ensemble
dure près de quatorze heures. Autant le
dire tout de suite, on n’a jamais vu ça sur
un écran. L’Argentin Mariano Llinas s’at-
taque au cinéma avec un appétit d’ogre. Il
mêle les genres, retombe sans cesse sur
ses pieds, emploie les quatre mêmes ac-
trices dans des rôles différents.
Au début, il présente lui-même son
projet en gribouillant sur un carnet. La
suite se transforme en série B vaguement
fauchée avec momie quechua dispen-
sant ses pouvoirs maléfiques dans un la-
boratoire au fond de l’Amérique du Sud.
Une scientifique est atteinte d’un mal
mystérieux. On glisse plus tard à un mé-
lodrame musical où un couple de chan-
teurs à la mode en train de se séparer re-
pousse au maximum le moment
d’enregistrer leur prochain disque. De-
vant le micro, leurs paroles résonnent
comme un règlement de comptes. Le
troisième épisode s’attarde sur une som-
bre affaire d’espionnage où deux agents
sont censés être de jeunes mariés. Le jeu,
qui les entraîne de Bruxelles à Paris, aura
des conséquences imprévues. Les mem-
bres des services secrets ont bien le droit
de tomber amoureux. Il y a aussi un sa-
vant kidnappé qui passe une bonne par-
tie du temps avec un sparadrap sur la
bouche. Llinas respecte le cahier des
charges. On apprendra comment dé-
jouer des écoutes clandestines dans une
chambre d’hôtel. Les noms de code sont
301 ou Angel. Un des collègues surnom-
mé Mac the Knife manie le couteau avec
dextérité et ridicule.
Les choses ont pour décor des halls
d’aéroport, des escaliers roulants, des
Être une femme libérée
CINÉMA « Curiosa » met en scène l’éducation
sexuelle et littéraire de Marie de Régnier
par le poète Pierre Louÿs. Affriolant.
ÉTIENNE SORIN esorin@lefigaro.fr
L
es écrivains donnent rarement
de bons films. Rien n’est plus
difficile que de montrer un
auteur au travail. Qu’il écrive à
la plume d’oie ou à la machine à
écrire, qu’il soit sobre ou alcoolique, son
activité créatrice n’est jamais très specta-
culaire. Le poète Pierre Louÿs a pour lui de
s’adonner à la photographie, discipline
cinégénique, a fortiori quand son sujet de
prédilection est la femme, vêtue de peu et
surtout de rien. Le premier appareil por-
table Kodak fait des miracles.
Curiosa n’est pas un biopic de Pierre
Louÿs (1870-1925), homme de lettres,
voyageur, érotomane. C’est le portrait
d’une femme, le récit de l’émancipation
de Marie de Régnier, follement amou-
reuse du pornographe. Son père, le poète
José Maria de Heredia, ruiné, la donne à
Henri de Régnier (Benjamin Lavernhe, le
Scapin de la Comédie-Française), poète
symboliste lui aussi, pour lequel Marie
Niels Schneider et Noémie Merlant
dans Curiosa. MEMENTO FILMS DISTRIBUTION
Pilar Gamboa, Elisa Carricajo, Laura Paredes et Valeria Correa dans La Flor, partie 4.
hangars. On croise la première femme à
avoir piloté un Mig. Un mystérieux Cas-
terman (hommage à Hergé ?) donne des
ordres au téléphone. On oubliait des
scorpions dont le venin contiendrait un
élixir de jeunesse. Le réalisateur utilise la
voix off, se sert des toiles de Manet en su-
rimpression, redonne un ton neuf aux
Quatre Saisons de Vivaldi. Soudain, le hé-
ros se demande s’il doit filmer des arbres
ou des humains. La question le laisse per-
plexe, l’égare dans des paysages incon-
grus. Une équipe de cinéma devient folle.
Voici, tiens, un Italien amnésique. Un
professeur échange des mails avec un
certain Smith auquel il raconte des évé-
nements légèrement éloignés de la réali-
té. Il faut dire que des sorcières rôdent
dans les parages, s’envolent sur leur ba-
lai, qu’on a retrouvé une Volvo perchée
en haut d’un eucalyptus. Ça n’est pas
n’éprouve rien. Très vite, Marie se jette
dans les bras de Pierre, lui sert de modèle.
Être photographiée dans des poses que la
morale réprouve l’enchante. Henri, cocu
pathétique, tente de faire bonne figure. Il
confie à Pierre : « Je préfère que ce soit
vous plutôt qu’un autre. » Cette mansué-
tude lui permettra d’écouter aux murs.
L’oreille collée à la cloison, il entend sa
femme jouir dans les bras du poète.
Un vaudeville polisson
Lou Jeunet veut à tout prix éviter le film
d’antiquaire, la naphtaline et le sépia.
Dans le Paris de 1895, elle ose l’anachro-
nisme, notamment en confiant la musi-
que à Arnaud Rebotini, DJ désormais pri-
sé par le cinéma (120 battements par
minute). L’électro de Rebotini sur les ima-
ges de ce vaudeville polisson et littéraire,
ce pourrait être kitsch. C’est au contraire
la pulsation idoine pour faire vibrer les
jeunes corps palpitants de Marie (Noémie
Merlant) et Pierre (Niels Schneider).
Louÿs collectionne les femmes comme
des papillons à épingler. Il finit par épou-
ser Louise, la petite sœur de Marie. Celle-
ci, frondeuse, affranchie, écarte les cuis-
ses sans complexe et plonge sans ciller
son regard noir dans l’objectif.
Pierre devient quasiment aveugle :
« Moi qui n’aimais que les cigarettes, les
femmes brunes et les pages blanches, me
voici réduit à l’abstinence. » Privé de pul-
sion scopique, il n’est plus rien. Marie
commence à signer des textes dans la Re-
vue des deux mondes sous un nom d’hom-
me, Gérard d’Houville. Elle meurt en
1963, à 87 ans. Elle aura eu des amants
nombreux et de plus en plus jeunes. ■
« Curiosa »
Drame de Lou Jeunet
Avec Noémie Merlant, Niels Schneider,
Benjamin Lavernhe
Durée 1 h 47
■ L’avis du Figaro : ○○○¡
LE FIGARO mercredi 3 avril 2019
31
ET AUSSI
Ruffin limier
Après Merci patron !, François
Ruffin, avec Gilles Perret,
empoigne une caméra pour aller
cette fois à la rencontre des « gilets
jaunes ». Ruffin, aujourd’hui
député de La France insoumise,
veut montrer qu’il n’y a pas
de fachos dans le mouvement.
« C’est pas du tout ça, c’est des
gens. » Des gens dans la mouise,
des hommes et des femmes
qui trouvent un peu de chaleur
humaine sur les ronds-points. Des
femmes, surtout. Elles racontent
à Ruffin la galère, la misère.
Une auxiliaire de vie divorcée doit
se débrouiller seule avec ses deux
enfants : « Les hommes ne payent
pas la pension alimentaire, et tout
le monde s’en fout. » Ruffin,
lui, ne s’en fout pas. Il écoute,
il acquiesce. On a déjà entendu
ou lu ces récits. Ce tour de France
périphérique a un train de retard.
Sinon, en guise d’intermèdes,
un montage des déclarations
de Macron (« pognon de dingue »,
« Y en a qui foutent le bordel »,
« fainéants »…), des images
de richards qui boivent du
champagne sur un yacht et,
comble de l’originalité, Douce
SANTIAGO MITRE/ARP SÉLECTION France de Charles Trenet plaquée
sur des scènes de « gilets jaunes »
tout. On saute du journal intime d’un col- Llinas égrène ce catalogue des senti-
lectionneur de livres rares à un extrait ments les plus divers comme un magi-
méconnu et peut-être apocryphe des cien qui mélangerait ses ingrédients
Mémoires de Casanova. avec une longue cuillère en bois. Il
cherche l’or du temps, possède un sens
Un sens aigu du récit aigu du récit, souffle sur la poussière de
Tout cela avant de rendre un hommage, celluloïd. Tout ce qu’il montre a l’air de
muet et en noir et blanc, à Partie de cam- surgir d’un livre d’images plein d’ora-
JOUR2FÊTE
pagne qui est un morceau de pure poésie. ges et de folies. Du pittoresque, de l’in-
Le marivaudage se déroule pendant un vention, du surréalisme, de la liberté,
meeting aérien. Sur la musique de Re- de l’insolite, Llinas renoue avec le vieux
noir, les avions qui lâchent un panache de sortilège. On n’ose y croire. Cela res-
fumée dans leur sillage dessinent un semble à du grand cinéma. ■ dans la rue face aux CRS.
cœur dans le ciel. Ultime rebondisse- De l’agit-prop sans génie. Seule
ment : les quatre comédiennes incarnent séquence amusante, un extrait
des prisonnières des Indiens, dans un flou « La Flor », partie 4 de L’An 01, film de 1973 de Jacques
antique et envoûtant. Le générique s’étire Espionnage de Mariano Llinas Doillon d’après la bande dessinée
sur une bonne demi-heure. Les partici- Avec Elisa Carricajo, Valeria Correa, de Gébé. Il y a de l’invention,
pants viennent saluer tête en bas. Pilar Gamboa de la fantaisie, de l’utopie.
Cet inventaire à la Prévert laisse le Durée 3 h 28 Il y a ce qui manque cruellement
souffle coupé. Il pleut de l’insolite. ■ L’avis du Figaro : ○○○○ à J’veux du soleil ! : du cinéma. É. S.
« ÉPOUSTOUFLANT » – Le Parisien
(WIDOWS)
DISPONIBLE EN DVD,
BLU-RAY, ACHAT DIGITAL ET VOD
© 2018 Twentieth Century Fox Film Corporation. All Rights Reserved.
© 2019 Twentieth Century Fox Home Entertainment LLC. All Rights Reserved.
A
TWENTIETH CENTURY FOX, FOX and associated logos are trademarks of Twentieth Century Fox Film Corporation and its related entities.
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

32 CULTURE

Un puits de science-fiction « La Lutte des classes »

CINÉMA Avec
ne fait pas de quartier
« Captive State », CINÉMA Mixité sociale, éducation, religion…
Michel Leclerc plonge Leïla Bekhti et Édouard Baer
Rupert Wyatt
dans un débat sans fin. Une exhaustivité épuisante.
signe un thriller Leurs personnages sont aussi légers que
dystopique NATHALIE SIMON nsimon@lefigaro.fr des bulles de savon, certains aussi filants

P
que des étoiles, quasi inexistants. L’inter-
captivant, sur fond aul est énervé. Avec Sofia, ils
ont fait une plus-value en ven-
prétation est incertaine. Seul Édouard
Baer s’en sort dignement. Se plaît à jouer
d’occupation dant leur appartement pour
acheter une petite maison à Ba-
le rebelle, porte d’ailleurs un blouson de
cuir noir avec une joie enfantine non dis-
extraterrestre. gnolet, en Seine-Saint-Denis.
Anar, de gauche, ce batteur membre d’un
simulée. Sa complicité avec Leïla Bekhti
est palpable. C’est avec lui que l’actrice

L
MICHAËL NAULIN
mnaulin@lefigaro.fr
a Terre n’est plus à
nous. Les extraterrestres sont au
pouvoir. Depuis 2016, des bestioles
de l’espace exploitent nos ressour-
ces, collectent nos données et impo-
sent une dictature, dirigée par le
« Législateur ». La vie privée n’existe
plus. À Chicago, en 2025, les drones
ont remplacé les oiseaux, des murs
encerclent la ville, le lac Michigan est
une rampe de lancement pour les
vaisseaux aliens. Dans les quartiers
crasseux, à l’écart des partisans lo-
John Goodman et Ashton Sanders dans Captive State.
Les informations passent par les pe-
tites annonces de la presse papier et
par les ondes radiophoniques.
Après son très bon Planète des
singes : Les Origines (2011), le réali-
sateur britannique Rupert Wyatt
crée un univers rétrofuturiste
effrayant de réalisme. Une réflexion
sur la liberté individuelle dans un
monde où tout est surveillé. Les
citoyens portent une puce implantée
dans le cou. Carte d’identité alien, et
traceur GPS. On ne peut s’empêcher
d’y voir un peu d’Orwell. Le héros,
joué par Ashton Sanders, travaille
groupe punk dans sa jeunessse ne tient
pas à s’enrichir de quelque façon que ce
soit. Le couple s’adapte rapidement à sa
LEWIS/METROPOLITAN FILMEXPORT nouvelle vie du quartier, Sofia y est née.
Il participe au jardin partagé, a inscrit
Stasi. Un chaos esthétique porté par leur fils Corentin dans une école primaire
la musique électronique viscérale de publique qui a pour nom… Jean-Jaurès,
Rob Simonsen. organise des soirées entre parents. Paul
Créatures étonnantes, couvertes de est l’homme au foyer. Il a une adolescente
pointes, ces porcs-épics d’acier sont née d’une première union qui « adore » sa
des extraterrestres que l’on voit peu. belle-mère avocate. Le problème survient
Ce qui les rend d’autant plus mysté- le jour où Corentin voit ses meilleurs co-
rieux et terrifiants. Si l’atmosphère SF pains partir dans une institution privée.
lui donne parfois des allures de jeu vi- Une hérésie pour Sofia et Paul.
déo postapocalyptique, Captive State Michel Leclerc a chargé la barque. Côté
se distingue d’un blockbuster ordinai- réalisation, il rame depuis Le Nom des gens,
re en pointant habilement les menaces César du meilleur scénario en 2010. Un
bien réelles qui pèsent aujourd’hui sur prix qu’il ne recevrait pas aujourd’hui mal-
les libertés individuelles. Les référen- gré quelques bonnes répliques. Outre une
ces sont éloquentes. Les extraterres- caméra indisciplinée, il lance bien lourde-
avait fait ses premiers pas au théâtre (dans
sa pièce À la française, en 2012).
Ce mercredi, Édouard Baer prête aussi
sa voix au robot de Terra Willy, planète in-
connue, un film d’animation d’Éric Tosti.
L’odyssée d’un petit garçon projeté dans
l’espace. Basé sur une intrigue prévisible,
mais haut en couleur, il attirera le jeune
public. Quant à Leïla Bekhti, elle sera
prochainement dans Chanson douce, de
Lucie Borleteau, adapté du livre de Leïla
Slimani, prix Goncourt 2016. ■
« La Lutte des classes »
Comédie de Michel Leclerc
Avec Leïla Bekhti, Édouard Baer
Durée 1 h 43
■ L’avis du Figaro : ○◐¡¡

KARE PRODUCTIONS/UGC IMAGES/ORANGE STUDIO/FRANCE 2

botomisés par la devise « Harmonie, dans une usine de traitement des tres érigent des murs autour des vil- ment le débat. Ses messages répétés sont
paix, unité », la résistance s’organise. données, sorte de ministère de la les ? Allusion au projet de Trump le jusqu’à plus soif. École laïque ou privé ?
Sous ces aspects simplistes entre Vérité. Son job ? Envoyer les long de la frontière mexicaine. Des pu- Bobo ou catho ? Pauvre ou riche ? Mixité

CINEMA/CHAOCORP PRODUCTIONS/SCOPE PICTURES

collabos et résistants, ce film de
science-fiction déborde d’intelligen-
ce. Pas d’invasion extraterrestre ni
de bataille laser dans ce thriller dys-
topique. Gabriel Drummond, ado or-
phelin, marche sur les traces de son
frère disparu, ancienne figure de la
résistance, et rejoint l’organisation
secrète Phoenix. Captive State suit ce
commando dans la préparation d’un
attentat contre le pouvoir en place.
Leur QG : le quartier de Pilsen, au sud
de Chicago. Ces maquisards du futur
communiquent par pigeons voya-
geurs, dialoguent en langue sifflée.
informations de votre carte SIM
dans un supercalculateur.
Chaos esthétique
Dans cette société « Big Brother »,
votre voisin épie vos moindres dé-
placements, caché derrière le rideau
de sa fenêtre. Vos conversations
sont enregistrées sur magnétopho-
ne. Une sorte de « remake » de
l’Union soviétique à la sauce extra-
terrestre où le commissaire à la
poursuite du commando dissident,
interprété par l’excellent John
Goodman, a des airs d’agent de la
ces électroniques placées sous la peau sociale, éducation, religion, identité…
contiennent nos données personnel- Comment et qu’est-ce que réussir sa vie ?
les ? Un procédé déjà en vigueur en À croire qu’il a eu peur d’oublier un sujet.
Suède. La reconnaissance faciale dans
la vidéosurveillance est démocratisée ? Clichés et caricature
La Chine en fait l’éloge… Le monstre À force de vouloir être exhaustif, il tombe
technologique nous a déjà envahis. ■ dans les clichés et la caricature (même la
fin de ce long-métrage désole et/ou aga-
ce). Sa mise en scène part à vau-l’eau, les
« Captive State » acteurs ont les coudées franches. On di-
Science-fiction de Rupert Wyatt rait un premier film. Pourtant, Michel
Avec Ashton Sanders, John Goodman, Leclerc a puisé dans son vécu. Il a habité
Vera Farmiga avec Baya Kasmi, la coscénariste (égale-
Durée 1 h 49 ment présente dans le film), à Bagnolet Leïla Bekhti et Édouard Baer, couple
■ L’avis du Figaro : ○○◐¡ pendant dix ans. complice dans La Lutte des classes.

Les autres films

Un site unique en France
■ « TEL AVIV ON FIRE » refuse de se considérer comme
Comédie de Sameh Zoabi, 1 h 37. une victime. Un film sur le déni

qui réunit les plus grands artistes

bien écrit et bien joué mais
qui ne transcende pas son sujet. É. S.
■ L’avis du Figaro : ○○¡¡

■ « L’HOMME À LA MOTO »
Drame d’Agustin Toscano, 1 h 33.
LIAM GALLAGHER / BLACK EYED PEAS /
HAUT ET COURT

/ EROS RAMAZZOTTI / STING / JOAN BAEZ /

/ CHRISTINE AND THE QUEENS /
/ SHAKA PONK / PASCAL OBISPO / Comment l’écriture d’une sitcom
rapproche un glandeur palestinien
/ HUBERT-FÉLIX THIÉFAINE
LES ACACIAS

et un officier israélien.
+ MARC LAVOINE / Le réalisateur a trouvé une façon
originale et drôle de traiter
/ THOMAS DUTRONC le conflit moyen-oriental.
ET LES ESPRITS MANOUCHES La fiction se mélange à la réalité. À Tucuman, en Argentine, Miguel,
Les deux camps en prennent voleur à l’arraché à moto, blesse
+ IBRAHIM MAALOUF pour leur grade. Cette comédie grièvement une vieille dame
ET HAÏDOUTI ORKESTAR / décalée pétille d’intelligence. É. N. en dérobant son sac. Rongé
■ L’avis du Figaro : ○○○¡ par la culpabilité, il décide de l’aider
/ SOPRANO / HOSHI + ANGÈLE / sans lui dire qui il est. Il s’installe
/ TROIS CAFÉS GOURMANDS ■ « SHAZAM ! » Fantastique dans sa maison pour préparer
de David F. Sandberg, 2 h 12. son retour de l’hôpital.
+ BÉNABAR /
Mairie de Carcassonne - Service communication - © Julien Roche - Martin Kierszenbaum - Jamie Morgan

Agustin Toscano met en scène

/ LES NÉGRESSES VERTES avec beaucoup de finesse
Licences numéro : 1-1055836 / 1-1055837 / 1-1055838 /1-1055839 / 2-1055840 / 3 -1055841

une relation ambiguë. É. S.

+ BERNARD LAVILLIERS / ■ L’avis du Figaro : ○○¡¡

/ KENDJI GIRAC / ORELSAN / ... ■ « LOS SILENCIOS » Drame

DU 2 AU 31 JUILLET 2O19 colombien de Beatriz Seigner,
WARNER BROS

1 h 29.

En adaptant un vieux personnage

PYRAMIDE DISTRIBUTION

de DC Comics des années

quarante, le réalisateur
David F. Sandberg signe
une comédie de super-héros
enlevée, décapante, qui fait
mouche par son humour pétillant…
www.festivaldecarcassonne.fr Sans oublier un excellent
RÉSEAUX : FRANCE BILLET - TICKETMASTER - DIGITICK - BOX OFFICE #FestiCarca BAVFW Zachary Levi !
■ L’avis du Figaro : ○○○¡
O. D. La version colombienne
de Sixième Sens, sans Bruce Willis
mais avec d’autres fantômes :
■ « COMME SI DE RIEN des victimes du conflit entre
N’ÉTAIT » Drame d’Eva Trobisch, les Farc et l’armée. Une chronique
1 h 30. à la lisière du fantastique, plus
Janne, jeune femme moderne, est nébuleuse que magique.
A

É. S.
violée après une soirée arrosée mais ■ L’avis du Figaro : ○○¡¡

VOYAGE
Partir comme
tout le monde
ENQUÊTE Alors que les Journées nationales
Tourisme & Handicaps se déroulent tout
le mois, « Le Figaro » a enquêté sur cette
clientèle qui franchit les obstacles pour
ne pas se priver du plaisir de la découverte.
A
JEAN-MARC DE JAEGER
jmdejaeger@lefigaro.fr
udrey n’oubliera jamais
son vol entre Hongkong et Paris. Après
un voyage en solo de trois mois en Asie,
cette jeune handivoyageuse pensait
rentrer en France en toute sérénité.
Sauf qu’à son arrivée à l’aéroport Rois-
sy-Charles-de-Gaulle, elle ne recon-
naît plus son fauteuil électrique. « Les
cale-pieds étaient complètement en vrac,
la roue arrière droite fracassée, les
rayons entièrement fêlés et fissurés »,
déplore-t-elle sur son blog (1). Ce genre
de mésaventure est la principale crainte
des voyageurs appareillés.
« L’aérien est le premier frein au voyage
chez les personnes à mobilité réduite »,
reconnaît Marie-Odile Vincent, tétra-
plégique et consultante handicap chez
Comptoir des voyages. Même en res-
pectant les règles et précautions édic-
tées par les compagnies (réservation
d’une assistance 48 heures avant le
départ, indication du type et des di-
mensions du fauteuil), le risque zéro
n’existe pas. « Pour éviter les mauvaises
surprises, mieux vaut éviter les compa-
gnies low-costs et prendre des vols sans
escale, quitte à payer plus cher »,
conseille Marie-Odile Vincent.
Les journées du tourisme et du handi-
cap, dont la 13e édition se tient partout
en France tout le mois d’avril, donnent
l’occasion aux professionnels de trou-
ver des solutions pour cette clientèle
négligée. Une population difficile à
chiffrer – le handicap étant considéré
comme un facteur de recensement
discriminant –, mais qui ne veut pas se
priver du plaisir de voyager. « Dès les
années 1990, les personnes atteintes
d’un handicap ont commencé, via des
associations, à revendiquer leur droit
d’utiliser leur pouvoir d’achat pour
avoir des loisirs et partir en vacances
comme tout le monde », détaille Annette
TRAIN
Carnet de route
Pour les trajets nationaux,
internationaux et TER
sous conditions : service
Accès Plus de la SNCF, au plus
tard 48 heures avant le départ.
Gratuit. Assistance en gare
et réduction sur le billet
de l’accompagnateur.
Tél. : 0890 640 650
et accessibilite.sncf.com
AVION
Service Saphir d’Air France
à réserver dès l’achat des billets
jusqu’à 48 heures avant
+
le départ. Pour faciliter
les déplacements du terminal
au siège de l’avion et le
transport de fauteuils en soute.
En France et 19 autres pays.
Tél. : 09 69 36 72 77
et airfrance.fr
CIRCUITS
Avec Comptoir des voyages
5 jours / 4 nuits à Séville
dès 530 € ; 4 jours / 3 nuits
à Stockholm ou Oslo dès 600 € ;
11 jours / 8 nuits de safari
au Kenya dès 2 700 €.
Tél. : 01 53 10 30 15.
www.comptoir.fr
Avec Yoola, 3 jours / 2 nuits dès
590 € dans la plupart des villes
européennes (Rome, Barcelone,
Londres, Berlin…) ; 7 jours dans
les Antilles dès 1 790 € ; 7 jours
à Bali dès 2 590 € ; circuit
de 10 jours en Argentine
dès 3 490 €
Tél. : 01 83 64 70 06 et yoola.fr
LIRE
Le guide Handitourisme
du Petit Futé est une mine
d’infos et de conseils, par région
et par pays. 15,95 €, version
numérique à 6,99 €.
LE FIGARO mercredi 3 avril 2019
33
Masson, présidente de l’association
Tourisme & Handicaps, organisatrice
de ces journées.
Si l’offre de voyage est encore loin
d’être parfaitement adaptée, les handi-
voyageurs comptent sur leurs petites
astuces. « Quand elles existent, les infor-
mations sur l’accessibilité des héberge-
ments manquent de précision. Lire Des agences spécialisées proposent des séjours sur mesure et des circuits 100 % accessibles aux handivoyageurs
“chambre accessible” sur Booking ne si- (ci-dessus, dans la Vallée sacrée des Incas, au Pérou). MARIE-ODILE VINCENT/COMPTOIR DES VOYAGES
gnifie rien. Alors, avant de réserver, je
contacte plusieurs hôtels pour connaître accueillir des personnes en fauteuil. mon autonomie. Cela m’oblige à innover, privé de l’essentiel du voyage : les belles
leurs aménagements, comme la largeur Mais ne pas pouvoir traverser la capitale à imaginer et à me dépasser », avoue de rencontres. » ■
des portes, la taille de la salle de bains ou en transports en commun n’empêche son côté Marie-Odile Vincent. Quant à (1) roulettes-et-sac-a-dos.com
la présence ou non d’une marche. Et, pas d’aller à l’autre bout du monde. Jean-Pierre Brouillaud, voyageur non (2) 1000decouvertes4roulettes.com
surtout, je leur demande des photos », La plupart des handivoyageurs s’ac- voyant, il se dit « peu tracassé par ces (3) wheelcome.net
abonde Blandine (2), une Belge de 27 ans commodent très bien du manque d’in- questions d’accessibilité ». Auteur du (4) l-illusion-du-handicap.com
qui a récemment conclu un tour du frastructures. « Les pays les moins acces- blog « L’Illusion du handicap » (4) et de
monde d’un an en solo. Il s’agit aussi de
se renseigner sur les lieux et activités
adaptés. « Il n’y a pas de place pour l’im-
sibles matériellement sont souvent les plus
accessibles humainement, note Blandine.
Lorsque j’avais besoin d’aide en Asie, des
l’autobiographie Aller voir ailleurs
(Points Aventure), il affirme : « Si tout
était traduit en braille, je me sentirais trop
+ @ SUR LE WEB
» L’Île de Pâques en fauteuil roulant : « Rien
provisation, je dois planifier mes visites à dizaines de personnes se pliaient en quatre dépendant. Je perdrais la force que je tire n’était impossible, c’est moi qui décidais »
l’avance. Je ne peux pas prendre le risque pour moi. » « En voyage, j’aime perdre de ma vulnérabilité. Et surtout, je serais www.lefigaro.fr/voyages
de me déplacer pour, au final, me retrou-
ver devant un musée ou un monument qui
ne peut pas m’accueillir », ajoute Char-
lotte (3). Autre solution : solliciter des
agences spécialisées.
« Perdre mon autonomie
m’oblige à me dépasser »
Comptoir des voyages propose des sé-
jours sur mesure dans une trentaine de
destinations. « Pour qualifier ses be-
soins, le client fournit des informations
très précises : les dimensions et le poids
exacts du fauteuil, son degré d’autono-
mie, sa capacité à faire sa toilette seul ou
non », précise Marie-Odile Vincent.
L’agence recommande ensuite les loge-
ments les plus appropriés, tous testés et
approuvés. Hauteur du lit, largeur de la
porte, taille des sanitaires, équipements
lors des excursions…
Aucun détail n’échappe à son œil ex-
pert. « Un hôtel parfaitement aux nor-
mes peut ne pas être proposé si les infras-
tructures aux alentours, comme l’accès à
la plage, ne sont pas adaptées », pré-
vient-elle. Quant à savoir si ces voyages
coûtent plus cher, elle rétorque : « La
vie quotidienne d’une personne en fau-
teuil coûte déjà plus cher en soi, il est lo-
gique que le séjour le soit aussi. »
En 2009, Yoola a investi un marché
quasiment inexistant en France.
L’agence s’est d’abord fait connaître en
proposant des circuits 100 % accessibles
lors de grands événements sportifs.
Puis elle s’est élargie au tourisme plus
traditionnel. Pourquoi s’en priver ? Se-
lon son fondateur, Malik Badsi, « les
personnes à mobilité réduite sont mal in-
formées sur l’offre disponible. Résultat,
elles se privent de partir malgré leur ca-
pacité physique et financière à voyager ».
Comptoir des voyages, Yoola, ces deux
spécialistes proposent entre autres loi-
sirs sportifs du parapente, des safaris,
des balades en quad ou à dos de droma-
daire, et prévoient une assistance mé-
dicale sur place, en option.
En France, les handivoyageurs peuvent
se référer au label « Tourisme & Handi-
caps », attribué par l’association épo-
nyme. Cette marque d’État, créée en
2005 par le ministère de l’Économie, est
décernée aux hébergements, restau-
rants et lieux de loisirs qui répondent
aux besoins d’au moins deux handicaps
parmi les quatre reconnus (moteur,
auditif, visuel et intellectuel). Aujour-
d’hui, près de 5 300 sites ou organismes
bénéficient de ce label attribué sur de-
mande pour une période de cinq ans re-
nouvelable. Un chiffre qui paraît assez
faible au regard du très grand nombre
d’établissements recevant du public,
touristique ou non. La loi accessibilité
de 2005 leur donnait dix ans pour être
se mettre aux normes. Mais entre les
impossibilités techniques, les contrain-
tes liées à la conservation du patrimoine
et le coût des travaux, il semble difficile
de faire respecter strictement la loi.
Aujourd’hui, moins de 40 % de ces éta-
blissements sont accessibles.
Le métro de Paris bénéficie d’une
dérogation, les travaux étant contraints
A
par l’ancienneté du réseau. Seule une
dizaine de stations sur 300 peuvent
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO
34 STYLE
1 2
4 5
8 9
Tous les mercredis, la rédaction sélectionne pour vous le meilleur des sorties : tendances mode, objets de désir,
nouveautés cosmétiques, livres de chevet, best of des expositions et des lieux originaux.
EXPOSITION
RENDEZ-VOUS AU SALON
L’œuvre de Guy Bourdin (1) n’en finit
pas de fasciner. Précurseur, la
photographie de mode était pour lui
comme un terrain de jeu pour raconter
ses histoires, souvent abracadabrantes,
teintées d’humour et d’impertinence.
De passage à New York entre les 4 et
7 avril, vous pourrez, sur le stand de la
galerie Louise Alexander du salon The
Photography Show by Aipad, redécou-
vrir cet artiste visionnaire à travers des
inédits, Polaroid et clichés emblémati-
ques mettant en lumière sa relation avec
les États-Unis. [Pier 94, New York.
www.aipadshow.com]
VESTIAIRE
LA NOTE BLEUE
« Tout le monde sur la terre / Ne peut pas
avoir les yeux bleus / Moi je t’aimerai
quand même / Si tu n’avais pas les yeux
bleus / Mais avec ta sacrée chance /
T’avais gagné d’avance / Puisque tu as /
Les yeux bleus / Oui tu as les yeux
bleus », chantait France Gall en 1968.
Pour les veinardes à l’iris azuré et les
autres, voici de quoi plonger dans un
océan de mode. Tailleur céruléen chez
Kwaidan Editions (10) (1 495 € la veste et
835 € le pantalon), costume à veste
ceinturée et épaules pincées bleu Klein
A
chez Y/Project (6) (1 095 € et 675 €) et
pyjama-treillis en satin froissé pour Sies
QUOI
DE
NEUF
CETTE
SEMAINE
Marjan (2) (1 255 € la chemise et 715 € le
cargo).
COLLAB
UNE POINTE DE HIP-HOP
Notorious B.I.G. mentionnait ses jeans
dans son tube One More Chance et Tupac
posait pour ses campagnes. La marque
Karl Kani, fondée en 1989 par le New-
Yorkais Carl Williams, a changé la don-
ne, inventant le baggy en particulier et le
streetstyle en général. Cette saison, elle
s’associe à Études (3), le jeune label lui
aussi apprécié des rappeurs comme notre
Orelsan national. Déjà repéré sur le défilé
du trio parisien, ce vestiaire en lin aux
rayures colorées (caractéristiques de Karl
Kani) pour homme et femme - blouson
(notre photo, 750 €), sweat-shirt (300 €),
jupe longue (489 €)… - est enfin disponi-
ble. [www.etudes-studio.com]
MAROQUINERIE
INSPIRATION
Vous garderez en mémoire cette forme
besace, cette longue bandoulière, ce
veau velours embossé du Cassandre, ce
bordeaux bourgeois, cette dégaine aux
accents vintage… Il s’appelle Satchel et
devrait devenir le meilleur ami de
notre éternelle Parisienne puisqu’il est
griffé Saint Laurent par Anthony
Vaccarello (4). [1 590 € le classique.
Existe aussi en format seau et sac camé-
ra. www.ysl.com]
PAGE RÉALISÉE PAR MADELEINE VOISIN AVEC
MARIE-GABRIELLE GRAFFIN, VALÉRIE GUÉDON,
FABIENNE REYBAUD, NICOLE TARBOURIECH
ET ÉMILIE VEYRETOUT
HORLOGERIE
LES MONTRES
SONT ÉTERNELLES
Mon premier est apparu dans Opération
Tonnerre en 1965, porté par l’agent 007.
Mon second a été chevauché par James
Bond en 2015 dans Spectre. Et mon tout
est le fruit de leur union qui a vu le jour,
en mars dernier, à Baselworld en Suis-
se. L’horloger helvétique, Breitling (5),
s’est associé au fabricant de moto
britannique, Norton, pour lancer ce
chronographe B01. Dotée d’un calibre
automatique dont la précision est
certifiée chronomètre par le COSC, cet-
te belle mécanique au cadran vintage et
au boîtier d’acier est la première édition
de ce nouveau partenariat. « Cette
montre mêle l’ADN de nos deux mar-
ques, affirme Stuart Garner, PDG de
Norton. Elle offre aux amateurs de chro-
nographes et de motos la possibilité
d’exprimer leur individualité. » Le prix
de ce tic-tac vrombissant ? 7 570 €.
Moins cher qu’une motocyclette an-
glaise. [www.breitling.com]
HOMME
BONS BAISERS DE RUSSIE
L’an dernier, l’annonce dans un post
Instagram laconique de l’arrêt de la
marque du Russe Gosha Rubchinskiy,
sensation de la mode masculine et
gourou des millennials, en avait déçu
plus d’un. On a dit que ce protégé de
3
6
7
10
Comme des Garçons cherchait
d’autres moyens de présenter (et ven-
dre) ses collections. Après quelques
mois, il revient donc avec un « projet
global » baptisé GR-Uniforma (8), soit
une ligne de vêtements utilitaires
(vendu à Paris chez Trading Museum
Comme des Garçons), une série de piè-
ces en denim réalisées en collaboration
avec Diesel et un groupe de rock alter-
natif avec un single « Ya i Ti » (Toi et
moi en russe) disponible sur iTunes. Et
à venir un album, un livre de photos et
une performance artistique semble-t-
il prochainement organisée à Venise.
[289€ la chemise avec cravate incluse.
Infos sur www.gr-uniforma.com]
DESIGN
L’ART DE VIVRE
Crescent Sofa Blue : ce pourrait être le
titre d’une tendre ballade. Pourtant, ce
canapé velouté d’un bleu nuit profond
aux angles arrondis, signé Charles
Kalpakian (9) en 2018, trône fièrement
sur le stand de la Galerie BSL, en quête
d’un nouvel écrin. Tout comme le gar-
de-corps en fonte d’Hector Guimard
(circa 1900, galerie Chamagne), la
commode en noyer de Gio Ponti (an-
nées 1950, 88 Gallery) ou la manchette
Gavarelli en or et diamants (Karry Ber-
reby). Ces pièces s’exhibent au salon
PAD 2019, qui ouvre ses portes aujour-
d’hui dans le jardin des Tuileries, à
NET A PORTER, THE GUY BOURDIN ESTATE 2019 , COURTESY LOUISE ALEXANDER GALLERY, DANIELE OBERRAUCH / IMAXTREE.COM, BREITLING, COQUI COQUI, GR-UNIFORMA, ALAIN CORNU, SAINT LAURENT, FILIPPO FIOR / IMAXTREE.COM, ETUDES X KARL KANI
Paris, avec 70 exposants, de France et
d’ailleurs, pour le plus grand plaisir des
fins collectionneurs d’art et de design.
En prime, le duo Godefroy de Virieu et
Stefania di Petrillo est sacré jeune desi-
gner de l’année : une belle perspecti-
ve ! [PAD 2019, jusqu’au 7 avril.
www.pad-fairs.com/paris]
BEAUTÉ
COUP D’ÉCLAT
Les Galeries Lafayette Champs-Élysées
inaugurées il y a une semaine et déjà le
Tout-Paris ne parle que de ça. Hier ma-
tin, le grand magasin révélait son espace
beauté. Ici, on vous parle d’éclat inté-
rieur (avec une offre pointue de com-
pléments alimentaires) et de cosmétique
clean, les produits sont rangés non plus
par marques mais par catégories (le
soin, la bougie, le parfum, etc.), s’af-
franchissant même du genre - pas de
corner homme, donc. C’est culotté, ul-
tracontemporain, à l’image d’une in-
dustrie en mutation. Le skincare prend
plus d’importance que le make-up, les
vendeurs conseillent une formule selon
une problématique plutôt qu’une mar-
que pour laquelle ils touchent une com-
mission, Tom Ford et Frédéric Malle cô-
toient les digital brands (Gisou, Rouje…)
ou de minuscules labels du bout du
monde, comme les huiles parfumées du
Yucatan, Coqui Coqui (7). [58 €. 60, ave-
nue des Champs-Elysées, Paris VIIIe]

AUTOMOBILE
L’hybride
des beaux
quartiers
ESSAI Taille de vaisseau, consommation
de moineau, la Lexus ES 300h se pose
en alternative des premiums germaniques.
Reste à s’habituer à sa transmission par variateur.
L
PHILIPPE DOUCET pdoucet@lefigaro.fr
a planche de bord d’une
Mercedes ne vous séduit
pas ? Vous n’êtes pas sa-
tisfait de l’ergonomie
d’une BMW ? Et Audi
vous semble un peu ter-
ne ? Tentez Lexus ! Ce la-
bel japonais est la mar-
que de luxe de Toyota. Nissan possède
également la sienne, Infiniti, qui va quit-
ter l’Europe de l’Ouest l’an prochain,
faute d’avoir réussi à s’imposer. Honda a
pour sa part réservé son haut de gamme
Acura au marché américain.
Lexus, créé il y a une trentaine d’an-
nées, a vite acquis une bonne réputation
outre-Atlantique. Ses voitures se sont
tout de suite montrées bien finies, bien
équipées, douces et silencieuses. Leur
esthétique, en revanche, a pendant
longtemps évoqué celle des Mercedes de
la génération précédente. Les Lexus ont
aujourd’hui leur propre personnalité. La
dernière ES 300h affiche ainsi un style
nerveux et original, non dénué d’élé-
gance. Les proportions de la voiture
sont harmonieuses et répondent aux
codes visuels traditionnels de la grande
berline. Ses lignes n’ont pas été « sur-
dessinées », comme c’est parfois le cas
de certaines productions japonaises, en
particulier chez Toyota.
L’offensive sécuritaire de Volvo
ÉQUIPEMENT Après une limitation de la vitesse de ses voitures, le constructeur suédois promet des caméras embarquées
pour surveiller le conducteur et une clé programmable pour limiter les performances de ses véhicules.
V
olvo mise depuis long-
temps sur la sécurité.
Après avoir annoncé la se-
maine dernière sa décision
de limiter la vitesse de ses
véhicules à 180 km/h, le constructeur
suédois, propriété du groupe chinois
Geely depuis 2010, présente trois in-
novations en matière de sécurité. La
première consiste à truffer le poste de
pilotage de caméras. Selon Volvo,
« l’installation de caméras de détection
de vigilance et autres capteurs embar-
qués analysant le comportement du
conducteur pourrait être la solution à
l’ivresse au volant ou à la distraction ».
De quoi permettre à la voiture d’inter-
venir par elle-même si un conducteur,
visiblement distrait ou en état
À l’avenir, une voiture pourra intervenir par elle-même si un conducteur, visiblement
distrait ou en état d’ébriété, ne réagit pas aux signaux d’avertissement. VOLVO
La grande originalité de l’ES 300h se
tient cependant sous son capot. Pas de
motorisations à la carte ou de choix varié
de transmission sur ce modèle, comme
dans le camp allemand. Ou encore une
interminable liste d’options. La Lexus ES
300h est une proposition unique pou-
vant se résumer dans le nombre 100.
100, pour 100 grammes d’émissions de
CO2 par kilomètre, ce qui correspond à
une consommation de 4,4 litres d’essen-
ce aux 100 km. Une valeur que même les
petites citadines classiques ont du mal à
atteindre. Elle vaut en France à cette
grande japonaise aucun malus, une
exemption de la taxe sur les véhicules de
société (TVS) pendant douze trimestres,
et enfin la gratuité de la carte grise dans
environ la moitié des départements.
Efficace en ville
Ces avantages ont été obtenus grâce au
concours d’un puissant moteur électri-
que. Il aide le moteur « thermique »
conventionnel, qui demeure le groupe
principal, spécialement pendant les
phases de démarrage. Ce système hy-
bride, inventé pour la Prius il y a plus de
vingt ans, est très efficace en ville mais
assez peu sur route, où la consommation
redevient celle d’un véhicule tradition-
nel. Ce dispositif n’est pas un parangon
d’agrément. Chaque accélération ou re-
lance un peu vigoureuse se traduit par
un emballement du moteur et une péni-
d’ébriété, ne réagit pas aux signaux
d’avertissement. Cette intervention,
toujours selon Volvo, « pourrait
consister à limiter la vitesse de la voitu-
re, à alerter le service d’assistance Vol-
vo on Call et, en dernier recours, à faire
ralentir et stationner le véhicule en tou-
te sécurité. » Reste à savoir si la police
ou d’éventuels secours seront ensuite
prévenus.
Bibliothèque numérique
Les comportements jugés à risque, tels
l’absence totale d’intervention sur le
volant pendant des périodes prolon-
gées, le conducteur fermant les yeux ou
détournant son regard de la route pen-
dant trop longtemps, des changements
de voie intempestifs, ou encore un
L’habitacle de l’ES 300h est vaste et ses sièges sont un remède au mal de dos.
ble sensation de patinage. Le fameux
syndrome de « l’avion au décollage »
bien connu de tous les utilisateurs de
transmissions à convertisseur (CVT). Il
est mieux accepté par les conducteurs
américains, plus habitués à se déplacer à
vitesse constante sur leurs motorways.
L’amortissement semble être égale-
ment calibré pour eux. Assez souple, il
peut montrer des signes de pompage si on
force l’allure. La version F Sport, dotée
d’une suspension adaptative, évite cet in-
convénient. Sinon, l’ES 300h tient bien la
route et se montre confortable. Mention
spéciale aux sièges, véritables remèdes au
temps de réaction trop long, seront dé-
tectés par les caméras.
L’autre innovation dévoilée par Vol-
vo est une clé nommée Care Key. Elle
permet de limiter la vitesse maximale
avant un prêt du véhicule à des mem-
bres de la famille, à des amis ou bien à
des conducteurs plus jeunes et inexpé-
rimentés venant d’obtenir leur permis.
Cette clé devrait équiper tous ses mo-
dèles en 2021.
Grand Palais
www.artparis.com
Retrouvez le programme de Art Paris en kiosque
LE FIGARO mercredi 3 avril 2019
35
WWW.SEBASTIENMAUROY.COM
La Lexus ES 300h
affiche un style
nerveux et original,
non dénué d’élégance.
Sous le capot
Moteurs
Cylindrée 2 487 cm
Type 4 cylindres + moteur électrique
Puissance 178 ch (cumulée : 218 ch)
Couple 221 Nm
Transmission
Type Traction
Boîte À variation continue
Dimensions/poids
L/l/h 4 975 × 1 865 × 1 445 mm
Coffre 454 litres
Poids 1 740 kg
ROUFFIGNAC BERNARD
Performances
0-100 km/h 8,9 secondes
Vitesse 180 km/h
Consommation /émissions
Mixte UE 4,4 l/100 km
CO2 100 g/km
Prix À partir de 47 490 €
mal de dos, ainsi qu’à la version Executi-  NOTRE AVIS
ve, richement équipée, mais exigeant un
supplément de plus de 15 000 € par rap- Lexus espère vendre 500 unités de sa
port à la version de base. L’habitacle est nouvelle berline en 2019 sur le marché
vaste, tout spécialement à l’arrière, où il français, ce qui semble un objectif am-
offre un espace disponible presque iden- bitieux. Seules 36 LS 500h, il est vrai
tique à celui de sa grande sœur LS 500h. deux fois plus coûteuses, ont trouvé
Avec moins de références ostensibles à preneurs l’an dernier dans l’Hexagone.
certains aspects de la culture japonaise, Selon la firme, les ventes aux profes-
l’intérieur est moins déroutant que celui sionnels devraient assurer les trois
de cette dernière. Les gros boutons émer- quarts des volumes, avec une version
geant de la casquette surplombant l’ins- Business (47 990 €) destinée aux entre-
trumentation et un grand nombre de prises, retenue dans 45 % des cas. Peut-
commandes montrent que l’ES 300h est être roulerez-vous en Lexus ES 300h
d’abord conçue pour l’Amérique. ■ grâce à votre patron ? ■
Enfin, Volvo met à disposition ses Jakobsson, professeur et spécialiste
connaissances en matière de sécurité technique au centre de sécurité de
dans une bibliothèque numérique Volvo Cars Safety.
centrale. La firme « invite les entrepri- Mais cette armada sécuritaire ne dis-
ses de l’industrie automobile à consulter pensera pas Volvo de continuer à suivre
sans tarder ces données ». « Nous dis- une autre voie, qu’il connaît bien égale-
posons de données sur des dizaines de ment : fabriquer de très bonnes voitu-
milliers d’accidents réels. Elles nous res, puissantes, confortables, tenant
aident à assurer un niveau de sécurité bien la route et équipées d’installations
maximum sur nos voitures au regard de audio de qualité afin de ne pas s’endor-
la réalité de la route », explique Lotta mir au volant. ■ P. D.
présente
04
07 Avril
2019
Une scène française d’un autre genre
Étoiles du Sud :
une exploration de l’art de l’Amérique latine
dans l’édition nationale du mois de mars de
A
 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO
36 TÉLÉVISION
BIEN VU
Anthony Palou
apalou@lefigaro.fr
Voyage
en Ferry
« Le Tour de la question »
Europe 1 | 9 heures | Mardi
A
près tout, ce doit être plutôt
agréable de faire une petite
croisière méditerranéenne
en compagnie de Luc Ferry. Il nous
parlerait pendant une semaine
de la naissance des dieux,
des amours de Zeus, de Midas
et du fleuve Pactole, de Prométhée
et de la boîte de Pandore, de Jason
qui prend le taureau par les cornes,
de ce cher Dionysos, d’Œdipe
et de son complexe, d’Antigone,
de Sisyphe et Asclépios,
d’Orphée, Eurydice, Éros, Psyché,
des orgueilleux Tantale, Dédale,
Phaéton, Icare, et puis, bien sûr,
de la sagesse d’Ulysse… Que nous
dirait-il sur l’homme aux mille
ruses ? Lundi, invité de Wendy
Bouchard, le philosophe pédagogue
- qui faisait la promotion
d’une série de bandes dessinées
(Éditions Glénat) - nous éclaira.
Il nous raconta que L’Odyssée est
la matrice de toute la philosophie.
Les enfants, écoutez : Ulysse habite
dans une petite cité, Ithaque.
Il est marié à une femme
charmante, Pénélope. Il a un petit
garçon, Télémaque. Le roi Ulysse
va être obligé d’aller à la guerre,
l’atroce guerre de Troie. C’est
donc l’itinéraire métaphysique
d’un homme. Il revient chez lui
au bout de vingt ans d’exil. Passé
du chaos à l’harmonie, il est le sage.
« À la fin de L’Odyssée, nous
rappelle Ferry, il y a trois critères
de la vie bonne qui vont influencer
toute la philosophie : primo vaincre
les peurs (celle de la mort), secundo
se débarrasser de la nostalgie
(le passé) et de l’espérance (le futur),
ces deux non-êtres qui nous
empêchent d’habiter le présent,
tertio parvenir à s’ajuster,
à s’ajointer à l’ordre du monde.
Ainsi, le sage s’aperçoit enfin
qu’il est un fragment d’éternité. »
Voilà. Le commandant Ferry à la
barre, la croisière s’est divinement
bien passée. Les passagers, pauvres
mortels en quête de salut, BD sous
le bras, en ont eu pour leur argent.
Se diront qu’ils ont, un peu, appris
à vivre, à surnager. C’est bien.
LE BUZZ TV
Invité : Xavier de Moulins,
présentateur du « 19 h 45 » (M6),
interviewé par Nicolas Vollaire et
Damien Canivez aujourd’hui sur :
MOTS CROISÉS
PROBLÈME N° 5003
HORIZONTALEMENT
1. Distributeurs de liquide. - 2.
Mouille les pages. - 3. Lémurien
nocturne au faciès de gargouille
médiévale. - 4. A beaucoup de cel-
lules grises ou de moins en moins
de cellules rouges. Courant d’air
violent. - 5. Grecque qui s’est fait
doubler dans l’opérette. N’a pas le
droit à la parole. - 6. Début août.
Premier organisateur du Louvre.
- 7. Parti dans tous les sens. Se met
au bridge sur ses vieux jours. - 8.
Dans le Morbihan. Cycle initial. Mise
en pratique des acquis théoriques.
- 9. Cartes d’études prévisionnelles.
- 10. Il inspira Borodine. Pas plus
grand que le pouce de son père. - 11.
Laisse sans tâche mais pas sans
vice. - 12. Hors d’enceinte. Ses fruits
sont souvent difficiles à ouvrir.
SOLUTION DU PROBLÈME N° 5002
HORIZONTALEMENT 1. Reboiser. - 2. Écornure. - 3. Calendes. - 4. Ires.
Ost. - 5. PTT. Skia. - 6. Ré. Stups. - 7. Olive. Es. - 8. Centrale. - 9. IMA. Ipé.
- 10. Tépale. - 11. Entières. - 12. Stentors.
VERTICALEMENT 1. Réciprocités. - 2. Écartèlement. - 3. Bolet. Inapte.
- 4. Ores. SVT. Ain. - 5. Inn. Stérilet. - 6. Sudoku. Apéro. - 7. Érésipèle.
A
éR. - 8. Restasse. OSS.
Basquiat, la promenade fantôme
Visite privée de la rétrospective « Basquiat » à la Fondation Vuitton avec un sosie du peintre dans
ce documentaire résolument subjectif. La peinture y est vue de près, sans le public et son brouhaha.
VALÉRIE DUPONCHELLE £@VDuponchelle
V
oilà un documentaire ambi-
tieux et donc, forcément,
avec les belles audaces et les
encombrements de l’ambi-
tion. En 26 minutes, cette
« Visite privée Master » dans les coulis-
ses de l’exposition « Basquiat » qui s’est
tenue du 3 octobre 2018 au 21 janvier
2019 à la Fondation Louis Vuitton, à Pa-
ris, se veut ronde et pleine comme un
objet d’art. Pas d’interlocuteurs qui
vous expliquent doctement l’histoire de
l’art, pas d’autre être humain que Jean-
Michel Basquiat (1960-1988), partout à
l’œuvre. L’artiste fulgurant aux mille
tableaux et aux 2 000 dessins est là dans
toute sa puissance et sa rage. Il s’expri-
me librement dans sa danse folle du
trait en plus de 120 œuvres que la ca-
méra fixe tranquillement (très beau
travail des monteurs, Manon Falise et
Alexandre Attal). Il suffit
de regarder. Le jeu de si-
gnes, qui sont égrenés sur
les quatre niveaux de ce
bateau flottant signé Frank
○○○¡
Gehry, se déroule de nou-
veau sous vos yeux, dans sa limpidité
utopique car sans public. Par le miracle
d’un film, cette rétrospective salue la
cohérence unique de Basquiat, comme
vous ne l’avez jamais vue.
Trente ans après sa mort précoce
d’une overdose d’héroïne le 12 août
1988, Basquiat est le héros d’une nou-
velle histoire de l’art, comme la réécrit
actuellement l’exposition événement,
« Le Modèle noir » au Musée d’Orsay.
On a vu déjà nombre d’images d’archi-
ves, de fictions, de témoignages et de
documentaires sur ce fils sauvage de
New York d’ascendance haïtienne et
portoricaine. La belle idée est de lui re-
donner un corps le temps d’une pro-
DANIEL VOJTECH
Formula 1, pilotes de leur destin revient
notamment sur la rivalité au sein de
l’écurie Red Bull entre Daniel Ricciardo
(notre photo) et Max Verstappen.
1 2
VERTICALEMENT
1. Nouvelle manifestation. - 2.
Maladie affectant certains ron-
1 V984
geurs. - 3. Descendue. Elle est ce
qu’elle est et plutôt deux fois 2 A3
qu’une chez Gertrude Stein. - 4.
Le territoire du Tigre. Familier
d’Eltsine ou de Becker. - 5. A pris 3 6 5 4
l’eau à Waterloo. Sort sa langue
de vipère. - 6. Antidote au curare. 4 le Valet de .
Virage enneigé. - 7. Répété en
répétition. Toujours plus haut.
Réalise une prise. - 8. Marronnier 5
de saison (trois mots).
6 Entame : Valet de  pris de l’As (le 9 en Est).
7 que du gisement favorable de l’As de . Erreur ! Vous pouvez « travailler » les  et réussir
8 les deux honneurs à  (voire ARV secs).
9 mais doit vous livrer un pli en rejouant soit  (en coupe et
10
11
12
22.40
Grillo, 1984, de Jean-Michel Basquiat, exposé à la Fondation Louis Vuitton, à Paris.
menade fantôme. Celui de l’artiste du
tag, du graffiti et du geste, Cédric Lollia,
né aux Abymes en Guadeloupe en 1975.
Les mêmes tresses redressées en un
buisson graphique, la même allure ur-
baine qui évoque le New York d’avant-
garde et que le réalisateur Adrien Boyer
filme au mieux de la ressemblance.
C’est-à-dire de dos, les bras croisés
comme un guetteur sioux, la marche
souple, tous les atouts de la jeunesse
éternelle. Son beau profil vient s’impri-
mer sur les tableaux les plus célèbres de
Basquiat, lui apportant cette force bio-
graphique d’un artiste jailli de la rue. Et
sa contemporanéité à l’heure où l’on
célèbre les artistes noirs et/ou afro-
La F1 comme vous ne l’avez jamais vue
Une série documentaire passionnante sur les coulisses du championnat 2018.
ROMAIN DELACROIX rdelacroix@lefigaro.fr
Q
u’on soit fan de Formule 1
ou non, impossible de
passer à côté de cette très
belle surprise concoctée
par Netflix : Formula 1, pi-
lotes de leur destin. Cette
série documentaire en dix épisodes
d’une trentaine de minutes nous fait
revivre la saison 2018 du championnat
automobile remportée par Lewis Ha-
milton. Loin des longues courses, par-
fois ennuyeuses, nous suivons cette
compétition avec un tout autre œil.
Dans ses coulisses quasiment incon-
nues du grand public et avec des intri-
Par Vincent Labbé
3 4 5 6 7 8
ESTATE OF JEAN-MICHEL BASQUIAT. LICENSED BY ARTESTAR, NEW YORK. PHOTO : © FONDATION LOUIS VUITTON / MARC DOMAGE
américains, les peintres désormais stars rester naturel. On le sent souvent em-
Kehinde Wiley, Henry Taylor, Lynette barrassé par le lyrisme, très juste au de-
Yiadom-Boakye, Mickalene Thomas, meurant dans son analyse, de l’écrivain
Amy Sherald, les artistes de l’image et presque frustré de ne pas prendre di-
comme Lorna Simpson, les sculpteurs rectement la parole. Qu’importe, le
comme Ousmane Sow. film suit son cours. Cela donne des en-
chaînements délicats. Les marchands
Conteur symbolique d’art, ces « affreux capitalistes », y sont
Le texte du narrateur, ciselé par l’écri- vilipendés comme les marchands du
vain Pierre Ducrozet, est fougueux, vif, temple. L’architecture cathédrale de
brillant. Trop peut-être dans sa fureur Frank Gehry nous rappelle juste après
littéraire pour Disiz, le rappeur dit Disiz où nous sommes et que le mécénat peut
la Peste, né Sérigne M’Baye Gueye en faire de grandes choses. D’une manière
1978 à Amiens, dans la Somme. Il a été générale, ce documentaire tire profit
choisi comme le conteur symbolique de des lieux. Comme cette image finale au
l’épopée Basquiat. Beaucoup de bonnes pied de la cascade de Gehry, qui évoque
intentions mais un tempo qui peine à les derniers rivages de la mort. ■
gues insoupçonnables de prime abord. Du côté de Haas, on se bat pour obtenir
Les caméras ont accès aux stands et, la quatrième place. Chez Red Bull Ra-
via des interviews, aux acteurs clés de cing, on décide de s’affranchir de la
ce sport si particulier : directeurs motorisation de Renault pour s’équiper
d’écurie, pilotes, proches… chez Honda.
Dans le même temps, le construc-
Bataille sans merci teur français recrute l’un des pilotes de
Les caméras embarquées, les échanges Red Bull pour la saison 2019… Les jeu-
radios, l’ambiance dans les stands, les nes espoirs de la F1 sont les stars de ce
accidents parfois spectaculaires, rien film. À l’image de Max Verstappen et
ne nous échappe dans cette série ad- Daniel Ricciardo, qui se livrent une ba-
dictive et passionnante, à regarder sur taille sans merci, parfois au détriment
un écran le plus grand possible. En de leur écurie (Red Bull). Le Monégas-
Formule 1, les enjeux sont que Charles Leclerc, alors chez
énormes, et le documentaire Sauber, brille aussi. Passé cette
prend le parti de suivre les écu- année chez Ferrari, il a
ries situées dans le milieu du d’ailleurs signé sa première pole
classement des constructeurs. ○○○○
Mercredi 3 avril
position dimanche dernier... ■
BRIDGE Par Philippe Cronier www.lebridgeur.com
PROBLÈME DE DÉFENSE N° 3058 : Tout n’est pas fini
R65 Contrat : Sud joue 4 Piques.
La séquence (Tous vuln.) :
AR7 Sud Ouest Nord Est
R73
1 passe
N
 R D 10 2 1 passe 1SA passe
O E
S 4 passe
A652 Entame : Roi de  pour l’As de Sud (le 5 en Est) qui rejoue
SOLUTION DU PROBLÈME N° 3057 : Une autre (petite) chance
Contrat : Sud joue 4 Cœurs (3-4).
Vous contemplez neuf levées, toutes en majeures. La dixième ne semble pouvoir provenir
votre contrat malgré le Roi de  mal placé à condition qu’Ouest possède le Valet de  et Est
Purgez les atouts (ici en un tour), coupez un  (premier geste clé) AR3
et jouez  pour le 10 (deuxième geste clé). Est prend du Roi DV86
 D 10 6 5
défausse), soit  (libérant la Dame), soit  (affranchissant  V 10 8 4  R 3 D976
le Roi). N
4
Bien entendu, si Est, après avoir pris la main à , peut la  V 9 8 2 O E
 10
AR7
S
redonner à son vis-à-vis dans cette couleur, ce dernier  D 10 9 2 AV864
contre-attaquera à  et il vous restera la chance intacte de 52
AR97532
l’As de  bien placé.
43
75
 LE FIGARO mercredi 3 avril 2019

TÉLÉVISION MÉTÉO PAR 37

ÉPHÉMÉRIDE St-Richard
Soleil : Lever 07h23 - Coucher 20h24 - Dernier croissant de Lune

19.20 Demain nous appartient. 18.40 N’oubliez pas les paroles ! Jeu 19.00 19/20 20.00 Vu. Magazine 18.50 Beauty Match : le choc des
Feuilleton 20.00 Le 20h 20.35 Le 20.00 20 heures 20.40 Un si grand 20.20 Plus belle la vie 20.45 Tout le influenceuses. Jeu 20.55 LolyWood MATIN
20h le mag 20.50 C’est Canteloup soleil. Feuilleton. sport 20.50 Ma maison de A à Z
21.00 Camping Paradis 3
21.00 21.00 21.00 Série. Comédie. Fra. 2006. Saison 1. 40
Série. Comédie dramatique Film TV. Drame Magazine. Reportage Avec Laurent Ournac. Lorsque l’en- 2
fant paraît. Tom découvre un bébé 3 3 6
installé dans son relax accompagné 2 5
d’un petit mot : «Merci». 6 9
4
2 4 4
5
22.45 Camping Paradis. Série 0.30 4
Confessions intimes. Magazine. 3 5 5
4

60 4 8
19.00 C à vous 20.00 C à vous, la 4
9
suite. Magazine 20.20 Entrée libre 6 5
Grey’s Anatomy La disparition Des racines et des ailes 11 12
EU. Saison 15. Avec Ellen Pompeo, Fra. 2012. Réal. : Jean-Xavier de Les- Prés. : Carole Gaessler. 2h05. Pas- 20.50 La grande librairie 10
Debbie Allen, Greg Germann, Justin trade. 1h30. Avec Thierry Godard, sion patrimoine : du Poitou aux îles Magazine. Littéraire. Présentation. : 9 7
Chambers. 2 épisodes. Inédits. Ca- Michaël Abiteboul. Betty disparaît des Charentes. Inédit. Direction la F. Busnel. 1h30. Inédit. Invités : Jean- 12 11
therine débarque à Los Angeles pour sans explication, laissant deux en- Nouvelle-Aquitaine, à la rencontre Christophe Rufin, Guillaume Musso.
10 20
sa nouvelle fondation et en profite fants derrière elle. Son amant est notamment de Mathias Chebrou, Chaque semaine, suivez l’actualité
pour appeler Meredith et Koracick. persuadé qu’elle a été tuée. un éleveur de chèvres. littéraire sous toutes ses formes. 11
APRÈS-MIDI
22.50 Chicago Med Série. 100 % 22.45 Ça ne sortira pas d’ici ! Mag. 23.10 Soir/3 23.45 Philippe 22.25 C dans l’air. Mag. 23.30 C à
bio. Inédit - Automédication. Inédit Inédit. Invitée, notamment : Alexan- Séguin, la politique au corps Doc. vous 0.35 C à vous, la suite. Mag. 9
0.30 Night Shift. Série. 2 épisodes. dra Lamy 1.55 Le jour du Seigneur Inédit 0.35 Vive la politique ! 30
8
8 8 9
7 10
19.05 Les Anges 11. Téléréalité 8 9
20.00 The Big Bang Theory. Série. 8
8 8 9
19.55 L’info du vrai, le mag (C) 20.50 19.00 Les secrets des fleurs sau- 18.40 Chasseurs d’appart’. Jeu 19.45 6
9
Le JT pressé (C) 20.55 Catherine et vages 19.45 Arte journal 20.05 Le 19.45 20.25 Scènes de ménages. 21.00 Unforgettable
9 9 8
Liliane (C). Divertissement. 28 minutes 20.50 Athleticus. Série. Série. Avec Amélie Étasse. Série. Policière. EU. 2011. Saison 1.
8
Avec Poppy Montgomery. 2 épi-
21.00 20.55 21.00 sodes. Carrie Wells découvre qu’une
Film. Comédie Film. Policier Jeu voisine de son immeuble a été as- 9 10
sassinée. Il n’y a pas de témoin. 40 10 12
9 11
22.50 Unforgettable. Série 0.45 Ma-
nipulation : désir dangereux. Film TV. 11 13
11
9 10
14 14
11 50
19.00 Off-Road Garage. Série docu-
16
mentaire.

20.50 Le Sacré-Cœur : T (en °c)

Game Night Le lieu du crime Top Chef mégastructure historique <-10 à 0 0 à 10 10 à 20 20 à 30 30 à >40
EU. 2018. Réal. : John Francis Daley, Fra. 1985. Réal. : André Téchiné. 1h25. Prés. : S. Rotenberg. 2h25. Inédit. Doc. Historique. 2018. Réal. : Fa-
Jonathan Goldstein. 1h40. Inédit. Avec Catherine Deneuve, Wadeck Si cette semaine marque le grand brice Buysschaert. 1h05. Inédit.
Avec Rachel McAdams, Jason Bate- Stanczak, Danielle Darrieux, Nico- retour de l’épreuve des restos, les Le Sacré-Cœur est le deuxième
man, Kyle Chandler. Pour pimenter las Girardi. La cavale de deux fugi- nouveautés sont au rendez-vous : monument parisien le plus visité. ALGER 15/24 AMSTERDAM 5/9 ATHÈNES 10/16
leur vie de couple, Max et Annie ani- tifs bouleverse la vie d’une famille, ce sont des professionnels qui éva- BARCELONE 12/13 BELGRADE 8/16 BERLIN 9/16
ment un jeu, une nuit par semaine. jusqu’à la faire imploser. lueront les candidats. 21.55 Secrets de cathédrales 23.40
BERNE 3/9 BRUXELLES 4/10 BUDAPEST 7/17
Paris, les grands travaux de Napoléon
22.40 Basquiat visite privée. Doc. 22.25 André Téchiné, cinéaste 23.25 Top Chef : cuisinez comme COPENHAGUE 7/10 DUBLIN 3/7 LISBONNE 9/19
23.10 Patrick Melrose Série. 2 épi- insoumis Documentaire. Inédit un grand chef Magazine 0.10 Food LONDRES 2/9 MADRID 10/16 PRAGUE 6/17
sodes 1.05 Madame. Film. 23.20 Bleeder. Film. Thriller. Porn : les meilleurs buzz culinaires ! RABAT 11/21 ROME 13/16 TUNIS 13/20
19.05 Elementary. Série. Diaboli-
quement vôtre - L’évadée belle. JEUDI VENDREDI SAMEDI

21.00 Hawaii 5-0 0/10 5/15

3/13
19.25 Quotidien, première partie. 18.50 Les Marseillais : Asian Tour. 19.35 TPMP : première partie 20.35 Série. Policière. EU. 2012. Saison 3.
Talk-show 20.10 Quotidien Téléréalité. Touche pas à mon poste ! Avec Alex O’Loughlin, Scott Caan. 1/9 2/8 5/11 1/12 5/12 3/15
2 épisodes. Lors d’un camp scout, un
21.00 Burger Quiz 21.00 Enquêtes criminelles : 21.00 Enquête homme armé prend en otage Steve 0/10 3/14 6/13
Jeu. Prés. : Vincent Dedienne. 0h45. le magazine des faits divers sous haute tension McGarrett et une petite fille.
Inédit. Invités notamment : Helena Magazine. Société. Prés. : Nathalie Magazine. Société. Prés. : Carole 3/12 4/14 7/14 7/15 6/12 9/13
Noguerra, Josiane Balasko, Thierry Renoux. 2h10. Inédit. Au sommaire, Rousseau. 2h00. Braquages, homi- 22.45 Hawaii 5-0. Série. I Ka Wa
Lhermitte. Le jeu est présenté par notamment : «Affaire Sophie cides, accidents : les gendarmes de Mamua - Ohuna - Wahine’inoloa.
différentes personnalités. Le Tan : prise au piège ?». Guyane en action. Inédit.
Tous les programmes lachainemeteo.com
22.35 Burger Quiz. Jeu 23.30 52 mi- 23.10 Enquêtes criminelles : le ma- 23.00 Enquête sous haute tension dans TV Magazine Par téléphone : LIVE 24/24 Sur L’APPLI
nutes de mode by Loïc Prigent gazine des faits divers. Magazine. 23.50 Langue de bois s’abstenir et sur l’appli TV Mag GRATUITE
2,99 €/appel La Chaîne Météo

SU DO KU MOTS FLÉCHÉS N°2245 FORCE 2 NOUVEAU

Chaque jour un peu plus difficile DRÔLE IL MONTRE VAGUE MUSE À PATRAQUE
ARRIVÉES IL FAIT BASSESSES
DE MISE LA ROUTE HUMAINE TOURNER LA FLÛTE
SUR MANCHE
GRILLE 2862 MOYEN ÉTAT SUBTER- LE TRÔNE DEVISE LES TRAIN PAYS SUR
DES USA FUGES NORDIQUE TABLES DE CHEVAL INSULAIRE COURT
6 3 2 8 SENSUELLE
PRÉSENTE

5 3 9 4 6 FAIT
BRILLER Le grand quiz
7 9 4 DESSINERA ENCOURA-
GER de la culture
À FUMER...
1 3 9 2
LIEU D’EX-
POSITION PASCAL générale
ÉTAT IM-
8 6 2 7 1 PECCABLE
EN CE LIEU
9 1 5 8 ALTIÈRE IL SE SYMBOLE
LÈVE TÔT
2 5 9 SIGLE
QUI FUT MÉGA-
CHIMIQUE
DE
L’ARGON
COLONIAL OCTET
7 5 1 9 3 HÉROÏNE
DE A PROUVÉ S’EXPRIME IL METTAIT
SA BONNE SANS AU
9 7 8 1 FLAUBERT
RENVOI
HUMEUR UN MOT SUPPLICE

STATION RÉTRIBUÉ
HS DIRECTIONS
PARTIE OPPOSÉES PETITE
SAINTE
2 5 3 4 9 8 6 7 1 CACHÉE
IL PERMET DE MÊME SOLUTION DU NUMÉRO PRÉCÉDENT
9 6 4 1 7 5 8 3 2 DE TOUT
LETTRES
SOLUTION DU N° 2861

7,90
1 7 8 6 3 2 4 9 5 IMAGINER H E Z O A E R A
POUR
PRO L’ÉTOURDI C OM P T O I R L I V R E E S
6 8 9 2 4 3 1 5 7 R A I S O N N A B L E M E N T En vente
SANS TEST
5 4 2 9 1 7 3 6 8 BAVURE ELLE EST T O N E S T E R E L C L U actuellement
POUR AU-DESSUS
3 1 7 5 8 6 9 2 4 UN UN PSY- D O R T A S T R E S L A C
DIPLÔME CHIATRE DES TPE
G A I S A C E T E M E R I disponible chez tous
7 3 6 8 2 4 5 1 9 T R I E T A R C R A M P E les marchands de journaux
4 2 1 3 5 9 7 8 6 M E S A D E R I S O I R E U et sur www.figarostore.fr
A

POINT
CHARNUES U G O A M E B E R N A S
8 9 5 7 6 1 2 4 3
T R I O M I E L S L E T T E

FIGARO_sem-14.indd 3 22/02/2019 10:01

 mercredi 3 avril 2019 LE FIGARO

38

Nicole Dassault,
une grande dame
HOMMAGE L’épouse de l’industriel et homme politique
Serge Dassault s’est éteinte à l’âge de 88 ans.

que, la culture, l’art, la politique, les enfants, les amis,
Carole Bellemare « les autres ». Elle savait fédérer.
£@BellemareCarole Épouse accomplie, mère attentive, elle a tout au
long de l’épopée industrielle accompagné sans
relâche son bâtisseur de mari dans le déploiement
CP
petits-fils et petites-filles ainsi que les cinq arrière- deuxième en France, installé à la Pitié-Salpêtrière.
petits-enfants qui lui furent donnés par la suite la Aujourd’hui, sa belle-fille Natacha, avec sa galerie
combleront de bonheur. Elle aimait les réunir pour d’art, et son époux Olivier Dassault ont pris en quel-
les vacances dans la résidence familiale de Port- que sorte son relais dans le soutien de cette cause.
La-Galère ou souvent, à Noël, à l’île Maurice, Très active dans l’Association Robert-Debré en

A
vec elle, c’est une grande dame
qui s’en va. Dix mois après le
décès de Serge Dassault, prési-
dent du Groupe Industriel Mar-
cel Dassault et du Figaro, Nicole
Dassault, son épouse, s’est
éteinte à son domicile parisien
du boulevard Suchet. Elle avait
88 ans. Vive, intelligente, s’intéressant à tout, cette
femme rayonnante pétillait d’un esprit brillant,
dont on avait du mal à admettre et à comprendre
ces dernières années l’inexorable déclin. Même
dans les heures sombres, la vie parfois fait bien les
choses… Déjà dans son monde à elle, elle n’aura pas
vraiment réalisé que son mari était parti, et lui ne
l’aura pas vu véritablement partir non plus. Ces in-
séparables sont désormais réunis pour l’éternité.
En décembre 2015, ce fut l’une de ses dernières ap-
paritions en public : souriante et visiblement heureu-
se, devant une assemblée de personnalités, Nicole
Dassault, toute de turquoise vêtue, était montée sur
scène au côté de son mari à l’occasion du 15e anni-
versaire de la Fondation SOS Jeunes Talents qu’elle a
longtemps soutenue. Elle aimait écouter ces enfants
prodiges et voir leurs petites mains s’envoler sur le
clavier du grand piano qu’elle faisait installer chaque
Noël à l’Hôtel Dassault, à quelques mètres d’un ma-
jestueux sapin. « La musique donne une âme à nos
cœurs et des ailes à la pensée », disait-elle après Pla-
ton. Cette sportive qui s’intéressait à tout épluchait la
presse, apprenait un poème par jour, aimait la musi-
de l’empire, dont, très fatiguée déjà en 2016, elle à l’hôtel… Paradis. Elle prenait des nouvelles de tous, faveur des enfants hospitalisés, dans l’association
n’avait pu être à la célébration du centième s’émerveillait des réussites des uns et des autres. d’entraide aux aviateurs blessés, Les Ailes brisées,
anniversaire. C’est d’ailleurs entourés de leur tribu que Nicole et où elle avait multiplié les levées de fonds, elle était
Nicole Raffel avait rencontré Serge Dassault, alors Serge Dassault avaient célébré en juillet 2010 leurs aussi mécène de l’École des pupilles de l’air-Mont-
élève ingénieur à Supaéro, lors d’une fête organisée noces de diamant. bonnot ainsi que de la Société nationale de sauveta-
à Sciences Po, où cette fille de marchand de biens Le groupe familial, Nicole Dassault en suivait aussi ge en mer. Pour remercier les Dassault, l’associa-
alsacien était étudiante boursière, pupille de la na- avec intérêt les développements. Elle fut notamment tion de Théoule-sur-Mer avait d’ailleurs baptisé sa
tion. Coup de foudre immédiat. Le 3 avril 1950, les directrice générale déléguée de Rond-Point Immo- nouvelle vedette Nicole Dassault.
jeunes gens se fiancent et le mariage est fixé trois bilier SAS, vice-présidente et membre du conseil de Vaincre le cancer-NRB, la Fondation Recherche
mois plus tard par Marcel Dassault à surveillance d’Immobilière Dassault, cardio-vasculaire ou encore l’Institut Pasteur : les
la mairie du XVIe arrondissement. En ainsi que du Groupe Industriel Marcel implications de l’épouse du grand industriel et
épousant cette blonde enjouée, de
six ans sa cadette et aux centres d’in-
térêt très différents des siens, Serge
Bio
EXPRESS
Dassault. Elle siégea aussi aux conseils
de Dassault Aviation, d’Artcurial, de
Dassault Media, du Groupe Figaro, de
homme politique furent innombrables. Hyperac-
tive, curieuse de tout, capable de réciter des poè-
mes entiers, Nicole Dassault a longtemps été une
Dassault se félicitait d’avoir fait « un Dassault Systèmes, mais aussi de la figure emblématique de la société parisienne.
vrai et grand mariage d’amour ». 23 février 1931 Fondation Serge Dassault. Toujours très élégante, mais économe et « détes-
De cette union heureuse naîtront Naissance rue Boileau, tant dépenser beaucoup d’argent pour ses vête-
trois fils : Olivier, député de l’Oise et à Paris XVIe Faire le bien ments », portant le plus souvent des tenues de
président du Comité de stratégie du 1950 Car, au-delà de ses nombreux enga- couleurs, cette lady blonde aux yeux clairs était
groupe Dassault ; Laurent, directeur Épouse Serge Dassault gements dans le monde des affaires et solidaire de tous les engagements aux côtés de son
général délégué qui préside notam- à la mairie du XVI e du mécénat culturel – les sociétés des mari. Un couple inséparable qui fut, durant de
ment les activités viticoles du groupe, 1951 Amis de Versailles, Pompidou, Car- nombreuses années, un modèle aux yeux du
dont Château Dassault ; et Thierry, Naissance de son navalet, Orsay, Opéra de Paris… –, Tout-Paris.
directeur général délégué, passionné premier enfant, Olivier, cette intuitive, qui aurait rêvé d’être Cette attention au monde culturel, médical, so-
de multimédia. Et puis Marie-Hélè- qui sera suivi de Laurent, une artiste, aimait faire le bien. Elle cial et humanitaire lui valut plusieurs décorations
ne, cette fille bénie du ciel qu’elle se Thierry et Marie-Hélène soutenait notamment, avec Catheri- bien méritées : officier de l’Ordre national du méri-
félicitait d’avoir « offert à Serge » le 2011 ne et Thierry Dassault, la Fondation te en 2012, officier de l’Ordre des arts et des lettres
jour de ses 40 ans. Celle-ci, qui a pris Grand Mécène et Grand pour la recherche de la maladie en 2007, Grand Mécène et Grand Donateur de la
le relais de son frère Olivier à la prési- Donateur de la Culture d’Alzheimer en organisant des soi- culture avec Serge Dassault en 2011, et enfin cheva-
dence du conseil de surveillance de avec Serge Dassault rées caritatives à l’Hôtel du Rond- lier de la Légion d’honneur en 2015.
GIMD, a épousé Benoît Habert, direc- 2015 Point. Dans ce cadre en 2013, le La rédaction et les collaborateurs du Figaro s’as-
teur général délégué, très investi dans Chevalier de la Légion Groupe Dassault avait financé en par- socient à la peine de sa famille et lui présentent
les nouvelles technologies. Les treize d’honneur tie l’acquisition d’un PET-IRM, le leurs sincères condoléances. ■

UN DERNIER MOT Par Étienne de Montety

edemontety@lefigaro.fr

Bloc [blok] n. m.
Cartel qui dérègle le mécanisme d’horlogerie
de l’Union européenne.

D
epuis plusieurs mois, les députés britanniques rejettent en bloc
toutes les propositions faites par la première ministre Theresa May
pour organiser le Brexit.
Le mot vient du néerlandais bloc qui signifie stricto sensu tronc abattu,
puis morceau de bois et ensuite désigne une masse.
Vote après vote, les parlementaires non seulement rejettent en bloc mais semblent
à bloc : on pourra d’ailleurs les trouver gonflés de dire non aux différents projets
de Brexit.
À Westminster, on ne parle plus d’un bloc des gauches ou d’un bloc de droite mais d’un
front qui fait tout simplement un blocage : un bloc non opératoire, en quelque sorte.
Ils bloquent le déclenchement du Brexit, protestent les uns.
Ils débloquent tout simplement, disent les autres en chœur.
Quoi qu’il en soit, deux cents ans après Napoléon, une chose est sûre : ce blocus
n’est plus continental : il est on ne peut plus insulaire. ■
W. SIMITCH/CAPA PICTURES POUR PUBLIC SÉNAT

FIGARO-CI ... FIGARO-LÀ

Un grand oral sur l’Europe sociale
retransmis par Public Sénat
Comment voient-ils l’Europe sociale ? Nathalie Loiseau,
François-Xavier Bellamy, Jordan Bardella, Manon Aubry,
Yannick Jadot et d’autres têtes de liste aux élections
européennes se croiseront le 11 avril, à la Maison de la Radio,
à Paris, pour un grand oral. Ils plancheront chacun 15 minutes
sur leur programme en matière de santé et de protection
sociale. Une initiative de la Mutualité française, qui publiera
à l’occasion un sondage Harris Interactive réalisé dans sept pays européens.

ECOUTEZ RFM ET PARTEZ EN WEEK-END L’événement, qui associe aussi Courrier international, sera diffusé en direct
sur Public Sénat, animé par Rebecca Fitoussi (photo).

POUR APPLAUDIR La garde républicaine

reçoit le grand prix
Michel Onfray
disserte sur le goût
des lumières de Paris

ED SHEERAN
* Le philosophe interviendra,
Le général de division Damien Striebig, le 15 avril, à 18 h 30, au Théâtre
commandant de la garde républicaine, des Mathurins à Paris,
*RÈGLEMENT ET CONDITIONS DE PARTICIPATION SUR RFM.FR

a reçu, mardi, le premier grand prix pour une conférence intitulée

des lumières de Paris, décerné dans les
salons de l’Automobile Club par l’Institut
international pour le rayonnement de Paris,
fondé par la sénatrice Catherine Dumas et le
maire du Ier arrondissement, Jean-François
Legaret. Les autres lauréats sont l’artiste
du papier Marianne Guely (jeune talent),
LE MEILLEUR DE LA MUSIQUE le réalisateur du film d’animation Dilili
à Paris Michel Ocelot (création) et Alain
Terrail, propriétaire du grand restaurant
A
« Une philosophie du goût ».
Par ailleurs, Michel Onfray
va faire son entrée, ce mois-ci,
dans la prestigieuse collection
« Bouquins ». Il est notamment
l’auteur du Ventre des
philosophes : Critique de la raison
diététique, chez Grasset (1989),
et de La Raison gourmande :
Philosophie du goût, chez
le même éditeur (1995).

La Tour d’Argent (patrimoine).