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Le mariage au XVIe siècle

Suite à l'affichage, en octobre 1517, des 95 thèses condamnant les dérives de l’Eglise
Catholique et plus particulièrement la vente des Indulgences1, par Luther, réformateur
religieux allemand, l’Eglise va réagir en l’excommuniant en 1520.

Martin Luther est un ancien moine marié à une ancienne nonne. Il traduit la Bible en
allemand afin que tout le monde puisse y avoir accès pour pouvoir interpréter lui-même
les textes bibliques, contrairement à avant où les prêtres donnaient leur propre
interprétation de la Bible alors en latin. Par ses réformes protestantes, Luther va
notamment abolir la prêtrise et supprime ainsi le sentiment d’ordination, ce qui donne la
possibilité aux prêtres de se marier. Il va aussi abolir le système de vie dans les couvents.

Des humanistes notamment, comme Erasme, vont alors tenter de réformer l’Eglise en
crise à cette époque : en effet, le haut clergé est composé de grands seigneurs vivant dans
le luxe et la bas clergé n’a que peu d’instruction. Par la suite, il va y avoir un sursaut
catholique : de 1545 à 1562, l’Eglise catholique organise la Contre-Réforme, ou
Réforme Catholique, afin de permettre une remise en ordre dans la vie ecclésiastique.

Le 13 décembre 1545 marque donc l’ouverture d’un nouveau concile : le Concile de


Trente, dans les Alpes. Il reste encore aujourd’hui l’un des conciles les plus importants
de l’histoire du catholicisme. Contre les thèses protestantes, il définit l'autorité de la
Bible, le péché originel et la justification et confirme les sept sacrements, le culte des
saints et des reliques ainsi que le dogme de la transsubstantiation. Il va aussi instaurer
différents canons sur le sacrement du mariage.

En 1563, le Concile de Trente publie une doctrine sur le sacrement du mariage2, dans
lequel il affirme l’importance de l’union, notamment par la notion d’indissolubilité : le
mariage est la constitution d’une unité qui sera à tout jamais inséparable3. C’est aussi la
première fois qu’apparaît le mot « sacrement », qui se définit comme un rite institué pour
sanctifier celui qui le reçoit et est accompagné d‘un signe matériel, comme l‘eau et huile
pour le baptême. Par différents droits canoniques4, il a donc comme but principal de
contrer tous les mouvements protestants et donc les hérésies et les « hommes impies »,
qui ont selon eux des opinions fausses sur ce sacrement.

Les canons5 catholiques sont pour la plupart différents de ceux protestants. Tout d’abord,
les catholiques considèrent sept sacrements, alors que les protestants n’en reconnaissent
que deux6 ; le mariage n’est donc pour ceux-ci pas un sacrement à proprement parler, car
il a été inventé l’Eglise et qu’il ne confère pas la grâce, c’est-à-dire le don surnaturel que
Dieu accorde en vue du salut.

1 En effet, l’Eglise qui entreprend la construction de monuments importants a besoin d’argent : elle va donc vendre des
Indulgences, càd des remises totales ou partielles des peines temporelles dues pour les péchés déjà pardonnés.
2 DUVAL, LAURET, ss la dir. de, Les conciles œcuméniques, t. II-2, Les décrets. Trente à Vatican, Paris, 1994, pp. 1531-1535.
3 Cf. enseignement du Christ : C’est pourquoi ils ne sont pas deux, mais une seule chair, confirmant les paroles d’Adam : Ce que
Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas (Mt 19, 6 ; Mc 10, 8-9).
4 droits de l’Eglise, donc opposés au droit civil
5 Loi ecclésiastique au point de vue de la foi et de la discipline
6 le baptême et l’eucharistie. Ils ne reconnaissent donc pas la confirmation, l’extrême-onction (ou sacrement des malades), le
mariage, l’ordination et la pénitence (ou confession).

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Sur le point de vue de la monogamie, les deux partis sont sur la même longueur d’onde :
tous deux interdisent la polygamie.

Mais alors que chez les catholiques de cette époque, l’Eglise peut se permettre de décider
d’empêchements supplémentaires interdisant le mariage et même d’octroyer des
dispenses à ces empêchements, chez les protestants il n’en est pas question : seuls les
degrés de consanguinité établis par le Lévitique7 peuvent empêcher le mariage.

L’Eglise catholique privilégie la notion d’indissolubilité en interdisant la rupture d’un


mariage pour cause d’hérésie, de vie commune insupportable, de l’absence voulue d’un
conjoint, et d’adultère8, alors que pour ces mêmes causes la rupture est possible dans
l’autre camp. Des époux peuvent donc vivre séparément sans aucune crainte selon les
canons catholiques.

Cependant, le mariage peut être annulé, sinon « consommé », notamment par l’entrée
dans les ordres, toujours selon le Concile de Trente.

De plus, ce dernier accorde une importance considérable à la fidélité de l’engagement : le


fait d’avoir fait le vœu de chasteté prévaut au sentiment ressenti lors de ce vœu. Il fait
donc preuve d’un idéalisme extrême, alors que dans le camp adverse le réalisme prévaut.
Chez les catholiques, la virginité fait référence aux religieux et le célibat consacré aux
prêtres, et cet état ne peut en aucun cas être considéré comme inférieur ou moins heureux
que le mariage : en effet, les religieux étant plus proches de Dieu, cet état est même
mieux perçu9. Chez les protestants, étant donné que l’état de vie est unique, accès au
mariage est permis pour tous.

Ceux-là interdisaient aussi la célébration de noces pendant certaines périodes de l’année -


le Carême entre autre - alors que ces derniers autorisaient un mariage à tout moment
l’année.

Finalement, le mariage est une affaire religieuse selon les catholiques et une affaire
d’homme, donc une matière civile, selon les protestants.

Afin de pouvoir réaliser un « bon mariage », il fallait donc respecter à la lettre ces
dogmes catholiques, sans quoi on devenait « anathème », c’est-à-dire exclu de la
communauté de l’Eglise par une excommunication majeure, seule arme réelle de l’Eglise
à cette époque.

Cependant, ces canons n’étant pas facilement compréhensibles pour une large couche de
la population, François de Sales privilégie la face littéraire10 de ces canons à l’expression
juridique : il va ainsi faire passer cette doctrine par des images aisément accessibles par
le peuple.

7 C’est-à-dire mariage impossible avec père, mère, belle-mère, sœur, demi-sœur, petits-enfants, tante, oncle, belle-fille, belle-sœur,
mère et fille, mère et petits-enfants et deux sœurs en même temps.
8 Hors, comme vu plus haut, l’Eglise a la possibilité d’annuler les mariages pour ces causes : il y a donc ici une contradiction.
9 Nouvelle contradiction : le mariage étant considéré comme un sacrement, il peut difficilement être considéré comme inférieur au
célibat des religieux qui n’en est même pas un.
10 François de Sales, Introduction à la vie dévote, Dovey, 1619 (Édition HENRION, F., Paris, 1930)

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Selon lui, un mariage placé sous la bénédiction de Dieu implique que les époux doivent
faire preuve d’un amour réciproque par l’union indissoluble des cœurs, la fidélité
inviolable de l’un envers l’autre (signe : l’échange des anneaux lors de la cérémonie de
mariage ) et la production et l’alimentation des enfants. Il faut aussi faire preuve d’une
grande vigilance, afin d’éviter que jalousie surgisse subitement.

Il utilise donc beaucoup d’images : par exemple, il fait passer la notion d’indissolubilité
par l’image de deux pièces de sapins collées ensemble : l’union sera si intense que si on
séparait les deux pièces, on fendrait beaucoup plus des autres endroits que celui de leur
conjonction. Il faut donc éviter de séparer les corps des époux, simplement attendre que
l’âme de l’un d’eux s’en aille.

Il compare aussi l’acte sexuel à la façon de manger : il faut manger simplement, c’est-à-
dire que le but principal des noces est d’assurer une descendance. Il faut aussi manger
librement, et non par force et par excès, il en va de même pour l’acte ; la façon de manger
est elle aussi importante, l’analogie reste la même sur le rapport sexuel.

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